Affaires étrangères et Commerce international Canada

Contributions d'aide technique à l'Europe centrale et de l'Est et à l'ex-Union soviétique

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Vérificateur général adjoint : Richard B. Fadden
Vérificateur responsable : Vinod Sahgal

Introduction

21.8 L'effondrement de l'empire soviétique et l'émergence d'États indépendants en Europe centrale et de l'Est et dans l'ex-Union soviétique (la région) désirant adopter des valeurs et des institutions démocratiques est une chance historique qui nous est offerte pour bâtir un ordre mondial plus stable et plus pacifique. Le pendant de cette chance est le spectre de l'instabilité régionale et mondiale en cas d'échec. L'aide des pays occidentaux à la région pour appuyer la transition vers la démocratie et l'économie de marché répond à des intérêts fondamentaux stratégiques des points de vue politique et économique. Autrement dit, ces pays considèrent que l'apparition de marchés libres et compétitifs, conjuguée à la stabilisation économique et à la privatisation au sein de sociétés démocratiques, favorisera la prospérité et la croissance économique. À terme, les économies de la région devraient s'intégrer au système financier et commercial international, ce qui renforcera la stabilité politique et économique à l'échelle mondiale.

21.9 Vingt-sept pays fournissent de l'aide à la région : les membres du G-24 et trois autres. Les membres du G-24 sont douze pays de l'Union européenne, six pays de l'Association européenne de libre-échange, les États-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la Turquie. Les principaux donateurs multilatéraux sont la Commission de l'Union européenne (comme entité distincte de ses membres), la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, et l'Organisation de coopération et de développement économique ( pièce 21.1 ). En outre, de nombreux États ou provinces, des municipalités, des entreprises privées, des fondations privées et des organisations non gouvernementales fournissent également de l'aide. Par exemple, plus de 40 entités fédérales, étatiques et municipales de l'Allemagne seulement, chacune ayant ses propres objectifs, oeuvrent en Hongrie et dans la République tchèque.

21.10 Étant donné la multiplicité des donateurs gouvernementaux, non gouvernementaux et multilatéraux, la coordination des programmes est essentielle mais, de ce fait, plutôt difficile. À cause de cela, les donateurs ont mis sur pied divers mécanismes de coordination. En outre, les donateurs individuels coordonnent leurs efforts avec d'autres donateurs oeuvrant dans des secteurs d'intérêt commun.

21.11 Le Comité d'aide au développement de l'Organisation de coopération et de développement économique publie des chiffres sur le montant de l'aide technique fournie par les donateurs bilatéraux individuels. Toutefois, les derniers chiffres disponibles à ce sujet concernent les années civiles 1991 et 1992 ( pièce 21.2 ). C'est l'Allemagne qui donne le plus, et de loin, alors que la contribution du Canada est relativement modeste.

21.12 Les quatre dernières années ont montré que la transformation politique et économique complète prendra beaucoup plus de temps que ne l'avaient prévu les dirigeants politiques des pays donateurs et des pays bénéficiaires de l'aide. Cette transformation complète exigera une aide soutenue des donateurs, notamment pour résoudre des problèmes macro-économiques de fond. Affaires étrangères et Commerce international Canada (le Ministère) estime que cela exigera un leadership actif et soutenu de la part des institutions multilatérales.

Nature de l'aide

21.13 Le Ministère gère un programme d'aide à l'Europe centrale et de l'Est et à l'ex-Union soviétique qui s'ajoute aux autres efforts d'aide canadiens dans la région. Ces efforts comprennent la participation du Canada à l'élaboration de politiques internationales au sein du G-7 et des instances de décision des grandes institutions multilatérales, comme les institutions financières internationales, qui sont actives dans la région. Celles-ci fournissent une aide très diversifiée, de nature aussi bien macro-économique que micro-économique au niveau des projets. L'aide du Canada comprend également un allégement de l'endettement. Par exemple, le Canada a radié une partie importante de l'intérêt sur les crédits à l'exportation octroyés à la Pologne par la Société d'expansion des exportations et par la Commission canadienne du blé.

21.14 À l'origine, l'aide fournie par le Ministère était considérée comme une aide financière exceptionnelle et de courte durée, destinée à appuyer les efforts de réforme des pays qui se sont engagés les premiers dans cette voie. C'est ainsi qu'a été lancé, en 1989, un premier programme d'aide à la Pologne et à la Hongrie. À mesure que d'autres pays de la région ont emprunté le chemin des réformes, ils sont devenus eux aussi admissibles à l'aide canadienne. L'aide fournie par le Ministère peut être répartie en trois catégories.

21.15 L'aide technique bilatérale est destinée à financer des projets dans des secteurs prioritaires qui, selon le Ministère, apporteront une contribution réelle aux trois objectifs primordiaux du programme. Il s'agit de projets mis en oeuvre par des organisations canadiennes en coopération avec des organisations partenaires des pays bénéficiaires. Ces agents d'exécution gèrent la coopération technique, généralement en fournissant des conseils sur l'élaboration des politiques, le renforcement des institutions et le perfectionnement des ressources humaines. Le programme d'aide technique bilatérale comprend par exemple le programme Renaissance Europe de l'Est, un programme souple de partage des coûts qui permet d'aider les entreprises canadiennes à élaborer des projets en participation, à exploiter des possibilités de commerce et d'investissement et à fournir une formation particulière d'entreprise. (voir photographe)

21.16 L'aide technique multilatérale est destinée à appuyer les programmes des organisations multilatérales et des institutions financières internationales, notamment des projets favorisant le bon gouvernement et une bonne conduite internationale. (voir photographe)

21.17 L'aide humanitaire est habituellement fournie par le truchement des organisations des Nations Unies, de la Croix-Rouge ou d'organisations humanitaires canadiennes, en privilégiant les endroits où elle peut être le plus utile. Par exemple, une aide alimentaire est fournie depuis 1991-1992 aux groupes les plus vulnérables des pays de la région, notamment l'ex-Yougoslavie.

21.18 Aux fins du présent chapitre, « le programme » désigne uniquement l'aide technique bilatérale (y compris le programme Renaissance) et multilatérale.

Objectifs du programme

21.19 Le programme a été mis sur pied pour servir les intérêts de la politique étrangère du Canada. Il repose d'abord sur les intérêts nationaux du Canada, qui comprennent notamment le renforcement de la sécurité mondiale, l'instauration d'un ordre mondial stable et intégré fondé sur des régimes démocratiques et des économies de marché compatibles avec les nôtres, l'avancement des intérêts politiques, économiques et commerciaux du Canada dans la région, et le renforcement des relations bilatérales. Il correspond également à la prise en charge par le Canada de ses responsabilités dans le cadre du partage des tâches entre les membres du G-7 et du G-24.

21.20 L'objectif primordial du Canada dans la région est de contribuer au maintien de la paix et de la sécurité mondiales - c'est-à-dire de tirer pleinement parti de l'occasion qui est offerte de rebâtir un ordre mondial stable après la guerre froide. Un certain nombre de pays de la région possèdent l'arme nucléaire. L'échec de la transition pacifique vers la démocratie et l'économie de marché provoquerait dans la région européenne une instabilité qui nuirait aux intérêts du Canada et à la sécurité mondiale. L'ex-Yougoslavie en est un cas d'espèce.

21.21 Le programme contribue également aux intérêts politiques, économiques et commerciaux du Canada et au renforcement des relations bilatérales. L'émergence de marchés libres dans la région pourrait offrir des possibilités importantes de commerce et d'investissement pour le Canada. En même temps, favoriser l'intégration des économies de la région dans le système économique mondial devrait contribuer à la prospérité de l'économie mondiale et du système des échanges commerciaux.

21.22 Finalement, le vif désir des 10 p. 100 de Canadiens ayant des origines familiales dans cette région d'appuyer et de favoriser la transformation des pays concernés est également un facteur important sous-jacent à l'action du Canada. (voir photographe)

21.23 Le programme canadien d'aide technique sert les intérêts de la politique étrangère canadienne à partir de trois objectifs : ( voir photographe )

Financement, fondement et organisation du programme

21.24 Financement . Au départ, la majeure partie du financement provenait de la réserve du Conseil du Trésor pour les priorités. Mais l'on a rapidement constaté que l'effort canadien serait probablement de plus longue haleine et qu'il faudrait une source de financement plus permanente. Depuis le budget fédéral de février 1991, le Ministère demande donc l'approbation du Conseil du Trésor pour puiser les crédits nécessaires dans la réserve de l'enveloppe d'aide internationale. L'affectation complète de la réserve n'avait pas été faite au budget principal du Ministère. Les soldes de la réserve sont inclus dans les budgets supplémentaires à mesure que sont proposées durant l'année des initiatives internationales exigeant des fonds. La réserve n'est qu'une petite partie de l'enveloppe d'aide internationale. L'autre volet, beaucoup plus gros, est l'aide publique au développement; l'Agence canadienne de développement international (ACDI) est responsable d'environ 80 p. 100 de l'aide publique au développement, laquelle fait partie du Budget principal des dépenses .

21.25 Il existe plusieurs différences entre le programme d'aide technique et le programme géographique de l'ACDI. Premièrement, le programme d'aide technique n'est pas axé sur le développement des infrastructures matérielles et sociales mais sur le souci d'aider les sociétés concernées à évoluer vers des régimes démocratiques et des économies de marché en recommençant à exploiter leurs connaissances et à acquérir de nouvelles compétences. Deuxièmement, le programme ne repose pas sur des ententes de coopération bilatérale officielle de pays à pays. Troisièmement, la plupart des pays de la région bénéficiant du programme ne sont pas admissibles à l'aide publique canadienne au développement.

21.26 Fondement . De par sa portée générale, la Loi sur le ministère des Affaires extérieures , 1980-1981-1982-1983, donne au ministre des Affaires étrangères le pouvoir de gérer le programme d'aide technique. Le Ministère n'a pas demandé de législation habilitante particulière pour le programme lui-même. Le cadre politique et les ressources financières du programme émanent plutôt d'une série de décisions du Cabinet et du Conseil du Trésor. Le programme a évolué en réponse aux engagements pris par le Canada lors des divers sommets du G-7 tenus entre 1989 et 1993, par exemple l'engagement pris au Sommet de Paris de 1989 de fournir une aide technique à la Pologne et à la Hongrie (de concert avec les autres membres du G-7) et celui pris au Sommet de Londres de 1991 envers l'Union soviétique.

21.27 Les modalités approuvées par le Conseil du Trésor définissent le cadre des pouvoirs en vertu duquel fonctionne le programme. La délégation des pouvoirs d'approbation de projets est décidée au sein du Ministère. Jusqu'en février 1994, la haute direction du Ministère détenait le pouvoir d'approbation des projets d'un montant maximum de 5 millions de dollars, mais les cadres du Ministère soulignent qu'ils ont demandé « l'approbation par le Ministre de tous les projets susceptibles de revêtir une importance politique et économique et de tous ceux ayant une valeur de 5 millions de dollars ou plus ». Présentement, l'approbation ministérielle est requise pour tous les projets de plus de
100 000 $.

21.28 Organisation . Un groupe de travail a été mis sur pied en 1989 pour gérer le programme. Par la suite, en juillet 1993, après que le Conseil du Trésor eut approuvé la continuation de l'aide canadienne à la région, le Ministère a créé à titre permanent une Direction générale de l'assistance à l'Europe centrale et à l'Europe de l'Est pour succéder au groupe de travail. La nouvelle direction générale fait partie du Secteur de l'Europe du Ministère, chargé de gérer les relations du Canada avec l'Europe de l'Ouest et de l'Est et de faire avancer les intérêts canadiens dans cette région.

21.29 L'expansion du programme a fait augmenter le nombre de personnes participant à sa gestion et à sa prestation. Ainsi, le personnel s'occupant du programme à l'Administration centrale est passé de cinq personnes en 1989 à 67 postes permanents le 31 mars 1994. En outre, dix employés canadiens et 25 employés de programme et de soutien recrutés localement contribuent actuellement dans les missions à l'étranger à dispenser le programme d'aide technique. Les dépenses de fonctionnement déclarées par le Ministère sont passées de 2 millions de dollars en 1992-1993 à 7,2 millions de dollars en 1993-1994. On s'attend à ce qu'elles augmentent encore en 1994-1995, en partie puisque d'autres employés canadiens et locaux ont été affectés au programme d'aide technique dans plusieurs missions à l'étranger.

Portée et dépenses du programme

21.30 Pays admissibles. La portée du programme s'est élargie rapidement, puisqu'elle est passée de deux pays admissibles en 1989 à 26 en 1994, soit huit pays du programme et six pays hors-programme en Europe centrale et de l'Est, et trois pays du programme et neuf pays hors-programme dans l'ex-Union soviétique ( pièce 21.3 ).

21.31 Les pays du programme sont ceux qui jouissent d'affectations budgétaires particulières, qui sont admissibles à toutes les formes d'aide et qui bénéficient de projets d'aide technique destinés à répondre à leurs besoins. Les pays hors-programme ne jouissent pas d'affectations budgétaires particulières, mais ils sont admissibles à des projets souples et occasionnels d'aide technique et peuvent bénéficier de l'aide régionale, multilatérale et humanitaire et du programme Renaissance Europe de l'Est. Les Ministres déterminent l'admissibilité d'un pays à l'aide en fonction des intérêts canadiens en matière d'économie, de politique et de sécurité de manière à optimiser l'incidence de ressources limitées dans certains pays clés. Les affectations budgétaires reposent sur des engagements pluriannuels pris par le gouvernement, sur les besoins du pays considéré, son engagement envers le processus de réforme, et sur les intérêts et points forts du Canada.

21.32 Dépenses . La croissance des dépenses annuelles a été spectaculaire ( pièce 21.4 ). De deux millions de dollars qu'elles étaient en 1989-1990, les
contributions d'aide technique ont atteint 74 millions de dollars par an en 1993-1994. Bien que l'aide technique se soit située en moyenne autour de 100 millions de dollars pendant chacun des deux derniers exercices financiers, la part de l'aide humanitaire a baissé alors que celle de l'aide technique a monté. Le Ministère croit que cette tendance se maintiendra en 1994-1995. Il souligne cependant qu'il ne lui est pas possible de spéculer sur les affectations du programme de 1994-1995, puisque le budget du programme pour cet exercice n'avait pas encore été adopté par les ministres concernés au moment de la vérification.

21.33 Fin 1993-1994, les contributions cumulées d'aide technique du Canada s'élevaient à 145 millions de dollars, soit environ 126 millions au titre de l'aide technique bilatérale (dont 16 millions environ pour le programme Renaissance) et près de 19 millions au titre de l'aide technique versée aux agences multilatérales pour leurs initiatives et pour des projets concernant la sécurité nucléaire, la paix et la démocratie. Le Ministère a également fourni près de 95 millions de dollars au titre de l'aide humanitaire pendant la même période ( pièce 21.5 ).

21.34 Nombre de projets . Selon les estimations du Ministère, plus de 700 projets bilatéraux concernant plus de 400 agents d'exécution ont été financés depuis la création du programme. Cinq pays (la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Russie et l'Ukraine) ont reçu la majeure partie de l'aide technique canadienne. On trouvera à la pièce 21.5 une ventilation de l'aide technique bilatérale versée par secteur entre 1989-1990 et 1993-1994 (plus de la moitié ayant été consacrée à des projets de développement du secteur privé et de démocratisation). La pièce 21.6 présente la ventilation des engagements d'aide technique bilatérale par type d'agent d'exécution pour 1993-1994, et la pièce 21.7 , la ventilation des mêmes chiffres pour le même exercice selon l'étendue des projets.

Objectifs, étendue et méthode de la vérification

21.35 En commençant cette vérification, nous avons tenu compte du fait que le programme a dû être organisé rapidement pour faire face à une situation qui évoluait elle aussi très vite. Bien que le programme n'existe que depuis moins de cinq ans, il représente l'un des secteurs de dépenses du Ministère dont l'expansion a été la plus rapide ces dernières années.

21.36 Notre décision d'entreprendre cette vérification résulte également des questions posées dans les rapports du General Accounting Office des États-Unis et, plus récemment, dans un rapport du Congrès des États-Unis au sujet du programme d'aide américain pour l'Europe de l'Est et l'ex-Union soviétique. La justification et les

objectifs du programme américain sont très semblables à ceux des programmes d'aide technique financés par le Canada ou par d'autres pays donateurs. Parmi les problèmes soulevés au sujet du programme d'aide américain, mentionnons la gestion des projets, la coordination des donateurs et l'efficacité à atteindre les objectifs.

21.37 Objectifs de la vérification . Cette vérification visait à fournir des données objectives pour aider le législateur à analyser la manière dont le Ministère utilise ses ressources, ainsi que sa gestion des résultats attendus. Nous souhaitions par ailleurs mettre en lumière les domaines susceptibles d'amélioration, du point de vue de la gestion du programme et des projets.

21.38 Nous nous attendions à ce que le Ministère s'attache, dans sa gestion du programme, à :

21.39 Étendue . La vérification a porté sur les 145 millions de dollars de contributions d'aide technique gérés par le Ministère entre la fin de 1989 et le 31 mars 1994. Elle n'a pas porté sur les 95 millions de dollars d'aide humanitaire versés par le Ministère pendant la même période.

21.40 Méthode . La vérification a été effectuée essentiellement à l'Administration centrale en procédant à l'examen de la documentation du programme et des projets. Nous avons consulté le personnel du programme et d'autres agents du Ministère, ainsi que des consultants ministériels et des experts universitaires. Nous avons effectué de brèves visites dans les missions canadiennes de Budapest et de Prague pour interviewer les agents du programme, les chefs de mission, un nombre choisi d'agents d'exécution sur le terrain et un certain nombre de bénéficiaires de l'aide technique canadienne.

21.41 Nous avons aussi eu recours à une évaluation de programme lancée par le gouvernement, ainsi qu'à une évaluation de programme et à un examen de gestion financière lancés par le Ministère. Comme nous n'avons pas évalué la méthodologie de ces évaluations et de l'examen financier, nous n'exprimons aucune opinion sur leur qualité. Nous formulons cependant des observations au sujet de leur mandat, et nous présentons leurs conclusions. Le Ministère nous a dit qu'il partage les conclusions de ces études.

Observations

Évaluation du programme

Le gouvernement a évalué son programme d'aide technique au bon moment
21.42 Le programme a été annoncé en octobre 1989; les ressources financières nécessaires ont été approuvées par le Conseil du Trésor en novembre 1989; le programme est entré en activité au début de 1990. Deux ans et demi après le début des opérations, le Ministère a mandaté des consultants externes pour évaluer le programme, sa gestion financière et ses procédures de contrôle. Nous pensons que cette décision était louable et qu'elle a été prise au bon moment. Elle témoigne d'un souci d'optimisation des ressources.

21.43 Examen de la gestion financière . En octobre 1992, le Ministère a fait évaluer la gestion financière et la structure de contrôle du programme pour planifier ce dernier, tenir des comptes à son égard et en faire rapport. On indiquait dans le Rapport de décembre 1992 qu'un indicateur de succès du programme serait la capacité « d'approuver rapidement les propositions ». On indiquait par ailleurs qu'il était nécessaire « d'assurer un équilibre satisfaisant entre la souplesse organisationnelle et l'aptitude à réagir rapidement aux besoins des pays d'Europe centrale et de l'Est, tout en améliorant la structure de contrôle financier ». Les auteurs du rapport ont mentionné en particulier certaines faiblesses dans la gestion des projets, comme l'absence de critères de sélection, de surveillance continue, d'évaluation et de rapports périodiques, et de mécanismes de contrôle financier pour assurer que les fonds étaient dépensés conformément aux objectifs du programme.

21.44 Évaluation du programme d'aide technique . En réponse à une exigence du Conseil du Trésor, on a demandé en juin 1992 à un consultant d'effectuer « une étude d'évaluation du programme d'aide technique » (étude ne portant pas sur le programme Renaissance). Il s'agissait de vérifier si le programme contribuait efficacement au succès des objectifs de politique étrangère du Canada dans la région et si le groupe de travail gérant le programme parvenait à concilier la nécessité de planifier et de consulter les partenaires avec la nécessité de fournir de vastes montants d'aide technique à brève échéance.

21.45 La conclusion de l'évaluation, terminée en février 1993, a été que « les activités du groupe de travail contribuent aux objectifs de politique étrangère du Canada et les appuient » dans la mesure où elles permettent de fournir rapidement une aide technique à la région, par le truchement d'un grand nombre de projets dans des secteurs d'activité reliés au mandat qui lui a été donné par le Cabinet. En outre, écrit-on dans le rapport, l'analyse détaillée de projets choisis au hasard et une enquête réalisée auprès de bénéficiaires du programme ont montré que « des résultats importants ont déjà été réalisés ». Finalement, « le groupe de travail est parvenu à concilier la nécessité de fournir l'aide du programme à la nécessité de consulter les partenaires », et « l'approche générale retenue pour mettre en oeuvre et réaliser le programme est saine et efficace ».

21.46 Le rapport de l'évaluation a recommandé des modifications dans la prestation du programme afin d'assurer une meilleure gestion des projets, notamment d'améliorer la surveillance, l'évaluation, la vérification et la mesure du rendement. Il a aussi recommandé que l'on adopte une démarche plus stratégique pour maximiser les retombées du point de vue du commerce et de l'investissement.

21.47 Évaluation du programme Renaissance . L'efficacité du programme Renaissance Europe de l'Est a été évaluée en 1993 du point de vue de la pertinence du programme, de la validité de ses objectifs, de son incidence et de ses possibilités d'amélioration. L'évaluation a été achevée en décembre 1993 et a permis de conclure que « dans l'ensemble, le programme continue d'être tout à fait justifié. Il atteint son objectif et des résultats commerciaux importants découlent directement des crédits fournis. En général, le programme est géré de manière efficace et efficiente. » On souligne cependant dans le rapport des carences administratives en matière de surveillance et de vérification des projets. On indique par ailleurs que « les informations concernant la manière de transiger des affaires dans la région, qui sont souvent obtenues des entreprises, ne sont pas diffusées aux autres entreprises canadiennes ni aux autres employés du gouvernement ».

Le Ministère applique les recommandations issues des études, mais il est encore trop tôt pour évaluer l'incidence complète des mesures prises
21.48 Les évaluations du programme et l'examen de sa gestion financière ont permis de formuler de nombreuses recommandations visant à améliorer la gestion des projets et la gestion financière du programme. Le Ministère a accepté ces recommandations et a pris des mesures pour les mettre en oeuvre. Ce sont :

21.49 Certaines de ces mesures viennent à peine d'être appliquées, alors que d'autres n'ont pas encore été complètement mises en oeuvre. En particulier, dix projets que nous avons examinés sur le terrain, en Hongrie et en République tchèque, n'avaient pas été touchés par la plupart de ces mesures récentes. Il est donc encore trop tôt pour mesurer l'effet de ces dernières. Nous nous proposons d'en effectuer l'évaluation dans le cadre d'un examen de projets plus récents lors de notre vérification de suivi du Ministère.

21.50 Les études contenaient d'autres recommandations qui n'ont pas encore été mises en oeuvre. Il s'agissait notamment de préparer des stratégies nationales pour les pays du programme, d'élaborer des critères d'évaluation du succès des projets, de mettre en place un mécanisme de consultation des parties prenantes, de recueillir et de diffuser de manière systématique des informations commerciales, et de mettre l'accent de manière plus stratégique sur les possibilités commerciales.

Efficacité du programme

21.51 Comme nous l'avons dit, le programme canadien d'aide technique a trois objectifs essentiels : appuyer la transition vers l'économie de marché, appuyer la transition vers la démocratie, et renforcer les liens de commerce et d'investissement du Canada avec la région. Voici les conclusions des évaluations effectuées jusqu'à présent.

Une évaluation a montré que le programme a permis de fournir rapidement un montant important d'aide technique dans des secteurs valables
21.52 L'évaluation du programme d'aide technique a montré que les activités ont permis de contribuer aux objectifs établis grâce au lancement rapide d'un grand nombre de projets dans plusieurs pays et dans des secteurs correspondant au mandat prévu par le Cabinet. Elle a ajouté que « cette approche a été efficace jusqu'à présent. » Elle a également établi, en se fondant sur l'analyse de projets choisis au hasard et d'un sondage effectué auprès de bénéficiaires du programme, que « des résultats notables, comme le transfert de connaissances, ont déjà été réalisés. »

21.53 Il n'appartenait pas aux évaluateurs de juger de l'incidence à long terme de l'aide technique, c'est-à-dire de déterminer si l'aide technique canadienne avait effectivement aidé le pays bénéficiaire à faire sa transition vers la démocratie et l'économie de marché, ni dans quelle mesure. Les évaluateurs ont souligné qu'ils n'ont pu mesurer que l'incidence à court terme du programme, celui-ci n'existant pas depuis assez longtemps pour en évaluer l'incidence à long terme.

21.54 Le Ministère souligne qu'il n'est pas possible, sur le plan pratique, d'évaluer l'incidence de l'aide technique fournie par tel ou tel donateur, grand ou petit, étant donné qu'ils sont nombreux à fournir de l'aide aux mêmes pays, souvent dans les mêmes secteurs, et parfois même dans le cadre d'ententes de cofinancement des mêmes projets. Autrement dit, il est quasiment impossible d'isoler l'incidence de tel ou tel projet national d'aide technique et de l'attribuer à un pays plutôt qu'à un autre. Même dans le cas des grands pays donateurs (et le Canada est très petit en comparaison), dit le Ministère, on ne pourra mesurer leur incidence particulière tant que les pays bénéficiant de leur aide ne se seront pas dotés d'une politique habilitante et d'une structure juridique adéquate et qu'il n'y aura pas de ressources financières adéquates à l'échelle locale.

21.55 Le Ministère considère que les donateurs auront finalement une incidence importante grâce à leurs efforts collectifs, mais qu'on ne pourra le vérifier qu'à long terme. Nous estimons qu'il serait utile de « prendre du recul » périodiquement pour mesurer les progrès réalisés, afin d'identifier les correctifs susceptibles de maximiser l'efficacité des efforts collectifs. Selon le Ministère, cela n'est pas nécessaire pour le moment, puisque le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement sont convenus d'effectuer une évaluation macro-économique continue des progrès de la région, ainsi que des évaluations détaillées par pays et par secteur. Le Ministère ne pense pas qu'il soit possible sur le plan pratique d'effectuer une évaluation « en prenant du recul ». Il ajoute qu'une évaluation faite par plusieurs donateurs serait inacceptable pour la plupart des pays bénéficiaires, voire la totalité, pour des raisons d'ordre politique.

Il faudra une orientation plus stratégique pour tirer parti au maximum des possibilités de commerce et d'investissement à long terme
21.56 Les activités du programme s'ajoutent aux activités traditionnelles d'expansion du commerce gérées par la Direction de l'expansion du commerce en Europe centrale et de l'Est du Ministère. Une partie des fonds attribués au programme d'aide technique est gérée par cette direction dans le cadre du programme Renaissance Europe de l'Est.

21.57 En matière de commerce et d'investissement, on contribue aux objectifs visés en positionnant les entreprises canadiennes grâce à leur participation aux projets d'aide technique. Cela offre trois avantages. Premièrement, les entreprises canadiennes obtiennent la possibilité d'acquérir une compréhension sur place de la région et de ses marchés, d'identifier de nouvelles possibilités de commerce, de prendre des contacts et d'établir des réseaux. Deuxièmement, ces projets peuvent être efficaces pour démontrer et prouver la technologie et la compétence canadiennes. Troisièmement, l'établissement de régimes contractuels et de cadres réglementaires adéquats sur le plan des finances, des taxes, de l'investissement et du commerce est essentiel pour assurer le succès du commerce et de l'investissement canadiens. Le programme d'aide a permis d'appuyer un certain nombre de projets visant à améliorer l'environnement global du commerce et de l'investissement dans la région. (voir photographe)

21.58 La question qui se pose, du point de vue de l'efficacité, c'est de savoir si la participation aux projets techniques a produit des résultats commerciaux tangibles, comme une hausse des ventes de biens et de services des entreprises canadiennes. L'évaluation du programme Renaissance (représentant en gros 5 p. 100 de l'aide technique totale) a montré que le programme reste pertinent, que les entreprises canadiennes qui en ont bénéficié font état de résultats non négligeables, et que la prestation du programme est efficace et efficiente. (voir photographe)

21.59 Le Ministère affirme qu'il est encore trop tôt pour procéder à l'évaluation de toute l'aide technique, puisque le programme existe depuis moins de cinq ans et que les bienfaits commerciaux qu'en tireront les participants ne pourront être mesurés qu'à long terme.

21.60 Nous croyons nous aussi que les retombées commerciales ne se concrétiseront pas automatiquement du simple fait que l'on aura fait la preuve de la compétence canadienne. En effet, celle-ci n'est pas unique et la concurrence est très vive dans la région, chaque donateur luttant pour obtenir sa part du même gâteau commercial. Nous pensons qu'il faudra déployer des efforts concertés et soutenus pour profiter de ces retombées.

21.61 L'évaluation du programme d'aide technique a permis de conclure que « du point de vue du positionnement des entreprises canadiennes, l'adoption d'une démarche plus stratégique et moins ponctuelle leur permettra probablement à l'avenir d'être mieux placées pour faire concurrence à l'échelle internationale. » En outre, « si l'on ne réussit pas à mieux focaliser les activités commerciales du programme, cela coûtera très cher et l'on perdra des occasions précieuses. » L'évaluateur du programme Renaissance a constaté que les informations commerciales recueillies dans la région ne sont pas diffusées parmi toutes les entreprises canadiennes qu'elles pourraient intéresser.

21.62 À nos yeux, la question importante qui se pose à l'heure actuelle pour le Ministère est de savoir si sa démarche en matière de consultation et de planification, de collecte et de diffusion des informations, ainsi que de suivi des possibilités est adéquate et suffisamment stratégique pour profiter au maximum du potentiel existant.

21.63 Le Ministère dit ceci :

[Traduction]
Des consultations permanentes et des consultations de coordination se tiennent entre la Direction générale de l'assistance et la Direction de l'expansion du commerce en Europe centrale et de l'Est, afin d'assurer le partage des informations et de tirer parti au maximum des possibilités et retombées commerciales. La Direction de l'expansion du commerce gère le programme Renaissance de manière à ce que ses activités contribuent directement aux intérêts et objectifs commerciaux canadiens dans la région. Les représentants de la Direction générale et de la Direction de l'expansion du commerce sont membres permanents du comité d'examen des projets des deux programmes. En outre, des consultations officieuses se tiennent en permanence sur les questions d'intérêt commun à l'Administration centrale et avec les missions. Finalement, les responsables du programme participent à l'élaboration du Plan de commerce international du Ministère et font partie du Comité interministériel sur les marchés des institutions financières internationales.
Le Ministère convient avec nous qu'il devra envisager d'imprimer au programme une orientation stratégique plus axée sur les activités commerciales.
21.64 La présente vérification fait état de deux évaluations du programme et d'un examen de la gestion financière de ce dernier; nous tenons à souligner que nous n'y faisons référence que dans le seul but d'illustrer les méthodes du Ministère en matière de gestion de ce programme. De fait, comme celui-ci existe depuis moins de cinq ans et qu'il serait difficile sur le plan pratique d'évaluer l'incidence à court terme de cette forme d'aide, nous avons délibérément centré notre travail sur les méthodes adoptées par le Ministère pour mettre le programme sur pied et pour l'exploiter. Même si nous félicitons le Ministère d'avoir entrepris ces études, nous n'exprimons aucune opinion quant à leur qualité ni quant à l'efficacité du programme « sur le terrain ».

Gestion des projets

21.65 Comme la portée et le volume des contributions d'aide technique ont augmenté rapidement au moment même où l'Administration centrale du Ministère et les missions étaient confrontées à une pénurie de personnel, on n'a pas accordé assez d'attention au problème de la gestion des projets lorsqu'on a lancé le programme. Les critères de sélection des projets n'étaient pas clairs, la surveillance était insuffisante et aléatoire, et l'on n'a entrepris aucune évaluation, vérification ou mesure des résultats entre le lancement du programme et décembre 1992, date du commencement des premières vérifications de projets.

Le Ministère prend les mesures nécessaires pour mettre davantage l'accent sur les résultats
21.66 Depuis décembre 1992, le Ministère a adopté en matière de gestion des projets une démarche qui est plus axée sur les résultats grâce à plusieurs mesures concrètes.

21.67 Le processus d'évaluation des propositions de projet a été amélioré . Une bonne gestion des projets commence par un processus de sélection fondé sur l'évaluation des risques et des facteurs cruciaux pour atteindre les objectifs établis. L'expérience acquise avec d'autres programmes d'aide du Canada, dans d'autres régions du monde, a montré qu'une analyse attentive de ces facteurs dès le départ augmente sensiblement les chances de succès des projets.

21.68 Les facteurs qu'il convient d'évaluer dépendent évidemment de la nature du projet, mais certains sont communs :

21.69 Le Ministère convient que ces facteurs, et d'autres, sont importants. Comme nous l'avons dit, il a révisé les lignes directrices relatives à la préparation des propositions de projets afin d'indiquer plus clairement la nature et l'ampleur des informations requises pour les prises de décisions de financement. Il s'attend à ce que cela améliore l'évaluation des nouvelles propositions de projets et, par conséquent, la qualité des projets retenus. De plus, il partage notre avis voulant que le personnel des missions peut contribuer de manière cruciale à la planification des projets en participant à l'évaluation des propositions.

21.70 La surveillance des projets sur le terrain a été renforcée . L'étape suivante importante en matière de gestion des projets est la surveillance continue, c'est-à-dire le suivi des progrès réalisés par rapport au potentiel de succès. La surveillance axée sur le respect des procédures et processus est utile, certes, mais elle ne permet pas en soi d'obtenir des données précises sur les résultats, lesquelles sont cependant nécessaires pour savoir si l'on avance de manière satisfaisante vers les objectifs. La présence sur le terrain d'un personnel canadien ou local bien formé peut contribuer de manière importante au succès de la surveillance d'un projet. En étant « sur le terrain », ce personnel peut suivre de près l'évolution du projet, sans compter qu'il connaît bien le pays et ses conditions et qu'il peut avoir facilement accès aux agents d'exécution et aux organismes bénéficiaires.

21.71 L'expérience acquise par l'ACDI pendant de nombreuses années, notamment au cours du récent exercice de décentralisation, a montré qu'envoyer du personnel supplémentaire à l'étranger ne suffit pas pour assurer une meilleure surveillance ou de meilleurs résultats. Ce qui est crucial, c'est qu'un personnel compétent et fortement engagé fasse la bonne sorte de surveillance. Cela veut dire que l'on doit avoir clairement défini ce que l'on veut surveiller, comment on doit en faire rapport et quelles mesures on devra prendre ensuite.

21.72 Le Ministère convient de l'importance d'une présence et d'un engagement accrus sur le terrain en matière de gestion des projets. Récemment encore, le personnel des missions ne jouait qu'un rôle limité dans la gestion des projets, par exemple en filtrant les propositions pour s'assurer qu'elles étaient conformes aux besoins du pays, en évaluant les organismes d'accueil et en faisant de la surveillance. Bien que la surveillance des projets ait toujours été un volet du travail du personnel des missions, elle n'a pas toujours été effectuée de manière systématique à cause d'un manque de ressources. On s'attend à ce que la surveillance soit renforcée suite à la nomination de dix agents canadiens d'aide technique et d'autres employés locaux dans sept missions des pays du programme. Il est prévu que le personnel de terrain jouera un rôle accru dans la surveillance des projets.

21.73 Les lignes directrices sur la surveillance des projets ont été révisées en 1993-1994 et plusieurs contrats de surveillance ont été octroyés. Le mandat donné aux agents de surveillance des projets met l'accent sur la collecte d'informations au sujet des résultats et définit ce qu'il faut surveiller, la manière dont on doit produire les rapports et les mesures qu'il faut prendre. De plus, des critères existent pour mesurer l'incidence et les résultats potentiels de chaque projet.

21.74 Nous recommandons au Ministère d'envisager si possible le recours à du personnel local ayant des connaissances et compétences adéquates pour effectuer la surveillance des projets, ce qui réduirait sensiblement le coût de cette activité.

21.75 Des évaluations de projets axées sur la mesure des résultats ont commencé . La dernière étape est l'évaluation périodique que l'on peut faire « en prenant du recul », et elle devrait avoir deux objectifs : premièrement, vérifier à intervalles réguliers que le système de surveillance continue est efficace, c'est-à-dire qu'il produit des informations axées sur les résultats des projets; deuxièmement, vérifier après l'achèvement des projets que les résultats attendus ont été atteints. Cette évaluation a posteriori devrait indiquer quels résultats ont été atteints, ainsi que ceux qui ne l'ont pas été et pourquoi. Cela permettrait de tirer des leçons importantes pour l'avenir sur ce qui fonctionne et sur ce qui ne fonctionne pas.

21.76 Le Ministère convient de l'importance d'une évaluation périodique du programme et des projets. Il a formulé une stratégie d'évaluation et, en juin 1994, plus de 40 évaluations de projets étaient commencées ou étaient presqu'achevées, pour déterminer si les résultats prévus sont en voie d'être atteints. On s'attend à ce que ces évaluations indiquent quels résultats sont susceptibles d'être atteints, et lesquels ne le seront probablement pas et pourquoi. Le Ministère pourra en tirer des leçons pour ses activités futures.

21.77 Pour ce qui est de l'évaluation de son système de surveillance continue, le Ministère affirme qu'il est encore trop tôt pour l'entreprendre.

21.78 À notre avis, les mesures prises par le Ministère sont trop récentes pour qu'on puisse juger de leur efficacité. Nous avons cependant l'intention d'en faire l'évaluation dans notre vérification de suivi du Ministère.

Vérification des contributions

21.79 Le programme d'aide technique du Ministère est un programme de contributions, c'est-à-dire de paiements de transfert conditionnels exigeant une entente officielle entre le donateur et l'organisme bénéficiaire. Dans cette entente, on doit préciser les modalités de chaque paiement, concernant notamment les dépenses admissibles, les paiements conditionnels à certains critères de rendement et l'exécution d'une vérification. Le Conseil du Trésor exige que les gestionnaires de programmes, qui sont fiduciaires de deniers publics, veillent au respect des modalités de chaque contribution. Ils doivent par exemple s'assurer que les bénéficiaires rendent compte de manière exhaustive des sommes qu'ils reçoivent, et que ces dernières sont utilisées exclusivement aux fins prévues dans l'entente de contribution.

21.80 Les budgets du programme de contributions d'aide technique du Ministère sont autorisés par le Parlement. À titre de vérificateur au service du Parlement, le vérificateur général a le devoir, en vertu de l'alinéa 7(2)c) de la Loi sur le vérificateur général, de signaler tous les cas où il a constaté que « des sommes d'argent ont été dépensées à d'autres fins que celles auxquelles le Parlement les avait affectées. » Pour ce faire, nous avons décidé de vérifier si, et dans quelle mesure, le Ministère obtient d'une source indépendante la certitude que les contributions ont été dépensées conformément aux objectifs fixés par le Parlement. Nous avons donc examiné les vérifications de projets réalisées pour le Ministère par des vérificateurs externes.

Le Ministère prend des mesures pour rendre plus explicites la nature et la portée de la certitude recherchée par la vérification
21.81 En décembre 1992, le Ministère a vérifié cinq projets réalisés entre 1990 et décembre 1992; il les a choisis en fonction de leur degré de risque et de leur importance. Il a ensuite vérifié cinq projets supplémentaires au sujet desquels les agents de projets disaient avoir des difficultés à obtenir à temps des informations financières complètes de la part des agents d'exécution. Les dix projets choisis étaient importants puisque chacun portait sur des contributions de plus de 250 000 $. Sept des dix vérifications étaient terminées au moment de notre examen. Les vérificateurs du Ministère ont constaté que, à tous égards importants, plus de 90 p. 100 des contributions (environ 4 millions de dollars) avaient été dépensées conformément aux modalités des ententes. Ils ont trouvé environ 327 000 $ ne correspondant pas aux critères d'admissibilité des dépenses, ce dont ils ont informé le Ministère. Certaines des sommes en jeu ont ensuite été recouvrées par le Ministère, d'autres ont été déduites de versements ultérieurs et le reste a été jugé admissible par le Ministère suite à l'obtention d'informations complémentaires fournies par les agents d'exécution.

21.82 Le Ministère a précisé que ces dix vérifications avaient été axées sur le respect des modalités des ententes de contribution, conformément à la politique du Conseil du Trésor en matière de vérification des contributions fédérales. Les vérificateurs ont indiqué que leur vérification permettait de « conclure que, à tous égards importants, les montants vérifiés représentent des coûts engagés par l'entrepreneur et réclamés au Ministère conformément aux modalités de l'entente de contribution. »

21.83 Dans leurs opinions, les vérificateurs du Ministère ne font aucunement référence à « l'utilisation des sommes d'argent aux fins pour lesquelles le Parlement les avait affectées. » Cela n'est pas une critique des dispositions actuelles. Les vérificateurs du Ministère ont effectué leur travaux selon la politique et les normes gouvernementales en matière de vérification. Nous ne soulevons aucunement cette question pour sous-entendre que l'argent a été dépensé à d'autres fins que celles prévues par le Parlement, mais simplement parce que nous nous demandons si le système actuel est apte à minimiser le risque de tels incidents.

21.84 Après en avoir discuté avec ses vérificateurs, le Ministère nous a dit que les travaux requis pour le respect de l'exigence de l'alinéa 7(2)c) de la Loi sur le vérificateur général exigerait peut-être des procédures, des efforts et des coûts supplémentaires. Le Ministère nous a aussi mentionné que l'opportunité de modifier le libellé du rapport de certification produit par ses vérificateurs est une question qui doit être résolue par le Conseil du Trésor en ce qui concerne la politique gouvernementale en matière de vérification des contributions. Il se dit prêt à en discuter avec le Contrôleur général du Canada.

21.85 Le Ministère a récemment mis en oeuvre un nouveau plan de vérification des contributions d'aide technique . Suite aux recommandations de ses consultants, le Ministère a pris plusieurs mesures pour améliorer la vérification des contributions d'aide technique. Les ententes de contribution ont été améliorées pour indiquer clairement les fins auxquelles les sommes doivent être utilisées et la manière dont les bénéficiaires doivent en rendre compte. Le Ministère exige maintenant que ses vérificateurs lui rapportent également les cas où des sommes n'ont pas été dépensées aux fins prévues. Il souligne aussi que les vérifications ne sont qu'un mécanisme de gestion parmi d'autres, dont la surveillance et l'évaluation, qui, lorsqu'appliqués systématiquement, procurent une certitude que les sommes sont dépensées à des fins prévues.

21.86 En outre, le Ministère a récemment introduit un plan de vérification annuel qui permettra de vérifier chaque année un échantillon des projets actifs, certains choisis d'après leur risque et leur importance, et d'autres, au hasard. Comme aucun projet n'a encore été vérifié en vertu de ce plan, nous ne pouvons formuler aucune observation sur sa mise en oeuvre. Nous envisageons de l'examiner lors de notre vérification de suivi du Ministère.

Rapports au Parlement

Il faudrait améliorer la qualité des informations fournies au Parlement
21.87 Rapports d'intendance . Nous évoquons au chapitre 6 de notre Rapport de 1992 les rapports d'intendance des ministères en disant qu'ils doivent porter sur la gestion et la responsabilité globales du ministre et des hauts fonctionnaires pour toute la gamme de leurs devoirs et obligations. Les rapports annuels axés sur le respect des autorisations de dépenses ne donnent pas d'indications sur ces devoirs et obligations plus généraux. En conséquence, les rapports d'intendance ont une portée beaucoup plus large que les rapports sur les dépenses annuelles.

21.88 Le Parlement a le droit de savoir l'efficacité avec laquelle les deniers publics sont dépensés. Voilà pourquoi le législateur exige des comptes à intervalles réguliers sur l'exercice des responsabilités déléguées aux ministres. Il appartient au ministre des Affaires étrangères de rendre compte au Parlement des résultats du programme d'aide technique pour l'Europe centrale et de l'Est et l'ex-Union soviétique géré par son ministère.

21.89 Parties III du Ministère . La partie III du budget du Ministère est le principal document de référence sur les activités de ce dernier : elle est censée contenir des informations sur le rendement de chaque activité. Nous avons examiné plusieurs parties III récentes du Ministère pour vérifier si, et dans quelle mesure, celui-ci fournit des rapports sur les résultats du programme d'aide à l'Europe centrale et de l'Est et à l'ex-Union soviétique.

21.90 Nous avons trouvé au chapitre des « Relations et activités bilatérales avec l'Europe » beaucoup de texte sur la justification du programme, les principaux pays bénéficiaires, les secteurs prioritaires, les diverses formes d'aide, ainsi que les activités passées, actuelles et futures. Ces informations sont fort utiles pour comprendre le programme et pour établir le contexte nécessaire à l'évaluation de ses résultats.

21.91 Il manque des informations importantes . Il manque cependant des informations que nous croyons essentielles dans tout rapport d'intendance de qualité. Par exemple, les documents publics ne procurent aucune information exhaustive sur l'ampleur du programme, sur ses objectifs stratégiques, sur ses plans, sur des indicateurs qui aideraient à en juger les résultats, ainsi que sur les résultats atteints.

21.92 Besoin de transparence . La transparence des informations fournies par le Ministère sur n'importe quel programme d'aide est cruciale pour démontrer la valeur du programme et l'efficacité de sa gestion. Cela est d'autant plus important que ce programme d'aide technique a été lancé sans législation habilitante particulière. De ce fait, la politique fondamentale en vertu de laquelle les sommes sont dépensées n'a pu faire l'objet d'un débat exhaustif au Parlement. Il serait utile que le Ministère adresse à intervalles réguliers au législateur un rapport sur le rendement de son programme d'aide technique. Quand les temps économiques sont difficiles et que le gouvernement fait face à des problèmes de déficit et d'endettement, il est essentiel de fournir au législateur les informations dont il a besoin pour faire son choix entre des projets qui se font concurrence pour l'obtention de ressources rares.

21.93 Certes, le Ministère affirme avoir pleinement respecté les exigences actuelles concernant les informations à fournir, ainsi que les lignes directrices sur les rapports et sur l'organisation de la partie III du Budget principal , telles qu'établies par le Conseil du Trésor. Il nous invite par ailleurs à adresser à ce dernier nos préoccupations sur la communication de rapports au Parlement au sujet du programme, étant donné qu'il s'agit là d'une question concernant l'ensemble du gouvernement. Il se peut fort bien que le Ministère respecte les lignes directrices du Conseil du Trésor sur les Parties III, mais nous tenons à signaler que rien ne l'empêche d'innover, dans le but de fournir des informations plus complètes et meilleures sur ce programme.

Conclusion

21.94 L'effondrement du communisme en Europe centrale et de l'Est et dans l'ex-Union soviétique a offert au Canada une chance unique de participer et de contribuer à la transformation politique et économique de nombreux pays de la région. Malgré un contexte d'incertitude, de changements rapides, de besoins énormes et de joueurs multiples, le Ministère a su mettre en oeuvre très rapidement le programme d'aide technique du Canada.

21.95 Nous convenons que pour la gestion de ce programme le Ministère a dû « apprendre à courir avant de savoir marcher. » Nous convenons aussi qu'il serait difficile et complexe de mesurer le succès d'un programme de cette nature, dont les objectifs ne pourront probablement être atteints qu'à long terme.

21.96 Notre vérification a montré que le Ministère a déployé des efforts importants et opportuns pour évaluer la gestion du programme, et qu'il a récemment pris des mesures notables pour que cette gestion soit plus axée sur les résultats. On ne pourra juger de la valeur de ces mesures que dans le futur.

21.97 Toutefois, plusieurs défis et préoccupations subsistent quant à l'aptitude du Ministère à évaluer l'efficacité du programme, dans un environnement aussi complexe.

21.98 Finalement, il importe que le Ministère gère ce programme de contributions en accordant une attention particulière à la fonction de contrôle et en tirant parti des mesures importantes qu'il a déjà prises. (Nous traitons en détail de cette question dans le paragraphe 22.56 du chapitre 22 du présent rapport). Il existe une occasion de prendre des mesures pour améliorer la qualité des informations que le Ministère fournit au Parlement sur les résultats du programme.