10.9 Les sociétés d'État fédérales sont celles qui appartiennent à 100 p. 100 au gouvernement. Il existe d'autres sociétés qui appartiennent en totalité au gouvernement et qui ne sont pas appelées sociétés d'État; ce sont des établissements publics; de par leur nature et leurs objectifs, ces établissements se rapprochent davantage des ministères. Il y en a d'autres encore où la participation du gouvernement n'atteint pas 100 p. 100; ce sont des entreprises mixtes ou des coentreprises. De plus, d'autres types d'organisations institutionnelles (par exemple, les organismes de service spéciaux et les organisations non gouvernementales comme les administrations aéroportuaires locales) servent à la poursuite des objectifs gouvernementaux.
10.10 La pièce 10.1 donne un aperçu des différentes structures d'activité du gouvernement, qui vont du contrôle plus centralisé et des activités protégées des ministères et des établissements publics à la délégation largement généralisée de la prise de décision dans les conditions plus concurrentielles que l'on trouve dans les sociétés d'État commerciales et dans le secteur privé réglementé.
10.11
Les sociétés d'État constituent, et de loin, la plus vaste catégorie
de ces autres types d'organisations institutionnelles. Il y a 48 sociétés d'État
mères et 64 filiales en propriété exclusive. Elles participent à de nombreux
secteurs de l'économie, notamment le transport, l'énergie et les ressources,
l'agriculture et la pêche, le développement et la construction, les services
gouverne-
mentaux, la culture et les intermédiaires financiers. Les activités des
sociétés d'État vont de la commercialisation du poisson à l'énergie nucléaire
et de l'exploitation des ressources minières à la radiodiffusion publique.
10.12 Les actifs de l'ensemble des sociétés d'État en activité (en excluant la Banque du Canada) s'élevaient à 57 milliards de dollars en 1994. Cela représentait une augmentation de plus de 10 milliards de dollars sur les cinq dernières années, financée principalement par une croissance de l'endettement ( voir la pièce 10.2 ). Au total, les prêts du gouvernement aux sociétés d'État s'élevaient à environ 14 milliards de dollars en 1994. Les sociétés d'État ont également d'autres dettes d'un montant de quelque 24 milliards de dollars, représentant des montants empruntés au secteur privé sur garantie, directe ou implicite, du gouvernement du Canada. En 1994, les crédits parlementaires pour les sociétés d'État s'élevaient à 4,6 milliards de dollars, destinés essentiellement à trois sociétés. Le nombre total d'employés dépassait 115 000, soit environ 23 p. 100 du nombre total des fonctionnaires fédéraux.
10.13 Un certain nombre d'activités récentes ont affecté les sociétés d'État :
10.16 Bon nombre de ces questions ont été soulevées auparavant, la dernière fois en 1993, mais l'achèvement du deuxième cycle d'examens spéciaux offre la possibilité de consolider les résultats des vérifications et de réfléchir à ce que le Parlement, le gouvernement et les sociétés d'État elles-mêmes peuvent faire pour responsabiliser davantage ces sociétés; il s'agirait surtout d'améliorer l'intendance. Ceux qui souhaitent en savoir plus sur les examens spéciaux, leurs résultats et les résultats du sondage sur les examens spéciaux, mené auprès des présidents de conseil et des chefs de direction, n'ont qu'à consulter l'annexe du chapitre. Nous avions présenté les résultats du premier cycle d'examens spéciaux dans le chapitre « Le régime de vérification s'appliquant aux sociétés d'État » de notre rapport de 1990.
10.18 Pour les entreprises du secteur privé, il est bien entendu que la priorité essentielle est de maximiser l'avoir des actionnaires. Cependant, pour les entités du secteur public, les objectifs premiers ne sont pas aussi clairs, car on exige de plusieurs sociétés d'État qu'elles soient autosuffisantes et qu'elles poursuivent en même temps des objectifs de la politique gouvernementale, comme la prestation de services publics même si ceux-ci peuvent ne pas être rentables sur le plan commercial. Des buts variés et même contradictoires modèlent des sociétés d'État complexes, qui peuvent se servir des recettes générées par leurs activités commerciales pour appuyer des entreprises non lucratives servant l'intérêt public.
10.20 Les sociétés d'État sont moins autonomes et plus contrôlées que les administrations locales, mais plus autonomes et moins contrôlées que les ministères. À notre avis, puisque le gouvernement crée de nouvelles structures pour administrer sa politique, il est important d'établir un cadre de contrôle et de responsabilisation approprié avant la création de ces structures. Le contrôle étant décentralisé, le besoin d'une responsabilisation plus rigoureuse se fait sentir et cela doit se refléter dans le cadre établi pour ces entités.
10.21 C'est à cette fin que la Loi sur l'administration financière (devenue depuis la Loi sur la gestion des finances publiques - LGFP) a été modifiée en 1984, de manière à fournir un cadre amélioré de contrôle et de responsabilisation pour les sociétés d'État, expliqué à la Partie X de la LGFP. Nous avons fortement appuyé le régime de contrôle et de responsabilisation établi par la LGFP pour les sociétés d'État, parce qu'il leur accorde suffisamment de liberté d'action, tout en faisant en sorte que le Parlement et le gouvernement exercent un contrôle et que des comptes leur soient rendus.
10.22 Le cadre fournit un certain nombre de caractéristiques clés, notamment :
10.24 La pièce 10.3 décrit d'une façon générale les rôles et les responsabilités des parties de la chaîne redditionnelle telle qu'établie dans la Partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques. L'intendance a trait à la manière dont les responsables s'acquittent de leurs responsabilités.
10.25 Le cadre de responsabilisation des sociétés d'État s'inspire de celui qui a été structuré pour le secteur privé. Par exemple, dans les deux secteurs, privé et public, le conseil d'administration est responsable de la gestion générale des affaires et des activités, commerciales ou non de la société. Il existe, cependant, des différences importantes. Alors que, dans le secteur privé, le conseil d'administration est seul à assumer la responsabilité et le pouvoir de gérer les affaires de la société au nom des actionnaires, dans les sociétés d'État, cette fonction est partagée. Les conseils d'administration des sociétés d'État ont les mêmes responsabilités que ceux des entreprises du secteur privé, mais ils n'ont pas les mêmes pouvoirs. Le gouvernement approuve les plans d'entreprise; les chefs de direction sont nommés par le gouvernement, non par le conseil d'administration. Cela signifie que le gouvernement, les conseils d'administration et la direction doivent avoir une compréhension commune de leurs rôles respectifs, posséder les pouvoirs nécessaires pour s'acquitter de ces rôles et être comptables de l'usage qu'ils font de ces pouvoirs.
10.26 Une quantité importante de travaux utiles ont été consacrés à la recherche de moyens qui permettraient aux conseils d'administration de mieux s'acquitter de leurs responsabilités. Des rapports produits par le secteur privé, comme The Financial Aspects of Corporate Governance in the United Kingdom , connu sous le nom de Rapport Cadbury (R.-U., 1992), et The Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission (É.-U., 1994), présentent divers points de vue sur la manière dont les conseils d'administration des sociétés du secteur privé devraient fonctionner. En 1994, la Bourse de Toronto a publié les Guidelines for Improved Corporate Governance in Canada , qui encouragent les sociétés canadiennes ouvertes à décrire leurs méthodes d'intendance dans leurs rapports annuels. De plus, l'Institut Canadien des Comptables Agréés a publié, en 1995, un document intitulé Recommandations à l'intention des administrateurs.
10.27 Le rapport de Gérard Veilleux, Une entreprise de longue haleine , publié en 1993, les Six caractéristiques d'une gouverne efficace de la Fondation canadienne pour la vérification intégrée, et notre propre rapport de 1993 « Les sociétés d'État - L'obligation de rendre compte du rendement » (chapitre 4) soulèvent d'autres questions d'intendance visant plutôt les entreprises du secteur public. En octobre 1994, la Direction générale des sociétés d'État du Conseil du Trésor / ministère des Finances, de concert avec le Conference Board du Canada, a parrainé une conférence sous le thème Régie des sociétés : Amélioration de l'efficacité des conseils d'administration des sociétés d'État . En 1993, ces organismes avaient également collaboré avec le Centre canadien de gestion à la publication, à l'intention des administrateurs, d'un ouvrage intitulé Guide d'introduction aux rôles et responsabilités des administrateurs de sociétés d'État , et le Ministère a récemment établi un comité consultatif sur les questions d'intendance touchant les sociétés.
10.28 Le cadre de responsabilisation des sociétés d'État étant structuré différemment de celui des entreprises du secteur privé, l'intendance des sociétés d'État touche non seulement le conseil d'administration et la direction, mais aussi le gouvernement et le Parlement. Chaque partie a un rôle important à jouer dans l'intendance si l'on veut que les sociétés d'État soient gérées dans le meilleur intérêt du public.
10.31 Chacune de ces sociétés avait au moins une lacune importante liée : 1) à la planification générale et stratégique ou 2) à la mesure du rendement et à la communication des résultats, ou aux deux. Nous pensons que ce fait est important pour le Parlement et pour le gouvernement, parce qu'il indique que ces sociétés :
10.34 D'après les examens spéciaux du deuxième cycle, nombre de sociétés n'ont pas de vision, de valeurs ou de buts clairement articulés. D'autres n'ont pas défini leurs priorités et les options possibles, ou encore, n'ont pas traduit leurs buts en objectifs clairs et mesurables. Ainsi se trouve réduite la capacité du gouvernement, ainsi que des conseils d'administration et de la haute direction des sociétés, d'offrir des orientations stratégiques claires et efficaces pour maximiser la vraisemblance d'un rendement approprié. De plus, le défaut d'un mandat, d'objectifs et d'une stratégie clairement formulés augmente le risque d'outrepasser le mandat conféré par le Parlement. Enfin, pour ces sociétés, il est difficile de déterminer si les opérations sont gérées au moindre coût, si les extrants généraux sont optimisés et si les résultats escomptés sont obtenus.
10.35 Dans certains cas, ayant de la difficulté à interpréter leur mandat légal, les sociétés ne sont pas en mesure d'articuler clairement leur vision et leurs buts. Dans d'autres, les mandats liés à la politique gouvernementale, conférés par les lois habilitantes, entrent en conflit avec les objectifs d'autosuffisance imposés par les contraintes budgétaires.
10.37 Cela peut se faire de façon moins formelle en améliorant la communication entre le ministre responsable, le conseil d'administration et le chef de la direction, et en exprimant, en résultats mesurables, les attentes convenues en matière de rendement. Lorsque le mandat n'est pas clair, et que plusieurs interprétations sont possibles, le gouvernement devrait définir l'orientation avec précision, et le conseil d'administration devrait chercher une interprétation dans le plan d'entreprise approuvé par le gouvernement.
10.38 Dans les cas où le conseil n'a pas énoncé adéquatement et de façon mesurable les attentes à long terme en regard desquelles les résultats peuvent être mesurés, le gouvernement devrait le faire et les communiquer au conseil. Cela est particulièrement important pour les sociétés d'État qui ne sont pas autosuffisantes, qui ont besoin de crédits parlementaires et qui doivent communiquer leurs résultats. De plus, les conseils d'administration et les chefs de direction des sociétés d'État pourraient recevoir une indication de la gamme des activités acceptables. Les activités qui ne seraient pas comprises dans cette gamme seraient considérées comme inacceptables.
10.40 Même si elles doivent communiquer leurs résultats au Parlement, nombre des sociétés que nous avons examinées ne recueillent pas d'information adéquate pour mesurer le rendement. Comme on peut s'y attendre, bon nombre de ces sociétés ont des lacunes importantes dans le secteur de la planification. Il est difficile, sinon impossible, d'élaborer des indicateurs du rendement qui montrent dans quelle mesure les objectifs sont atteints lorsque ceux-ci ne sont pas clairs et que l'on n'a pas grand chose en regard de quoi les mesurer. Quelques-unes seulement des sociétés que nous avons examinées comparent les résultats réels aux cibles décrites dans le plan d'entreprise et les communiquent. De plus, l'information sur le rendement, qui compare des activités semblables au sein de la société ou avec d'autres entités, est rare.
10.41 Dans de nombreuses sociétés, les données sur le rendement recueillies et communiquées ne sont pas suffisamment axées sur les résultats des programmes et des initiatives de la société. Bien que les sociétés fournissent généralement de l'information utile sur les activités, comme les dépenses et les recettes, cette information ne fournit pas à la direction, au conseil d'administration et au gouvernement de moyen adéquat pour évaluer dans quelle mesure la société s'acquitte de son mandat et prendre des décisions stratégiques éclairées. Elle ne fournit pas non plus d'indication sur la productivité ou le caractère satisfaisant des services de la société. L'information sur ce qui a été exécuté (les activités) est rarement la même que l'information sur ce qui a été réalisé (les résultats).
10.42 Nous reconnaissons qu'il est difficile de développer des données sur le rendement, mais nous incitons fortement les responsables à poursuivre les efforts à la fois dans la mesure et dans la communication des résultats, et même à utiliser de l'information comparative d'entités ou d'activités semblables, qui pourra servir de repère. À cet égard, il existe d'autres méthodes pour élaborer des mesures appropriées et communiquer les résultats, notamment que le gouvernement demande la vérification des données quantitatives (rendement) que les sociétés d'État doivent communiquer en rapport avec leurs objectifs. Cette disposition de la LGFP n'a pas encore été utilisée.
10.44 Le deuxième cycle d'examens spéciaux a révélé que les résumés des plans d'entreprise d'un certain nombre de sociétés ne tenaient pas compte des questions et options stratégiques ou, si elles le faisaient, ne fournissaient pas de plans d'action à cet égard, ou ne fournissaient pas non plus de buts et d'objectifs de rendement qui soient complets et mesurables. À la suite d'un examen des rapports annuels, nous avons constaté que les sociétés ne rendaient pas adéquatement compte de la mesure dans laquelle elles atteignaient leurs objectifs, bien que la LGFP l'exige. Constatant que l'information n'est pas adéquatement communiquée par les sociétés d'État, nous estimons qu'en plus des instructions déjà fournies pour la préparation des plans d'entreprise et des rapports annuels, le gouvernement pourrait, par l'intermédiaire de la Direction générale des sociétés d'État, Conseil du Trésor / ministère des Finances, donner aux sociétés d'État d'autres instructions sur la communication des résultats et sur la manière de présenter cette information dans leurs plans d'entreprise et dans leurs rapports annuels.
10.45 Par exemple, un certain nombre de grandes sociétés d'État ne recueillent pas d'information sectorielle sur la rentabilité de chacun de leurs secteurs d'activités commerciales. La direction n'a pas besoin d'information adéquate seulement pour fournir des rapports au conseil d'administration, mais aussi pour diriger et surveiller les opérations quotidiennes de la société. Notre préoccupation vient de ce que, dans l'information communiquée, il est souvent impossible de faire la distinction entre les activités liées à l'application des politiques gouvernementales et celles qui pourraient être des activités commerciales non rentables. Par ailleurs, et c'est encore plus important, les sociétés n'établissent souvent pas de liens entre leur rendement et leurs buts et objectifs, lorsque ceux-ci ont été énoncés.
10.46 Dépôt des résumés des plans d'entreprise et des rapports annuels. Nous pensons que l'information communiquée par les sociétés d'État pourrait être grandement améliorée si tous les résumés des plans d'entreprise et rapports annuels déposés par les ministres responsables contenaient l'information nécessaire au Parlement pour évaluer le rendement des sociétés, à savoir des objectifs clairs et mesurables, les résultats escomptés et la mesure dans laquelle ils ont été atteints. Si le Parlement ne reçoit pas l'information pertinente ou que les comités parlementaires ne l'examinent ou ne l'utilisent pas, le cadre de responsabilisation s'en trouve affaibli.
10.47 Rapport du président du Conseil du Trésor. Nous reconnaissons que le rapport annuel du président du Conseil du Trésor au Parlement a été amélioré. À notre avis, on pourrait faire encore mieux en communiquant au Parlement de l'information sur le rendement par portefeuille ou par secteur. Ce genre de rapport pourrait contenir de l'information sur les taux de rendement attendus pour cette catégorie d'investissements, ou sur les limites de l'endettement, s'il en est, prévues pour les sociétés, et ainsi de suite. Ce genre de rapport aiderait le Parlement à déterminer si les sociétés d'État, dans l'ensemble, génèrent le niveau souhaité d'avantages sociaux et économiques à un coût raisonnable. Le type d'organisation qu'est la société d'État permet ce genre d'analyse et d'orientation, et nous recommandons que l'on en tire profit.
10.50 Les résultats du sondage sur l'intendance se trouvent à la pièce 10.6 . On remarquera que ces résultats ne font que présenter les opinions des présidents de conseil et des chefs de direction; aucune autre étude n'a été faite pour les confirmer.
10.51 Dans notre rapport de 1993, nous avons recommandé que les conseils établissent un profil de l'administrateur afin de cerner les aptitudes et les qualités que doivent présenter les membres d'un conseil d'administration solide. D'après notre sondage, bien peu de conseils ont donné suite à cette recommandation. Nous incitons les ministres à encourager les conseils à établir ces profils, dans le but de définir les critères qui assureront la nomination des administrateurs les plus qualifiés pour chaque conseil.
10.52 La majorité (74 p. 100) des sociétés d'État que nous avons étudiées sont d'avis qu'il faudrait que le gouvernement accélère le processus de nomination des administrateurs aux postes vacants des conseils (c.-à-d. nominations ou renouvellement des nominations). Nous avons déjà encouragé le prompt remplacement des administrateurs qui quittent leur poste afin d'assurer la continuité, la solidité et la stabilité des conseils. Nous reconnaissons l'incertitude qu'entraînent les vacances de postes d'administrateurs, et nous encourageons le gouvernement à rationaliser le processus de nomination aux conseils et d'annonce des nominations.
10.57 Les paragraphes précédents se concentraient sur les questions découlant des examens spéciaux; les paragraphes suivants porteront sur un certain nombre de questions distinctes, qui intéressent les sociétés d'État et qui représentent une mise à jour des points de vue et des positions du Bureau.
10.59 Les prêteurs imposent aux emprunteurs une certaine forme de discipline au moyen des taux d'intérêt : les intérêts croissent proportionnellement au risque. Les gouvernements sont aussi soumis à cette règle mais, une fois les taux privilégiés établis pour le gouvernement, les sociétés d'État peuvent généralement en bénéficier.
10.60 La croissance de l'endettement des sociétés d'État exerce des pressions considérables sur la capacité du portefeuille des sociétés d'État d'assurer le service de la dette ( voir la pièce 10.7 ), et les gains n'ont pas suivi la courbe de l'endettement.
10.61 À mesure que la dette d'une société augmente, les fonctions de trésorerie de la société occupent une place de plus en plus importante dans la gestion de cette dette. Le marché de l'emprunt devient de plus en plus complexe du fait, par exemple, qu'un nombre croissant de services de trésorerie se servent d'instruments dérivés. Étant donné les nombreux cas récents, dans les secteurs privé et public, où les transactions sur instruments dérivés ont entraîné des faillites d'organisations, les conseils et le gouvernement ont besoin de savoir comment faire la distinction entre la spéculation sur les instruments dérivés et les bonnes pratiques de gestion du risque, et de s'assurer que ces pratiques minimisent le risque.
10.63 Nous avons donc soulevé ces préoccupations parce qu'elles représentaient des anomalies dans un système prévu pour essayer de placer les sociétés d'État au même niveau que les entreprises du secteur privé. Nous mettons encore en question la raison pour laquelle l'impôt sur le revenu s'applique aux sociétés d'État. Par exemple, maintenant, bien qu'il soit peu probable qu'elles aient jamais à le faire, les sociétés financées par crédits parlementaires pourraient avoir à payer un impôt sur le revenu pour ces crédits; elles doivent donc remplir une déclaration de revenu.
10.64 Il est peut-être temps que le gouvernement évalue s'il n'y aurait pas d'autres moyens que l'impôt sur le revenu pour obtenir une part des profits des sociétés d'État. Les coûts administratifs qu'entraînent, pour les sociétés et pour Revenu Canada, la préparation et l'évaluation des déclarations complexes du revenu des sociétés, pourraient être éliminés si le gouvernement décidait simplement de retenir des sommes équivalentes sous forme de dividendes.
10.66 Récemment, un certain nombre de projets de loi d'initiative parlementaire ont essayé de régler la question, car exempter des sociétés de l'obligation redditionnelle de base à l'égard du gouvernement reste une pratique discutable, d'autant plus que ces sociétés sont financées par crédits parlementaires. Dans les cinq dernières années seulement, ces sociétés ont reçu plus de 2,9 milliards de dollars (sauf la Société Radio-Canada, pour laquelle la plupart des dispositions redditionnelles applicables aux autres sociétés d'État sont directement intégrées dans la Loi sur la radiodiffusion ).
10.67 Pour autant que nous sachions, ces sociétés n'ont pas eu de problème qui aurait pu être évité si elles avaient été soumises aux dispositions de la Partie X de la LGFP, mais elles exercent des fonctions commerciales et poursuivent des objectifs de politique gouvernementale importants sans passer par le processus d'approbation du plan d'entreprise et sans avoir à rendre compte des résultats ni à se soumettre aux exigences des examens spéciaux; en outre, le Bureau ne peut être nommé vérificateur ou covérificateur, s'il ne l'était pas déjà auparavant, comme ce serait le cas si ces sociétés figuraient à l'annexe III-I.
10.69 Bien que ces dernières années aient vu un certain nombre d'améliorations, plusieurs sociétés d'État continuent de déclarer des crédits parlementaires d'exploitation comme recettes dans leur état des résultats au lieu de les classer à part. Cette manière de faire n'est pas celle de la majorité des sociétés et, à notre avis, elle est inappropriée.
10.70 Les recettes sont généralement définies comme le montant gagné au cours d'un exercice et provenant de la vente de produits ou de services rendus à des tiers. Les montants reçus de l'actionnaire pour financer une opération ne correspondent pas à cette définition largement acceptée et, par conséquent, ne devraient pas, à notre avis, être considérés comme des recettes. En traitant les crédits parlementaires comme des recettes, on fausse les résultats nets d'exploitation pour l'exercice, puisqu'on y inclut non seulement les résultats des opérations, mais aussi l'apport de l'actionnaire. Il est donc plus difficile d'évaluer le rendement des opérations, particulièrement lorsqu'on le compare à d'autres sociétés.
10.71 Nous encourageons ces sociétés à se pencher sur cette question de communication de l'information afin de rendre l'information contenue dans les états financiers plus utile.
10.73 Les sociétés d'État continuent de jouer un rôle public important, qui touche habituellement la plupart des Canadiens et Canadiennes, sinon tous. À notre avis, les Canadiens et Canadiennes sont généralement bien servis par le cadre qui régit les activités de ces sociétés. Comme nous l'avons déjà dit, le cadre de contrôle et de responsabilisation établi dans la Partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques constitue une assise législative solide, qui a donné de très bons résultats depuis son instauration il y a 11 ans. La situation actuelle est bien meilleure que celle qui existait avant qu'il ne soit introduit en 1984.
10.74 Toutefois, nous aurions tort de nous reposer sur nos lauriers; nous devons viser à ce que les objectifs soient plus clairs et à ce que la communication des résultats en regard de ces objectifs soit meilleure. En dépit des complexités avec lesquelles les sociétés d'État doivent composer, nous pensons que cela peut et doit être fait grâce à une meilleure intendance mettant à contribution toutes les parties, à savoir le Parlement, le gouvernement, les conseils d'administration et la direction.
Équipe de vérification
Denis Scott
Norah Roberts
Olga Dupuis
Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec le vérificateur responsable, M. Grant Wilson.
10.76 L'examen spécial, un genre de vérification de l'optimisation des ressources, sert à fournir, au conseil d'administration, une opinion impartiale sur la question de savoir si les systèmes de contrôle et d'information financiers, de contrôle et d'information de gestion ainsi que les méthodes de gestion de la société sont maintenus de manière à donner la certitude raisonnable que :
10.78 Seulement 17 des 31 examens terminés ont été exécutés uniquement par le Bureau dans les deux cycles. Pour les autres, il s'agissait de sociétés dont l'examen du premier cycle avait été fait par des praticiens du secteur privé ou bien de sociétés dont l'examen du deuxième cycle était le premier. Dans un cas, le Bureau a été le seul examinateur pour le premier cycle et un examinateur conjoint pour le deuxième. Donc, il vaudrait peut-être mieux ne pas faire de comparaison directe entre les deux cycles sans bien en comprendre les différences.
10.79 Les résultats dont il est question dans le chapitre se fondent uniquement sur les examens effectués par notre Bureau. Toutefois, comme nous avons échangé de l'information avec les praticiens du secteur privé pendant de nombreuses années, les méthodes générales et le genre de rapports adoptés par le secteur privé présentent une grande uniformité avec les nôtres.
10.82 Les raisons de cette augmentation sont diverses. Les sociétés examinées dans le deuxième cycle étant plus importantes et plus complexes, il était plus justifié de porter les questions qui les touchaient à l'attention du ministre. De plus, certains rapports ont été transmis à des ministres parce qu'ils traitaient de questions qui outrepassaient les capacités de la société (p. ex., interprétation du mandat), alors que d'autres révélaient d'importantes lacunes qui n'avaient pas été corrigées adéquatement depuis la fin du premier cycle.
10.84 Par « planification générale et stratégique », on entend l'interprétation faite par la direction de la mission et du mandat de la société et la hiérarchisation des activités de la société. En plus des lacunes dans la planification ainsi que la mesure du rendement et la communication des résultats dont on a discuté dans le chapitre, on a trouvé des lacunes dans les secteurs des opérations, de la gestion des ressources humaines et de la gestion de l'actif. Les opérations comprennent tous les processus opérationnels qui ont trait aux activités de base de la société, comme la planification opérationnelle, la production, la livraison des produits ou la prestation des services. La gestion des ressources humaines a trait aux activités comme le recrutement, la formation, la planification de la relève et les modes de négociation collective. La gestion de l'actif comprend la gestion des installations, l'entretien et la sécurité de la propriété intellectuelle et des biens matériels.
10.85 Parmi les lacunes importantes dans ces secteurs, citons les plans opérationnels et les activités actuelles qui ne sont pas liés au plan stratégique, les conventions collectives qui ne correspondent pas à la réalité opérationnelle, et les systèmes et pratiques qui ne suffisent pas pour protéger et contrôler les actifs immobiliers. Quelques sociétés seulement avaient des lacunes importantes dans des secteurs comme la commercialisation et l'établissement des prix, les systèmes d'information de gestion, la gestion financière et la gestion environnementale.
10.86 La pièce 10.12 classe les lacunes importantes sous les catégories efficacité des opérations, gestion économique et efficiente des ressources et protection de l'actif. Il s'agit des objectifs que les sociétés sont tenues d'atteindre et en regard desquels elles sont évaluées dans le cadre des examens spéciaux. La rubrique « protection et contrôle des éléments d'actif insuffisants » couvre des lacunes importantes comme l'entretien inadéquat des biens matériels, et une gestion et une protection de la propriété intellectuelle qui laissent à désirer. La rubrique « gestion non économique et inefficiente des ressources » couvre des lacunes importantes comme une mauvaise gestion de l'inventaire des matières premières, des risques environnementaux non résolus et le manque de systèmes de mesure, de surveillance et de rétroaction sur le rendement opérationnel (p. ex., la productivité et l'utilisation des ressources) et la rentabilité.
10.87 La rubrique « déroulement peu efficace des opérations » porte sur des questions comme le manque de clarté des objectifs et des stratégies, l'insuffisance de l'évaluation et de l'établissement des rapports sur la mesure dans laquelle les objectifs et les buts sont atteints, l'insuffisance de l'information sur les coûts et les résultats qui permettrait de mettre en oeuvre les stratégies clés efficacement.
10.88 La correction des lacunes dans le secteur de l'efficacité des opérations exige souvent la contribution d'un certain nombre de parties, dont certaines n'appartiennent pas à la société. Nous avons déjà signalé ces lacunes dans le chapitre. Cependant, nous croyons que la société peut elle-même corriger certaines lacunes importantes ayant trait à l'efficacité des opérations ainsi que toutes les questions touchant la protection et le contrôle des éléments d'actif et la gestion des ressources.
10.90 Nous n'avons pas pu tirer parti autant que nous l'espérions des travaux des vérificateurs internes. Dans notre Rapport de 1990, nous prévoyions que les examens du deuxième cycle se feraient en étroite collaboration avec les vérificateurs internes des sociétés et nous pensions utiliser exhaustivement leurs travaux. Cependant, depuis le premier cycle, les fonctions de vérification interne de nombreuses sociétés ont été réduites du fait de la restructuration et de la réduction des effectifs; cela limite déjà l'utilisation que nous pouvons faire de ces travaux; à cela s'ajoutent les délais plus courts des examens spéciaux et notre orientation davantage axée sur les résultats.
10.91 Dans cinq cas, nous n'avons pas utilisé les vérifications internes, soit parce que leur étendue ne correspondait pas à celle des examens spéciaux, soit parce que les sociétés n'avaient pas effectué de vérification qui soit comparable à notre examen spécial. Une corporation était inactive et ses activités progressivement réduites, six autres avaient été exemptées de l'obligation de faire des vérifications internes. Le gouverneur en conseil accorde des exemptions lorsqu'il estime, souvent à cause de la taille de la société ou de la nature de ses activités, que le coût de ces vérifications en dépasserait les avantages.
10.93 Comme pour le premier cycle, les questions de délais et de calendrier posent encore problème. Plus d'un tiers des rapports définitifs des examens ont été présentés aux conseils d'administration juste après la date limite fixée par la Loi sur la gestion des finances publiques. Cela s'explique surtout par le fait que les examens spéciaux sont souvent prévus pour la fin du cycle de cinq ans et que les dates des réunions des conseils d'administration ne concordent pas toujours avec celle de la fin du rapport.
10.94 Le deuxième cycle se sera étalé sur plus de sept ans (septembre 1989 à décembre 1996), mais 91 p. 100 des sociétés actives auront été examinées durant la période de deux ans se terminant en novembre 1994. Voir, à la pièce 10.15 , le calendrier des examens des deux cycles. Il s'agit là d'un problème administratif pour le Bureau; pendant la période de pointe, nous avons dû faire appel à des experts-conseils de l'extérieur pour aider notre personnel.
10.95 Jusqu'à présent, ce sont les sociétés qui ont mis en route le processus d'établissement du calendrier des examens spéciaux et, c'est compréhensible, elles attendent souvent jusqu'à ce que les lacunes importantes passées soient corrigées ou jusqu'à ce que les réorganisations ou autres initiatives internes soient terminées. Cependant, nous espérons qu'avec l'appui et la collaboration des sociétés d'État, et en réduisant davantage encore la durée moyenne des examens spéciaux, nous pourrons optimiser le calendrier des examens spéciaux du troisième cycle afin de respecter les délais prévus par la loi et de continuer à réduire les coûts. D'ici peu, nous communiquerons avec certaines sociétés d'État pour discuter du calendrier des examens spéciaux du troisième cycle.
10.98 Cela signifie que, dans nos vérifications, nous sommes passés d'une méthode axée sur les processus ou les systèmes à une méthode davantage axée sur les résultats, qui concorde mieux avec les intérêts des gestionnaires et des administrateurs. Cela signifie également que, lorsque nous relevons une lacune importante, il faut se demander Quelles en sont les répercussions ? et aussi Quelle en est l'importance ? Pour qu'une lacune soit considérée comme importante et soit consignée dans le rapport d'examen spécial, il faut que ses répercussions soient graves.
10.99 En février 1995, on a demandé par sondage aux présidents de conseil et aux chefs de direction des sociétés d'État leurs points de vue sur les examens spéciaux ( voir les autres résultats du sondage à la pièce 10.16 ). Les réponses provenaient de 24 des 32 sociétés; la majorité étaient fortement en faveur des examens spéciaux. En fait, 83 p. 100 des répondants estimaient que la certitude donnée par l'opinion du vérificateur dans le rapport d'examen spécial était un atout pour les conseils d'administration; 71 p. 100 étaient d'avis que, dans l'ensemble, compte tenu des avantages et des coûts pour les sociétés et des coûts pour le Bureau, ces examens avaient été utiles. Douze pour cent n'avaient pas d'opinion et 17 p. 100 estimaient que les examens spéciaux n'étaient pas utiles.
10.100 Certains répondants ont dit que les examens leur avaient été utiles parce qu'ils leur donnaient un point de vue impartial sur les activités des sociétés et, à l'occasion, les avaient amenés à repenser leur façon de faire des affaires. Pour de nombreux présidents de conseil, le processus était important parce qu'il contribuait à renforcer l'obligation redditionnelle de la direction devant le conseil d'administration. Les réponses neutres et négatives avaient trait à la durée des examens spéciaux, à leurs coûts en temps et en argent pour la société et aux frais qu'ils entraînent pour le Bureau et donc, pour les contribuables.
10.102 Le troisième cycle d'examens spéciaux commencera au début de 1997. Les deux premiers cycles ainsi que le sondage auprès des sociétés d'État nous ont beaucoup appris. Nous prévoyons être encore plus efficients dans le troisième cycle et être encore plus utiles aux sociétés d'État en concentrant nos efforts comme suit :