Le ministère de la Défense nationale

Grands projets d'immobilisations - Initiatives de développement industriel

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Vérificateur général adjoint : David Rattray
Vérificateur responsable : Tom Hopwood

Grands projets d'immobilisations
Initiatives de développement industriel

Introduction

16.6 Deux chapitres de notre rapport portent sur les grands projets d'immobilisations relevant du ministère de la Défense nationale. Ce chapitre examine principalement les facteurs externes influant sur ces projets, notamment l'incidence, sur le plan de l'optimisation des ressources, des initiatives de développement industriel découlant des projets du ministère en tout début de projet.

16.7 Le chapitre qui suit met en lumière les processus de lancement et de mise en oeuvre des projets au ministère et porte sur trois domaines particuliers : la gestion de programme, la gestion de projet et les mécanismes de rétroaction.

16.8 Pour jouer son rôle et mener à bien les tâches qui lui sont confiées, le ministère doit veiller au bon fonctionnement d'une grande variété de systèmes d'armements complexes, notamment de nombreux véhicules, navires et avions de tous genres. Bien que les fonds qui lui sont consentis pour l'achat de l'équipement nécessaire à l'exercice de ses fonctions soient limités, de tous les ministères, c'est la Défense nationale qui a le plus vaste programme d'immobilisations.

16.9 Au moment de notre vérification, le Programme des services de défense, un plan échelonné sur quinze ans, comptait environ 550 grands projets d'immobilisations, dont le coût total s'élèverait à 63 milliards en dollars constants de 1990. Des initiatives de développement industriel sont généralement rattachées aux grands projets d'immobilisations d'un coût supérieur à 100 millions, catégorie désignée du nom de grands projets de l'État. Environ 70 de ces projets relèvent du Programme des services de défense. Le ministère est responsable de la majorité des grands projets de l'État susceptibles de donner lieu à des initiatives de développement industriel. Si les tendances actuelles se maintiennent, la valeur de ces initiatives découlant des projets de défense pourrait s'élever à 30 milliards.

16.10 Tout grand projet d'immobilisations comporte quatre étapes, soit le lancement du projet, sa mise en oeuvre, l'entrée en service et la cessation. La plupart des plus grands projets s'échelonnent sur une période dépassant habituellement 20 à 30 ans. L'optimisation des ressources est souvent une question critique à l'étape du lancement du projet. C'est à cette étape que l'on décide du bien-fondé du projet, que l'on élabore les stratégies d'approvisionnement et de développement industriel, que l'on invite les entrepreneurs à présenter des offres, que l'on adjuge les marchés et que l'on met en place les processus de gestion du projet. Les erreurs commises à ce stade risquent fort de compromettre la bonne marche des activités pendant la durée du projet.

16.11 La marche à suivre pour veiller à l'application de la politique gouvernementale en matière d'approvisionnement engage plusieurs ministères. Essentiellement, le ministère de la Défense nationale établit le bien-fondé du projet, précise les exigences techniques et opérationnelles et fixe les priorités en ce qui a trait au financement et au calendrier d'exécution. Le Secrétariat du Conseil du Trésor dicte les politiques générales et les lignes directrices se rapportant aux divers aspects de l'approvisionnement. Le ministère des Approvisionnements et Services contribue à l'élaboration d'une stratégie en matière d'approvisionnement et d'adjudication des marchés et se charge de la gestion du processus d'adjudication des marchés. Enfin, le ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie, l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, le ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest et le Bureau fédéral de développement régional (Québec), sont responsables des initiatives de développement industriel et régional découlant des grands projets d'immobilisations.

16.12 Dès qu'il est déterminé qu'un grand projet d'immobilisation répond aux exigences opérationnelles du ministère et fera partie du Programme des services de défense, les ministères précités commencent à influer sur la stratégie d'approvisionnement. Une fois que le projet a suivi les diverses étapes du Système de gestion du Programme de la Défense et que le ministère est prêt à le soumettre à l'approbation du Conseil du Trésor ou du Cabinet, le cas échéant, les ministères participants se sont généralement déjà entendus sur la stratégie d'approvisionnement et les processus d'appels d'offres et d'adjudication des marchés. De plus, les initiatives de développement industriel ont déjà fortement influencé la stratégie d'approvisionnement et ont aussi probablement eu une incidence sur le coût global et le calendrier d'exécution du projet.

Étendue de la vérification

16.13 Nous avons examiné les six grands projets de l'État relevant du ministère de la Défense nationale qui étaient en cours au début de notre vérification et dans le cadre desquels des marchés avaient été conclus et des initiatives de développement industriel étaient prévues, en tout ou en partie, en vertu de la politique gouvernementale en vigueur. Ces projets représentent une dépense totale de 11,4 milliards de dollars (dollars de l'année budgétaire); pour la ventilation des coûts, voir la pièce 16.1 . En plus du marché principal, le coût total du projet couvre la gestion du projet par le gouvernement, les pièces de rechange, les installations et les frais de formation. Les initiatives de développement industriel ne découlent normalement que du marché principal. Comme l'illustre la pièce 16.1 , la valeur estimée des initiatives de développement industriel liées à ces grands projets s'élève à 6 milliards, soit 85 p. 100 du coût total des marchés principaux.

16.14 Dans l'ensemble, notre vérification portait principalement sur le degré d'optimisation des ressources en matière d'approvisionnement. Dans cette partie de notre vérification, nous avons étudié la démarche adoptée par les ministères et les organismes fédéraux pour appliquer la politique gouvernementale relative aux initiatives de développement industriel découlant des grands projets d'immobilisations du ministère. Pour chacun des six projets, nous avons examiné la stratégie d'approvisionnement, les initiatives de développement industriel ainsi que les processus d'appels d'offres et d'adjudication des marchés relevant du ministère. Nous n'avons pas vérifié les programmes de développement industriel et régional d'autres ministères, mais nous nous sommes concentrés sur les effets des initiatives de développement industriel sur les projets de la Défense. Nous avons analysé les retombées industrielles escomptées ou obtenues par rapport aux coûts. Nous avons aussi rencontré en entrevue les présidents-directeurs généraux et d'autres membres de la haute direction de 28 entreprises canadiennes oeuvrant dans le secteur de la défense afin de connaître leur opinion sur le déroulement de ces initiatives.

Vérifications antérieures

16.15 Par trois fois déjà au cours des douze dernières années, les grands projets d'immobilisations de la Défense ont fait l'objet d'une vérification intégrée. En 1980, nous avons procédé à une vérification d'envergure gouvernementale de la gestion du matériel, y compris dans le cadre de certains projets du ministère. En 1984, nous nous sommes penchés sur sept grands projets d'immobilisations en cours au ministère, plus particulièrement à l'étape du lancement et à celle de la mise en oeuvre. Nous avons aussi examiné la gestion des compensations industrielles offertes dans le marché des chasseurs CF-18.

16.16 En 1984, dans notre rapport sur les initiatives de développement industriel, nous avons signalé le risque de chevauchement au niveau des rôles et des responsabilités des divers ministères et l'absence d'objectifs, de politiques et de plans précis qui auraient normalement dû accompagner la gestion des compensations industrielles. Nous avons aussi remarqué que les objectifs de nature non militaire, y compris la question des retombées industrielles, venaient compliquer et limiter les projets d'équipement du ministère. L'année suivante, le Comité permanent des comptes publics a recommandé qu'on consigne les objectifs non militaires dans la Partie III du Budget des dépenses, qu'on veille de près à leur réalisation et qu'on en fasse rapport. En 1987, nous avons souligné que l'on avait appliqué cette dernière recommandation, mais qu'aucun rapport n'était présenté au Parlement sur les coûts liés à la réalisation des objectifs en matière de retombées industrielles.

16.17 Dans notre Rapport de 1987, nous avons signalé la nécessité de définir les buts et objectifs de la politique d'achat au Canada et de préciser la prime à verser en s'approvisionnant auprès de fournisseurs canadiens au lieu de fournisseurs étrangers. Les préoccupations que soulevaient chez nous les objectifs non militaires allaient au-delà de la simple nécessité de les définir et d'en faire rapport. Elles s'étendaient à leur prix, à leurs répercussions sur les objectifs des projets et à leur application systématique dans le processus d'adjudication des marchés. Nous avons remarqué que, dans une large mesure, ces objectifs non militaires servaient davantage à satisfaire les visées d'autres ministères, comme le ministère de l'Expansion industrielle régionale, mais que leurs coûts étaient imputés au budget du ministère. Nous recommandions alors que, dans la mesure du possible, l'on fasse état des coûts directs et indirects associés à la réalisation d'objectifs non militaires et d'approvisionnement stratégique dans la Partie III du Budget des dépenses.

16.18 En 1987, nous avons aussi remarqué que quatre des marchés examinés avaient été adjugés à un fournisseur unique canadien, de sorte que l'on avait contourné le processus d'appels d'offres et le règlement spécifique du Conseil du Trésor en la matière. Nous avons demandé à voir les analyses qui avaient mené à la sélection d'un fournisseur unique, mais l'information que nous avons obtenue ne contenait aucune analyse coûts-avantages, ni aucun examen des aspects économiques et financiers qui auraient dû soutenir une telle décision. Nous recommandions alors que les décisions de contourner le processus d'appels d'offres devaient s'appuyer sur des documents justificatifs complets, lesquels devaient être conservés dans le dossier du marché, où seraient précisés les coûts, les avantages et les risques d'une solution de ce genre, compte tenu des bénéfices escomptés pour le pays.

16.19 Outre ces trois vérifications des projets de la Défense, celle de 1991 auprès du ministère des Approvisionnements et Services passait en revue les pratiques de gestion visant à tirer parti de l'approvisionnement dans le cadre des grands projets de l'État pour favoriser le développement industriel et régional et réaliser d'autres objectifs gouvernementaux connexes. La vérification portait principalement sur les projets autres que ceux de la Défense. Nous recommandions alors au ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie d'évaluer, dans les limites de son mandat, l'efficacité de ses politiques et pratiques visant à stimuler le développement industriel par l'approvisionnement. Ce dernier a favorablement accueilli notre recommandation.

Contexte

Avant 1986, on s'attendait à des mesures compensatoires dans le cadre des marchés de la défense

16.20 Durant la Seconde Guerre mondiale, le Canada est devenu un important producteur de matériel de défense. Cependant, depuis les vingt ou trente dernières années, la production dans ce secteur ne représente qu'un pourcentage relativement faible de la production industrielle du pays. Aujourd'hui, le Canada importe généralement ses grands systèmes de défense des États-Unis tandis que ses exportations liées à la défense consistent principalement en pièces et en sous-systèmes destinés aux systèmes assemblés aux États-Unis.

16.21 Il y a une trentaine d'années, le Canada a conclu avec les États-Unis l'Accord sur le partage de la production de défense et l'Accord sur le partage du développement industriel pour la défense, dont l'objet était en partie d'offrir une compensation à l'industrie canadienne en échange des importants marchés militaires conclus avec les manufacturiers américains. En 1963, les deux pays ont convenu d'amender l'Accord sur le partage de la production de défense pour y inclure une disposition garantissant à long terme un certain équilibre des échanges entre les deux pays.

16.22 Outre les fonds des ministères fédéraux responsables du développement industriel et régional et d'autres formes d'aide fédérale, les fabricants du secteur canadien de la défense reçoivent souvent une aide provinciale et municipale d'une forme ou d'une autre. En 1959, le Canada a créé le Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense (PPIMD), lequel prévoit des contributions remboursables à frais partagés pour promouvoir, entre autres, les activités de recherche et développement dans ce secteur. De 1979 à 1990, les sommes consenties aux fabricants canadiens de matériel de défense dans le cadre de ce programme totalisaient 1,8 milliard de dollars.

16.23 De 1976 à 1986, l'on cherchait en général à obtenir des «mesures compensatoires» (ou, comme on dit maintenant, «un bénéfice indirect») des fournisseurs étrangers dans les grands marchés d'approvisionnement de la défense, même si souvent ces marchés entraînaient également certaines retombées industrielles directes. Une «mesure compensatoire» supposait l'achat de biens et de services d'origine canadienne, un investissement ou un échange de technologie au profit du Canada, non liés au produit acheté comme tel par l'État. L'entrepreneur devait livrer l'équipement spécifié dans le marché au prix convenu et, parallèlement, se procurer au Canada le bien ou le service, ou fournir l'investissement ou l'échange de technologie prévus, dont la valeur estimée, règle générale, égalait ou dépassait le coût total du marché.

16.24 Une étude réalisée à la demande du gouvernement a révélé que, durant cette période, le Canada avait élaboré, pour ces programmes de compensation, des politiques et des processus administratifs beaucoup plus complexes et coûteux que ceux d'autres pays industrialisés comme la Belgique, le Danemark, l'Australie, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la Suède. La politique américaine précise que les fonds fédéraux ne doivent pas servir au financement de mesures compensatoires. Le gouvernement américain considère en outre que certaines mesures compensatoires en matière d'exportations dans le secteur de la défense ne sont pas rentables et faussent les échanges.

16.25 Dans son rapport de 1985, le Groupe de travail ministériel chargé de l'examen des programmes concernant les programmes d'approvisionnement du gouvernement (le Groupe de travail Nielsen) a indiqué qu'aucune partie associée au processus d'approvisionnement ne semblait avoir une idée précise des intentions du gouvernement en matière de retombées industrielles. Selon les membres du Groupe, le problème ne tenait pas tant à l'absence d'objectifs qu'à leur caractère parfois contradictoire et à de nombreux chevauchements, ce qui avait pour résultat d'embrouiller les pistes, aussi bien pour l'administration publique que pour l'industrie. Les auteurs du rapport affirmaient que les attentes du gouvernement étaient en général peu réalistes et mal orientées et qu'on avait même parfois grandement exagéré l'éventuelle contribution des achats publics pour stimuler l'activité économique au Canada. Les ministères, en particulier le ministère de la Défense nationale et le ministère des Transports, étaient de plus en plus mécontents du fait que leurs besoins opérationnels étaient compromis par des décisions prises par les comités ad hoc d'une tierce partie constituée d'autres ministères. Selon le Groupe de travail, on n'a jamais obtenu, loin de là, les résultats escomptés sur le plan de la distribution régionale, de l'échange de technologie et des investissements. En outre, il était à craindre, toujours selon le Groupe, que les politiques en vigueur aient en fait privilégié les bénéfices à court terme aux dépens de bénéfices plus durables.

16.26 Dans son rapport, le Groupe de travail invitait le gouvernement à réévaluer ses politiques à la lumière de certaines considérations, notamment le peu de réalisme dont il avait fait preuve en espérant obtenir l'entière compensation de ses marchés; les faibles avantages tirés de ces mesures compensatoires par rapport aux avantages escomptés et leur intérêt généralement provisoire pour le Canada; les coûts substantiels découlant des activités visant à obtenir des retombées industrielles; et le froid que ces pratiques compensatoires avaient créé dans les relations commerciales avec les États-Unis et l'Europe, sans pour autant présenter d'intérêt appréciable à long terme pour le Canada.

Les critiques des mesures compensatoires ont conduit à l'adoption d'une nouvelle politique en 1986, l'accent portant alors sur les bénéfices directs

16.27 Le rapport du Groupe de travail Nielsen a eu entre autres pour résultat une refonte majeure de la politique de développement industriel que le gouvernement avait annoncée en 1986. La nouvelle politique et les énoncés de principe qui ont suivi ont souligné la nécessité de viser des retombées industrielles durables, d'abandonner en règle générale des objectifs de maximisation des mesures compensatoires et de tirer le meilleur parti des initiatives de développement industriel pour accroître la compétitivité des entreprises canadiennes.

16.28 La nouvelle politique du gouvernement précise clairement que les objectifs fédéraux en matière d'approvisionnement mettent au premier plan l'optimisation des ressources dans les activités visant à satisfaire les exigences opérationnelles. Essentiellement, cela signifie qu'il faut obtenir l'équipement nécessaire afin de pourvoir à ces exigences de la manière la plus rentable possible.

16.29 Vient ensuite l'objectif qui consiste à revoir les activités d'approvisionnement à la lumière des possibilités de développement industriel et régional à long terme, en insistant sur des retombées industrielles durables, susceptibles d'aider les entreprises canadiennes à devenir plus concurrentielles sur les marchés intérieur et extérieur.

16.30 Lorsque, pour satisfaire aux exigences opérationnelles, des stratégies d'approvisionnement prometteuses vont à l'encontre du concept d'optimisation des ressources, mais semblent être rentables du point de vue du développement industriel et régional, il faut soumettre ces stratégies à l'attention des ministres avant d'émettre des demandes de propositions aux entreprises privées. Dans la mesure du possible on fournira une estimation des coûts et il faut présenter aux ministres une source de financement lorsque des primes importantes sont prévues.

16.31 Lorsque les grands projets d'immobilisations prévoient des initiatives de développement industriel et régional, l'augmentation des coûts qui en résulte doit être assumée à la fois par le ministère qui parraine le projet et par le ministère responsable du développement industriel, lequel jouera un plus grand rôle dans le financement des activités de développement industriel qui ne sont pas directement liées au mandat du ministère qui parraine le projet. Dans le cas des grands projets d'immobilisations de la Défense nationale, celui-ci ne doit financer que les éléments de projets essentiels à la sécurité nationale (par exemple, de façon à créer et à assurer une base industrielle dans le secteur de la défense). Les coûts de toute initiative de développement industriel qui n'est pas considérée essentielle à la sécurité nationale doivent être partagés par la Défense et les autres ministères responsables du développement industriel et régional, ces derniers devant en assumer une plus grande part.

16.32 Si pour obtenir un avantage spécifique il y a des coûts supplémentaires, il faut établir la preuve que l'activité qui en résulte sera durable et a toutes les chances de réussir commercialement, que les avantages socio-économiques suffisent à justifier les coûts additionnels de cet achat et que les avantages en question ne pourraient être obtenus sans l'aide du gouvernement.

16.33 Selon les fonctionnaires, la nouvelle politique signifie qu'il faut viser des retombées industrielles rentables, directement liées au système ou produit visé par le marché public. Bien qu'il soit toujours possible de proposer des bénéfices indirects liés au système ou produit (autrefois appelés «mesures compensatoires»), il faut donner la priorité aux avantages directs. Au titre des avantages directs et indirects peuvent figurer l'«effort de production», c'est-à-dire la valeur du contenu canadien des biens et des services; l'échange de technologie ouvrant l'accès aux marchés mondiaux; et les investissements qui favorisent un développement industriel et régional durable.

Observations

La participation directe peut contribuer à accroître les coûts et les risques
16.34 Avant 1986, alors qu'on favorisait les mesures compensatoires, les soumissionnaires étrangers savaient que la valeur en dollars de la mesure compensatoire incluse dans leur proposition allait également être évaluée et, par conséquent, influerait grandement sur l'adjudication du marché. Étant donné que les mesures compensatoires ne sont pas directement liées au produit acheté et comme la plupart des systèmes d'armements étaient fabriqués et assemblés à l'étranger, le régime compensatoire n'obligeait pas les soumissionnaires à modifier leurs procédés de fabrication. Pour le gouvernement canadien, il en résultait surtout le risque de ne pas bénéficier des avantages prévus. En revanche, il était peu probable que le coût de fournir ces compensations augmente le coût du produit livré.

16.35 La nouvelle politique du gouvernement propose une structure de base en vue d'optimiser les ressources tout en satisfaisant les exigences opérationnelles et, par la même occasion, de tirer parti des possibilités de développement industriel durables, susceptibles de donner lieu à des produits concurrentiels sur les marchés intérieur et extérieur. Si cette politique nouvelle se prête à la réalisation de projets de grande valeur pour le Canada, elle pose néanmoins des difficultés de mise en oeuvre appréciables aux fonctionnaires.

16.36 Par contre, la démarche actuelle en matière d'approvisionnement pour appliquer la nouvelle politique n'a pas beaucoup changé par rapport à ce qu'elle était avant 1986. Il revient encore principalement au secteur privé de cerner les possibilités de développement industriel et régional qu'offrent les grands projets de l'État et d'en faire la proposition aux ministères responsables de ces initiatives. En effet, dans le cadre des demandes de propositions, on invite les soumissionnaires à préciser non seulement les questions de prix et de qualités techniques afin de satisfaire les exigences opérationnelles, mais encore les éventuelles retombées industrielles et régionales.

16.37 Par sa structure, la démarche actuelle continue de favoriser les entreprises dont les propositions maximisent les retombées industrielles. Aujourd'hui, l'accent étant mis sur les avantages directs, les entreprises étrangères, souvent seules à avoir la capacité de fabriquer d'importants systèmes de défense mais qui, habituellement, n'ont pas d'usines au Canada, peuvent être exclues des marchés visant l'approvisionnement de systèmes complets d'armement ou de soumissionner directement.

16.38 Diverses démarches ont été adoptées pour favoriser une plus grande participation directe de l'industrie canadienne. Parfois, les entreprises canadiennes deviennent les entrepreneurs principaux chargés de l'assemblage final de l'équipement conçu et fabriqué à l'étranger. D'autres fois, on leur confie la tâche d'intégrer ces systèmes d'armements. En outre, des offres sont libellées de manière à favoriser la plus grande utilisation possible de composantes d'origine canadienne. Bien que l'industrie canadienne ait des points forts, les composantes fournies par des entreprises canadiennes pour les projets que nous avons examinés étaient souvent plus rudimentaires sur le plan technologique et leur prix n'était pas nécessairement concurrentiel par rapport aux composantes semblables disponibles sur le marché étranger. Souvent, elles exigeaient beaucoup plus de travail de conception et d'essai supplémentaire pour bien les intégrer au produit original.

16.39 Les entreprises étrangères reconnues qui fabriquent d'importants systèmes de défense disposent déjà de procédés de fabrication complets. Souvent, ils ont amorti leurs frais d'investissement, de conception, de gestion de projet et de démarrage en raison de plus grands lots de fabrication. Ils ont peut-être même déjà commencé à réaliser des économies d'échelle. Tout cela rend le marché extrêmement compétitif. Lorsqu'un marché de fabrication ou d'assemblage final est passé à une entreprise, au Canada ou ailleurs, qui n'a jamais conçu ou fabriqué de systèmes ou de produits de pointe dans le secteur de la défense, les coûts et les risques sont susceptibles d'être plus élevés.

16.40 Les entreprises qui font affaire avec le gouvernement n'ont d'autre choix que de se conformer aux modalités régissant l'approvisionnement telles qu'elles sont définies dans les conditions générales de la demande de propositions. C'est là le seul moyen d'éviter que leur soumission ne soit rejetée.

16.41 Le graphique de la pièce 16.2 illustre le concept fondamental de la politique d'approvisionnement du gouvernement en ce qui a trait aux initiatives de développement industriel découlant des grands projets d'immobilisations. Les coûts que doivent payer l'État et l'industrie dans le cadre d'une initiative de développement industriel doivent être plus que compensés par le rendement du capital investi sous la forme d'une meilleure productivité et donc d'une compétitivité accrue des produits sur le marché mondial. On peut mesurer la valeur de cette plus grande productivité à la lumière des profits que l'on compte tirer des ventes, au pays comme à l'étranger, dans un proche avenir. Les mêmes principes s'appliquent à n'importe quel pays engagé dans des activités de développement industriel de ce genre.

16.42 Dans les secteurs où les entreprises canadiennes sont déjà concurrentielles, le coût additionnel de leur participation à un projet peut être faible, voire nul. De même, si le matériel de défense demandé est si unique qu'aucun produit comparable ne peut être fourni par une entreprise étrangère, il se peut qu'il soit tout aussi rentable de le fabriquer au Canada. Cependant, en général, la participation directe des entreprises canadiennes nécessiterait un investissement au chapitre de la conception du produit, de la mise en place d'une infrastructure, du perfectionnement de la main-d'oeuvre ou autre. Quand une décision est prise en faveur d'investissements de ce genre, il convient d'analyser soigneusement le projet pour s'assurer que les avantages à court et à long terme justifient les investissements ou que le caractère unique des capacités recherchées en justifient les coûts.

16.43 Selon les cas, il pourrait être facile ou très difficile d'estimer ces coûts et ces avantages. Il est notamment plus complexe de définir le rapport coûts-avantages lorsque les exigences opérationnelles issues des besoins militaires particuliers du Canada font appel à des capacités uniques. Dans les projets complexes, il peut être difficile d'obtenir des prix de vente précis de divers manufacturiers, de même qu'une idée exacte des possibilités futures en ce qui a trait aux ventes ou à la part du marché qu'on pourrait accaparer. Quoi qu'il en soit, la politique gouvernementale exige une analyse des coûts et des éventuels avantages. Il faudra faire preuve de jugement pour décider des ressources à investir afin de pouvoir tirer de ces analyses une assurance raisonnable de l'optimisation des ressources. Nous nous rendons compte de la difficulté de ce travail dans le cas des marchés plus complexes, mais nous croyons que cela est possible et nécessaire.

Notre examen de six projets démontre certains problèmes que l'on peut rencontrer

16.44 Les six projets que nous avons examinés peuvent être groupés en trois catégories. Deux des projets, le Projet des véhicules blindés légers pour la Milice et le Programme de modernisation de l'équipement électronique du CF-5, illustrent des cas où le processus normal d'approvisionnement a été contourné en raison de considérations industrielles ou régionales. Dans le cadre de trois autres projets, soit le Projet de défense aérienne à basse altitude, le Projet de la frégate canadienne de patrouille et le Projet de véhicules logistiques lourds sur roues, il a été décidé que l'industrie canadienne devait jouer un rôle important dans la conception, la fabrication, l'assemblage ou l'intégration d'équipement jamais construit auparavant au Canada. Pour sa part, le Projet d'aéronef de surveillance aérienne dans l'Arctique et les zones maritimes, supposait principalement l'achat de produits disponibles sur le marché et faisait appel en partie à l'industrie canadienne.

Les priorités industrielles ou régionales ont influé sur deux projets
16.45 Le Projet des véhicules blindés légers pour la Milice. En 1976, la Division diesel de la General Motors, à London, en Ontario, a adapté un véhicule blindé léger de conception suisse en vue de sa fabrication au Canada. Elle verse à la société MOWAG, en Suisse, des droits pour fabriquer sous licence ce véhicule au Canada. ( Voir la photo )

16.46 En août 1988, la Division a présenté au ministère de la Défense nationale une soumission non sollicitée visant la construction de 200 véhicules blindés légers pour la Milice canadienne. Dans sa proposition, elle signalait qu'en raison d'un arrêt de la production à la suite d'une commande de 759 de ces véhicules par le corps des Marines des États-Unis, elle courait le risque que la société-mère ne l'oblige à fermer ses portes, ce qui allait entraîner la perte de 375 emplois dans la région de London. Elle a en outre indiqué que l'avenir s'annonçait très prometteur et qu'elle prévoyait exporter des milliers de véhicules.

16.47 Au départ, la démarche d'approvisionnement visant à satisfaire les besoins opérationnels du ministère consistait à faire l'achat de véhicules chenillés qui seraient compatibles avec l'équipement utilisé par les unités de la Force régulière auprès de laquelle la Milice était appelée à servir. On a exprimé certaines inquiétudes au sujet des limites des véhicules blindés légers pour la Milice en terrain accidenté ou en neige profonde, et du manque d'efficacité opérationnelle pouvant résulter de démarches différentes en matière de formation. En outre, le coût initial de ces véhicules était plus cher que celui des véhicules chenillés et leur introduction rapide dans les opérations du ministère a causé des perturbations sur le plan de l'entretien et de la formation. Ces coûts initiaux peuvent être compensés par les coûts supérieurs de fonctionnement des véhicules chenillés, compte tenu des taux d'utilisation. En octobre 1988, cependant, le ministre de la Défense nationale, avec le soutien du chef d'état-major de la Défense, a répondu qu'il allait inviter ses collègues à approuver l'achat des véhicules de GM.

16.48 Les engagements au titre des retombées industrielles de ce marché s'élevaient à 91,5 millions de dollars, soit le montant exact du marché principal. Le contenu canadien du véhicule représentait 60 p. 100 de cette somme. Le reste était compensé par l'achat d'autres produits canadiens par GM. Les dirigeants de la société nous ont indiqué que la valeur des engagements au titre des mesures compensatoires sera supérieure à 200 p. 100.

16.49 Le projet de modernisation de l'équipement électronique du CF-5. Canadair Ltée de Montréal, au Québec, a construit la flotte des CF-5 à la fin des années 1960. En 1984, le ministère a recommandé qu'on modernise l'équipement électronique de l'aéronef pour lequel il n'existait plus de pièces de rechange et qu'on en fasse un meilleur avion d'entraînement de transition pour le CF-18, un appareil très sophistiqué. ( Voir la photo )

16.50 En 1986, un consortium, composé entre autres de Bristol Aerospace de Winnipeg, a émis une proposition qui a remporté globalement la faveur pour le soutien technique des systèmes ainsi que la révision et la réparation des cellules du CF-18. Cependant, on a attribué le marché à Canadair, leader du consortium occupant la deuxième position dans le processus d'adjudication, parce qu'on a estimé que Canadair serait plus en mesure d'assurer l'échange de la technologie en aval.

16.51 En janvier 1987, un mois après la signature du marché concernant le CF-18, il était annoncé que le soutien industriel rattaché au CF-5 sera transféré de Canadair à Bristol afin de mieux répartir la distribution de l'approvisionnement dans l'industrie aérospatiale. Cette décision a entraîné des coûts supplémentaires à l'État en raison des frais associés au transfert d'outils et de documents techniques à Bristol; des frais additionnels occasionnés par l'adjudication des marchés relatifs aux prototypes et à la production; des retards et de la courbe d'apprentissage à Bristol; du manque d'efficacité vu que les travaux de réparation et les travaux de modernisation ne pouvaient plus se dérouler simultanément, comme c'était prévu à l'origine; et de l'aide gouvernementale supplémentaire pour financer les études de commercialisation internationale et les investissements de positionnement.

16.52 Ce marché ne prévoit aucun engagement sous la forme de retombées industrielles. Néanmoins, la Partie III du Budget des dépenses de 1992-1993 fait état d'un montant de 34 millions de dollars au titre de l'effort de production, des mesures compensatoires et de l'échange de technologie. Ces chiffres avaient été établis avant la décision d'adjuger le marché à un fournisseur unique, soit Bristol, c'est-à-dire au moment où l'on prévoyait que l'État ferait l'acquisition des principales composantes nécessaires à la modernisation et fournirait lui-même cet équipement à l'entrepreneur. À la suite de notre vérification, les fonctionnaires du ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie ont informé le ministère qu'il n'était plus nécessaire de faire rapport des retombées industrielles découlant de ce projet dans la Partie III du Budget des dépenses.

Trois projets ont été montés pour permettre à l'industrie canadienne de jouer un rôle de premier plan
16.53 Le Projet de véhicules logistiques lourds sur roues, le Projet de la frégate canadienne de patrouille et le Projet de défense aérienne à basse altitude sont au nombre des projets où des décisions ont été prises pour permettre à l'industrie canadienne de jouer un rôle de premier plan dans un grand projet de l'État. Dans les deux premiers cas, le marché était ouvert aux entreprises canadiennes seulement, tandis que dans le dernier cas, le marché a été adjugé à la suite d'un concours ouvert à la concurrence internationale. Les trois marchés ont été attribués au plus bas soumissionnaire, conformément aux restrictions régissant le processus d'adjudication. Dans les trois cas, l'équipement obtenu n'avait jamais été fabriqué ou assemblé au Canada. (Voir les photo .)

16.54 Pour le projet de véhicules logistiques lourds, UTDC Inc. de Kingston, en Ontario, a assemblé des camions à partir de pièces d'origines diverses. La société Steyr d'Autriche fournissait les pièces principales, comme le moteur, la transmission et les essieux, alors que des fabricants et des fournisseurs canadiens s'occupaient d'autres composantes et d'une partie de l'assemblage, entre autres, les carrosseries cargo et le matériel de manutention, de même que toute une série d'articles plus rudimentaires sur le plan technologique. Dans certains cas, les entreprises canadiennes avaient obtenu des permis de fabrication sous licence d'entreprises étrangères; dans d'autres, elles se contentaient d'assembler des composantes fabriquées à l'étranger. Les fournisseurs de composantes devaient d'abord concevoir les produits et mettre en place les procédés de production nécessaires. UTDC avait pour responsabilités générales de veiller à la compatibilité des diverses composantes et à l'assemblage, à l'intégration des systèmes et à la gestion du projet. ( Voir la photo )

16.55 Dans le cas du Projet de défense aérienne à basse altitude, Oerlikon Aérospatiale Inc., de Saint-Jean, au Québec, était responsable de l'assemblage des pièces principales du Système de défense aérienne et de lutte antichar (ADATS), élément du Système de défense aérienne à basse altitude, et de l'intégration de l'ensemble des systèmes. Quelques éléments de l'ADATS, comme le radar, sont fournis par des entreprises canadiennes en vertu d'ententes de fabrication sous licence conclues avec des entreprises étrangères.

16.56 Dans le cas du Projet de la frégate canadienne de patrouille, la Saint John Shipbuilding Limited, de Saint John, au Nouveau-Brunswick, était chargée des travaux de conception, de la construction de la coque et de l'assemblage de frégates à la fine pointe du progrès. Paramax, de Montréal, au Québec, un important sous-traitant de Saint John Shipbuilding, conçoit un progiciel d'intégration des systèmes qui est aussi perçu comme un produit de technologie avancée. ( voir la photo )

16.57 À ce jour, les entreprises et l'État ont consenti d'importantes mises de fonds à la réalisation de ces projets. Il a fallu entre autres moderniser substantiellement ou mettre en place le matériel ou les usines nécessaires, recruter et former du personnel qualifié, entreprendre les travaux de conception nécessaires, développer un progiciel d'intégration et gérer le projet. En outre, comparativement aux projets d'achat de produits disponibles sur le marché, ces projets de développement complexes entraînent pour le gouvernement fédéral des frais de gestion de projet supérieurs. Dans les trois cas précités, il était conclu que les exigences opérationnelles uniques du Canada excluaient l'achat direct auprès de fournisseurs étrangers, même si, dans le cas du projet des véhicules logistiques lourds et de celui de la frégate, on savait, au moment de l'adjudication des marchés, qu'il y avait des systèmes d'armements semblables à l'étape de la production ou de la conception.

16.58 Comme l'indique la pièce 16.2 , les profits tirés des ventes futures doivent permettre de recouvrer les mises de fonds au poste du développement industriel. Les entreprises participant à ces trois projets ont commercialisé leurs produits sur les marchés étrangers mais, à quelques exceptions près, n'y ont pas encore remporté beaucoup de succès et ce, pour de multiples raisons. Il se livre une vive concurrence sur le marché mondial du matériel de défense, les barrières au commerce international empêchent le secteur canadien de la défense de trouver des débouchés à l'étranger pour certains de ses produits et les grands pays industrialisés préfèrent généralement fabriquer leurs propres systèmes. L'envergure du marché intérieur canadien est faible, et l'évolution de la situation mondiale a eu des répercussions notables sur les budgets d'approvisionnement de matériel de défense.

16.59 Bien que le Canada puisse avoir intérêt à construire au pays ses propres systèmes plutôt que de les acheter de fournisseurs étrangers (réduction du taux de chômage, utilisation accrue de la capacité industrielle), la valeur réelle de ces avantages de même que la manière de les évaluer à l'aide d'une analyse coûts-avantages soulèvent un vif débat. Les lignes directrices du Conseil du Trésor et du ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie à ce sujet rappellent que les avantages réels d'un projet pour une région ou une industrie en particulier sont parfois contrebalancés par des désavantages du même ordre ou plus grands encore dans une autre région ou pour une autre industrie.

Un projet portait sur l'achat de produits disponibles sur le marché
16.60 Projet d'aéronef de surveillance aérienne dans l'Arctique et les zones maritimes. Dans le cadre de ce projet, il s'agissait essentiellement de l'achat direct de produits disponibles sur le marché. ( Voir la photo )

16.61 La participation canadienne à ce projet comprenait l'approvisionnement de composantes évaluées à quelque 4,5 millions de dollars US et normalement fournies par des entreprises canadiennes à Lockheed, aux États-Unis, pour ce type d'aéronef. En outre, des travaux évalués à un autre 12 millions de dollars US étaient prévus dans les provinces de l'Atlantique pour l'installation des composantes permettant de satisfaire aux besoins opérationnels du ministère. Nous avons été avisés par les dirigeants de Lockheed que, par rapport à ce qu'il en aurait coûté à Lockheed pour faire le même travail dans son usine aux États-Unis, les travaux n'avaient pas occasionné de frais additionnels.

16.62 Un engagement de 90 millions de dollars US était prévu à titre de mesure compensatoire : 40 millions de dollars US sous la forme d'achats dans les provinces de l'Ouest et de l'Atlantique, et 50 millions de dollars US en approvisionnement possible de composantes canadiennes en vue de l'acquisition par la Marine américaine de l'avion de lutte anti-sous-marins P-7. Le projet du P-7 a été annulé et les dirigeants de l'entreprise nous ont avisés qu'ils cherchaient d'autres moyens de remplir leurs engagements.

Observations générales tirées de notre examen des projets

16.63 Plusieurs observations générales sont ressorties de notre vérification des six projets et s'appliquent à la plupart d'entre eux.

16.64 Premièrement, aucun de ces projets ne s'est appuyé sur une stratégie à long terme en matière d'initiatives de développement industriel en vue de guider la sélection de la méthode appropriée d'approvisionnement. Comme nous le mentionnons plus loin, les présidents-directeurs généraux d'entreprises de matériel de défense trouveraient utile que soit élaborée une stratégie de participation de l'industrie canadienne à ces projets bien avant que ne s'amorce le processus de demande de soumissions.

16.65 Deuxièmement, aucune des stratégies d'approvisionnement adoptées n'a été soutenue par une analyse approfondie des coûts, des avantages et des risques éventuels. On n'a pas non plus évalué d'autres solutions possibles, comme les entreprises en participation avec d'autres pays. Dans le cas des projets aux exigences opérationnelles uniques, aucune évaluation n'a été faite afin de comparer les dépenses nécessaires pour satisfaire ces exigences par rapport aux coûts occasionnés par l'achat d'équipement déjà disponible ou à l'étape de la conception.

16.66 Troisièmement, bien que les marchés aient été adjugés en fonction du prix, des qualités techniques et des retombées industrielles, souvent, la valeur de pondération de chacun de ces critères dans la décision finale n'était pas clairement précisée dans la demande de propositions, pas plus que les caractéristiques exigées des initiatives de développement industriel.

16.67 Quatrièmement, la décision d'avoir recours au processus d'approvisionnement pour satisfaire aux besoins nationaux ou régionaux immédiats, pour permettre au Canada d'acquérir une capacité opérationnelle unique, ou pour «canadianiser» les composantes peut entraîner des coûts appréciables. Dans le cas des projets que nous avons examinés, ces coûts représentaient parfois tout simplement les frais liés à l'administration des retombées industrielles découlant de l'achat de produits disponibles sur le marché et, d'autres fois, pouvaient atteindre 20 p. 100 du total des coûts du projet. Dans la perspective globale du Programme des services de défense, un plan échelonné sur quinze ans qui comprend des grands projets de l'État d'une valeur dépassant 50 milliards de dollars, ces coûts pourraient totaliser plusieurs milliards.

16.68 Cinquièmement, dans les cas que nous avons examinés, l'activité industrielle concurrentielle et à long terme résultant des initiatives de développement industriel a été jusqu'à présent très limitée. Un certain nombre de sous-traitants choisis pour la fabrication des composantes de divers produits se sont retirés des affaires. Malgré les efforts soutenus de commercialisation des entrepreneurs principaux et des sous-traitants les plus importants, peu de ventes additionnelles ont été réalisées à ce jour, bien que l'on travaille actuellement à la concrétisation de marchés prometteurs.

16.69 Sixièmement, dans certains cas, la réalisation d'initiatives de développement industriel a entravé la démarche adoptée pour satisfaire les besoins opérationnels du ministère et établir le calendrier d'exécution des projets, voire même ses activités régulières. En outre, comme les coûts additionnels des initiatives de développement industriel sont maintenant assumés par le ministère, il y a moins de fonds disponibles pour satisfaire d'autres besoins opérationnels. En revanche, le désir d'obtenir un équipement qui dépasse les capacités existantes ou planifiées ailleurs dans le monde entraîne des investissements substantiels dans la conception et la production de cet équipement.

16.70 Septièmement, le degré de validation ou de vérification des avantages obtenus en regard des engagements contractuels paraît faible.

16.71 Huitièmement, il faudra améliorer sensiblement l'information consignée dans la partie III du Budget des dépenses. Il n'y figure aucune indication des coûts rattachés aux initiatives de développement industriel et les responsabilités en matière de dépenses n'y sont pas clairement indiquées. Les retombées industrielles dont il est question dans la Partie III du Budget des dépenses pour ces projets représentent principalement le contenu canadien de certaines activités industrielles pour lesquelles on fait en outre une distinction entre les avantages «directs» et «indirects». Par avantage direct, on désigne simplement la valeur du contenu canadien du produit acheté par le ministère. Il ne s'agit pas des avantages au sens où l'entend la politique du gouvernement. Les avantages indirects sont les bénéfices que l'on prévoit de tirer ultérieurement de la vente du produit acheté ou la valeur du contenu canadien d'autres produits ou services (mesures compensatoires) non liés au projet que l'entrepreneur principal s'engage à acheter auprès d'entreprises canadiennes. L'avantage réel net de ces mesures compensatoires pour le Canada n'a pas été défini et, souvent, les ventes prévues ne se sont pas matérialisées. Dans une moindre mesure, au nombre des autres avantages directs et indirects, on pourrait citer la valeur de la technologie acquise et celle des investissements faits par des entreprises étrangères au Canada.

Les entrevues menées auprès de présidents- directeurs généraux de l'industrie confirment la nécessité d'apporter des améliorations

16.72 Nous avons interviewé 37 présidents-directeurs généraux (PDG) et autres membres de la haute direction de 28 entreprises. Vingt-six d'entre elles sont au nombre des entrepreneurs principaux et des sous-traitants les plus importants participant à la réalisation d'un ou de plusieurs grands projets de l'État relevant de la Défense. Les deux autres ont présenté des soumissions pour un grand marché avec le ministère, mais n'ont pas été sélectionnées.

16.73 Même si les PDG estiment en général que les grands projets de l'État peuvent favoriser le développement industriel, le processus mis en oeuvre soulève chez eux de graves inquiétudes. La plupart souhaitent en fait l'application en tous points de la politique d'approvisionnement du gouvernement.

16.74 Les sentiments exprimés par les leaders de l'industrie à l'égard du développement industriel sont à la fois très marqués et assez généralisés. Bien qu'à ce chapitre quelques personnes interrogées aient eu une expérience positive, la plupart se sont montrées très critiques de la démarche actuelle. Certaines nous ont dit avoir sérieusement envisagé la possibilité de retirer leur entreprise des négociations avec le gouvernement pour éviter les problèmes causés par le processus actuel de mise en oeuvre. Quelques PDG affirment que le Canada s'en sortirait mieux si le gouvernement cessait de rattacher des dispositions relatives au développement industriel à ses activités d'approvisionnement. La plupart pensent que de telles initiatives sont des éléments inévitables du processus, mais ils aimeraient qu'elles soient mieux gérées. À tout le moins, ils souhaiteraient qu'on définisse de façon claire et précise les critères qui serviront à l'évaluation de ces initiatives avant même de lancer l'appel d'offres et surtout qu'on ne les modifie pas en cours de route.

16.75 Dans notre rapport de 1987, nous avons recommandé aux ministères de préciser autant que possible les coûts associés aux initiatives de développement industriel. Leurs représentants ont répondu à l'époque que cela était impossible pour les projets en cours. Nous avons demandé aux PDG s'ils croyaient qu'il serait possible d'évaluer les coûts d'initiatives visant à appuyer les objectifs de développement industriel et régional. La plupart ont répondu par l'affirmative et ont même dit que c'était là une chose essentielle. Ils ont été nombreux à s'inquiéter des mesures qui incitent les entreprises à se lancer dans des activités qui ne sont pas justifiées sur le plan économique, et de l'absence d'analyses approfondies qui soutiennent le bien-fondé des initiatives de développement industriel proposées.

16.76 La plupart des PDG trouvaient que la démarche actuelle dans le cadre de ces initiatives va à l'encontre de l'intention de départ. Nombreux sont ceux qui croyaient qu'elle compromet la compétitivité d'entreprises ou d'industries canadiennes. Parfois, des entreprises étrangères sont invitées à acquérir des capacités qui les mettent en concurrence directe avec des entreprises établies au Canada, dont certaines ont d'ailleurs reçu des encouragements du gouvernement pour exercer des activités dans ce secteur du marché. Parfois, des employés sont déplacés et la première entreprise se retire du marché parce qu'elle n'obtient plus assez de commandes. À d'autres occasions, les entreprises sont obligées de disperser leurs activités, bien qu'elles soient efficientes, de sorte que leur compétitivité globale en souffre. Certains PDG estiment que les entreprises établies au Canada souffrent actuellement d'un désavantage du fait qu'elles ne sont pas en mesure de proposer de nouveaux investissements ou échanges de la technologie. Parmi d'autres exemples de la «politique schizophrène», comme on l'appelle souvent, mentionnons le refus d'accorder des licences d'exportation pour les produits ayant bénéficié d'une aide fédérale et la réticence à utiliser de tels produits.

16.77 En temps de paix, les besoins du Canada dans le domaine de la défense sont généralement si réduits qu'il n'est pas économiquement viable d'établir une capacité de production limitée à ce marché ou de s'attendre à ce qu'un grand nombre d'entreprises canadiennes se disputent ce marché. Le marché mondial est très concurrentiel et les pays où la demande est très forte subviennent généralement à leurs besoins. La baisse de la demande de matériel de défense, par suite de la compression des budgets consacrés à la défense de par le monde, accentue ce problème. Dans ce marché hautement concurrentiel, la plupart des PDG pensent que le Canada a besoin d'une stratégie industrielle claire et d'une politique de défense stable qui guident les initiatives de développement industriel. Selon nombre d'entre eux, les responsables du secteur public doivent envisager des démarches totalement nouvelles. Entre autres sujets de considération, citons la possibilité de conclure des ententes stratégiques avec d'autres pays, en vertu desquelles l'un d'eux fournirait tout un système d'armement, sous réserve d'acheter un produit canadien concurrentiel.

16.78 Les PDG ont donné des exemples de ce qu'ils estimaient être des initiatives de développement industriel réussis. Quand nous leur avons demandé de citer les facteurs de réussite de leur entreprise, ils mentionnaient généralement le fait que le projet ne livrait pas concurrence à d'autres activités canadiennes de production en cours; qu'il était économiquement viable et que le produit était nécessaire au Canada et devançait la concurrence à l'étranger.

16.79 Souvent, les PDG ont précisé qu'il est généralement trop tard, à l'étape de la demande de propositions, pour lancer de solides initiatives de développement industriel. La plupart croient qu'en l'occurrence, il faudrait amorcer la planification bien avant et mettre en place des mécanismes de planification régulière. Nombreux ont été les PDG à suggérer que l'on devrait inviter l'industrie à proposer des initiatives de développement industriel significatives. Enfin, il apparaît évident, dans le secteur privé, qu'il faut revoir entièrement la gestion des initiatives de développement industriel découlant des marchés de l'État et étudier d'autres manières de tirer profit de ces marchés.

16.80 En résumé, les PDG ont uniformément souligné la nécessité d'adopter une démarche à plus long terme dans ce domaine, de mieux planifier les activités et de préparer des analyses coûts-avantages plus rigoureuses pour toute initiative.

Conclusions

Il est nécessaire de veiller à une saine gestion afin de mieux concilier exigences opérationnelles et objectifs de développement industriel

16.81 Si, dans les projets que nous avons vérifié, on avait suivi de plus près la politique d'approvisionnement du gouvernement, la stratégie première en matière d'approvisionnement aurait été de satisfaire les exigences opérationnelles du ministère de la façon la plus rentable possible. À partir de là, les ministères chargés de proposer des initiatives de développement industriel auraient soumis des propositions spécifiques, fondées sur une analyse coûts-avantages appropriée, afin de permettre à l'industrie canadienne de profiter d'avantages durables et à long terme contribuant à accroître sa compétitivité internationale. Là où ces avantages l'auraient justifié, ces propositions auraient été intégrées dans la stratégie d'approvisionnement.

16.82 Les coûts de toute initiative de développement industriel qui n'est pas considérée essentielle à la sécurité nationale doivent être partagés par la Défense nationale et par les autres ministères responsables du développement industriel et régional, ces derniers devant en assumer une plus grande part. Aussi bien la Défense que le(s) ministère(s) parrainant l'initiative de développement industriel disposeraient des fonds nécessaires pour couvrir tout coût supplémentaire des programmes clairement identifiés à cette fin dans leur Budget des dépenses respectif. L'on pourrait ainsi s'assurer que le financement des initiatives de développement industriel soit dûment approuvé par le Parlement. Il serait ensuite possible de prendre les mesures nécessaires pour le suivi et le contrôle approprié de ces initiatives. Malheureusement, cette démarche n'a été suivie pour aucun des six projets que nous avons examinés.

16.83 Pour ce qui est des initiatives de développement industriel que nous avons examinées, la démarche était fondamentalement la même que celle d'avant la politique de 1986, même si la nouvelle politique crée plus d'attentes et comporte plus de risques. En raison de l'importance qu'on accorde maintenant aux avantages directs, on a vu des entreprises qui n'avaient jamais réalisé de projets de ce genre ou d'une telle complexité produire ou assembler du matériel au Canada. Cependant, il était encore clair pour les soumissionnaires que leurs chances d'obtenir un marché s'amélioraient si les avantages industriels offerts étaient maximisés.

16.84 On a demandé aux entreprises d'identifier et de proposer des initiatives de développement industriel dans le cadre de leurs soumissions. Les prix demandés devraient faire état des coûts supplémentaires liés à la stratégie d'approvisionnement. Les fonctionnaires ont analysé ces propositions de développement industriel en tenant compte de la probabilité qu'elles puissent être concrétisées. Vu l'absence d'information sur les coûts de ces initiatives et l'inexistence de stratégies et d'objectifs d'ensemble, ils n'ont pas pu évaluer ces initiatives par rapport aux objectifs de la politique d'approvisionnement.

16.85 La situation se reproduit jusque dans les dispositions actuelles de surveillance et de compte rendu. La surveillance et la vérification se font à la lumière des engagements pris dans les marchés et on fait état de ces engagements et des résultats obtenus dans la Partie III du Budget des dépenses. Ces rapports donnent l'impression que les achats publics procurent des avantages industriels considérables au Canada. En fait, les avantages directs signalés se situent principalement au niveau du contenu canadien des produits achetés et on peut considérer que ces avantages augmentent en raison de facteurs comme le dépassement des coûts, le manque d'efficience au niveau de la production, la multiplication du nombre de sous-traitants qui contribuent à la hausse des coûts et des profits et les frais indirects plus élevés. Comme l'a signalé le Groupe de travail Nielsen, les avantages indirects que l'on s'attend d'obtenir des initiatives, notamment les mesures compensatoires, sont souvent irréalistes.

16.86 Le ministère n'a justifié aucune des stratégies d'approvisionnement adoptées dans le cadre des projets examinés comme étant essentielle au développement d'une base industrielle de défense canadienne, capable de soutenir l'expansion des forces armées canadiennes au cas où le besoin s'en ferait sentir. Cependant, dans certains cas, les documents finaux du processus d'approvisionnement laissent croire que la stratégie d'achat au Canada servirait à soutenir le développement d'une base industrielle de défense. Si le ministère avait officiellement invoqué ce motif comme raison principale de la préférence accordée à un fournisseur canadien, le motif en question aurait figuré au nombre des exigences opérationnelles du ministère. Selon la politique d'approvisionnement du gouvernement, tous les coûts associés à l'achat d'équipement ou à l'amélioration de la base industrielle auraient été assumés par le ministère. En vertu de la politique du gouvernement, les initiatives de développement industriel découlant des projets de la Défense et non liées aux exigences opérationnelles de ce ministère ou à la création d'une base industrielle de défense auraient dû être financées en grande partie par les ministères responsables du développement industriel. Or, étant donné que les forces armées canadiennes fonctionnent depuis des années selon le concept des «forces constituées», sans prévoir d'expansion significative, les références à la nécessité de développer une base industrielle de défense à des fins militaires au pays sont particulièrement difficiles à justifier.

16.87 Notre vérification révèle qu'il est nécessaire de veiller à une saine gestion afin de mieux concilier exigences opérationnelles et objectifs de développement industriel. Le processus actuel crée une relation de concurrence plutôt que de collaboration entre les ministères et a fait naître beaucoup d'inquiétudes dans le secteur privé. À notre avis, les ressources de l'État seraient davantage optimisées si les responsabilités et les obligations de rendre compte étaient clairement définies et si de meilleurs processus étaient établis pour discuter des compromis à faire entre la satisfaction des exigences opérationnelles de la manière la plus rentable possible et la réalisation d'initiatives de développement industriel à long terme, durables et rentables.

16.88 Vers la fin de notre vérification, en juin 1992, le Conseil du Trésor a approuvé le chapitre portant sur l'examen des acquisitions dans le manuel consacré à la politique d'acquisition et de gestion des projets. L'application de cette politique telle qu'elle y est formulée constituerait une réponse à plusieurs des préoccupations que nous avons soulevées.

Recommandations

16.89 Les ministères responsables du développement industriel et régional, après consultation avec le secteur privé canadien, devraient définir des objectifs d'ensemble, énonçant clairement les résultats escomptés des initiatives de développement industriel, et élaborer une stratégie permettant de réaliser ces objectifs.

Commentaire du ministère de la Défense nationale : Le ministère est pleinement d'accord avec les grandes lignes de cette recommandation.

16.90 Le ministère de la Défense nationale, en collaboration avec les ministères responsables du développement industriel et régional, devrait d'abord viser à satisfaire ses besoins opérationnels, de la manière la plus rentable qui soit, indépendamment du pays d'origine des fournisseurs. À partir de là, les ministères chargés du développement industriel et régional devraient, après avoir consulté le secteur privé canadien, chercher à tirer le meilleur parti des fournisseurs canadiens concurrentiels et reconnus ou à établir de nouvelles sources d'approvisionnement au Canada. Il faut au préalable s'appuyer sur une analyse approfondie des coûts, des avantages et des répercussions sur les exigences opérationnelles du ministère et le calendrier d'exécution des travaux. Cette analyse doit tenir compte des coûts, le cas échéant, du développement de l'industrie canadienne afin qu'elle puisse soutenir la concurrence, des risques associés à la réalisation de ces initiatives et des avantages à en tirer, en particulier les avantages durables et à long terme. Les ministères doivent ensuite suggérer des solutions rentables aux responsables et, au besoin, aux ministres, tout en précisant la source de financement, avant d'émettre des demandes de propositions.

Commentaire du ministère de la Défense nationale : Le ministère est pleinement d'accord avec le principe de base voulant que tout projet d'achat d'équipement vise à satisfaire les exigences opérationnelles de manière rentable. Nous nous rallions également au reste de la recommandation, soit d'effectuer une analyse approfondie des coûts et des avantages découlant des initiatives de développement industriel chaque fois qu'une telle initiative est envisagée et d'en préciser la source de financement.

16.91 Il conviendrait d'évaluer des solutions de remplacement pour s'assurer qu'on consacre des ressources adéquates à la planification, à l'analyse, à la validation et à la vérification des initiatives de développement industriel. Les dépenses supplémentaires en ressources pourraient alors faire partie du coût total du projet présenté aux décideurs.

Commentaire du ministère de la Défense nationale : Le ministère est d'accord que l'on consacre des ressources adéquates afin de veiller à la bonne marche de la planification, de l'analyse, de la validation et de la vérification des initiatives de développement industriel. Tout coût supplémentaire de ces ressources devrait être désigné comme un coût lié au projet de développement industriel et financé à même les crédits du ministère parrainant l'initiative de développement industriel.

16.92 Pour favoriser l'obligation de rendre compte dans la réalisation d'initiatives de développement industriel procurant des avantages durables et découlant des marchés d'approvisionnement du ministère, les fonctionnaires responsables auraient intérêt à trouver les moyens d'appliquer la politique d'approvisionnement du gouvernement, laquelle précise qu'il faut imputer les coûts supplémentaires découlant de ces initiatives en partie au ministère de la Défense nationale et en partie aux ministères responsables du développement industriel et régional.

Commentaire du ministère de la Défense nationale : Le ministère serait prêt à étudier la possibilité de partager une partie des coûts supplémentaires lorsque ceux-ci ont pour effet de favoriser le développement de l'industrie du matériel de défense stratégique.

16.93 Les ministères qui parrainent des initiatives de développement industriel devraient veiller à en assurer la surveillance et la vérification. Les coûts et les résultats de ces initiatives devraient être présentés avec exactitude et justesse au Parlement dans la Partie III du Budget des dépenses, et on devrait viser à une présentation uniforme d'une année à l'autre.

Commentaire du ministère de la Défense nationale : Le ministère est pleinement d'accord avec les grandes lignes de cette recommandation.

Commentaire du ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie à l'ensemble des recommandations : Le ministère est d'accord avec la teneur générale des recommandations et prendra un certain nombre de mesures visant directement à leur donner suite.