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Mobilité interprovinciale de la main d'oeuvre canadienne : Rôle de l'assurance-chômage,de l'assistance sociale et de la formation

Zhengxi Lin

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But

Le présent mémoire donne un résumé des résultats d'une étude portant sur les effets qu'ont sur la mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre les divers moyens d'application de la politique relative au marché du travail, c'est-à-dire l'octroi de prestations d'assurance-chômage et d'assistance sociale, et les divers programmes de formation professionnelle parrainés par le gouvernement fédéral. Cette étude constitue un des éléments d'une évaluation majeure du Programme des prestations ordinaires d'assurance-chômage au Canada.

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Contexte

Le Canada est un immense pays composé de régions très diverses au plan économique. En raison de ces disparités régionales, on y trouve différents marchés du travail qui doivent constamment s'ajuster à la conjoncture économique locale. En théorie, la mobilité géographique de la main-d'oeuvre constitue un des mécanismes d'ajustement pouvant permettre une redistribution des travailleurs des régions où la demande de main-d'oeuvre est faible vers les régions où elle est forte. En pratique, toutefois, il peut y avoir plusieurs raisons qui font que les travailleurs ne se déplacent pas d'une région vers une autre. On peut en effet se demander quel est le rôle de certains programmes tels que l'assurance-chômage, l'assistance sociale et les divers programmes de formation professionnelle parrainés par le gouvernement fédéral par rapport à la mobilité géographique des travailleurs.

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Source des données

Les données sur lesquelles s'appuie cette étude sont tirées des fichiers longitudinaux de données individuelles de l'Enquête sur l'activité de Statistique Canada portant sur la période de 1988-1990.Ces fichiers contiennent des données sur un même échantillon de personnes pour trois années consécutives. La province de résidence en 1988 correspond à la province d'origine du répondant et sont considérées comme « migrants » les personnes qui ont changé de province de résidence en 1989 ou en 1990.Le présent mémoire expose la mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre, les caractéristiques démographiques et socio-économiques des migrants, les liens entre la mobilité des travailleurs et les programmes gouvernementaux de même que le rendement de l'activité dans le cas des migrants comparativement aux non-migrants. L'étude traite également des tendances de la migration à rebours, un migrant à rebours étant défini comme toute personne ayant quitté sa province d'origine en 1989 qui retourne s'y établir en 1990.Enfin, l'auteur analyse de façon empirique les effets de l'assurance-chômage, de l'assistance sociale et de la formation sur la migration interprovinciale, à l'aide de modèles économétriques.

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Principaux résultats

Gains et pertes de population

En 1989, environ 120 000 Canadiens d'âge adulte (de 16 à 69 ans) ont changé de province, ce qui représente 0,7 % de la population adulte totale. En 1990, leur nombre est passé à quelque 170 000, soit 1 % de la population adulte totale. Si les résidents du Québec, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique se sont révélés peu portés à migrer, on a enregistré de forts taux de migration dans es provinces de l'Atlantique et dans les Prairies pour ces deux années.

Alors qu'au Québec, l'immigration et l'émigration internes ont été sensiblement équivalentes entraînant peu de variation de la population d'âge adulte, à Terre-Neuve, à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick, au Manitoba et en Saskatchewan, on a enregistré une baisse de cette catégorie de population. Bien que ces dernières provinces aient reçu une partie des migrants interprovinciaux, elles ont perdu un nombre plus important de résidents qui ont migré vers une autre région. Contrairement aux tendances passées, l'Ontario a elle aussi enregistré une perte de population d'âge adulte durant cette période. Les provinces qui ont bénéficié de la migration interprovinciale sont, en particulier, la Nouvelle-Écosse, l'Alberta et la Colombie-Britannique. Même si ces provinces ont enregistré des taux élevés d'émigration interne, l'afflux d'immigrants internes a été plus important, ce qui a abouti à un gain net de population.

Provinces de destination

Si les émigrants internes en provenance du Québec et de l'Ontario se sont répartis plutôt uniformément dans le reste du pays, ceux des provinces de l'Atlantique et de la Colombie-Britannique ont surtout déménagé en Ontario et en Nouvelle-Écosse. La majorité des émigrants internes qui ont quitté les provinces des Prairies sont restés dans l'Ouest.

Raisons du déménagement

En 1989, près du tiers des migrants interprovinciaux ont quitté leur province d'origine pour des raisons économiques (ils avaient été mutés par leur employeur, ils avaient accepté une offre d'emploi qui nécessitait un déménagement ou ils avaient déménagé pour chercher du travail ailleurs), 27 % l'ont quitté pour des raisons familiales (leur conjoint ou leurs parents avaient déménagé ou ils avaient déménagé pour se rapprocher de membres de leur famille ou d'amis), environ un tiers des répondants n'ont pas donné de raisons précises et le reste des répondants ont déclaré avoir déménagé pour fins d'étude ou parce qu'ils avaient pris leur retraite.

Lorsque l'on analyse les raisons de déménager selon le sexe, on observe des variations importantes. Chez les hommes, la mobilité est le plus souvent déterminée par des raisons économiques tandis que chez les femmes, elle est le plus souvent reliée aux responsabilités familiales. Par exemple, près de 46 % des hommes mais seulement 26 % des femmes qui ont migré en 1989 ont déclaré avoir été mus par des raisons économiques. Par contre, près de 39 % des femmes mais seulement 19 % des hommes ont déclaré avoir déménagé à cause de leurs responsabilités familiales.

Avantages économiques de la mobilité

Pour analyser les avantages économiques liés à la mobilité, l'auteur a étudié les résultats correspondant à plusieurs indicateurs du rendement de l'activité pour les migrants et pour les nonmigrants. Comme la migration observée avait lieu en 1989, on a comparé les données de 1988 (avant la migration) à celles de 1990 (après la migration) et on a comparé les résultats obtenus pour les migrants à ceux des nonmigrants. En choisissant les nonmigrants comme groupe de référence, l'auteur était en mesure d'estimer le supplément de revenu pouvant être attribué à la décision de déménager prise par les migrants par rapport à ce qu'aurait été leur situation s'ils n'avaient pas déménagé.

Les estimations de l'avantage économique lié à la mobilité interprovinciale des travailleurs ont donné des résultats nettement positifs en 1989.En moyenne, le gain salarial nominal net sur une base annuelle pour les migrants de sexe masculin (c.-à-d. l'écart entre l'augmentation de salaire enregistrée entre 1988 et 1990 pour les hommes ayant migré par rapport à l'augmentation correspondante pour les hommes n'ayant pas migré) était de 5 520 $, ce qui représente près de 26 % du salaire avant la migration. Chez les femmes, l'avantage économique est un peu moindre en chiffres absolus (5 220 $), mais il est proportionnellement de beaucoup supérieur au salaire de la personne avant qu'elle ait migré (près de 45 %).

Quand l'auteur a décomposé le salaire annuel en fonction des gains horaires et du nombre d'heures d'emploi, le supplément relatif de gain attribuable à la mobilité chez les hommes s'est révélé dû à une augmentation relativement plus forte des gains et à un accroissement comparatif des heures de travail dans le cas des migrants. Chez les hommes, les gains horaires des migrants se sont accrus de 15,3 % contre seulement 11,3 % pour ceux des non-migrants, ce qui donne un supplément de gains attribuable à la mobilité de l'ordre de 0,39 $ l'heure, ou 3,1 % par rapport au salaire avant la migration. Toujours chez les hommes, le nombre annuel d'heures de travail des migrants a augmenté de 18,5 % tandis que pour les nonmigrants, il a diminué de 1 %, ce qui donne un écart de 308 heures pour l'année ou près de 20 % par rapport au nombre d'heures travaillées avant la migration. Chez les femmes, les travailleuses migrantes n'ont pas enregistré une augmentation de gains aussi importante que leurs homologues non migrantes mais elles ont affiché une augmentation plus importante de leur nombre annuel d'heures de travail. L'écart d'heures de travail attribuable à la mobilité a été de 376 heures pour l'année, soit 29 % de moins que le nombre d'heures travaillées avant la migration. L'avantage est nettement plus marqué que dans le cas des hommes.

En ce qui a trait aux autres mesures du rendement de l'activité, les résultats sont mitigés. Chez les hommes, la mobilité a conduit à une augmentation du chômage annuel moyen de 0,26 semaine (7,7 %) par rapport au niveau avant la migration. Elle a également entraîné une augmentation de la fréquence de versement des prestations d'assurance-chômage de 7,2 points de pourcentage et des prestations d'assistance sociale de 3,1 points. Par contre, chez les femmes, la mobilité s'est soldée par une réduction du chômage moyen de 1,97 semaine pour l'année (36,5 %) par rapport au niveau avant la migration mais aussi à une diminution de 1,7 point de pourcentage de la fréquence de versement des prestations d'assistance sociale. Toutefois, elle a entraîné une augmentation de 11 points de pourcentage de la fréquence de versement des prestations d'assurance-chômage.

Mobilité à rebours

En 1990, plus de 7 000 personnes sont retournées s'installer dans la province où elles demeuraient en 1988, ce qui correspond à environ 5,8 % des 120 000 migrants qui avaient déménagé en 1989.Cependant, cette mobilité à rebours se manifeste de façon très différente selon les provinces. Elle est beaucoup plus forte que la moyenne nationale dans le cas des migrants originaires de Terre-Neuve, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique, mais elle est inférieure à la moyenne nationale dans le cas des migrants originaires de la Nouvelle-Écosse, du Québec, de l'Ontario, du Manitoba et de l'Alberta. On note également des divergences considérables lorsqu'on analyse la mobilité à rebours selon la raison qui avait motivé le départ initial de la personne. Les personnes qui avaient migré pour des raisons économiques retournent généralement en plus grand nombre dans leur province d'origine que celles qui avaient migré pour des raisons familiales. Alors que 30 % des migrants qui étaient retournés dans leur province d'origine n'ont déclaré aucune raison particulière pour ce retour, environ 42 % ont donné des raisons économiques et quelque 21 %, des raisons familiales.

Mobilité et perception de prestations d'assurance-chômage, d'assistance sociale et formation

Approximativement 11,9 % de la population d'âge adulte a reçu des prestations d'assurance-chômage à un moment ou à un autre en 1988.Le pourcentage est tombé à 11,4 % en 1989 mais il est remonté à 12,4 % en 1990. La perception de prestations d'assurance-chômage, qui est reliée au contexte économique global, varie considérablement selon les provinces. Elle est nettement plus forte dans les provinces de l'Atlantique et au Québec, et beaucoup plus faible en Ontario et dans l'Ouest du Canada.

Le pourcentage de personnes ayant reçu des prestations d'assistance sociale à un moment ou à un autre durant l'année était de 4,1 % en 1988, de 3,7 % en 1989 et de 4,1 % en 1990. On note également de fortes variations selon les provinces. À Terre-Neuve, au Nouveau-Brunswick et au Québec, les pourcentages sont supérieurs à la moyenne nationale alors qu'ils lui sont inférieurs dans le reste du pays. En ce qui a trait aux programmes de formation parrainés par le gouvernement fédéral, le pourcentage de participation était de 0,9 % en 1988, de 0,7 % en 1989 et de 0,8% en 1990. Les pourcentages étaient plus élevés dans les provinces de l'Atlantique et au Québec, et ils étaient moindres en Ontario et dans l'Ouest du Canada.

Bien que l'on relève des écarts entre les provinces, le taux de mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre était généralement supérieur chez les prestataires de l'assurance-chômage que chez les non-prestataires, il était moindre chez les prestataires de l'assistance sociale que chez les non-prestataires et il était plus élevé chez les participants aux programmes de formation que chez les non-participants.

Les déterminants de la mobilité

Les résultats de la régression logit indiquent que la mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre décroît lorsqu'il est plus difficile de trouver un emploi dans une autre province que dans la province d'origine, croît avec le niveau de scolarité, décroît lorsque l'âge croît, est plus faible chez les francophones, décroît lorsque la taille de la famille augmente, décroît lorsque la durée d'occupation de l'emploi augmente, est plus faible chez les travailleurs syndiqués et chez ceux dont les salaires sont protégés par une convention collective. Bien que le taux de mobilité interprovinciale globale soit plus élevé chez les prestataires de l'assurance-chômage que chez les non-prestataires et chez les personnes participant à un programme de formation que chez les non-participants, un examen des différences quant à la rémunération, au nombre d'heures travaillées, à la difficulté de trouver un emploi, aux caractéristiques personnelles et aux caractéristiques liées à l'emploi a révélé que ces mesures d'aide ne sont pas des déterminants statistiquement significatifs de la mobilité interprovinciale des travailleurs. La perception de prestations d'assurance-chômage chez les femmes en 1990 fait toutefois exception car elle s'est avéré avoir une incidence positive et significative sur leur mobilité.

Les résultats empiriques de cette étude soulignent que la migration interprovinciale des travailleurs est déterminée essentiellement par les forces du marché et par les caractéristiques personnelles. Les politiques telles que l'assurance-chômage, l'assistance sociale et la formation parrainée par l'État ne sont pas des facteurs déterminants en la matière.

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Notes biographiques

Zhengxi Lin a réalisé cette étude quand il était agent d'évaluation à la Direction générale des programmes d'assurance, Développement des ressources humaines Canada. Il a obtenu un doctorat en 1993 de la Dalhousie University et il est co-auteur d'un certain nombre d'articles publiés dans des revues spécialisées. Zhengxi Lin travaille actuellement à Statistique Canada, à la Division de l'analyse des entreprises et du marché de travail.

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