Le Service correctionnel du Canada

La garde des détenus

Vérificateur général adjoint : David Rattray
Vérificateur responsable : David Brittain


Points saillants

16.1 En 1992-1993, le Service correctionnel du Canada (SCC) a dépensé près de 1 milliard de dollars pour la garde de 12 500 délinquants incarcérés dans les prisons fédérales et pour la surveillance de 9 500 autres délinquants mis en liberté sous condition dans la collectivité. Le coût direct moyen pour la garde et la réadaptation d'un détenu, dans une prison du SCC, est de 48 000 $. Lorsque les coûts en immobilisations, les frais des administrations centrale et régionales ainsi que les dépenses engagées par d'autres ministères sont ajoutés à ce chiffre, cette moyenne peut atteindre 80 000 $.

16.2 Bien que le Service correctionnel soit l'organisme chargé d'administrer les peines des détenus incarcérés dans les prisons fédérales, il n'a qu'un contrôle limité sur sa population de détenus. C'est à lui qu'il incombe de régler bon nombre des problèmes liés au logement dont il est question dans le présent chapitre, mais les décisions des tribunaux et de la Commission nationale des libérations conditionnelles ont une incidence sur le nombre de détenus dans les pénitenciers du SCC.

16.3 Les détenus des pénitenciers fédéraux sont logés dans des prisons dont le niveau de sécurité varie - maximum, moyen et minimum - selon le risque qu'ils représentent. Un système bien conçu de classement de sécurité des détenus est essentiel si l'on veut minimiser le risque pour la sécurité du public et réduire les frais de fonctionnement des prisons. Nous avons repéré des lacunes dans la conception et l'application du processus de classement de sécurité du Service. Le Service correctionnel doit disposer de renseignements précis et à jour sur le classement et le placement des détenus.

16.4 En 1981 et 1986, nous avons relevé des faiblesses importantes dans la planification du logement des détenus relevant du SCC. Au cours de la présente vérification, nous avons constaté que le Service avait continué de favoriser les projets de réaménagement et de remplacement. Pour conserver sa capacité, le Service doit consacrer une partie de ses fonds d'immobilisations à l'entretien et au réaménagement des installations qui se détériorent, mais il n'a pas effectué les analyses coûts-avantages du cycle de vie nécessaires pour démontrer le bien-fondé de cette approche. Il a également été lent à envisager le partage des locaux (construction de cellules prévues pour plus d'une personne) comme une solution valable. De 1986 à 1993, le Service correctionnel n'a augmenté sa capacité totale que de 900 places alors que la population carcérale, elle, augmentait de plus de 2 000. Par conséquent, la double occupation des cellules (deux détenus dans une cellule prévue pour un) est passée de 7 p. 100 en 1986 à 24 p. 100 en 1993.

16.5 Pendant notre vérification, le Service s'est attaqué à la dichotomie que représente, d'une part, l'accroissement de la population carcérale et, d'autre part, la baisse des ressources financières. Le Service correctionnel prévoit donc adopter une nouvelle politique de double occupation des cellules et de partage des locaux. Nous estimons que la double occupation grandissante des cellules, depuis le début des années 1980, a permis d'économiser, aux contribuables, environ 240 millions de dollars en éventuels coûts uniques en capital pour la construction de nouvelles prisons et a réduit les dépenses de fonctionnement d'environ 60 millions de dollars par année. Nous estimons en outre que si le Service met en oeuvre sa nouvelle politique de consacrer jusqu'à 25 p. 100 de sa capacité actuelle à la double occupation des cellules ou au partage des locaux, il pourrait éviter d'autres frais uniques en capital de plus de 100 millions de dollars et économiser 30 millions de dollars de plus par année en dépenses de fonctionnement. Le Service devra cependant agir avec précaution, parce que cette politique se démarque complètement de sa philosophie traditionnelle et qu'on ne connaît pas encore les effets à long terme de la double occupation des cellules et du partage des locaux sur l'efficacité des services correctionnels. Une fois cette nouvelle politique officiellement adoptée, il devra également revoir sa planification à long terme des locaux.