Alphabétisation des Adultes: politiques, programmes et pratiques: Étude bilan
IntroductionL’alphabétisation est l’un des fondements de la citoyenneté et elle constitue une compétence essentielle pour le travail et l’apprentissage continu. Au Canada, nombreux sont les adultes qui n’ont pas le niveau d’alphabétisation nécessaire pour participer activement à la vie communautaire, à l’économie et à des activités d’acquisition du savoir. Selon l’Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes de 1994, environ 18% des Canadiens en âge de travailler éprouvaient des difficultés extrêmes à lire, tandis que 26% avaient des capacités très limitées à cet égard. Problèmes associés à l’alphabétisation des adultesLes problèmes associés à l’alphabétisation des adultes prennent deux formes: les problèmes qu’éprouvent les personnes sous-alphabétisées et les problèmes occasionnés par un matériel de lecture inutilement difficile et de plus en plus complexe. Les études réalisées permettent de conclure que les faibles niveaux d’alphabétisation engendrent, pour les individus comme pour la société, des problèmes d’ordre personnel, social, économique et politique.
Au même moment, certains documents sont devenus inutilement complexes. C’est le cas, notamment, des documents techniques utilisés par diverses industries et institutions. Les niveaux exigés en matière d’alphabétisation et d’instruction/formation formelles sont de plus en plus élevés, principalement sur le marché du travail. Un niveau élevé d’alphabétisation est un outil essentiel dans une économie du savoir. Interventions axées sur l’alphabétisation des adultesPour remédier à la situation, des politiques appuyant des recherches, des programmes et des stratégies ont été élaborées. Les politiques reliées à l’alphabétisation des adultes ont été façonnées par trois éléments:
Ces politiques ont surtout favorisé des recherches sur la nature de l’alphabétisation des adultes, la promotion de l’importance de l’alphabétisation grâce à des campagnes de sensibilisation, l’élaboration de modèles de mise en œuvre et de matériel, la mise en œuvre d’initiatives de promotion d’un langage clair et l’adoption de mesures visant à encourager le secteur privé à mettre des programmes en œuvre. Les programmes d’alphabétisation des adultes sont offerts dans le contexte du système d’éducation publique, et par des organisations non gouvernementales (ONG) et des organismes communautaires. Les pratiques et stratégies liées à l’alphabétisation des adultes prennent diverses formes, soit du matériel de lecture précis, des stratégies d’enseignement et des campagnes de relations publiques, notamment des campagnes visant à promouvoir l’utilisation de termes simples. L’évaluation des divers programmes, politiques et pratiques d’alphabétisation visant à résoudre les problèmes décelés a permis de tirer un certain nombre d’enseignements. Enseignements tirés
Les programmes d’alphabétisation des adultes peuvent profiter à la fois aux individus et à l’ensemble de la société. Les adultes qui participent à des programmes d’alphabétisation parviennent généralement à renforcer leurs compétences en matière d’alphabétisation. Pour les apprenants, les programmes d’alphabétisation peuvent avoir de nombreuses répercussions positives, notamment l’amélioration de la confiance en soi et des compétences parentales, l’augmentation du nombre de débouchés d’emploi et un leadership communautaire. Cependant, cela ne s’est généralement pas traduit par un plan concerté pour concrétiser ces avantages. Le grand public semble appuyer «la lutte contre l’analphabétisme des adultes» comme une bonne cause, mais non comme un enjeu en matière d’éducation. Les particuliers continuent de se porter bénévoles comme tuteurs et champions de la cause de l’alphabétisation, mais le soutien ne semble pas aller plus loin. Une grande partie des ressources réservées à l’alphabétisation des adultes est consacrée à la recherche et à la sensibilisation du public, mais peu de ressources sont utilisées pour modifier le système actuel d’éducation et de formation pour qu’il fasse la part belle à l’alphabétisation des adultes. La variété des programmes est pratiquement illimitée, et on retrouve des combinaisons diverses, par exemple du personnel rémunéré et des bénévoles, une conception formelle ou non formelle, des cours individuels et des cours en groupes, une gestion souple ou stricte de l’apprentissage. Les méthodes d’enseignement et les contextes d’apprentissage les plus efficaces varient selon le genre d’apprenants. Bref, il n’y a pas «une façon unique» de dispenser les cours d’alphabétisation et la variété est importante, autant dans les programmes que dans les approches. De façon générale, la pratique la plus appropriée consiste à faire appel à des instructeurs ayant reçu une formation adéquate, à mettre en place un environnement d’apprentissage non menaçant, à utiliser du matériel et des approches convenant à des adultes en matière d’enseignement et d’évaluation, ainsi qu’à adopter un style d’enseignement individualisé et souple. Les programmes efficaces prévoient des services de soutien et des liens avec d’autres prestataires de services. Un enseignement efficace devrait mettre l’accent sur les questions intéressant les apprenants et faire appel à du matériel de tous les jours. Les programmes permettant aux participants d’acquérir plus que des capacités de lecture et d’écriture semblent être ceux qui remportent le plus de succès. Certains genres de programmes présentent plus d’intérêt pour les adultes qui ont des problèmes d’alphabétisation ou ont plus de succès auprès de ces adultes. Par exemple, les parents sont beaucoup plus susceptibles de persévérer dans le cadre des programmes d’alphabétisation familiale que dans le cadre d’autres genres de programmes. Les travailleurs participeront plus vraisemblablement aux programmes si la formation a lieu pendant les heures normales de travail. Les travailleurs sont plus enclins à participer à des programmes d’amélioration des compétences lorsqu’ils ont un emploi que lorsqu’ils sont en chômage, étant donné le stress lié au chômage. Compte tenu que différentes approches en matière de programmes et d’enseignement sont privilégiées pour différents groupes cibles, les programmes ciblés semblent plus appropriés et plus efficaces. Ces programmes ont un effet de motivation étant donné qu’ils se rapportent directement à la situation de l’apprenant, par exemple, la promesse d’un emploi ou une autre forme de reconnaissance. Il est possible d’améliorer les répercussions des programmes d’alphabétisation grâce à un meilleur ciblage, par exemple des programmes qui s’adressent aux contrevenants, aux familles, aux travailleurs employés ou en chômage, aux participants à l’éducation de base des adultes, aux adultes qui ont des difficultés d’apprentissage et ainsi de suite. Les programmes qui offrent à la fois un volet d’alphabétisation et un volet de perfectionnement remportent un succès mitigé. De façon générale, ils ne permettent pas de recruter et de conserver des étudiants. Entre 6% et 10% seulement des personnes qui pourraient ou qui devraient prendre part à des programmes d’alphabétisation y participent réellement. Diverses raisons sont invoquées pour expliquer les taux de participation peu élevés, notamment les obstacles à l’accès et aux locaux en ce qui a trait aux programmes d’enseignement/d’apprentissage associés à la pauvreté et au chômage. En outre, un grand nombre d’adultes ne terminent pas leur programme d’alphabétisation et le nombre d’apprenants qui échouent, pour quelque raison que ce soit, est élevé. Parmi les raisons invoquées pour expliquer le «décrochage» dans le cas des programmes d’alphabétisation, mentionnons: Pour assurer l’utilité individuelle et collective des programmes d’alphabétisation des adultes, il faut surmonter les obstacles à la participation et à l’achèvement et résoudre les problèmes connus en ce qui a trait aux programmes. Pour ce faire, une stratégie importante consisterait à amener les apprenants à prendre part au processus décisionnel se rapportant aux programmes et aux politiques. Un très petit nombre d’apprenants ont été en mesure, avec l’aide du gouvernement et des ONG, de se porter à leur propre défense. La majorité des participants aux programmes d’alphabétisation sont fermement déterminés à apprendre, comprennent bien les enjeux dans la vie de tous les jours et sont prêts à faire des choix positifs. Pour accroître le taux de réussite, les stratégies d’alphabétisation des adultes devraient mettre l’accent sur les clients et essayer de répondre à leurs besoins. L’utilisation de matériel informatique pour former les adultes semble présenter de nombreux avantages. Les ordinateurs permettent d’offrir aux étudiants une intimité qu’ils souhaitent peut-être et de fournir des commentaires rapidement à chaque étudiant. Les ordinateurs sont perçus comme un outil prestigieux dans le cadre des programmes et ils ont tendance à attirer plus d’étudiants. En outre, les apprenants sont en mesure d’acquérir des compétences de base en informatique. On constate une productivité accrue, une meilleure compréhension de ce qui entre dans la production de textes écrits, une participation accrue de la part des apprenants et des niveaux plus élevés d’enthousiasme et d’intérêt face à l’utilisation des technologies d’apprentissage. Cependant, rien ne prouve que les ordinateurs donnent lieu à des améliorations spectaculaires, à l’amélioration des attitudes et au renforcement de l’estime de soi, du contenu individuel, du contrôle et de la flexibilité. Le niveau global d’intérêt face à l’utilisation de la technologie est élevé. Cependant les études soulèvent une variété de défis. La plupart des programmes n’ont pas les fonds nécessaires pour acheter le matériel et les logiciels requis pour permettre un accès informatique adéquat à leurs étudiants. Dans le cas des programmes qui ont les ressources nécessaires, aucun genre de logiciel ne présente des avantages évidents. La plupart des logiciels manquent de créativité et s’adressent à des enfants plutôt qu’à des adultes. En outre, les employés et les bénévoles ont une connaissance et une formation restreintes en ce qui a trait à l’utilisation de la technologie comme outil d’enseignement. Une évaluation cohérente permettrait la planification, l’élaboration et la responsabilisation systématiques de tous les types d’interventions liées à l’alphabétisation des adultes à l’avenir. Les politiques, programmes et pratiques d’alphabétisation ne sont pas évalués de façon cohérente et une aide est nécessaire à cet égard. Bon nombre de questions essentielles ne semblent pas avoir été évaluées; c’est le cas, notamment, des politiques et programmes provinciaux et territoriaux de sensibilisation, des répercussions réelles des programmes sur les apprenants et des avantages que présente l’amélioration du niveau d’alphabétisation des adultes, ainsi que des répercussions et de l’efficacité des initiatives visant à adopter un langage clair. Orientations futures possiblesPremièrement, il est possible et important d’élaborer une description exhaustive de la pratique idéale en ce qui a trait aux programmes d’alphabétisation en réunissant tous les faits connus. C’est le cas, notamment, de la préparation des enseignants, du matériel utilisé, des techniques d’apprentissage et de la participation des apprenants. On pourrait utiliser une série exhaustive de lignes directrices dans le cadre d’un processus consensuel, aux fins de la planification et de l’évaluation, et commencer à offrir à tous les adultes canadiens un accès équitable à des programmes d’alphabétisation efficaces et efficients. Deuxièmement, l’alphabétisation des adultes doit être intégrée à d’autres politiques sociales. Les adultes sous-alphabétisés présentent des caractéristiques communes, notamment un revenu peu élevé, un rang social peu élevé et des problèmes d’apprentissage. Il existe également, au sein de la société canadienne, des groupes qui ont tendance à afficher de faibles niveaux d’alphabétisation des adultes; c’est le cas, notamment, des membres des Premières Nations, des contrevenants et des pauvres. Il est impossible de faire la distinction entre les multiples problèmes qui sont à l’origine de la sous-alphabétisation et ceux qui en découlent. Par conséquent, les initiatives futures devraient tabler sur ces connaissances et donner lieu à la mise en œuvre de programmes ciblés efficaces. Troisièmement, les sept enseignements tirés du sondage devraient être considérés comme des défis. Les divers paliers de gouvernement jouent des rôles différents, et l’intervention fédérale reste nécessaire dans le domaine de l’alphabétisation. Il est important de tenir compte du fait que de nombreux systèmes s’adressent aux mêmes clients et qu’il y a lieu d’établir un lien entre ces systèmes.
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