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Rapport du vérificateur général
B V G
Rapport de 2001
Points saillants
Introduction
Observations
Conclusion et recommandations
À propos de la vérification
11.1 — Substances illicites et légales qui peuvent faire l'objet d'un usage abusif
11.2 — Nombre de personnes accusées d'infractions au Canada, en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, en 1999
11.3 — Infrastructure canadienne de lutte contre les drogues illicites
11.4 — Accusations portées en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, en 1999
11.5 — Valeur marchande des drogues saisies par l'Agence des douanes et du revenu du
Canada en 1999
11.6 — Estimation des dépenses fédérales consacrées à la lutte contre les drogues illicites en 1999-2000
11.7 — Résultats des affaires relatives aux drogues devant les tribunaux pour adultes en 1999-2000, pour certains secteurs de compétence
11.8 — Évaluation des rapports de
rendement ministériels, 1999-2000
Des employés d'une compagnie aérienne sont arrêtés dans une affaire d'importation
de drogue

Les drogues illicites — Le rôle du gouvernement fédéral

Communiqué

Points saillants

11.1 Les drogues illicites ont un impact négatif important sur le Canada et sur les Canadiens à titre individuel. Elles constituent une source majeure de financement pour le crime organisé et le terrorisme. Les coûts économiques, notamment ceux associés aux soins de santé (le VIH/sida et l'hépatite, à titre d'exemple), à la perte de productivité, aux crimes contre les biens et à l'application des lois, dépasseraient les cinq milliards de dollars par année. En 1999, plus de 50 000 personnes ont été mises en accusation pour des infractions liées aux drogues, et environ 400 000 comparutions ont été enregistrées.

11.2 Si le Canada veut réduire l'impact des drogues illicites, il devra travailler à combler des lacunes au chapitre du leadership et de la coordination, de l'information et de la présentation de rapports publics détaillés. Voici ce que nous avons constaté :

  • Le Canada a besoin d'un leadership plus fort et d'une coordination plus uniforme pour établir une stratégie, des objectifs communs et des attentes sur le plan du rendement collectif. Il doit pouvoir réagir rapidement à de nouvelles préoccupations liées à la consommation et au trafic de drogues illicites. Il faut revoir et améliorer la structure actuelle de leadership et de coordination du gouvernement fédéral. Les mécanismes de coordination avec les provinces et les municipalités doivent également être examinés puisque le problème touche les trois ordres de gouvernement.
  • L'information sur l'étendue du problème des drogues est restreinte, périmée ou non disponible. En outre, les ministères fédéraux manquent d'information de base, au niveau de la gestion, sur les efforts déployés en matière de drogues illicites, notamment des données sur les dépenses, les objectifs ou les résultats.
  • Il n'existe pas non plus de rapports publics détaillés. Aucun rapport public n'explique clairement les mesures prises par le gouvernement fédéral et les autres ordres de gouvernement afin de réduire la demande de drogues illicites et en restreindre l'offre. Ni les parlementaires ni les Canadiens ne connaissent l'ampleur du problème des drogues illicites, ni d'ailleurs les coûts sociaux, économiques et de santé qui y sont associés.
Contexte et autres observations

11.3 En 1992, le gouvernement a approuvé la Stratégie canadienne antidrogue, un effort coordonné destiné à réduire les méfaits découlant de l'alcool et des autres drogues. La stratégie fait appel à une approche équilibrée visant la réduction à la fois de la demande et de l'offre de drogues par l'entremise d'activités telles que le contrôle et l'application de la loi, la prévention, le traitement et la réadaptation, ainsi que la réduction des méfaits.

11.4 En 1997, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances a été adoptée. C'est encore cette Loi qui régit aujourd'hui l'utilisation des drogues illicites. Depuis 1997, la plupart des modifications législatives du gouvernement associées aux drogues illicites se sont attachées à restreindre l'offre (application de la loi) plutôt qu'à réduire la demande.

11.5 Pour coordonner la Stratégie canadienne antidrogue, Santé Canada préside les deux groupes de coordination suivants : le Comité directeur des sous-ministres adjoints sur l'alcool et les autres drogues et le Groupe de travail interministériel sur l'alcool et les autres drogues.

11.6 À l'échelle fédérale, onze ministères et organismes consacrent annuellement près de 500 millions de dollars au problème de l'utilisation des drogues illicites au Canada. Les principaux participants sont Santé Canada, le ministère de la Justice, la Gendarmerie royale du Canada, Solliciteur général Canada, l'Agence des douanes et du revenu du Canada, Service correctionnel Canada et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Les gouvernements provinciaux et territoriaux et les administrations municipales se penchent également sur le problème des drogues illicites.

11.7 D'autres pays engagés dans la lutte contre les drogues illicites insistent sur l'importance d'un leadership fort, d'une information de gestion à jour ainsi que de rapports publics détaillés. Le Canada n'y accorde pas la même importance.

Réaction du gouvernement. Santé Canada répondant au nom du gouvernement, a indiqué qu'il tiendrait compte de nos recommandations, mais il n'a présenté aucune mesure particulière.

Début

Introduction

11.8 Depuis des siècles, les humains font l'essai de diverses substances comme le tabac, l'alcool, l'opium et le coca pour diverses raisons personnelles et culturelles. Avec le temps, certaines de ces substances sont devenues une préoccupation majeure pour le Canada et elles sont maintenant définies comme étant des substances illicites.

11.9 L'expression « drogues illicites » est généralement utilisée au Canada pour désigner certaines substances énumérées dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances de 1997. Ces substances comprennent l'héroïne, la cocaïne, le cannabis (y compris la marijuana et le hachisch) ainsi que des substances synthétiques comme le LSD et l'ecstasie. Les règlements pris en vertu de la Loi énoncent les conditions dans lesquelles certaines drogues peuvent être utilisées pour des raisons légitimes, notamment le traitement médical. Les règlements précisent également les conditions dans lesquelles la possession, la production et la vente de ces substances sont illégales. La pièce 11.1 donne un aperçu des substances illicites et légales susceptibles de faire l'objet d'un usage abusif.

Les drogues illicites affectent les Canadiens de diverses façons

11.10 Les ventes de drogues illicites représentent une façon de mesurer l'étendue du problème. Bien que les estimations varient, les Nations Unies pensent que les ventes annuelles totales de drogues illicites sont de l'ordre de 450 à 750 milliards de dollars. Au Canada, les estimations des ventes, selon le gouvernement, varient de 7 à 18 milliards de dollars.

11.11 Une autre façon de mesurer le problème consiste à examiner ses coûts économiques : ceux-ci comprennent les coûts associés aux soins de santé, à la perte de productivité, à l'application des lois relatives aux drogues et aux crimes contre les biens commis par les toxicomanes. On estime que, au Canada, le total des coûts économiques dépasse les cinq milliards de dollars par année.

11.12 Une troisième façon de mesurer l'impact des drogues illicites consiste à examiner les effets des infractions liées aux drogues sur le système de justice pénale. En 1999, quelque 50 000 personnes ont été mises en accusation pour des infractions visées par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, dans des cas où l'infraction la plus grave était liée aux drogues (voir la pièce 11.2, et plus particulièrement la première note). Au cours de cette même année, nous avons estimé que les tribunaux pénaux ont entendu 34 000 affaires de drogue nécessitant plus de 400 000 comparutions devant le tribunal. Environ 19 p. 100 des délinquants dans le système correctionnel fédéral purgent des peines pour des infractions graves liées aux drogues.

11.13 En ce qui a trait aux quelque 50 000 personnes accusées, 90 p. 100 des accusations concernaient le cannabis et la cocaïne. Plus des deux tiers des accusations visaient le cannabis, et environ la moitié étaient des accusations de possession.

11.14 La gravité de l'impact des drogues illicites varie considérablement. Par exemple, le cannabis est moins souvent associé à des crimes contre les biens et à des effets graves sur la santé que ne l'est la cocaïne. Les drogues affectent des gens de tous les milieux. Les méfaits les plus directs se produisent au sein des populations à risque élevé comme les utilisateurs de drogues injectables, les jeunes de la rue et les pauvres des centres-villes. Environ 125 000 personnes au Canada s'injectent des drogues. L'usage de drogues injectables constitue un facteur de risque majeur dans la propagation du VIH/sida et de l'hépatite; en 1999, quelque 34 p. 100 des nouvelles infections au VIH en auraient résulté.

11.15 Les drogues illicites sont associées à tout un éventail de crimes, comme l'introduction par effraction, les vols qualifiés, les vols de voiture, la prostitution ainsi que le meurtre. Les utilisateurs de drogues illicites peuvent commettre divers crimes pour financer leur toxicomanie. À Vancouver, par exemple, on estime que 70 p. 100 des activités criminelles sont associées aux drogues illicites. Environ 63 p. 100 des délinquants sous responsabilité fédérale ont des problèmes de toxicomanie.

11.16 La relation entre les drogues, le crime organisé et la violence constitue une préoccupation majeure au Canada. En 1998, une étude du gouvernement fédéral sur le crime organisé a conclu que le commerce de la drogue avait des répercussions importantes sur les Canadiens et qu'il suscitait une violence considérable. De plus, les groupes du crime organisé, dont les drogues constituent la principale source de revenu, font de l'intimidation auprès des agents de police, des juges, des jurés et des agents de correction. Une telle intimidation constitue une menace directe à l'égard de la philosophie de paix, d'ordre et de bon gouvernement du Canada. Il importe de signaler que, depuis 1994, 150 décès ont été attribués à la guerre des « motards » au Québec pour le contrôle du crime organisé, y compris le commerce des drogues illicites.

11.17 Les drogues illicites représentent également une source de revenu pour les groupes terroristes. Les Nations Unies ont exprimé une profonde inquiétude au sujet des liens entre les groupes terroristes et la production et le trafic des drogues illicites.

11.18 Le Canada participe activement à des activités internationales qui ciblent les drogues illicites. Il préside le groupe de travail sur le Mécanisme multilatéral d'évaluation de la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues de l'Organisation des États américains. Le Canada est également un membre élu de la Commission des stupéfiants, l'organe directeur du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues. Le Canada a collaboré avec la Commission et les États membres afin d'élaborer une « Déclaration sur les principes fondamentaux de la réduction de la demande de drogues » ainsi qu'un plan d'action en vue de la mise en oeuvre de ces principes.

11.19 Les efforts du Canada, à l'instar de ceux des autres nations occidentales, ont fait l'objet d'évaluations à la fois positives et négatives sur le plan international. Le Canada a tardé à réglementer les « précurseurs chimiques » (substances chimiques utilisées pour produire des drogues illicites comme l'ecstasie). Le Canada est vu à la fois comme un pays d'approvisionnement et de transit pour les drogues illicites. L'Organe international de contrôle des stupéfiants des Nations Unies a récemment soulevé certaines inquiétudes au sujet des efforts du Canada en vue d'éradiquer le cannabis. Selon l'Organized Crime Agency de la Colombie-Britannique, il y a dans cette province plus de 15 000 exploitations de marijuana dont la production annuelle est évaluée à six milliards de dollars. Les services de police pensent qu'une importante partie de cette production est introduite en contrebande aux États-Unis; toutefois, le Canada n'approvisionne qu'une faible portion du marché américain.

Comment le Canada s'est attaqué au problème des drogues

11.20 Il n'existait que très peu de restrictions sur l'usage des drogues avant que le Canada adopte sa première loi sur les drogues en 1908 - la Loi de l'opium. Depuis ce temps, plusieurs lois ont été adoptées afin de contrôler directement ou indirectement l'usage des drogues illicites au Canada. La législation a élargi la liste des substances illicites et a accru les pouvoirs fédéraux d'application de la loi afin de s'attaquer au problème. Toutefois, en dépit de toutes les lois et des modifications législatives qui ont suivi, les Canadiens et les parlementaires ont reconnu de plus en plus que la capacité des forces de l'ordre de restreindre l'offre de drogues était limitée.

11.21 En 1987, le gouvernement fédéral a annoncé sa Stratégie nationale antidrogue. Il s'agissait d'un effort destiné à promouvoir une « approche équilibrée » pour réduire à la fois la demande et l'offre de drogues au Canada. La stratégie favorise un équilibre entre la prévention et la sensibilisation, d'une part, et l'application de la loi, d'autre part. Ses objectifs étaient de mieux sensibiliser et renseigner le public au sujet des problèmes liés à l'abus de drogues et d'alcool, d'accroître la disponibilité de services de traitement et de réadaptation et de faciliter l'accès à ces services, de renforcer les mesures d'application de la loi et de contrôle, de coordonner les efforts nationaux et d'accroître la coopération avec les organismes internationaux.

11.22 De 1987 à 1992, la Stratégie nationale antidrogue a reçu un financement supplémentaire de 210 millions de dollars pour améliorer les programmes existants et financer de nouvelles initiatives, non seulement à l'échelle fédérale, mais également à l'échelle provinciale. Environ 70 p. 100 des fonds ont été consacrés aux secteurs prioritaires de l'éducation, de la prévention et du traitement, sous la direction de ce qui était alors Santé et Bien-être social Canada. La stratégie ciblait principalement les jeunes d'âge scolaire.

11.23 En 1988, le Parlement a créé le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies (CCLAT), à titre d'organisme national non gouvernemental du Canada sur les toxicomanies. Le gouvernement fédéral tentait ainsi de favoriser la collaboration entre tous les ordres de gouvernement et les autres partenaires. Le CCLAT cherche surtout à atténuer les effets nocifs sur la santé et les méfaits sociaux et économiques qui sont associés à l'abus d'alcool et de drogues et aux toxicomanies. Sa responsabilité principale consiste à fournir de l'information et des politiques objectives et crédibles sur les toxicomanies, au gouvernement fédéral, au secteur privé, aux organismes sans but lucratif, aux gouvernements provinciaux et territoriaux et aux administrations municipales. Aujourd'hui, Santé Canada accorde au CCLAT un financement de base annuel de 500 000 $.

11.24 En novembre 1990, un secrétariat a été établi à Santé et Bien-être social Canada afin de coordonner les activités au sein du gouvernement fédéral et avec d'autres gouvernements canadiens et étrangers. Il devait travailler étroitement avec le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies.

11.25 En 1992, le gouvernement a fusionné la Stratégie nationale visant à réduire la conduite avec facultés affaiblies et la Stratégie nationale antidrogue, pour en faire la Stratégie canadienne antidrogue. Cette stratégie représentait un effort coordonné visant à réduire les méfaits causés par l'alcool et les autres drogues. Sa portée a été élargie pour inclure la prévention, le traitement et la réadaptation, l'information et la recherche, ainsi que l'application de la loi et le contrôle. Les populations cibles comprenaient non seulement les jeunes en général, mais également les enfants à risque (les jeunes qui ont fait l'objet de mauvais traitements, les décrocheurs, les enfants de la rue, les chômeurs et les jeunes Autochtones vivant hors-réserve). Le financement de la stratégie était établi à 270 millions de dollars répartis sur cinq ans. Ce montant s'ajoutait à ce qui était déjà consacré aux autres mesures associées à la lutte contre les drogues.

11.26 Dans le but de coordonner la stratégie, Santé et Bien-être social Canada présidait deux nouveaux groupes de coordination : le Comité directeur des sous-ministres adjoints sur l'alcool et les autres drogues et le Groupe de travail interministériel sur l'alcool et les autres drogues. Selon son mandat, le Comité directeur doit se réunir au moins deux fois par an pour améliorer l'efficacité globale de la stratégie et offrir une orientation au Groupe de travail. Son objectif consiste à coordonner les activités fédérales, à obtenir un consensus sur les priorités, à aborder les questions nouvelles et à surveiller la mise en oeuvre de la stratégie fédérale.

11.27 En 1997, le gouvernement a adopté la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, qui régit encore aujourd'hui l'usage des drogues illicites. En 1998, la Stratégie canadienne antidrogue a été renouvelée en principe, mais sans financement. Bien qu'elle ait été appelée Stratégie canadienne antidrogue, seuls les ministères et organismes du gouvernement fédéral en étaient les signataires. Le rôle de Santé Canada consistait, de nouveau, à offrir un leadership national et à coordonner la stratégie renouvelée. Le Ministère devait mener des recherches, diffuser aux partenaires clés les meilleures pratiques et l'information de pointe, et collaborer avec les organismes multilatéraux afin de s'attaquer au problème de la drogue dans son ensemble. Des propositions sont actuellement formulées dans le but de renouveler la stratégie.

11.28 L'objectif à long terme de la stratégie demeure la réduction des méfaits que l'alcool et les autres drogues causent à la société. Elle continue de promouvoir un équilibre entre la restriction de l'offre de drogues et la réduction de la demande. Ses objectifs comprennent, notamment :

  • la réduction de la demande de drogues;
  • la réduction de la mortalité et de la morbidité liées aux drogues par la diminution des comportements à risque élevé, comme le partage d'aiguilles, qui favorise la propagation du VIH/sida;
  • l'amélioration de l'efficacité et de l'accessibilité de l'information et des interventions en matière d'abus de drogues et d'alcool;
  • la restriction de l'offre de drogues illicites;
  • la réduction de la rentabilité du trafic des drogues illicites;
  • la réduction des coûts associés à l'abus de drogues et d'alcool pour la société canadienne.

11.29 Depuis 1997, la plupart des modifications législatives du gouvernement fédéral concernant les drogues illicites se sont attachées à restreindre l'offre (application de la loi) plutôt qu'à réduire la demande. À titre d'exemple, le Code criminel a été modifié de façon à inclure les infractions par le crime organisé, et le gouvernement a créé le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada pour surveiller les transactions financières afin de détecter et de prévenir le blanchiment d'argent. En 2000, des mesures législatives de contrôle sont entrées en vigueur à l'égard de certaines substances psychotropes visées par la Convention de l'ONU de 1971 portant sur ces substances.

Objet de la vérification

11.30 Notre examen a surtout porté sur le rôle du gouvernement fédéral en ce qui a trait à la partie de la Stratégie canadienne antidrogue relative aux drogues illicites. Notre vérification visait à déterminer si le gouvernement fédéral avait :

  • recueilli une information adéquate sur l'étendue du problème ainsi que l'information requise pour lui permettre de gérer ses activités;
  • produit des rapports publics détaillés sur les objectifs et les résultats;
  • établi un leadership et une coordination clairs.

11.31 La vérification n'a pas examiné le rôle joué par les provinces, les municipalités et les organisations non gouvernementales. Leur participation est considérable. Des précisions sur les objectifs, l'étendue et les critères sont présentées à la fin du chapitre, à la section « À propos de la vérification ».

Début

Observations

Aborder le problème des drogues illicites

L'infrastructure fédérale

11.32 Tous les ordres de gouvernement - fédéral, provincial ou territorial et municipal - participent aux efforts du Canada destinés à réduire les méfaits et la disponibilité des drogues illicites. Au niveau provincial ou territorial et au niveau municipal, des efforts sont déployés par les services de santé, les services correctionnels, les services sociaux, les tribunaux, les substituts du procureur général (au Québec seulement) et les services policiers. À titre d'exemple, les services policiers municipaux et provinciaux ainsi que les tribunaux s'occupent de la majorité des affaires de drogues illicites. La communauté internationale et les organisations non gouvernementales, comme l'Association canadienne des chefs de police et la Fédération canadienne des municipalités, jouent également un rôle important.

11.33 À l'échelle fédérale, onze ministères et organismes participent à la lutte contre l'utilisation des drogues illicites au Canada. Les principaux sont Santé Canada, Solliciteur général Canada, le ministère de la Justice, la Gendarmerie royale du Canada (GRC), l'Agence des douanes et du revenu du Canada, Service correctionnel Canada et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (voir la pièce 11.3). Le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies joue également un rôle clé.

11.34 Santé Canada. Santé Canada dirige et coordonne la Stratégie canadienne antidrogue. Ce ministère préside à la fois le Comité directeur des sous-ministres adjoints sur l'alcool et les autres drogues et le Groupe de travail interministériel sur l'alcool et les autres drogues. Il participe également à bon nombre de comités, aux titres suivants :

  • président du Comité fédéral-provincial-territorial sur l'alcool et les autres drogues;
  • coprésident du Comité fédéral-provincial-territorial sur l'utilisation de drogues injectables;
  • chef intérimaire de la délégation canadienne à la Commission des stupéfiants des Nations Unies;
  • membre du comité sur l'abus des drogues de l'Association canadienne des chefs de police;
  • membre du Comité directeur du Partenariat des secteurs de la santé et des services de police.

11.35 En outre, Santé Canada participe directement à des activités destinées à réduire la demande et l'offre de drogues illicites. Son Bureau des substances contrôlées est responsable de la structure législative des mesures de contrôle visant les drogues illicites. Le Bureau gère les règlements pris en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, qui comprennent le traitement des permis et licences exigés pour l'utilisation, à des fins légitimes, de substances contrôlées. Le Bureau de l'accès médical au cannabis contrôle l'utilisation médicale de la marijuana. Le Bureau de la stratégie canadienne antidrogue gère un programme de contributions annuelles de 15,5 millions de dollars, qui finance les programmes de traitement pour les alcooliques et les toxicomanes. Le même programme finance également le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies. Le Service d'analyse des drogues offre à la police canadienne un service de laboratoire qui permet d'analyser les drogues saisies.

11.36 Solliciteur général Canada. Le Solliciteur général joue un rôle de leadership et de coordination à l'égard des volets de la Stratégie canadienne antidrogue qui couvrent les services policiers, la sécurité et les services correctionnels. Le Ministère participe également à d'autres activités connexes, tant à l'échelle nationale qu'internationale :

  • il préside le Groupe de travail sur le Mécanisme multilatéral d'évaluation, de la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues;
  • il préside le comité interministériel des sous-ministres adjoints sur la sécurité publique;
  • il préside le Comité national de coordination sur le crime organisé;
  • il copréside le Forum sur le crime transfrontalier Canada-États-Unis;
  • il copréside le Comité directeur des sous-ministres fédéral-provinciaux-territoriaux sur le crime organisé;
  • il participe avec les provinces et les municipalités au Comité directeur du Partenariat des secteurs de la santé et des services de police.

11.37 Gendarmerie royale du Canada. Les efforts de la GRC en matière de lutte antidrogue à l'échelle fédérale portent principalement sur des activités comme la saisie de drogues, les enquêtes et les arrestations aux échelons supérieurs des organisations criminelles impliquées dans le trafic des drogues, ainsi que la saisie des produits de la criminalité. La GRC se charge également de l'application des lois antidrogues dans le cadre de ses responsabilités policières exécutées à contrat pour les provinces et les municipalités.

11.38 Les activités de la GRC en matière de lutte antidrogue à l'échelle fédérale sont essentiellement menées par deux groupes : la Sous-direction de la police des drogues, dont l'effectif s'établit à 886 personnes environ, et l'Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité, qui emploie quelque 415 personnes. Ce dernier groupe fait des enquêtes sur les gens afin de trouver les produits de la criminalité et saisit les biens obtenus par la vente de drogues illicites. Ces deux groupes reçoivent une aide importante d'autres volets de la GRC comme le renseignement et les services d'enquête spécialisés, y compris la surveillance électronique et physique. D'autres groupes de la GRC comme la Sous-direction des douanes et de l'accise et la section de l'application des lois fédérales effectuent également bon nombre d'arrestations liées aux drogues. Toutefois, ces arrestations sont généralement accessoires par rapport à l'objectif principal de leurs activités.

11.39 Sur les 50 000 personnes accusées au Canada en 1999 pour des infractions à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, lorsqu'une infraction liée aux drogues constituait l'infraction la plus grave, environ 4 p. 100 ont été mises en accusation par la GRC dans son rôle fédéral. La pièce 11.4 montre les entités qui ont porté les accusations en 1999.

11.40 La GRC a adopté une démarche stratégique, davantage axée sur le renseignement. Elle établit maintenant des priorités nationales fondées sur les évaluations de la menace, de façon que les ressources soient orientées vers les secteurs qui présentent le risque le plus important pour les Canadiens. Actuellement, ce sont les échelons supérieurs du crime organisé qui sont ciblés. Cette démarche a donné lieu à des cas complexes et longs à régler, qui consomment des ressources considérables. Elle requiert d'importants partenariats avec les autres services policiers tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada.

11.41 La GRC participe à bon nombre d'« opérations policières conjointes » destinées à combattre le crime organisé. Certaines de ces opérations sont menées par des groupes de travail permanents, tandis que d'autres sont de nature temporaire et visent une cible particulière. La GRC estime qu'environ 900 employés sont affectés à ces opérations, et bon nombre de ceux-ci appartiennent à sa Sous-direction de la police des drogues. L'étude de cas donne un exemple d'un projet de partenariat.

11.42 L'Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité est un projet fédéral dont l'objectif consiste à enquêter sur les groupes du crime organisé afin de saisir ou retenir et de confisquer les biens obtenus par des activités criminelles. Il s'agit essentiellement d'une initiative associée aux drogues; environ 90 p. 100 des saisies sont liées à des drogues. L'Initiative comprend 13 unités à l'échelle du Canada, dotées d'agents provenant des services policiers fédéraux, provinciaux et municipaux, d'avocats du ministère de la Justice, d'agents des douanes, d'enquêteurs en matière fiscale, de gestionnaires des biens et de juricomptables. Les cas sont complexes et longs, car le crime organisé blanchit ses fonds par l'intermédiaire d'un réseau de comptables, d'avocats et d'entreprises apparemment légitimes qui débordent souvent les limites de compétence. Dans son Rapport sur le rendement de 1999-2000, la GRC a signalé que la valeur des biens saisis s'établissait à 32 millions de dollars.

11.43 La GRC exécute également des programmes visant la prévention de l'usage des drogues. Elle présente chaque année quelque 8 000 exposés à des étudiants, à des parents, à des employés et à des groupes communautaires. Les agents fédéraux de la GRC et les agents des services policiers contractuels de la GRC participent également à ces efforts par l'entremise de programmes tels que « Drogues et Sports ».

11.44 Ministère de la Justice. Le ministère de la Justice intente des poursuites dans des affaires de drogues et offre son expertise pour l'élaboration de lois visant le crime organisé. Son initiative pilote, le Programme judiciaire de traitement de la toxicomanie de Toronto, offre des solutions de rechange aux poursuites traditionnelles.

11.45 Le Service fédéral des poursuites (SFP) intente des poursuites dans des affaires de drogues, notamment des affaires liées aux produits de la criminalité dont l'enquête a été menée par les services policiers municipaux ou provinciaux ou par la GRC (à contrat ou par ses Services de police fédérale). Au Québec, le SFP intente des poursuites uniquement dans les cas où la GRC a déposé des accusations.

11.46 Le Service fédéral des poursuites compte plus de 300 avocats à l'interne et près de 800 avocats du secteur privé engagés à titre d'agents de la Couronne. Ils intentent des poursuites pour des infractions visées par une gamme de lois fédérales, mais les poursuites liées aux drogues comptent pour la plus grande part de leur travail. La capacité du SFP d'offrir des services de poursuite de grande qualité constitue un facteur déterminant pour la réussite ou l'échec des efforts des services policiers. La plupart des affaires sont d'une complexité faible ou moyenne, mais la complexité des cas augmente. On estime actuellement que les affaires complexes représentent 7 p. 100 de la charge de travail, mais qu'elles monopolisent 60 p. 100 du temps des procureurs. Les affaires complexes associées au crime organisé nécessitent la participation du ministère de la Justice dès le stade initial à cause des questions légales liées à la collecte, à l'organisation et à l'admissibilité de la preuve.

11.47 Agence des douanes et du revenu du Canada. L'Agence des douanes et du revenu du Canada contribue de deux façons à réduire l'offre de drogues illicites. L'Agence intercepte les drogues illicites aux frontières du pays. Ainsi, l'Agence estime que, en 1999, elle a saisi des drogues illicites d'une valeur marchande d'environ 351 millions de dollars (voir la pièce 11.5). Les saisies sont attribuables à ses propres efforts et à l'information policière. À titre d'exemple, entre 1986 et 1999, la GRC a fourni des renseignements qui ont mené à 45 saisies de cocaïne, ce qui représente 18 p. 100 de la quantité totale de cocaïne interceptée au cours de cette période. Les Services fiscaux de l'Agence effectuent des vérifications des personnes soupçonnées de se livrer au commerce des drogues illicites, ou à d'autres activités illégales et établissent des cotisations et imposent des amendes lorsqu'ils découvrent des revenus non déclarés. Ils enquêtent également sur les cas d'évasion fiscale présumés et recommandent que des poursuites soient intentées contre des particuliers.

11.48 Service correctionnel Canada. Service correctionnel Canada (SCC) est responsable des délinquants qui purgent des peines de plus de deux ans, notamment des personnes condamnées pour des infractions graves liées aux drogues. Le SCC offre des programmes de traitement de la toxicomanie aux délinquants qui ont des problèmes de drogue. Il applique également des mesures de sécurité pour contrôler l'offre de drogues illicites dans les prisons, dont le recours à des chiens détecteurs de drogue et à des analyses d'urine.

11.49 Les coûts les plus importants pour le SCC sont ceux de l'incarcération. Pour 17 p. 100 des délinquants (soit 3 400 personnes), l'infraction la plus grave est liée aux drogues. Selon le SCC, environ 7 p. 100 des délinquants sous sa responsabilité sont associés au crime organisé.

11.50 La toxicomanie constitue l'un des sept facteurs qui contribuent au comportement criminel. Près des deux tiers des délinquants admis dans les établissements correctionnels fédéraux sont aux prises avec un problème de toxicomanie. Environ 53 p. 100 des délinquants participent à des programmes pour toxicomanes pendant qu'ils purgent leur peine.

11.51 En plus des programmes pour toxicomanes, le SCC offre un traitement à la méthadone à certains utilisateurs de drogues injectables ayant une dépendance aux opiacés. Les utilisateurs de drogues injectables posent un grave problème aux établissements car ils peuvent contribuer à la propagation du VIH/sida et de l'hépatite. À titre de mesure d'atténuation des risques, le SCC met également de l'eau de Javel à la disposition des détenus afin qu'ils puissent stériliser les aiguilles qu'ils se partagent.

11.52 Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) collabore avec les autres ministères fédéraux et représente le Canada en ce qui a trait aux aspects internationaux de la Stratégie canadienne antidrogue. Le Ministère gère les contributions financières canadiennes au Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues et à la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues de l'Organisation des États américains. Un comité interministériel, constitué de ministères et organismes fédéraux et présidé par le MAECI, est chargé de répartir ce financement entre divers projets.

Début

Besoin en information

11.53 La gestion du problème des drogues illicites au Canada est intrinsèquement difficile. Elle requiert les efforts des trois ordres de gouvernement - fédéral, provincial ou territorial et municipal - ainsi que ceux de nombreuses organisations non gouvernementales. Elle exige également d'équilibrer deux démarches différentes : réduire la demande de drogues illicites et en restreindre l'offre. Pour atteindre cet équilibre, il faut intégrer les activités de tous ceux qui participent à l'application de la loi, à la prévention, au traitement et à la réadaptation, et à la réduction des méfaits. Bien que l'intégration des efforts des trois ordres de gouvernement soit difficile, elle reste un élément essentiel.

11.54 L'obtention du niveau approprié d'intégration requiert la présence de trois éléments :

  • une information adéquate sur l'étendue du problème, ainsi que l'information requise pour permettre la gestion des activités;
  • des rapports publics détaillés sur les résultats;
  • un leadership clair afin de coordonner les activités de tous les intervenants et d'optimiser l'efficacité des efforts du Canada dans sa lutte contre les drogues illicites.

11.55 L'obstacle le plus important auquel nous avons été confrontés dans cette vérification a été le manque de données. Nous avons constaté que les données étaient peu nombreuses, souvent périmées ou non disponibles, ou qu'elles se trouvaient dans une foule d'endroits différents.

Les ressources fédérales globales ne sont pas connues

11.56 L'information la plus fondamentale requise pour gérer efficacement un programme est celle portant sur la somme des ressources qui y sont consacrées. Le gouvernement fédéral n'a pu fournir de données complètes sur les ressources qu'il consacre au problème des drogues illicites. Une partie de cette difficulté est facilement compréhensible. Bon nombre de ministères ne conservent pas de données établies en fonction du problème des drogues illicites. Par exemple, Service correctionnel Canada ne répartit pas normalement ses coûts d'incarcération par type d'infraction.

11.57 Nous appuyant sur l'information que certains organismes ont pu nous fournir, nous avons effectué une estimation des dépenses fédérales engagées au cours de l'exercice 1999-2000 (voir la pièce 11.6).

11.58 Notre estimation exclut les programmes qui ne consacrent pas une quantité importante de ressources au problème des drogues illicites et les programmes pour lesquels il était difficile d'établir ne serait-ce qu'une évaluation approximative. À titre d'exemple, nous avons exclu le Programme national de lutte contre l'abus d'alcool et de drogues chez les Autochtones, de Santé Canada, qui consacre environ 80 millions de dollars par année au traitement et à la prévention de la toxicomanie chez les Autochtones vivant dans les réserves. En effet, selon Santé Canada, la majorité de ces ressources ont été utilisées pour des programmes de prévention et de traitement de l'alcoolisme. Un autre programme qui présente des possibilités de coûts liés aux drogues illicites est le programme sur le VIH/sida de Santé Canada, qui reçoit un financement annuel de 42 millions de dollars afin de soutenir des activités comme la surveillance et des initiatives communautaires de prévention. Ce programme a été exclu parce que nous avons été incapables d'évaluer la part de ce programme consacrée au problème des drogues illicites; cependant, en 1999, on a estimé à 34 p. 100 la proportion de nouvelles infections au VIH résultant de l'utilisation de drogues injectables.

11.59 Le programme Aide à l'employabilité des personnes handicapées, de Développement des ressources humaines Canada (DRHC), s'attache surtout à l'employabilité, mais il a accordé un certain soutien au traitement de la toxicomanie au cours des dernières années. Les dépenses de ce programme s'élèvent à environ 189 millions de dollars par année, mais nous n'avons pu estimer la portion consacrée au traitement de la toxicomanie à cause du manque d'information du Ministère sur l'utilisation des fonds. Un autre programme financé par DRHC, l'Initiative sur les sans-abri, annoncée par le gouvernement en 1999, comprend des projets qui abordent le problème de la toxicomanie chez les sans-abri. Toutefois, nous n'avons pas inclus ce programme dans notre évaluation parce que les sommes dépensées en 1999-2000 étaient peu importantes.

11.60 Environ 95 p. 100 des dépenses du gouvernement fédéral affectées au problème des drogues illicites ont servi à restreindre l'offre (application de la loi ou répression du trafic de drogues). La GRC, Service correctionnel Canada et le ministère de la Justice sont les organismes qui ont dépensé la majeure partie de cet argent (voir la pièce 11.6). Les dépenses du gouvernement fédéral relatives à l'application de la loi reflètent bien son rôle dans ce domaine; par contre, le rôle joué par le gouvernement fédéral en matière de réduction de la demande de drogues illicites est moins clair. Les dépenses fédérales consacrées au problème des drogues illicites profitent également à d'autres priorités fédérales. Ainsi, les dépenses en matière de lutte antidrogue servent à soutenir les priorités du gouvernement à l'égard du crime organisé.

11.61 On ne connaît pas les montants que les provinces, les territoires et les municipalités consacrent à des activités visant à réduire la demande de drogues illicites et à en restreindre l'offre.

Il faut améliorer les statistiques sur l'application de la loi

11.62 Certains volets des statistiques sur l'application de la loi comportent des lacunes. Tout d'abord, il n'existe pas de statistiques nationales sur les condamnations et les peines infligées relativement aux drogues illicites. Ainsi, la Colombie-Britannique, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick et le Nunavut ne fournissent pas à Statistique Canada de données sur les tribunaux pénaux pour adultes. L'utilisation des statistiques requiert une bonne analyse et une bonne interprétation pour comprendre les tendances et les causes sous-jacentes. Étant donné que le Canada ne possède pas de données nationales, il ne peut suivre des tendances importantes comme celles relatives à la durée des peines, à l'apparition de nouvelles drogues ou aux écarts régionaux. Par exemple, à cause du grand nombre de personnes accusées de possession, il existe une croyance populaire selon laquelle les gens ne seraient arrêtés qu'en raison d'une simple possession de drogues. Toutefois, une étude restreinte de la GRC a constaté qu'une part importante des affaires de possession résultaient d'une intervention policière pour d'autres affaires, comme une infraction relative à la conduite d'un véhicule.

11.63 Une deuxième lacune vient du fait que les statistiques sur les condamnations et les peines relatives aux drogues sont déclarées selon les catégories visées par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, et ne sont pas très détaillées. Alors que les statistiques nationales sur les mises en accusation par la police répartissent le nombre d'accusations liées aux drogues selon le type de substance (par exemple, héroïne, cocaïne et cannabis) et le type d'infraction (par exemple, possession, trafic, importation et culture), les statistiques sur les condamnations ne sont réparties qu'en deux catégories — possession et trafic. Le rapport de 1999-2000 publié par la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues, qui fait état des progrès du Canada en matière de réglementation des drogues, signale la nécessité d'améliorer les statistiques judiciaires sur les infractions liées aux drogues.

11.64 Un troisième secteur qui nécessite de l'amélioration est celui de l'information sur les saisies de drogues illicites. Selon une étude du Solliciteur général effectuée en 1998, il n'existe que des données partielles sur les drogues saisies au Canada par les services policiers.

11.65 Le Centre canadien de la statistique juridique produit régulièrement des rapports sur les principales composantes du système de justice au Canada, y compris des données sur les services policiers, les tribunaux et les services correctionnels. Il produit également des rapports analytiques en réponse aux priorités de l'appareil judiciaire. Les produits et les priorités du Centre sont établies par l'Entreprise nationale relative à la statistique juridique — un partenariat établi entre les ministères fédéral, provinciaux et territoriaux responsables de la justice. Enfin, le Centre a publié, en 1999, un rapport distinct sur les drogues illicites fondé sur des statistiques disponibles jusqu'en 1997.

L'information sur le problème des drogues au Canada laisse à désirer

11.66 Le Canada ne connaît ni l'étendue du problème des drogues illicites ni son évolution. L'estimation nationale la plus récente provient d'une étude de 1996, qui évaluait les coûts économiques des drogues illicites en 1992. Il y a eu beaucoup de changements depuis lors. L'influence croissante du crime organisé, la propagation du VIH/sida et de l'hépatite C, la nouvelle popularité de drogues comme l'ecstasie et la production accrue de marijuana en Colombie-Britannique constituent des facteurs qui ont tous aggravé le problème des drogues illicites. L'étude de 1996 ne rendait pas compte de tous les coûts importants. À titre d'exemple, elle n'incluait pas les coûts des crimes contre les biens — c'est-à-dire les vols destinés à financer l'utilisation des drogues — qui se chiffrent, selon les estimations, à plusieurs milliards de dollars par année. Un autre aspect qui a été négligé est l'impact de la production nationale de cannabis sur l'économie canadienne.

11.67 Depuis l'Enquête canadienne sur la consommation d'alcool et d'autres drogues de 1994, aucune enquête nationale n'a porté spécifiquement sur l'utilisation des drogues, et aucune n'est prévue dans un proche avenir. Le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies produit tous les ans Profil canadien : l'alcool, le tabac et les autres drogues. Il extrait à cette fin des données de diverses sources pour décrire les taux, les tendances et les conséquences de la consommation de l'alcool, du tabac et des autres drogues. Sur certains sujets, il y a peu ou pas de nouvelle information depuis 1994.

11.68 Nous avons besoin d'information sur les causes profondes de la consommation de drogues car il s'agit rarement d'un problème isolé. La connaissance des groupes particuliers à risque élevé est également restreinte. Une des plus importantes lacunes est le manque d'information sur la consommation des drogues illicites dans les réserves autochtones; cette information est pratiquement inexistante. Une évaluation de 1998 du Programme national de lutte contre l'abus d'alcool et de drogues chez les Autochtones, de Santé Canada, a recommandé l'établissement d'un groupe de travail pour examiner le problème, mais aucune mesure n'a été prise à ce jour. De même, on connaît peu de chose au sujet de la nature, de l'étendue et des conséquences des nouvelles drogues comme l'ecstasie ou au sujet de certains groupes comme les sans-abri canadiens.

11.69 D'autres pays semblent avoir mieux réussi à recueillir de l'information. En Australie, par exemple, le Illicit Drug Reporting System, en vigueur depuis cinq ans, offre une information périodique sur les sujets suivants :

  • la disponibilité, la pureté et le prix actuels des drogues illicites;
  • les tendances dans l'utilisation des drogues illicites;
  • les changements observés dans l'utilisation des drogues illicites;
  • les problèmes de santé apparents liés aux nouvelles tendances dans l'utilisation des drogues.
Le gouvernement fédéral n'a pas établi d'objectifs clairs

11.70 Pour atteindre les résultats escomptés d'un programme, quel qu'il soit, le gouvernement doit établir des attentes ou des objectifs clairs et mesurables. Notre examen des rapports sur le rendement des ministères a révélé que peu de rapports énoncent de telles attentes ou de tels objectifs concrets.

11.71 L'objectif global de la Stratégie canadienne antidrogue consiste à réduire les méfaits pour la société. Une mesure de ces méfaits est l'estimation des coûts sociaux associés aux drogues illicites. Comme nous l'avons mentionné précédemment, on ne connaît ni le montant actuellement dépensé pour lutter contre les drogues illicites ni la façon dont ce montant a évolué au fil du temps. Compte tenu de la stratégie « équilibrée » du Canada, il importe de fixer des objectifs clairs à l'égard de l'équilibre recherché et d'établir des indicateurs précis qui permettent de constater les résultats obtenus.

11.72 Une vaste gamme de cibles mesurables peuvent servir à définir les attentes (les résultats escomptés) pour les programmes destinés à réduire la demande. Voici quelques exemples :

  • accroître de X ans l'âge moyen des nouveaux utilisateurs, en Y années;
  • réduire de X p. 100 le nombre de décès résultant d'une surdose de drogue, en Y années;
  • réduire de X p. 100 la proportion de détenus qui consomment des drogues, en Y années;
  • réduire de X p. 100 la transmission du VIH/sida et de l'hépatite C résultant du partage d'aiguilles, en Y années;
  • accroître de X p. 100 le nombre de conseils scolaires qui ont mis en oeuvre, vérifié et évalué des programmes antidrogue;
  • accroître de X p. 100 la proportion de jeunes qui désapprouvent l'utilisation de l'ecstasie.

11.73 De même, dans le domaine de l'application de la loi, des exemples d'attentes mesurables pourraient inclure :

  • accroître de X p. 100 les saisies des produits de la criminalité, en Y années;
  • démanteler X p. 100 des organisations criminelles ciblées;
  • arrêter et poursuivre X p. 100 des personnes ciblées;
  • détruire une quantité X de marijuana par l'éradication des récoltes;
  • saisir une quantité X d'héroïne;
  • réaliser un progrès X dans la mise en oeuvre de la Convention Y des Nations Unies.

11.74 Certains pays ont établi de telles attentes mesurables dans le cadre de leur stratégie de lutte contre les drogues illicites. Par exemple, l'objectif du Royaume-Uni consiste à réduire de 50 p. 100, d'ici 2008, la récidive des auteurs d'une infraction liée aux drogues. Les États-Unis visent à réduire de 25 p. 100 d'ici 2007 les conséquences des drogues illicites sur la santé et la société. Ces pays ont défini des objectifs, des cibles et des indicateurs pour mesurer les progrès réalisés tant à l'échelle nationale que par des organismes particuliers.

Les rapports ministériels manquent d'information sur les résultats

11.75 Un organisme doit pouvoir mesurer ses résultats et en faire état afin de déterminer les progrès réalisés. La mesure des résultats est également essentielle à la prise de décisions sur l'attribution des fonds à différentes initiatives ou à des projets concurrents. Pour les ministères participant à la Stratégie canadienne antidrogue, comprendre les résultats obtenus constitue une étape clé pour décider de l'équilibre approprié entre les efforts visant à réduire la demande de drogues et ceux visant à en restreindre l'offre.

11.76 Les rapports sur le rendement publiés par les divers ministères fournissent peu de précisions sur la façon dont leurs activités ont contribué à la lutte antidrogue du gouvernement fédéral. La stratégie de ces ministères est inconnue ou imprécise, nous ne savons pas ce qu'ils espèrent réaliser ni le montant qu'ils consacrent à réduire la demande ou à restreindre l'offre. De même, leurs rapports n'indiquent pas si leurs stratégies fonctionnent, s'ils les rajustent pour répondre à l'évolution de la situation ou s'ils réaffectent les ressources à des interventions plus rentables.

11.77 Le Rapport sur le rendement de la GRC, à titre d'exemple, ne fournit qu'une information minimale sur les activités liées aux drogues illicites exécutées par ses Services de police fédérale. Bien que sa stratégie consiste à cibler les échelons supérieurs du crime organisé qui contrôlent le commerce de la drogue, la GRC ne fait pas état de ses réalisations dans la lutte contre le crime organisé. Son Rapport sur le rendement donne peu de renseignements permettant d'établir si l'offre de certaines drogues augmente ou diminue. Il se peut que ces lacunes au chapitre des rapports externes résultent du fait que la GRC est encore en train de mettre au point un bon système d'information de gestion interne.

11.78 Nous sommes également d'avis que certains des renseignements sur les Services de police fédérale contenus dans le Rapport sur le rendement de la GRC ne sont pas suffisamment explicites et ne reflètent pas les réalisations. Par exemple, en 1999-2000, la GRC a signalé avoir fait enquête sur 38 515 infractions liées aux drogues. Cependant, la majorité de ces enquêtes ont été menées dans le cadre de ses activités policières provinciales et municipales et non de celles de ses Services de police fédérale. Par conséquent, il est impossible d'obtenir un tableau précis des résultats de ses activités de police fédérale en matière de drogue.

11.79 De même, le Rapport sur le rendement du ministère de la Justice n'indique pas dans quelle mesure ce ministère exécute son rôle clé d'intenter des poursuites dans les affaires de drogues et de produits de la criminalité. Bien que le Ministère consacre des ressources considérables aux poursuites, son Rapport sur le rendement ne fait état d'aucun aspect de cette importante activité ni de ses résultats.

11.80 Il n'existe pas de données publiées sur les résultats des efforts déployés par le gouvernement fédéral en matière de poursuites. Cependant, sept provinces et un territoire ont produit des données tant sur les poursuites liées aux drogues intentées par le ministère de la Justice que sur les poursuites entreprises à ce chapitre par d'autres ordres de gouvernement (voir la pièce 11.7). Cette pièce montre que 14 p. 100 des affaires se sont soldées par une peine d'emprisonnement, 42 p. 100 ont entraîné une condamnation sans peine d'emprisonnement, et 43 p. 100 n'ont donné lieu à aucun verdict. Dans environ 90 p. 100 des cas de ce dernier groupe, les accusations ont été suspendues ou retirées tandis que les autres ont été renvoyées à la Cour supérieure ou ont fait l'objet d'une décision d'une autre cour. La politique sur les poursuites du ministère de la Justice prévoit qu'un procureur ne peut intenter de poursuite que lorsqu'il existe une chance raisonnable de condamnation et que l'intérêt public justifie une poursuite.

11.81 Un examen du Service fédéral des poursuites du ministère de la Justice, effectué en 2001, a révélé l'absence de données fiables sur les activités. Selon les résultats de l'examen, le Service fédéral des poursuites non seulement ne fournit pas de renseignements détaillés comme des données sur les coûts et une évaluation de la complexité des affaires, mais il ne produit pas de données élémentaires comme un profil simple et fiable du nombre d'affaires. L'examen a recommandé que l'élaboration de données fiables devienne une priorité pour le Ministère.

11.82 Le Service fédéral des poursuites affirme qu'il trouve difficile de satisfaire à la demande pour ses services, tant à cause du volume que de la complexité des affaires. On s'attend à ce que l'écart entre la demande pour ses services et sa capacité de satisfaire à cette demande s'élargisse, à moins que des modifications ne soient apportées. Toutefois, tant que le Ministère ne produira pas de meilleures données de base et plus d'information sur le rendement, il pourra difficilement savoir quelles sont les modifications à effectuer.

11.83 Nous avons examiné les rapports sur le rendement et les rapports sur les plans et les priorités de chaque ministère et organisme visé par la Stratégie canadienne antidrogue. Pour les cinq principaux organismes, nous avons évalué l'information sur les ressources, les objectifs et les résultats et avons indiqué si celle-ci était inexistante, limitée ou précise. Nos constatations sont résumées à la pièce 11.8.

Début

Rapports détaillés

Le Canada ne sait pas dans quelle mesure il gère efficacement le problème des drogues illicites

11.84 Les parlementaires et les Canadiens ont besoin d'une information plus pertinente sur les drogues illicites. Les activités qui impliquent plusieurs ministères fédéraux et, en l'occurrence, des gouvernements provinciaux et territoriaux et des administrations municipales, requièrent des rapports publics détaillés. On élimine ainsi le besoin de fouiller les rapports sur le rendement de ministères particuliers et c'est le seul moyen de permettre aux parlementaires ou au public de bien comprendre ce que fait le Canada pour s'attaquer au problème des drogues illicites.

11.85 Des rapports détaillés à l'échelle gouvernementale devraient décrire le milieu dans lequel la stratégie antidrogue fonctionne et fournir de l'information consolidée sur les attentes, les cibles concrètes et les résultats, ainsi que sur les stratégies destinées à améliorer le taux de réussite à l'avenir. À maints égards, il s'agit de la même information que chaque ministère devrait produire de façon courante pour gérer ses propres activités.

11.86 Même si le gouvernement fédéral assume le leadership et la coordination des efforts de lutte contre les drogues illicites, il n'a produit aucun rapport détaillé qui établit dans quelle mesure le Canada gère bien le problème. Il serait logique que Santé Canada, à titre de Ministère directeur, fasse rapport des résultats obtenus à l'échelle gouvernementales par le Canada afin de réduire la demande et l'offre de drogues illicites.

11.87 Les rapports sur la violence familiale et sur le VIH/sida sont deux exemples de rapports détaillés au Canada. D'autres pays, comme le Royaume-Uni et les États-Unis, produisent des rapports détaillés sur le problème des drogues. Dans ces deux pays, les organismes concernés présentent chaque année des rapports à leur législature. Ce type de rapport donnerait aux parlementaires canadiens un aperçu facilement accessible de la situation actuelle au Canada, de la stratégie utilisée pour lutter contre le problème des drogues et une certaine indication du succès obtenu.

Début

Leadership et coordination

Un leadership fort et une bonne coordination sont essentiels

11.88 Depuis les 15 dernières années, la Stratégie canadienne antidrogue a mis l'accent sur la nécessité d'adopter une approche équilibrée. Cet équilibre signifie qu'il faut répartir adéquatement les efforts entre la réduction de la demande et la restriction de l'offre de drogues illicites. Les diverses activités prévues par cette approche sont exécutées par des centaines d'intervenants différents aux paliers municipal, provincial ou territorial et fédéral, ainsi que par des organisations non gouvernementales. L'atteinte de cet équilibre nécessite une bonne compréhension des efforts de tous les intervenants d'un bout à l'autre du pays. À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral ne sait pas où en est l'effort national global.

11.89 Une question que le gouvernement doit aborder est l'importance nationale du problème des drogues illicites. D'autres pays y ont accordé une plus grande importance. Au Royaume-Uni, par exemple, le premier ministre a désigné un champion pour diriger cet effort. Le président des États-Unis a également désigné un champion. En Australie, il existe un comité ministériel constitué de ministres du gouvernement fédéral et des États.

11.90 Ce qui favorise le plus le leadership et la coordination, c'est un engagement continu du gouvernement. Depuis 15 ans, la Stratégie canadienne antidrogue n'a bénéficié que d'un financement intermittent. En 1998, Santé Canada a demandé, en vain, des fonds pour des activités comme la prévention, le traitement et la réadaptation, le développement des connaissances et l'application de la loi. Nous comprenons que le renouvellement de la Stratégie canadienne antidrogue est en cours. Le manque de financement durant les cinq dernières années a directement nui à la capacité de Santé Canada de coordonner et de mettre en oeuvre la stratégie.

11.91 Pour que le Canada puisse aborder efficacement la question complexe des drogues illicites, il a besoin d'un leadership fort et d'une bonne coordination. Il pourra alors accomplir les tâches suivantes :

  • mettre en oeuvre une structure de coordination efficace;
  • établir des objectifs communs et une stratégie commune;
  • réagir rapidement aux nouveaux problèmes;
  • veiller à ce que les attentes sur le plan du rendement collectif soient énoncées clairement;
  • faire en sorte que le rendement soit mesuré et fasse l'objet de rapports;
  • rendre plus accessible l'information sur le rendement pour améliorer les efforts du Canada en vue de réduire l'utilisation des drogues illicites;
  • communiquer de l'information complète sur le rendement;
  • recommander des modifications qui débordent les frontières ministérielles.

11.92 Rôle de Santé Canada. Depuis 1987, le rôle de Santé Canada a consisté à diriger et à coordonner la lutte du Canada contre les drogues illicites. À ce titre, il préside deux comités interministériels clés sur les drogues illicites. Le Bureau de la stratégie canadienne antidrogue, un petit groupe au sein de Santé Canada, s'occupe de la coordination. En 1999-2000, ses dépenses consacrées à la coordination, y compris les salaires du personnel, étaient inférieures à un million de dollars.

11.93 Pour Santé Canada, le problème des drogues illicites occupe une place secondaire par rapport à plusieurs autres questions de santé comme l'accès aux soins de santé, les effets du tabagisme et de l'alcoolisme, et le cancer. Toutefois, ce problème représente beaucoup plus qu'une simple question de santé. Comme nous l'avons signalé, la plupart des activités connexes du gouvernement fédéral sont liées à l'application de la loi.

11.94 Les pouvoirs de Santé Canada à titre de coordonnateur sont limités. Par exemple, le Ministère ne peut réaffecter des ressources provenant des budgets des autres ministères; il ne peut gérer directement les ressources fédérales, de l'ordre de 432 à 454 millions de dollars; il ne parle pas non plus au nom des différents ministères et organismes fédéraux concernés par la réduction de la demande ou de l'offre de drogues illicites. Le rôle de coordination de Santé Canada se limite plutôt à fournir les services de secrétariat à divers comités de coordination et à coordonner des activités comme les présentations au Conseil du Trésor et les mémoires au Cabinet.

11.95 L'intégration de tous les efforts est cruciale. Un leadership et une coordination efficaces sont essentiels non seulement au palier fédéral, mais également aux niveaux municipal et provincial ou territorial. Il est crucial que les activités de tous les différents intervenants soient bien intégrées. Bien que la question des drogues illicites puisse ne pas occuper un rang très élevé sur la liste de priorités d'un organisme particulier, elle a des répercussions importantes sur l'ensemble du Canada. Le gouvernement fédéral ne peut intégrer les activités et réaliser entre elles l'équilibre approprié que s'il s'engage réellement et fournit un leadership fort et une bonne coordination.

Début

Conclusion et recommandations

11.96 Les drogues illicites continuent d'avoir d'importantes répercussions négatives sur le Canada. Pour lutter efficacement contre le problème, il faut une bonne information, des rapports détaillés et un leadership fort.

11.97 L'information clé sur le milieu de la drogue, comme la fréquence et l'importance de l'utilisation des drogues et leur impact sur la société, est non disponible ou périmée. L'absence quasi totale d'information de gestion de base sur l'affectation des ressources, sur les attentes et sur les résultats d'une activité qui représente près de 500 millions de dollars par année est particulièrement préoccupante. Sans une information exacte et pertinente dans ces domaines, il est impossible d'évaluer les résultats obtenus grâce aux sommes dépensées ou de mesurer les progrès accomplis.

11.98 Il n'existe aucun rapport public détaillé sur les drogues illicites, bien que onze ministères et organismes fédéraux ainsi que des gouvernements provinciaux ou territoriaux et municipaux participent à des activités à ce chapitre. Le nombre et la diversité des intervenants travaillant sur deux fronts — réduction de la demande et restriction de l'offre — rendent cruciales l'intégration de leurs activités et la préparation de rapports détaillés. L'absence d'intégration et d'information pertinente sur le rendement signifie que ni le Parlement ni les Canadiens ne savent dans quelle mesure le gouvernement lutte efficacement contre le problème des drogues illicites. Tant que le gouvernement ne publiera pas des rapports publics détaillés à l'échelle nationale, il sera impossible de mesurer l'efficacité nette de la Stratégie canadienne antidrogue.

11.99 D'autres pays ont clairement mis en relief la nécessité d'un leadership fort et d'une bonne coordination pour s'attaquer efficacement au problème des drogues illicites. Le Canada n'y accorde pas la même importance. Pour faire des progrès, le gouvernement fédéral doit accorder une importance accrue au problème des drogues illicites, fournir un financement continu et offrir un engagement plus marqué et un leadership plus fort. La structure de son leadership doit lui permettre de réagir aux nouvelles préoccupations.

11.100 Recommandation. Le gouvernement devrait fournir une information plus complète et plus à jour sur la nature, l'étendue et les conséquences du problème des drogues illicites au Canada. Il devrait aussi produire des renseignements sur le rendement en ce qui concerne les coûts, les attentes et les résultats, et présenter des rapports détaillés au Parlement et aux Canadiens sur la mesure dans laquelle le Canada lutte efficacement contre le problème des drogues illicites.

11.101 Recommandation. Le gouvernement devrait veiller à ce que la Stratégie canadienne antidrogue se voie accorder l'importance et les ressources propres qui sont nécessaires pour lutter contre le problème des drogues illicites au Canada.

11.102 Recommandation. Le gouvernement devrait examiner les mécanismes actuels de leadership et de coordination au sein du gouvernement fédéral, ainsi que les mécanismes de coordination avec les gouvernements provinciaux ou territoriaux et les administrations municipales, qui ont été mis en place pour s'attaquer au problème des drogues illicites.

Réponse du gouvernement. La Stratégie canadienne antidrogue reflète un équilibre entre les objectifs de restriction de l'offre de drogues et de réduction de la demande à ce chapitre. Il s'agit d'une stratégie qui se fonde sur quatre piliers importants : prévention, application des lois et contrôle, traitement et réadaptation, et réduction des méfaits. La stratégie est gérée comme un partenariat entre onze ministères et organismes fédéraux qui travaillent ensemble et elle comprend les partenaires provinciaux et territoriaux, les organisations non gouvernementales, les municipalités, les fournisseurs de services et d'autres organismes de première ligne. Bien que la toxicomanie soit un problème social et de santé, il y a des liens avec le trafic des drogues, le blanchiment d'argent, le crime organisé et le terrorisme. Étant donné que la préoccupation principale touche la santé, la Stratégie canadienne antidrogue est dirigée par Santé Canada.

Le gouvernement considérera, dans le cadre de coordination actuel, l'examen et l'amélioration de sa gestion de cette question horizontale afin d'élaborer une stratégie antidrogue mieux intégrée, qui comprendrait une capacité accrue de coordination, d'évaluation, de reddition de comptes et de prise en considération des autres priorités et initiatives gouvernementales. Les recommandations de la vérificatrice générale et les recommandations qui seront émises prochainement par le Comité spécial sur les drogues illicites et le Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments guideront les efforts du gouvernement lors du renouvellement de la Stratégie canadienne antidrogue.

Début

À propos de la vérification

Objectifs

Les objectifs de la vérification consistaient à déterminer si le gouvernement avait :

  • recueilli une information adéquate sur l'étendue du problème des drogues illicites ainsi que l'information nécessaire pour gérer ses activités;
  • produit des rapports publics détaillés sur les objectifs et les résultats;
  • établi un leadership et une coordination clairs.

Étendue

La vérification a porté sur les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour s'attaquer au problème des drogues illicites dans le contexte de la Stratégie canadienne antidrogue. Elle a mis tout particulièrement l'accent sur les questions générales concernant le leadership et la coordination, sur l'information, les objectifs et la mesure du rendement, ainsi que sur les rapports au Parlement.

La vérification a inclus bon nombre des principaux intervenants dans la Stratégie canadienne antidrogue : Santé Canada, Solliciteur général Canada, la Gendarmerie royale du Canada, Service correctionnel Canada, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, l'Agence des douanes et du revenu du Canada et le ministère de la Justice.

Critères

Nous nous attendions à trouver les éléments suivants :

  • de l'information et des rapports clairs de la part de tous les ministères et organismes fédéraux;
  • une information actuelle et pertinente sur l'ampleur de l'utilisation des drogues illicites;
  • une information de gestion portant sur les dépenses, les objectifs et les résultats;
  • des rapports publics détaillés sur la mesure dans laquelle le Canada gère efficacement le problème des drogues illicites;
  • un leadership fort et une bonne coordination.

Équipe de vérification

Vérificateur général adjoint : Doug Timmins
Directeur principal : David Brittain

Charlene Cieslik
Daniel Thompson
Ronald Wolchuk

Pour obtenir de l'information, veuillez communiquer avec M. David Brittain.

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