Methodologie d'évaluation : macro-évaluation et analyse fonctionnelle - Partie A : concepts et théorie - Bibliothèque et Archives Canada
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Méthodologie d'évaluation :
macro-évaluation et analyse fonctionnelle

Partie A : concepts et théorie



Rédigé par Terry Cook, été 2000. Revu et corrigé par Richard Brown et Judith Roberts-Moore avec l'aide des membres du Comité d'examen du Programme de disposition des documents gouvernementaux : Angèle Alain, Catherine Bailey, Brian Beaven, Gabrielle Blais, Normand Fortier, Yvette Hackett, Andrew Horrall, Candace Loewen, Paul Marsden, Jean-Stéphen Piché, Sheila Powell et Paul Sabourin, été 2001

Approuvé par l'Archiviste nationale du Canada
le 17 octobre 2001

Introduction

De façon générale, ce document vise à fournir aux archivistes le fondement et la méthodologie nécessaires à l'évaluation des documents, en réaction aux demandes d'autorisation multimédias détaillées reçues par les Archives nationales en vertu du Plan pluriannuel pour disposer de documents (PPDD) et de l'approche proposée pour disposer des documents gouvernementaux. L'objectif principal est d'accroître la cohérence intellectuelle des décisions en matière de disposition des documents et la logique de son explication et de sa présentation dans les Rapports d'évaluation (RÉ).

Le point de mire de toute macro-évaluation doit être global. Par globalité, on entend un domaine fonctionnel ou une zone de programme considéré dans son ensemble (habituellement une direction ou un secteur) qui devrait comprendre tous les paliers de l'administration centrale, des services régionaux et des bureaux locaux, de même que l'ensemble de leurs séries, systèmes et collections de documents et de dossiers, sous quelque forme que ce soit. D'un point de vue idéal, pour les institutions de petite et de moyenne taille, une macro-évaluation globale doit inclure une considération de tous les documents de l'institution dans une même demande et, par conséquent, une même évaluation.

La Méthodologie d'évaluation : macro-évaluation et analyse fonctionnelle traite exclusivement de l'essence même de l'évaluation. C'est donc dire que le document ne s'attarde pas à expliquer les procédés opérationnels ou organisationnels connexes. La Méthodologie d'évaluation se présente en deux parties. La première (Partie A : concepts et théorie) traite de l'infrastructure intellectuelle qui appuie la stratégie des Archives nationales du Canada en matière de macro-évaluation des documents gouvernementaux. La seconde (Partie B : lignes directrices en matière d'évaluation archivistique des documents gouvernementaux) fournit aux archivistes les différentes méthodologies à suivre pour amorcer et réaliser des projets d'évaluation.

Les principaux éléments de la Méthodologie d'évaluation comprennent :

  • une explication des objectifs stratégiques du programme pour disposer des documents gouvernementaux;
  • un énoncé des principes conceptuels et théoriques sous-jacents à ce programme qui appuient la macro-évaluation et l'analyse fonctionnelle au moment de répertorier les documents archivistiques;
  • une description des liens importants entre les fonctions opérationnelles et les structures administratives, et un recensement des Bureaux de premier intérêt (BPI) en tant que lieux principaux de conservation des documents archivistiques;
  • une explication de la pertinence de l'interaction entre les citoyens/groupes et le gouvernement du Canada (par le biais des différents BPI) aux fins de la détermination de séries de dossiers individuels destinés à la préservation archivistique, y compris l'acquisition de dossiers individuels pour leur valeur informative;
  • une clarification des liens entre la macro-évaluation des fonctions opérationnelles et des structures administratives et la micro-évaluation des documents courants, afin de confirmer les hypothèses d'évaluation;
  • un examen des exigences légales en matière de conservation des documents dans un contexte de macro-évaluation;
  • une liste des lectures de référence recommandées traitant des concepts et des aspects théoriques liés à la macro-évaluation (Partie A) et des études de cas connexes (Partie B), de même qu'un nombre limité d'autres ouvrages qui complètent ou ont inspiré l'approche mise en pratique par les Archives nationales (Partie A).
Il importe de faire remarquer que la Méthodologie d'évaluation, qui trace sommairement les grandes lignes de la stratégie et des processus de macro-évaluation des AN, reflète également le raisonnement courant et le consensus institutionnel global en matière d'évaluation des documents gouvernementaux. Le document est destiné à être utilisé par les membres du personnel des AN, tant comme ligne directrice opérationnelle qu'à titre d'instrument d'orientation en matière d'évaluation de documents. Il est également prévu d'accorder une importance croissante à ce document et d'assurer qu'il soit mis au point de façon à tenir compte des innovations et des expériences liées à l'évaluation des documents gardés sous la responsabilité des différentes institutions du gouvernement fédéral. En outre, les Archives nationales doivent rendre compte à la population canadienne de leurs décisions en matière de préservation des documents archivistiques relatifs à notre histoire nationale et à notre mémoire collective, pour le bénéfice des générations à venir. Pour ces raisons, les Archives nationales diffusent leur Méthodologie d'évaluation dans le but d'offrir au grand public une explication de la façon dont elles choisissent les documents archivistiques aux fins de préservation.1

Théorie de l'évaluation archivistique et macro-évaluation

La théorie de l'évaluation explore, d'un point de vue philosophique, les différentes sources ou influences sur lesquelles s'appuient les archivistes lorsqu'ils prennent la décision d'accorder une « valeur » ou une « pertinence » ou une « importance » particulière aux documents. Avant de décider qu'un document donné a une certaine « valeur », l'archiviste doit d'abord soulever certaines questions essentielles : Pour qui le document possède-t-il une valeur archivistique? Quels critères ont été utilisés pour déterminer cette valeur? Pourquoi? Les stratégies et les méthodologies d'évaluation constituent des moyens à l'aide desquels de telles définitions théoriques ou philosophiques du terme « valeur » peuvent être précisées et mises en pratique dans un contexte réaliste de travail quotidien. La théorie prime sur tout. De façon successive, la stratégie, la méthodologie et la pratique en découlent. En l'absence d'une telle progression (théorie, stratégie, méthodologie, pratique), il n'existe aucun fondement logique ou valable aux décisions relatives à l'évaluation archivistique.

Aux Archives nationales, la macro-évaluation demeure à tous égards indépendante du support des documents. Elle s'applique de façon explicite à tous les documents conservés par les institutions gouvernementales et visés par la Loi sur les Archives nationales du Canada, c.-à-d., les documents textuels en format papier, les données et les documents de programmes opérationnels créés et conservés dans un environnement électronique, les photographies, les plans, les cartes, les dessins, les enregistrements audio-visuels et sonores, l'art documentaire, etc.

La théorie de macro-évaluation des Archives nationales s'appuie sur l'hypothèse3 voulant que les valeurs sociétales devraient fournir le contexte nécessaire à la prise de décisions en matière d'évaluation de documents. Bien que personne ne puisse connaître ou énoncer de façon objective, avec une entière assurance, les éléments actuels ou antérieurs des valeurs sociétales d'une génération donnée, les archivistes peuvent élaborer des stratégies et des méthodologies d'évaluation qui donnent très probablement une mémoire documentaire globale fidèle à l'évolution de la société au fil du temps. Aux Archives nationales, l'objectif premier est d'offrir aux Canadiens et aux Canadiennes un nombre suffisant de documents probants de la façon dont le gouvernement a élaboré ses politiques, pris ses décisions, traité ses affaires et délibéré ses questions, et interagi avec les citoyens et les citoyennes du Canada. De cette façon, les chercheurs et les autres utilisateurs ont pour tâche d'analyser et d'interpréter la signification des événements révélés par les documents archivistiques. Essentiellement, la macro-évaluation aux AN vise à documenter tant la fonctionnalité du gouvernement dans son rôle d'administrateur public que les répercussions de ses politiques, programmes et services sur la population dans un contexte élargi de gestion publique3. Évidemment, les décisions liées à l'évaluation de la valeur des documents créés par le secteur privé devrait servir de complément et de supplément à la préservation archivistique des documents du secteur public dans un cadre de travail s'appuyant sur le concept d'archives totales. Cet élément dépasse cependant la portée de la présente Méthodologie d'évaluation. En plus du point de mire sociétal adopté de façon formelle par les Archives nationales du Canada en 1991, deux autres théories principales de détermination de la valeur archivistique ont été préconisées par différents groupes d'archivistes au cours du 20e siècle :

  • Une première théorie soutenait que la valeur archivistique devrait être déterminée de manière empirique et pragmatique en soupesant l'utilisation actuelle ou anticipée des documents aux fins de recherche. Plus un document est utilisé par les chercheurs, ou plus grande est la nécessité de le conserver aux fins de recherche, plus sa valeur archivistique augmente.
  • La deuxième théorie appuyait l'idée que le créateur d'un document donné demeure la seule personne en mesure d'en déterminer la valeur archivistique et, par conséquent, de préciser les documents qui pourraient être préservés à titre d'archives.
La macro-évaluation diffère des méthodes utilisées pour déterminer ou évaluer les taxonomies de valeur élaborées respectivement par T.R. Schellenberg et Sir Hilary Jenkinson, et leurs disciples.

La macro-évaluation embrasse certains aspects des approches préconisées par Schellenberg et Jenkinson, comme il sera expliqué plus à fond dans la Partie B. Elle rejette cependant hors de tout doute la position défendue par Jenkinson à l'effet que les archivistes ne devraient pas procéder à l'évaluation archivistique des documents, puisqu'une telle pratique risquerait de compromettre leur rôle de gardien ou de conservateur objectif et passif des reliquats documentaires laissés par un créateur. La macro-évaluation fait valoir que les archivistes  -  et non les chercheurs ou les créateurs  -  sont des agents professionnels de la société nommés en vertu d'une loi et chargés d'établir sa mémoire collective. En vertu de leurs décisions relatives à l'évaluation archivistique, les archivistes façonnent activement l'héritage documentaire propre à leur époque.4.

Les théoriciens de la société et d'autres intervenants ont évoqué que toutes les sociétés accordent plus ou moins d'importance aux différentes dimensions des interactions qui se jouent entre les structures sociales, les fonctions sociétales et les citoyens/groupes en tant qu'agents sociaux. Aux AN, la macro-évaluation soutient qu'une compréhension adéquate des interactions entre les structures administratives du gouvernement, ses fonctions opérationnelles et les citoyens demeure un aspect essentiel dans la détermination de la valeur archivistique des documents gouvernementaux. Essentiellement, dans le but de préserver une image documentaire du fonctionnement du gouvernement au sein de la société, la macro-évaluation force les archivistes à rechercher et à analyser les profils fonctionnels et les structures administratives du gouvernement, de même que ses politiques et programmes opérationnels, pour préciser la nature de leurs répercussions sur les individus et les groupes. En documentant la façon dont le gouvernement dirige ses opérations, s'organise, exécute ses programmes et dispense ses services, et les modalités selon lesquelles il traite ses affaires et traite des questions, les AN offriront une vue d'ensemble fidèle de l'historique du gouvernement.5.

Aux AN, la formulation essentielle de la macro-évaluation s'inspire en fait d'une largeur de vue exprimée quelque cinq décennies auparavant par l'archiviste américaine Margaret Cross Norton  -  les documents suivent, reflètent et soutiennent les fonctions opérationnelles. Une telle situation existait et existe toujours, tant dans les milieux des grandes entreprises qu'au sein du gouvernement, et se manifeste actuellement dans l'analyse et la planification des impératifs et des besoins d'entreprises, dans la conception et la méthodologie des systèmes informatiques, de même que dans les approches contemporaines de refonte/restructuration des activités et de transformation gouvernementale. Ce courant de pensée dit fonctionnel se situe également au coeur même de la thèse de la macro-évaluation.

Au Canada, comme dans de nombreux autres pays, l'administration publique se voit essentiellement confier des responsabilités (fonctions) par un corps élu de représentants qui possèdent une compétence constitutionnelle et disposent d'un mandat accordé en vertu de la promulgation de lois, de règlements et de politiques. Pour accomplir ces fonctions, l'administration s'organise sous forme d'institutions (ministères, organismes, conseils et bureaux) possédant des mandats de compétence précis, dont certains sont exclusifs à une institution donnée et d'autres partagés entre différentes institutions. En règle générale, ces institutions sont mises sur pied et organisées par le gouvernement pour faire écho aux exigences et aux besoins contemporains de la société canadienne, c.-à-d. que les responsabilités de l'état fédéral doivent se rattacher à une société et à des « valeurs » sociétales particulières et bien définies. En documentant la façon dont les institutions gouvernementales respectent les responsabilités et les obligations de rendre compte qui leur ont été attribuées, et en préservant les documents qui illustrent la façon dont les institutions exécutent les activités publiques de la nation, les Archives nationales assureront la préservation de documents gouvernementaux ayant une valeur et un intérêt archivistique et historique durables pour l'ensemble de la population canadienne.

***

De nos jours, les affaires gouvernementales sont d'une complexité extraordinaire. La théorie de la macro-évaluation des AN s'appuie sur l'hypothèse voulant que la meilleure façon pour les archivistes de bien comprendre les activités opérationnelles du gouvernement, et de prendre des décisions éclairées en matière d'évaluation pour préserver les documents et assurer une représentation archivistique globale de chaque activité, repose sur l'analyse et l'évaluation des fonctions opérationnelles attribuées au gouvernement. La théorie de la macro-évaluation répartit ces fonctions selon deux catégories distinctes : les fonctions confiées aux institutions par le Parlement, selon une approche de gestion de portefeuille et à l'échelle de l'administration fédérale par le biais de lois, de règlements et de politiques; et les fonctions attribuées ou déléguées aux institutions pour leur permettre d'assumer leurs responsabilités administratives internes et, par conséquent, de respecter leurs mandats institutionnels. En partant d'un point de vue axé sur l'évaluation archivistique, il y a lieu d'examiner et d'évaluer l'organisation hiérarchique de la fonctionnalité gouvernementale.

À l'échelle de l'administration fédérale, en partant de la théorie de la macro-évaluation des AN et en évoluant vers sa stratégie et sa méthodologie de programmes, des domaines de responsabilité fonctionnelle globaux sont attribués à des regroupements administratifs d'institutions gouvernementales. Au Canada, ces domaines ou macro-fonctions ont fait preuve d'une relative stabilité depuis les années 60. De façon générale, il existe, à l'échelle du gouvernement fédéral, certains domaines de responsabilité fonctionnelle essentiels qui nécessitent la participation d'une ou de plusieurs institutions à l'élaboration des politiques, à la prise des décisions, à la réalisation des programmes et à la prestation des services, comme :

  • science et technologie;
  • sécurité et renseignement;
  • patrimoine et culture;
  • industrie et développement économique;
  • développement des ressources humaines;
  • relations extérieures et commerce international, etc.
Dans ces regroupements administratifs et à un niveau propre à une institution en particulier, divers éléments de ces macro-fonctions globales sont habituellement attribués en premier lieu aux mandats des ministères de plus grande taille, puis aux institutions de moindre envergure relevant du Parlement. Par exemple, dans le domaine global de responsabilité fonctionnelle gouvernementale lié aux transports, le ministre des Transports administre et gère les politiques et la réglementation en matière de transports dans un ministère principal (Transports Canada), mais les enquêtes sur les accidents de transport relèvent du Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Les audiences publiques sur la sécurité dans les transports et d'autres règlements sont du ressort de l'Office des transports du Canada, la gestion de la flotte de la Garde côtière canadienne est sous la responsabilité du ministère des Pêches et des Océans, alors que la surveillance de l'espace aérien canadien relève d'une agence quasi-gouvernementale sans but lucratif nommée NAV Canada.

La théorie de la macro-évaluation des AN soutient que les Archives nationales devraient uniquement acquérir les documents qui donnent de l'information relative aux fonctions à l'échelle de l'administration fédérale ou sur une base propre à une institution en particulier, sur la foi des renseignements créés, accumulés ou gérés par les Bureaux de premier intérêt (BPI). Un BPI constitue une entité administrative du gouvernement qui demeure exclusivement responsable ou redevable, envers la population canadienne, de l'élaboration des politiques, de la prise des décisions, de la réalisation des programmes ou de la prestation de services en vertu de lois, de règlements ou de mandats. En outre le BPI est l'endroit où se trouve le meilleur document archivistique de sa catégorie. La désignation, dans l'organigramme gouvernemental, d'un BPI approprié pour certaines fonctions particulières, nécessite des recherches et des analyses importantes et parfois même complexes. C'est principalement pour cette raison que le programme de disposition des documents gouvernementaux appuie sa théorie de macro-évaluation par le biais d'un programme axé sur la recherche. À l'aide de cette recherche méthodologique, les Archives nationales obtiendront des résultats cohérents en matière d'évaluation, permettant ainsi l'exécution d'un programme de préservation des documents davantage ciblé.

La thèse de la macro-évaluation signifie que le milieu contextuel dans lequel les documents sont créés et subséquemment évalués par les archivistes à l'aide de l'approche de macro-évaluation, est globalement déterminé par un éventail de facteurs : structures administratives, macro-fonctions, fonctions, sous-fonctions, programmes, activités, transactions/opérations, interactions avec la clientèle, processus de création de documents, systèmes de documents et technologies d'enregistrement. La macro-évaluation offre un point de vue documentaire équilibré de l'historique du gouvernement en orientant la recherche en matière d'évaluation archivistique vers l'analyse des fonctions opérationnelles du gouvernement, plutôt que vers l'analyse des documents eux-mêmes. Le risque de la sur représentation archivistique de certains documents, en raison du fait qu'ils servent des intérêts de recherche contemporains, est éliminé. En outre, les documents/dossiers de moindre importance et les duplicatas ressortent plus facilement. Ce qui est encore plus important, c'est que les domaines d'activités traditionnellement sous-représentés dans les archives le sont de façon plus complète.

Essentiellement, la macro-évaluation réoriente le point de mire essentiel de l'évaluation, en le faisant passer du document  -  y compris toutes les caractéristiques ou les valeurs en matière de recherche qu'il contient  -  au contexte fonctionnel dans lequel ce document est créé. Les principales questions d'évaluation soulevées par l'archiviste ne sont plus du type « de quel document s'agit-il? », « où se trouve ce document? » et « quelle est la valeur archivistique de ce document? ». Plutôt, l'archiviste fait appel aux connaissances acquises grâce à l'analyse fonctionnelle d'une institution donnée, notamment l'analyse de l'interaction entre les fonctions et la structure, de la culture organisationnelle, des systèmes de tenue des dossiers, et de l'engagement des citoyens/clients auprès de l'institution ou envers la fonction. Les questions clés rattachées à l'évaluation sont les suivantes :

  • En quoi consistent les fonctions et les activités mandatées des institutions gouvernementales?
  • Quelle est l'importance de ces fonctions et activités à l'échelle du gouvernement et au sein de ces institutions?
  • Quelle est l'importance de ces fonctions et activités dans le contexte élargi de la société canadienne?
  • À partir du moment où une fonction ou une activité revêt une certaine importance, quels éléments ou caractéristiques doivent être documentés?
  • D'un point de vue archivistique, qu'est-ce qui constitue une documentation suffisante?
  • Au sein du gouvernement, où se situe le Bureau de premier intérêt de qui relève une fonction ou une activité donnée?
  • Le Bureau de premier intérêt constitue-t-il l'endroit où se trouve le meilleur document archivistique permettant d'obtenir des renseignements pertinents sur la fonction ou l'activité?
En soulevant ces questions fondamentales et en y répondant, les archivistes peuvent cibler pour examen des documents ou des séries de dossiers dans le but de confirmer leurs hypothèses de recherche relativement à l'importance de la fonction ou de l'activité analysée. L'examen des documents donne lieu à l'un ou l'autre des résultats suivants :
    a) L'examen des documents confirme l'hypothèse de recherche. Des recommandations sont subséquemment formulées relativement à leur préservation archivistique. (Par conséquent, il n'est pas nécessaire que les Archives nationales fassent l'acquisition de documents liés à une fonction ou à une activité de quelque site administratif que ce soit au gouvernement, mis à part le Bureau de premier intérêt);
ou
    b) L'examen des documents ne confirme pas l'hypothèse de recherche. Les recommandations sont formulées relativement à la documentation appropriée de la fonction ou de l'activité, celle-ci revêtant une importance d'un point de vue archivistique.
La macro-évaluation propose principalement que seuls les Bureaux de premier intérêt puissent être en mesure de produire la documentation essentielle touchant des fonctions et des activités gouvernementales particulières. Par conséquent, les Archives nationales feront exclusivement l'acquisition des documents archivistiques qui proviennent de ces entités administratives. Bien que la macro-évaluation réoriente le point de mire en matière d'évaluation en le faisant passer du document vers son contexte de création, elle conserve l'examen des documents comme étant l'étape définitive primordiale dans sa méthodologie d'évaluation. En premier lieu, en examinant les documents, les archivistes ont la possibilité de vérifier leurs recherches et de confirmer leurs hypothèses. Deuxièmement, un aspect sans doute encore plus important, les archivistes doivent décider de la nature et du nombre de documents requis pour constituer une documentation adéquate de la fonction ou de l'activité. La dernière tâche effectuée par l'archiviste lors de l'évaluation des documents consiste à procéder à leur examen. Les Archives nationales ne doivent pas chercher à acquérir tous les documents rattachés à une fonction ou à une activité et jugés comme possédant une valeur archivistique ou une importance nationale. Il faut aussi tenir compte du fait que les fonctions ne revêtent pas toutes une importance égale, ou n'ont pas des répercussions similaires sur la vie des Canadiens et des Canadiennes. Comme il est expliqué dans les Lignes directrices en matière d'évaluation archivistique (Partie B de la Méthodologie d'évaluation), on s'attend à ce que les archivistes puissent déterminer les dossiers qui documentent de façon adéquate la fonction ou l'activité dont il est question. Les archivistes devraient y consacrer leur jugement éclairé, de même que leurs recherches et connaissances, en prenant en considération les ressources dont disposent les Archives nationales. Le point de mire théorique de la macro-évaluation est « sociétal » : elle doit permettre de préciser les documents qui font mieux saisir le fonctionnement du gouvernement et ses répercussions sur la société canadienne. L'objectif n'est pas de fournir des preuves documentaires archivistiques relatives aux fonctions et aux activités en tant que but en soi.

Objectifs de documentation liés à la macro-évaluation des documents gouvernementaux

Le point de mire sociétal de la macro-évaluation qui mène à l'acquisition ou à la préservation archivistique des documents gouvernementaux par les Archives nationales est régi par les objectifs de documentation décrits ci-dessous. L'objectif principal est de préserver des dossiers choisis qui permettent de documenter les délibérations, les décisions et les mesures prises par le gouvernement en relation avec les fonctions opérationnelles, les programmes et les activités qui lui ont été attribués, de même que les documents et dossiers qui établissent la souveraineté, l'organisation et l'administration du gouvernement. Les autres objectifs de documentation sont :

  • de préserver des documents choisis qui donnent au gouvernement et au grand public l'information nécessaire à propos des politiques, des décisions et des programmes des institutions gouvernementales au fil du temps, aux fins de révision, d'examen minutieux et de compréhension;
  • de préserver des documents choisis qui fournissent les renseignements pertinents sur les répercussions du processus décisionnel gouvernemental sur les citoyens et les groupes au Canada, de même que sur l'interaction entre la population canadienne et l'état fédéral;
  • de préserver des documents choisis jugés essentiels à la protection des droits et des privilèges collectifs et individuels des Canadiens et des Canadiennes, de même que leur environnement social, culturel et physique;
  • de préserver des documents choisis qui revêtent une importance nationale et contiennent des renseignements primordiaux ou uniques qui accroissent de manière substantielle la compréhension de l'histoire, de la société et de la culture canadiennes, de même que du peuple canadien;
  • de préserver des documents choisis que le gouvernement du Canada, en vertu de la loi, doit conserver pendant une certaine période déterminée.
L'objectif de la macro-évaluation

L'objectif de la macro-évaluation consiste à obtenir des différents Bureaux de premier intérêt un nombre appréciable et suffisant de preuves documentaires. Celles-ci devraient refléter de la manière la plus concise possible, et en faisant appel aux meilleurs supports d'enregistrement existants, les répercussions d'une fonction ou d'un programme donné sur la population canadienne et l'interaction entre le grand public et cette fonction ou ce programme.

Les étapes méthodologiques élaborées pour soutenir cette stratégie sont précisées dans la Partie B : lignes directrices en matière d'évaluation archivistique des documents gouvernementaux.
___________________

Bibliographie sommaire (publications seulement)

Recherches théoriques effectuées par le personnel du programme :

Richard Brown. « Macro-Appraisal Theory and the Context of the Public Records Creator », Archivaria, vol. 40, automne 1995, p. 40-74.

Richard Brown. « Records Acquisition Strategy and Its Theoretical Foundation : The Case for a Concept of Archival Hermeneutics », Archivaria, vol. 33, hiver 1991-1992, p. 34-56.

Richard Brown. « The Value of "Narrativity" in the Appraisal of Historical Documents : Foundation for a Theory of Archival Hermeneutics », Archivaria, vol. 32, été 1991, p. 152-156.

Terry Cook. « The Archival Appraisal of Records Containing Personal Information : A RAMP Study With Guidelines », Paris, Conseil international des archives, UNESCO, 1991.

Terry Cook. « Documentation Strategy », Archivaria, vol. 34, été 1992, p. 181-191.

Terry Cook. « Macroappraisal and Functional Analysis: Appraisal Theory, Strategy, and Methodology for Archivists », L'évaluation des archives : des nécessités de la gestion aux exigences du témoignage, Groupe interdisciplinaire de recherche en archivistique, 3e symposium, Montréal, 1998, p. 27-33.

Terry Cook. « "Many are called but few are chosen" : Appraisal Guidelines for Sampling and Selecting Case Files », Archivaria, vol. 32, été 1991, p. 25-50.

Terry Cook. « Mind Over Matter: Towards a New Theory of Archival Appraisal », dans Barbara Craig (ed.), The Canadian Archival Imagination : Essays in Honour of Hugh Taylor, Ottawa, 1992.

Terry Cook. « What is Past is Prologue : A History of Archival Ideas Since 1898, and the Future Paradigm Shift », Archivaria, vol. 43, printemps 1997, p. 17-63.

Jean-Stephen Piché. « Macro-Appraisal and Duplication of Information : Federal Real Property Management Records », Archivaria, vol. 39, printemps 1995, p. 39-50.

Jean-Pierre Wallot. « Building a Living Memory for the History of Our Present : New Perspectives on Archival Appraisal », Revue de la Société historique du Canada (nouvelle série), vol. 2, 1991.

Ian E. Wilson. « The Fine Art of Destruction Revisited », Archivaria, vol. 49, printemps 2000, p. 124-139.

Influences conceptuelles externes ou réflexions à l'appui

Hans Booms. « Society and the Formation of a Documentary Heritage : Issues in the Appraisal of Archival Sources », Archivaria, vol. 24, été 1987, traduit par Hermina Joldersma et Richard Klumpenhouwer, comprend une introduction -- article original, 1972.

Hans Booms. « Uberlieferungsbilding : Keeping Archives as a Social and Political Activity », Archivaria, vol. 33, hiver 1991-1992, p. 25-33.

Mark A. Greene et Todd J. Daniels-Howell. « Documentation with an Attitude : A Pragmatist's Guide to the Selection and Acquisition of Modern Business Records », dans James M. O'Toole, The Records of American Business, Chicago, 1997, p. 161-229.

Gerald F. Ham, « Archival Choices : Managing the Historical Record in an Age of Abundance », dans Nancy E. Peace, éditeur., Archival Choices : Managing the Historical Record in an Age of Abundance (Lexington, Mass., 1984).

Gerald F. Ham, « The Archival Edge, » dans Maygene Daniels et Timothy Walch, éditeurs., A Modern Archives Reader (Washington, 1984) -- article original, 1975.

National Archives (Netherlands), PIVOT : Logic Model : Institutional Research (1992).

Greg O'Shea, « The Medium is not the Message : Appraisal of Electronic Records by Australian Archives, » Archives et manuscrits 22, no 1 (mai 1994).

Catherine Robinson, « Records Control and Disposal Using Functional Analysis », Archives et manuscrits 25 (novembre 1997), p. 288-303.

Helen Samuels. Varsity Letters : Documenting Modern Colleges and Universities (1992).

Helen Samuels. « Who Controls the Past? » American Archivist 49, no 2 (printemps 1986).

Jim Suderman, « Appraising Records of the Expenditure Management Function : An Exercise in Functional Analysis, » Archivaria 43 (printemps 1997), p. 129-42.

United States, National Archives and Records Administration, Office of Records Administration, Appraisal of Department of Justice Case Files : Final Report (Washington, 1989).