La Commission de contrôle de l'énergie atomique

Organisme canadien de réglementation nucléaire

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Vérificatrice générale adjointe : Maria Barrados
Vérificatrice responsable : Ellen Shillabeer

Contexte

Mandat

15.7 La Commission de contrôle de l'énergie atomique (CCEA) a été créée aux termes de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique de 1946 pour contrôler et superviser le développement, l'application et l'utilisation de l'énergie nucléaire (atomique). La CCEA a aussi été établie pour permettre au Canada de participer de façon efficace aux mesures de contrôle international de l'énergie nucléaire.

15.8 La CCEA est un organisme de réglementation indépendant, qui relève du Parlement par l'intermédiaire d'un ministre désigné, soit le ministre des Ressources naturelles (anciennement de l'Énergie, des Mines et des Ressources). Pour s'acquitter de son mandat, la CCEA a reçu, aux termes de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique , de vastes pouvoirs qui lui permettent d'adopter et de faire appliquer des règlements dans le domaine de l'énergie nucléaire. La CCEA est aussi un établissement public désigné à l'Annexe II de la Loi sur la gestion des finances publiques .

Mission

15.9 À titre d'organisme canadien de réglementation nucléaire, la CCEA maintient un contrôle réglementaire sur l'utilisation de l'énergie nucléaire. Ce contrôle vise les éléments suivants :

15.10 La mission de la CCEA consiste à s'assurer que l'utilisation de l'énergie nucléaire au Canada ne pose pas de risque indu pour la santé, la sécurité, la sécurité matérielle et l'environnement.

15.11 La CCEA réalise sa mission grâce à un régime complet de délivrance de permis qui vise tous les aspects des installations, de l'équipement, des matières radioactives (sauf certaines des matières d'origine naturelle) et des substances réglementées, notamment l'homologation des emballages pour le transport des matières radioactives d'origine canadienne et étrangère. La délivrance des permis se fait en coopération avec d'autres ministères fédéraux et provinciaux, qui oeuvrent dans des domaines comme la santé, l'environnement, le transport et le travail.

Structure organisationnelle et ressources

15.12 En vertu de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique , la Commission se compose de cinq membres nommés par le gouverneur en conseil. Un des commissaires est désigné président de la Commission et il est le seul membre de la Commission à plein temps. Le président fait aussi office de premier dirigeant de la Commission et, à ce titre, supervise et dirige les travaux de l'organisme. La Commission se réunit présentement environ dix fois par année.

15.13 En vertu de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique , la Commission assume, en bout de ligne, la responsabilité et l'obligation de rendre des comptes à l'égard de la réglementation de l'industrie nucléaire canadienne. Dans le cadre de son mandat, la Commission est habilitée à adopter des règles pour la conduite de ses travaux et l'exercice de ses fonctions.

15.14 Conformément à la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique , la Commission a pris plusieurs séries de règlements, avec l'agrément du gouverneur en conseil, et a établi un régime complet de permis. La Commission décide elle-même de la délivrance de permis à une centaine de grandes installations nucléaires - centrales nucléaires, réacteurs de recherche et mines d'uranium - quand elle a l'assurance que l'utilisation de la technologie nucléaire faite par la société est sécuritaire. Le régime de délivrance de permis est fondé sur un examen du site, des plans, de la construction, de l'exploitation et du déclassement au moyen d'examens et d'évaluations scientifiques et techniques, d'inspections de conformité et d'application des règlements. Les autres décisions relatives à la délivrance de permis, notamment les permis de radio-isotopes, ont été déléguées par la Commission à des agents désignés de la CCEA.

15.15 Le personnel de la CCEA applique les politiques de la Commission et lui présente ses recommandations quant à la délivrance de permis et aux questions de réglementation. Le personnel se répartit en cinq directions et un Secrétariat, comme l'indique la pièce 15.1 .

15.16 Pendant l'exercice 1993-1994, la CCEA comptait un effectif autorisé de 420 équivalents temps plein (années-personnes). Elle a eu des dépenses d'environ 44,7 millions de dollars et a récolté des recettes d'environ 24,2 millions de dollars, recettes générées surtout grâce à son programme de recouvrement des coûts. Malgré la taille relativement petite de la CCEA, elle assume des responsabilités réglementaires qui lui confèrent un pouvoir important sur les grands titulaires de permis, dont l'actif total atteint les dizaines de milliards de dollars, et sur environ 3 700 titulaires de permis de moindre envergure.

Principaux changements depuis notre vérification de 1985

15.17 Lors de notre vérification de 1985, nous avons examiné les contrôles de gestion et les procédures administratives liés aux activités de délivrance des permis, d'inspection et d'application des règlements de la CCEA. Dans le cadre de notre vérification de suivi de 1987, nous signalions que la CCEA avait réagi de façon positive à nos recommandations de 1985 et qu'elle progressait dans leur mise en oeuvre.

15.18 Depuis notre vérification de 1985, de nombreuses pressions supplémentaires se sont exercées sur la CCEA et sur les titulaires de permis : réforme de la réglementation fédérale, instauration du système de recouvrement des coûts, arrivée d'un grand nombre de nouveaux employés à la CCEA, dégradation du climat économique, défaillances dues au vieillissement de l'équipement dans les centrales nucléaires et attentes accrues quant à la protection de l'environnement, imposant des procédures plus rigoureuses exigées par le Décret sur les lignes directrices visant le processus fédéral d'évaluation et d'examen en matière d'environnement . En outre, les organismes de réglementation doivent désormais composer avec l'obligation supplémentaire de devoir prouver devant les tribunaux qu'ils remplissent toutes leurs obligations réglementaires fondamentales.

15.19 La réforme de la réglementation oblige davantage les organismes de réglementation à :

15.20 Cette réforme de la réglementation a été encouragée en plus, au cours des dix dernières années, par la réduction des obstacles au commerce international. Le mouvement en faveur d'une ouverture accrue des frontières et la création de blocs commerciaux régionaux ont incité les gouvernements, partout dans le monde, à réévaluer les politiques qui nuisent à la compétitivité des industries nationales.

15.21 Les organismes de réglementation fédéraux doivent aussi pouvoir « réglementer de façon plus intelligente ». Les gestionnaires doivent désormais faire la preuve que, pour les programmes réglementaires existants et les projets de règlement ou de modification de fond, la réglementation constitue la meilleure solution. Comme solutions de rechange à la réglementation, on compte les campagnes d'information visant à sensibiliser les personnes à risque, l'élaboration de normes volontaires appuyées par l'industrie et par le grand public, la persuasion et l'autoréglementation.

15.22 Plusieurs changements ont fait augmenter les tensions dans les rapports entre la CCEA et les entités réglementées. Dans le cadre d'une initiative gouvernementale, la CCEA a lancé un programme de droits à l'usager en avril 1990 pour récupérer la plupart des coûts liés à l'application des règlements, sauf dans quelques cas bien précis. La plupart des entités réglementées doivent maintenant payer le prix de leur propre réglementation.

15.23 En même temps que le programme de droits à l'usager était mis en oeuvre, le niveau des effectifs à la CCEA a commencé à augmenter de façon significative, au point où les titulaires de permis ont commencé à s'inquiéter de leur incapacité de contrôler les coûts liés à la réglementation, préoccupations qui se trouvent exacerbées par l'impact d'une récession prolongée. Cela vient augmenter la probabilité que les titulaires de permis exigent que soit mieux justifiée toute nouvelle exigence réglementaire.

15.24 Par suite des augmentations de son effectif et de l'absence de toute proposition pour la construction de nouvelles centrales nucléaires, la CCEA peut maintenant consacrer davantage d'attention aux installations actuelles pour ce qui est de l'entretien préventif, de l'examen des exigences de remise à neuf et du règlement des questions de sécurité générale toujours en suspens. Le personnel de la CCEA a aussi pu diriger des travaux d'examen plus détaillés sur une foule de questions relevant de la réglementation nucléaire. Les services publics du domaine nucléaire estiment qu'il y a eu escalade des exigences et des attentes au niveau de la réglementation, tant à l'égard de ce qui doit être fait qu'à l'égard des délais de mise en oeuvre, et ce pendant une période de restrictions budgétaires.

15.25 Au cours des dernières années, un certain nombre d'employés clés et comptant de longues années de service ont quitté l'organisation, emportant avec eux toute une richesse d'expérience et de savoir. Cela oblige la CCEA à trouver des moyens de conserver la mémoire de l'organisation et de former le nouveau personnel.

15.26 Depuis notre dernière vérification, il y a neuf ans, la fréquence des défaillances dues au vieillissement des installations a augmenté dans le cas des centrales nucléaires plus anciennes; on s'attend à ce que ces incidents entraînent l'apparition d'un nombre croissant de problèmes. La détérioration des tubes de force et des tubes de chaudière, ainsi que de leurs structures de support, continue de poser des défis techniques de taille.

15.27 En outre, les gouvernements insistent davantage sur la protection de l'environnement. La CCEA, étant donné sa mission, a participé à bon nombre d'audiences d'évaluation environnementale au cours des cinq dernières années, notamment à celles qui concernaient les mines d'uranium. La CCEA participera aussi à des audiences similaires lorsque l'énoncé des incidences environnementales de l'évacuation du combustible nucléaire irradié sera soumis à l'examen d'un groupe d'évaluation environnementale du gouvernement fédéral.

15.28 Les tendances récentes dans les décisions des tribunaux font ressortir l'importance de l'affectation rationnelle des ressources humaines, financières et matérielles disponibles pour les activités de réglementation. De nombreuses activités d'inspection et d'application des règlements sont maintenant susceptibles d'être examinées en détail par les tribunaux dans les cas où des dommages sont supposés avoir été causés, en tout ou en partie, par la négligence de l'organisme de réglementation dans la façon dont il fait appliquer les règlements. Bien que les tribunaux reconnaissent que les ressources sont limitées, l'organisme de réglementation qui peut démontrer à ces mêmes tribunaux qu'il a réparti ses ressources de façon raisonnable améliore ses chances de ne pas être jugé coupable de négligence.

15.29 Ainsi, le contexte dans lequel la CCEA régit l'industrie nucléaire a considérablement changé depuis notre vérification de 1985. Ces changements présentent des défis de taille pour ce qui est du respect des obligations réglementaires de la CCEA.

Étendue, objectif et critères de la vérification

Accent de la vérification

15.30 Pendant la planification de la vérification, nous avons rencontré un certain nombre de titulaires de permis et d'autres parties intéressées, ainsi que les cadres supérieurs et tous les commissaires de la CCEA. Au terme de ce travail, nous avons choisi de nous attacher aux aspects suivants du programme de réglementation de la CCEA, qui sont importants pour la réalisation de son mandat :

15.31 Les activités d'examen scientifique et technique et l'évaluation de leurs résultats n'ont pas été incluses dans l'étendue de la vérification; cependant, il s'agit là d'un autre aspect important du programme de réglementation de la CCEA. Elles fournissent de l'information, dont se sert la Commission pour acquérir l'assurance qu'une installation ou une entreprise qui utilise des substances radioactives est conçue et exploitée de façon sécuritaire.

15.32 Nous avons aussi effectué un suivi de nos observations et de nos recommandations de 1985 et de 1987.

Objectif et critères de la vérification

15.33 Dans les domaines visés par l'examen, l'objectif de notre vérification était de déterminer si la CCEA respectait ses obligations à titre d'organisme de réglementation.

15.34 À la pièce 15.2 , nous indiquons un certain nombre de systèmes de gestion, que nous jugeons essentiels à un organisme de réglementation dont le mandat comporte un volet sécurité. Une gestion efficiente et efficace exige aussi l'existence :

Observations et recommandations

La loi concernant la CCEA doit être mise à jour

15.35 Pour qu'un organisme de réglementation puisse s'acquitter de ses tâches de façon efficiente et efficace, il importe qu'il dispose de lois à jour, qui lui fournissent un cadre précis pour ses activités de réglementation.

15.36 Le cadre législatif à partir duquel la CCEA exerce son contrôle réglementaire a été créé en 1946 par la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique . La Loi est restée essentiellement la même depuis. Elle s'attache surtout à la sécurité des matières nucléaires, et non pas à la santé et à la sécurité. En 1978, un projet de loi (projet C-14) proposait une version révisée de la Loi, mais est mort au Feuilleton à la clôture de la session parlementaire.

15.37 Au cours des vingt dernières années, diverses commissions et études ont recensé des lacunes au niveau de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique . Au nombre d'entre elles, nous comptons deux comités parlementaires, deux groupes d'examen ministériels et d'autres groupes d'études ou commissions indépendants. Tous ces groupes signalent que ces lacunes ont une incidence sur la capacité de la CCEA de s'acquitter de son mandat. Les lacunes suivantes ont été relevées :

15.38 Au moment de la vérification, une nouvelle loi était à l'étude. La CCEA prévoit que la nouvelle loi ouvrira la voie à des améliorations fondamentales de la réglementation nucléaire. À l'heure actuelle, des améliorations limitées peuvent être apportées seulement par des ajouts, des suppressions et des modifications périodiques aux règlements. À notre avis, il importe que le Parlement envisage la possibilité de modifier l'actuelle Loi sur le contrôle de l'énergie atomique . Cependant, une nouvelle loi ne peut en soi corriger les lacunes au niveau des procédés et des méthodes de gestion, recensées pendant la présente vérification.

Nécessité de disposer d'une gamme appropriée de mécanismes d'application des règlements
15.39 Pour encourager les intervenants à se conformer à ses exigences réglementaires, la CCEA dispose d'un certain nombre de mécanismes. Le mécanisme utilisé dépend, pour une large part, de la gravité de l'infraction et du dossier de l'intéressé. Au nombre des mécanismes non punitifs, nous comptons la sensibilisation, la persuasion, les avertissements et les directives.

15.40 Dans les cas où les mesures non punitives ne produisent pas les résultats escomptés, ou quand il s'agit d'infractions graves, la CCEA peut modifier, suspendre ou révoquer un permis ou encore refuser d'en délivrer un ou de le renouveler. Ces dernières mesures peuvent avoir un impact financier considérable sur le titulaire du permis. Par exemple, il peut en coûter à l'exploitant d'une centrale nucléaire plus de 250 000 $ par jour pour l'énergie de remplacement si son permis a été suspendu ou révoqué. Les conséquences d'une suspension ou d'une révocation de permis pour un titulaire de moins grande envergure sont tout aussi graves puisque, par là, le titulaire et son personnel risquent de perdre leur gagne-pain. C'est pourquoi la suspension et la révocation de permis sont des mesures qui sont rarement utilisées.

15.41 La CCEA peut aussi intenter des poursuites aux termes de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique ou du Règlement afférent. Dans le cas des substances réglementées et des radio-isotopes, nous avons constaté que, pendant la période de deux ans allant d'avril 1991 à mars 1993, environ 2 900 infractions au Règlement afférent à la Loi ou aux conditions dictées par le permis auraient pu avoir un effet direct sur la radioprotection. Pendant cette période, 21 particuliers et titulaires de permis de substances réglementées et de radio-isotopes ont comparu devant les tribunaux. La CCEA a obtenu gain de cause dans dix-huit cas, pour 22 400 $ en amendes au total. Les frais liés aux poursuites et aux enquêtes pour cette période ont dépassé 750 000 $. Devoir engager des sommes pareilles n'a rien pour encourager la CCEA à intenter des poursuites contre les autres titulaires et particuliers qui contreviennent aux règlements et aux conditions dictées par les permis.

15.42 À notre avis, la CCEA ne dispose pas d'une gamme appropriée de mécanismes d'application des règlements pour encourager l'observation de la loi. La sanction maximale prévue aux termes de l'actuelle Loi sur le contrôle de l'énergie atomique est une amende de 10 000 $ ou une peine d'emprisonnement de cinq ans, ou les deux. Ces dispositions ne correspondent pas à celles d'autres sphères de compétence dont les lois et les pratiques relatives à l'environnement peuvent exiger des pollueurs qu'ils versent des amendes maximales de un million de dollars. La Loi ne prévoit aucune autre amende administrative ni aucune autre « contravention » en cas de non-conformité aux exigences réglementaires de la CCEA.

15.43 Les dispositions limitées de l'actuelle Loi compromettent la capacité de la CCEA de faire appliquer ses règlements et les conditions dictées par les permis.

Nécessité d'obtenir des garanties financières
15.44 À l'heure actuelle, la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique ne confère pas expressément à la CCEA le pouvoir d'exiger des garanties financières pour le déclassement des installations nucléaires ou pour l'évacuation des matières nucléaires, comme les résidus de l'extraction du minerai d'uranium, les déchets provenant du raffinage de l'uranium et le combustible nucléaire irradié. Grâce à ces garanties, on pourrait disposer de fonds en cas de besoin et faire en sorte que le fardeau financier ne passe pas à l'État.

15.45 L'absence d'exigences réglementaires relatives aux garanties financières soulève des questions importantes. Par exemple, s'il n'existe aucun titulaire de permis ou propriétaire identifiable, ou si le titulaire du permis n'est pas capable de payer ou ne veut pas payer, qui donc paiera pour ce qui suit :

15.46 Nous avons constaté que le gouvernement fédéral a accepté la responsabilité financière de la gestion et de l'évacuation à long terme des déchets radioactifs historiques de faible activité. Par déchets historiques, nous entendons généralement les déchets qui ont été gérés autrefois d'une façon qui n'est plus considérée acceptable, mais dont le producteur initial ne peut plus, avec raison, être tenu responsable. Ces déchets proviennent, pour la plupart, de l'industrie du radium et de la production d'uranium au cours des années 1930 et 1940 dans la région de Port Hope, en Ontario.

15.47 La CCEA se propose d'inclure dans son projet de loi des pouvoirs explicites pour exiger des titulaires de permis des garanties financières pour le déclassement de toutes les installations nucléaires et l'évacuation des matières nucléaires. En même temps, on tentera d'obtenir, par la loi, des pouvoirs pour recouvrer, auprès des parties responsables, les coûts liés à la décontamination et aux autres mesures correctives. La CCEA avait précédemment reconnu, dans le projet de loi C-14, la nécessité d'inclure la question de la responsabilité financière dans les conditions qui pourraient être liées à l'approbation d'un site ou à la délivrance d'un permis. Cependant, le projet de loi C-14 est mort au Feuilleton en 1978.

15.48 À notre avis, lorsque la sécurité publique ainsi que des sommes importantes sont en jeu, le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les intérêts des contribuables. L'absence de modifications appropriées à la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique , qui permettraient à la CCEA d'exiger des garanties financières, entretient les incertitudes quant à savoir qui paiera l'entreposage et l'évacuation des déchets nucléaires, si les parties responsables ne pouvaient pas payer.

Fournir l'assurance que l'industrie nucléaire canadienne est sécuritaire

15.49 L'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques comporte tant des avantages que des risques qui doivent être contrôlés de façon appropriée. La réglementation nucléaire canadienne est fondée sur le principe voulant que ce soit à l'usager ou au titulaire du permis qu'il revienne d'assumer la responsabilité première de la sécurité. Le rôle de la CCEA consiste à établir des normes de sécurité appropriées, qui doivent être respectées par le titulaire du permis ou par le demandeur du permis, et à s'assurer, par une foule de mécanismes de conformité et d'évaluation, que ces normes sont bel et bien respectées. (voir photographe)

15.50 À titre d'organisme canadien de réglementation nucléaire, la CCEA fournit l'assurance que l'industrie nucléaire canadienne est sécuritaire. Les demandeurs de permis doivent convaincre la CCEA, et ce avant même d'obtenir leur permis, que les opérations proposées seront conformes à ses exigences réglementaires et que les installations seront exploitées de façon sécuritaire. Ces permis sont habituellement valables pour une période de deux ans. Par divers processus, dont des inspections de conformité et des évaluations et examens périodiques, la CCEA s'assure que les opérations restent sécuritaires. Elle s'assure aussi que le titulaire du permis exploite son installation de façon sécuritaire, au moment du renouvellement du permis, grâce au processus de renouvellement.

15.51 Cette assurance dépend, dans une large mesure, de la compétence technique du personnel de la CCEA et de l'engagement pris par les titulaires de permis vis-à-vis de la sécurité. Presque tous les titulaires de permis et autres parties intéressées joints pendant la vérification ont exprimé un respect sans équivoque pour le dévouement, le professionnalisme et la compétence technique du personnel de la CCEA.

15.52 La CCEA signale qu'au Canada, il n'y a jamais eu d'accidents impliquant des réacteurs ou des matières radioactives qui aient entraîné un problème décelable pour le grand public et que, sauf dans les mines d'uranium, il y a eu relativement peu de cas où des travailleurs ou l'environnement ont subi des effets néfastes.

15.53 La sûreté des 22 réacteurs nucléaires qui fonctionnent présentement au Canada a aussi été examinée par des groupes d'étude indépendants. Vingt de ces vingt-deux réacteurs sont la propriété d'Ontario Hydro; un réacteur appartient à la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick et un autre appartient à Hydro-Québec. (voir photographe)

15.54 Pour ce qui concerne les réacteurs nucléaires d'Ontario Hydro, le ministère ontarien de l'Énergie a commandé, en 1986, une étude indépendante sur la sûreté des réacteurs par des experts du domaine de l'énergie nucléaire. Cette étude, intitulée Ontario Nuclear Safety Review , ainsi que deux mises à jour ultérieures, portait sur la sûreté des réacteurs nucléaires de l'Ontario entre 1987 et le début de 1993.

15.55 Dans l'étude originale, on a constaté que ces réacteurs sont exploités de façon sûre et que ni le grand public, ni les travailleurs d'Ontario Hydro n'ont subi d'irradiation décelable. Les réacteurs sont exploités suivant des normes techniques élevées et sans qu'il n'y ait eu d'infractions importantes aux règlements pertinents de la CCEA. Les mises à jour ultérieures de cette étude ont permis de constater que l'exploitation des réacteurs d'Ontario Hydro, qui fournissent maintenant environ 50 p. 100 de l'énergie électrique de la province, est toujours conforme aux normes de protection des effectifs et du grand public. Cela étant dit, les installations présentent cependant des symptômes de problèmes techniques depuis déjà quelques années, problèmes dont s'occupe d'ailleurs la société de service public.

15.56 Deux examens indépendants des systèmes de gestion du réacteur nucléaire de la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick ont été effectués. Selon Énergie Nouveau-Brunswick, ces examens, effectués par des organisations internationales d'experts nucléaires, n'ont relevé aucune lacune importante dans cette installation. Un examen international indépendant semblable de la centrale d'Hydro-Québec est prévu pour l'automne 1994.

15.57 En plus de la compétence technique de l'organisme de réglementation, il faut, pour pouvoir fournir l'assurance de la sûreté des exploitations, une gestion efficace du programme de réglementation. Notre examen de la gestion par la CCEA de son programme de réglementation a révélé de nombreux secteurs dans lesquels une amélioration importante s'impose.

Nécessité de renforcer le cadre réglementaire de la CCEA

15.58 Tout organisme de réglementation doit être doté d'une stratégie qui définisse diverses exigences, dont le degré d'intervention normative souhaité; les instruments juridiques existants; les éléments permettant de déterminer l'étendue et la portée du travail de l'organisme de réglementation; la façon dont l'organisme de réglementation évalue la compétence des titulaires de permis et de leur personnel et l'étendue de cette évaluation; l'examen scientifique et technique et la politique d'évaluation de l'organisme de réglementation; et sa politique d'inspection de conformité et d'application des règlements.

Absence d'une stratégie de réglementation clairement consignée
15.59 Comme nous l'indiquons plus loin, la CCEA apporte ou propose des changements importants dans la façon dont elle fonctionne et réglemente l'industrie. Ces changements ont été intégrés dans diverses politiques et procédures internes adoptées récemment, dans les projets de règlement ou de modification des exigences réglementaires de la CCEA, dans ses politiques réglementaires et ses guides et dans les conditions de permis. Citons deux exemples de changement : la Politique d'application de la réglementation de la CCEA, approuvée et émise en février 1993, et les initiatives récentes de la CCEA pour s'assurer de la compétence du personnel clé des centrales nucléaires.

15.60 Dans certains domaines, la CCEA est en train d'adopter une approche plus interventionniste vis-à-vis de la réglementation de l'industrie nucléaire. Cela signifie que non seulement elle établit les « règles du jeu » (précisant aux titulaires de permis ce qu'ils doivent faire), mais aussi qu'elle leur indique comment procéder pour y arriver. Les facteurs jouant un rôle sur le degré d'intervention spécifié par la CCEA incluent la complexité de l'activité, l'expérience acquise avec diverses technologies et l'évaluation faite par la CCEA de la compétence des titulaires de permis. Pour certaines activités, comme des utilisations particulières de radio-isotopes, la CCEA établit dorénavant des exigences plus précises en matière de sécurité.

15.61 Un Comité d'examen ministériel de la dotation à la CCEA a présenté son rapport en février 1990 et a indiqué que, à l'égard de la réglementation des réacteurs nucléaires, moins de personnel serait nécessaire que ce que la CCEA demandait si celle-ci limitait ses activités à celles d'un vérificateur : s'assurer que des processus adéquats sont en place, effectuer des vérifications ponctuelles pour déterminer si les processus sont appliqués comme il se doit et rendre compte des résultats. L'examen a aussi révélé que certaines des activités du personnel de la CCEA (projetées ou en cours) semblaient aller au-delà de ces fonctions. La CCEA n'a pas clairement défini la nature de son rôle de vérification ni l'étendue des activités d'inspection qu'elle souhaite mettre de l'avant en ce qui a trait à la réglementation des réacteurs.

15.62 Un autre changement important en cours concerne la façon dont la CCEA s'assure que le personnel des centrales nucléaires a une formation et des compétences suffisantes pour s'acquitter de ses responsabilités. Par le passé, la CCEA insistait pour s'assurer de la compétence de deux postes clés - chef de quart et opérateur de salle de commande - dont les titulaires assument la responsabilité première de l'exploitation quotidienne des réacteurs. Les candidats à ces postes doivent subir une série d'examens administrés par la CCEA, processus instauré à l'origine dans les années soixante, avant d'être autorisés par la CCEA à exercer leurs fonctions. La CCEA n'exige pas de renouvellement de l'accréditation de ces candidats.

15.63 En 1990, avec la coopération des services publics produisant de l'énergie nucléaire, la CCEA a lancé diverses initiatives en vue d'établir un nouveau régime réglementaire pour examiner la formation et la compétence du personnel opérationnel. Ces initiatives ont entre autres pour objectif :

En outre, on prévoit qu'avec ces changements, il sera possible de compter davantage, le cas échéant, sur les programmes de formation des services publics.

15.64 La stratégie de réglementation sur laquelle reposent ces changements à l'approche vis-à-vis de la réglementation n'est pas établie dans un document global de stratégie.

Nécessité d'une discipline de gestion plus rigoureuse pour l'actualisation des exigences réglementaires
15.65 Un des moyens qui permettraient à la CCEA de remplir ses obligations à titre d'organisme de réglementation consisterait à obtenir le point de vue des parties intéressées sur les projets d'exigences réglementaires et à élaborer et à adopter ces exigences en temps opportun.

15.66 Après avoir établi un premier contact avec les parties directement intéressées, la CCEA distribue ses projets de règlement et de modification importante aux règlements en vigueur, ainsi que ses politiques quasi-réglementaires et ses guides, à titre de documents de consultation. Ce processus, établi en 1981 par la CCEA, constitue un mécanisme qui permet aux titulaires de permis, au grand public et aux groupes d'intérêts spéciaux de faire connaître leur point de vue. La période prévue pour les premiers commentaires est normalement de trois à six mois, selon le sujet en question. Le processus sert aussi de consultation préliminaire dans le cadre de la politique de réglementation du Conseil du Trésor.

15.67 Une fois le processus de consultation terminé, un Résumé de l'étude de l'impact de la réglementation est préparé pour toute proposition qui suppose la rédaction d'un projet de règlement. Le Résumé exige une analyse des avantages que représentent les exigences réglementaires par rapport à ce qu'il en coûte pour les appliquer. Le projet de règlement peut aussi être modifié en fonction des observations reçues. Le règlement ainsi que le Résumé de l'étude de l'impact de la réglementation sont ensuite soumis à l'approbation des instances, selon le processus de réglementation fédéral qui en prévoit la publication, en bout de ligne, dans la Partie II de la Gazette du Canada . La CCEA a relevé certains problèmes au niveau de la préparation de ces Résumés de l'étude de l'impact de la réglementation, plus particulièrement quand il s'agit d'analyser et de comparer les avantages et les coûts liés à la réglementation.

15.68 La CCEA a lancé des projets pour mettre à jour ses exigences réglementaires et a cherché à obtenir le point de vue des parties intéressées; cependant, elle n'a pas veillé à l'achèvement et à l'application en temps opportun de plusieurs de ces projets.

15.69 Par exemple, la CCEA a lancé, en 1980, un projet de remaniement du Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique , qui n'avait pas été modifié en profondeur depuis 1974. Sur les sept règlements qui s'appliquent, le Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique est le plus important. Les six autres règlements sont plus spécifiques ou concernent un domaine d'application plus étroit. Bien que le projet de remaniement vise à établir une base de réglementation à jour et exhaustive pour l'industrie nucléaire, il n'a pas pour objet d'imposer de changements importants à la portée du régime réglementaire. Le projet de remaniement en question a été publié la première fois en 1986 pour que le grand public y donne suite; des changements importants ont découlé de la première publication dans la Gazette du Canada en 1991. Le Remaniement était censé être publié de nouveau dans la Gazette pendant le troisième trimestre de 1994, et être approuvé de façon officielle peu après (soit 14 ans après le lancement du projet).

Commentaire de la CCEA : En raison de certaines questions juridiques liées à la version préliminaire des modifications, la CCEA a suspendu temporairement tout travail additionnel sur le Remaniement du Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique , jusqu'à ce qu'une décision soit prise quant à l'adoption d'une nouvelle loi qui remplacerait l'actuelle Loi sur le contrôle de l'énergie atomique . En attendant, la CCEA a mis sur pied un groupe de travail dont le mandat est de revoir sa structure réglementaire, de retravailler le règlement actuel (là où il y a lieu) et d'élaborer de nouvelles initiatives réglementaires qui seraient compatibles avec la Loi actuelle et toute nouvelle loi. En raison des retards relatifs à l'adoption du Remaniement, la CCEA a préparé un énoncé de principe détaillé (juin 1994), tel qu'indiqué au paragraphe 15.83, visant à mieux définir et à clarifier son processus d'élaboration de la réglementation.

15.70 Parmi les autres projets, on compte l'adoption de nouvelles exigences réglementaires portant sur les services d'étalonnage des instruments de mesure de la radioactivité et sur les services d'essai d'étanchéité. Ces deux projets ont été lancés par le personnel de la CCEA en 1985 et, après une période de consultation publique, des projets de politique réglementaire ont été rédigés à la fin de 1992. Ces politiques viennent d'être approuvées par les cadres supérieurs et sont censées être soumises à l'approbation de la Commission sous peu. La plupart des permis de substances réglementées et de radio-isotopes exigent le recours à l'un ou à l'autre de ces services ou aux deux. Au moment de la vérification, la CCEA ne disposait pas de normes officielles pour ces services.

15.71 Nous avons constaté que le processus consultatif de la CCEA ne prévoit aucun délai fixe pour la disposition définitive d'un document de consultation. Par exemple, 21 documents figurant dans le Catalogue de publications de 1994 de la CCEA n'ont pas progressé au-delà du stade de la consultation, et n'ont pas été retirés non plus. Douze de ces documents datent d'avant 1990 et six d'entre eux ont plus de dix ans.

15.72 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait trouver des moyens d'accélérer le traitement des documents engagés dans le processus consultatif et à d'autres stades pour qu'ils soient publiés dans leur forme définitive, c'est-à-dire sous forme de règlement, de politique ou de guide, ou qu'ils soient retirés après une période raisonnable de consultation.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. Nous avons modifié le processus de préparation des documents consultatifs et réglementaires de manière à assurer la participation de la haute direction (dès le début du processus et à des intervalles fréquents), la surveillance et le suivi réguliers de l'évolution des documents, et le respect d'une période de révision standard et de dispositions de réexamen. D'ici le 31 mars 1996, nous examinerons tous les documents de consultation « en suspens » afin de les officialiser, de les modifier ou de les rééditer pour commentaires, ou nous les retirerons.

La réglementation par les conditions de permis pose des problèmes
15.73 La CCEA a soumis toutes les modifications importantes à ses règlements au processus de réglementation fédéral. Cependant, le cadre réglementaire actuel ne contient pas de règlement propre à la gestion des déchets nucléaires, au déclassement des centrales nucléaires et aux réacteurs de recherche. La CCEA énonce certaines de ses exigences réglementaires relatives à ces domaines, entre autres dans les conditions des permis, qui ont pleine force de loi.

15.74 La CCEA dispose aussi d'outils quasi-réglementaires comme les politiques, les guides et les documents de consultation, qui n'ont aucune valeur juridique à moins d'avoir été inclus dans une condition de permis. Cependant, la CCEA peut choisir, au cas par cas, d'imposer ces exigences en les incluant dans les conditions de permis. Il peut donc être difficile pour les organismes qui demandent un nouveau permis de déterminer au départ les exigences précises de la CCEA.

15.75 En plus des règlements, toutes les autres exigences réglementaires importantes incluses dans les conditions de permis, à l'exception des politiques et des procédures propres au titulaire de permis, doivent être soumises au processus de réglementation fédéral. Cependant, ces autres exigences réglementaires incluses dans les conditions du permis ne sont pas soumises à ce processus. En effet, ces exigences ne font pas l'objet d'un Résumé de l'étude de l'impact de la réglementation en bonne et due forme, d'une analyse de leur impact sur la compétitivité de l'industrie nucléaire ni d'un examen parlementaire.

15.76 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait réexaminer l'utilisation qu'elle fait des conditions de permis pour réglementer l'industrie nucléaire.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA convient de l'importance de respecter le système de délivrance des permis et a établi une stratégie à long terme visant à accorder au plus grand nombre possible d'exigences réglementaires un statut juridique plus important. Par exemple, il se pourrait que des conditions de délivrance de permis couramment appliquées soient intégrées à la réglementation et que certains aspects de la réglementation, communs à bon nombre de domaines d'activité de la CCEA, soient incorporés à la loi. La CCEA consultera ses titulaires de permis sur cette question afin de trouver un équilibre judicieux.

Peu de progrès ont été accomplis au niveau des documents énonçant les exigences réglementaires
15.77 Parallèlement à un examen de ses besoins en ressources humaines en 1989, la CCEA s'est aussi penchée sur son approche vis-à-vis de la réglementation. Cet examen a révélé une lacune au niveau des documents contenant les exigences réglementaires de la CCEA, plus particulièrement quand il s'agit des exigences et des normes de sûreté des réacteurs nucléaires. L'un des facteurs que le Conseil du Trésor a pris en considération en 1989 pour décider d'augmenter les ressources de la CCEA concernait l'amélioration des documents contenant les exigences de la CCEA en matière de sûreté.

15.78 Le Comité d'examen ministériel de la dotation à la CCEA, qui a terminé ses travaux en février 1990, a aussi reconnu la nécessité d'améliorer les documents contenant les exigences réglementaires de la CCEA. Le Comité a signalé de nombreux cas à l'égard de la réglementation des réacteurs, où de nouvelles exigences avaient été imposées aux titulaires de permis sans qu'un renvoi soit fait aux règlements et aux guides existants sur le régime de permis. Dans les recommandations, on proposait entre autres d'améliorer les documents contenant les exigences de la CCEA et d'améliorer la consignation et la publication des décisions portant sur la délivrance des permis, y compris les motifs des décisions dans le domaine de la réglementation des réacteurs. Cependant, on ne prévoyait pas d'en augmenter le contenu prescriptif.

15.79 Bien que le personnel de la CCEA ait lancé certaines initiatives dans le domaine, les documents nécessaires n'existent toujours pas.

15.80 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait disposer de documents plus complets sur ses exigences réglementaires, y compris sur les précédents importants ou les positions réglementaires qui en constituent la base ou les motifs.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA poursuivra son initiative pluriannuelle visant à améliorer la documentation relative à ses exigences réglementaires. Ce processus nécessitera la consultation des intervenants afin d'assurer, notamment, un équilibre judicieux entre les principes généraux et le contenu prescriptif.

Manque de coordination du processus d'élaboration des règlements de la CCEA
15.81 Le processus d'élaboration des règlements à la CCEA est décentralisé. Il incombe à chaque gestionnaire de présenter, le cas échéant, des projets de règlement ou de modifications aux exigences réglementaires. Le gestionnaire prépare ensuite les documents de consultation nécessaires, consulte les parties intéressées et fait approuver son projet par les cadres supérieurs et, s'il y a lieu, par la Commission. L'Unité de l'examen de la réglementation au sein du Secrétariat s'assure que le processus des initiatives réglementaires du Conseil du Trésor est bien suivi.

15.82 En partie en raison du manque de coordination centrale du processus d'élaboration des règlements à la CCEA, il n'existe aucun plan d'action détaillé pour l'élaboration des exigences réglementaires. Par conséquent, aucune priorité n'a été établie pour les initiatives réglementaires, ni d'échéance pour l'achèvement de ces initiatives; par ailleurs, il n'existe pas de mécanismes de surveillance ou de contrôle de gestion.

15.83 En juin 1994, la direction de la CCEA approuvait et mettait en oeuvre une procédure interne pour donner à l'Unité de l'examen de la réglementation la responsabilité de gérer le processus général de réglementation, dont l'examen des nouveaux règlements et des modifications à ceux qui existent déjà.

Possibilités d'améliorer la fonction d'inspection de conformité et d'application des règlements

15.84 Il est vital qu'un organisme de réglementation soit doté d'une fonction d'inspection de conformité et d'application des règlements qui soit efficace. La pièce 15.2 propose une liste des domaines relevant de cette fonction. (voir photographe)

Nécessité de disposer de procédures et de critères de conformité et d'application des règlements
15.85 En février 1993, la Commission approuvait la Politique d'application de la réglementation de la CCEA. L'objectif de la Politique consiste à établir une base pour les procédures et les critères de la CCEA afin de s'assurer qu'un programme de conformité exhaustif est bien en place. La politique vise aussi à s'assurer que les principes d'application des règlements de la CCEA sont mis en oeuvre uniformément, de façon rigoureuse, équitable et prévisible, et ce en temps opportun. Les procédures d'application des règlements devraient prévoir une progression dans le recours aux outils d'application des règlements, s'il y a lieu, selon la gravité de l'infraction commise et suivant les antécédents de la société concernée.

15.86 La CCEA n'a pas encore élaboré de procédures et de critères sur la conformité et l'application des règlements qui soient à jour dans les domaines que nous avons examinés. Ces procédures et ces critères sont exigés par la politique de la Commission, afin de garantir un traitement équitable de tous les titulaires de permis. Pour les centrales nucléaires, la CCEA a approuvé des procédures d'inspection qui sont en voie de mise à jour, mais elle ne dispose pas encore de procédures et de critères d'application des règlements pour étayer la nouvelle politique de la Commission. La mise à jour du guide des inspections relatives aux substances réglementées et aux radio-isotopes est en cours; en outre, des procédures et des critères d'application des règlements à ce chapitre ont été rédigés, mais n'ont pas encore été approuvés. Aucun programme ni aucune procédure ou critère systématique d'application des règlements n'existe à l'égard des responsabilités de la CCEA relatives au transport des matières nucléaires. Les grandes lignes d'un programme en ce sens ont été rédigées en novembre 1993; cependant, les exigences détaillées du programme n'ont pas encore été élaborées.

15.87 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait s'assurer que des procédures et des critères de conformité et d'application des règlements sont élaborés en temps opportun.

Réponse de la CCEA : La CCEA convient qu'il faudrait élaborer les procédés de vérification de la conformité et les modalités d'application dans des délais plus rapides; nous avons déjà adopté des mesures afin d'améliorer la situation. Par exemple, nous avons approuvé un guide de référence relativement aux enquêtes et aux litiges applicable aux permis de radio-isotopes; de plus, la version préliminaire des critères du tableau des résultats d'inspection devrait être approuvée sous peu. Nous venons d'établir un nouveau poste dont le titulaire sera responsable d'améliorer la vérification de la conformité dans le domaine du transport des matières nucléaires.

Nécessité d'une mise en oeuvre intégrale des exigences d'inspection des centrales nucléaires
15.88 En plus de procédures qui soient à jour, il importe, à l'égard de la mise en oeuvre de la fonction d'inspection de conformité et d'application des règlements, de recenser les exigences et les priorités d'inspection et de disposer d'un personnel qui a reçu la formation appropriée sur la réglementation.

15.89 En décembre 1992, la CCEA lançait un projet d'analyse des tâches pour définir ce que les chargés de projet dans les centrales nucléaires devraient faire comme travail et pour déterminer où l'accent devrait être mis. C'est ainsi que la CCEA a recensé plus de 150 types différents de tâches qui pourraient être assumées par ces chargés de projet dans l'optique de déterminer la conformité aux exigences réglementaires. Les responsables du projet se sont aussi penchés sur l'absence de critères écrits à l'égard de la portée des examens et de la fréquence des inspections nécessaires afin de garantir un niveau de sûreté approprié dans les centrales nucléaires. Le projet établira en outre des priorités pour les tâches approuvées.

15.90 Nous avons constaté que ces chargés de projet n'ont reçu que très peu de formation officielle et systématique. Sans une définition précise de leur rôle, il n'est pas possible de préciser concrètement des exigences en matière de formation et d'expérience. Cette question s'inscrit dans le cadre du projet d'analyse des tâches.

15.91 La CCEA croit pouvoir commencer la mise en oeuvre des recommandations du projet d'analyse des tâches avant septembre 1994. Étant donné l'importance du projet, nous encourageons la CCEA à mettre ces recommandations en oeuvre dès que possible.

Commentaire de la CCEA : Nous en convenons. Ce projet se poursuit selon les prévisions.

Application non uniforme de la politique réglementaire de la CCEA sur le déclassement des installations nucléaires
15.92 En août 1988, la CCEA publiait une politique réglementaire sur le déclassement des installations nucléaires. Cette politique prévoyait que les titulaires de permis seraient tenus de présenter des plans de déclassement conceptuel pour toutes leurs installations nucléaires. La politique précise que des plans de déclassement détaillés doivent être présentés au moins un an avant que l'installation n'atteigne la fin de sa vie opérationnelle ou dans les six mois suivant l'annonce d'une fermeture permanente non prévue. Entre 1988 et le début de 1990, la CCEA a informé tous les titulaires de permis d'installations nucléaires de l'adoption de cette politique. Elle demandait en même temps des exemplaires de plans qui répondraient aux exigences de cette politique.

15.93 La CCEA n'a pas appliqué sa politique relative au déclassement de façon cohérente. La CCEA vient de mettre au point une base de données qui contient des plans de déclassement pour 76 des 164 installations nucléaires qui détiennent un permis. La stratégie en vue d'obtenir des plans de déclassement des 88 autres installations est en cours d'élaboration. L'exigence de plans de déclassement ne figure pas dans tous les permis des installations en exploitation.

15.94 Sur les 164 installations nucléaires de la liste, 24 sont fermées définitivement, certaines ayant été partiellement déclassées. La CCEA n'a pas reçu de plans de déclassement pour neuf de ces installations alors que cette demande était tout à fait raisonnable.

15.95 Même dans les cas où de tels plans existent, nous n'avons pas la preuve que la CCEA les a vérifiés pour voir s'ils sont conformes à ses exigences en matière de politique et pour s'assurer de leur vraisemblance, notamment au niveau de l'estimation des coûts. La CCEA n'a pas encore établi de critères précis pour les exigences à inclure dans les plans de déclassement. Elle prévoit élaborer ces critères d'ici mars 1995.

15.96 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait mettre au point et appliquer de façon cohérente des critères relatifs aux plans de déclassement pour toutes les installations nucléaires, et ce dès que possible.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA est en train d'élaborer des lignes directrices relatives à la soumission de plans de déclassement; nous veillerons à l'application régulière de ces exigences dès leur mise en place.

Lacunes au niveau des activités de conformité et d'application des règlements à l'égard des permis de substances réglementées et de radio-isotopes
15.97 Nous avons recensé, à l'égard des permis de substances réglementées et de radio-isotopes, plusieurs domaines où les processus et pratiques de gestion de la CCEA pourraient être renforcés de façon significative : prestation de conseils sur ce que signifient les diverses conditions de permis et le Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique ; évaluation de la compétence des titulaires de permis et, le cas échéant, de leur personnel; et suivi des lacunes recensées lors d'une inspection.

15.98 Critères de conformité. La CCEA n'a pas fourni, à l'égard des quelque 3 700 permis de substances réglementées et de radio-isotopes, de directives écrites pour expliquer ce que signifient les diverses conditions du permis et le Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique . Ces conseils et les critères qui s'y rapportent sont essentiels pour s'assurer que les inspecteurs de conformité appliquent une méthode d'inspection conséquente à chaque type de titulaire de permis. Sans ces critères, l'unité de la CCEA qui définit ces exigences, celle qui vérifie la conformité et les titulaires de permis ne sauraient interpréter de la même façon les exigences réglementaires.

15.99 Compétence des titulaires de permis. La CCEA doit s'assurer de la compétence des titulaires de permis et du personnel qui utilise ou manipule tous les types de substances réglementées et les radio-isotopes. Il faut donc pouvoir disposer de critères afin d'évaluer l'utilité de la formation offerte par le titulaire, critères qui serviront aussi de base à l'application des règlements. Ces critères devraient être mis à la disposition du titulaire de permis et du personnel de la CCEA.

15.100 La CCEA n'a pas fait grand chose pour s'assurer que les demandeurs de permis de substances réglementées et de radio-isotopes sont bien au courant de leurs obligations en ce qui a trait aux exigences réglementaires de la CCEA. Les procédures actuelles de la CCEA ne tiennent pas compte de façon adéquate du besoin qu'a le titulaire de permis de maintenir ses connaissances ou de s'assurer qu'au besoin son personnel possède les mêmes compétences.

15.101 Dans la majorité des cas, les permis relatifs aux substances réglementées et aux radio-isotopes exigent simplement que les personnes qui manipulent des matières radioactives aient reçu une « formation adéquate ». La CCEA a établi des critères de formation pour certaines des utilisations les plus dangereuses des matières radioactives, comme la radiographie et les irradiateurs, ainsi qu'à l'intention des agents de radioprotection dans les hôpitaux. Toutefois, elle n'a pas établi de critères pour définir ce qu'elle entend par « formation adéquate » pour la majorité du personnel des titulaires qui manipule des substances réglementées et des radio-isotopes. Dans ces derniers cas, la condition de permis ne peut pas être appliquée de façon appropriée, puisqu'il n'existe aucun critère à partir duquel mesurer la conformité. Par conséquent, la CCEA ne peut pas s'assurer que les personnes qui manipulent des substances réglementées et des radio-isotopes ont reçu une formation adéquate.

15.102 Les services publics d'énergie nucléaire et certains grands détenteurs de permis offrent des programmes de formation officiels et disposent de personnel et d'installations réservés à cette fin. Cependant, il est peu probable que la plupart des titulaires de permis de substances réglementées et de radio-isotopes, qui dirigent de petites exploitations, aient les mêmes possibilités. Les petites exploitations sont nombreuses et représentent une vaste gamme d'organisations. À notre avis, la CCEA est investie d'une obligation particulière vis-à-vis de ces titulaires de permis si elle veut veiller à ce que la direction et le personnel de la radioprotection comprennent à fond les exigences réglementaires.

15.103 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait, à l'égard des substances réglementées et des radio-isotopes, veiller à ce que le personnel de la CCEA et celui du titulaire de permis interprètent de la même façon les règlements, les conditions de permis et les exigences en matière de formation.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA met la dernière main à un document qui explique les conditions de délivrance de permis de radio-isotopes. Nous élaborons aussi les exigences de formation, en commençant par les utilisations les plus dangereuses. Nous n'avons pas élaboré de document explicatif pour le règlement, puisque le règlement actuel devait être remplacé dans le cadre du Remaniement. Étant donné que l'adoption d'un nouveau règlement a été reportée en attendant la décision sur une nouvelle loi qui remplacerait l'actuelle Loi sur le contrôle de l'énergie atomique, nous examinerons à nouveau l'opportunité de produire des documents explicatifs au sujet du règlement actuel.

15.104 Radiographes. Les radiographes industriels sont chargés de la manipulation de substances réglementées et de radio-isotopes. La CCEA a le pouvoir d'examiner et d'accréditer les radiographes à titre d'opérateurs accrédités aux termes du Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique . Le personnel de la CCEA a proposé des changements à l'examen d'accréditation actuel, qui n'a pas été revu depuis 1983. Ces changements viennent d'être approuvés par la direction de la CCEA et devraient être mis en oeuvre d'ici décembre 1994.

15.105 Le certificat à vie d'opérateur accrédité est accordé à toute personne qui réussit à l'examen de la CCEA. Cependant, les titulaires de ces certificats ne font l'objet d'un examen qu'au moment où la CCEA procède à une inspection de l'installation d'un titulaire de permis qui emploie l'opérateur accrédité en question. Ainsi, il se peut que la CCEA ne fasse jamais subir d'examen aux opérateurs accrédités en vue de vérifier s'ils respectent ses exigences réglementaires. Les titulaires de permis qui emploient des opérateurs accrédités dans le domaine de la gammagraphie industrielle comptent pour environ 3 p. 100 de tous les titulaires de permis de la CCEA, soit une centaine de titulaires. Cependant, ces titulaires sont à l'origine d'une partie, toute proportion gardée, plus importante des incidents et des surexpositions (environ 25 p. 100, ou 8 par année), et des poursuites judiciaires (environ 75 p. 100).

15.106 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait réévaluer le recours aux certificats à vie et les exigences pour l'examen des opérateurs accrédités dans le domaine de la gammagraphie industrielle.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA est en train d'examiner les modalités d'inspection relatives aux radiographes industriels mais, en ce moment, elle ne prévoit pas abolir la délivrance de certificats permanents aux opérateurs qualifiés. Toutefois, la CCEA a préparé la version préliminaire d'un règlement qui lui permettra de retirer ce certificat à la suite de violations sérieuses. Nous croyons que cette mesure, jumelée aux inspections et au contrôle des doses de rayonnement des opérateurs qualifiés, est suffisante.

15.107 Suivi. La CCEA a la possibilité d'améliorer son efficacité au niveau des suivis pour la non-conformité liée aux substances réglementées et aux radio-isotopes. Après une inspection, l'inspecteur de conformité présente un rapport qui détaille les éléments non conformes, le cas échéant, à la division chargée de la délivrance des permis de la CCEA. C'est à cette division qu'il incombe de s'assurer que des mesures correctives sont prises à l'égard des éléments recensés comme étant non conformes.

15.108 Notre examen des dossiers de titulaires de permis a révélé que les agents chargés de la délivrance des permis acceptent une vaste gamme de mesures correctives pour les éléments de non-conformité signalés. Dans certains cas, le titulaire de permis a présenté à l'agent responsable de la délivrance des permis une réponse d'une page indiquant que toutes les lacunes identifiées avaient été corrigées, et ce, sans aucun document justificatif ni explication. Dans d'autres cas, une preuve de la mesure corrective pour chaque lacune a été présentée avec la réponse écrite du titulaire du permis.

15.109 Le manque d'uniformité au niveau de la méthode de suivi pourrait bien contribuer à la persistance d'éléments de non-conformité à l'occasion d'inspections ultérieures. Nous avons relevé un nombre important de cas où l'inspection du titulaire du permis avait révélé le même élément de non-conformité grave au cours de deux inspections consécutives. La CCEA est en train d'organiser de façon plus rigoureuse sa procédure de suivi.

15.110 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait veiller au suivi efficace des éléments de non-conformité liés aux permis de substances réglementées et de radio-isotopes.

Réponse de la CCEA : Nous en convenons. La CCEA a adopté des exigences documentaires et des modalités d'examen plus sévères, qui seront imposées à la suite de la constatation de violations sérieuses.

Gestion des rapports avec les autres champs de compétence

15.111 Pour réduire le fardeau réglementaire des contribuables et des titulaires de permis, tout organisme de réglementation doit s'assurer qu'il gère efficacement ses rapports avec les autres champs de compétence, qu'il s'agisse de coopération, comme l'harmonisation des normes et des procédés réglementaires, de la reconnaissance mutuelle des normes, des compétences ou des spécifications techniques, de la délégation à d'autres paliers de gouvernement de la responsabilité de la réglementation ou de l'administration des règlements, ou du partage du travail et de l'échange de l'information.

15.112 Comme certains aspects de la réglementation nucléaire sont normalement de compétence provinciale ou relèvent d'autres champs de compétence au sein des ministères ou des organismes fédéraux, la CCEA a mis au point un processus réglementaire conjoint avec ces autres organisations. Dans ce contexte, la CCEA agit à titre d'organisme principal tandis que les autres fournissent des avis et des conseils dans leur domaine respectif de compétence. Ce processus s'articule autour de la délivrance de permis et de la conformité aux conditions du permis. L'exercice est aussi l'occasion d'essayer d'éviter le plus possible les cas de double emploi et de chevauchement.

Nécessité de déployer davantage d'efforts pour réduire les cas de double emploi et de chevauchement et les lacunes au niveau des règlements
15.113 Depuis 1981, la CCEA a conclu au total 12 ententes avec des ministères et des organismes fédéraux et provinciaux dans l'optique de clarifier les rôles et les responsabilités dans les domaines de compétence commune, à savoir : l'environnement, le transport, la santé et la sécurité professionnelles, les cuves sous pression dans les installations nucléaires et les mines d'uranium. Huit de ces ententes ont été signées en 1985 ou avant. Au moins deux de ces ententes doivent être mises à jour pour mieux tenir compte des rôles et des responsabilités ainsi que de la nouvelle conjoncture.

15.114 Le conseil consultatif du ministre sur l'examen de la réglementation a signalé, en octobre 1993, des cas de double emploi au niveau des responsabilités réglementaires pour ce qui concerne les mines d'uranium. La CCEA était déjà au courant de ce problème et avait conclu, bien des années auparavant, un protocole d'entente avec la province de l'Ontario, aux termes duquel celle-ci effectue des inspections des exigences conventionnelles de santé et de sécurité dans les mines. En novembre 1993, la CCEA a signé un protocole d'entente avec le gouvernement de la Saskatchewan pour réduire les cas de double emploi et de chevauchement au niveau de la réglementation des mines d'uranium de la Saskatchewan. Néanmoins, il reste à définir les dispositions administratives pour l'application de cette entente.

15.115 Aux termes du Règlement sur le contrôle de l'énergie atomique , la CCEA est responsable des questions de santé, de sécurité, de sécurité matérielle et de protection de l'environnement pendant le transport des matières « radioactives ». Transports Canada et certaines des provinces ont aussi des responsabilités à l'égard du transport de ces matières. Jusqu'à 800 000 colis de matières radioactives sont exportés, importés ou transportés chaque année au Canada. Ces colis contiennent des radio-isotopes utilisés à des fins industrielles, agricoles, médicales et de recherche, ainsi que du matériel pour les centrales nucléaires. La CCEA n'a pas le pouvoir juridique d'arrêter le trafic ou les transporteurs pendant la phase de transit afin d'effectuer des inspections. Des ententes de coopération doivent donc être signées avec les compétences fédérales et provinciales appropriées, et ce dans l'optique de permettre à la CCEA d'assumer ses responsabilités pendant le transport des matières « radioactives ». (voir photographe)

15.116 Aux termes de la Loi sur le transport des marchandises dangereuses , Transports Canada établit des normes pour les transporteurs à l'égard du transport de toutes les marchandises dangereuses; les matières radioactives ne représentent qu'une catégorie de marchandises dangereuses. La CCEA régit l'emballage de ces matières par son Règlement sur l'emballage des matières radioactives destinées au transport . En 1981, la CCEA et Transports Canada ont conclu un protocole d'entente sur le transport des matières radioactives. Cette entente ne tient pas compte de toutes les responsabilités de la CCEA à l'égard des matières radioactives en transit. En août 1991, un nouveau protocole d'entente a été rédigé par la CCEA pour la clarification des rôles et des responsabilités à partir de son expérience à cet égard. Cette nouvelle version du mémoire d'entente n'est toujours pas approuvée.

15.117 Les provinces exercent aussi certaines responsabilités à l'égard du transport à l'intérieur de leurs frontières. À l'heure actuelle, il n'existe aucune entente de coopération avec les provinces à cet égard. La CCEA et le ministère des Transports de l'Ontario ont entrepris, en mai 1989, des consultations en vue d'améliorer l'application des exigences réglementaires de la CCEA à l'égard du transport routier des matières radioactives en Ontario. Au moment de notre vérification, aucune entente n'avait encore été finalisée. La CCEA envisage de négocier des ententes similaires avec les autres provinces et, pour ce faire, de tenir compte de son expérience avec l'Ontario. En l'absence d'ententes de coopération avec les provinces, la CCEA est incapable d'assumer intégralement ses responsabilités réglementaires pendant la phase de transit du transport des matières radioactives.

15.118 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait examiner les ententes interorganismes actuelles pour s'assurer qu'elles reflètent fidèlement les rôles et les responsabilités et tiennent compte de la conjoncture actuelle. Elle devrait définir dès que possible les dispositions administratives pour l'application de l'entente avec le gouvernement de la Saskatchewan qui vise à réduire les cas de double emploi au niveau de la réglementation des mines d'uranium, et avec toutes les provinces afin d'assurer l'application des exigences réglementaires de la CCEA relativement au transport des matières radioactives.

Réponse de la CCEA : La CCEA convient qu'il faudrait accorder une plus grande priorité à ces éléments et s'efforce, de son côté, d'accélérer le processus dans la mesure du possible; toutefois, il se peut que l'organisme correspondant dans chacun des cas n'accorde pas la même priorité à la situation.

De nombreux intervenants s'occupent de déchets nucléaires
15.119 La CCEA joue un rôle au niveau de la réglementation de la gestion des déchets nucléaires. Elle est chargée de préciser les exigences réglementaires, de juger les solutions pour la gestion des déchets nucléaires proposées dans les demandes de permis, de délivrer des permis pour les sites d'entreposage et pour l'évacuation permanente des déchets, et d'inspecter les sites qui détiennent un permis pour les déchets nucléaires.

15.120 La responsabilité des déchets nucléaires au Canada et de la solution aux problèmes posés par les déchets radioactifs de faible activité, le combustible nucléaire irradié et les résidus de l'extraction du minerai d'uranium est partagée entre plusieurs intervenants, dont la CCEA. Les autres intervenants exercent certaines responsabilités non réglementaires liées à la gestion ainsi qu'au nettoyage et à l'évacuation éventuels des déchets nucléaires.

15.121 Nous nous proposons, dans une vérification ultérieure, d'examiner plus à fond la question plus vaste de la gestion par le fédéral des déchets nucléaires, notamment les responsabilités des autres intervenants fédéraux, ainsi que les progrès réalisés relativement aux questions en suspens.

Nécessité d'un plan stratégique

15.122 En plus de disposer des systèmes de gestion essentiels indiqués à la pièce 15.2, tout organisme de réglementation doit aussi s'assurer qu'il gère ses opérations d'une façon efficace et efficiente. La direction doit avoir un plan stratégique rigoureux, qui fasse le pont entre les programmes et les services d'une part et la stratégie de réglementation d'autre part, et qui fournisse le cadre pour la détermination des besoins au niveau des ressources.

15.123 Le plan stratégique doit comprendre le but, les objectifs et les priorités de l'organisme. Il n'existe à l'heure actuelle aucun plan de ce genre qui regroupe ces divers aspects pour la CCEA. Celle-ci a lancé un plan d'action en janvier 1994 afin d'élaborer un plan stratégique qui devrait être achevé avant juin 1995. Il importe que la CCEA veille à incorporer dans son plan stratégique une stratégie de réglementation clairement définie.

15.124 L'absence d'un président à plein temps de janvier 1993 à septembre 1994 pourrait bien avoir ajouté à la faiblesse de l'orientation stratégique de la CCEA. Cette absence a aussi rompu les liens essentiels qui existaient entre les commissaires et le personnel de la CCEA.

Les rôles et les responsabilités ne sont pas clairement définis
15.125 Les rôles et les responsabilités au sein de la CCEA ne sont pas clairement définis. La CCEA croit que l'ambiguïté actuelle au niveau du partage des responsabilités entre l'administration centrale et les inspecteurs en centrale et dans les régions rend particulièrement ardue la responsabilisation individuelle. Les titulaires de permis ont aussi exprimé des inquiétudes et un certain sentiment de confusion à l'égard des exigences qui ne sont pas coordonnées et qui émanent de différents secteurs au sein de la CCEA.

15.126 La CCEA a lancé un projet en vue d'améliorer la définition et la consignation des rôles et des responsabilités de chaque division et de chaque personne au sein des unités. Elle prévoit terminer la première étape de ce projet d'ici octobre 1994 dans le cas des activités de réglementation qui s'appliquent aux centrales nucléaires.

Les besoins en ressources humaines doivent être réexaminés

15.127 Pour qu'un organisme de réglementation puisse bien évaluer ses besoins en ressources humaines, il doit posséder l'information qui se trouve généralement dans une stratégie de réglementation et un plan stratégique.

15.128 Dans son Rapport annuel de 1988-1989, la CCEA indiquait que ses ressources étaient insuffisantes pour lui permettre d'assumer intégralement toutes ses responsabilités. La direction de la CCEA estimait que le personnel, à l'époque, ne pouvait suffire à la tâche que représentent les processus nécessaires d'examen, de délivrance de permis, d'inspection et d'application exigés par les règlements.

15.129 Après une série d'études internes effectuées par la CCEA entre novembre 1987 et mai 1989, la CCEA a établi qu'il lui fallait obtenir au total 246 années-personnes supplémentaires au cours d'une période de cinq ans. Cela représente une augmentation de presque 95 p. 100 par rapport au niveau de dotation autorisé pour 1989. Notre examen des documents connexes a révélé que la CCEA n'avait pas énoncé clairement toutes les hypothèses et les justifications au niveau de la charge de travail à partir desquelles elle a calculé ses besoins en ressources humaines.

15.130 En 1989, on amorçait le programme d'accroissement progressif des effectifs proposé par la CCEA. Les premières étapes du programme se sont déroulées de novembre 1989 à juin 1992, période pour laquelle le Conseil du Trésor a approuvé une augmentation totale de 156 années-personnes. Les augmentations du personnel ont été approuvées en raison de la nécessité d'améliorer considérablement l'efficacité de la réglementation nucléaire. Cependant, en partie en raison des difficultés que représente la dotation de postes techniques spécialisés, l'effectif réel de la CCEA au mois de décembre 1993 avait augmenté d'environ 40 p. 100, ou de 110 années-personnes, par rapport au niveau de 1989.

15.131 Les augmentations en ressources approuvées jusqu'en juin 1992 correspondaient, pour l'essentiel, à l'une des recommandations du Comité ministériel d'examen de la dotation à la CCEA. À cause des incertitudes face à l'avenir de l'industrie nucléaire, le Comité ne se sentait pas en mesure de prédire les besoins en ressources de la CCEA au-delà de cette date. Par conséquent, il recommandait qu'un nouvel examen détaillé de toute la question de dotation à la CCEA soit entrepris en 1994. Les coupures que le gouvernement a annoncées depuis 1992 ont rendu plus pressante la nécessité de réexaminer les besoins en ressources de la CCEA. Dans le contexte des compressions budgétaires, la CCEA a terminé, en avril 1994, un rapport sur la répartition des ressources. Un examen plus poussé des besoins en ressources de la CCEA serait opportun.

15.132 Les éléments de la stratégie de réglementation et du plan stratégique de la CCEA et des hypothèses précises quant à sa charge de travail n'ont pas été clairement définis, regroupés et approuvés. En l'absence d'une telle documentation, la CCEA ne dispose pas de données de base à partir desquelles évaluer de façon appropriée ses besoins en ressources humaines.

15.133 La Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait :

Réponse de la CCEA : La CCEA convient qu'elle devrait mieux documenter sa stratégie en matière de réglementation, notamment les hypothèses et le raisonnement qui fondent l'évaluation de ses besoins en ressources humaines. La CCEA prévoit poursuivre les efforts entrepris en 1994 dans ce domaine.

Le Comité d'examen avait recommandé un réexamen, en 1994, de la question de la dotation en personnel en prévision d'une demande de ressources additionnelles de la part de la CCEA après 1994. De fait, la série de compressions budgétaires imposées par le gouvernement depuis 1993 empêchera la CCEA d'atteindre le niveau de dotation autorisé en 1992. Par conséquent, l'examen des ressources humaines de 1994 fut entrepris en fonction d'objectifs différents de ceux prévus à l'origine. La CCEA convient qu'elle doit continuer d'évaluer périodiquement ses besoins globaux, en tenant compte des développements au sein de l'industrie nucléaire, de manière à déterminer si elle possède des ressources adéquates pour réaliser son mandat.

La CCEA ne dispose pas de mécanismes efficaces de surveillance de gestion

15.134 L'évaluation de programme et la vérification interne sont des mécanismes importants de surveillance de gestion qui peuvent aider à déterminer :

15.135 La CCEA n'a pas effectué d'évaluation officielle de programme depuis 1988. Au nombre des domaines qu'il faut évaluer, on compte la réglementation des centrales nucléaires, la gestion des déchets nucléaires, les installations de recherche et les accélérateurs, les normes et exigences réglementaires ainsi que la sûreté des installations et des matières nucléaires.

15.136 Certains examens du programme de réglementation de la CCEA ont bel et bien été effectués. Par exemple, la CCEA a répondu à l' Ontario Nuclear Safety Review , qui a examiné, en partie, la réglementation de la CCEA visant les centrales nucléaires. Elle a aussi participé à l'étude effectuée par le Comité d'examen ministériel de la dotation à la CCEA en 1989 et en 1990; cet examen portait, entre autres, sur l'efficience et l'efficacité des programmes réglementaires de la CCEA. Cependant, comme l'indique notre vérification de l'évaluation des programmes au gouvernement fédéral, en 1993, ces mécanismes d'examen n'offrent pas la même assurance relativement à l'uniformité de la méthode que les évaluations de programme.

15.137 En outre, la CCEA a réalisé seulement deux vérifications internes depuis 1990. Une première vérification portait sur le Bureau d'information publique de la CCEA et l'autre, sur son programme de recouvrement des coûts.

15.138 Au moment de notre vérification, le poste d'agent de vérification et d'évaluation était vacant et les activités d'évaluation de programme et de vérification interne étaient en suspens. Par conséquent, des mécanismes précieux de surveillance de gestion, qui auraient pu aider à prévenir ou à déceler de nombreux problèmes recensés par notre vérification, n'ont pas été utilisés de façon efficace.

15.139 Pendant notre vérification, nous avons attiré l'attention des cadres supérieurs de la CCEA sur certaines lacunes au niveau de ses projets de politique, de plans et de guides pour relancer les évaluations de programme et les vérifications internes. La CCEA vient de commencer à prendre les mesures nécessaires, dont la nomination d'un agent de vérification et d'évaluation, pour donner suite à nos préoccupations au sujet de ces mécanismes importants de surveillance de gestion.

Possibilités d'améliorer les mécanismes de communication de l'information au Parlement et au grand public

15.140 La Partie III du Budget des dépenses de la CCEA fournit de l'information limitée sur les mesures concernant le régime de permis et sur le nombre des inspections de conformité dans les centrales nucléaires et relativement aux substances réglementées et aux radio-isotopes. L'information communiquée au Parlement et au grand public pourrait être améliorée sans qu'il faille étoffer davantage la Partie III de la CCEA; il suffirait de faire un renvoi au Rapport annuel de la CCEA et aux rapports annuels des agents sur chacune des centrales nucléaires. Ces rapports fournissent de l'information plus détaillée sur ces activités de la CCEA et d'autres activités.

15.141 Cependant, notre examen de ces rapports a révélé que ceux-ci pourraient aussi être améliorés s'ils fournissaient de l'information plus utile. Le Rapport annuel de la CCEA pourrait, par exemple, inclure de l'information appropriée sur les indicateurs de rendement de la CCEA ainsi que des comparaisons avec les années précédentes, et ce dans l'optique d'analyser les tendances.

15.142 Les rapports annuels des agents de la CCEA concernant chacune des centrales nucléaires constituent une source potentiellement importante d'information sur la sûreté de ces centrales. Cependant, nous avons constaté que les rapports en question ne sont pas cohérents au niveau du degré de détail et de la façon dont leur but, leurs données et leurs conclusions sont rédigés. Par exemple, l'information sur le rendement contenue dans les rapports est présentée sans que soient énoncées des normes quantitatives précises. L'information n'est pas suffisante, si bien que le lecteur ne peut en saisir l'importance réelle. En outre, comme des données portant sur plusieurs années ne sont pas toujours présentées dans les cas où il y aurait lieu qu'elles le soient, il n'est pas possible d'analyser les tendances.

Conclusion

15.143 Jusqu'à maintenant, la CCEA fournit aux Canadiens l'assurance que l'industrie nucléaire est exploitée de façon sûre. En cette période de changements et de difficultés, la CCEA doit faire preuve de plus de vigilance encore pour pouvoir continuer de donner cette assurance. La Loi sur le contrôle de l'énergie atomique de 1946 limite la capacité de la CCEA de faire appliquer ses exigences réglementaires et de répondre aux nouvelles attentes à l'égard de la santé, de la sécurité et de la protection de l'environnement. Il importe que des changements à cette Loi soient considérés par le Parlement.

15.144 Dans les domaines que nous avons examinés, nous avons constaté que la CCEA ne remplissait pas toutes ses obligations à titre d'organisme de réglementation en raison de lacunes au niveau de ses processus et de ses méthodes de gestion. La CCEA a déjà commencé à prendre les mesures qui s'imposent pour améliorer ses procédés et ses méthodes de gestion, mais il est essentiel qu'elle mette en place ces améliorations sans tarder. Nous croyons que la nouvelle présidente, en fonction depuis septembre 1994, aura un rôle important à jouer pour ce qui est de déterminer l'orientation stratégique que la CCEA doit prendre pour améliorer ses pratiques de réglementation.

15.145 À notre avis, sans une actualisation de la Loi et une amélioration de ses procédés et méthodes de gestion, la CCEA sera limitée dans sa capacité de fournir l'assurance que l'industrie nucléaire demeure sécuritaire.