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Archives - salle des nouvelles de l'ancien premier ministre (1995-2003)

Archives - salle des nouvelles de l'ancien premier ministre (1995-2003)

Discours à l’occasion de l’inauguration de la
Chaire d’études canadiennes de
l’Université de Paris III Sorbonne Nouvelle

Le 23 juin 2000
Paris (France)

Je suis très heureux d’être ici. Je tiens à remercier le recteur de l’Académie, Monsieur René Blanchet, pour ses paroles aimables. C’est grâce à ses efforts, grâce aussi à l’engagement du président Jean-Louis Leutrat et à l’action du professeur Jean-Michel Lacroix, que nous soulignons aujourd’hui l’inauguration de cette Chaire d’études canadiennes à l’Université de Paris III Sorbonne Nouvelle.

Je veux aussi exprimer toute ma reconnaissance à Monsieur Lacroix, pour avoir consacré plus de 25 ans de sa vie professionnelle à mieux faire connaître le Canada, sa culture, sa littérature et ses institutions en France.

Je tiens également à féliciter l’Association française d’études canadiennes, qui réunit plus de 18 universités en France, et qui ont chacune créé en leur sein un Centre d’études canadiennes au cours des vingt dernières années.

Mesdames et Messieurs, la Chaire que nous inaugurons aujourd’hui illustre bien notre volonté commune d’échanger au sujet des expériences canadienne et française. Je suis certain qu’elle sera un forum dynamique, un lieu de réflexion et de discussion libre et stimulant.

Cette chaire est un hommage à tous les professeurs, étudiants et chercheurs universitaires qui s’intéressent au Canada. Vous êtes les nouveaux explorateurs. Vous êtes les héritiers de ceux qui, il y a exactement quatre siècles, au printemps 1600, se sont rendus à Tadoussac. Et qui ont érigé, dès 1604 aux côtés de Samuel de Champlain et de Pierre Dugua de Mons, le premier établissement français en Amérique du Nord, sur un territoire qui allait devenir l’Acadie. Une date importante que le Canada et la France vont d’ailleurs célébrer ensemble, en 2004. De la même façon, nous soulignerons en 2008 le 400e anniversaire de fondation de la ville de Québec.

Le Canada s’est transformé en quatre siècles. Au-delà des traditions française et britannique, notre pays s’est façonné une personnalité propre, unique, originale. Et en cette époque où la mondialisation multiplie nos liens identitaires et nous incite à chercher des points de repères, vous avez bien raison de poser un regard sur le Canada.

Nous avons bâti un pays fort de deux langues officielles, membre à la fois de la Francophonie internationale et du Commonwealth. En soi, il s’agit d’une réalisation majeure sur un continent largement anglophone.

Mais la détermination des Canadiens et l’appui des différents gouvernements ont fait en sorte que la francophonie soit aujourd’hui bien implantée au Canada. Elle trouve son foyer principal au Québec, bien sûr, où résident la majorité des 8 millions de francophones du pays. Mais elle s’étend aussi au Nouveau-Brunswick, une province officiellement bilingue où 40 % de la population est francophone. Et ailleurs au pays, le fait français continue de se renforcer.

Quelque 300 000 jeunes Canadiens de parents anglophones fréquentent des écoles d’immersion. L’enseignement s’y déroule très majoritairement en français. Le taux de bilinguisme des jeunes anglophones canadiens est en hausse constante depuis 1971.

Notre paysage juridique est lui aussi original. Notre droit puise à la common law britannique et au droit civil français. Ce bijuridisme typiquement canadien fournit un exemple de cohabitation utile pour les organisations et les regroupements internationaux qui doivent concilier deux traditions juridiques. Il a d’ailleurs suscité l’intérêt de nombreux experts français.

Ces exemples illustrent combien le Canada est d’abord le fruit d’une conviction profonde. Que la collectivité prend tout son sens si chacun peut trouver sa place dans le respect de l’identité des autres. En cela, notre pays constitue une des réponses au défi de la coexistence des identités.

À l’aube du XXIe siècle – nous en sommes tous témoins – nos sociétés sont de plus en plus multiculturelles, ou encore plurielles, pour reprendre un terme populaire ici. Le défi des gouvernements est d’intégrer cette diversité dans la poursuite du bien public.

À ce chapitre, la reconnaissance des droits de tous nos citoyens est un point de départ bien avisé. C’est d’ailleurs la voie que nous avons suivie au Canada pour répondre aux attentes des Premières Nations, des Inuits et des Métis, qui vivent tous des situations particulières. L’un des gestes les plus significatifs que nous ayons posés récemment est bien entendu la création d’un nouveau territoire pour les Inuit, le Nunavut, au mois d’avril 1999.

Comme vous le savez, le Président Chirac a été le premier chef d’État étranger à visiter le Nunavut, cinq mois seulement après sa création. À cette occasion, il avait parlé d’un « Canada qui recherche et invente les règles d’un savoir-vivre ensemble pacifique et tolérant. » Avec ces quelques mots, votre Président a résumé l’essence même du projet canadien.

Le multiculturalisme canadien veut que le refus des cloisonnements passe par la reconnaissance de nos différences. Voilà un défi qui interpelle aujourd’hui la terre entière. Mais c’est sur ce principe que se développe depuis 1867, mais surtout depuis le début du XXe siècle, notre société. Aujourd’hui, seulement 48 % des Canadiens ont des racines en France ou en Grande-Bretagne. Les autres viennent des quatre coins du monde.

Reflet de cette réalité, la majorité des habitants de la communauté urbaine de Toronto, la métropole du Canada, sont nés hors du Canada. C’est aussi le cas de près de la moitié des résidents de Vancouver, et d’un nombre grandissant de Montréalais.

La Gouverneure générale du Canada est née à Hong Kong. Le Premier ministre de la province de la Colombie-Britannique est né en Inde. La troisième langue parlée au pays, après l’anglais et le français est le chinois!

Dans ce contexte, ce n’est pas un hasard si le Canada a choisi le fédéralisme comme mode de gouvernement. Et ce n’est pas pour rien si nous croyons aux possibilités d’un régime décentralisé. Pour nous, c’est le seul possible. Il permet à chacun de conserver son identité, tout en participant à un projet de société commun.

Bien entendu, tout système fédéral est aussi un lieu de débats et de discussions parfois vives. Mais entre les régionalismes des uns et des autres, des valeurs communes rassemblent les Canadiens d’un océan à l’autre. Et le gouvernement central leur donnent voix.

Notre histoire, notre mode de gouvernement et notre vision de la société ont un effet sur les valeurs et les priorités des Canadiens. Par exemple, des sondages démontrent que les Canadiens sont plus attachés au rôle de l’État que nos voisins des États-Unis.

Les Canadiens croient que les gouvernements peuvent veiller au partage de la prospérité, tout en maintenant un équilibre entre l’interventionnisme d’État et le laissez-faire économique. Nous voulons aider les plus démunis, préserver notre régime universel d’assurance-maladie, et préparer les nouvelles générations à la réussite.

Mais en même temps, il nous faut contrôler la taille de l’État. C’est pourquoi nous avons assaini nos finances publiques, ce qui nous a permis de dégager des surplus budgétaires au cours des trois derniers exercices financiers. Cela nous a aussi permis de réduire la dette nationale, de diminuer les impôts, et d’améliorer les programmes ou d’en créer de nouveaux.

Par exemple, toutes les écoles et les bibliothèques publiques du Canada sont maintenant branchées à l’Internet. Le Canada a été le premier pays au monde à y arriver. Et notre prochain objectif est de brancher toutes les salles de classe. Nous sommes également en train de créer 2000 Chaires d’excellence en recherche du XXIe siècle dans les universités canadiennes, pour attirer chez nous les meilleurs chercheurs du monde et former notre relève.

Ces deux exemples illustrent bien la volonté du Canada de prendre sa place dans l’économie mondiale du savoir. Et nous sommes convaincus que le monde nouveau qui se dessine a le potentiel d’améliorer le sort de chaque homme, de chaque femme et de chaque enfant.

Mais il est aussi porteur de son lot de défis.

L’un des plus saillants est certainement de préserver la diversité culturelle qui fait toute la richesse de notre monde. Les bouleversements technologiques et la puissance nouvelle de certains acteurs industriels, entre autres basés chez notre puissant voisin du Sud, ont mis en valeur l’importance de cet enjeu ces dernières années.

Au Canada, le combat pour la diversité culturelle mobilise à la fois les francophones et les anglophones. Nous croyons fermement qu’il est possible d’encourager la création de vastes ensembles économiques sans pour autant perdre ce qui nous distingue. Et nous sommes persuadés que les gouvernements ont un rôle de premier plan à jouer dans la préservation et la promotion de la culture.

La France et le Canada sont de grands alliés dans la lutte pour la diversité culturelle. Nous l’évoquons tous deux dans plusieurs forums, dont l’UNESCO et la Francophonie. Et c’est une préoccupation qu’il va falloir porter un jour dans bien d’autres instances multilatérales, y compris celles qui gèrent la mondialisation économique et technologique.

Mesdames et Messieurs, l’étude du Canada vous réserve des découvertes intéressantes. Je suis heureux et fier de l’intérêt que vous portez à notre pays, à l’histoire de nos relations avec la France et aux défis qui nous attendent tous en tant qu’alliés et amis.

Et je suis convaincu que cette nouvelle Chaire d’études canadiennes contribuera à renforcer les liens privilégiés qui existent entre nos pays depuis déjà quatre siècles.

Vive le Canada! Vive la France! Et vive l’amitié franco-canadienne!

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Mise à jour: 2006-01-27  Avis importants