Les déplacements aux termes des directives sur le service extérieur

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Vérificateurs généraux adjoints : Richard B. Fadden et David H. Roth
Vérificateur responsable : Trevor R. Shaw

Introduction

Le pourquoi de la présente vérification

8.5 Les fonctionnaires en poste à l'étranger ont droit à des indemnités que leur confèrent les directives sur le service extérieur. Celles-ci comportent des dispositions sur le logement, la réinstallation, les études, les congés et les déplacements dont se prévalent les employés du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et ceux d'autres ministères. En vertu de celles-ci, les employés peuvent organiser eux-mêmes leurs déplacements en s'adressant au Service des voyages du gouvernement ou à n'importe quelle autre agence de voyage au Canada ou à l'étranger.

8.6 Dans notre rapport de 1994 à la Chambre des communes, nous observions que le Ministère avait mené une enquête sur les demandes de remboursement de dépenses de voyage irrégulières soumises par des employés aux termes des directives sur le service extérieur. De plus, nous avons exprimé notre intention de faire un suivi des mesures prises par le Ministère pour rectifier le problème. Nous nous sommes aussi engagés à produire un rapport sur le résultat de nos activités en mai 1995.

8.7 Parce que des irrégularités avaient été décelées au chapitre des dépenses de voyage, nous avons voulu examiner les mesures correctrices prises par le Ministère à ce chapitre, et les améliorations apportées à la gestion des déplacements. Nous avons aussi voulu considérer les conséquences des modifications apportées ultérieurement aux directives sur le service extérieur, en particulier en ce qui concerne les déplacements des fonctionnaires fédéraux mutés à l'étranger.

Objectifs de la vérification

8.8 La vérification avait pour objet de fournir au Parlement une certitude quant aux mesures prises par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international à la suite des demandes de remboursement irrégulières présentées par des employés du service extérieur. Cette vérification de suivi devait permettre d'établir si les mécanismes de reddition des comptes et de contrôle des dépenses de voyage s'étaient améliorés depuis la découverte, en 1988, des premiers abus au chapitre des dépenses de voyage. Plus précisément, elle devait permettre :

8.9 Le présent chapitre se veut donc une suite logique du chapitre 22 de notre rapport de 1994, Affaires étrangères et Commerce international Canada - Gestion et contrôle financiers .

Étendue et méthode

8.10 Pour cette vérification de suivi, nous nous sommes servis de l'information fournie par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) et par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Nous n'avons jamais obtenu les noms des employés mis en cause.

8.11 Nous avons examiné l'éventail des demandes de remboursement sur lesquelles a porté l'enquête de l'Unité des projets spéciaux du MAECI. Nous nous sommes aussi penchés sur la suite qu'a eue l'enquête et nous avons évalué le processus disciplinaire et le traitement réservé aux employés concernés du Ministère.

8.12 Pendant leurs recherches, les enquêteurs ont également découvert des irrégularités dans les demandes de remboursement présentées par des employés d'autres ministères et organismes (25 employés de l'Agence canadienne de développement international (ACDI) et 17 employés de dix autres organismes). C'est à ces organismes qu'il revenait de prendre des mesures disciplinaires à l'égard de leurs employés. Nous les avons donc écartés de la présente vérification.

8.13 Nous avons examiné les méthodes d'enquête utilisées par l'Unité des projets spéciaux, en particulier pour cerner le problème, mener l'enquête préliminaire, définir les critères de l'enquête et en élargir l'étendue. Avec le Ministère, nous avons étudié le rôle dans cette affaire des compagnies aériennes, de l'Association du transport aérien international, des agences de voyage et de la Gendarmerie royale du Canada.

8.14 Nous avons examiné les pouvoirs juridiques et délégués du sous-ministre des Affaires étrangères pour ce qui est de définir les normes et les sanctions à appliquer dans des cas d'inconduite ou de manquement à la discipline. Nous avons étudié le mandat du comité de discipline du Ministère de même que les critères et le processus disciplinaire qu'il a observés. Avec le MAECI, nous avons passé en revue l'intervention du Secrétariat du Conseil du Trésor et des conseillers juridiques du ministère de la Justice. La première partie du présent chapitre, soit les paragraphes 8.19 à 8.44, est consacrée aux résultats de la vérification sur les irrégularités repérées au chapitre des déplacements et sur les mesures disciplinaires appliquées.

8.15 Nous avons également passé en revue les pratiques de gestion du Ministère en matière de gestion des voyages. Nos observations sont consignées aux paragraphes 8.45 à 8.51.

8.16 Étant donné que les irrégularités commises mettaient surtout en cause les directives 45 (Congé de service à l'extérieur) et 50 (Aide au déplacement pour le service à l'extérieur) sur le service extérieur, nous avons analysé les modifications apportées en 1993 aux dispositions régissant les déplacements faits aux termes de ces deux directives. Notre vérification n'a pas comporté d'examen détaillé de l'utilisation de celles-ci. Afin d'en illustrer la complexité, nous nous sommes plutôt concentrés sur la description de ces directives et de l'information à l'origine des changements qui y ont été apportés, de même que sur les directives régissant le service extérieur en général. La deuxième partie du présent chapitre, soit les paragraphes 8.52 à 8.108, est donc consacrée aux résultats de ce travail.

Observations et recommandations

Mesures prises à l'égard des irrégularités découvertes dans l'utilisation des indemnités de déplacement

Renseignements généraux
8.17 Les déplacements de fonctionnaires sont nécessaires pour l'exécution des programmes du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Tous les ans, le Ministère traite environ 23 000 demandes de remboursement de dépenses de voyage. D'ailleurs, en 1993-1994, il a dépensé 32 millions de dollars au chapitre des voyages en service commandé et 14,5 millions environ à des dépenses connexes, autorisées par sept directives sur le service extérieur, dont trois en particulier, soit la directive 50 sur l'aide au déplacement pour le service à l'extérieur, la directive 45 sur le congé de service à l'extérieur et la directive 51 sur les déplacements pour réunion de famille. En outre, d'autres dépenses de voyage sont visées par la directive 15 sur les déplacements associés à une réinstallation.

8.18 En 1988, le Ministère a découvert que certains employés présentaient, aux termes des directives sur le service extérieur (DSE), des demandes de remboursement de dépenses de voyage accompagnées de fausses pièces justificatives. Il a donc amorcé une enquête qui, après examen de 281 demandes de remboursement, a confirmé l'existence d'un problème. Le Ministère a décidé d'étendre l'enquête. Celle-ci devait alors couvrir aussi des demandes de remboursement présentées durant une période de 51 mois, soit du 1er avril 1986 au 30 juin 1990.

L'enquête a été bien délimitée
8.19 Une Unité des projets spéciaux a été mise sur pied pour faire enquête sur les demandes de remboursement. Elle fait maintenant partie, depuis 1993, du Bureau de l'inspecteur général du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

8.20 L'Unité a défini des critères, élaboré un plan d'action et choisi une méthode d'enquête. Après une évaluation initiale, elle a déterminé que 45 000 demandes de remboursement de dépenses de déplacement répondaient aux critères et correspondaient à la période visée par l'enquête. Certaines concernaient des voyages effectués aux termes des directives sur le service extérieur, d'autres des voyages en service commandé effectués à partir d'Ottawa. Ce chiffre ne comprenait pas toutes les demandes de remboursement de voyages liés à l'exécution des programmes, dont le point de départ était une mission à l'étranger.

8.21 Entre autres, l'Unité a cherché à obtenir confirmation que les billets d'avion dont les employés avaient demandé le remboursement avaient été utilisés. Elle a donc envoyé 20 449 billets d'avions à 125 compagnies aériennes. De ce nombre, elle en a envoyé 5 955 à l'Association du transport aérien international pour vérifier s'ils avaient ou non été annulés ou vendus. À partir de l'information qu'elle a recueillie, l'Unité a prélevé en tout 7 269 demandes de remboursement de dépenses de voyages afin d'examiner en détail les déplacements par avion. À l'issue de ces démarches, elle a trouvé 482 demandes de remboursement problématiques qui mettaient en cause 269 fonctionnaires et 5 non-fonctionnaires.

Le processus d'enquête a été approfondi et les résultats sont soutenables
8.22 Dès que l'Unité découvrait une anomalie dans une demande de remboursement, on informait l'employé en cause que sa demande faisait l'objet d'un examen. On lui permettait alors de fournir d'autres renseignements, de revoir la demande avec des représentants de l'Unité et d'en accepter les conclusions ou de s'y opposer. Tous les employés ont reconnu le bien-fondé des résultats, ont fourni par la suite des demandes corrigées et dûment étayées et remboursé l'argent qu'ils devaient à l'État. Ainsi, on a recouvré une somme totale de 567 200 $ à l'égard de toutes les demandes qui se sont avérées irrégulières, y compris auprès de personnes à la retraite.

8.23 La pièce 8.1 présente les données sur le nombre de personnes en cause. L'enquête a révélé diverses manipulations dont les auteurs tiraient des avantages pécuniaires. La plus fréquente consistait à monnayer un billet, c'est-à-dire à se faire rembourser le prix d'un billet plein tarif en classe économique, alors qu'on avait en réalité payé et utilisé le prix d'un billet à rabais. L'Unité a aussi découvert que quatorze des fonctionnaires qui avaient soumis des demandes de remboursement de dépenses de voyage n'avaient même pas voyagé du tout.

8.24 L'Unité n'a trouvé aucune anomalie dans les dispositions de voyage prises par l'intermédiaire du Service des voyages du gouvernement. Les irrégularités venaient des réservations faites par l'entremise d'autres agences de voyage au Canada et à l'étranger.

8.25 L'enquête a permis de découvrir que 274 personnes avaient présenté des demandes de remboursement irrégulières. De ce nombre, 227 étaient des employés du ministère des Affaires étrangères, ce qui représente environ 10 p. 100 des quelque 2 200 employés du Ministère visés par la DSE sur les voyages. Sur les 227 fonctionnaires du Ministère, 24 employés impliqués avaient déjà pris leur retraite. Les 203 autres employés venaient de tous les niveaux hiérarchiques du Ministère : 125 employés de soutien, 55 agents et 23 administrateurs.

8.26 Les employés qui avaient soumis des demandes de remboursement irrégulières travaillaient dans 67 bureaux différents, dont certains au Canada. Dans 58 p. 100 des cas, les auteurs des demandes irrégulières venaient de régions sans privation comme Ottawa, Londres, Paris et Canberra et, dans environ 22 p. 100 des cas, les demandes venaient d'employés en poste dans des missions parmi les plus difficiles.

8.27 Les demandes de remboursement irrégulières présentées l'ont été aux termes de sept des directives sur le service extérieur, mais surtout aux termes de la directive 45 sur le congé de service à l'extérieur et de la directive 50 sur l'aide au déplacement pour le service à l'extérieur. Les demandes présentées en vertu de ces deux directives ont été à l'origine de 57 p. 100 des irrégularités et de 82 p. 100 du montant total recouvré (ou 462 561 $) auprès de toutes les personnes en cause, y compris des employés du Ministère. Devant cet état de fait, nous avons décidé d'examiner les changements ultérieurs apportés en 1993 à ces directives sur le service extérieur.

Les rapports d'enquête ont été constants et complets
8.28 Tout au long de l'enquête, l'Unité des projets spéciaux a tenu la haute direction au courant de l'évolution de ses démarches. Le Ministère a aussi transmis des récapitulatifs au Secrétariat du Conseil du Trésor, au Bureau du contrôleur général, au Bureau du vérificateur général, au ministère de la Justice et à la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

8.29 Pendant l'enquête, le sous-ministre des Affaires étrangères de l'époque a aussi veillé à ce que tous les employés soient tenus au courant des événements. Un bulletin d'information a circulé pour rappeler le code d'éthique aux employés et souligner la gravité de toute inconduite. Aucun nom n'a jamais été révélé.

8.30 L'Unité des projets spéciaux a envoyé l'information sur les demandes à la GRC pour examen. Celle-ci a choisi 15 de ces demandes pour mener sa propre enquête et décider s'il y avait suffisamment de preuves pour déposer des accusations criminelles. Après avoir consulté initialement le procureur de la Couronne de l'Ontario, la GRC a fait enquête pendant 13 mois. Elle en a conclu qu'il était possible de porter des accusations et s'est tournée à nouveau vers le procureur de la Couronne de l'Ontario. En avril 1993, celui-ci a décidé de ne pas porter d'accusation pour les raisons suivantes : délai préparatoire au procès; toutes les personnes en cause avaient restitué les montants injustement reçus; il n'était pas dans l'intérêt public de s'embarquer dans de longues et coûteuses poursuites; les incidents, selon lui, étaient surtout une affaire entre l'employeur et les employés.

8.31 L'enquête du Ministère a surtout porté sur les déplacements par avion. Dans le cas des demandes de remboursement irrégulières, ils ont aussi vérifié si les autres dépenses de voyage, outre les billets d'avion, étaient légitimes. Ils ont apporté de nombreuses modifications et récupéré les fonds. Cependant, pour des raisons pratiques, l'Unité ne pouvait examiner toutes les demandes concernant le transport aérien. Par exemple, les compagnies aériennes ne conservent des données sur les billets utilisés que pendant une période limitée, généralement de 18 à 24 mois. Dans le cas des demandes dont le billet d'avion était trop ancien, les enquêteurs n'ont pu faire les vérifications qui s'imposaient. Exception faite de ces demandes, l'enquête a sans doute mis au jour la plupart des anomalies, compte tenu de ses limites.

Conclusions
8.32 Dans les circonstances, l'enquête, dans les limites de son étendue, a été bien menée. Le Ministère n'ayant pas terminé l'examen des demandes de remboursement présentées par les employés depuis juin 1990, nous ne savons pas si ont cessé les cas où l'on a encaissé de l'argent contre des billets d'avion. Le Ministère nous a avisés qu'il avait commencé une vérification de suivi en novembre 1994 et qu'il prévoyait l'achever en 1995.

Le processus disciplinaire était adéquat
8.33 Même si l'on a recouvré 567 200 dollars qui correspondaient aux montants repérés, il n'en reste pas moins que le fait de présenter une demande de remboursement irrégulière constitue une faute professionnelle. La haute direction a demandé au comité de discipline du Ministère de prendre les mesures qui s'imposaient. On a commencé par définir clairement et avec concision le mandat du comité, présidé par le sous-ministre adjoint, (Personnel). On a aussi créé un sous-comité, sous la présidence de l'inspecteur général adjoint, qui devait se charger des irrégularités relatives aux déplacements. On a établi des critères régissant la discipline après consultation avec la haute direction du Ministère et le service des relations de travail du Secrétariat du Conseil du Trésor.

8.34 Sur réception du dossier de l'Unité des projets spéciaux, le sous-comité et le secrétaire du comité de discipline passaient l'affaire en revue. Soucieux d'appliquer le principe de l'équité, on organisait des entrevues avec les personnes concernées. Celles-ci devaient répondre à une série de questions, les mêmes pour toutes, et avaient ainsi l'occasion de présenter leur version des faits. À l'administration centrale, à Ottawa, ces entrevues étaient menées par le sous-comité et, dans les missions à l'étranger, elles l'étaient par le chef de mission ou un autre haut responsable.

8.35 Deux cent vingt-sept employés ont été à l'origine des demandes de remboursement irrégulières. Entre-temps, 24 d'entre eux avaient pris leur retraite. Le comité de discipline est intervenu pour 199 de ces personnes et il ne restait plus, au moment de notre vérification, que quatre affaires en suspens.

On a tenu des dossiers sur les mesures disciplinaires appliquées
8.36 La pièce 8.2 présente une récapitulation des mesures disciplinaires recommandées par le comité. Cent quarante-et-un employés ont été suspendus pendant un total de 1 543 jours, ce qui représente une retenue sur les salaires d'environ 276 000 dollars. Chacun des employés devait garder dans son dossier un rapport de suspension durant deux ans, après quoi le rapport devait être retiré. D'autres mesures disciplinaires ont été prises contre les autres employés en cause. Par exemple, cinquante-trois ont été réprimandés et cinq ont dû payer des amendes totalisant 12 750 dollars. Aucune mesure n'a été prise contre les 24 retraités, mais ils ont dû rembourser les fonds.

8.37 Lorsqu'il décidait d'imposer des mesures disciplinaires, le comité a appliqué des critères spécifiques et tenu compte de circonstances aggravantes ou atténuantes telles l'occupation d'un poste de confiance, l'ancienneté, l'existence ou l'absence de dossier disciplinaire antérieur et la restitution des fonds. Le comité a suggéré aux gestionnaires hiérarchiques de suspendre sans paye les employés en cause, pendant un certain nombre de jours consécutifs. Il est donc revenu à chaque gestionnaire hiérarchique de donner suite ou non à la recommandation du comité en faveur de la suspension.

8.38 Officiellement, la position du Ministère a été la suivante : les employés sanctionnés devaient passer leur période de suspension sans solde hors des locaux de l'employeur et avaient 90 jours pour le faire. La recommandation du comité de discipline en faveur de la suspension a été communiquée à tous les gestionnaires ou supérieurs hiérarchiques des employés en cause. C'est à eux qu'il est revenu d'agir et de veiller à ce que la suspension ait lieu conformément à la politique en vigueur. Une fois les décisions prises à ce sujet, ils devaient communiquer les dates de la suspension au comité de discipline, et ce dernier devait s'assurer que le montant approprié allait être retranché de la paye des employés.

Les mesures disciplinaires contribuent à réduire le risque de récidive, mais leur effet pourrait être éphémère
8.39 Concrètement, une suspension implique deux conséquences indissociables : premièrement, l'employé ne peut se trouver sur les lieux de travail pendant la durée de la suspension; deuxièmement, un montant équivalant à sa période d'absence est déduit de sa paye. La suspension n'a rien changé aux indemnités prévues aux termes des directives sur le service extérieur.

8.40 Nous avons pu établir que les déductions de salaire avaient été appliquées et que le Ministère avait suivi les procédures prescrites par le gouvernement pour les mesures disciplinaires. Ces procédures n'exigeaient pas que l'on fasse savoir au comité de discipline si toutes les suspensions s'étaient effectuées conformément à la politique officielle du gouvernement.

8.41 À notre avis, la discipline est un facteur qui influence les comportements et les valeurs. Étant donné la gravité des irrégularités dans les demandes de remboursement des dépenses de voyage et l'intérêt du public à cet égard, on aurait pu prendre d'autres mesures spéciales pour qu'il ne fasse aucun doute, pour toutes les personnes concernées, que les suspensions avaient été dûment appliquées. Le fait d'exiger des superviseurs la confirmation que les suspensions avaient été appliquées aurait procuré une certitude complète.

8.42 L'imposition de mesures disciplinaires pour corriger un comportement douteux et un abus de confiance peut avoir un effet dissuasif puissant. Outre la perte de revenus, les mesures disciplinaires limitent de beaucoup les possibilités d'avancement.

Conclusions
8.43 Dans cette affaire, le processus disciplinaire a été bien géré et des sanctions diverses ont été imposées selon les cas d'inconduite.

8.44 Cette affaire d'irrégularités dans les demandes de remboursement de dépenses de voyage, qui a entaché l'histoire du Ministère, est un incident clos. Il ne nous reste plus qu'à tourner la page et à concentrer notre énergie sur le présent et l'avenir.

Il faut améliorer la gestion des déplacements
8.45 Le type d'irrégularités commises ne pourraient être entièrement prévenues au moyen de contrôles officiels. Fondamentalement, elles révèlent des lacunes dans la culture du Ministère, ce qui comprend le code d'éthique et les valeurs. L'enquête et les mesures disciplinaires adoptées ont beaucoup contribué à renforcer le contrôle exercé par le Ministère, mais elles n'en restent pas moins intrinsèquement temporaires.

8.46 Outre cette enquête et les mesures disciplinaires, nous comptions trouver une amélioration dans la gestion des déplacements par le Ministère. Cela aurait permis d'éviter que ce genre de problème se reproduise et aurait fourni l'assurance que les voyages sont bien gérés, tant sur le plan de l'efficacité que de l'efficience.

8.47 Depuis 1992, les résultats des vérifications attirent l'attention sur les lacunes perpétuelles de la gestion des voyages. Par exemple, ils signalent le peu de rapports à la direction sur l'utilisation et les coûts des déplacements, le taux élevé d'erreurs dans la préparation et le traitement des demandes de remboursement des dépenses à ce chapitre, le peu d'analyses effectuées sur les taux d'erreurs, le retard accumulé dans la vérification des comptes visés par les demandes, les lacunes de cette vérification, les montants excessifs des avances, et les demandes de remboursement présentées au-delà des délais autorisés.

8.48 Le Ministère nous a indiqué qu'il avait récemment instauré des mesures pour améliorer sa gestion des voyages. Ainsi, le Ministère vient-il tout juste de terminer une vérification interne dont le rapport final devrait être présenté sous peu.

8.49 Selon nous, ce qu'il faut au Ministère pour améliorer la gestion des voyages en général, c'est un plan exhaustif, qui ait l'appui de la haute direction. Ce plan doit viser à renforcer le processus décisionnel à tous les niveaux et le degré de contrôle global.

8.50 Entre autres, ce plan pourrait redéfinir l'administration des déplacements, déterminer les besoins d'information et de rapports de gestion, évaluer les besoins de voyages et les moyens d'en réduire les coûts, prévoir un échantillonnage statistique des demandes de remboursement des dépenses à ce chapitre afin d'en tirer une évaluation du risque. Ce plan pourrait également recommander une formation plus soutenue des employés de sorte qu'ils soient davantage en mesure de préserver l'efficacité des programmes tout en réduisant les coûts au montant minimum.

8.51 Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international devrait poursuivre la mise en oeuvre d'un plan afin d'améliorer sa gestion des déplacements.

Modification des directives sur le service extérieur

Introduction
8.52 Comme nous l'avons fait remarquer plus tôt au paragraphe 8.27, la quasi-totalité des demandes de remboursement irrégulières décelées par le Ministère découlaient de sept des directives sur le service extérieur, en particulier de celles qui traitent des voyages associés aux réinstallations, du transport en période de congé et de l'aide au déplacement. Dans le cadre de nos travaux sur les mesures qu'a prises le Ministère pour corriger les irrégularités, nous avons dû approfondir les modifications apportées en 1993 aux directives 45 (Congé de service à l'extérieur) et 50 (Aide au déplacement de vacance pour le service à l'extérieur). Nous n'avons pas procédé à un examen détaillé de l'utilisation de ces directives, mais nous avons passé en revue le processus et l'information dont le Ministère s'était inspiré pour modifier ces directives, en particulier, et les autres directives sur le service extérieur en général. Ce faisant, nous avons étudié les conséquences des modifications apportées au régime des indemnités.

Renseignements généraux
8.53 Déjà, en 1994, nous soulignions, dans notre rapport, la complexité des directives sur le service extérieur. La description ci-dessous vient appuyer cette affirmation, en particulier pour ce qui est des directives 45 et 50. Pour plus de renseignements et une description détaillée de ces directives DSE, le lecteur peut se reporter au chapitre 22 de notre rapport de 1994.

8.54 Les directives sur le service extérieur ne sont pas récentes. Au cours des ans, elles ont évolué et, de règlements imposés par l'administration fédérale, elles sont devenues des droits négociés. Tous les trois ans, le Conseil du Trésor, en sa qualité d'employeur, en négocie les modalités avec les représentants des fonctionnaires.

8.55 Les directives sur le service extérieur (DSE) s'appuient sur trois concepts fondamentaux : la comparabilité, l'encouragement et l'incitation, et le lien avec l'exécution des programmes . L'incitation, par exemple, consiste à susciter de l'intérêt pour le service extérieur en offrant aux employés et à leur famille une compensation en échange d'éventuels inconvénients et désagréments dans d'autres pays. Une prime de service extérieur (directive 56) est versée à tous les employés en poste à l'étranger. Cette indemnité non imposable augmente selon le groupe salarial, la situation familiale et la durée du service extérieur. Les employés en poste à l'étranger peuvent aussi se prévaloir d'un congé supplémentaire (directive 45), calculé d'après le nombre de mois de services fournis à l'extérieur, et bénéficier d'une aide au déplacement de vacance (directive 50) pour eux-mêmes et pour les membres de leur famille résidant à l'étranger. Cette dernière aide s'adresse surtout aux employés en poste dans des régions difficiles.

8.56 La pièce 8.3 illustre les dépenses nettes effectuées aux termes des directives sur le service extérieur, ventilées selon le principe directeur qui les sous-tend. Globalement, les DSE abordent jusqu'à 100 aspects différents de la vie à l'étranger, dont le logement, la réinstallation, la santé, les études, les indemnités et le déplacement. Quelque 1 700 fonctionnaires canadiens travaillant à plus de 140 endroits dans le monde, dans des conditions plus ou moins difficiles, peuvent s'en prévaloir. Soixante-quatre pour cent environ de ces personnes relèvent du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

8.57 La nouvelle orientation des directives 45 et 50 date de 1982. Auparavant, diverses dispositions prévoyaient des congés « canadiens » pour aider les fonctionnaires et leur famille à revenir au Canada. Il s'agissait de permettre à ces personnes de refaire connaissance avec le Canada et de reprendre des forces dans un contexte connu, loin des difficultés et restrictions d'un milieu étranger. Les directives 45 et 50 sur le service extérieur n'ont plus, comme autrefois, pour unique objet d'assurer la « recanadianisation » des fonctionnaires envoyés à l'étranger. De nos jours, ces employés peuvent prendre leurs vacances et aller se reposer n'importe où dans le monde, et ne sont pas tenus de revenir au Canada pour pouvoir profiter de leurs indemnités.

8.58 Pour encourager le service à l'extérieur, la directive 45 accorde aux employés un congé additionnel de 10 jours par année de service à l'étranger. Les employés ont le choix entre trois options : utiliser leurs crédits de congé; toucher, contre leurs crédits de congé, une somme en espèces calculée d'après leur traitement au 31 mars; ou échanger dix jours de crédits de congés contre une indemnité de transport. Le versement en espèces est imposable et nécessite l'envoi d'un feuillet T4 ou d'un T4A.

8.59 Les employés qui choisissent la troisième option, l'échange contre une indemnité de transport, reçoivent une indemnité équivalant à 85 p. 100 du coût d'un billet d'avion aller-retour plein tarif en classe économique entre Ottawa et le poste d'attache. Pour pouvoir échanger son indemnité contre un billet d'avion, l'employé doit présenter la demande tandis qu'il est encore en poste à l'étranger. Cette option n'est pas imposable. Cette indemnité peut être touchée en plusieurs tranches dans l'année ou servir à plus d'une personne. Par exemple, un employé peut profiter de l'indemnité pour se rendre auprès de sa famille ou pour faire venir des membres de sa famille à la mission. Bien que le montant de l'indemnité soit calculé d'après le prix des billets d'avion, il n'est pas obligatoire, pour en bénéficier, de voyager par ce mode de transport.

8.60 Tous les modes de transport commerciaux sont admissibles à un remboursement en vertu de la DSE 45. Le Ministère établit une distinction entre les modes de transport commerciaux et récréatifs. Par exemple, les coûts rattachés à l'utilisation de fourgonnettes de camping ou de maisons flottantes comme moyens de transport sont admissibles, alors qu'ils ne le sont pas dans le cas de canots et de bicyclettes, qui font partie de la catégorie des moyens de transport récréatifs. Les employés qui obtiennent une avance doivent en rendre compte et la régler dès le retour du voyage ou dans l'année qui suit le versement de l'avance.

8.61 Les congés de service à l'extérieur non utilisés peuvent être accumulés. Le DSE 45 prévoit qu'ils peuvent être pris ou monnayés en tout temps. En 1993-1994, les dépenses qui ont découlé de l'application de la DSE 45 se sont élevées à 3,7 millions de dollars.

8.62 La DSE 50, qui date de 1982, prévoit une aide au déplacement qui permet aux employés et à leurs personnes à charge de revenir au Canada ou de visiter un autre pays pendant leur séjour à l'étranger ou à la fin de celui-ci, dans les limites du montant total de l'indemnité.

8.63 Pendant leur séjour à l'étranger, les employés en poste et leurs personnes à charge ont droit, aux termes de la DSE 50, à la valeur d'un voyage aller-retour entre la mission et l'administration centrale (normalement à Ottawa). Le nombre de ces voyages payés dépend du degré de difficulté attribué à la mission. L'aide au déplacement pour vacances est réservée aux personnes en poste à l'étranger et pendant une période déterminée au-delà de laquelle elle n'est plus disponible. Pour bénéficier de son indemnité aux termes de la DSE 50, l'employé doit prendre un minimum de 10 jours de congé. En 1993-1994, les dépenses au titre de la DSE ont totalisé 8,4 millions de dollars.

Modifications apportées aux directives 45 et 50 sur le service extérieur
8.64 En 1993, on a modifié les modalités d'application de la directive 45. Les employés sont maintenant autorisés à monnayer leurs crédits de congé plusieurs fois par an. En outre, ils ont jusqu'à un an pour justifier les avances d'indemnité de transport. Le montant de cette indemnité a été fixé à 85 p. 100 du prix d'un billet d'avion aller-retour plein tarif en classe économique entre la mission et l'administration centrale. Auparavant, ce montant pouvait atteindre l'équivalent de 100 p. 100 du coût d'un tel billet.

8.65 En 1993, on a réintitulé la DSE 50 « Aide au déplacement de vacance pour le service à l'extérieur ». On y a ajouté le choix d'une autre indemnité de déplacement de vacance à l'égard de laquelle l'employé n'est pas tenu de rendre des comptes en présentant des pièces justificatives. Un employé peut maintenant choisir n'importe quelle destination, mais le Ministère s'attend normalement que l'indemnité accordée au titre de la DSE soit utilisée pour voyager ailleurs qu'à proximité de la mission (généralement une ville). Les employés peuvent rester dans le pays où ils séjournent ou en sortir.

8.66 Les employés ont encore la possibilité de demander le remboursement de leurs dépenses de voyage, jusqu'à concurrence du plafond établi, soit l'équivalent du prix d'un billet d'avion aller-retour plein tarif en classe économique. Pour toucher l'indemnité, les employés doivent rendre des comptes, c'est-à-dire présenter des reçus pour justifier leur demande de remboursement de frais de voyage. S'ils choisissent un paiement non soumis à justification, ils reçoivent l'équivalent de 80 p. 100 du prix d'un billet d'avion aller-retour plein tarif, en classe économique, entre la mission et l'administration centrale (ou 90 p. 100 en cas d'escale normale) par personne (l'employé et chacune de ses personnes à charge). Les employés ne sont pas tenus de présenter des reçus pour justifier ces versements. Bien qu'il ne soit pas nécessaire de justifier l'utilisation des fonds en vertu de la nouvelle option, le sous-ministre peut demander confirmation que le voyage a bien été effectué.

8.67 Si l'option précédente exigeait que les fonds servent à couvrir des dépenses de transport et d'escale, la nouvelle option, elle, permet d'utiliser les fonds pour couvrir n'importe quelle dépense de vacances. Par exemple, les familles peuvent s'en servir pour acheter des forfaits, ce qui, auparavant, n'était pas permis.

8.68 En modifiant ainsi les directives, le Conseil du Trésor espérait donner plus de latitude aux employés, réduire le solde des crédits de congés accumulés aux termes de la DSE 45, diminuer le coût des indemnités autorisées par la DSE 50 et limiter le nombre des demandes de remboursement de dépenses de voyage et donc les coûts administratifs correspondants.

L'obligation de rendre compte des résultats liés à l'application des directives sur le service extérieur
8.69 Le Conseil du Trésor, qui regroupe six ministres, a été établi en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques . En tant qu'employeur, ce comité législatif est responsable en dernier recours des directives sur le service extérieur. Les DSE donnent droit à des indemnités négociées par le Conseil national mixte, indemnités qui doivent être approuvées par le Conseil du Trésor. Le Secrétariat du Conseil du Trésor est responsable de la politique en matière de service extérieur et doit rendre compte de la formulation des directives à cet égard.

8.70 Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international est responsable et comptable de l'administration des DSE. Il traite les demandes et doit également interpréter et appliquer les directives. Le Ministère joue donc un rôle d'exécuteur à cet égard. Il est également chargé de soumettre de l'information sur les DSE au Secrétariat du Conseil du Trésor.

8.71 Dans notre rapport de 1994, nous avons fait part de nos préoccupations au sujet des DSE, à savoir leur complexité, le contrôle des coûts et la mesure dans laquelle elles donnaient les résultats escomptés. Nous avons conclu que, pour apporter des modifications dans ce domaine, il faudrait revoir de fond en comble tout le système des DSE, la manière dont il est géré et les mécanismes de contrôle destinés à garantir l'optimisation des ressources. Dans le cadre de cet exercice, il serait bon que les parties établissent entre elles leurs responsabilités respectives concernant la reddition des comptes pour les résultats des DSE.

8.72 Le Secrétariat du Conseil du Trésor et les ministères dont les employés sont touchés par les directives sur le service extérieur devraient, de concert, mieux clarifier leurs obligations redditionnelles respectives à l'égard des directives sur le service extérieur.

Les paiements non soumis à justification
8.73 Les employés cherchent depuis des années à faire assouplir les modalités d'utilisation des indemnités de voyage. L'idée de pouvoir présenter des demandes de remboursement en vertu de la DSE 50 sans pièces justificatives date d'avant 1989. On ne l'avait pas négociée en raison du report, jusqu'en 1990, de la mise à jour des DSE. C'est en 1993, à l'occasion de cette mise à jour, qu'on a commencé à autoriser le versement d'indemnités sans exiger de pièces justificatives aux termes de la DSE 50.

8.74 En 1991, le Conseil du Trésor a donné au Secrétariat le pouvoir de négocier la possibilité de présenter des demandes de remboursement non soumises à justification aux termes de la DSE 50. Les décideurs ont été avisés que ces nouvelles dispositions les exposeraient à la critique, dans la foulée des irrégularités décelées relativement à certaines dépenses de voyage. Néanmoins, ils ont jugé que la simplicité d'application et la réduction des coûts qui devaient en découler valaient amplement la peine qu'on en prenne le risque.

8.75 Depuis 1993, à titre expérimental, la DSE permet aux employés de recevoir, pour leurs vacances, une somme non soumise à justification équivalant à 80 ou 90 p. 100 d'un billet d'avion aller-retour, plein tarif, en classe économique et de l'utiliser pour voyager par le moyen de transport ou vers la destination de leur choix. L'évaluation des effets du changement a débuté en février 1995, au moment où nous achevions notre vérification.

8.76 Il semble qu'en vertu de la politique antérieure, les employés avaient beaucoup d'argent pour le transport et peu pour les autres dépenses du voyage. L'introduction de versements non sujets à justification aux termes de la DSE 50 résoud ce problème en leur laissant plus de latitude : la directive ne sert plus seulement à couvrir les dépenses de transport, mais elle constitue aussi un moyen pour les employés d'obtenir des indemnités en espèces.

8.77 La DSE 50 autorisant désormais le versement d'indemnités en espèces non soumises à justification, maintes restrictions, que les employés jugeaient injustes ou illogiques relativement à leur utilisation, ont été levées. Ce changement apporte un incitatif plus attrayant pour retenir les employés du service extérieur.

8.78 Entre juin 1993 et juin 1994, les employés ont présenté 1 485 demandes de remboursement aux termes de la DSE 50. Soixante-dix pour cent de ces demandes d'indemnités visaient un paiement non soumis à justification. Cela indique que la nouvelle formule plaît aux employés.

8.79 L'évaluation imminente de la DSE 50 permettra non seulement une meilleure appréciation de l'incidence qu'ont eue les modifications apportées à la DSE, mais suggérera aussi l'orientation générale que l'on devra suivre en vue de simplifier les DSE, de les assouplir et d'en réduire le coût, tout en établissant des mécanismes de reddition de comptes et de suivi des résultats.

On a besoin d'une information et de communications de meilleure qualité
8.80 Nous avons signalé, dans notre rapport de 1994, que les dépenses découlant de l'application des directives sur le service extérieur ont augmenté, en moyenne, dans une proportion de neuf pour cent par employé et par année depuis 1988-1989. Le coût des indemnités accordées aux employés à l'étranger augmente, sans que cela fasse l'objet d'un examen suffisant.

8.81 En septembre 1991, le Conseil du Trésor a autorisé le Secrétariat à négocier les directives sur le service extérieur. Selon les pouvoirs que lui conférait ce mandat, l'augmentation éventuelle du coût des DSE (à l'exclusion des indemnités consacrées au logement) ne devait pas dépasser un certain pourcentage ou un certain montant. Cependant, ce plafond n'était pas destiné à limiter les dépenses effectives au titre des DSE.

8.82 Nous avons établi que les dépenses aux termes de ces directives, sans compter le logement, avaient augmenté au total de 7,7 millions de dollars entre l'exercice financier de 1992 et celui de 1994. En particulier, les dépenses occasionnées par la DSE 50 n'ont pas diminué comme prévu, mais bien augmenté de 16,6 p. 100.

8.83 Même si les données existent, il est difficile de réunir des résultats d'analyses utiles pour la prise de décisions. Nous avons constaté que le Secrétariat du Conseil du Trésor et le Ministère ne partageaient pas les mêmes attentes quant aux coûts et aux économies que devaient engendrer les modifications apportées aux DSE. En 1991, le Secrétariat du Conseil du Trésor prévoyait réaliser des économies au titre de la DSE 50, mais il n'en a pas fait l'estimation parce qu'à son avis, celles-ci étaient liées à l'issue des négociations. On s'attendait aussi à des économies à long terme pour ce qui était des crédits de congés en vertu de la DSE 45, mais celles-là non plus n'ont pas fait l'objet d'estimations plus précises, parce qu'on les considérait trop dépendantes des habitudes des utilisateurs. Le Ministère pensait, sans avoir fait d'analyse détaillée des coûts à ce sujet, que les modifications apportées aux DSE 45 et 50 n'allaient entraîner ni augmentation ni réduction des coûts.

8.84 Bien que les données servent à orienter les négociations au sujet des DSE, ni le Secrétariat du Conseil du Trésor ni le Ministère n'ont prévu de budget pour ces directives au cours des prochaines années. Par conséquent, les dépenses à prévoir, tant au titre de la DSE 45 que de la 50, sont mal connues. Aucun des deux organismes n'a profité de l'occasion qui lui était donnée à la clôture des négociations ou avant la mise en oeuvre des changements pour analyser les tendances liées à l'utilisation et au coût total des DSE. Or, les dépenses rattachées à la DSE 50 ont augmenté de 1,2 million de dollars (16,6 p. 100) au cours des exercices 1993 et 1994, et les dépenses associées à la DSE 45, de 262 000 $ au cours de la même période. D'après nos observations, on ne surveillait pas l'évolution des dépenses ni des tendances liées à l'utilisation des DSE; nous n'avons obtenu non plus aucune explication au sujet de leur augmentation. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a entrepris une analyse à ce sujet. Par exemple, il se peut que le coût de l'application de la DSE 50 ait augmenté en raison d'une hausse approximative de 8 p. 100 du prix des billets d'avion à l'échelle internationale.

8.85 Les DSE sont complexes et les dépenses qui en découlent sont appelées à varier grandement selon de nombreux facteurs. Nous ne prétendons pas qu'il soit aisé de faire une analyse des tendances. Par exemple, elles sont tributaires des fluctuations du dollar canadien. Ainsi, entre 1992 et 1994, le dollar canadien a été déprécié de 14,7 p. 100 par rapport au dollar américain. Elles sont aussi influencées par le coût de la vie à l'étranger, les variations du nombre d'employés en poste à l'étranger, la fréquence des mutations et la situation familiale des employés en poste à l'étranger. Lors de l'examen des DSE, le Secrétariat du Conseil du Trésor et le Ministère auront besoin d'analyses plus approfondies pour évaluer les effets des directives sur leurs activités et les coûts connexes.

8.86 Enfin, même s'il n'est pas essentiel d'établir des comparaisons avec les autres administrations publiques pour savoir comment devraient s'appliquer les directives sur le service à l'étranger au sein du gouvernement canadien, les décideurs pourraient trouver cet exercice utile. D'après nos recherches, il est inhabituel que des administrations publiques accordent à leurs employés en poste à l'étranger des indemnités en espèces, non soumises à justification, pour des vacances ou des crédits de vacances, aussi élevées que celles allouées au Canada.

Il faut mettre sur pied un système d'analyse
8.87 Les directives sur le service extérieur sont complexes et l'on ne possède pas d'information ni de mécanismes d'analyse suffisants pour les gérer. Certes, il ne serait pas facile d'établir de meilleures analyses, et il y aurait des frais à supporter. Pourtant, faute d'un tel mécanisme, les décideurs en sont réduits aux hypothèses et aux conjectures sur les coûts et les avantages. Les paragraphes qui suivent illustrent la complexité que revêt l'analyse des données nécessaire à la présentation de meilleures informations pour la prise de décisions.

8.88 La DSE 45 est conçue de telle sorte qu'elle risque d'entraîner une augmentation des coûts. Ainsi, des crédits de congés accumulés par l'employé alors qu'il est en poste à proximité d'Ottawa peuvent être échangés contre une indemnité de transport d'une valeur plus élevée quand l'employé est détaché dans une mission éloignée.

8.89 D'après les rapports du Conseil du Trésor, en mars 1991, le nombre de crédits accumulés de congés de service à l'extérieur atteignait 78 878 jours. En 1991, le Secrétariat du Conseil du Trésor s'attendait à ce que les modifications proposées favorisent une réduction du solde des crédits de congés aux termes de la DSE 45. L'ampleur de cette réduction allait dépendre, selon lui, des tendances liées à l'utilisation, ce qui fait qu'on ne l'a pas estimée. Par ailleurs, personne ne s'est arrêté non plus à analyser ces tendances.

8.90 D'après les données récentes que nous avons obtenues du Ministère, le solde des crédits accumulés en février 1995 était de 21 736 jours, ce qui semble indiquer une réduction de 57 142 jours ou de 72 p. 100 en quatre ans. Or, il n'est pas certain que les données actuelles, soit 21 736 jours, soient comparables aux données antérieures (78 878 jours). Par exemple, la mutation d'employés du service extérieur dans d'autres ministères ou d'autres organismes pourrait expliquer cet écart. Toutefois, dans la mesure où ces données sont fiables, les fonctionnaires canadiens affectés à l'étranger ont pris (ou transformé en argent ou en indemnités de transport), en moyenne, plus de 20 jours de congés tous les ans aux termes de la DSE 45. Cela représente une fréquence qui équivaut à plus de deux fois celle d'une accumulation réglementaire à raison de 10 jours par an.

8.91 Le manque d'information et d'analyses à ce sujet fait qu'il est difficile d'établir précisément un rapport de cause à effet. Il est possible que les modifications des DSE 45 et 50 aient accéléré le rythme d'utilisation des crédits de congés. D'autres facteurs ont pu aussi intervenir et, pour obtenir des réponses à ces questions, il faudrait de meilleurs mécanismes d'analyse.

8.92 Auparavant, le montant d'une indemnité au titre de la DSE 50 pouvait être l'équivalent du prix d'un billet d'avion aller-retour plein tarif en classe économique; cette indemnité, maintenant réduite, ne peut dépasser 80 ou 90 p. 100 de ce prix. En toute logique, cette réduction devrait entraîner une diminution de l'argent déboursé pour chaque demande, dans une proportion qui pourrait atteindre jusqu'à 20 p. 100 du prix d'un billet d'avion. Pourtant, les dépenses totales aux termes de la DSE 50 n'ont pas cessé d'augmenter d'année en année. Il faudrait analyser cet écart afin de pouvoir l'expliquer. Le Secrétariat du Conseil du Trésor s'est attelé à la tâche.

8.93 Le Secrétariat du Conseil du Trésor a essayé de rendre la DSE 50 moins complexe et d'en réduire les coûts d'administration en faisant appel au principe des avances non soumises à justification. Cependant, avec cette modification, on doit reconnaître qu'il faut mettre en équilibre l'atteinte de ces buts et la possibilité d'un attrait financier pour les employés.

8.94 La pièce 8.4 donne des exemples d'incitatifs financiers attribuables à l'écart entre le prix d'un billet d'avion aller-retour plein tarif en classe économique (entre la mission et l'administration centrale) et celui d'un billet économique à rabais. La différence, s'il y en a une, varie forcément d'un lieu à l'autre et selon les prix des billets d'avion en vigueur au moment de l'achat, selon la destination et le mode de transport choisis par l'employé, et le nombre de personnes à sa charge.

8.95 Ainsi, des employés occupant des postes dans des missions également difficiles peuvent pourtant obtenir des indemnités plus ou moins avantageuses. Par exemple, les missions de Bruxelles et de Tokyo présentent toutes deux des niveaux de difficulté nuls, mais un employé en poste à Bruxelles peut tirer un profit de 2 236 $ tandis que son homologue en poste à Tokyo pourrait tirer jusqu'à 3 757 $ de la même transaction, en raison de la différence entre les prix des billets d'avion.

8.96 Nous n'avons pu trouver de fondement à cette proportion établie à 80 ou 90 p. 100, ni d'autres solutions qui aient été envisagées. Les agents de négociation qui représentaient les employés ont approuvé ces proportions. On nous a fait savoir que, si l'objectif du Secrétariat du Conseil du Trésor était de réduire les dépenses auxquelles l'exposait la politique alors en vigueur, le pourcentage précis de la réduction des frais admissibles a été arrêté par la négociation.

8.97 En résumé, en dépit de données disponibles, les moyens sont limités lorsqu'il s'agit de cerner les tendances liées à l'utilisation des DSE et l'évolution des coûts connexes, ou de les analyser. Sans doute, un certain nombre de raisons expliquent l'augmentation des coûts à court terme et leur baisse possible à plus long terme. Sans un dispositif d'analyse plus systématique au Ministère et au Secrétariat du Conseil du Trésor, aucune information ne permet de savoir si les modifications déjà apportées, ou susceptibles de l'être, aux directives sur le service extérieur contribuent véritablement à une gestion plus efficace et plus efficiente des indemnités.

8.98 En concluant qu'il faudrait recueillir plus de données et faire plus d'analyses, on reconnaît que cela pourrait entraîner d'autres coûts. Nous ne voulons pas dire qu'il faut engager plus de personnel à temps plein, mais plutôt qu'on pourrait envisager d'engager du personnel en fonction des besoins.

8.99 Conformément à leur politique et à leurs responsabilités opérationnelles, le Secrétariat du Conseil du Trésor et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international devraient améliorer leurs services de collecte et d'analyse de l'information sur les tendances liées à l'utilisation des directives sur le service extérieur et sur les coûts qui en résultent.

Il reste encore à évaluer le bien-fondé d'une simplification et d'une réduction de la charge administrative
8.100 La possibilité d'obtenir un paiement sans pièces justificatives conformément à la DSE 50 a éliminé la nécessité de préparer, de soumettre et de traiter des demandes de remboursement des dépenses de voyage. Normalement, cela devrait se concrétiser par une réduction du temps consacré à la préparation et à la vérification des demandes. Néanmoins, on a, parallèlement, compliqué davantage les DSE 45 et 50 en y ajoutant de nouvelles options.

8.101 Le Ministère traite plus de 23 000 demandes de remboursement par an pour des dépenses de voyage en service commandé et des dépenses de voyage dans le cadre des directives sur le service extérieur. Le millier à peine de demandes éliminées depuis l'introduction des paiements non soumis à justification aux termes de la DSE 50 devrait en principe contribuer à faire baisser les coûts administratifs. Toutefois, comme les employés sont maintenant libres de prendre n'importe quelle portion de leurs crédits de congés (DSE 45) pendant une année donnée, il est possible aussi que le coût de l'administration des DSE augmente. Le Ministère doit encore faire la preuve qu'il gère avec plus d'efficience sa charge administrative, par suite des modifications apportées aux DSE en 1993.

8.102 Dans le cadre du prochain examen triennal, le Secrétariat du Conseil du Trésor, soutenu par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, devrait évaluer l'incidence des modifications qu'il a apportées aux directives sur le service extérieur en 1993. En particulier, il devrait étudier les effets de l'introduction des paiements non soumis à justification.

Il faudrait revoir le traitement fiscal des indemnités
8.103 Le traitement fiscal réservé aux indemnités relatives au service extérieur est une autre question d'une grande complexité. La première fois que Revenu Canada a réexaminé si ces avantages étaient imposables ou non remonte à la fin des années 1970 et au début des années 1980. À l'époque, seules deux des indemnités avaient été jugées imposables.

8.104 En 1991, le Secrétariat du Conseil du Trésor a demandé à Revenu Canada de confirmer si certaines indemnités non soumises à justification envisagées pour les dépenses de réinstallation de même que les indemnités issues de la transformation d'un remboursement de dépenses de voyage réelles et raisonnables en une indemnité de déplacement de vacance non soumise à justification continueraient de ne pas être imposées. Revenu Canada a répondu par l'affirmative en invoquant une disposition de la Loi de l'impôt sur le revenu en vertu de laquelle les indemnités, pour représentation ou autres circonstances spéciales, versées aux fonctionnaires pendant un séjour à l'extérieur du Canada, ne sont pas imposables. Par conséquent, les montants versés aux employés à titre d'indemnités non soumises à justification ne figurent pas sur les feuillets T4 ou les T4A des employés.

8.105 En août 1994, Revenu Canada s'est vu demander si les indemnités versées aux termes de dix DSE étaient imposables en tout ou en partie et s'il fallait, le cas échéant, fournir des feuillets T4 ou des T4A aux employés, ou si, au contraire, elles étaient exemptées aux termes de certaines dispositions spécifiques de la Loi de l'impôt sur le revenu . Le Ministère a attiré en particulier l'attention de Revenu Canada sur les DSE 45 et 50. Au moment de notre vérification, Revenu Canada n'avait pas encore amorcé l'examen demandé. Nous signalons cependant que les montants versés à titre d'indemnités aux termes de la DSE 50 sont établis non pas d'après les dépenses réelles des déplacements de vacance des employés, mais d'après le prix des billets d'avion sur le marché.

8.106 Le caractère non imposable des indemnités accordées par la DSE 50 se traduit par un avantage supplémentaire pour les employés. Il n'est pas sûr que l'exemption dont fait état la Loi de l'impôt sur le revenu ait eu pour objet de s'étendre aux types d'indemnités actuellement versées aux fonctionnaires en service à l'étranger. Le traitement fiscal des DSE est un élément important que devront prendre en considération les personnes chargées d'évaluer les avantages liés aux DSE. Cette demande d'interprétation auprès de Revenu Canada est d'autant plus pertinente et opportune que l'on amorcera sous peu le prochain examen triennal des DSE.

8.107 Le prochain examen triennal des directives sur le service extérieur devrait inclure un examen approfondi du traitement fiscal des indemnités.

Conclusions

8.108 Dans notre rapport de 1994, nous avons signalé que les directives sur le service extérieur demeuraient complexes et qu'il restait à régler à leur sujet un certain nombre de questions de longue date. Le présent chapitre illustre encore une fois ce problème. Les modifications apportées en 1993 aux DSE ont accordé plus de latitude aux employés, mais les résultats, notamment les économies, n'en ont pas encore été évalués. Il y a lieu de profiter du prochain examen triennal, prévu en 1996, pour répondre à ces questions. Comme nous l'avions fait observer en 1994, une révision en profondeur du système des DES demeure le plus grand défi à relever.

Réponse du Secrétariat du Conseil du Trésor en ce qui a trait à ses responsabilités : Le Rapport du vérificateur général fait plusieurs observations et recommandations positives au sujet des procédés et des renseignements qui ont été utilisés par le Secrétariat du Conseil du Trésor pour modifier les Directives sur le service extérieur (DSE).

Le Secrétariat et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international continueront à coopérer afin d'améliorer la qualité des renseignements et la gestion des DSE.

Comme il est indiqué dans le Rapport du vérificateur général, il faut reconnaître que les moyens de cerner et d'analyser les schémas d'utilisation des DSE et les coûts y afférents sont limités. Cette situation est rendue encore plus complexe à cause des taux de change de monnaies à travers le monde.

Des projets de modification de la politique feront l'objet de discussions avec les syndicats de la fonction publique au sein du Conseil national mixte et ce, dans le cadre de l'examen triennal des Directives sur le service extérieur, qui débutera à l'automne de 1995. On y fera notamment un examen minutieux de la mise en oeuvre des modifications qui ont été apportées aux DSE 45 et 50. Le traitement fiscal des DSE sera également étudié. Le Secrétariat aura pour objectif de simplifier les directives susmentionnées et de réaliser un maximum d'économies.

Il faut en outre souligner que toute modification apportée aux DSE est assujettie à l'approbation des agents négociateurs du Conseil national mixte.


Équipe de vérification

N. Pal Ahuja
Brian Brisson
Tony Shaw
Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec le vérificateur responsable, M. Trevor R. Shaw.