Le projet de construction d'un complexe de laboratoires fédéraux de santé humaine et animale

line

Introduction

7.9 Santé Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada (ci-après Agriculture), les deux ministères clients, procèdent conjointement à la construction de laboratoires de classe internationale au centre-ville de Winnipeg. Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (ci-après Travaux publics) est le ministère contractant et le responsable de l'exécution du projet. Le 1er avril 1997, la partie du complexe de laboratoires de Winnipeg qui ressortissait à Agriculture Canada a été transférée à l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), mais le Ministère continue de fournir à l'Agence des services de gestion de projet.

7.10 Le nouveau complexe abrite des installations de diagnostic, de recherche et de formation parmi les plus modernes de leur catégorie qui soient en exploitation, et des spécialistes les considèrent comme une valeur de référence à l'échelle internationale. C'est le premier établissement dans le monde à réunir des laboratoires qui s'occupent à la fois des maladies de l'homme et de l'animal, et le premier au Canada à comporter des laboratoires de « niveau 4 de biosécurité » dont l'aménagement permet la manipulation des virus les plus dangereux que l'on connaisse. La pièce 7.1 décrit les quatre niveaux de biosécurité et de confinement des laboratoires. (Voir photographe).

Rôles des laboratoires de Winnipeg en ce qui concerne les programmes
7.11 Programme de santé. La mission du Programme de santé de Santé Canada est d'aider les Canadiens à préserver et à améliorer leur santé. Le Laboratoire de lutte contre la maladie (LLCM) relève de la Direction générale de la protection de la santé du Ministère et, par l'intermédiaire de réseaux canadiens d'hygiène publique bien établis, il est responsable de la surveillance épidémiologique, de l'évaluation des risques et de la lutte contre les maladies qui posent un problème grave à l'échelle nationale et internationale.

7.12 Le Bureau de microbiologie est la principale composante du LLCM dont l'installation dans les nouveaux laboratoires de Winnipeg est prévue. Les travaux du Bureau portent sur une large gamme d'agents pathogènes, de bactéries, de virus et de rickettsies, y compris les hantavirus, les virus de l'hépatite, de la grippe et d'autres. En plus de ses nouveaux laboratoires de Winnipeg, le Bureau exploite, en collaboration avec des laboratoires provinciaux, six centres nationaux répartis dans tout le pays, chacun opérant dans un domaine spécialisé de la microbiologie.

7.13 Les laboratoires de Winnipeg ont été conçus dans le but de faciliter les travaux continus du Bureau et d'améliorer sa capacité d'intervention lors d'apparition de problèmes sanitaires nouveaux, grâce à un réseau d'organismes nationaux et internationaux d'hygiène publique, ainsi que d'universités et de partenaires de recherche.

7.14 L'Agence canadienne d'inspection des aliments. L'ACIA fournit les services d'inspection et les services connexes qui contribuent à assurer la salubrité et l'innocuité de l'approvisionnement alimentaire au Canada. Son rôle permet aussi de faciliter le commerce des denrées et des produits d'origine alimentaire, animale et végétale, tant entre les provinces qu'avec les autres pays.

7.15 Le Centre national des maladies animales exotiques (CNMAE) de l'Agence canadienne d'inspection des aliments s'installera dans les laboratoires de Winnipeg. Le Centre se spécialise dans les tests diagnostiques qui servent à dépister les maladies exotiques graves susceptibles de menacer les animaux d'élevage canadiens. Le personnel de laboratoire du CNMAE est chargé de faire les premiers diagnostics et de former les vétérinaires praticiens à la détection précoce des maladies exotiques. Le Centre est également chargé d'intervenir en cas de poussées épidémiques d'une maladie exotique et il fournit analyses et conseils pour l'élaboration des directives sanitaires relatives à la trentaine de maladies exotiques susceptibles de menacer la santé de l'homme et de l'animal. Selon une étude réalisée en 1985 par Agriculture Canada, une flambée de fièvre aphteuse au Canada qui serait suivie d'un embargo d'un an et demi entraînerait des pertes estimatives, pour les producteurs, de l'ordre de 2,8 milliards de dollars.

7.16 En résumé, les principaux rôles de programmes que joueront Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans les nouveaux laboratoires de Winnipeg sont les suivants :

Le projet de Winnipeg
7.17 Le nouveau complexe de Winnipeg a une superficie d'environ 28 300 mètres carrés, et comprend des laboratoires de niveaux 2, 3 et 4 de biosécurité. La conception de la majorité des laboratoires de Santé Canada doit obéir aux critères de confinement de niveau 2, niveau type de nombreux laboratoires affiliés aux universités, aux entreprises pharmaceutiques et aux hôpitaux. La plus grande partie des aires de laboratoire de l'Agence canadienne d'inspection des aliments est de niveau 3. La pièce 7.2 fournit des détails sur l'allocation des locaux au sein du complexe.

7.18 En plus des aires de laboratoire et de bureau, le complexe comprend un auditorium de 137 places destiné à répondre aux besoins de formation, des aires communes telles que la cafétéria et la bibliothèque, des aires de services et d'entreposage et une infrastructure de soutien.

7.19 On prévoit qu'environ 180 employés travailleront dans le complexe lorsqu'il sera pleinement opérationnel vers la fin de 1998. En outre, 45 employés de Travaux publics exploiteront et entretiendront les installations physiques. Au moment où nous avons terminé notre vérification sur place, 70 postes n'étaient pas encore pourvus. Les hauts fonctionnaires responsables des programmes sont d'avis que la dotation de ces postes avec les personnes compétentes constitue un défi qu'il faudra relever pour assurer la mise en oeuvre des programmes.

7.20 Cadre de gestion du projet . Les ministères ont conclu un protocole d'entente en mars 1990 (révisé par la suite en juillet 1994 et en janvier 1997) qui établit un cadre indépendant de gestion du projet. Le cadre comporte une structure de comités à deux paliers qui comprend un Comité de direction de projet et plusieurs comités opérationnels.

7.21 Le Comité de direction du projet est responsable de l'orientation et de la conduite générales du projet. Il se compose actuellement de cinq sous-ministres adjoints - deux de Santé Canada et trois d'Agriculture, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et de Travaux publics, respectivement. Les deux ministères clients assumeront la présidence à tour de rôle. La gestion courante du projet est assurée par le Comité de gestion des clients et le Comité de gestion du projet. Le premier comprend des hauts fonctionnaires des domaines de programmes des deux ministères clients et leurs responsables de gestion des installations. Le second, qui se compose principalement des gestionnaires du projet et d'autres agents des deux ministères clients, est présidé par le gestionnaire du projet de Travaux publics.

7.22 Le budget et le calendrier du projet . Le budget approuvé du projet de construction des laboratoires de Winnipeg est de 141,8 millions de dollars financés à peu près également par Santé Canada et Agriculture. Les coûts d'entretien et de fonctionnement annuels sont estimés à neuf millions de dollars, financés à raison de 70 p. 100 et de 30 p. 100 respectivement par Santé Canada et par Agriculture. Le calendrier qui avait été établi au moment où le Conseil du Trésor a donné son approbation définitive au projet, c'est-à-dire en août 1992, se trouve à la pièce 7.3 où l'on indique aussi les dates prévues et les dates de réalisation réelles. La pièce 7.4 , présente la chronologie des principales étapes du processus qui a mené à l'approbation du projet de complexe de laboratoires de Winnipeg.

Objet de la vérification
7.23 Nous avons examiné les principaux aspects de la conception et de la construction de ce grand projet d'État en nous reportant aux phases généralement reconnues d'une bonne planification et d'une bonne mise en oeuvre de projet. En raison de la nature des travaux qui seront effectués à l'intérieur de ce complexe de laboratoires, nous avons plus particulièrement cherché à vérifier si les mesures nécessaires avaient été prises pour assurer la sécurité des employés et de la collectivité. En ce qui a trait aux questions touchant les programmes de Santé Canada, d'Agriculture et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, nous nous sommes restreints à acquérir une connaissance générale des exigences des programmes auxquelles la conception du nouveau complexe devait répondre.

7.24 Santé Canada vient en outre de construire de nouveaux laboratoires sur son campus du Parc Tunney, à Ottawa. Les projets d'Ottawa et de Winnipeg avaient au départ été planifiés et gérés comme un seul et unique projet, mais ils ont été ensuite séparés et traités comme deux projets distincts. Notre vérification a porté essentiellement sur le projet de Winnipeg. De plus amples détails sur les objectifs, les critères, l'étendue et la méthode de la vérification figurent à la fin du présent chapitre, à la section intitulée À propos de la vérification .

Observations et recommandations

7.25 Bien que nous considérions que tous les aspects de la réalisation d'un grand projet d'État sont importants, nous pensons que l'obligation pour les laboratoires de Winnipeg de satisfaire aux exigences fonctionnelles et de sécurité constitue l'aspect le plus essentiel pour ce qui concerne le grand public, les scientifiques et le personnel employés dans le nouveau complexe, ainsi que les habitants des quartiers environnants de Winnipeg.

Biosécurité

Les mesures appropriées qui ont été prises pour assurer la sécurité des employés et de la collectivité
7.26 Le terme biosécurité est l'abréviation de « sécurité biologique » qui désigne le maintien, la manutention et le confinement sécuritaires des microorganismes qui sont infectieux pour l'homme ou pour l'animal, ou pour les deux.

7.27 Nous sommes convaincus que les questions qui touchent la sécurité des employés et de la collectivité ont constitué une préoccupation primordiale tout au long du projet. L'application d'un processus d'agrément et de mise en service rigoureux a permis d'assurer le respect de toutes les exigences relatives à la biosécurité. Les spécialistes internationaux qui ont participé à l'examen des critères de conception et de construction du complexe ont jugé celui-ci extrêmement sécuritaire pour ce qui concerne le confinement des matières qui présentent un danger biologique. En janvier 1996, les responsables de programmes et de projets concernés ont préparé un document qui montre que le complexe a satisfait aux Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire édictées par Santé Canada et par le Conseil de recherches médicales du Canada, et que, dans certains cas, il les dépassait. Les fonctionnaires envisagent de maintenir à jour cette étude et ils nous informent que des spécialistes de la biosécurité signeront les résultats de tous les tests de mise en service pertinents pour faire en sorte que les installations respectent les normes appropriées.

7.28 Depuis le début du projet, l'équipe responsable a fait en sorte que le public puisse se faire entendre à chacune des principales étapes de l'évolution des travaux. Le rapport de consultations publiques daté de septembre 1997, commandé par l'équipe du projet, conclut que le processus de consultation publique a permis d'instaurer une relation positive avec la collectivité qui, de façon générale, continue d'être favorable au projet.

Les rôles et les rapports hiérarchiques doivent être renforcés
7.29 Le Bureau de biosécurité de Santé Canada a été créé en 1980 pour recueillir, examiner, consigner et diffuser une information à jour sur la sécurité des laboratoires au Canada, aux stades de la conception, de la construction et de l'exploitation. Le Bureau a principalement pour fonction de fournir des services consultatifs sur demande aux laboratoires de microbiologie des hôpitaux, des universités, des laboratoires de santé publique et des établissements de recherche. Dans le cadre de cette fonction, il doit aider à la résolution des problèmes relatifs à la sécurité des activités de laboratoire et réaliser des évaluations globales des laboratoires. Le Bureau a joué un rôle primordial dans l'élaboration et la mise à jour des Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire . Le directeur du Bureau de biosécurité relève maintenant du directeur du Bureau de microbiologie et, à ce qu'on nous dit, relèvera bientôt du directeur général du Laboratoire de lutte contre la maladie.

7.30 En 1992, le Conseil du Trésor a révisé son Guide sur la sécurité et la santé au travail afin d'encourager tous les laboratoires microbiologiques du gouvernement fédéral à se conformer aux Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire édictées par Santé Canada. Nous notons, toutefois, que le Conseil du Trésor n'a pas prévu dans ses lignes directrices de disposition pour la surveillance de la conformité à celles-ci. La décision de demander l'aide du Bureau de biosécurité au cours de la conception, de la construction ou de l'exploitation d'un laboratoire est laissée à la discrétion des gestionnaires ministériels.

7.31 Le Service de sécurité et de confinement des dangers biologiques d'Agriculture et Agroalimentaire Canada a été mis sur pied en 1993 pour fournir à la Direction de la santé des animaux et de la protection des végétaux les services liés au confinement et à la biosécurité. En 1997, le Service s'est joint à la Division de la consultation et de la gestion scientifiques de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Le directeur de la Division relève du directeur général de la Direction de la santé des animaux et de la protection des végétaux qui relève à son tour du vice-président des Programmes de l'Agence.

7.32 Le Service fournit des conseils au personnel de l'Agence sur les pratiques relatives à la biosécurité et au confinement des agents zoopathogènes. Il établit les normes de biosécurité des établissements qui manipulent des agents zoopathogènes et détermine le niveau de biosécurité correspondant à chacun des agents zoopathogènes dont l'Agence est responsable. Dans le cadre d'un programme de certification interne, le Service s'assure que les établissements exploités par l'Agence se conforment aux critères physiques et aux pratiques d'exploitation stipulés dans les Normes sur le confinement des installations vétérinaires . Le Service appuie également le programme d'importation de la Division de la santé des animaux en certifiant tous les établissements canadiens qui souhaitent importer ou transporter un agent zoopathogène.

7.33 Nous avons constaté que les rôles et responsabilités de la Direction de la biosécurité des centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis - les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) - sont davantage officialisés que chez leur équivalent canadien. De plus, la Direction de la biosécurité, qui relève du directeur adjoint des CDC, jouit d'une plus grande indépendance qu'au Canada. La Direction intervient à tous les stades de la conception, de la construction, de la rénovation, de l'entretien et de la réfection des laboratoires des CDC de niveaux 2, 3 et 4 de biosécurité, et délivre une attestation officielle avant que ceux-ci ne soient mis en service. Sur demande, la Direction donne également des conseils sur la sécurité de la conception et de l'exploitation des laboratoires de même catégorie qui relèvent du secteur public et du secteur des organismes sans but lucratif, à l'intérieur et à l'extérieur des États-Unis. Un règlement fédéral récemment adopté aux États-Unis exige que les laboratoires des gouvernements, des universités et de l'industrie qui manipulent certains agents infectieux soient agréés par les CDC. Nous avons été informés que les laboratoires agréés sont périodiquement inspectés par les CDC et que la responsabilité de la gestion du règlement incombe à la Direction de la biosécurité.

7.34 Nous croyons que les rôles et les responsabilités du Bureau de biosécurité et du Service de sécurité et de confinement des dangers biologiques doivent être renforcés. À notre avis, les spécialistes de ces deux entités devraient examiner systématiquement tous les laboratoires qui travaillent avec des agents infectieux et attester formellement de leur conformité à toutes les lignes directrices pertinentes en matière de biosécurité. Selon nous, de telles mesures sont particulièrement appropriées au moment où le Canada commence à manipuler les virus les plus dangereux que l'on connaisse, et si l'on tient compte des possibilités futures d'élargissement des programmes. Nous croyons aussi que les bureaux de biosécurité ne devraient pas relever hiérarchiquement des gestionnaires de programmes, de façon à réduire au minimum tout conflit d'intérêts réel ou perçu.

7.35 Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments devraient revoir les rôles et les rapports hiérarchiques du Bureau de biosécurité et du Service de sécurité et de confinement des dangers biologiques, respectivement, dans le but de les renforcer et de réduire au minimum tout conflit d'intérêts réel ou perçu.

Réponse de Santé Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments : D'accord. Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments examineront les rôles et les liens hiérarchiques respectifs du Bureau de biosécurité et de la Sous-section du confinement des biorisques et de la sécurité, afin d'évaluer le meilleur moyen de dispenser ces services. Santé Canada, sous réserve de l'approbation du Parlement et dans le cadre du renouvellement de la législation de la protection de la santé, étudiera la question de la manipulation des pathogènes humains afin de déterminer si des mécanismes de contrôle additionnels devraient être mis en place à l'échelon fédéral.

Définition des besoins et analyse des options

La décision de construire les nouveaux laboratoires a été prise sans que l'on ait fait une analyse de la capacité actuelle
7.36 Les documents établissant le besoin de nouveaux laboratoires datent, pour Agriculture et Agroalimentaire Canada, de 1975 (voir la pièce 7.4 ) et d'avant et, pour Santé Canada, de 1982. Divers plans et projets de remplacement et d'agrandissement des laboratoires actuels ont été établis puis reportés ou abandonnés, non sans engendrer parfois des coûts importants pour le contribuable. L'exemple le plus récent est l'annulation, en octobre 1986, du projet d'un nouveau laboratoire de virologie animale qui devait être construit à Nepean, en Ontario. Ce projet a été annulé parce que le coût estimatif était passé d'environ 52 millions de dollars à quelque 93 millions de dollars. Or, au moment où le projet a été annulé, environ 5,5 millions de dollars avaient déjà été dépensés en plans et en cahiers des charges.

7.37 Le projet de Winnipeg a vu officiellement le jour en septembre 1987. Les documents présentés au Conseil du Trésor par les deux ministères clients pour justifier les nouvelles installations, y compris le besoin de laboratoires de haute biosécurité (niveau 4), reposaient sur le raisonnement suivant :

7.38 Notre vérification a confirmé que les deux ministères avaient effectivement besoin de moderniser et d'agrandir les laboratoires existants, de façon à pouvoir réaliser de façon efficace et efficiente les programmes dont ils avaient la responsabilité. Une partie des laboratoires de Winnipeg répondent à un besoin de capacité et de programmes auquel aucun autre laboratoire au Canada ne pouvait répondre. Toutefois, au moment où la décision de construire les nouveaux laboratoires de Winnipeg a été prise, l'on n'avait effectué aucune analyse approfondie du profil global des laboratoires de chaque ministère et de leur capacité de répondre aux besoins actuels et futurs de services et d'installations. Ce n'est qu'en avril 1996 que Santé Canada a commandé une étude pour évaluer de tels besoins actuels et futurs. Les nouveaux laboratoires fédéraux à Winnipeg sont considérés comme la clé de voûte des services de laboratoires microbiologiques et de la capacité connexe de Santé Canada, et ils n'ont pas été inclus dans l'étude.

7.39 L'étude de Santé Canada concluait, en partie, que le Ministère consacrait des sommes importantes à entretenir ce qui semblait être une capacité en laboratoire excédentaire et recommandait la réalisation d'une étude sur l'utilisation optimale des aires de laboratoire. Les fonctionnaires de Santé Canada reconnaissent qu'on a eu tendance dans le passé à construire intentionnellement des laboratoires plus grands que nécessaire parce que l'on s'attendait à une croissance future des besoins pour pouvoir faire face aux imprévus, lesquels, souvent, ne se sont pas concrétisés.

7.40 Santé Canada a un autre complexe de laboratoires à Winnipeg. Il s'agit d'un bâtiment de deux étages, dont la construction a été achevée en octobre 1987 au coût de quelque 12 millions de dollars, et dont la superficie brute totalise plus de 5 900 mètres carrés. Nous avons constaté que le bâtiment était sous-utilisé et nous avons été informés par Santé Canada que la superficie excédentaire était attribuable à une surcapacité qui avait été planifiée en prévision d'une croissance future qui ne s'est pas matérialisée par suite des compressions du gouvernement et du regroupement des programmes. Nous avons aussi noté que l'établissement compte un laboratoire de confinement qui n'a jamais été mis en service, ni exploité, ni évalué afin de déterminer s'il avait le potentiel pour répondre à une partie des besoins de programme transférés à Winnipeg.

7.41 En juillet 1997, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a chargé un groupe de travail d'évaluer le volume des services de laboratoire et de soutien dont elle aura besoin pour ses programmes de quarantaine. L'objectif est d'élaborer des options qui permettront de réduire le coût des laboratoires et des inspections de quarantaine tout en n'ayant qu'une incidence minimale sur le service. L'Agence nous a informés que l'étude n'était pas achevée, au moment où nous terminions notre vérification sur place, et que la portée en avait été élargie pour inclure un examen plus vaste des options. On ne sait pas très bien quand l'étude sera terminée.

7.42 Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments devraient inclure la capacité des laboratoires de Winnipeg dans leurs évaluations continues de leurs besoins de laboratoires nationaux.

Réponse de Santé Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments : D'accord.

La superficie construite dépasse les besoins et le niveau approuvé et aucune stratégie n'a été définie pour en optimiser l'utilisation
7.43 À notre avis, le nouveau complexe de Winnipeg peut accueillir nettement plus de scientifiques et d'employés de soutien que le nombre prévu dans les plans. Nous avons pris connaissance de plusieurs faits qui indiqueraient que la superficie nette construite a augmenté et qu'il existe maintenant un excédent de capacité.

7.44 Dans leur demande de financement supplémentaire pour leur projet, en mai 1991, les ministères clients ont assuré le Conseil du Trésor qu'ils avaient revu leurs programmes et éliminé tout ce qui faisait double emploi. Les besoins totaux en superficie, à cette époque, avaient été estimés à 10 900 mètres carrés nets. Au moment de la demande d'approbation définitive du projet, en août 1992, le besoin total en superficie s'était élevé, passant à 12 200 mètres carrés nets, sans une augmentation correspondante des besoins des programmes. La superficie nette construite, comme l'a inscrit le consultant principal en mai 1996 dans une brochure sur la commercialisation, totalisait 13 000 mètres carrés nets, soit une augmentation d'environ 20 p. 100 par rapport au besoin initial et de sept pour cent par rapport au besoin révisé.

7.45 L'énoncé de projet, daté de juin 1991, affirmait que les laboratoires et les postes de travail modulaires, soit une superficie totale de 3 600 mètres carrés, qu'Agriculture occupait alors à Hull, au Québec, seraient logés dans la superficie nette de 2 568 mètres carrés qui était allouée au Ministère, dans le complexe de Winnipeg. Toutefois, l'énoncé indique que le Bureau de microbiologie de Santé Canada, qui occupe actuellement 2 500 mètres carrés dans quatre bâtiments du Parc Tunney, à Ottawa, sera remplacé par 5 610 mètres carrés de superficie nette dans le complexe de Winnipeg, soit plus de deux fois l'espace. En examinant l'énoncé, un consultant mandaté par Santé Canada a relevé que le complexe de Winnipeg fournirait au personnel du Ministère environ deux fois plus d'espace qu'à leurs homologues américains des CDC.

7.46 Dans une lettre à Santé Canada, en octobre 1996, un spécialiste de l'Organisation mondiale de la santé qui siège au Comité d'experts du projet de Winnipeg écrivait que le complexe pourrait probablement accueillir de deux à trois fois plus de scientifiques et d'employés de soutien que le nombre alors prévu. En outre, un gestionnaire principal de programmes de l'Agence indiquait que, selon certains scénarios, la partie du complexe allouée à cette dernière pourrait accueillir encore plus de personnes que le nombre actuellement prévu.

7.47 Dans tout le pays, et sans compter le complexe de Winnipeg, l'utilisation de la totalité des aires fonctionnelles de laboratoire, par membre du personnel professionnel scientifique, va de 27 à 86 mètres carrés, avec une moyenne de 54 mètres carrés par programme. Le complexe de Winnipeg offre environ 100 mètres carrés par membre du personnel professionnel scientifique, soit environ le double de la superficie moyenne. Cela représente aussi, par membre du personnel, plus du double de locaux offerts dans l'aile récemment ajoutée au Laboratoire de lutte contre la maladie, à Ottawa.

7.48 Les deux ministères nous ont fait savoir qu'ils sont conscients de l'importance de tirer pleinement parti de la capacité du complexe de Winnipeg et d'explorer les options permettant un recouvrement des coûts. Or, à la fin de notre vérification sur place, l'on n'avait toujours pas élaboré de stratégie et de plan d'entreprise exhaustifs pour atteindre ces objectifs.

7.49 Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments devraient procéder à une étude sur l'utilisation des locaux dans le nouveau complexe de Winnipeg afin de déterminer quelle superficie excédentaire y est disponible. Ils devraient établir une stratégie et un plan d'entreprise exhaustifs pour faire en sorte que la capacité du complexe soit pleinement utilisée et explorer des possibilités de recouvrement des coûts.

Réponse de Santé Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments : D'accord.

L'analyse et la mise en oeuvre inappropriées des options entraînent des débours inutiles et des coûts plus élevés
7.50 Nous avons noté que plusieurs options propres à entraîner des économies n'ont pas été mises en oeuvre en temps opportun ou n'ont pas été suffisamment explorées par l'équipe du projet. Par exemple, lorsqu'il est devenu clair en 1991 que le coût des projets cumulés d'Ottawa et de Winnipeg allait nettement dépasser le budget approuvé, l'équipe du projet a choisi de moderniser et d'agrandir un laboratoire existant à Ottawa plutôt que de construire un nouveau complexe distinct, comme celui qui était projeté. L'équipe estimait que cette option de modernisation permettrait d'économiser environ dix millions de dollars sans nuire à la mise en oeuvre des programmes. À notre avis, cette option viable aurait dû être envisagée plus tôt dans le processus de planification, même s'il n'y avait pas eu de contrainte budgétaire. Si cela avait été fait, le projet aurait bénéficié dès le départ d'une économie de dix millions de dollars et aurait permis d'éviter le débours de quelque deux millions de dollars en honoraires et frais pour travaux abandonnés sur l'option de laboratoire distinct.

7.51 En 1993, un membre de l'équipe du projet s'est inquiété parce que le projet risquait de dépasser le budget de quelque 15 millions de dollars. Il a cerné et porté à l'attention d'un cadre supérieur du Ministère plusieurs options économiques qui, croyait-il, ne nuiraient pas à la mise en oeuvre des programmes. Les mesures d'économie proposées consistaient à réduire la quantité de locaux de laboratoire de Santé Canada, à modifier certains paramètres architecturaux et à supprimer l'auditorium. Cependant, les autres membres de l'équipe du projet ne partageaient pas l'opinion selon laquelle le projet dépassait le budget et ils n'appuyaient pas les mesures d'économies proposées. À notre avis, de par leur nature et leur importance, ces possibilités d'économies justifiaient un examen formel de la part du Comité de direction du projet.

Gestion et contrôle financiers

7.52 Des budgets réalistes, des mesures rigoureuses de contrôle des coûts et des rapports exacts présentés en temps opportun sont les composantes essentielles qui étayent un bon système de gestion et de contrôle financiers. Pour que le système fonctionne convenablement, les estimations budgétaires doivent être scrutées à la loupe et mises en question par les gestionnaires supérieurs et les fonctionnaires du Conseil du Trésor lorsqu'ils approuvent les projets. Cela permettrait un financement suffisant et éviterait l'approbation de fonds qui dépassent les besoins. Le budget approuvé constitue la référence en fonction de laquelle il est possible de mesurer le déroulement financier du projet. La présentation en temps opportun de rapports exacts sur les coûts réellement engagés, rapprochés des coûts budgétisés, permet aux décideurs de régler tout problème d'écart ou d'exception important. À notre avis, le projet de Winnipeg nécessitait une gestion et un contrôle financiers plus rigoureux.

Le budget préliminaire du projet était incomplet et les augmentations ultérieures insuffisamment étayées
7.53 En janvier 1989, Santé Canada et Agriculture Canada ont soumis une présentation conjointe au Conseil du Trésor demandant l'approbation préliminaire d'un projet visant l'élaboration d'un projet de 145 millions de dollars, dont 93,9 millions de dollars reliés au projet conjoint de Santé Canada et d'Agriculture Canada, à Winnipeg, et 51,1 millions de dollars pour le Centre canadien de lutte contre les maladies, à Ottawa. Les ministères ont fait savoir au Conseil du Trésor que le budget de 145 millions de dollars englobait les ressources nécessaires pour équiper et aménager les deux centres de façon à fournir des installations « clés en mains ». Or, nous avons noté que Travaux publics estimait alors que la réalisation de ce projet exigeait un budget plus réaliste d'environ 173 millions de dollars et que, pour cette raison, il n'a pas avalisé la présentation au Conseil du Trésor. Les fonctionnaires de Travaux publics ont informé les fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor que les estimations de coûts étaient plus élevées, mais aucune mention de cette information n'a été faite dans la présentation au Conseil du Trésor.

7.54 En juin 1989, le Conseil du Trésor a donné une approbation préliminaire du projet à la condition que la préparation de l'avant-projet définitif ne commence pas tant qu'il n'aurait pas reçu l'assurance que les coûts projetés ne dépasseraient pas 145 millions de dollars. En mai 1991, après qu'il fut devenu manifeste que le projet ne pourrait pas être réalisé dans les limites du budget approuvé, un budget révisé de 183,5 millions de dollars a été demandé, dont 141,8 millions de dollars étaient réservés au complexe de Winnipeg. Les ministères ont mis l'augmentation des coûts sur le compte de l'inflation, de la TPS, des imprévus, des coûts d'aménagement du site et des coûts de consultation et de gestion du projet, 50 p. 100 de cette augmentation des coûts étant attribuée directement à l'inflation et à la TPS.

7.55 Nous avons analysé l'incidence de l'inflation et de l'entrée en vigueur de la TPS sur le budget du projet. D'après les données de Statistique Canada, il y a eu en réalité une légère diminution de l'inflation (dans l'indice des prix pour la construction d'immeubles non résidentiels), de 1989 à 1991. En ce qui concerne la TPS, nous avons calculé que l'incidence (après déduction de la taxe sur les ventes des fabricants) était inférieure à dix pour cent de l'augmentation des coûts. Par conséquent, nous concluons que l'incidence de ces deux facteurs représente moins de dix pour cent de l'augmentation et que le Conseil du Trésor n'a pas reçu une explication exacte des surcoûts du projet.

Le budget approuvé du projet ne reflète pas exactement ses coûts totaux
7.56 En août 1992, le Conseil du Trésor a approuvé le budget de 141,8 millions de dollars requis pour le complexe de Winnipeg. Nous avons constaté que la nature et l'étendue précises des activités qui devaient être financées par le budget n'avaient pas été clairement énoncées.

7.57 On nous a informés que les deux ministères avaient adopté des fondements différents pour préparer leurs budgets respectifs. Par exemple, le budget du projet prévoyait au total environ 10,5 millions de dollars pour les coûts de déménagement du personnel, les débours des clients et le matériel. Le budget d'Agriculture prévoyait 5,8 millions de dollars pour les achats de matériel tandis que Santé Canada, qui n'avait affecté que 650 000 dollars à ce chapitre dans le budget du projet, prélève maintenant environ 9,3 millions de dollars de son propre budget pour l'acquisition de matériel. Santé Canada finance également 9,6 millions de dollars supplémentaires puisés à d'autres sources que le budget du projet pour réinstaller le personnel muté à Winnipeg, tandis qu'Agriculture finance ces coûts avec la part qui lui revient des 141,8 millions de dollars du budget du projet. Nous avons également constaté que, pour administrer le projet, les ministères ont dépensé neuf autres millions de dollars prélevés sur des fonds non destinés au projet. La pièce 7.5 présente un coût total plus réaliste de la construction et de l'exploitation du complexe.

7.58 À notre avis, une estimation claire et exhaustive du coût total du projet n'a pas été présentée au Conseil du Trésor, à l'étape de l'approbation définitive du projet, et ce coût total dépasse actuellement de quelque 34 millions le budget approuvé de 141,8 millions de dollars. Par conséquent, les ministres ont approuvé le projet sans avoir un tableau réaliste et complet de ce que le complexe allait coûter au contribuable canadien.

La démarche de l'équipe du projet qui consiste à « construire jusqu'à la limite du budget » n'a pas incité à l'économie
7.59 Comme dans la plupart des autres grands projets d'État que nous avons examinés, l'équipe chargée du projet a suivi la démarche « construisons jusqu'à la limite du budget » pour les besoins de l'élaboration du projet. Bien qu'elle vise le non-dépassement du budget global, cette approche n'incite pas à rechercher des possibilités d'économies et à réaliser un projet sans épuiser la totalité du budget, chaque fois que cela est possible. L'équipe du projet n'est en bout de ligne responsable que de rester dans les limites du budget total approuvé par le Conseil du Trésor, sans égard au fait que le budget puisse éventuellement être plus élevé que nécessaire. Par exemple, le budget approuvé intègre de nombreuses estimations de dépenses imprévues qui peuvent ne pas être nécessaires, mais celles-ci ne sont pas désignées comme telles ni comptabilisées à part de façon qu'on puisse assurer la rentabilité de leur utilisation. Les réserves pour carences de conception, les clauses pour éventualités prévues dans les contrats, les provisions pour inflation et autres risques représentent des montants élevés qui, à notre avis, doivent être approuvés, contrôlés et comptabilisés séparément du budget de base.

7.60 Les fonctionnaires de Travaux publics ont reconnu que de nombreux projets sont conçus de façon à absorber le budget prévu. Ils croient que cette attitude devrait changer, mais que cela devra passer par un changement de culture. Travaux publics étudie actuellement la façon dont les honoraires sont définis et payés, et à quels stades du contrat ils sont payés. Il croit que les contrats doivent être structurés de façon à inciter aux économies. Les contrats afférents au projet n'incitent pas les consultants à réduire les coûts, étant donné que les honoraires sont calculés selon un pourcentage des coûts de construction. Nous appuyons les efforts déployés par Travaux publics pour réformer les pratiques de passation de contrats dans le but d'inciter les chargés de projet à repérer les possibilités d'économies et à réaliser les projets sans épuiser la totalité du budget, chaque fois qu'ils le peuvent. Toutefois, les fonctionnaires de Travaux publics reconnaissent que des contrôles appropriés doivent être en place pour que les économies ne se fassent pas au détriment de la réalisation des programmes et n'aboutissent pas à un accroissement du coût total du cycle de vie du projet.

7.61 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait définir clairement la nature et l'étendue précises des activités que les budgets de projet approuvés sont destinés à financer. Le Secrétariat et les ministères devraient aussi insister sur l'obtention du meilleur rapport qualité-prix dans les décisions d'approvisionnement et concevoir des mesures qui incitent à ne pas dépenser la totalité du budget, chaque fois que cela est possible.

Réponse du Secrétariat du Conseil du Trésor : La politique du Conseil du Trésor concernant l'approbation des projets inclut un objectif des coûts, une estimation des ressources totales à approuver par le Conseil du Trésor et nécessaires à la mise en oeuvre du projet. L'un des objectifs de l'examen des présentations des ministères effectué par le Conseil du Trésor est et continuera d'être de s'assurer que ces derniers ont mentionné tous les coûts de mise en oeuvre du projet dans l'approbation budgétaire demandée.

La politique du Conseil du Trésor indique que « l'objectif des marchés publics est de permettre l'acquisition de biens et de services et l'exécution de travaux de construction, d'une manière qui contribue à accroître l'accès, la concurrence et l'équité, qui soit la plus rentable ou, le cas échéant, la plus conforme aux intérêts de l'État et du peuple canadien ».

Le Secrétariat du Conseil du Trésor se concentrera davantage sur les options visant à réaliser des économies à même le budget global lors de l'examen des présentations ministérielles. Pour les ministères et les organismes dotés de budgets d'immobilisations, la capacité de payer devrait justifier leurs stratégies d'investissement et la valeur de l'argent devrait être ancrée dans leur philosophie de gestion.

Le Secrétariat ne croit pas qu'un régime d'incitation au niveau du projet en vue d'encourager la sous-utilisation des fonds budgétaires serait un moyen efficace de réaliser des économies. Il serait difficile d'imaginer un régime d'incitation qui n'aurait pas d'effet négatif en l'absence d'un processus d'approbation par le Conseil du Trésor beaucoup plus rigoureux que celui qui existe actuellement. Par exemple, le Secrétariat pourrait craindre que l'incitation au partage des économies conduise les intéressés à gonfler les estimations des coûts et à relever les exigences de conception pour donner l'impression de rester en dessous du budget en réduisant les coûts et en faisant des économies.

7.62 Travaux publics et Services gouvernementaux Canada devrait revoir ses pratiques de passation des contrats et y inclure des clauses incitant à la réalisation d'économies dans les limites des budgets approuvés, sans pour cela compromettre les objectifs des projets. Le Ministère devrait également exiger que les réserves pour carences de conception, les clauses pour éventualités prévues dans les contrats et les provisions pour inflation et autres risques soient approuvées, contrôlées et comptabilisées séparément du budget de base.

Réponse de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada : D'accord. Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) cherche actuellement des moyens pour intégrer dans le processus contractuel des incitatifs rentables et efficaces qui contribueront à réduire les coûts. TPSGC élaborera des conseils pratiques et examinera la possibilité d'adopter officiellement la présentation de rapports sur les modifications apportées aux réserves pour conception et aux éventualités relatives aux contrats.

La communication des écarts budgétaires doit être améliorée
7.63 Une vérification interne du complexe de Winnipeg a révélé, ce que notre propre travail a confirmé, que des composantes et des montants du budget étaient souvent réaffectés à l'intérieur du budget approuvé. Qui plus est, nous avons remarqué que les coûts réels n'étaient pas présentés selon les mêmes règles que les coûts prévus dans le budget. Même si nous reconnaissons qu'il est nécessaire de réaffecter les fonds du budget lorsqu'on dispose de plus d'information, nous croyons que la source, la justification et l'approbation de ces changements devraient être claires et bien étayées. Par exemple, nous avons relevé que les augmentations des coûts de consultants, d'un total de 10,2 millions de dollars, avaient été financées à partir du budget approuvé, mais nous n'avons pas vu clairement quels éléments du budget avaient généré des économies pour financer ces augmentations.

7.64 Nous avons remarqué que l'équipe de gestion du projet ne s'est pas servie de méthodes prévisionnelles pour estimer les futures augmentations de coûts possibles. Elle pensait qu'à cause de la nature unique et complexe du projet, les prévisions officielles ne pouvaient pas constituer des outils de gestion rentables et fiables. À notre avis, la technique prévisionnelle utilisée par l'équipe de gestion du projet ne permettait pas de tenir compte des écarts par rapport au budget et au calendrier. Nous avons remarqué que dès 1996, l'équipe de gestion signalait aux sous-ministres et aux ministres que le projet était en avance sur le calendrier et qu'il restait dans les limites du budget. À notre avis, les risques de retard et de dépassement du budget étaient très réels.

Non-conformité aux politiques du Conseil du Trésor
7.65 Nous avons remarqué plusieurs cas où Travaux publics avait outrepassé son pouvoir de dépenser et où le Conseil du Trésor avait accordé rétroactivement son autorisation. Dans l'un des cas, nous avons découvert qu'en juin 1996, Travaux publics avait dépassé d'environ 500 000 $ l'autorisation de paiement accordée par le Conseil du Trésor avant de se rendre compte de son erreur. Toutefois, dans sa demande d'autorisation de payer ce montant supplémentaire, le Ministère n'a pas informé le Conseil du Trésor que les sommes visées par la demande avaient déjà été versées.

7.66 Nous avons aussi noté l'absence de rapports sur l'état d'avancement du projet et la piètre qualité des rapports sur ses coûts qui ont été soumis au Conseil du Trésor. Nous sommes préoccupés de l'absence de rapports semi-annuels sur l'avancement de ce grand projet d'État, comme l'exigent les politiques du Conseil du Trésor. Le point qui nous préoccupe le plus, toutefois, est l'exactitude et le caractère intégral des déclarations qui figurent dans diverses présentations au Conseil du Trésor, comme celles qui justifient les augmentations des coûts du projet; elles ne semblent pas concorder avec les données recueillies lors de notre vérification.

7.67 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait s'assurer que les ministères soumettent des rapports sur l'état d'avancement des projets, conformément aux politiques du Conseil du Trésor sur la gestion des grands projets d'État.

Réponse du Secrétariat du Conseil du Trésor : Le Secrétariat du Conseil du Trésor appuie cette recommandation. Même si une ancienne politique exigeait la présentation semestrielle de l'information sur l'avancement du projet, elle a depuis été révisée pour inclure la présentation de l'information à des étapes clés préétablies d'un projet. Cela devrait améliorer la communication de l'information. En fin de compte, les ministères et les ministres sont responsables de l'exécution du travail à accomplir et les résultats prévus doivent être obtenus d'une manière cohérente avec la politique du Conseil du Trésor et avec son approbation. Des corrections et des ajustements aux programmes peuvent s'avérer nécessaires en cours de route. Lorsque les autorisations doivent être réévaluées, les ministères sont chargés d'appliquer les mesures correctives et d'obtenir les approbations nécessaires auprès du Conseil du Trésor.

Cadre de gestion et de contrôle du projet

Deux vérifications internes ont révélé des carences préoccupantes dans les pratiques de gestion des premières étapes du projet
7.68 Un cabinet du secteur privé, mandaté par les deux ministères clients, a effectué deux vérifications internes du projet de Winnipeg et en a fait rapport en novembre 1992 et en juin 1996. Les deux rapports mettaient l'accent sur la qualité du cadre de gestion et de contrôle du projet.

7.69 Le premier rapport recommandait notamment d'améliorer les pratiques d'établissement du budget, de définir et de contrôler les réserves pour éventualités et de renforcer le processus de revue de l'avant-projet. Le rapport faisait également état du peu de mesures d'incitation à réaliser le projet à un coût inférieur au budget approuvé par le Conseil du Trésor.

7.70 Le deuxième rapport portait sur le suivi des recommandations formulées dans le premier rapport et concluait que la majorité d'entre elles n'avaient été mises en oeuvre qu'en partie ou qu'elles ne l'avaient pas été du tout. Il recommandait que l'équipe du projet fasse la preuve que la conception des nouveaux laboratoires avait respecté les critères des Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire de Santé Canada, et que la présence sur le chantier des spécialistes des ministères clients était justifiée par la nature des activités de construction qui devaient s'y dérouler. Le rapport mentionnait également que les parties n'avaient pas conclu d'entente sur un calendrier de construction réaliste, ni convenu d'un plan de contrôle de la mise en service, et que l'entente sur le contrôle et la vérification de la construction était fondée sur un calendrier de construction non approuvé. Le rapport réitérait la recommandation concernant l'amélioration des pratiques en matière de budgétisation, de prévision et de rapports.

7.71 Nous avons constaté que les gestionnaires avaient pleinement donné suite à la recommandation selon laquelle il fallait démontrer que la conception des laboratoires reflétait les lignes directrices en matière de biosécurité, et qu'ils avaient donné suite à plusieurs autres recommandations à des degrés divers. Certaines recommandations avaient été jugées rétrospectives et non utiles à l'achèvement du projet.

Il faut améliorer la sélection des consultants et les pratiques de gestion pour atténuer les risques d'accroissement des coûts
7.72 En décembre 1986, le ministre de Travaux publics avait approuvé une liste de sept cabinets invités à soumettre des propositions portant sur la conception, pour Santé Canada, d'un nouvel édifice de bureaux et de laboratoires de haute biosécurité dans la région de la capitale nationale. L'édifice devait abriter le Laboratoire de lutte contre la maladie et le Bureau de biologie. En mai 1987, les propositions des sept cabinets ont été évaluées dans les règles par un comité de Travaux publics et une des propositions a été retenue. Nous n'avons pu examiner la manière dont le comité avait classé les propositions les unes par rapport aux autres parce que Travaux publics n'avait pas conservé la documentation à ce sujet.

7.73 En septembre 1987, avant que le contrat soit officiellement octroyé, on a décidé de déménager une partie du projet de Santé Canada à Winnipeg, au Manitoba. On a aussi décidé que la demande d'Agriculture concernant le nouveau laboratoire de virologie d'abord prévu à Nepean, en Ontario, serait intégrée au nouveau projet du complexe de Winnipeg. Aux yeux de certains responsables du projet, ces décisions avaient nettement changé la portée du projet. Ils craignaient que le fait de confier ce projet au consultant qui avait été retenu à l'origine pour un projet foncièrement différent pourrait être perçu comme une manoeuvre sapant l'équité du processus de sélection des consultants. D'autres gestionnaires croyaient quant à eux que, malgré le changement de portée et de coût, l'objet global du nouveau projet était semblable à celui du projet d'origine et qu'un nouvel appel de propositions prendrait du temps et accroîtrait les coûts, tant pour l'État que pour les consultants concernés.

7.74 Vu la nature et l'importance du changement de portée et vu le risque élevé que l'attribution du contrat sur la base d'un projet foncièrement différent passe pour une manoeuvre compromettant l'équité du processus de sélection des consultants, nous pensons que le Comité de direction du projet n'a pas suffisamment motivé sa décision de ne pas procéder à un nouvel appel d'offres.

7.75 Pour des projets aussi importants et complexes que celui de Winnipeg, nous nous serions attendus que les contrats passés avec les consultants soient adaptés de façon à tenir compte de problèmes contractuels spécifiques au projet. Au lieu de cela, nous avons constaté que, conformément à sa politique ministérielle d'alors, Travaux publics avait utilisé la convention de conseil standard qu'il a élaborée pour la situation « normale » d'un projet moins important géré par un consultant intervenant depuis son cabinet et sous-traitant avec des consultants de son choix, situés habituellement non loin des consultants principaux. Tout au long du déroulement du projet, les conventions entre Travaux publics et les consultants principaux, et à certains moments, avec les sous-traitants, ont donné lieu à des différends sur des questions qui n'avaient pas été clairement stipulées dans la convention de conseil et qui ont entraîné des frais supplémentaires. En voici des exemples :

7.76 La pièce 7.5 décrit en détail les coûts estimatifs du projet. Le coût des services de consultants, y compris les honoraires de Travaux publics et les frais d'administration des ministères a atteint en tout 38,8 millions de dollars. Nous croyons que ces coûts sont élevés car ils représentent environ 38 p. 100 des coûts de construction, ou 31 p. 100 des coûts cumulatifs de la construction et de l'équipement. Les responsables du projet reconnaissent que les coûts sont plus élevés que prévu et ils attribuent l'augmentation à plusieurs facteurs. Les retards dans l'ordonnancement et la construction ont contraint à garder du personnel sur le chantier pendant des périodes plus longues que prévu. Un grand nombre de consultants et de responsables du projet ont dû faire de fréquentes navettes entre le chantier et leur cabinet, depuis six villes dispersées au Canada. La décision de Santé Canada d'engager ses propres consultants pour examiner le travail des consultants principaux a également contribué à alourdir sensiblement les coûts des services de consultants.

7.77 À notre avis, les mesures suivantes auraient permis d'économiser plusieurs millions de dollars :

7.78 Travaux publics et Services gouvernementaux Canada devrait faire en sorte que les contrats passés avec les consultants soient adaptés à chaque projet particulier et il devrait mieux surveiller le rendement de l'entrepreneur.

Réponse de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada : Depuis 1993, TPSGC a adapté une nouvelle norme en modifiant considérablement la présentation du contrat de consultants, en collaboration et en consultation avec les associations professionnelles. Cette présentation permet d'adapter les contrats à divers genres de travaux à réaliser, de respecter les normes des associations professionnelles, tout en offrant la souplesse nécessaire pour permettre d'élaborer la portée des travaux en fonction des particularités de chaque projet. TPSGC continue à réviser l'entente standardisée afin de couvrir les situations spécifiques des projets.

La régie du projet ainsi que la « chimie » et les taux de rotation au sein de l'équipe responsable ont hypothéqué la bonne réalisation du projet
7.79 Un ingrédient clé du succès est la désignation d'un centre de leadership investi du pouvoir et de la responsabilisation appropriés pour la conduite du projet, du début jusqu'à la fin. Dans les projets entrepris par plusieurs ministères, il est indispensable que les participants acceptent d'être une équipe qui collabore à la réalisation des objectifs globaux du gouvernement. L'instauration de l'esprit d'équipe exige la confiance et le respect pour les rôles et les responsabilités des diverses parties.

7.80 Nous avons constaté que le cadre et les pratiques de contrôle et de gestion expliquent en partie l'incapacité de l'équipe du projet de prévenir ou de régler plus efficacement certains des problèmes rencontrés pendant le projet, y compris les dépassements de coûts et les retards de construction. Au cours de ce projet, le processus décisionnel a été rendu plus difficile et plus complexe en raison du fait qu'il y avait deux ministères clients dont les exigences de programmes et les options préférées ne coïncidaient pas fréquemment. Il en est résulté souvent des négociations et des débats avant que l'on s'entende pour aller de l'avant.

7.81 Nous avons relevé plusieurs cas où les ministères clients avaient de la difficulté à s'entendre sur la meilleure façon de résoudre les problèmes; durant les premières étapes, l'absence d'esprit d'équipe chez les responsables du projet a caractérisé le climat de travail. La pièce 7.6 fournit un exemple des difficultés rencontrées pour parvenir à un consensus; dans ce cas précis, la décision portait sur le type d'autoclave (stérilisateur) le mieux indiqué. Nous avons aussi noté, toutefois, que le travail d'équipe et la collaboration s'étaient nettement améliorés à partir du milieu de l'année 1995, après que Santé Canada eut réorganisé sa méthode de gestion du projet et son personnel responsable.

7.82 Les consultants principaux ont noté la divergence des points de vue entre les ministères clients et Travaux publics sur les questions qui avaient trait à la portée du projet, à la conception et aux opérations. À notre avis, pendant les premières phases du projet, il n'existait pas chez toutes les parties un sentiment d'engagement envers le projet, ce qui s'est souvent manifesté par des désaccords et un manque d'esprit d'équipe.

7.83 Bien que Travaux publics soit le pouvoir contractant chargé d'exécuter le projet, Santé Canada a jugé nécessaire de dépenser 1,6 million de dollars en engageant les services d'un autre consultant chargé d'examiner l'énoncé du projet, les avant-projets et les avis de modification envisagée. La situation a exaspéré Agriculture, Travaux publics et les consultants principaux parce qu'elle ralentissait l'évolution du projet et créait une atmosphère de remise en question sur des points à l'égard desquels le consultant de Santé Canada n'avait en dernier ressort aucune responsabilité. Nous avons appris que très peu de recommandations du consultant distinct avaient été appliquées dans le projet.

7.84 Le Comité de direction du projet était chargé de l'orientation et de la conduite générales du projet. Au début, il se composait de trois sous-ministres adjoints provenant de Santé Canada, d'Agriculture et de Travaux publics, respectivement. En juillet 1995, le Comité est passé à cinq membres, soit deux sous-ministres adjoints de Santé Canada et trois sous-ministres adjoints d'Agriculture, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et de Travaux publics, pour mieux tenir compte des problèmes de gestion du complexe. Nous avons noté que pendant la durée du projet, 13 membres différents se sont succédé au Comité pour des mandats de deux à trois ans chacun. À notre avis, le taux de rotation élevé et l'obligation de prendre des décisions consensuelles ont dilué la fonction de reddition de comptes du projet. Nous croyons que ce manque de continuité et de responsabilisation dans le cadre de contrôle et de gestion explique, du moins en partie, la définition inadéquate du coût du projet et du calendrier de construction, ainsi que le nombre des réclamations en dommages-intérêts et l'importance des sommes réclamées .

7.85 Dans les projets futurs qui impliqueront plus d'un ministère client, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait veiller à ce qu'une seule autorité soit désignée comme l'autorité principale qui représentera les intérêts de tous les ministères clients et qui sera tenue responsable des résultats du projet, comme l'exigent les politiques du Conseil du Trésor sur la gestion des projets d'immobilisations.

Réponse du Secrétariat du Conseil du Trésor : La politique du Conseil du Trésor précise qu'une seule autorité doit être établie aux fins de la gestion et de la responsabilisation. Les structures organisationnelles complexes et les coentreprises peuvent avoir besoin de comités directeurs afin de tenir compte des intérêts de l'ensemble des parties lors de l'exécution de projets importants. Dans de telles situations, des mécanismes peuvent être mis en place pour aider au règlement des différends et faciliter la direction efficace et efficiente du projet à l'intention de l'autorité principale.

Réponse de Santé Canada, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments : Les trois ministères et l'Agence estiment que les Canadiens peuvent être fiers de cet établissement de classe internationale, qui ajoute à la solide renommée de notre pays comme chef de file dans le milieu scientifique, et lui assure une place de premier plan dans le domaine de la santé humaine et animale. L'équipe de gestion du projet s'est montrée à la hauteur des défis que représente la régie d'un projet spécial et complexe pendant toute une décennie : il a fallu planifier et prendre des mesures en fonction de trois révisions du code du bâtiment; se conformer aux exigences de tous les niveaux d'approbation ministériels; et surtout, s'adapter au roulement du personnel, à des changements majeurs au Ministère, à l'évolution des programmes, et aux progrès rapides de la technologie.

Une meilleure gestion des ordres de modification aurait réduit les coûts assumés par l'État
7.86 Comme pour tout projet complexe, des modifications ont été apportées aux plans, aux cahiers des charges et aux contrats. Ces modifications ont été mises en oeuvre par le mécanisme des avis de modification envisagée et des ordres de modification; l'avis de modification, après approbation, devient un ordre de modification. Le travail exécuté aux termes d'un ordre de modification coûte habituellement plus cher parce qu'il n'est pas assujetti à l'appel d'offres et qu'il engendre des frais d'administration nettement plus élevés lorsque plusieurs fournisseurs entrent en jeu. Les modifications de contrat accroissent aussi le risque de coûts supplémentaires qui découlent des réclamations pour préjudices causés par les retards.

7.87 Nous avons remarqué que les travaux réalisés aux termes des ordres de modification ont été financés à partir de deux sources, soit un fonds pour éventualités de 7,2 millions de dollars et des liquidités de réserve de 12,2 millions de dollars. Ces dernières étaient prévues au contrat du maître d'oeuvre et étaient destinées à l'achat de certains articles dont on savait qu'ils étaient requis, mais dont on ne pouvait déterminer les spécifications avant la passation du contrat, par exemple, les armoires et l'équipement de laboratoire et les dispositifs de contrôle. Trente et un ordres de modification totalisant 10,5 millions de dollars ont été imputés aux liquidités de réserve. Quant aux modifications de contrat financées à partir du fonds pour éventualités, 926 avis de modification ont été soumis, dont 677 ont été approuvés en tant qu'ordres de modification qui ont coûté en tout 7,6 millions de dollars; 179 avis ont été annulés et 70 restent à régler.

7.88 Nous avons constaté que les ordres de modification avaient été généralement bien administrés; ils étaient bien documentés, consignés et contrôlés, et l'exécution des travaux avait été vérifiée avant le paiement. Par contre, un grand nombre d'avis de modification avaient été mal gérés. Bon nombre des avis de modification envisagée ont mis longtemps avant d'être approuvés en tant qu'ordres de modification; plusieurs ont mis dix mois et deux ont mis 22 mois. Dans certains cas, nous avons noté que les modifications du cahier des charges avaient contribué à retarder le processus d'approbation des modifications du contrat et avaient entraîné des coûts supplémentaires. Dans de nombreux autres cas, les retards étaient attribuables à l'énorme écart entre le prix estimé par les consultants principaux et le prix demandé par le maître d'oeuvre, écarts qui, dans notre échantillon, atteignaient en moyenne 330 p. 100, et qui, dans deux cas précis, ont dépassé 2 300 p. 100.

7.89 Les retards et les modifications ont donné lieu à des débours inutiles. Dans un de ces cas, à cause des délais pour obtenir l'approbation des ministères clients, les portes bioétanches spéciales ont coûté 148 000 $ de plus que le prix fixé au départ. Dans un autre cas, des désaccords entre les clients sur la nécessité de modifier certains autoclaves ont entraîné des coûts supplémentaires de 71 000 $ occasionnés par le stockage et la modification des autoclaves déjà en cours de fabrication.

7.90 La classification des modifications en tant qu'« erreurs et omissions » a posé des problèmes à Travaux publics pour de nombreux projets. La convention de conseil standard à laquelle Travaux publics a recours stipule que « le consultant ne peut prétendre à des honoraires relativement à des coûts qu'il supporte pour corriger des erreurs ou des omissions touchant l'exécution des services qui lui sont imputables, ou qui sont imputables à ses employés ou agents, ou à des personnes pour lesquelles il s'est porté garant de la bonne exécution des services ». Toutefois, la convention de conseil ne fournit pas de définition d'« erreurs et omissions ». Travaux publics s'en tient au principe selon lequel les erreurs et omissions s'appliquent aux avis de modification ou ordres de modification délivrés pour corriger un problème qui découle du manque de coordination entre les architectes et les ingénieurs pendant l'élaboration des plans et du cahier des charges, ou à des détails incomplets ou impossibles à réaliser. Dans ces cas, le consultant n'a pas droit à des honoraires.

7.91 Les consultants principaux font valoir qu'ils n'ont jamais accepté la définition des « erreurs et omissions » de Travaux publics et ils croient que « poursuite des travaux de conception » serait un libellé plus équitable; ils réclament environ 400 000 $ en rémunération supplémentaire. Ils soutiennent qu'aucun jeu de plans ni qu'aucun cahier des charges n'est parfait et qu'il n'est pas raisonnable d'attendre des consultants des avant-projets exempts de toute erreur, dans tout projet quel qu'il soit, en particulier dans des projets de grande envergure comme celui du complexe de Winnipeg.

7.92 À notre avis, il aurait fallu trouver une solution aux désaccords majeurs sur ce qui constitue une erreur ou une omission et non laisser ceux-ci persister pendant toute la durée du projet, étant donné que les moyens dont l'État dispose pour négocier avec les consultants diminuent normalement à mesure que le projet avance.

7.93 En concertation avec les associations d'architectes et d'ingénieurs, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada devrait définir clairement ce qui constitue des erreurs et des omissions de conception, établir les responsabilités à leur égard et intégrer cette définition et ces responsabilités dans les contrats.

Réponse de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada : D'accord.

Les besoins en biens d'équipement et les coûts de ceux-ci sont mal justifiés et des biens ont été achetés à l'avance, et en excédent des besoins
7.94 Les biens d'équipement font partie intégrante des opérations qui seront effectuées dans les nouveaux laboratoires de Winnipeg. Dans les documents d'approbation du projet, les ministères ont estimé les achats de biens d'équipement à environ 23 millions de dollars, mais la somme affectée à ce poste du budget n'est que de 18,5 millions de dollars. Les 4,5 millions de dollars restants ont été désignés par Santé Canada comme une somme qui sera nécessaire quand les laboratoires de Winnipeg commenceront à être exploités et que les biens d'équipement actuels auront atteint la fin de leur vie utile. À la fin de notre vérification sur place, les ministères avaient acquis pour environ 25,2 millions de dollars de biens d'équipement pour le complexe de Winnipeg.

7.95 On nous a informés que toutes les demandes d'achat de biens d'équipement avaient été examinées et mises en question pour s'assurer que seuls des biens nécessaires avaient été achetés. Or, les ministères n'ont pas été en mesure de nous fournir la documentation ni l'analyse qui étayaient leurs estimations initiales des besoins en biens d'équipement. Nous avons constaté qu'Agriculture avait surestimé son budget d'équipement d'environ 1,7 million de dollars, dans le but d'utiliser l'excédent comme une réserve pour imprévus. Nous comprenons mal pourquoi Santé Canada n'a pas inclus les besoins totaux en biens d'équipement dans le budget du projet. Nous avons remarqué toutefois que la valeur totale de l'équipement acheté par Santé Canada est maintenant plus de deux fois supérieure à celle qui avait été prévue. Nous en concluons donc que le Ministère n'avait ni planifié ni budgétisé avec exactitude ses besoins en biens d'équipement.

7.96 Nous avons relevé plusieurs cas où des achats excédant les besoins ont été effectués à l'avance, pour un total de plus de deux millions de dollars. La pièce 7.7 montre un exemple d'achat de biens d'équipement qui dépasse les besoins. Nous avons également relevé qu'entre janvier 1996 et mars 1997, Santé Canada a acheté pour un total de 1,9 million de dollars de matériel qui est entreposé actuellement à Ottawa et à Winnipeg.

Agrément et mise en service

L'agrément et la mise en service ont été généralement bien gérés, mais l'ordonnancement des tests a engendré des problèmes et des coûts accrus pour l'État
7.97 Le processus d'agrément et de mise en service est une suite ordonnée de tests dont les résultats sont validés en fonction de critères de rendement escompté qui portent sur tous les éléments des installations physiques, de l'équipement, des systèmes et des systèmes intégrés. Dans le projet qui nous occupe, le processus d'agrément et de mise en service prévoyait un examen en trois phases : par le personnel du chantier (phase I), par des spécialistes indépendants des techniques et des questions réglementaires (phase II) et par un comité d'experts internationaux des domaines de la santé humaine et de la santé animale (phase III).

7.98 Le programme de contrôle et de vérification de la construction disposait d'un budget de 5,3 millions de dollars. Il était fondé sur le calendrier de construction proposé en mai 1994 par le maître d'oeuvre et qui fixait au 30 juin 1996 l'acceptation provisoire. Le coût total réel de ce programme n'est pas connu à ce jour parce que des comptes distincts n'ont pas été ouverts de manière à ce que les coûts soient inscrits et déclarés de la même façon qu'ils ont été budgétisés.

7.99 À la fin de notre vérification sur place, les tests des systèmes intégrés avaient été effectués pour la majorité de la partie du complexe qui relève de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et avaient donné des résultats satisfaisants. La direction nous a informés que, postérieurement à notre vérification sur place, tous les systèmes auront été testés d'ici avril 1998.

7.100 Nous avons remarqué que l'équipe d'agrément et de mise en service de Travaux publics a participé à tous les aspects de la validation des tests et de l'acceptation des systèmes. L'équipe a acquis une expérience de première main en travaillant sur les systèmes et elle a reçu une formation et un soutien techniques de la part des consultants principaux et du maître d'oeuvre. Un bon nombre des membres de cette équipe sont maintenant responsables de l'exploitation et de l'entretien du complexe.

7.101 La direction nous a informés que tous les employés seront formés aux procédures de laboratoire et à la manutention sécuritaire des organismes infectieux et de l'équipement avant que les laboratoires n'entrent en exploitation. Lorsque les laboratoires seront opérationnels, le bureau des services de sécurité et de protection environnementale du complexe sera chargé de contrôler les programmes, les procédures suivies par le personnel et l'entretien des laboratoires pour s'assurer que toutes les exigences de sécurité continuent d'être respectées.

7.102 Globalement, nous avons trouvé que le programme d'agrément et de mise en service était généralement bien géré. Nous avons constaté toutefois que la décision d'organiser le calendrier de ce programme en fonction d'un calendrier de construction non approuvé a fait perdre du temps et de l'argent, car il a fallu différer et reprogrammer des tests, ce qui a entraîné le transfert à l'État de responsabilités et de coûts qui incombaient au maître d'oeuvre.

Conclusion

L'exécution de ce projet complexe a été une réussite, mais des pratiques de gestion plus solides auraient réduit les coûts pour l'État
7.103 Nous concluons que ce complexe de laboratoires exceptionnel répond aux exigences formulées par les ministères clients et que, dans certains cas, il les dépasse. Les fonctionnaires de Santé Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments ont fait savoir qu'ils en étaient très satisfaits. Ils sont convaincus qu'une fois tous les postes pourvus, le complexe leur permettra de mener à bien, et ce de façon sécuritaire, les programmes qui relèvent de leur mandat et d'être à l'avant-garde de la recherche sur les maladies de l'homme et de l'animal.

7.104 Les projets d'immobilisations obligent l'État à débourser des capitaux importants au moment de leur réalisation et à assumer, pendant tout le cycle de vie de l'actif immobilisé, des coûts d'exploitation et d'entretien souvent encore plus élevés. Il est essentiel que les ministères fournissent au Conseil du Trésor les meilleures estimations possibles des coûts totaux d'un projet avant que celui-ci ne soit irréversiblement entamé. Il est tout aussi important qu'en approuvant les projets, le Conseil du Trésor fasse savoir clairement ce qui a été approuvé, de façon que les cadres supérieurs puissent être tenus responsables des résultats des projets. Dans le projet qui nous occupe, nous avons noté des lacunes dans ces deux domaines.

7.105 Nous avons relevé un certain nombre de cas où les politiques et les approbations du Conseil du Trésor n'ont pas été respectées et où la mise en oeuvre du projet s'est déroulée sans souci de l'économie et de l'efficience. L'information fournie au Conseil du Trésor pour approuver et contrôler ce grand projet d'État n'était pas à la hauteur de ce qu'exigent les politiques du Conseil du Trésor. Le projet a été entamé sans une analyse satisfaisante des besoins et des options. Le cadre organisationnel et les processus décisionnels appliqués à la gestion de ce projet complexe ont été à l'origine de retards coûteux et d'un environnement turbulent de gestion du projet. À notre avis, ces facteurs ont engendré un manque d'économies dont le montant totalise au moins cinq millions à dix millions de dollars.

Le défi consistera à tirer pleinement parti de ces installations dispendieuses de classe internationale
7.106 À la fin de notre vérification sur place, de nombreux postes scientifiques clés n'avaient pas encore été pourvus. En outre, les ministères clients travailleront dans un domaine qui ne leur est pas familier lorsqu'ils commenceront à former leur personnel professionnel aux procédures de laboratoire de niveau 4, ce qui n'a jamais encore été fait au Canada. Qui plus est, il faudra que les tests des systèmes et des systèmes intégrés prévus dans le programme de mise en service soient tous terminés avec succès avant que les laboratoires ne puissent entrer en exploitation pour de bon. Tout retard important dans l'exécution de ces étapes cruciales aboutirait à des inconvénients majeurs pour les ministères puisque ceux-ci seraient contraints de continuer à exploiter des installations parallèles dans la région de la capitale nationale pour assurer leur capacité d'intervention.

7.107 Les ministères clients devront aussi s'efforcer d'optimiser l'utilisation de la superficie de laboratoire qu'offre le complexe, superficie qui dépasse actuellement le taux prévu d'occupation, et étudier des possibilités de recouvrement des coûts.

7.108 Il s'agit du premier complexe dans le monde à regrouper des laboratoires qui s'intéressent à la fois aux maladies de l'homme et aux maladies de l'animal. Le complexe devrait accroître les possibilités de solutions scientifiques en permettant aux spécialistes de la santé humaine et animale de travailler en collaboration dans une installation unique. La cohabitation des deux fonctions a aussi probablement donné lieu à des économies par rapport à la construction de deux installations distinctes.

7.109 Cependant, une fois que les laboratoires seront entièrement opérationnels, des problèmes d'exploitation éventuels pourraient poser un défi. Certes, le complexe pourrait créer des possibilités de synergie et de collaboration entre les ministères, mais il se pourrait que les priorités fonctionnelles concurrentes qui ont causé des difficultés durant sa conception et sa construction viennent contrecarrer la matérialisation de ces avantages. Nous continuerons à suivre les mesures prises par les cadres supérieurs en vue de tirer le plein rendement de ces nouvelles installations.


À propos de la vérification

Objectifs

La vérification avait pour objectif de déterminer si le complexe de laboratoires construit répond aux exigences qui avaient été formulées par les ministères clients et aux politiques et approbations du Conseil du Trésor concernant le projet, et si la construction s'est déroulée avec un souci de l'économie et de l'efficience.

Étendue

Nous avons examiné les principaux aspects de la conception et de la construction de ce grand projet d'État en nous reportant aux phases généralement acceptées d'une bonne planification et d'une bonne mise en oeuvre du projet. Plus particulièrement, nous avons examiné la définition des besoins et la formulation des exigences, l'analyse des options, la définition du projet et son approbation, la conception et l'adjudication des contrats, les phases de construction ainsi que celle d'agrément et de mise en service. Cette dernière n'était pas terminée au moment où prenait fin notre vérification sur place.

Notre vérification n'était pas tant destinée à répondre à la question de savoir si les laboratoires de Winnipeg sont sécuritaires qu'à vérifier la mesure dans laquelle l'équipe du projet pouvait faire la preuve que les laboratoires sont sécuritaires et que la conception et la construction du complexe se sont faites dans le respect intégral des Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire de Santé Canada. Notre vérification a porté notamment sur l'établissement d'un processus formel d'examen et de signature par lequel les autorités compétentes attestent de la biosécurité des laboratoires. Nous avons également examiné les rôles et les responsabilités du Bureau de biosécurité de Santé Canada et du Service de sécurité et de confinement des dangers biologiques d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Critères

Nos critères d'évaluation sont tirés des méthodologies établies par le Bureau pour la vérification des projets d'immobilisations et des politiques du Conseil du Trésor sur la gestion des grands projets d'État. Les lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire de Santé Canada et les Normes sur le confinement des installations vétérinaires d'Agriculture et Agroalimentaire Canada ont fourni les critères de l'évaluation du projet qui ont trait à la biosécurité.

Méthode

Nous avons rencontré les principaux responsables de programme et de projet des ministères clients et nous avons examiné les dossiers et les documents pertinents au projet. Notre vérification sur place a consisté à visiter le nouveau complexe de Winnipeg, les laboratoires actuels de Santé Canada, à Ottawa et à Winnipeg, les laboratoires actuels d'Agriculture et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments de la région de la capitale nationale, ainsi que les Centres for Disease Control and Prevention (centres d'épidémiologie) à Atlanta, en Géorgie, et le Foreign Animal Disease Diagnostic Laboratory (laboratoire de diagnostics des maladies animales exotiques) du U.S. Department of Agriculture (ministère de l'Agriculture des États-Unis) à Plum Island, dans l'État de New York.

Équipe de vérification

Vérificateur général adjoint : Shahid Minto
Directeur principal : Reno Cyr
Directeur : Joe Martire

Bernard Battistin
Rosemary Marenger

Pour obtenir de l'information, veuillez communiquer avec M. Reno Cyr.