Revenu Canada

Garantir l'équité du régime fiscal : la détection des non-déclarants et les Enquêtes spéciales

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Vérificateur général adjoint : Shahid Minto
Vérificateurs responsables :
Jim Ralston - Détection des non-déclarants
Barry Elkin - Enquêtes spéciales

Introduction

Le programme des non-déclarants est indispensable pour préserver l'assiette fiscale
31.12 La déclaration de revenus est le pivot du régime canadien d'imposition du revenu, pour établir soit le montant de l'impôt exigible, soit celui du remboursement. Les déclarations de revenus sont la source d'une grande partie des renseignements dont Revenu Canada dispose au sujet des contribuables; elles servent donc à un grand nombre d'activités du Ministère, par exemple répondre aux demandes de renseignements des contribuables, procéder aux vérifications et traiter les appels.

31.13 Pour que le régime d'imposition du revenu fonctionne de façon équitable et efficiente, il importe que chacun (particulier ou société) produise une déclaration lorsqu'il est tenu de le faire en vertu de la loi : dans le cas des particuliers, c'est quand ils doivent de l'impôt ou qu'ils remplissent d'autres critères, par exemple s'ils versent des cotisations au Régime de pensions du Canada sur le revenu d'un travail indépendant; dans le cas des sociétés, c'est chaque année, qu'il y ait impôt exigible ou non.

31.14 Le programme des non-déclarants du Ministère vise à déterminer quels contribuables n'ont pas produit la déclaration de revenus requise et à obtenir d'eux cette déclaration. Si un contribuable a déjà produit une déclaration par le passé, son nom figure au rôle d'impôt du Ministère, qui a ainsi la tâche relativement facile. Si le contribuable ne figure pas au rôle (on parle alors de « non-déclarants inconnus »), le Ministère doit obtenir des indices et les utiliser pour déterminer si le non-déclarant est effectivement tenu de produire une déclaration.

31.15 Dans certains cas, le Ministère intente des poursuites contre les contribuables qui n'ont pas produit de déclaration. Dans des cas peu nombreux, si le Ministère le juge utile, il intentera des poursuites pour évasion fiscale. Les tribunaux peuvent infliger une peine plus sévère pour avoir fraudé l'impôt que pour n'avoir pas produit une déclaration. (Voir la section du présent chapitre qui porte sur les Enquêtes spéciales.)

Objectif et étendue de la vérification

31.16 Notre vérification visait à évaluer la manière dont Revenu Canada gère son programme des non-déclarants. Nous avons surtout examiné les politiques et les pratiques que le Ministère a adoptées afin d'obtenir des déclarations de revenus des particuliers et des sociétés ainsi que les mesures qu'il a prises en vue de repérer les non-déclarants qui ne figurent pas à son rôle d'impôt. La pièce 31.1 énumère les critères que nous avons utilisés au cours de cet examen.

31.17 Notre vérification s'est déroulée à l'Administration centrale du Ministère ainsi que dans des bureaux de district et des centres fiscaux choisis.

Observations et recommandations

Le programme des non-déclarants entraîne la production de centaines de milliers de déclarations

31.18 En 1993-1994, Revenu Canada a obtenu, par son programme des non-déclarants, la production de 509 000 déclarations de revenus (particuliers ou sociétés), ce qui lui a permis de percevoir des impôts supplémentaires nets de 124 millions de dollars, en plus des intérêts et des pénalités connexes. Pour chaque année d'imposition, environ 20 millions de contribuables produisent une déclaration.

31.19 La pièce 31.2 montre que le nombre de déclarations obtenues au moyen du programme a beaucoup augmenté au cours des cinq dernières années. La hausse est surtout attribuable à l'emploi du système automatisé, qui a indiqué un nombre accru de non-déclarants et leur a envoyé des notes de rappel, ainsi qu'aux mesures de relance prises par le personnel du Ministère lorsque ces notes de rappel demeuraient sans réponse. En utilisant les données sur le revenu figurant dans d'autres genres de feuillets de renseignements, le Ministère a pu découvrir le nom d'autres particuliers tenus de produire une déclaration.

31.20 En 1993-1994, Revenu Canada a reçu 307 déclarations de revenus par suite d'actions intentées pour non-production d'une déclaration. Les amendes infligées aux contribuables poursuivis ont presque atteint un million de dollars. Le Ministère considère les poursuites judiciaires comme le dernier moyen à employer pour obtenir une déclaration; il essaie d'abord d'obtenir le même résultat par des mesures de relance ordinaires prises par son personnel.

Le programme des non-déclarants a été renforcé du fait de l'effort de lutte contre l'économie souterraine entrepris par Revenu Canada
31.21 En 1993, dans le cadre de son effort de lutte contre l'économie souterraine, le Ministère a commencé, par l'intermédiaire de certains de ses bureaux locaux, à soumettre différents secteurs de l'économie canadienne à des covérifications de l'impôt sur le revenu et de la TPS (taxe sur les produits et services). (Ces covérifications suivent l'annonce que le Ministère a faite, en 1992, de son intention d'adopter une approche intégrée à la vérification afin de déranger le moins possible les entreprises.) Quand une covérification permet d'identifier un non-déclarant, les renseignements à ce sujet sont renvoyés au programme des non-déclarants, comme dans le cas de toute autre vérification.

31.22 L'importance accrue récemment attachée à la lutte contre l'économie souterraine s'est traduite par une augmentation des ressources affectées au programme des non-déclarants. Le nombre d'employés affectés au programme a augmenté de 22 p. 100 en cinq ans, passant de 380 à 463, mais l'accroissement s'est surtout produit en 1993-1994. Cette année-là, le Ministère a donné au programme des non-déclarants la permission d'utiliser, dans 15 bureaux locaux, 50 années-personnes supplémentaires sous la forme d'employés nommés pour une période déterminée. (Les employés nommés pour une période déterminée ne sont pas des employés permanents, qui eux sont nommés pour une période indéterminée.) S'ils utilisaient de ces employés supplémentaires, les bureaux locaux devaient traiter les renvois provenant de l'effort de lutte contre l'économie souterraine avant la charge de travail croissante des cas ordinaires de non-déclarants. Toutefois, le nombre d'années-personnes employées dans le programme des non-déclarants de ces 15 bureaux locaux n'a augmenté que de 36, en raison de retards subis dans l'embauche des employés temporaires et du fait que le programme a perdu certains employés, ceux-ci ayant provisoirement été réaffectés à d'autres fonctions dans le Ministère. Dans l'ensemble, le programme des non-déclarants n'a pas utilisé 4 p. 100 de l'effectif global prévu à son budget de 1993-1994.

31.23 Pour 1994-1995, le Ministère a ajouté 149 autres années-personnes en employés nommés pour une période déterminée au programme des non-déclarants.

Les notes de rappel automatisées sont un moyen efficient d'obtenir la production de déclarations
31.24 Sur les 509 000 déclarations obtenues au moyen du programme des non-déclarants, 300 000 ont été reçues grâce aux notes de rappel envoyées par le système automatisé, sans que des employés du Ministère aient eu à prendre de mesures de relance. (Nous ne parlons ici que des notes de rappel mais, en réalité, les non-déclarants récidivistes peuvent recevoir une « demande formelle » de déclaration.)

31.25 Chaque année, le système automatisé des non-déclarants détermine les contribuables (particuliers et sociétés) figurant au rôle, qui n'ont pas produit de déclaration à l'échéance de production, et il leur envoie une note de rappel. Dans le cas des particuliers, le système n'envoie la note que si le contribuable lui semble avoir une obligation fiscale, selon les déclarations déjà produites et les feuillets de renseignements reçus de tiers. Après 40 jours, si le contribuable n'a pas produit de déclaration, le système envoie automatiquement une deuxième note de rappel.

31.26 Le simple fait d'obtenir une déclaration de revenus constitue un élément essentiel des activités visant à faire observer la loi. C'est par leurs déclarations que les contribuables figurent ensuite dans le rôle d'impôt, où le Ministère peut facilement les soumettre à des contrôles (par son système des non-déclarants et ses autres programmes d'exécution) pour déterminer le montant exact de leur impôt. Les notes de rappel entièrement automatisées sont un moyen efficient d'obtenir la production de déclarations. Les déclarations obtenues par ce moyen n'augmentent pas toujours les recettes fiscales, car bon nombre d'entre elles comportent une demande de remboursement d'impôt. En 1993-1994, les déclarations ainsi obtenues ont entraîné une réduction nette des recettes fiscales égale à 79 millions de dollars.

La plupart des cotisations d'impôt supplémentaires sont obtenues grâce aux mesures de relance prises par le personnel du Ministère
31.27 Les 209 000 autres déclarations obtenues au moyen du programme en 1993-1994 sont attribuables aux mesures de relance prises par le personnel du Ministère. Contrairement aux notes de rappel entièrement automatisées, ces mesures de relance contribuent normalement à faire augmenter les recettes fiscales de Revenu Canada (elles représentent un apport net de 203 millions de dollars aux recettes fiscales de 1993-1994). Chaque employé a permis au Ministère d'obtenir en moyenne, au cours de 1993-1994, 505 déclarations et 492 000 $ en cotisations d'impôt supplémentaires. Cela compense largement les dépenses du programme, puisque le salaire annuel moyen était de 35 000 $ et que nombre de non-déclarants touchés se mettent ensuite à produire volontairement leurs déclarations et à payer leurs impôts.

31.28 La charge de travail en mesures de relance provient de deux sources. Premièrement, les cas de non-déclarants relevés par le système automatisé sont transmis à des bureaux locaux lorsque la deuxième note de rappel n'entraîne pas la production d'une déclaration. La plupart des employés du programme s'occupent des cas ainsi transmis. Ceux-ci ont représenté, en 1993-1994, des recettes fiscales supplémentaires de 148 millions de dollars pour les 173 000 déclarations ainsi obtenues.

31.29 Deuxièmement, le Ministère met dans sa charge de travail des non-déclarants (inscrits au rôle ou non) grâce au travail exécuté dans le cadre de projets, c'est-à-dire grâce au programme de rapprochement, aux cas renvoyés par d'autres unités internes et aux renseignements qu'il obtient de sources externes, par exemple les registres de permis de construire. Le rapprochement (voir le paragraphe 31.32) permet d'identifier des non-déclarants à partir de feuillets de renseignements présentés par des tiers. La plupart des déclarations reçues grâce aux projets sont attribuables au rapprochement ou aux renvois. La consultation de sources externes accroît la possibilité de trouver des non-déclarants. Parce qu'il comprend l'importance de ces sources, le Ministère continue de prendre des mesures en vue d'y avoir accès (voir les paragraphes 31.39 et 31.40).

31.30 Grâce à ses projets, le Ministère a reçu 36 000 déclarations de plus et il a établi des cotisations supplémentaires d'impôt égales à 55 millions de dollars en 1993-1994. En moyenne, l'employé affecté à un projet permet au Ministère d'obtenir, par année, un moins grand nombre de déclarations, mais des recettes fiscales plus élevées, que l'employé affecté aux mesures de relance des cas relevés par le système automatisé (voir la pièce 31.3 ). Le traitement des cas découlant des projets prend plus de temps, d'où le nombre moins élevé de déclarations obtenues, mais il permet d'inscrire au rôle d'impôt des contribuables qui n'y figuraient pas.

31.31 Le Ministère n'obtient pas une déclaration de chaque non-déclarant qu'il a identifié comme tel. Afin que son personnel ne soit pas débordé par la charge de travail, le Ministère fixe des seuils de tolérance, c'est-à-dire des niveaux de revenu ou de probabilité qu'il y ait obligation fiscale en-deça desquels il ne prend pas de mesures de relance. Il peut également cesser les mesures de relance dans d'autres cas, notamment si le particulier est décédé ou si la société est inactive. Le Système automatisé a envoyé 464 000 notes de rappel à des particuliers et 263 000 à des sociétés pour l'année d'imposition 1991. Dans un tiers des cas pour ce qui est des particuliers et dans la moitié des cas relatifs aux sociétés, les mesures de relance ont été abandonnées pour les raisons indiquées ci-dessus. Les cas abandonnés représentent une source de déclarations à laquelle le Ministère pourrait puiser s'il avait plus d'employés affectés au programme pour déterminer dans chaque cas le montant de l'impôt exigible ou du remboursement à faire.

L'absence du numéro d'assurance sociale sur les feuillets T5 nuit au programme des non-déclarants et aux autres programmes d'exécution
31.32 L'identification de non-déclarants par le Ministère est l'un des résultats de son programme de rapprochement. Celui-ci consiste à comparer, par ordinateur, les revenus et les déductions que les particuliers indiquent dans leurs déclarations de revenus, d'une part, et les données des feuillets de renseignements reçus de tiers, d'autre part. Les T4, reçus des employeurs, et les T5, reçus des institutions financières, sont les principaux genres de feuillets utilisés pour le rapprochement.

31.33 Le Ministère a besoin des numéros d'assurance sociale (NAS) pour ce rapprochement. Si un feuillet ne porte pas de NAS, on ne peut pas le soumettre à un rapprochement automatisé. Le rapprochement manuel prend beaucoup de temps, coûte cher et est donc rarement utilisé. Le Ministère élabore actuellement une méthode de rapprochement automatisé des déclarations de revenus des particuliers et des feuillets de renseignements sans NAS. Cette méthode a recours au nom et à l'adresse du particulier ou à d'autres bases de données du Ministère pour trouver le NAS manquant.

31.34 Parce que le NAS manquait, le Ministère n'a pas pu utiliser le rapprochement automatisé pour plus de 6,5 millions de feuillets T5, soit 27 p. 100 des 24 millions de T5 qu'il a reçus pour 1992. Une partie de ces feuillets sans NAS appartiennent à des bénéficiaires qui n'ont pas besoin d'un NAS, par exemple une société. Le nombre de T5 sans NAS, qui indiquent des particuliers comme bénéficiaires, est estimé à 5 millions. (Un dénombrement plus exact s'est révélé impossible parce que le fichier des données de T5 contient des enregistrements dans lesquels le code indiquant le genre de bénéficiaire est inexact ou absent.)

31.35 Pour évaluer le montant global des revenus déclarés en moins par les « bénéficiaires » des feuillets T5 sans NAS et le nombre de ces « bénéficiaires » qui n'ont pas produit de déclaration de revenus, Revenu Canada a procédé à des essais de rapprochement manuel d'une envergure restreinte. Comme on pouvait s'y attendre, les résultats montrent que la plupart des contribuables ont indiqué correctement les renseignements dans leurs déclarations, mais certains ont omis les montants des T5 et d'autres, moins nombreux, n'ont pas produit de déclaration.

31.36 Le Ministère sait depuis plusieurs années quelles difficultés les NAS manquants lui occasionnent. En vertu d'une modification apportée à la Loi de l'impôt sur le revenu en 1988, sont passibles d'une pénalité de 100 $ les contribuables qui n'indiquent pas leur NAS à leur institution financière et les institutions financières qui ne s'appliquent pas raisonnablement à obtenir le NAS d'un particulier ou qui ne communiquent pas le NAS à Revenu Canada. Malgré le grand nombre de NAS manquants, aucune pénalité n'a encore été établie. Le Ministère a jugé que la disposition prévoyant la pénalité serait à la fois difficile et coûteuse à exécuter; à la place, il tâche surtout de mieux faire connaître la loi aux contribuables et d'inciter les institutions financières à obtenir le NAS et à le communiquer.

31.37 L'Internal Revenue Service (l'administration fiscale des États-Unis) exige que l'impôt soit retenu si aucun numéro d'identification n'est fourni. Revenu Canada et le ministère des Finances ont discuté de la possibilité de modifier la loi de telle manière que les institutions financières soient tenues de retenir l'impôt dans les cas où aucun NAS valide ne leur a été fourni. En 1995, le Ministère a l'intention de reconsidérer cette possibilité après étude des résultats des consultations qu'il effectue actuellement auprès d'institutions financières en vue d'un plan d'action que l'une ou l'autre partie ou les deux ensemble pourraient adopter afin d'améliorer l'observation concernant le NAS.

31.38 Le Ministère devrait poursuivre son initiative visant à obtenir les NAS qui manquent sur les feuillets qui ont un particulier comme bénéficiaire (voir la pièce 31.7). Vu le problème que représente visiblement pour lui la disposition actuelle prévoyant une pénalité, le Ministère devrait étudier d'autres solutions possibles, y compris rendre obligatoire la retenue de l'impôt si aucun NAS valide n'est fourni, puis recommander des modifications législatives en conséquence.

Réponse du Ministère : Le Ministère poursuit son initiative en vue d'obtenir les numéros d'assurance sociale sur les feuillets T5 par le biais de négociations avec le secteur financier. Le Ministère évaluera périodiquement l'efficacité de cette approche visant à améliorer le niveau d'observation relativement au numéro d'assurance sociale. En l'absence de progrès, le Ministère étudiera d'autres moyens, y compris des modifications législatives.

Le Ministère doit continuer d'augmenter sa capacité d'obtenir des indices de non-déclaration
31.39 Revenu Canada sait bien que les renseignements de sources externes contiennent des indices précieux pour identifier les non-déclarants. Différents bureaux locaux ont entrepris des projets dans lesquels ils utilisent des renseignements accessibles au public ou des renseignements fournis volontairement par des tiers. La nature des renseignements utilisés varie d'un bureau à l'autre et peut comprendre, par exemple, un registre des permis de construire et une liste des paiements faits à des entrepreneurs.

31.40 En 1993-1994, le Ministère a dressé une liste nationale de bases de données externes; cette liste mentionne notamment des renseignements détenus par d'autres ministères fédéraux ou par des gouvernements provinciaux. Le Ministère a reçu la permission d'utiliser certaines de ces bases de données et il travaille à obtenir la permission pour les autres. Il veut les renseignements contenus dans ces bases pour s'en servir dans plusieurs programmes d'exécution, y compris le programme des non-déclarants. Au moment de notre vérification, la majorité des bases figurant sur la liste n'étaient pas encore accessibles au Ministère.

31.41 Revenu Canada a récemment commencé à faire des rapprochements entre plusieurs de ses bases de données internes qui n'utilisaient pas les mêmes genres de numéros d'identification. Il a ainsi fait des rapprochements entre les employeurs qui déclarent des retenues sur la paye, les déclarants aux fins de la TPS et les déclarants aux fins de l'impôt des sociétés, en se fiant à leurs noms et adresses. Il a l'intention de procéder à des essais afin de voir si le procédé peut servir à identifier des sociétés non déclarantes.

31.42 Le Ministère a l'intention d'utiliser les bases de données mentionnées pour déterminer les cas d'inobservation dans des groupes particuliers de contribuables. Il pourrait toutefois compléter ce travail en faisant des recherches sur l'observation et en utilisant pour ces recherches d'autres bases de données, de façon à obtenir un profil des non-déclarants. Par exemple, munis des données cumulatives du recensement de 1991, nous avons comparé le nombre de particuliers ayant déclaré avoir eu un revenu en 1990 et le nombre de particuliers ayant produit une déclaration de revenus pour 1990; les résultats ont été intéressants.

31.43 Notre comparaison n'est pas concluante, mais elle donne lieu de croire que le groupe d'âge des moins de 20 ans pourrait compter un grand nombre de non-déclarants. Selon ce que nous avons constaté, parmi les moins de 20 ans dont le revenu dépassait 20 000 $, 80 p. 100 des hommes et 55 p. 100 des femmes ont produit une déclaration de revenus. Nous nous attendions à trouver un pourcentage de déclarants plus élevé chez les personnes ayant au moins ce revenu. L'écart entre le pourcentage attendu et le pourcentage constaté peut s'expliquer par le fait que des particuliers ont des revenus non imposables ou qu'ils ont assez de déductions pour n'avoir pas d'impôt à payer. Ou encore, de nouveaux membres de la population active peuvent n'avoir pas produit les déclarations exigées, surtout s'ils travaillaient à leur propre compte.

31.44 Le Ministère doit, en faisant des recherches sur l'observation, analyser des renseignements du genre évoqué ci-dessus, afin de concevoir en conséquence sa stratégie visant à faire observer la loi. S'il parvient à savoir que les non-déclarants appartiennent surtout à telles classes de personnes, il pourra prendre des mesures plus efficaces à l'intention de ces classes. Par exemple, un programme d'éducation destiné aux jeunes qui gagnent un revenu amènera peut-être un nombre accru d'entre eux à produire leur première déclaration de revenus.

31.45 Par ses recherches sur l'observation (voir la pièce 31.7 ), le Ministère devrait tenter d'obtenir un profil des non-déclarants qui l'aiderait dans la conception de ses programmes.

Réponse du Ministère : Comme il est énoncé à la pièce 31.7, le Ministère établira une division des recherches sur l'observation pour renforcer et augmenter sa capacité de recherche sur l'observation.

Pour ce qui est de l'élaboration de profils pour les non-déclarants, les preuves recueillies par le Ministère au cours des années indiquent clairement qu'il y a peu d'écart entre les profils des non-déclarants et ceux des contribuables qui produisent leur déclaration à temps. Des mesures telles que l'examen approfondi de secteurs et d'industries, l'amélioration des dispositions législatives en matière de déclaration et le rapprochement des données se sont avérées plus efficaces pour déceler les non-déclarants.

Le Ministère doit rendre les renseignements sur le programme des non-déclarants plus accessibles
31.46 L'Administration centrale fixe la politique à suivre pour le programme des non-déclarants, mais ce sont les bureaux locaux qui exécutent le programme et qui décident du travail à entreprendre et du temps à y consacrer. Les décisions que les bureaux locaux doivent prendre dans leurs situations propres comprennent les suivantes : le type de travail à entreprendre, les bases de données externes à utiliser, les seuils de tolérance à appliquer pour savoir de quels cas s'occuper, le temps durant lequel les cas peuvent rester dans la charge de travail et le pourcentage des heures-personnes à consacrer aux projets. Afin d'évaluer la pertinence des décisions, les gestionnaires ont besoin de plus de renseignements qu'ils en ont présentement à leur disposition.

31.47 Le Ministère pourrait mieux gérer son programme des non-déclarants si ses systèmes d'information sur ordinateur étaient plus performants. Il utilise trois systèmes informatiques pour consigner et communiquer les résultats du programme. Les données doivent être entrées séparément dans les deux systèmes nationaux et le système local. Les définitions des renseignements fournis par les systèmes diffèrent souvent de l'un à l'autre, des totaux de même nature divergent en raison d'écarts entre les moments de saisie, et le cumul automatique des données ne se fait pas de façon appropriée ou uniforme dans certains cas. Les systèmes nationaux ne permettent pas d'obtenir des rapports spéciaux en temps voulu.

31.48 En 1989, Revenu Canada a entrepris un projet : il s'agissait d'élaborer un nouveau système pour remplacer les trois systèmes existants et pour automatiser certains procédés manuels. Le Ministère veut ainsi résoudre les problèmes causés par les systèmes actuels et rendre ses opérations plus efficientes. En vue du nouveau système, le Ministère est en train d'élaborer une méthode de cotation qui lui permettra de déterminer quels particuliers non déclarants présentent la plus forte probabilité d'avoir de l'impôt à payer, afin que les bureaux locaux prennent des mesures de relance à leur égard. En 1991, l'exécution du projet a été différée, et l'équipe d'élaboration du nouveau système n'a été constituée qu'en juin 1992. Le Ministère prévoit maintenant de mettre le nouveau système en place par étapes, de 1995 à 1996.

31.49 Jusqu'à ces derniers temps, les bureaux locaux connaissaient les projets réussis des autres bureaux surtout au hasard des relations occasionnelles. Les communications électroniques permettent maintenant de transmettre des renseignements sur les projets à tous les bureaux de façon plus rapide et plus efficiente, et l'Administration centrale les utilise à cette fin depuis mars 1993. L'Administration centrale invite les bureaux locaux à lui transmettre des renseignements sur les projets qu'ils ont menés à bien, pour diffusion électronique à tous les bureaux, mais la réponse des bureaux locaux à cette invitation a été décevante. Des données sur les projets locaux n'ont été reçues que de 7 des 38 bureaux de district, et la plupart d'entre elles provenaient du même bureau.

Le Ministère doit évaluer l'efficacité du programme des non-déclarants
31.50 Le Ministère mesure l'efficacité du programme des non-déclarants d'après le nombre de déclarations obtenues, le montant des impôts établis et le temps que les employés y consacrent. Ces trois indicateurs se rapportent aux résultats directs du programme. Nous aimerions voir utiliser aussi d'autres indicateurs, par exemple la mesure dans laquelle le Ministère réussit à accroître l'observation de la loi par les contribuables, en comparaison de l'accroissement possible de cette observation. Le nombre des non-déclarants ajoutés au rôle de l'impôt serait l'un de ces indicateurs, mais les données nécessaires ne sont pas recueillies.

31.51 Revenu Canada estime que favoriser l'observation volontaire de la loi à l'avenir constitue un but fondamental de ses programmes visant l'observation. Or, le Ministère ignore s'il atteint ce but. Par exemple, il ignore combien de non-déclarants pris en faute produisent volontairement par la suite leurs déclarations de revenus. Ses systèmes informatiques actuels produisent un état historique de l'observation postérieure de la loi par les non-déclarants, mais le Ministère trouve ces états peu fiables. (Fournir des renseignements permettant de déterminer dans quelle mesure les non-déclarants observent ensuite la loi constitue justement un objectif du nouveau système automatisé mentionné au paragraphe 31.48.) Le Ministère s'attend d'achever en décembre 1994 une étude d'une partie de la charge de travail en non-déclarants, et cette étude devrait notamment traiter de l'observation postérieure de la loi par les non-déclarants. Le travail que nous avons effectué sur plusieurs dossiers de non-déclarants nous donne des raisons de croire que les non-déclarants récidivistes constituent un problème bien réel. Il faudrait que le Ministère analyse plus en profondeur le comportement des contribuables s'il veut mieux orienter le programme et accroître ainsi l'observation postérieure de la loi.

31.52 Grâce aux travaux du Comité de revue des mesures (voir la pièce 31.7 ), le Ministère devrait définir des indicateurs appropriés et fiables de manière à pouvoir évaluer son programme des non-déclarants. De plus, il devrait poursuivre ses efforts d'élaboration du nouveau système automatisé qui lui fournira certains des renseignements nécessaires à l'évaluation de ce programme.

Réponse du Ministère : Le Comité de revue des mesures du Ministère déterminera et élaborera des critères appropriés de mesure pour les programmes de vérification.

De plus, le Ministère met actuellement en place un système automatisé qui l'aidera à mesurer l'efficacité du programme des non-déclarants.

Conclusion

31.53 Le Ministère admet qu'obtenir des déclarations de revenus constitue un aspect essentiel de son mandat de faire observer la Loi de l'impôt sur le revenu . C'est pourquoi il applique le programme des non-déclarants depuis bien des années. La majeure partie de ce programme consiste à prendre des mesures de relance à l'égard des non-déclarants qui figurent déjà dans le rôle d'impôt et que le système automatisé indique aux fins de telles mesures. De plus, le Ministère consulte des sources internes et externes de renseignements, pour faire des recherches sur l'observation et pour trouver d'autres indices qui lui permettront de découvrir des non-déclarants ne figurant pas au rôle; il doit toutefois continuer d'élargir la gamme des sources ainsi consultées. Par le programme des non-déclarants, le Ministère obtient déjà des centaines de milliers de déclarations exigées aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu et des millions de dollars de recettes; le Ministère doit toutefois déterminer dans quelle mesure il parvient, grâce à ce programme, à obtenir que les non-déclarants se comportent par la suite en citoyens respectueux de la loi.

GARANTIR L'ÉQUITÉ DU RÉGIME FISCAL : LES ENQUÊTES SPÉCIALES

Introduction

31.54 L'évasion fiscale est une infraction criminelle grave. Dans un récent discours sur ce sujet, le ministre du Revenu national a mentionné que l'économie souterraine et l'évasion fiscale avaient des répercussions sur les services gouvernementaux et rendaient plus difficile pour les gouvernements la tâche de réduire les déficits et ensuite les impôts. Le Ministre a souligné que l'évasion fiscale est un crime qui fait des victimes : des gens perdent leur emploi, des contribuables honnêtes supportent un fardeau injuste et des entreprises légitimes subissent une compétition déloyale.

31.55 La Loi de l'impôt sur le revenu prévoit des poursuites criminelles pour les auteurs de fraude fiscale. Les poursuites criminelles peuvent constituer une puissante incitation à respecter la législation fiscale et permettre de réduire l'évasion fiscale. L'effet dissuasif se produit à deux niveaux : au niveau du contribuable, par des poursuites et par l'imposition d'amendes et de peines d'emprisonnement, et à un niveau plus général, par la publicité sur les condamnations.

31.56 La Division des enquêtes spéciales du Ministère est responsable de l'application des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi) en matière de poursuites criminelles. Elle enquête sur des cas présentant des indices d'évasion fiscale et, au besoin, recommande au ministère de la Justice d'intenter des poursuites (voir la pièce 31.4). Ces cas lui viennent habituellement d'autres secteurs d'exécution, surtout de la vérification.

31.57 Les Enquêtes spéciales font aussi des vérifications dans le cadre du Programme spécial d'exécution, pour déterminer les impôts à payer par des personnes qui tirent des revenus d'activités illégales et qui pourraient faire l'objet de poursuites pour d'autres infractions criminelles par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) ou d'autres organismes chargés de l'application de la loi. Les Enquêtes spéciales traitent également des demandes de divulgation volontaire de revenus non déclarés et acceptent des renseignements sur des cas d'évasion fiscale possible soumis par des dénonciateurs.

31.58 S'il veut obtenir une condamnation pour évasion fiscale, le Ministère doit pouvoir prouver que le contribuable avait l'intention d'éluder l'impôt. Les éléments de preuve nécessaires sont semblables à ceux qui doivent être produits à l'appui des accusations d'infraction ou de fraude selon le Code criminel . Le fait d'omettre de déclarer des revenus ne constitue pas en soi de la fraude ou de l'évasion fiscale. Mais la production délibérée d'une déclaration fausse ou trompeuse, en vue d'induire en erreur le ministre du Revenu national, est un acte frauduleux.

31.59 Dans les cas où il est impossible de prouver que l'évasion fiscale est délibérée, le Ministère n'intente pas de poursuites criminelles mais peut imposer une pénalité pour faute lourde égale à 50 p. 100 de l'impôt établi.

31.60 Les Enquêtes spéciales ont un budget de 464 années-personnes, qui représentent environ 8,5 p. 100 des années-personnes allouées aux activités d'observation postcotisation de Revenu Canada pour 1994-1995. Les ressources humaines utilisées par les Enquêtes spéciales ont diminué de 10 p. 100 depuis 1989-1990.

Objectif et étendue de la vérification

31.61 Notre vérification avait pour objectif d'évaluer la pertinence des activités d'exécution menées par Revenu Canada en vue d'identifier et de poursuivre les auteurs d'évasion fiscale. Nous avons aussi examiné la qualité des renseignements fournis au Parlement pour l'examen de ces activités.

31.62 Notre examen visait les activités de la Division des enquêtes spéciales et d'autres activités d'exécution du Ministère qui ont des répercussions sur les opérations de la Division. Nous avons effectué des entrevues à l'Administration centrale et dans certains bureaux de district. Nous avons aussi consulté des procureurs (criminel) du ministère de la Justice qui participent à la poursuite des cas présentant des indices d'évasion fiscale.

Observations et recommandations

Le nombre de cas présentant des indices d'évasion fiscale relevés par les vérificateurs de l'Impôt a diminué de moitié depuis 1990, passant de 1 000 à 500 par année
31.63 Le programme des Enquêtes spéciales dépend d'un acheminement continuel de cas émanant d'autres unités du Ministère. Le Ministère est conscient de l'importance de cet acheminement de cas. Selon le manuel des opérations :

Le succès du programme des Enquêtes spéciales dépend d'un acheminement continuel d'indices. Les indices sur l'évasion fiscale doivent émaner en grande partie des personnes préposées à la vérification des déclarations d'impôt et à l'examen des dossiers des contribuables. Les gestionnaires de toutes les sections de l'Administration centrale et des bureaux de district doivent donner instruction à leurs employés de surveiller les indications de non-observation volontaire à l'égard de toute loi appliquée par le Ministère. Ils doivent veiller à ce que tous les cas où des enquêtes criminelles peuvent être justifiées soient portés à l'attention des Enquêtes spéciales.
31.64 Au cours des quatre dernières années, le nombre de cas transmis annuellement aux Enquêtes spéciales par d'autres secteurs du Ministère, surtout la vérification, est passé de 1 000 à 500. La diminution des renvois venant de la vérification a réduit le nombre de cas pour lesquels la Division fait des enquêtes et intente des poursuites. Cette situation risque de diminuer la capacité du Ministère de maintenir un programme de poursuites criminelles uniforme et équilibré visant tous les groupes de contribuables et toutes les régions.

31.65 La diminution du nombre de renvois inquiète le Ministère. En 1993-1994, l'Administration centrale a demandé aux bureaux de district de l'ensemble du pays d'augmenter leurs efforts de détection de manière à transmettre 1 296 renvois aux Enquêtes spéciales. Le Ministère nous a indiqué que le nombre réel de renvois, cette année-là, a été de 490.

31.66 Lors de nos discussions avec les hauts fonctionnaires du Ministère, ceux-ci nous ont révélé que la diminution du nombre de renvois pouvait être en partie attribuée à la meilleure qualité et à la plus grande complexité des cas soumis par la vérification. Toutefois, nous n'avons obtenu aucune preuve d'une telle amélioration.

Le nombre prévu de renvois en vue de poursuites est de 170 par année
31.67 Les enquêtes visant à prouver l'évasion fiscale délibérée et à déterminer le montant de la fraude demandent beaucoup de travail et de temps. Une enquête prend, en moyenne, plus de 2 000 heures directes, soit environ 1,5 année-personne. L'étape de la poursuite devant les tribunaux par le ministère de la Justice exige en moyenne deux ans. Depuis quelques années, les enquêtes sont plus longues à effectuer en raison de l'obligation de respecter les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés .

31.68 Les éléments de preuve à l'appui des accusations de fraude fiscale s'obtiennent surtout par des enquêtes et des perquisitions autorisées par mandat. Les enquêteurs ne recommandent pas d'intenter des poursuites tant que le ministère de la Justice n'a pas examiné les preuves et qu'il n'est pas entièrement d'accord avec les accusations de fraude fiscale.

31.69 Au cours des cinq dernières années, Revenu Canada a prévu soumettre chaque année 170 cas présentant des indices d'évasion fiscale au ministère de la Justice pour que des poursuites soient intentées. Le nombre réel de renvois est d'environ 150 par année. L'objectif de 170 cas par année est fondé sur les ressources qui ont été attribuées aux Enquêtes spéciales. Il n'est pas fondé sur des recherches visant à déterminer dans quelle mesure des poursuites au criminel doivent être intentées pour lutter contre l'évasion fiscale et améliorer l'observation de la loi.

31.70 Nous avons noté que, pour réaliser le nombre prévu de renvois en vue de poursuites, le Ministère a réduit le nombre d'enquêtes préliminaires et a limité le nombre d'années d'imposition et d'infractions fiscales visées par ses enquêtes et ses recommandations de poursuites. Il a aussi beaucoup compté sur l'acceptation de plaidoyers de culpabilité pour réduire le temps à consacrer à chaque cas.

31.71 Les procureurs du ministère de la Justice que nous avons rencontrés ont déclaré que les dossiers des Enquêtes spéciales étaient habituellement bien préparés et que les recommandations de poursuites étaient bien documentées. Au cours des quatre dernières années, 90 p. 100 des poursuites recommandées ont été intentées, et 90 p. 100 de ces poursuites ont donné lieu à des condamnations (voir la pièce 31.5 ).

31.72 Parmi les condamnations, 16 p. 100 résultent d'un procès, et 84 p. 100 de l'acceptation de plaidoyers de culpabilité. Selon les dossiers, certains plaidoyers sont obtenus en négociant les accusations et la peine avec le contribuable. Dans ces cas-là, le montant de l'impôt visé par les accusations d'évasion fiscale, le nombre d'années d'imposition en cause, le montant des pénalités civiles à imposer et le nombre de contribuables impliqués dans la fraude, ainsi que la peine ou l'amende proposée au criminel, peuvent être réduits en échange d'un plaidoyer de culpabilité et du paiement des impôts dus à la Couronne. Le pourcentage d'acceptation de plaidoyers va de 94 p. 100 à Montréal à 73 p. 100 à Vancouver.

31.73 Les plaidoyers de culpabilité ont toujours été utilisés dans le règlement des cas d'évasion fiscale. En fait, ils sont utilisés dans tout le système de justice pénale. Les cas avec plaidoyers de culpabilité coûtent moins cher parce que les éléments de preuve que les enquêteurs doivent rassembler en vue des procès sont réduits au minimum. Ces cas exigent en moyenne 600 heures de moins que les causes avec procès. La durée des comparutions devant les tribunaux pour les contribuables et pour leurs représentants, ainsi que pour les avocats du ministère de la Justice, est également réduite.

La publicité sur les condamnations a repris
31.74 Les poursuites ont pour objet de pénaliser les contribuables qui ne respectent pas la loi et de décourager d'autres personnes de commettre les mêmes infractions. Selon la théorie générale sur la dissuasion, pour maximiser les résultats, les condamnations résultant de poursuites doivent être largement diffusées. En plus d'avoir un effet dissuasif, la publicité rassure les contribuables honnêtes, qui savent ainsi qu'ils n'auront pas à payer pour les gens malhonnêtes.

31.75 En 1987, le Ministère a décidé de ne pas informer les médias des poursuites qu'il intentait. Dans notre rapport de 1990 sur l'exécution, nous avons souligné que cette décision avait entraîné une importante diminution de la publicité sur les poursuites pour évasion fiscale.

31.76 Selon une nouvelle politique introduite en août 1993 et officiellement mise en application en janvier 1994, les poursuites pour évasion fiscale visant des impôts de 250 000 $ ou plus et les cas d'intérêt national doivent être diffusés dans l'ensemble du pays au moyen de communiqués. Des communiqués régionaux font état des cas d'évasion fiscale concernant des sommes moins élevées. Tous ces communiqués font mention de l'accusation, des détails de la cause, de la pénalité et de l'identité du contrevenant.

31.77 Le Ministère nous a fait part de son intention d'élaborer d'autres méthodes proactives de divulgation de l'information sur les poursuites fructueuses et sur d'autres cas de fraude.

31.78 Notre examen des documents ministériels indique que la publicité semble avoir un effet positif sur les contribuables contrevenants. Au cours du dernier exercice, le nombre de divulgations volontaires de revenus non déclarés a augmenté de plus de 100 p. 100, passant de 268 à 587. L'année dernière, le motif le plus souvent invoqué pour les divulgations volontaires a été la publicité faite par le Ministère.

Les résultats des activités d'exécution courantes sont mesurés et signalés sous l'angle des impôts supplémentaires établis
31.79 Dans la Partie III du Budget des dépenses , le Ministère mentionne que toutes ses activités d'exécution, y compris les Enquêtes spéciales, ont pour objet de favoriser l'autocotisation et d'améliorer l'observation volontaire de la loi. Toutefois, le rendement de toutes ces activités est surtout mesuré et signalé sous l'angle des impôts supplémentaires établis. Mais les nouvelles cotisations ne constituent pas une mesure d'amélioration de l'observation volontaire.

31.80 La mesure du rendement sous l'angle des impôts supplémentaires établis peut inciter les vérificateurs à concentrer leurs efforts sur l'établissement de nouvelles cotisations, ce qui risque d'aller à l'encontre de l'obligation du Ministère de déceler l'évasion fiscale. De plus, une telle mesure du rendement ne favorise pas la responsabilisation sur le plan de l'amélioration de l'observation de la loi.

31.81 Le Ministère ne connaît pas le règlement final des nouvelles cotisations établies dans le cadre de ses programmes d'exécution - sommes recouvrées, soldes non recouvrables et cotisations annulées à la suite d'appels internes ou de décisions des tribunaux. Dans la Partie III du Budget des dépenses de 1994-1995, le Ministère déclare : « Tous les efforts de promotion de l'autocotisation et toutes les mesures visant l'observation se révèleraient inutiles si les impôts établis n'étaient pas finalement recouvrés par l'État. » Toutefois, le Ministère ne compile pas les données pour établir dans quelle mesure les soldes des nouvelles cotisations établies à la suite d'enquêtes criminelles ont été recouvrés ou radiés. Si l'évaluation du rendement des programmes comportait des renseignements sur le règlement final des nouvelles cotisations, le Parlement aurait une image plus complète des répercussions des activités d'exécution.

La recherche sur l'observation est essentielle à l'amélioration de l'observation volontaire
31.82 En 1990, nous avons recommandé au Ministère de faire plus de recherches sur l'observation de la loi. En 1992, celui-ci nous a informés qu'il allait revoir ses opérations et ses exigences en matière de recherche. La même année, il a abandonné sa fonction de recherche et l'a remplacée par une fonction de planification de la vérification qui ne dispose pas de ressources suffisantes pour effectuer des recherches sur l'observation. Le Ministère a récemment annoncé son intention de reprendre les recherches sur l'observation de la loi. À la fin de notre vérification, cette fonction n'était pas encore redevenue opérationnelle.

31.83 À l'heure actuelle, le Ministère n'effectue pas de recherches en vue de déterminer dans quelle mesure les activités d'exécution augmentent l'observation volontaire et, particulièrement, comment les sanctions criminelles améliorent le niveau d'observation dans des industries ou des collectivités particulières. Pour maximiser l'amélioration de l'observation volontaire avec un niveau de ressources donné, le Ministère doit faire des recherches pour déterminer les effets des différentes activités sur l'observation de la loi. Les recherches sur l'observation pourraient aider à déceler d'importants secteurs d'inobservation et à évaluer le rendement des activités d'exécution.

31.84 À la suite de notre vérification, nous avons suggéré des questions pour les recherches sur l'observation. Ces questions figurent à la pièce 31.6 .

31.85 Un programme de recherche systématique est essentiel si le Ministère veut suivre une stratégie de maximisation des recettes et de l'observation volontaire de la loi.

31.86 Le Ministère devrait prendre les mesures suivantes :

Réponse du Ministère : Comme il est indiqué à la pièce 31.7 , le Ministère fait les démarches nécessaires pour établir une division des recherches sur l'observation dont le mandat sera de maximiser l'observation volontaire et la production de recettes.

Le Comité de revue des mesures du Ministère déterminera et élaborera des critères appropriés de mesure pour les programmes de vérification.

Dans le cadre du mandat du Comité de revue des mesures, le Ministère étudiera la faisabilité de fournir des renseignements sur le règlement final des nouvelles cotisations établies par l'entremise des programmes de vérification et sur ses activités de recherche.