Le ministère des Finances

Participation aux institutions de Bretton Woods et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement

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Vérificatrice générale adjointe : Bonnie Miller
Vérificateur responsable : Michael Adibe

Participation aux institutions de Bretton Woods et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement

Introduction

La participation - Un moyen de travailler à l'avancement de nos intérêts en matière de politique économique et étrangère

12.7 La grande dépression des années 30 et la Seconde Guerre mondiale ont été la cause d'énormes bouleversements dans l'économie de nombreux pays. Le relèvement de ces économies et l'établissement de mécanismes en vue de faciliter le commerce international et la circulation des capitaux ont été au coeur des nombreux accords multilatéraux conclus vers la fin de la guerre et peu après celle-ci. Deux institutions financières internationales ont été établies lors de la conférence de Bretton Woods, en 1944, sous les auspices du Conseil économique et social des Nations-Unies : le Fonds monétaire international et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (appelée BIRD ou Banque mondiale).

12.8 Le bien-être économique des Canadiens a toujours été étroitement lié au commerce extérieur ainsi qu'à la circulation internationale des capitaux. Le Canada est donc intéressé à favoriser un système monétaire international efficace, des taux de change stables, un milieu commercial ouvert et le développement mondial : ce sont là les raisons d'être des institutions de Bretton Woods. Par conséquent, la participation du Canada aux activités de ces institutions lui sert en partie à poursuivre ses intérêts en matière de politique économique et extérieure.

12.9 Le Fonds monétaire international. Le Fonds monétaire international (FMI) a été créé pour promouvoir le bon fonctionnement du système monétaire international, et ce, dans le but de faciliter le commerce et la circulation des capitaux dans le monde. Il fournit une aide financière aux pays membres de façon à les aider à surmonter les difficultés de balance des paiements qu'ils rencontrent à court terme. Il surveille et analyse les politiques de taux de change et le rendement économique de tous les pays membres et discute de ses conclusions avec eux.

12.10 Le FMI est financé grâce aux quotes-parts versées par les membres, dans leur propre devise pour une part, et en devises fortes pour une autre. La quote-part de chaque membre correspond à son importance économique relative, et détermine le pourcentage de voix qui lui revient ainsi que le montant maximum d'aide qu'il peut obtenir du Fonds pour améliorer sa balance des paiements.

12.11 Le Groupe de la Banque mondiale . Créée à l'origine pour contribuer à relever les économies de l'Europe et du Japon ravagées par la guerre, la Banque mondiale, dont le siège social est à Washington (D.C.), est maintenant la plus importante source de financement pour le développement dans le monde. La Banque mondiale, de pair avec les institutions spécialisées qui lui ont été associées par après, soit l'Association internationale de développement, la Société financière internationale et l'Agence multilatérale de garantie des investissements, constitue le Groupe de la Banque mondiale. L'objectif commun des institutions de ce groupe est de contribuer à élever le niveau de vie dans les pays en développement en dirigeant vers eux des ressources financières à long terme. ( Voir la photo )

12.12 Les souscriptions à la Banque mondiale par les pays membres sont versées sous forme de capital d'apport - une modeste partie (environ 7 p. 100) du total - et de capital exigible (une promesse de payer, si nécessaire). En se servant de ces quotes-parts et du produit de ses propres opérations, la Banque mondiale emprunte sur les marchés de capitaux pour consentir des prêts de développement aux pays membres en développement, qui bénéficient ainsi d'un accès plus facile aux capitaux et de taux d'intérêt qui sont beaucoup plus favorables que ceux qu'ils pourraient obtenir eux-mêmes.

De nouveaux défis économiques exigent de nouvelles stratégies

12.13 Après la Seconde Guerre mondiale, le Fonds monétaire international a mis en oeuvre un code de conduite destiné à promouvoir la stabilité des taux de change grâce à l'adoption d'un taux de change fixe lié au dollar américain et à l'or. À l'époque, le Fonds comptait surtout des pays industrialisés en tant que membres. Cependant, entre 1971 et 1973, la plupart des pays ont adopté des taux de change flottants, ce qui a forcé le Fonds à fonctionner de façon très différente.

12.14 Au début des années 80, la faiblesse du prix des denrées, la récession dans les pays industrialisés, les taux d'intérêt réel élevés, les échecs de politique intérieure et d'autres facteurs encore ont rendu difficile, pour les nations plus pauvres, le remboursement de leurs emprunts internationaux, que ce soit à des banques commerciales ou à d'autres nations. Les institutions financières et les pays créanciers ont été forcés de chercher le moyen de faire face à une crise qui menaçait de ruiner le système financier international.

12.15 C'est ainsi que le G-7 (c'est-à-dire le groupe des sept nations les plus industrialisées, dont le Canada fait partie) a conçu plusieurs plans correcteurs que le FMI, avec son expérience de la restructuration économique et sa capacité d'analyse de la conjoncture, était particulièrement bien placé pour aider à mettre en oeuvre.

12.16 Les approches à court terme, adoptées traditionnellement en cas de difficultés relatives à la balance des paiements, n'ont pas pu venir à bout des problèmes chroniques et récurrents dont ont été affligés un certain nombre de pays au cours des deux dernières décennies. Le FMI et d'autres experts estiment qu'il faut trouver des solutions structurelles à long terme. En conséquence, le FMI a adapté quelques-uns de ses mécanismes de financement et quelques-unes de ses politiques de prêt aux besoins précis de certains membres. Et, quoique le FMI n'ait pas été conçu à l'origine comme institution de développement du tiers monde, il s'est doté d'une capacité d'ajustement structurel ainsi que d'une capacité d'ajustement structurel renforcée qui lui permettent de prêter de l'argent à long terme et à des taux d'intérêt de faveur à des pays à faible revenu et lourdement endettés. Toutefois, le rôle du FMI demeure toujours celui d'un organisme monétaire qu'intéressent d'abord et avant tout les questions macro-économiques.

12.17 L'attitude du Groupe de la Banque mondiale envers la question du développement a également évolué. Historiquement, les fonds de développement étaient canalisés vers des projets et des programmes aux objectifs très circonscrits. Les ramifications économiques, sociales et environnementales plus vastes de ces projets n'étaient pas complètement précisées et, par conséquent, étaient ignorées.

12.18 Depuis le début des années 80, de plus en plus de prêts de la Banque mondiale se sont trouvés liés à l'aide d'ajustement sectoriel et structurel, dont le but est de renforcer des secteurs entiers de l'économie. En 1992, les prêts à l'ajustement constituaient 27 p. 100 de tous les prêts autorisés. Des conditions telles que la protection de l'environnement sont maintenant attachées à certains prêts, et la Banque mondiale n'hésite pas à exprimer les préoccupations qu'elle a à l'endroit des politiques des pays bénéficiaires. De même, il va maintenant de soi que les fonds de développement soient engagés en conformité de certains objectifs et projets macro-économiques, de sorte que les activités de la Banque mondiale se rapprochent peu à peu de celles du FMI.

12.19 Au fur et à mesure que ces institutions ont orienté leurs stratégies vers les réformes macro-économiques, leur collaboration et leur coordination se sont améliorées. Cependant, il est en soi difficile d'analyser l'efficacité de stratégies à long terme et à objectifs multiples. Le défi à relever consiste à définir précisément les objectifs, à recueillir les renseignements nécessaires et à faire des analyses qui permettent l'affectation et l'utilisation la plus efficiente et la plus efficace possible des rares fonds disponibles pour le développement.

12.20 La Banque européenne pour la reconstruction et le développement. La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (appelée Banque européenne ou BERD) a été créée en 1991 pour canaliser l'aide financière aux anciens pays communistes de l'Europe de l'Est, y compris les pays de l'ancienne Union soviétique. Elle a pour mandat de favoriser la transition vers la démocratie et l'économie de marché, et de promouvoir l'esprit d'entreprise ainsi que l'initiative privée dans ces pays. La Banque s'attache aussi à promouvoir l'adoption d'institutions démocratiques et le respect des droits de la personne.

12.21 Le financement de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement est analogue à celui de la Banque mondiale, mais le capital d'apport représente 30 p. 100 du total des souscriptions des états membres, comparé à 7 p. 100 pour la Banque mondiale. La Banque européenne emprunte également sur les marchés de capitaux pour financer ses prêts et ses investissements.

La participation du Canada

12.22 L'adhésion du Canada au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale a été autorisée aux termes de la Loi sur les accords de Bretton Woods , qui date de 1945. Depuis l'apparition des organismes affiliés à la Banque mondiale, la participation du Canada est autorisée par la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes de 1985, telle que modifiée. Notre participation à la Banque européenne est autorisée aux termes de la Loi sur l'accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement , qui date de 1991.

12.23 Le ministère des Finances est le principal gestionnaire de la participation du Canada à ces institutions. Les autres ministères et organismes qui jouent un rôle en la matière sont l'Agence canadienne de développement international (ACDI), le ministère des Affaires extérieures et la Banque du Canada. De toute évidence, une bonne coordination s'impose.

12.24 La Division des finances et du développement international du ministère des Finances gère les relations du Canada avec le Fonds monétaire international, avec le Groupe de la Banque mondiale et avec la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Elle dispose d'un administrateur dans chacune de ces institutions. La division :

Le ministre des Finances fait rapport tous les ans au Parlement sur ces activités.

12.25 Les administrateurs canadiens faisant partie de ces institutions financières représentent d'autres pays, des pays emprunteurs pour la plupart, aussi bien que le Canada. Ils cumulent donc deux fonctions, qui sont de promouvoir les intérêts du Canada en tant que créancier, et ceux des autres membres en tant qu'emprunteurs, même s'il peut arriver que ces intérêts soient incompatibles.

12.26 Le pourcentage des voix revenant au Canada est très faible (3,2 p. 100 au FMI le 30 avril 1991, 3 p. 100 à la Banque mondiale le 30 juin 1991, et 3,5 p. 100 à la Banque européenne le 31 décembre 1991). Le Canada n'a pas de droit de veto. Ses administrateurs tentent d'amener les institutions à adopter des politiques et des arrangements administratifs qui, selon le Canada, sont de nature à mener à un développement durable, qui soit conséquent avec les autres buts et priorités que le Canada favorise. Cependant, la capacité du Canada à influer sur les décisions prises par les institutions va beaucoup plus loin. Avec un de ses nationaux dans chaque conseil d'administration, et en tant que membre du G-7, qui exerce collectivement une grande influence sur l'établissement des priorités et des stratégies des institutions, et même sur le déroulement de leurs activités, le Canada peut exercer une influence proportionnellement plus grande que son pourcentage de voix lorsqu'il obtient l'appui de ses alliés du G-7.

12.27 La participation du Canada à ces institutions est liée à son programme d'aide publique au développement. La contribution du Canada au FMI et au Groupe de la Banque mondiale s'élevait, en 1990-1991, à 320 millions de dollars, soit près de 11 p. 100 du total de ses dépenses d'aide publique au développement cette année-là. Par habitant, la quote-part du Canada à la Banque mondiale est la plus élevée parmi celles des pays du G-7 (voir les pièces 12.1 et 12.2 ).

Coûts et avantages pour le Canada

12.28 En tant que membre, le Canada aide ces institutions au moyen de souscriptions de capitaux d'apport, de souscriptions de capitaux exigibles (une promesse de payer, si nécessaire), de prêts et d'autres engagements. Il est également tenu de respecter les conditions et modalités posées par les statuts des institutions. Au 31 mars 1991, la quote-part du Canada au FMI s'élevait à 4,6 milliards de dollars. Le total des engagements financiers du Canada auprès du groupe de la Banque mondiale et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement était de 5,6 milliards de dollars (voir les pièces 12.3 et 12.4 ).

12.29 La participation du Canada à ces institutions lui rapporte des avantages commerciaux mesurables, sous forme de marchés de biens et de services octroyés au Canada par la Banque mondiale et l'Association internationale de développement. Le bon fonctionnement du système monétaire mondial, l'amélioration des échanges commerciaux et de la circulation des capitaux, ainsi que les conditions d'un développement économique international durable, que favorisent ces institutions, rapportent aussi au Canada, quoique les avantages ainsi retirés soient difficiles à évaluer. Grâce à cette participation, le gouvernement a accès à de l'information qu'il ne pourrait pas obtenir dans le cadre de programmes bilatéraux. Cependant, le fait d'être représenté au G-7 et aux conseils d'administration impose aussi au pays une responsabilité de partager les risques et les fardeaux inhérents à la gestion d'ensemble.

Objectifs et étendue de la vérification

12.30 Notre vérification avait pour objectifs d'établir, premièrement, comment le ministère des Finances surveille la mesure dans laquelle la participation du Canada contribue à l'atteinte de ses objectifs et fait rapport en conséquence; deuxièmement, comment les Finances gèrent les risques liés aux engagements financiers du Canada envers les institutions concernées; troisièmement, comment les Finances gèrent le flux d'information et comment elles coordonnent leurs activités avec les autres ministères et organismes intéressés; et enfin, si les Finances informent le Parlement et lui rendent compte comme il convient de la participation du Canada à ces institutions. Nous expliquons, dans les diverses sections du présent chapitre, nos motifs pour examiner ces secteurs et ce que nous nous attendions à trouver.

12.31 Notre vérification a surtout porté sur la gestion faite par les Finances de la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods (le FMI et le Groupe de la Banque mondiale); elle a compris un bref examen du rôle de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, qui est de création relativement récente. Comme notre vérification mettait l'accent sur le rôle joué par ces institutions pour faciliter la durabilité de la croissance économique des pays en développement, nous nous sommes surtout attachés à la participation du Canada au groupe de la Banque mondiale.

12.32 Quoique cette vérification ait supposé de notre part une certaine compréhension des opérations de prêt de ces institutions, elle n'a pas consisté en une vérification de ces institutions.

Observations et recommandations

Examen de la participation du Canada - Objectifs et résultats

12.33 Nous nous sommes penchés sur la façon dont les Finances surveillent et examinent le flux de l'information relative à l'efficacité des institutions, en particulier eu égard à la réalisation des objectifs du Canada en matière de développement international.

12.34 Compte tenu de l'importance des engagements financiers en cause, il est raisonnable de s'attendre :

Il faut que les raisons pour lesquelles le Canada participe aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes soient précisées et énoncées clairement
12.35 Les objectifs poursuivis par le Canada dans sa participation à ces institutions doivent être clairement énoncés pour que la rentabilité de cette participation puisse être évaluée.

12.36 Dans son rapport de 1991 sur les activités menées aux termes de la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes , les Finances déclarent : «En sa qualité de pays membre du FMI, le Canada peut promouvoir un système financier stable à l'échelle mondiale et favoriser, dès le début, un rajustement méthodique des politiques dans les pays aux prises avec un déséquilibre insoutenable des paiements extérieurs. Ce sont les objectifs que le Canada a toujours appuyés et qui influencent encore les politiques canadiennes à l'égard du Fonds.» Elles ajoutent : «Le Canada peut tirer plusieurs avantages de son statut de membre de la Banque mondiale, cette dernière exerçant une influence considérable au chapitre des programmes de développement global, des politiques et de l'innovation. En outre, non seulement la Banque est l'organisme le plus important au monde sur le plan du développement, mais elle a également le plus d'influence et est la plus active à cet égard. À titre de pays membre de la Banque mondiale, le Canada a donc un certain poids dans la prise de décisions relativement importantes et a accès à des renseignements qu'il ne peut normalement obtenir dans le cadre de son programme bilatéral.»

12.37 Les documents internes des Finances font état d'autres objectifs à la participation du Canada : la durabilité du développement, la lutte contre la pauvreté, la protection et l'amélioration de l'environnement et une direction «convenable» au moyen de la prestation de prêts et d'une aide financière fondés sur des orientations précises. Le Canada s'attend également à retirer des avantages commerciaux de sa participation : l'octroi de marchés de biens et de services au Canada par la Banque mondiale et ses institutions connexes, et la création d'emplois pour des Canadiens au sein de ces organismes.

12.38 Ces objectifs et les résultats prévus, qui sont indiqués dans les documents internes du ministère des Finances, ne sont pas signalés par celui-ci dans la Partie III du Budget des dépenses, ni dans le rapport annuel relatif à la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes . L'objectif ayant trait aux organisations financières internationales est plutôt décrit par les Finances dans la Partie III comme étant de «fournir des fonds pour le paiement des souscriptions du Canada à divers organismes internationaux». Rien n'est mentionné quant aux résultats attendus de ces versements, et la nature de la répartition des charges qui y sont associées n'est pas précisée. Les objectifs de la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes ne sont énoncés dans aucun document public de façon assez claire et assez complète pour que le Parlement et le public soient pleinement informés des raisons pour lesquelles les deniers des contribuables sont dépensés, c'est-à-dire les motifs de la participation du Canada et ses responsabilités connexes, et pour fournir une base à l'évaluation des résultats obtenus.

12.39 Dans les documents publics tout comme dans les documents internes, les buts et les objectifs de la participation du Canada sont exprimés en termes généraux et abstraits, qui ne peuvent se mesurer. Par exemple, ce qu'on entend par développement durable et direction convenable n'est pas défini, pas plus que les critères qui permettraient d'évaluer la mesure dans laquelle ces buts sont atteints. Le ministère des Finances a fait état de la nécessité de ce genre de critères afin, par exemple, de pouvoir mesurer l'efficacité du travail accompli par l'Association internationale de développement pour réduire la pauvreté. En général, les cibles et les indicateurs relatifs aux résultats escomptés, qui intéressent particulièrement le Canada, ne sont pas énoncés. L'évaluation indépendante de la mesure dans laquelle les buts sont atteints est donc plus difficile. Il faut, pour que les avantages de la participation du Canada puissent être évalués, que les objectifs soient clairement énoncés et que des indicateurs de résultats soient définis, lorsque la chose est possible, et surveillés de près.

12.40 Lorsque des indicateurs permettant d'évaluer l'atteinte de certains objectifs ont été définis, les résultats sont mesurés et signalés. Dans le rapport sur les activités menées aux termes de la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes , qu'il est légalement tenu de publier, le ministère des Finances a fourni des renseignements sur les marchés (dépenses discernables) octroyés au Canada par la Banque mondiale et par l'Association internationale de développement, et ce, dans quatre catégories d'activités : les services de consultation, les travaux publics, les machines et l'équipement, et les autres biens confondus. Il a également indiqué le nombre et le pourcentage de Canadiens qui travaillent à la Banque mondiale. Aucun renseignement relatif à l'emploi n'a été fourni quant au Fonds monétaire international. Les Finances et les Affaires extérieures se tiennent également au courant de certains aspects des avantages commerciaux retirés par le Canada, et font rapport à ce sujet. De même, pour ce qui est des négociations en vue de la reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement, le ministère des Finances a examiné et utilisé des indicateurs précis mis au point par le Programme des Nations Unies pour le développement (incidence de la pauvreté ou proportion de la population vivant au-dessous du seuil de la pauvreté, espérance de vie, indice de rendement scolaire, PIB rajusté par habitant, indice d'amélioration des conditions humaines, le tout classé par pays et par région) pour définir la position du Canada en ce qui a trait à la répartition régionale des ressources de l'Association.

12.41 Ces indicateurs fournissent des données concrètes qui peuvent aider à évaluer la mesure dans laquelle ont été atteints les objectifs qui ont été clairement précisés, et on rendrait plus évidents les résultats de la participation du Canada si on les publiait. Cependant, ils ne suffisent pas en eux-mêmes. Les changements dans les indicateurs ne peuvent être attribués uniquement ni aux activités du Groupe de la Banque mondiale, ni à la participation du Canada. Une évaluation ou un examen régulier dans lequel on tiendrait compte de l'analyse de ces indicateurs ainsi que d'autres indicateurs et renseignements pertinents, permettrait de se faire une idée plus précise de la mesure dans laquelle l'adhésion du Canada au Groupe de la Banque mondiale produit les résultats escomptés.

12.42 Le gouvernement devrait énoncer clairement et complètement les objectifs de la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes. Le ministère des Finances devrait définir, surveiller et analyser un certain nombre d'indicateurs lui permettant d'évaluer dans quelle mesure le Canada atteint les objectifs qu'il vise par sa participation à ces institutions et il devrait faire rapport à ce sujet.

Commentaire du ministère : Nous convenons que les objectifs de la participation du Canada à ces institutions doivent être clairement exposés. Les rapports annuels présentés au Parlement fournissent un aperçu global des activités des institutions, ainsi que des objectifs et avantages de la participation du Canada. De plus, des rapports exhaustifs sont présentés au Parlement de façon plus directe grâce aux comparutions fréquentes devant des comités parlementaires, y compris le Sous-comité de la Chambre des communes sur les institutions financières internationales (IFI), récemment établi. Il convient de souligner qu'il est difficile d'évaluer en termes inéquivoques et quantifiables les avantages de la participation à ces institutions en fonction des objectifs que s'est fixés le Canada. Les IFI diffèrent beaucoup des banques commerciales; elles s'adonnent à une gamme d'activités qui offrent des avantages pour le Canada et la communauté internationale qu'il n'est pas facile de mesurer avec précision. Ce serait ignorer ces avantages importants que de porter, en fonction de critères commerciaux limités, des jugements sur la valeur que le Canada reçoit en contrepartie de sa participation.

Il y a lieu de faire le point sur les objectifs, l'ampleur et les résultats de la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes
12.43 Plusieurs facteurs militent en faveur d'un examen des objectifs, de l'étendue et des résultats de la participation du Canada au FMI, au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

12.44 Tout d'abord, comme nous l'avons déjà souligné, les rôles, les activités et les mécanismes de financement des institutions ont évolué avec le temps (voir les paragraphes 12.13 à 12.19). Un examen complet du mandat de ces institutions, mis en regard de leurs activités (de préférence en collaboration avec les autres membres intéressés du G-7, à des fins d'économie et d'efficacité), permettrait peut-être d'améliorer grandement la qualité de la reddition de comptes.

12.45 Deuxièmement, dans le cadre de son évaluation continue en vue de répertorier les secteurs d'amélioration possible, la Banque mondiale s'est dite préoccupée du fait que le taux de réussite des projets qu'elle finance ait baissé. La proportion des projets qui connaissent des problèmes et des projets rapportés par le Département de l'évaluation rétrospective des opérations de la Banque mondiale comme n'ayant pas été couronnés de succès augmente depuis 1979. Les retombées sociales, culturelles et écologiques négatives de certains de ces projets sont également devenues un sujet de préoccupation. Par ailleurs, une étude de l'Institut Nord-Sud a abouti à la conclusion que le système d'aide multilatérale avait très bien marché pour le Canada, car il avait bien servi les multiples intérêts Canadiens et globaux. Cependant, l'étude et les examens subséquents de l'Institut ont relevé des questions d'aide multilatérale qui exigent qu'on leur accorde de l'attention. Il est difficile de se faire une idée juste sans des rapports réguliers sur les résultats, ou sans une évaluation indépendante ou publique de la mesure dans laquelle les objectifs du Canada sont atteints au moyen des activités du groupe de la Banque mondiale.

12.46 Troisièmement, un certain nombre de facteurs internationaux vont dans le sens d'accorder des ressources supplémentaires à ces institutions. Les problèmes de développement, de balance des paiements et de dettes persistent dans les pays du tiers monde. Il faut des ressources importantes pour remédier à ces problèmes et pour aider à la reconstruction des économies de l'Europe de l'Est. Tout cela a entraîné une augmentation de la demande de financement, qui ne semble aucunement vouloir diminuer. Cela veut dire que les pressions sur le Canada et sur les autres membres créanciers en vue d'augmenter leur soutien financier vont s'accentuer, et cela au moment même où, au pays, des pressions budgétaires militent en faveur de la réduction de l'aide au développement et des autres dépenses. Le gouvernement fédéral, lui-même aux prises avec des compressions budgétaires, doit comparer les résultats escomptés et les résultats obtenus grâce à la participation du Canada à ces institutions multilatérales et à d'autres organismes semblables à la lumière des engagements financiers pris envers ces institutions et des autres demandes faites à l'endroit des deniers publics.

12.47 Quatrièmement, des évaluations fourniraient au gouvernement des renseignements utiles pour déterminer la meilleure façon de répartir les fonds limités de l'aide publique au développement entre l'aide multilatérale et l'aide bilatérale, ainsi qu'entre les banques de développement mondiales et les banques de développement régionales. On pourrait s'attendre à ce que ces ressources soient affectées, du moins en partie, là où elles servent le mieux à atteindre les objectifs du Canada. Lorsqu'il a élaboré la position du Canada en vue de la négociation de la dixième augmentation des ressources de l'Association internationale de développement, le ministère des Finances a demandé que soient fournis, de façon plus régulière et systématique, des renseignements plus transparents sur la mesure dans laquelle les efforts déployés par les pays bénéficiaires pour lutter contre la pauvreté sont pris en considération dans l'affectation des ressources de l'Association. Des principes analogues pourraient être appliqués à la répartition des fonds du programme canadien d'aide publique au développement.

12.48 Cinquièmement, les leçons tirées des examens périodiques pourraient fournir des indications sur la façon de rendre plus efficace la participation du Canada. Ces examens pourraient également permettre de trouver des réponses à des questions pertinentes telles que celles qui sont posées dans la pièce 12.5 , et à d'autres encore, soulevées par le ministère des Finances lors de la préparation des négociations sur la reconstitution des ressources dans le paragraphe précédent.

12.49 Sixièmement, à notre connaissance, le gouvernement fédéral n'a jamais fait le moindre examen global de la participation du Canada aux institutions concernées depuis que celui-ci y est entré, en 1945. De temps à autre, le ministère des Finances a effectué des études poussées mais partielles, généralement lorsque les pays membres se voyaient demandés d'approuver une reconstitution du capital ou une augmentation des quotes-parts. En 1985, le Canada a également participé à une étude du groupe des dix (G-10) sur le fonctionnement du système monétaire international. Par ailleurs, le ministère examine les questions qui intéressent le Canada et fait des commentaires à ce sujet afin de promouvoir la poursuite des objectifs du Canada par ces institutions. Cependant, ces examens n'ont pas permis de fournir au Parlement et au public suffisamment de renseignements sur la mesure dans laquelle les objectifs du Canada se concrétisent.

Il faut recueillir des renseignements sur les résultats et les avantages de la participation du Canada et faire rapport à cet égard
12.50 Le Département de l'évaluation rétrospective des opérations (DERO) de la Banque mondiale produit tous les ans des rapports sur les résultats d'évaluation, par secteur et par pays. Ces rapports servent de base à l'évaluation du taux de réussite des efforts de développement multilatéral déployés dans divers pays et au relevé des points forts et des faiblesses des projets réalisés.

12.51 Le ministère des Finances prend connaissance des rapports de la Banque mondiale et, dans le passé, il a fondé certains de ses arguments relatifs aux politiques opérationnelles de la Banque sur les résultats d'évaluation du DERO. Il a également fait des recommandations visant à améliorer la diffusion, parmi les différents départements de la Banque, des résultats dont le DERO fait état. Les Finances ont fait remarquer que, lorsqu'il s'agit d'objectifs précis (réduction de la pauvreté, rôle des femmes dans le processus de développement, environnement), la Banque a tendance à se concentrer sur la quantité (le volume des prêts) plutôt que sur la qualité (les résultats), et ont suggéré qu'une étude plus approfondie des résultats réels des programmes de la Banque serait plus utile. Nous sommes d'accord avec le ministère et nous l'encourageons à poursuivre en ce sens et à travailler avec les autres membres de la Banque mondiale à la formulation de meilleurs indicateurs de résultats. Entre temps, le ministère pourrait utiliser les rapports de la Banque mondiale pour diffuser et fournir au Parlement de l'information sur l'atteinte des objectifs et priorités du Canada en matière de développement social et économique des pays les plus démunis.

12.52 Nous reconnaissons que l'évaluation de la rentabilité de l'aide au développement fournie aux pays en voie de développement dans le cadre d'une action multilatérale est un processus complexe. D'autres pays qui ont des objectifs analogues à ceux du Canada en matière de développement (l'Australie, les États-Unis, le Royaume-Uni et les pays nordiques) se sont montrés intéressés à évaluer les résultats de leur participation aux institutions multilatérales. Une étude ou une évaluation mixte, par le Canada et d'autres membres intéressés, en particulier les pays du G-7, aurait plus de poids et serait plus économique et efficiente pour toutes les parties concernées.

12.53 Il n'y a pas, en soi, de formule idéale pour évaluer les avantages de cette forme de participation. Des évaluations occasionnelles, telles que celle que l'Australie a effectuée cette année, peuvent être appropriées dans certains cas. Il serait également possible d'évaluer dans quelle mesure les processus de vérification et d'évaluation propres à ces institutions sont à même de fournir des renseignements adéquats en matière de reddition de comptes et d'optimisation des ressources. Un suivi continu d'un choix d'indicateurs des résultats serait encore une autre façon d'évaluer le rendement. Selon une autre formule, le Parlement pourrait procéder à des examens occasionnels. Pendant le déroulement de notre vérification, un sous-comité du Comité permanent des finances de la Chambre des communes a été créé pour étudier la gestion et les politiques du FMI, du Groupe de la Banque mondiale et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Ce genre d'examen parlementaire favorise le débat public et, pour cette raison, pourrait s'avérer efficace.

12.54 Étant donné l'importance d'évaluer périodiquement la participation du Canada à ces institutions, il y aurait peut-être lieu d'envisager l'adoption de dispositions législatives exigeant que ces évaluations soient effectuées, par exemple, au moins tous les dix ans. Cela pourrait donner l'élan nécessaire pour évaluer la pertinence de la participation du Canada, avec comme conséquence que cette participation pourrait être envisagée davantage en fonction des résultats. Cela permettrait aussi d'attirer l'attention sur l'intérêt que ces institutions présentent pour le Canada.

12.55 Le ministère des Finances devrait se pencher sur la faisabilité d'une évaluation conjointe, par le Canada et d'autres membres intéressés, de la rentabilité de la participation aux institutions de Bretton Woods et aux autres institutions connexes, en tant que moyen de promouvoir les objectifs nationaux. Les leçons tirées de ces évaluations pourraient être utilisées pour améliorer le fonctionnement des institutions, en particulier en ce qui a trait aux objectifs des pays qui fournissent des devises fortes et l'appui financier nécessaire aux emprunts sur le marché des capitaux.

12.56 Le ministère des Finances devrait également envisager de combiner sa capacité d'évaluation avec celle des autres ministères et organismes concernés (tels que l'ACDI) pour étudier l'ampleur de la participation globale du Canada aux institutions financières multilatérales.

Commentaire du ministère : Nous convenons que tous les efforts possibles devraient être déployés pour examiner les résultats et les avantages de la participation du Canada. À cet égard, nous tenons à souligner que le ministère évalue déjà de manière exhaustive l'efficacité des institutions à des étapes importantes de l'évolution de leurs activités afin d'assurer la promotion des objectifs nationaux. Dans le cadre de cette évaluation, le Canada collabore étroitement avec d'autres pays, non seulement au sein du Conseil d'administration, mais au sein de groupes plus petits de pays membres intéressés. Des évaluations substantielles de l'ampleur de la participation globale du Canada aux institutions financières internationales sont réalisées de concert avec d'autres ministères et organismes intéressés lors des reconstitutions et des augmentations du capital. De plus, le ministère effectue une analyse quotidienne des politiques et des activités des institutions, et cherche à influencer ces politiques et ces activités de manière à répondre aux objectifs du Canada.

La gestion du risque financier

La demande d'aide financière pour les institutions de Bretton Woods et les institutions connexes ne cesse d'augmenter
12.57 Nous avons examiné les systèmes et pratiques employés par les Finances pour gérer le risque financier lié à la participation du Canada au FMI, au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

12.58 Nous nous attendions à ce que les engagements financiers du Canada envers ces institutions soient clairement définis et suivis, et à ce que les répercussions financières des déficits et des besoins financiers futurs soient régulièrement évaluées.

12.59 On demande sans cesse aux pays membres d'augmenter substantiellement leur souscription de capital (d'apport et exigible). Le neuvième examen général du FMI prévoit une augmentation de 47 p. 100 de la quote-part du Canada. La dixième augmentation des ressources de l'Association internationale de développement est actuellement en cours de négociation. De même, des pressions se font sentir en vue de l'injection de capitaux importants pour aider les anciens pays communistes de l'Europe de l'Est.

12.60 Pour répondre à l'augmentation de la demande, ces institutions pourraient un jour avoir à reconstituer leurs ressources dans une proportion considérable. Le Canada et les autres membres créanciers pourraient se trouver dans l'obligation, pour procéder à ces reconstitutions de capital, d'envisager de détourner des ressources destinées à d'autres usages ou de recourir à l'impôt ou à l'emprunt. Le ministère des Finances suit la situation, fait l'estimation des besoins futurs en ressources et évalue les répercussions financières. Ainsi, à l'occasion de la dixième reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement (organisme du Groupe de la Banque mondiale qui accorde des prêts assortis de conditions libérales), les Finances, avec la participation de l'ACDI et des Affaires extérieures, ont examiné les demandes de reconstitution des ressources et ont évalué le besoin de reconstitution en fonction du plan financier du Canada, et détermineront le montant à recommander au ministre. Un processus analogue est suivi dans le cas des augmentations générales du capital de la Banque mondiale et des quotes-parts au FMI.

Le risque financier lié à notre participation est considéré comme étant faible
12.61 Selon les représentants des Finances, le risque lié aux engagements financiers du Canada envers le Fonds monétaire international et le Groupe de la Banque mondiale est faible.

12.62 Quelques pays lourdement endettés envers le FMI ne paient ni l'intérêt, ni le principal. Le FMI lui-même n'a jamais radié ces créances, mais les nations créancières voient baisser le taux de rendement des placements nets qu'elles ont faits dans le Fonds, alors que les autres nations emprunteuses paient des taux d'intérêt plus élevés pour éponger les comptes en souffrance. Cette façon de répartir les charges, ajoutée à d'autres pratiques de gestion et de contrôle financiers, réduit au minimum le risque de voir s'éroder la valeur de la souscription du Canada, sa «position de réserve», au FMI. Toute nation a le droit de retirer à volonté sa position de réserve pour les besoins de sa balance des paiements.

12.63 Le risque couru par le Canada d'avoir à fournir des ressources financières supplémentaires importantes au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement réside essentiellement dans le fait qu'il pourrait se voir demander de verser le capital exigible, ou la partie de sa souscription sujette à appel (5 milliards de dollars au 31 mars 1991), afin que ces institutions puissent honorer les obligations qu'elles ont contractées envers ceux qui ont fait des placements dans leurs valeurs mobilières par l'intermédiaire des marchés financiers internationaux. En fait, le Canada et les autres membres créanciers font office de garants des valeurs émises par les institutions à des investisseurs privés.

12.64 Depuis la création de la Banque mondiale, il y a 48 ans, le capital exigible n'a jamais été appelé au versement. On a expliqué la chose en partie par le statut de créancier privilégié dont jouit la Banque et par les saines politiques financières et le bon rendement de l'institution. Les pays en arrérages ont souvent été soutenus au moyen de programmes bilatéraux et multilatéraux qui leur ont permis de servir leurs dettes auprès de la Banque mondiale et d'autres institutions internationales. Selon les statuts de la Banque, le montant total des garanties, des participations à des prêts et des prêts directs consentis par elle ne peut dépasser 100 p. 100 du montant du capital souscrit, des réserves et de l'excédent. À la fin de l'exercice 1991, le montant total à percevoir représentait 60 p. 100 de cette somme.

Le niveau des provisions pour pertes sur prêts de la Banque mondiale doit continuer d'être réévalué, tout particulièrement du point de vue de l'actionnaire
12.65 Pour déterminer le risque associé aux engagements financiers du Canada auprès de la Banque mondiale, les Finances se basent sur les rapports du comptable indépendant de la Banque qui fait office de vérificateur, elles surveillent la viabilité financière de la Banque, et elles examinent ses politiques financières, sur lesquelles elles influent d'ailleurs par l'intermédiaire de l'administrateur canadien.

12.66 Les comptables indépendants n'ont exprimé aucune réserve dans leur plus récent rapport sur les états financiers de 1990 et de 1991 de la Banque. Les agences d'évaluation financière ont attribué à la Banque mondiale leur plus haute cote de solvabilité (triple A) : c'est là le résultat de l'appui fourni sous forme de capital exigible par les pays membres qui disposent d'une devise forte. Le ministère des Finances suit l'évolution de ces cotes de solvabilité.

12.67 De bons niveaux de réserves et de provisions pour pertes sur prêts sont un retranchement nécessaire contre l'éventuel appel au versement du capital exigible de la Banque pour honorer les obligations afférentes aux emprunts ou aux garanties. En date du 30 juin 1991, le ratio de la réserve par rapport aux prêts était de 11,2 p. 100, et le taux de la provision pour pertes sur prêts était de 2,5 p. 100.

12.68 Le ministère tente également d'influer sur les politiques financières de la Banque mondiale par l'intermédiaire de l'administrateur canadien siégeant au conseil d'administration. Lors de leur examen du document publié par la Banque, en 1991, relativement à ses provisions pour pertes sur prêts, les Finances n'ont pu déterminer si le taux de 2,5 p. 100 était suffisant et ont demandé davantage de détails sur les raisons qui avaient présidé à son choix.

12.69 Le Canada et d'autres membres créanciers ont émis l'hypothèse que le taux actuel de provisionnement pour pertes sur prêts n'est peut-être pas assez élevé étant donné la précarité des perspectives économiques mondiales, le niveau élevé de l'indicateur de risque sur portefeuille et d'autres facteurs encore, et ils ont suggéré que ce taux soit revu.

12.70 Le taux de provision pour pertes sur prêts de 2,5 p. 100 de la Banque mondiale semble bas eu égard à la situation au 30 juin 1991, alors que la direction de la Banque a déterminé que 37 p. 100 du portefeuille de prêts étaient considérés comme présentant un risque élevé et 3 p. 100 comme n'accumulant pas d'intérêt. Les prêts de cinq pays constituaient 45,1 p. 100 du portefeuille, et les pays dont les prêts avaient été restructurés représentaient 49,4 p. 100 du portefeuille.

12.71 Le risque financier auquel le Canada est exposé relativement à la Banque mondiale étant étroitement lié au niveau de provisionnement, le ministère des Finances devrait envisager de demander la réalisation d'une évaluation, en collaboration avec ses partenaires du G-7, du taux de provision pour pertes sur prêts et de la méthode utilisée pour l'établir, afin que les provisions accumulées pour pertes sur prêts soient adéquates du point de vue des actionnaires, si bien que le risque d'un appel au versement du capital exigible reste faible.

Commentaire du ministère : Nous convenons que l'intégrité financière de la Banque mondiale est importante si nous voulons que les investissements que nous avons réalisés dans la Banque demeurent solides et que la Banque continue d'être une institution efficace de développement. À cet égard, les niveaux des réserves et des provisions pour pertes sur prêts revêtent une grande importance. Le Conseil d'administration approuve ces niveaux à la fin de chaque exercice. De plus, ils sont discutés par le Conseil à intervalles réguliers pendant l'année; à ces moments-là, les administrateurs peuvent décider d'accroître ou de diminuer le taux d'accumulation des provisions pour pertes sur prêts. Les administrateurs des pays du G-10 se réunissent d'habitude pendant la semaine qui précède les discussions du Conseil au sujet des niveaux des réserves et des provisions pour pertes sur prêts afin d'évaluer si ces niveaux sont suffisants.

Procédures de fonctionnement - Traitement de l'information et coordination avec les autres entités

12.72 Nous avons examiné les procédures et les systèmes mis en oeuvre par les Finances pour recueillir des renseignements pertinents sur les questions d'actualité intéressant le FMI et la Banque mondiale, par exemple les renseignements contenus dans des documents d'orientation et des documents relatifs aux prêts, et pour communiquer son point de vue aux administrateurs.

12.73 Nous avons également examiné les pratiques et les systèmes mis en oeuvre par les Finances pour coordonner les activités avec les ministères et organismes qui participent à la réalisation du programme d'aide publique au développement de façon à ce que la position adoptée par le Canada soit uniforme.

12.74 Il est raisonnable de s'attendre à ce que le ministère des Finances, en tant qu'organisme chargé au premier chef de la gestion de la participation du Canada à ces institutions, recueille tous les renseignements pertinents sur les questions touchant le FMI et la Banque mondiale, et fasse en sorte que les administrateurs soient informés de l'opinion de toutes les parties intéressées avant que les conseils d'administration ne discutent de ces questions. Il est également raisonnable d'attendre de lui qu'il coordonne le travail de tous les ministères et organismes concernés, de façon à promouvoir une approche suivie dans la poursuite des objectifs du Canada.

12.75 Nous avons constaté que le ministère rassemble effectivement des renseignements pertinents relativement aux questions intéressant la Banque mondiale, qu'il recueille l'opinion des toutes les parties intéressées et qu'il informe les administrateurs, en temps opportun, de l'opinion et de la position du Canada.

12.76 Les responsabilités de chaque ministère ou organisme sont circonscrites et tous les intéressés les comprennent. Des agents des Finances, de l'ACDI et des Affaires extérieures ont récemment décrit les rôles et responsabilités de leurs organismes respectifs, avec documents à l'appui, au Sous-comité des institutions financières internationales du Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Ils ont expliqué comment les trois organismes interagissent avec la Banque mondiale et les uns avec les autres. Les Finances surveillent les activités des institutions pour déterminer si elles continuent d'être bien gérées et financées. Le rôle principal de l'ACDI est de fournir des données sur les questions touchant le développement, et celui des Affaires extérieures d'en fournir sur les questions touchant la politique extérieure. Le ministère des Affaires extérieures tente également de faire profiter les entreprises canadiennes des retombées des activités des institutions.

12.77 Les mécanismes de coordination des activités des Finances, de l'ACDI et des Affaires extérieures sont dans une grande mesure officieux. Il existe un comité interministériel, mais les Finances nous ont informés qu'il n'a pas de mandat écrit et qu'on n'établit pas de procès-verbaux des réunions. Les autres moyens de coordination sont les réunions et les rencontres, les notes de service et les appels téléphoniques.

12.78 Dans une grande mesure, ces méthodes officieuses font appel à la mémoire des individus plutôt qu'à celle des organismes, et c'est la raison pour laquelle elles ne peuvent garantir la cohérence et l'uniformité des approches et des positions adoptées par les organismes sur les diverses questions qui se posent, en particulier lorsqu'il y a changement de personnel. Il y a lieu d'envisager la rédaction de protocoles d'entente traitant des rôles et responsabilités des ministères et organismes concernés. Cela permettrait également d'éviter les redondances.

Reddition de comptes - L'information transmise au Parlement

L'information transmise au Parlement doit être améliorée
12.79 Nous avons examiné les renseignements fournis au Parlement dans les documents publics sur la nature, les coûts (y compris le risque financier) et les avantages de la participation du Canada au FMI, au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Nous avions pour but de déterminer si cette information était suffisante et compréhensible dans un contexte de reddition de comptes.

12.80 Nous nous attendions à ce que le Parlement reçoive des renseignements pertinents, complets, précis et compréhensibles sur les coûts, les mécanismes et les résultats liés à la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes ainsi qu'à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, de manière à ce que les députés puissent examiner et approuver les propositions gouvernementales concernant la participation du Canada à ces institutions.

12.81 Le Parlement est tenu au courant des augmentations prévues dans les quotes-parts au FMI et les souscriptions de capital au Groupe de la Banque mondiale. Les augmentations de quotes-parts exigent une modification législative, et donc une autorisation du Parlement. La loi autorise le ministère des Finances à fournir une aide financière aux institutions de la Banque mondiale, jusqu'à concurrence du montant précisé dans un crédit voté par le Parlement. Le ministère tient le Parlement au courant, dans son rapport annuel sur les activités menées aux termes de la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes , des prévisions relatives aux futures souscriptions de capitaux à ces institutions.

12.82 Lorsqu'un montant est fixé, il est inclus dans un projet de loi de crédits qui sera soumis au Parlement. Cependant, nous sommes préoccupés par le fait que le libellé de la Loi de crédits, en ce qui a trait à l'augmentation générale de 1988 du capital de la Banque mondiale, n'indique pas clairement que les versements à la Banque mondiale sont destinés à des achats d'actions et ne représentent que le montant versé, soit environ 3 p. 100 du total des souscriptions de capital pour ces actions. L'existence du capital exigible, qui représente environ 97 p. 100 du total des souscriptions, n'est aucunement mentionnée. En tant que souscripteur d'actions, le Canada est engagé quant à la partie exigible. Nous craignons donc que le Parlement ne soit pas pleinement informé du fait qu'il approuve un engagement financier potentiel lorsqu'il approuve les versements à la Banque mondiale. Depuis 1988, le capital exigible relativement aux actions achetées par le Canada s'élève à près de 1,5 milliard de dollars.

12.83 Le libellé de la Loi de crédits, relativement aux versements à la Banque mondiale, devrait clairement préciser que les versements visent l'achat d'actions, et devrait également indiquer le montant de l'engagement financier relatif à la partie de la souscription constituée de capital exigible.

Commentaire du ministère : Même si le Parlement est mis au courant que les paiements à la Banque mondiale représentent la partie versée des souscriptions au capital-actions par notre rapport annuel et nos comparutions devant divers comités de la Chambre des communes, nous fournirons à l'avenir plus de détails dans le libellé des crédits de la Loi de crédits.

12.84 Le ministère des Finances et les administrateurs canadiens des institutions ont amélioré la quantité et la qualité des renseignements qu'ils fournissent dans le rapport annuel sur les activités menées aux termes de la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes , ainsi que dans le rapport annuel sur les activités menées aux termes de la Loi sur l'accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement . Ces rapports contiennent de nombreux renseignements sur l'objet, le financement, les activités et le cadre d'activité des institutions. De plus, des agents du ministère (mais non les administrateurs canadiens des institutions) sont souvent appelés à témoigner lors d'audiences des comités parlementaires.

12.85 Cependant, tous ces renseignements ne sont pas suffisants. Ces rapports et la Partie III du Budget des dépenses des Finances ne font pas état d'objectifs mesurables, de cibles et des résultats obtenus grâce à la participation du Canada. Les renseignements relatifs aux engagements financiers découlant de la participation du Canada sont diffus et parfois obscurs. Par exemple, dans le rapport annuel sur la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes , les renseignements relatifs aux engagements financiers sont dispersés dans tout le document, ce qui ne facilite guère la tâche à qui veut en saisir l'ensemble. De plus, le rapport n'indique pas clairement combien d'argent a été engagé et combien a été dépensé au titre des souscriptions à l'Association internationale de développement. Il est donc difficile pour le Parlement d'avoir une idée de l'ensemble de l'engagement financier associé à la participation du Canada à ces institutions.

12.86 À notre avis, les renseignements fournis par les Finances au Parlement et au public sur la participation du Canada aux institutions de Bretton Woods et aux institutions connexes se sont améliorés au cours des dernières années. D'autres améliorations sont encore nécessaires. Il faut des renseignements plus complets, plus compréhensibles et utilisables sur les objectifs et les résultats de la participation du Canada, ainsi que sur les risques financiers qui y sont associés, afin de permettre aux députés et au public en général d'évaluer les coûts et les avantages de la participation du Canada. On devrait également trouver, dans la Partie III du Budget des dépenses des Finances, des renvois aux rapports annuels et aux autres sources d'information sur la participation du Canada.

12.87 Au fur et à mesure qu'il continuera d'améliorer la qualité des renseignements qu'il fournit au Parlement sur la participation du Canada au FMI, au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, le ministère des Finances devrait aussi fournir des renseignements plus complets et plus compréhensibles sur les objectifs et les résultats de cette participation et sur les engagements financiers qui en résultent.

Commentaire du ministère : La participation financière du Canada au FMI, au Groupe de la Banque mondiale et à la Banque européenne est déjà présentée au Parlement dans nos rapports annuels, de même que les objectifs que vise le Canada dans le cadre de ces institutions. Nous examinerons cependant le contenu et la présentation de ces documents de manière à nous assurer qu'ils soient les plus utiles possibles pour les parlementaires.

Le traitement comptable des effets à payer à l'Association internationale de développement doit être revu
12.88 Les effets à payer à l'Association internationale de développement (IDA), qui s'élevaient à 885 millions de dollars le 31 mars 1991, sont présentés à l'état de l'actif et du passif du gouvernement à titre de réduction de l'investissement du gouvernement dans l'IDA. L'investissement net dans l'IDA, soit le montant de l'investissement diminué du montant des effets à payer, figure dans les dépenses budgétaires et dans le déficit des exercices courant et antérieurs. Depuis le 1er avril 1986, l'encaissement des effets (152 millions de dollars en 1990-1991) est effectué en vertu d'une autorisation budgétaire, tandis que l'émission d'effets en faveur de l'IDA (pour une valeur de 276 millions de dollars en 1990-1991) continue de se faire en vertu d'une autorisation non budgétaire.

12.89 À notre avis, les effets émis représentent une obligation légale de faire des versements ultérieurs. Ils ne diffèrent pas sensiblement des comptes créditeurs que le gouvernement comptabilise et déclare comme éléments de passif à la clôture de l'exercice. Par conséquent, nous estimons que les effets à payer à l'IDA devraient figurer au bilan du gouvernement à titre de passif et ne plus être portés en diminution de l'investissement dans l'IDA. Aussi, les engagements pris envers l'IDA par l'émission d'effets devraient être portés aux dépenses budgétaires. S'ils y figuraient à la date d'émission plutôt qu'à la date d'encaissement des effets, leurs répercussions sur le déficit se feraient sentir plus tôt.

12.90 Le gouvernement devrait réexaminer, et réviser s'il y a lieu, sa façon de comptabiliser et de déclarer les effets à payer à l'Association internationale de développement.

Commentaire du ministère : Le ministère des Finances a consulté le Bureau du contrôleur général (BCG) et nous convenons que le traitement comptable actuellement utilisé est approprié. La raison la plus évidente est que les effets à payer sont des engagements envers l'IDA, et non des éléments de passif, et qu'en conséquence ils ne devraient pas être inclus dans les éléments de passif du gouvernement. On s'entend pour effectuer des paiements sur une période future échelonnée qui, à son tour, sert à établir les calendriers des projets. En conséquence, les coûts, ainsi que les avantages, de nos contributions à l'IDA se matérialisent lorsque les effets sont encaissés et non lorsqu'ils sont émis. Cependant, de manière à accroître la précision de la présentation de l'IDA dans les Comptes publics, nous examinerons la présentation actuelle du bilan avec le BCG.