Autres observations de vérification

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Introduction

33.6 Le présent chapitre traite de questions d'importance qu'il convient, à notre avis, de signaler à la Chambre des communes et dont nous n'avons fait mention nulle part ailleurs dans le Rapport. Les questions signalées ont été relevées au cours de nos vérifications financières et de nos vérifications de conformité aux autorisations des Comptes publics du Canada, des sociétés d'État et d'autres entités ou au cours de nos vérifications de l'optimisation des ressources.

33.7 Le paragraphe 7(2) de la Loi sur le vérificateur général exige que le vérificateur général porte à l'attention de la Chambre des communes tous les cas importants où il a constaté que :

33.8 Chacune des questions d'importance signalées dans le présent chapitre a été examinée, conformément aux normes de vérification généralement reconnues; par conséquent, nos examens ont comporté les sondages et autres procédés que nous avons jugés nécessaires dans les circonstances. Les questions signalées ne devraient pas servir à tirer des conclusions au sujet de points que nous n'avons pas examinés. Les cas que nous avons observés sont décrits dans le présent chapitre sous le nom du ministère ou de l'entité concerné.


Défense nationale

Vérificateur général adjoint : Jean Ste-Marie
Directeur : Neil J. Papineau

Commissions secrètes/pots-de-vin à l'achat de carburant destiné aux véhicules militaires
Certains membres du personnel militaire et civil de la Défense nationale ont pris l'habitude d'accepter des commissions secrètes/pots-de-vin des stations-service qui vendent au détail du carburant diesel destiné aux véhicules militaires. Au moment de notre vérification, cette pratique abusive avait cours depuis au moins deux ans.

Contexte

33.9 Le Conseil du Trésor ayant pris la décision de privatiser le Système d'information pour la gestion du parc automobile et le Système des cartes de crédit du gouvernement du Canada, on a confié à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) la tâche de conclure des offres à commandes avec des entreprises du secteur privé en vue d'aider les ministères à gérer leurs parcs automobiles.

33.10 Le 15 décembre 1993, le gouvernement a octroyé à une entreprise de gestion de parcs automobiles une offre à commandes principale et nationale (OCPN) pour la période allant du 1er avril 1994 au 31 mars 1999, laquelle a été prolongée jusqu'au 31 mars 2000. Les ministères ne sont pas tenus de se servir cette offre à commandes. Ils peuvent faire une commande relativement à l'offre à commandes principale et nationale, ou conclure de leur propre chef un marché avec n'importe quelle autre entreprise de gestion de parcs automobiles.

33.11 Entre autres services offerts en exécution de cette offre à commandes, notons un système de cartes de service (cartes de crédit) et des services d'information pour la gestion du parc automobile. Les ministères peuvent ainsi tirer avantage des exemptions fiscales du gouvernement et des escomptes grâce aux offres à commandes qui sont conclues entre TPSGC et les grands fournisseurs de carburant, les fabricants de pneus et de chambres à air, les constructeurs de véhicules et les fournisseurs de services de réparation et d'entretien de véhicules. L'offre à commandes comprend aussi d'autres services, dont la gestion de l'entretien, la gestion des données, la facturation et les paiements regroupés, l'aide à la gestion du parc automobile et différentes combinaisons de services de ce genre.

33.12 Quelque 21 000 détaillants font partie de cette offre à commandes. À l'heure actuelle, le ministère de la Défense nationale (MDN) dispose de près de 4 100 cartes de crédit pour véhicules du parc automobile et l'ensemble du gouvernement fédéral, de 17 100.

33.13 Le ministère de la Défense nationale fait le plein de ses véhicules militaires soit aux dépôts de carburant situés dans les bases militaires, soit dans de nombreuses stations-service au détail partout au Canada. Lorsque le personnel militaire et civil du MDN se ravitaille en carburant en dehors des bases militaires, il règle généralement la note à l'aide des cartes de crédit du parc automobile qui sont distribuées en exécution de l'offre à commandes principale et nationale mentionnée ci-dessus.

33.14 Le carburant diesel que le ministère de la Défense nationale a acheté des stations-service au détail aux termes de cette OCPN s'élevait à 1 518 000 $ en 1997-1998 et à 2 117 000 $ en 1998-1999.

33.15 Le MDN ne coordonne pas de manière centralisée la distribution de ces cartes de crédit du parc automobile. La responsabilité intégrale en incombe à chaque base militaire, qui décide si elle utilisera ou non ce genre de cartes de crédit.

Étendue
33.16 Le Bureau du vérificateur général a reçu une plainte selon laquelle des membres du personnel militaire du MDN recevaient des remises en espèces à la suite du ravitaillement en carburant diesel des véhicules militaires. Conséquemment, le Bureau a entrepris d'examiner les achats de carburant diesel effectués par le MDN en 1997-1998 et en 1998-1999.

33.17 Notre examen s'est limité à un petit échantillon de stations-service au détail dans deux provinces et à un nombre restreint de bases du MDN. Nous avons, entre autres, procédé à un examen approfondi des dossiers du Ministère et de tierces parties et nous avons interrogé des représentants du Ministère de même que du secteur privé. Nous avons confiné notre examen aux achats de carburant diesel par cartes de crédit du parc automobile, et nous n'avons pas tenu compte des achats courants réglés au moyen d'autres types de cartes de crédit. Les constatations de la vérification témoignent des résultats de cet examen restreint.

Questions

33.18 Il ressort de notre examen des achats de carburant diesel effectués par le ministère de la Défense nationale dans des stations-service au détail, que de nombreuses remises en espèces ont été versées par ces stations-service à certains membres du personnel militaire et civil du MDN. Des remises en espèces ont été versées au cours des exercices financiers 1997-1998 et 1998-1999, et cette pratique se poursuivait toujours au moment de notre vérification.

33.19 À notre avis, ces remises en espèces constituent des commissions secrètes ou des pots-de-vin. On entend généralement par commission secrète le fait pour un préposé de donner ou de recevoir un objet de valeur afin d'influencer une décision commerciale à l'insu et sans le consentement du commettant. Les pots-de-vin sont une forme de commission secrète qui comportent généralement une surfacturation. La plupart du temps, ils touchent une fonction d'achat d'une organisation et ils impliquent des employés exerçant des responsabilités liées aux achats. Dans le cas qui nous intéresse, les militaires et fonctionnaires en cause sont les préposés et l'État constitue le commettant.

33.20 D'après l'échantillon de stations-service au détail que nous avons examiné dans deux provinces, plus de 200 membres du personnel militaire et civil du MDN ont accepté des remises en espèces de stations-service au détail au cours des exercices financiers 1997-1998 et 1998-1999. Les membres du personnel militaire et civil de 18 bases militaires sur 22 ont accepté ce genre de remises en espèces. Les bases militaires en cause se retrouvent dans les trois armes : les Forces maritimes, l'Armée de terre et la Force aérienne.

33.21 Le montant de la remise en espèces varie selon la quantité de carburant diesel achetée et selon le taux de remise offert par les stations-service au détail. Celles-ci offraient des ristournes allant de deux à cinq cents le litre de carburant diesel. Les remises varient de 4 $ à plus de 70 $ par véhicule ravitaillé. Même si les remises individuelles en espèces ne sont pas élevées en elles-même, le total cumulatif, à l'échelle nationale, pourrait être appréciable au fil des ans. Le montant des remises en espèces calculé à partir de notre échantillon était de 15 600 $, pour des achats de carburant diesel s'élevant à 216 700 $.

33.22 Nous avons constaté que certaines stations-service au détail gonflaient le prix du litre de carburant diesel vendu au MDN pour financer les ristournes. Une de ces stations haussait même davantage le prix de vente au titre de frais d'administration pour le versement des remises en espèces. Certaines stations-service au détail établissaient donc le prix du carburant diesel de cinq à neuf cents le litre au-dessus de leur prix de vente normal.

33.23 Selon notre examen, les membres du personnel militaire et civil du MDN ont accepté des remises en espèces dans le cas de 763 ventes de carburant diesel sur un total de 861 transactions où il y a eu achat d'une quantité suffisante pour justifier une remise en espèces. Par conséquent, les remises en espèces lors de l'achat de carburant diesel ont été acceptées dans 88 p. 100 des cas où elles étaient accessibles au personnel militaire et civil du MDN. Lorsqu'on n'acceptait pas la remise en espèces, le montant de la ristourne était parfois déduit de la somme portée au débit du compte de crédit du parc automobile, témoignant d'une réduction du coût du carburant diesel acheté. Nous n'avons relevé que 40 cas où le montant de la ristourne avait été déduit des frais de carburant diesel paraissant sur le reçu de la transaction de crédit. Ces 40 cas ont été traités d'une manière acceptable pour ce qui est des remises en espèces au titre de l'achat de carburant diesel : on a porté le montant au débit du compte de crédit du parc automobile et l'on a ainsi réduit l'ensemble des frais exigés de l'État. Selon le personnel des stations-service au détail, il est pratique courante dans l'industrie de verser des remises en espèces aux conducteurs de camions qui se ravitaillent en carburant diesel.

33.24 Même si notre échantillon limité de stations-service au détail visait le MDN, notre examen a permis de découvrir que des membres du personnel de trois autres ministères fédéraux et d'une société d'État avaient aussi accepté des remises en espèces pour le ravitaillement en carburant diesel de véhicules gouvernementaux au moyen de cartes de crédit du parc automobile. Nous avons constaté que cette pratique était peu répandue dans ces autres organismes fédéraux.

33.25 L'acceptation de remises en espèces par des membres du personnel militaire et civil du MDN et par des employés d'autres ministères est contraire à la Directive du Conseil du Trésor sur les voyages, selon laquelle « Tous les avantages obtenus par les fonctionnaires deviennent immédiatement la propriété de l'État à moins qu'ils aient été obtenus dans le cadre d'un programme approuvé par le Conseil du Trésor. » Ces remises en espèces contreviennent également au Code du Conseil du Trésor régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat. Selon un des principes de ce code, « mis à part les cadeaux, les marques d'hospitalité et les autres avantages d'une valeur minime, il (...) est interdit de solliciter ou d'accepter les transferts de valeurs économiques, sauf s'il s'agit de transferts résultant d'un marché exécutoire ou d'un droit de propriété ». De plus, l'acceptation de remises en espèces contrevient à la Loi sur la gestion des finances publiques et, en ce qui concerne le personnel du MDN, cette pratique est contraire à la Loi sur la Défense nationale.

33.26 Le Quartier général de la Défense nationale ignorait quelles bases militaires employaient les cartes de crédit du parc automobile et il ne surveillait pas l'usage de ces cartes. Le MDN a établi des lignes directrices nationales énonçant les restrictions et les obligations qui s'appliquent aux officiers ou agents des transports ou aux utilisateurs de cartes de crédit du parc automobile. Les membres du personnel militaire et civil du MDN, chargés des cartes de crédit du parc automobile dans certaines bases du Ministère, ne connaissaient pas ces lignes directrices.

33.27 Notre examen des bases militaires a révélé que les mécanismes de contrôle et d'autorisation variaient sensiblement d'une base militaire à l'autre pour ce qui est des cartes de crédit du parc automobile. La majorité des bases faisant l'objet de l'examen ne tenaient aucun registre historique des responsables des cartes de crédit. Par ailleurs, la plupart des bases militaires du MDN réglaient les factures mensuelles de carburant émises par l'entreprise de gestion du parc automobile sans bien vérifier si tous les frais avaient été engagés ou étaient justifiés.

33.28 Nous avons aussi établi qu'avant même que le Bureau du vérificateur général ne reçoive une plainte à cet effet, le ministère de la Défense nationale avait reçu une plainte selon laquelle des remises en espèces étaient versées à du personnel militaire du MDN pour l'achat de carburant. La police militaire du MDN avait fait enquête à la suite de cette plainte, mais elle avait clos le dossier après avoir jugé la plainte non fondée.

Conclusion

33.29 Par suite de notre examen restreint, nous avons constaté qu'un grand nombre de membres du personnel militaire et civil du MDN, en poste dans 18 bases militaires, s'adonnaient à la pratique abusive qui consiste à accepter des remises en espèces pour le ravitaillement en carburant des véhicules militaires. Cela soulève une sérieuse question - la caractère inadéquat des mécanismes de contrôle en place pour protéger l'État contre les risques que pose l'usage de ces cartes de crédit du parc automobile. Plus importante encore, la question de l'éthique des membres du personnel militaire et civil du MDN qui s'adonnent à ces activités est pour nous un élément inquiétant.

33.30 L'acceptation de remises en espèces par des fonctionnaires d'autres ministères et d'une société d'État soulève le même genre de préoccupation.

Réponse du ministère de la Défense nationale : Le ministère de la Défense nationale n'est pas en mesure, à l'heure actuelle, de pleinement corroborer l'exactitude des informations fournies dans cette note de vérification. Toutefois, la pratique décrite dans ce rapport va à l'encontre des valeurs du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, et nous sommes résolus à y mettre fin. Nous sommes également déterminés à examiner la pertinence des mécanismes de contrôle régissant l'utilisation des cartes de crédit du parc automobile.


CORCAN - Un organisme de service spécial de Service correctionnel Canada

Vérificatrice générale adjointe : Maria Barrados
Directeur : Amjad Saeed

Manque de systèmes de gestion et de contrôle financiers à CORCAN
CORCAN doit mettre en oeuvre un système complet de gestion et de contrôle financiers qui lui permettrait de préparer des états financiers fiables et vérifiables, conformément à l' Acte constitutif de cet organisme.

Contexte

33.31 En 1992, le Parlement a approuvé la création de CORCAN, un organisme qui offre de la formation et de l'expérience reliées à l'emploi aux détenus des établissements exploités par le Service correctionnel du Canada. L'organisme offre aussi des services reliés à l'emploi dans la collectivité afin d'aider les détenus à réintégrer la société à leur libération. CORCAN est géré comme une entreprise. En 1998-1999, les recettes totales de l'organisme étaient de 73 millions de dollars et provenaient de la vente de biens et de services aux secteurs manufacturier, de l'agriculture et de la construction.

33.32 CORCAN est désigné « organisme de service spécial »; il s'agit d'une unité, au sein de l'administration fédérale, qui bénéficie d'une souplesse administrative et financière lui permettant d'atteindre des résultats particuliers, convenus par les parties.

33.33 Lorsque CORCAN est devenu un organisme de service spécial, le Parlement l'a autorisé à avoir accès à un fonds renouvelable de 45 millions de dollars, pour être utilisé comme fonds de roulement, pour acquérir des immobilisations et pour couvrir les pertes d'exploitation. Un fonds renouvelable est un crédit parlementaire continu ou permanent.

33.34 Au même moment, le Conseil du Trésor a approuvé un acte constitutif décrivant le cadre de responsabilités et de rapports s'appliquant à CORCAN. L'Acte constitutif inclut, entre autres choses, une description des fonctions de comptabilité, d'évaluation et de vérification. Pour ce qui est de la fonction comptable, l'Acte constitutif précise que « CORCAN doit mettre en application un système complet de contrôle financier et de comptabilité de gestion qui prévoit l'examen à intervalle régulier des coûts réels, des recettes, du rendement des activités et de l'encaisse par comparaison avec le budget. Le système de comptabilité doit répondre aux normes établies par le Conseil du Trésor pour le fonctionnement d'un fonds renouvelable. »

33.35 Les politiques du Conseil du Trésor en ce qui concerne la comptabilité des fonds renouvelables précisent ce qui suit.

« Le système comptable doit au moins permettre :

La présentation et la divulgation des actifs et des passifs dans les états financiers de même que les méthodes de calcul de l'amortissement doivent être conformes aux principes comptables généralement reconnus et être les mêmes d'une année à l'autre. »

Questions

Résultats de nos récentes vérifications de CORCAN
33.36 En 1996, nous avons exprimé des inquiétudes parce que CORCAN n'atteignait pas ses buts en matière d'autosuffisance financière ou ne remplissait pas son mandat qui est de fournir aux détenus une formation et une expérience reliées au travail. En avril 1999, nous avons constaté que CORCAN n'avait pas pris de mesures adéquates pour donner suite à ces observations. De plus, nous avons constaté qu'après six ans d'exploitation et après avoir reçu du Service correctionnel du Canada environ 18 millions de dollars par année pour la formation, CORCAN déclarait des pertes accumulées totalisant 12 millions de dollars. Ces pertes, ajoutées aux fonds utilisés pour financer le fonds de roulement et acquérir des immobilisations, sont telles qu'au 31 mars 1999, CORCAN avait utilisé 32 des 45 millions de dollars du fonds renouvelable. Puisque CORCAN a déclaré qu'au 31 mars 1999, il ne restait que 13 millions dans le fonds renouvelable, il est vital que la direction s'assure que son système de comptabilité de gestion financière permet de produire des états financiers précis et fiables. Cela favorisera la prise de décisions.

Les efforts de CORCAN pour produire des états financiers vérifiables
33.37 À l'automne de 1996, CORCAN, avec l'aide de Conseils et Vérification Canada, a pris l'initiative d'engager un cabinet d'experts-comptables indépendant pour vérifier ses états financiers du 31 mars 1997. Un an plus tard, le cabinet d'experts-comptables informait officiellement la direction de CORCAN qu'il ne pouvait exprimer une opinion de vérification sans réserve sur ces états financiers [traduction] « en raison de problèmes omniprésents concernant le système d'information et les contrôles de CORCAN ».

33.38 Le cabinet d'experts-comptables a relevé plusieurs lacunes que CORCAN devait combler pour être en mesure de recevoir une opinion de vérification sans réserve sur ses états financiers annuels. Ces lacunes incluaient des inexactitudes dans la comptabilité concernant les contrats de construction et les immobilisations, le manque de contrôle sur les créditeurs et de mauvaises méthodes pour effectuer le dénombrement et établir la valeur du bétail.

33.39 Puisque CORCAN n'a pu obtenir une opinion de vérification sans réserve sur ses états financiers du 31 mars 1997, le cabinet d'experts-comptables a informé la direction de CORCAN qu'il lui serait plus avantageux de consacrer son temps et ses efforts à combler les lacunes connues plutôt que de procéder à une vérification.

33.40 À notre demande, CORCAN, avec l'aide du cabinet d'experts-comptables, nous a fourni, le 15 octobre 1998, un rapport sur l'avancement des correctifs aux lacunes constatées en 1997. Le rapport indiquait ce qui suit : [traduction] « Nous avons l'intention de terminer le travail sur ces questions d'ici la fin de l'exercice en cours et d'être en mesure de soumettre nos états financiers du 31 mars 1999 à une vérification indépendante ».

33.41 Lors de notre suivi de ces questions en août 1999, nous avons constaté que des rapports provisoires sur les politiques, les procédures et les contrôles internes pour trois secteurs d'activités de CORCAN et la fonction de comptabilité de l'organisme avaient été préparés par le cabinet d'experts-comptables indépendant. Dans ces rapports provisoires, les observations les plus importantes portaient sur l'absence [traduction] d'« environnement de contrôle global ». Rendre la direction davantage [traduction] « consciente du contrôle » est la condition la plus importante pour la création d'une atmosphère positive, qui favorise le fonctionnement efficace des systèmes de comptabilité et des contrôles. Les rapports provisoires mentionnaient aussi que CORCAN devait franchir un [traduction] « pas important » pour être en mesure de subir une vérification indépendante de manière efficace et efficiente.

Conclusion

33.42 Depuis sept ans, c'est-à-dire depuis que le Service correctionnel du Canada a été autorisé à faire de ses ateliers industriels un organisme de service spécial, avec de nouvelles responsabilités et des pouvoirs particuliers, CORCAN n'a pas su maintenir un bon système de comptabilité de gestion et de contrôle financier lui permettant de produire des états financiers fiables et vérifiables, comme le prévoit l'Acte constitutif. Le maintien d'un tel système est essentiel pour la prise de décisions efficace et la reddition de comptes. Compte tenu de l'ensemble de nos préoccupations, passées et présentes, nous sommes d'avis que CORCAN ne s'est pas conformé à son Acte constitutif, ni aux politiques sur les organismes de services spéciaux approuvées par le Conseil du Trésor.

33.43 Une fois nos travaux de vérification terminés, la direction de CORCAN nous a informés que l'organisme avait récemment effectué un examen de sa structure redditionnelle et de ce qu'est un bon cadre de contrôle de gestion; elle envisage, nous a-t-on dit, la mise en oeuvre de ces deux éléments comme condition préalable au maintien d'un système de contrôle financier et d'un système de comptabilité et de rapports de gestion fiables et efficients. CORCAN est d'avis qu'il pourra recevoir une opinion de vérification favorable sur ses états financiers de l'exercice se terminant le 31 mars 2001.


Développement des ressources humaines Canada

Vérificatrice générale adjointe : Maria Barrados
Directeur : Basil Zafiriou

Excédent du Compte d'assurance-emploi
La Loi sur l'assurance-emploi ordonne à la Commission de l'assurance-emploi du Canada de fixer les taux de cotisation qui permettent, au cours d'un cycle économique, de couvrir les coûts du programme et de maintenir une certaine stabilité des taux. À la fin de l'exercice 1999, l'excédent cumulatif du Compte d'assurance-emploi (AE) s'établissait à 21 milliards de dollars, soit un montant beaucoup plus élevé que le montant nécessaire pour répondre aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi, selon l'actuaire en chef de Développement des ressources humaines Canada. La Loi donne effectivement à la Commission le pouvoir de fixer les taux et de déterminer le niveau approprié de la réserve. Toutefois, afin de permettre au Parlement et au public de mieux évaluer comment la Commission utilise son pouvoir discrétionnaire, cette dernière devrait divulguer les facteurs justifiant les taux de cotisation et la réserve du Compte d'assurance-emploi qu'elle juge nécessaires afin de satisfaire aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi.

Contexte

33.44 Le rapport du vérificateur général sur les états financiers du Compte d'assurance-emploi pour l'exercice terminé le 31 mars 1999 attire l'attention sur le fait que l'excédent du Compte d'assurance-emploi a augmenté de 7,3 milliards de dollars au cours de l'exercice et qu'il atteint maintenant 21 milliards de dollars (voir la pièce 33.1). À ce niveau, l'excédent du Compte est beaucoup plus élevé que le montant jugé suffisant par l'actuaire en chef de Développement des ressources humaines Canada (DRHC) pour répondre aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi, en vertu de laquelle le Compte a été établi. La taille de l'excédent et son taux de croissance soulèvent des questions sur les facteurs dont se sert la Commission de l'assurance-emploi du Canada pour fixer les taux de cotisation et déterminer le niveau de la réserve nécessaire pour répondre aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi. C'est pour cette raison que nous avons signalé cet excédent.

Questions

L'importance de l'excédent
33.45 Selon l'article 66 de la Loi sur l'assurance-emploi, la Commission de l'assurance-emploi du Canada doit fixer les taux de cotisation qui, à son avis, permettent le mieux, au cours d'un cycle économique, d'assurer un apport de revenus suffisant pour couvrir les débits autorisés sur le Compte d'assurance-emploi et de maintenir une certaine stabilité des taux. Les taux établis par la Commission (qui est composée de représentants des employés, des employeurs et du gouvernement) doivent être approuvés par le gouverneur en conseil, sur la recommandation du ministre du Développement des ressources humaines et du ministre des Finances.

33.46 L'actuaire en chef de DRHC a établi qu'une réserve de 10 à 15 milliards de dollars (accumulée à la veille d'une récession) devrait suffire à garantir la stabilité des taux au cours d'un cycle économique. De plus, l'actuaire en chef estime que des taux de cotisation des employés représentant de 1,90 à 2,10 p. 100 de la rémunération assurable devraient couvrir les coûts du programme d'assurance-emploi à long terme.

33.47 Le taux de cotisation des employés pour 1999 était de 2,55 p. 100 (le taux des cotisations des employeurs était 1,4 fois plus élevé, soit 3,57 p. 100). Aux taux de cotisation actuels, l'excédent cumulatif du Compte d'assurance-emploi dépassera probablement les 26 milliards de dollars à la fin du présent exercice. L'excédent cumulatif du Compte d'assurance-emploi dépasse déjà largement le montant jugé nécessaire, par l'actuaire en chef de DRHC, pour répondre aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi. On peut s'attendre à ce que l'excédent continue d'augmenter tant et aussi longtemps que le taux de cotisation excédera le taux qui, de l'avis de l'actuaire en chef, est suffisant pour couvrir les coûts permanents du programme d'assurance-emploi.

33.48 Les dispositions législatives concernant l'établissement des taux de cotisation ne sont pas très précises. Les expressions « apport de revenus suffisant » et « certaine stabilité des taux » ne sont pas définies dans la Loi. Cette ambiguïté se combine à l'exigence selon laquelle la stabilité des taux est établie par rapport au « cycle économique ». Bien que le terme « cycle économique » ait une signification claire en économie, la durée et l'amplitude des cycles économiques ne peuvent être prédites avec certitude. Par conséquent, la Loi, dans sa teneur actuelle, donne à la Commission de l'assurance-emploi du Canada énormément de pouvoir pour fixer les taux de cotisation et déterminer le niveau approprié de la réserve de l'assurance-emploi. Ce pouvoir doit s'exercer conformément au processus de consultation, de recommandation et d'approbation mentionné au paragraphe 33.45.

33.49 Toutefois, si l'on veut que la Loi sur l'assurance-emploi ait un sens, le pouvoir utilisé pour fixer les taux de cotisation ne peut être illimité. Les revenus de l'assurance-emploi sont prélevés afin de financer les activités autorisées en vertu de la Loi, et il doit y avoir une réserve suffisante pour s'acquitter de cette responsabilité. L'actuaire en chef de DRHC a informé la Commission qu'une réserve de 15 milliards de dollars (accumulée à la veille d'une récession) est suffisante. À l'heure actuelle, le montant de la réserve est beaucoup plus élevé - et il continue d'augmenter.

33.50 Les estimations de l'actuaire en chef sont fondées sur des calculs et des hypothèses qui sont exposés clairement dans son rapport annuel à la Commission de l'assurance-emploi. Bien que la Commission ne soit pas tenue d'accepter l'avis de l'actuaire en chef, nous croyons que si elle n'est pas d'accord avec ses estimations, elle devrait fournir une explication. Si la Commission prend d'autres facteurs en considération pour fixer les taux, elle devrait aussi les expliquer. Sinon, le Parlement et le public doivent spéculer sur les facteurs motivant les décisions concernant l'un des programmes du gouvernement parmi les plus importants et les plus visibles.

Incidence sur les états financiers du gouvernement
33.51 Les taux de cotisation à l'assurance-emploi ont d'importantes répercussions sur les états financiers du gouvernement dans leur ensemble. Depuis 1986, le Compte d'assurance-emploi est consolidé dans les états financiers sommaires du gouvernement. Ce traitement est conforme aux normes de l'Institut Canadien des Comptables Agréés (ICCA) concernant la comptabilisation des activités contrôlées étroitement par les gouvernements et correspond au traitement des sociétés d'État et des autres comptes à fins déterminées semblables.

33.52 La consolidation signifie que les excédents ou les déficits du Compte de l'assurance-emploi ont une incidence directe sur le solde budgétaire du gouvernement. À titre d'exemple, en l'absence de l'excédent de 7,3 milliards de dollars du Compte en 1998-1999 et si tous les autres éléments étaient restés les mêmes, le gouvernement aurait déclaré un déficit de 4,4 milliards de dollars au lieu d'un surplus de 2,9 milliards de dollars. Ainsi, sans la réserve de l'assurance-emploi de 21 milliards de dollars, la dette nette du gouvernement, au 31 mars 1999, aurait été de 598 milliards au lieu de 577 milliards de dollars.

Conclusion

33.53 La Loi sur l'assurance-emploi ordonne à la Commission de l'assurance-emploi du Canada de fixer les taux de cotisation qui, au cours d'un cycle économique, permettent de couvrir les coûts du programme et de maintenir une certaine stabilité des taux. L'excédent actuel du Compte de l'assurance-emploi dépasse de beaucoup le montant que l'actuaire en chef de DRHC estime suffisant pour maintenir la stabilité des taux au fil du temps, à un niveau qui permettra de couvrir les coûts autorisés du programme. La Loi donne effectivement à la Commission le pouvoir de fixer les taux et de déterminer le niveau approprié de la réserve. Toutefois, afin de permettre au Parlement et au public de mieux évaluer comment la Commission utilise son pouvoir discrétionnaire, cette dernière devrait divulguer les facteurs justifiant les taux de cotisation et la réserve du Compte d'assurance-emploi qu'elle juge nécessaires afin de satisfaire aux exigences de la Loi sur l'assurance-emploi.

Réponse de Développement des ressources humaines Canada : Les taux de cotisation de l'assurance-emploi sont établis selon le processus formulé à l'article 66 de la Loi sur l'assurance-emploi, à partir de l'analyse fournie par l'actuaire en chef. La Commission de l'assurance-emploi du Canada établit chaque année le taux de cotisation, avec l'approbation du gouverneur en conseil, et sur la recommandation des ministres du Développement des ressources humaines et des Finances. La Commission est composée de représentants des travailleurs, des employeurs et du gouvernement. Chaque année, ils tentent de faire concorder leurs points de vue divers afin d'en venir à une conclusion unanime. Pour chacune des trois dernières années, le taux de cotisation de l'assurance-emploi a fait l'objet d'un consensus réussi. Cela a donné lieu à des cotisations moins élevées pour chacune de ces années.