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Rapport du vérificateur général
B V G
Rapport d'avril 2000
Points saillants
Introduction
Observations
Conclusion
À propos de l'étude
Annexe A — Résumé des rôles et des responsabilités de quelques-uns des nombreux
intervenants dans la gestion des ressources humaines
à la fonction publique
Annexe B — Études du gouvernement fédéral et autres études sur la gestion des ressources humaines dans la fonction publique, 1967-2000
9.1 — Valeurs de la fonction publique
9.2 — Problèmes de longue date relevés
par le Comité
D'Avignon
9.3 — Principales constatations de l'étude de l'APEX
9.4 — Constituer un effectif de calibre mondial — certaines constatations du Rapport Duxbury
9.5 — Incidence d'une décision de la Cour fédérale sur la dotation
9.6 — Le « principe du mérite » ou le « système du mérite »
9.7 — Temps moyen pour doter un poste
par voie de concours interne (restreint)
9.8 — Principaux messages de La
Relève

La rationalisation du régime de gestion des ressources humaines — Une étude de l'évolution des rôles et des responsabilités

Communiqué

Points saillants

9.1 Nous avons réalisé cette étude pour attirer l'attention du Parlement sur l'urgence de régler des problèmes de longue date et de s'attaquer aux nouveaux défis liés à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique.

9.2 Le cadre actuel qui régit la gestion des ressources humaines dans le « noyau » de la fonction publique est dépassé et indûment complexe. Les systèmes administratifs sont lourds, coûteux et désuets. Ce cadre ne convient pas à un environnement qui exige souplesse et adaptabilité et qui est confronté à des défis majeurs en matière de gestion des ressources humaines et à un marché du travail de plus en plus concurrentiel.

9.3 La dotation dans la fonction publique est une source importante de frustration tant pour les gestionnaires que pour les employés. Le système, axé sur les règles, est inefficient. Les gestionnaires doivent posséder plus de pouvoirs en matière de dotation, mais ils doivent également être tenus de rendre compte de leurs décisions, et ce, de façon plus claire. Les intérêts des employés doivent être respectés, mais il est urgent de moderniser et de rationaliser le système de dotation et les mécanismes de recours connexes.

9.4 Depuis longtemps, on s'inquiète au sujet de la « responsabilité éparpillée » en matière de gestion des ressources humaines. La responsabilité et l'obligation de rendre compte des changements nécessaires pour simplifier, rationaliser et renforcer le régime actuel de gestion des ressources humaines doivent être clairement attribuées et appuyées adéquatement. Cela est particulièrement important dans les domaines où la responsabilité est divisée.

  • Dans la gestion des ressources humaines, les sous-ministres - les dirigeants des principales organisations du gouvernement - sont considérés comme étant responsables avant tout de l'administration d'un cadre prescrit par les organismes centraux. Le rôle des sous-ministres doit évoluer de façon importante. Ils doivent être les principaux responsables de l'établissement et du maintien d'un milieu de travail sain dans leurs ministères et leurs responsabilités à l'égard de la gestion des ressources humaines doivent être énoncées officiellement. Les sous-ministres doivent être tenus de rendre compte de la façon dont leurs ministères s'acquittent de ces responsabilités, et ce, de façon claire.
  • La Commission de la fonction publique doit engager un dialogue avec le Parlement sur les changements à apporter à ses activités et à la façon de s'acquitter de ses responsabilités pour assurer la protection du principe du mérite. Ce dialogue doit porter sur la nécessité d'une réforme législative de la dotation. La Commission doit aussi améliorer l'information communiquée sur le rendement des ministères quant au respect des dispositions et des principes de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.
  • Le Conseil du Trésor doit améliorer l'information qu'il communique au Parlement sur les aspects de la gestion des ressources humaines dont il est responsable. De plus, il faut préciser la responsabilité des sous-ministres quant à l'information communiquée sur la qualité et l'efficacité de la gestion des ressources humaines de leurs ministères.
Contexte et autres observations

9.5 Le « noyau » de la fonction publique est maintenant beaucoup plus petit qu'il ne l'a été depuis le début des années 1970. Au cours des dix dernières années, il a diminué de près de 100 000 employés et comptait quelque 143 000 employés à la fin de 1999. La réduction des effectifs, la dévolution, la privatisation, le recrutement limité et d'autres mesures ont contribué à cette diminution. Plus de 50 000 fonctionnaires ont quitté le « noyau » de la fonction publique (dont le Conseil du Trésor est l'employeur) pour des « employeurs distincts » comme l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

9.6 Les travailleurs du savoir représentent maintenant 55 p. 100 des fonctionnaires (en hausse par rapport à 33 p. 100 il y a 15 ans). Ils nourrissent de nouvelles attentes à l'égard du milieu de travail, qui rendent les changements encore plus nécessaires.

9.7 Le pourcentage des fonctionnaires âgés de 45 à 54 ans a pratiquement doublé au cours des 14 dernières années. En outre, d'ici une dizaine d'années, 70 p. 100 des hauts fonctionnaires seront admissibles à la retraite. Cela laisse présager une crise du leadership. De plus, les jeunes sont sous-représentés : le pourcentage des fonctionnaires de moins de 35 ans est à peu près la moitié de celui de la main-d'oeuvre canadienne.

9.8 En 1996, le Secrétariat du Conseil du Trésor estimait qu'il existait 840 taux de rémunération distincts et 70 000 règles régissant la paie et les avantages sociaux. En 1997, les manuels du personnel et d'administration de la paie du Conseil du Trésor comptaient plus de 12 000 pages d'instructions. Il faut 119 jours civils en moyenne pour mener à terme un concours interne dans le « noyau » de la fonction publique, sans compter le temps de traitement des appels. C'est à peu près deux fois plus que le temps qu'il n'en faut dans certaines organisations quasi publiques, selon celles-ci. Pour un nouveau poste qui doit être classifié, la dotation exige 230 jours civils en moyenne - près de huit mois.

Dans sa réponse commune, le gouvernement convient de la nécessité d'un cadre solide pour la gestion des ressources humaines et de l'importance d'une fonction publique saine. Il est plus optimiste que le vérificateur général face à certaines questions et fait mention de récentes initiatives visant à régler certains problèmes. Dans sa réponse complémentaire, la Commission de la fonction publique a indiqué qu'elle poursuivait ses efforts pour améliorer les systèmes de dotation et pour amorcer un dialogue avec le Parlement.

Introduction

9.9 Les femmes et les hommes qui composent la fonction publique du Canada offrent des services essentiels aux Canadiens. Ces services vont du traitement de prestations et de l'approbation de nouveaux médicaments à la communication d'information sur laquelle la population s'appuie pour prendre des décisions personnelles ou d'affaires. Les fonctionnaires conseillent également les ministres du jour au sujet de questions et de choix de politiques dans un large éventail de domaines. Les Canadiens s'attendent à ce que leurs fonctionnaires soient impartiaux et offrent des services honnêtes, équitables, objectifs et d'un bon rapport coût-efficacité.

9.10 Le Canada est réputé comme étant dans le monde l'un des meilleurs pays où il fait bon vivre et travailler. Notre fonction publique fédérale est tout aussi bien vue par ceux qui reconnaissent le rôle essentiel qu'elle joue dans l'élaboration et la prestation des programmes et des services qui font partie intégrante de notre mode de vie. Toutefois, la fonction publique fait face à d'importants défis en matière de gestion des ressources humaines. De plus, il existe de graves préoccupations à propos du caractère adéquat et de la souplesse du régime de gestion des ressources humaines.

9.11 Le bien-être organisationnel de la fonction publique, et partant, sa capacité de produire des résultats, dépend de sa capacité d'attirer, de perfectionner et de maintenir en poste un personnel qualifié. Un régime efficace de gestion des ressources humaines est essentiel pour y parvenir. Cela est particulièrement important étant donné les fortes pressions que subit la fonction publique, les mutations du marché du travail et les demandes croissantes auxquelles sont confrontés les fonctionnaires.

9.12 La fonction publique cherche à recruter des personnes très compétentes possédant les qualités et les habiletés nécessaires, grâce à un système de dotation impartial et fondé sur le principe du mérite. Ces principes ont suscité la création d'une fonction publique professionnelle, où l'on fait carrière. Ils sous-tendent le cadre législatif et institutionnel que le Parlement a créé pour régir la gestion des ressources humaines.

9.13 Les gestionnaires ne sont pas libres de gérer les personnes comme bon leur semble. Que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public, ils doivent suivre un cadre réglementaire et respecter les politiques, les directives et les lignes directrices de leur organisation. La plupart des organisations créent des systèmes de ressources humaines qui, s'ils sont conçus adéquatement, aident les gestionnaires à gérer leur personnel.

9.14 Les fonctionnaires sont gérés suivant un cadre directeur qui remonte à 1967, où différentes lois ont énoncé les rôles et les responsabilités des organisations gouvernementales s'occupant de « gestion du personnel ». De nombreuses études réalisées au cours des 30 dernières années ont révélé qu'un changement fondamental était fortement souhaitable, voire essentiel, et ont recommandé des changements importants à ce cadre. Les études actuelles sont parvenues aux mêmes conclusions. Pourtant, le changement a été circonscrit à une évolution dans les limites du cadre, lequel est demeuré à peu près inchangé.

9.15 Aujourd'hui, les attentes des gestionnaires de la fonction publique exigent une gestion des ressources humaines souple, qui réponde aux besoins et qui soit à-propos. Il est temps de régler les problèmes qui font depuis longtemps obstacle à l'amélioration de la gestion dans la fonction publique.

9.16 Par les lois qu'il adopte, le Parlement décide comment la fonction publique doit être gérée. Lorsqu'il examine les budgets et les rapports redditionnels du gouvernement et les questions concernant la fonction publique, il joue un rôle essentiel en veillant au maintien de la compétence et de la capacité de la fonction publique.

Le cadre législatif directeur

9.17 Le cadre directeur de gestion des ressources humaines des 20 ministères et des quelque 60 organismes qui constituent le « noyau » de la fonction publique comporte trois lois adoptées en 1967 : la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Une quatrième loi, la Loi sur la pension de la fonction publique, établit les régimes de retraite pour la fonction publique du Canada. Le cadre législatif vise à assurer le respect des valeurs fondamentales de la fonction publique et la protection et la surveillance du principe du mérite (voir la pièce 9.1).

9.18 La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique a introduit la négociation collective, à laquelle environ 85 p. 100 des employés sont maintenant assujettis. En règle générale, le régime de négociation collective respecte les principes et les processus établis par la loi pour régir les relations entre les employeurs et leurs employés. Exceptions de taille dans la fonction publique, la classification des emplois et la dotation en sont toutefois exclues.

9.19 Depuis 1967, plusieurs lois se sont ajoutées à ce cadre directeur, dont la Loi sur les langues officielles, la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Charte canadienne des droits et libertés, la Loi sur l'accès à l'information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Les principaux intervenants dans la gestion

9.20 Aujourd'hui, le Conseil du Trésor, le Bureau du Conseil privé, la Commission de la fonction publique et les ministères responsables jouent des rôles essentiels en matière de gestion des ressources humaines dans le « noyau » de la fonction publique. Les entités fédérales qui ne font pas partie du « noyau » jouissent d'une plus grande autonomie à cet égard.

9.21 Le Conseil du Trésor. En vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, le Conseil du Trésor agit, au nom du gouvernement, comme « employeur » pour le « noyau » de la fonction publique. Le Conseil du Trésor est un comité du Cabinet qui possède, en vertu de la loi, des pouvoirs en matière de gestion financière et de dépenses, de service et d'innovation, de technologies de l'information, et de gestion des ressources humaines. Dans ce domaine, les ministres du Conseil du Trésor ont pour rôle d'assurer le maintien en poste d'un effectif solide, représentatif et compétent. Par l'entremise du Secrétariat du Conseil du Trésor, le Conseil consulte les syndicats et négocie avec eux. De plus, le Conseil du Trésor est généralement responsable, selon la Loi sur la gestion des finances publiques, de la politique administrative ainsi que de la gestion financière et de la gestion du personnel (à l'exception des nominations, responsabilité de la Commission de la fonction publique). Le Conseil du Trésor, avec l'appui de son secrétariat, énonce les politiques concernant, entre autres, l'évaluation des emplois, la rémunération, les conditions d'emploi, la formation et le perfectionnement, les relations de travail, le réaménagement des effectifs, les régimes de retraite, les avantages sociaux, l'équité en matière d'emploi et les langues officielles.

9.22 Le Bureau du Conseil privé (BCP). Sous la direction du greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, le BCP doit veiller au rendement satisfaisant de la fonction publique qui, elle, soutient le premier ministre et le Cabinet. Cette fonction comprend la gestion stratégique des hauts fonctionnaires. Le BCP fournit conseils et appui pour la sélection des sous-ministres et des autres personnes nommées par le gouverneur en conseil, et pour le processus d'appréciation du rendement, de rémunération et de cessation d'emploi de ces personnes. Dans le cas des sous-ministres, il présente également conseils et soutien pour la planification de carrière. En 1993, le Greffier est devenu le chef de la fonction publique; il joue un rôle de chef de file important auprès des sous-ministres et des fonctionnaires en général en établissant l'orientation stratégique et les priorités de gestion de la fonction publique.

9.23 La Commission de la fonction publique (CFP). En vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, la Commission est un mandataire indépendant du Parlement qui possède le pouvoir légal de nommer ou d'assurer la nomination des « personnes qualifiées » dans la fonction publique, ces personnes étant de la fonction publique ou d'ailleurs. Elle veille à ce que les nominations soient fondées sur le principe du mérite « selon ce que détermine la Commission ». La Commission est également chargée de mener des enquêtes et d'effectuer des vérifications au sujet de questions dont elle est responsable et d'administrer les mécanismes de recours en matière de dotation prévus par la Loi. Elle met en oeuvre des programmes de formation et de perfectionnement du personnel et aide les sous-ministres adjoints à ce chapitre. Elle a aussi des responsabilités au chapitre de l'équité en matière d'emploi et s'occupe des affaires que lui confient le Conseil du Trésor ou le gouverneur en conseil.

9.24 Les ministères. Les ministres jouissent de vastes pouvoirs sur l'organisation et l'affectation des ressources dans leurs ministères. Les sous-ministres ont la responsabilité et le pouvoir de gérer le ministère pour appuyer leur ministre. Outre cela, la loi confère peu de pouvoirs aux sous-ministres en matière de gestion des ressources humaines. Leurs pouvoirs leur sont plutôt conférés par des instruments de délégation du Conseil du Trésor et de la Commission de la fonction publique.

Les nombreux autres intervenants

9.25 Il existe de nombreux autres intervenants. Le Centre canadien de gestion est chargé du perfectionnement de la collectivité des cadres afin d'assurer l'efficacité. Le Réseau du leadership est responsable d'appuyer le développement de réseaux et de promouvoir le renouvellement de la fonction publique ainsi que la gestion centrale de la collectivité des sous-ministres adjoints. Cela indique que ses membres constituent une ressource essentielle.

9.26 Divers comités de gestion jouent également un rôle important. Les deux principaux sont deux comités permanents de sous-ministres :

  • le Comité des hauts fonctionnaires (CHF), qui conseille le Greffier sur les nominations de hauts fonctionnaires et d'autres priorités et questions qui touchent la gestion des ressources humaines;
  • le Comité consultatif du Secrétariat du Conseil du Trésor (CCSCT), qui conseille le Secrétaire du Conseil du Trésor sur toutes les questions administratives soumises au Conseil, y compris celles qui ont trait à la « gestion du personnel ».

9.27 D'autres organismes jouent un rôle dans la coordination, la discussion ou l'examen des questions de gestion des ressources humaines ou s'acquittent de fonctions administratives (voir l'annexe A). Parmi eux, l'on retrouve divers organismes permanents ou spéciaux et des institutions de surveillance - le Commissariat aux langues officielles, les bureaux du Commissaire à l'information et du Commissaire à la protection de la vie privée, la Commission canadienne des droits de la personne et la Commission des relations de travail dans la fonction publique, qui administre la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Il y a également les 16 syndicats et divers forums employeurs-employés et agents négociateurs, tels que le Conseil national mixte et le Conseil consultatif de la Commission de la fonction publique.

Objet de l'étude

9.28 Nous avons réalisé cette étude pour attirer l'attention du Parlement sur l'urgence de régler des problèmes de longue date et de s'attaquer aux nouveaux défis auxquels fait face la gestion des ressources humaines dans le « noyau » de la fonction publique (les organisations pour lesquelles le Conseil du Trésor agit comme « employeur »). La modernisation des lois nécessaires pour régler certains de ces problèmes pourrait exiger l'intervention du Parlement. La surveillance d'autres situations problèmes par le Parlement est également capitale pour que les changements nécessaires se concrétisent, étant donné leur importance vitale pour le bien-être de la fonction publique et, partant, pour les Canadiens.

9.29 L'objectif de l'étude était de cerner les problèmes que posent les rôles et les responsabilités et la reddition de comptes concernant la gestion des ressources humaines. Nous voulions relever les secteurs où des changements sont nécessaires pour améliorer la capacité de la fonction publique de répondre aux besoins, maintenant et à l'avenir, dans un environnement qui évolue rapidement.

9.30 Pour un complément d'informations, voir la section À propos de l'étude, à la fin du chapitre.

Observations

Historique des préoccupations suscitées par le régime de gestion des ressources humaines

9.31 Au fil des ans, le régime de gestion des ressources humaines de la fonction publique a fait l'objet d'examens et d'analyses approfondis.

9.32 La Commission royale d'enquête sur l'organisation du gouvernement (la Commission Glassco - 1962). Le mandat de la Commission Glassco était de déterminer, entre autres, comment des liens modifiés entre le Conseil du Trésor, les autres organismes centraux et les ministères et organismes responsables pourraient améliorer l'efficience, l'économie et le service au public. La Commission a constaté que des changements profonds au cadre directeur s'imposaient. Ses recommandations ont contribué à la conception du cadre législatif établi en 1967.

9.33 Bien que de nombreuses recommandations de la Commission aient été adoptées, celles qui avaient trait au système du mérite et au rôle de la Commission de la fonction publique ne l'ont pas été. Certaines de ses préoccupations au sujet de la division des responsabilités en matière de gestion des ressources humaines demeurent encore sans réponse. Par exemple, la Commission Glassco avait exprimé des inquiétudes au sujet de la division des responsabilités entre le Conseil du Trésor et la Commission du service civil (maintenant la Commission de la fonction publique), et de ses répercussions sur l'efficience et la reddition de comptes.

9.34 Le Comité spécial sur la gestion du personnel et le principe du mérite (le Comité D'Avignon - 1979). L'examen réalisé par le Comité était et demeure unique dans les études du régime de gestion des ressources humaines, car les syndicats de la fonction publique y ont participé pleinement.

9.35 Le Comité recommandait que des changements importants soient apportés à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. À l'instar de la Commission Glassco, le Comité D'Avignon était fort préoccupé par la division des responsabilités, le manque de clarté quant à l'obligation de rendre compte, le rôle de la Commission de la fonction publique et le système de dotation. La pièce 9.2 décrit quelques points saillants du Rapport du Comité.

9.36 La Commission royale sur la gestion financière et l'imputabilité (la Commission Lambert - 1979). La Commission Lambert a mis au jour des problèmes semblables à ceux soulevés par le Comité D'Avignon. La Commission Lambert avait été créée non pas pour examiner la gestion du personnel mais pour se pencher sur la gestion financière et l'obligation de rendre compte. Néanmoins, elle avait conclu que « la gestion du personnel, à tout point de vue, est aussi importante, sinon plus, que la gestion financière pour la gestion efficace de l'ensemble des activités gouvernementales. »

9.37 La Commission Lambert avait également souligné que le contrôle de la gestion du personnel exercé par le Parlement était plus limité que celui de la gestion financière exercé par le Comité des comptes publics. Elle avait constaté que le contrôle parlementaire était limité, en partie, du fait de la responsabilité fragmentée en matière de gestion du personnel et de l'obligation redditionnelle y afférente.

9.38 Fonction publique 2000. Les examens D'Avignon et Lambert n'ont suscité aucun changement législatif ni institutionnel important au régime de gestion des ressources humaines, pas plus que maintes autres études réalisées dans les années 1970 et 1980 qui recommandaient des changements fondamentaux. En 1989, après de nombreuses années de vaines tentatives de réforme et devant l'évolution rapide de l'environnement et les nouveaux défis auxquels la fonction publique était confrontée, les fonctionnaires souhaitaient vivement un changement majeur. Fonction publique 2000, initiative de renouvellement de la fonction publique, a soulevé bien des attentes pour ce qui est de la réforme du cadre législatif, de la clarification des rôles et des responsabilités des organismes centraux et de la simplification des systèmes de personnel. Tout cela semblait possible quand le gouvernement, à la fin de 1989, annonçait ceci : « La complexité du régime administratif régissant la fonction publique est considérée comme une importante source de difficultés depuis plus d'une décennie. » Les hauts fonctionnaires ont déployé ensuite des efforts importants et la Loi sur la réforme de la fonction publique de 1992 a apporté des modifications visant à moderniser et à assouplir le système. Cependant, les changements relativement mineurs apportés au cours de la dernière décennie n'ont pas répondu aux attentes.

9.39 De nouvelles études mais peu de changements apportés au cadre directeur. Au cours de cette période de plus de 30 ans, de nombreuses autres études ont fait valoir la nécessité de changements administratifs, législatifs et structurels. Pourtant, quelques-uns des problèmes les plus importants ne sont toujours pas réglés par crainte, entre autres, de porter atteinte à l'indépendance et au rôle de la Commission de la fonction publique. Une chronologie des études réalisées sur la gestion des ressources humaines est présentée à l'annexe B.

Un cadre de gestion des ressources humaines désuet et indûment complexe

9.40 Au fil des ans, la fonction publique a connu de nouvelles lois et de nouvelles institutions reflétant les tendances sociétales, les nouveaux défis en matière de gestion du personnel et d'autres pressions. Le cadre régissant la gestion des ressources humaines dans le « noyau » de la fonction publique est devenu plus complexe. Certains intervenants partagent ou cumulent des responsabilités avec d'autres, et les obligations redditionnelles de chacun ne sont pas toujours claires. Dans un rapport de 1998, les membres d'un sous-comité du Comité des hauts fonctionnaires (CHF) se sont dits troublés par les risques de confusion, de conflits et de double emploi posés par « l'éparpillement des responsabilités » liées à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique.

9.41 Les systèmes administratifs sont également trop complexes. Il n'y a pas si longtemps, en 1996, le Secrétariat du Conseil du Trésor estimait qu'il existait 840 taux de rémunération et 70 000 règles régissant la paie et les avantages sociaux. De plus, en 1997, les manuels du personnel et d'administration de la paie du Conseil du Trésor comptaient plus de 12 000 pages d'instructions.

9.42 En outre, comme nous l'avons signalé dans le chapitre 12 de notre rapport de 1995, après plus de six années d'efforts et des dépenses de 61 millions de dollars, un projet visant à mieux utiliser la technologie pour administrer la paie a été annulé. Cet échec est en partie attribuable à la complexité du système de paie.

9.43 Le cadre législatif directeur a été conçu et remanié à une époque dominée par le principe du « pouvoir hiérarchique et du contrôle ». Plutôt que de mettre l'accent sur les valeurs à protéger et les résultats à atteindre, on s'est attaché à établir des règles et des procédures détaillées.

9.44 L'environnement actuel de la fonction publique contraste vivement avec celui des années 1960, alors que les principes, les systèmes et les processus de gestion mettaient l'accent sur la stabilité et la conformité. Aujourd'hui, les conditions, les priorités et les moyens d'atteindre les objectifs peuvent changer rapidement. À tous les niveaux et dans toutes les sphères de l'administration publique, y compris le mode de gestion des fonctionnaires, on insiste bien davantage sur la prise de risque éclairée et la pensée novatrice. Les gestionnaires ont besoin de beaucoup plus de souplesse et les employés doivent pouvoir s'adapter. Les concepts de gestion des ressources humaines qui évoluent rapidement et qui font appel à des approches très différentes exigent que les décisions soient prises collectivement par les superviseurs et les employés. Les gestionnaires doivent aussi investir davantage dans le perfectionnement du personnel clé.

Des pressions exigent que l'on agisse sans tarder

9.45 Le « noyau » de la fonction publique est maintenant plus petit qu'il ne l'a jamais été depuis le début des années 1970. Au cours des dix dernières années, il a diminué de près de 100 000 employés. D'environ 240 000 employés en 1990, après un sommet de quelque 243 000 en 1992, il compte maintenant environ 143 000 employés. La réduction des effectifs, la dévolution, la privatisation, le recrutement limité et d'autres mesures ont contribué à cette diminution.

9.46 Au cours des dernières années, plus de 50 000 fonctionnaires ont quitté le « noyau » de la fonction publique pour des « employeurs distincts » (aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique). Environ 4 500 ont quitté les ministères de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, de la Santé et des Pêches et des Océans pour la nouvelle Agence canadienne d'inspection des aliments; 3 900 sont passés à l'Agence canadienne des parcs au printemps de 1999; et environ 43 000 travaillent maintenant à l'Agence des douanes et du revenu du Canada, établie en novembre 1999. D'autres mouvements semblables avaient eu lieu au cours des années 1980 (et avant), quand des organisations telles que Postes Canada (environ 50 000 employés) et les musées nationaux (environ 1 000 employés) sont devenues des sociétés d'État.

9.47 Ces agences ont été créées pour améliorer le service et l'efficience. Leurs dirigeants jouissent de plus de souplesse, par rapport à celle que permettent les systèmes et contrôles au sein du « noyau » de la fonction publique - des contrôles comme ceux imposés par le cadre de gestion des ressources humaines. Ces agences ne sont plus soumises à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, ni à l'autorité directe de la Commission de la fonction publique en matière de nomination. Elles ne sont pas non plus soumises à l'autorité du Conseil du Trésor en tant qu'employeur.

9.48 Pour justifier la création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, on a soutenu que l'adoption du statut « d'agence » donnerait plus de latitude pour la gestion des ressources humaines. En créant la nouvelle agence, on a supprimé une part importante des activités de gestion des ressources humaines du « noyau » de la fonction publique. Ainsi, lors de l'exercice précédent (avant qu'il ne devienne une agence), Revenu Canada comptait près de 35 p. 100 de toutes les nominations, externes ou autres, dans le « noyau » de la fonction publique, en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

9.49 Il est donc resté un cadre complexe pour gérer beaucoup moins de personnes. Fait encore plus important, la création de ces nouvelles agences reflète la frustration ressentie à l'égard du régime actuel dans le « noyau » de la fonction publique et la difficulté d'y apporter des changements en profondeur, malgré un certain nombre d'initiatives bien intentionnées. Les agences jouissent d'une plus grande autonomie pour gérer leurs ressources humaines, mais des mesures correctives s'imposent toujours dans le « noyau » de la fonction publique.

9.50 Pressions en faveur du renouvellement de la fonction publique et du maintien en poste de l'effectif. Le gouvernement a besoin d'un régime de gestion des ressources humaines appuyé par un cadre souple et qui réponde aux pressions exercées dans la fonction publique et à l'évolution du marché du travail. Les gestionnaires de la fonction publique prennent un certain nombre de mesures en réponse à ces pressions, ce qui démontre l'importance d'aller de l'avant avec détermination pour apporter des améliorations essentielles.

9.51 Les fonctionnaires se sentent toutefois stressés et à bout, comme l'a montré clairement une étude réalisée en 1997 intitulée Les habitudes de travail, les conditions de travail et l'état de santé des cadres dans la fonction publique du Canada. Il s'agit là d'un groupe de leaders essentiels pour susciter le changement souhaité. L'étude a montré que les hauts fonctionnaires fédéraux travaillaient beaucoup plus d'heures par semaine (52,9 heures) que les membres des groupes de professionnels et de gestionnaires de la population en général (43,2 heures). De plus, ils prenaient généralement moins de jours de congés que le nombre de jours de congés annuels auxquels ils avaient droit. Ils prenaient généralement moins de la moitié de la moyenne annuelle des jours de congés de maladie pris par les fonctionnaires. L'étude a également révélé des niveaux de stress élevés au sein du groupe de hauts fonctionnaires, accompagnés souvent de maladies (voir la pièce 9.3). Ces résultats accentuent la crainte que de nombreux hauts fonctionnaires décident de prendre leur retraite plus tôt qu'ils ne l'auraient fait autrement.

9.52 Ces difficultés et d'autres ont amené le greffier du Conseil privé en 1997 à reconnaître, dans son rapport annuel au premier ministre, des signes des « malaises » dans la fonction publique. Avec l'aide de ses collègues sous-ministres, le Greffier a lancé une initiative de renouvellement de la fonction publique appelée La Relève. Toutefois, les résultats du sondage mené auprès des fonctionnaires fédéraux en 1999 confirment que, si les employés demeurent fortement dévoués à la fonction publique, ils continuent de se sentir à bout. Cinquante pour cent des répondants ont indiqué que la qualité de leur travail souffrait « toujours » ou « souvent » du fait qu'ils devaient effectuer le même travail ou plus de travail avec moins de ressources.

9.53 Le « noyau » de la fonction publique est de plus en plus « axé sur les connaissances ». Un éventail de facteurs - le progrès technologique et l'évolution du travail, la privatisation d'activités comme celles des aéroports, la fermeture de bases des Forces armées, l'évolution des secteurs d'activités et la réduction des effectifs - ont modifié considérablement le profil professionnel de la fonction publique.

9.54 Aujourd'hui, 55 p. 100 des fonctionnaires sont des « cols blancs » ou des travailleurs du savoir (ceux qui sont employés dans le Groupe de la direction, la catégorie scientifique et professionnelle et la catégorie de l'administration et du service extérieur). Cette situation est fort différente de celle d'il y a environ 15 ans, où les cols blancs constituaient à peu près le tiers de la fonction publique. Cette tendance devrait s'accentuer.

9.55 Une autre étude, réalisée en 1998 par plusieurs universitaires, (Le perfectionnement professionnel dans la fonction publique fédérale - Constituer un effectif de calibre mondial - le Rapport Duxbury), mettait l'accent sur la façon dont les travailleurs du savoir dans la fonction publique fédérale percevaient leurs perspectives de carrière. Environ 75 p. 100 des répondants ont dit avoir envisagé de quitter la fonction publique. Comme principaux motifs de frustration, ils citaient la lourdeur bureaucratique et une atmosphère de travail caractérisée par des conflits entre les groupes et de lourdes charges de travail (voir la pièce 9.4).

9.56 Un certain nombre de mesures ont été prises en réponse aux préoccupations croissantes au sujet du maintien en poste de l'effectif actuel. Mentionnons par exemple la création, en octobre 1999, du Sous-comité du CHF chargé du mieux-être en milieu de travail, présidé par le secrétaire du Conseil du Trésor, dont le mandat est d'établir une stratégie et un plan de travail à l'échelle fédérale pour assurer en priorité le maintien en poste des fonctionnaires. Le Secrétariat du Conseil du Trésor compte aussi s'appuyer sur les résultats du sondage auprès des fonctionnaires comme points de référence pour mesurer les progrès réalisés.

9.57 L'évolution démographique de la fonction publique laisse présager une crise du leadership. L'effectif de la fonction publique est non seulement beaucoup plus réduit qu'au cours de la dernière décennie, mais la moyenne d'âge des fonctionnaires est également beaucoup plus élevée, et un grand nombre d'entre-eux sont sur le point de prendre leur retraite.

9.58 En 1996, les sous-ministres considéraient la fonction publique comme une « institution à risque », en raison du taux prévu de départs à la retraite et des difficultés de maintenir l'effectif au niveau de la direction et des « groupes de relève » (le réservoir traditionnel de candidats pour les postes de direction). De hauts fonctionnaires reconnaissent que des problèmes importants existent déjà dans certaines professions, comme dans la collectivité de la réglementation et de l'inspection.

9.59 Les données du Conseil du Trésor montrent qu'à la suite de la réduction des effectifs, du recrutement limité et d'autres changements, le pourcentage des fonctionnaires âgés de 45 à 54 ans a augmenté, passant de moins de 24 p. 100 à plus de 39 p. 100, au cours des huit dernières années. Durant les 14 dernières années, leur proportion a presque doublé. La situation est à peu près la même dans toutes les catégories professionnelles, à l'exception du Groupe de la direction, où elle est bien pire. Près de 65 p. 100 des hauts fonctionnaires sont maintenant âgés de 45 à 54 ans, et 16 p. 100 d'entre eux ont plus de 54 ans.

9.60 On s'attend à ce que d'ici quelques années le nombre de fonctionnaires âgés présentement de 45 à 54 ans qui prendront leur retraite augmente de façon marquée. Des données de la Commission de la fonction publique révèlent que plus du tiers des hauts fonctionnaires seront admissibles à la retraite en 2002, selon le régime actuel (près de 40 p. 100 des sous-ministres adjoints). En janvier 1998, le Secrétariat du Conseil du Trésor estimait que 70 p. 100 des hauts fonctionnaires pourraient prendre leur retraite d'ici une dizaine d'années.

9.61 Les données sur les « groupes de relève » montrent que ce réservoir de candidats est également plus âgé en moyenne que l'effectif de la fonction publique et que les départs pourraient y être plus nombreux au cours de la décennie à venir. Il sera d'autant plus difficile de remplacer le grand nombre de hauts fonctionnaires qui quitteront la fonction publique. Des prévisions d'un organisme central montrent que :

  • dans le premier groupe de relève (niveaux supérieurs de quatre groupes professionnels de la catégorie de l'administration et du service extérieur), d'où sont issues plus de la moitié des personnes promues dans le Groupe de la direction, 56 p. 100 des employés sont âgés de 45 à 54 ans - 17 p. 100 de plus que la moyenne des fonctionnaires;
  • dans le deuxième groupe de relève (niveaux supérieurs de onze autres groupes professionnels), d'où sont issues près du quart des personnes nommées dans le Groupe de direction, 45 p. 100 des employés sont âgés de 45 à 54 ans - six pour cent de plus que la moyenne de la fonction publique.

9.62 Les jeunes sont sous-représentés dans la fonction publique actuelle. La main-d'oeuvre de la fonction publique est généralement plus âgée que la main-d'oeuvre canadienne en général. Le pourcentage des fonctionnaires âgés de moins de 35 ans représente à peu près la moitié de celui du même groupe d'âge dans la main-d'oeuvre canadienne. Le Secrétariat du Conseil du Trésor prévoit que cet écart s'élargira considérablement au cours de la prochaine décennie, à moins que des mesures spéciales ne soient prises.

9.63 Les préoccupations exprimées au sujet de l'incidence éventuelle de l'évolution démographique dans la fonction publique et de la faiblesse du recrutement (particulièrement de diplômés universitaires récents) ont suscité un intérêt accru pour celui-ci. La formation, l'automne dernier, d'un sous-comité du CHF, composé de sous-ministres et présidé et par le greffier du Conseil privé, reflète la priorité donnée à ce problème. L'objectif du sous-comité est « d'élaborer l'énoncé du problème, une stratégie fédérale et un plan d'action pour répondre aux besoins de recrutement... »

9.64 La fonction publique doit aussi relever de nouveaux défis en raison de l'évolution du marché du travail et du milieu de travail. La concurrence avec le secteur privé pour le personnel qualifié pose un défi grandissant depuis quelques années. Étant donné l'évolution démographique de la population active canadienne, on peut s'attendre à ce que le défi s'accroisse au cours des années à venir.

9.65 Le taux de croissance de la population active canadienne a diminué de près de la moitié depuis les années 1960. Le nombre de Canadiens du groupe d'âge où l'on entre généralement dans la population active (les Canadiens âgés entre 15 et 24 ans) a diminué de 28 p. 100 au cours des années 1980, selon une étude récente. En outre, les études et les compétences, souvent inadéquates, de nombreux chercheurs d'emploi ne correspondent pas aux besoins des postes vacants.

9.66 De plus, les travailleurs du savoir ont de nouvelles attentes à l'égard du milieu de travail. Bon nombre d'entre eux manifestent plus d'esprit d'entreprise et deviennent plus exigeants. Ils ont d'autres aspirations professionnelles et misent sur leur employabilité plutôt que sur la loyauté à un seul employeur pendant toute leur carrière. Ces travailleurs sont plus instruits, connaissent mieux les technologies et ont des intérêts culturels plus variés. Ils préfèrent aussi travailler au sein d'équipes autogérées.

9.67 Les milieux de travail évoluent rapidement pour répondre aux attentes des travailleurs du savoir. De nombreuses organisations s'éloignent des systèmes et des pratiques qui, comme ceux de la fonction publique, sont fondés surtout sur les postes. Elles adoptent des approches fondées sur la compétence, avec des équipes et des structures organisationnelles plus souples.

9.68 Plus du tiers des répondants au sondage effectué auprès des fonctionnaires en 1999 ont dit qu'ils n'avaient pas la possibilité d'acquérir ni d'appliquer les compétences dont ils avaient besoin pour améliorer leurs perspectives de carrière. Leurs superviseurs ou leurs ministères ne leur fournissaient pas le soutien nécessaire pour qu'ils puissent progresser dans leur carrière.

9.69 Pour relever les défis que posent le recrutement, le perfectionnement et le maintien de l'effectif, et veiller à ce qu'elle soit représentative de la population qu'elle dessert, la fonction publique doit être considérée comme un milieu de travail attrayant. Le régime d'emploi doit donc être souple et adaptable.

Certains pas ont été faits dans la bonne direction, mais une réforme plus vaste s'impose

9.70 Les tentatives de réformer le cadre de gestion des ressources humaines ont montré qu'il était difficile d'apporter des changements en profondeur. Nos discussions avec les hauts fonctionnaires attestent d'un vaste appui en faveur d'un changement du cadre législatif, particulièrement chez les spécialistes de la gestion des ressources humaines. Cependant, certaines personnes, notamment des sous-ministres, doutent de la faisabilité de poursuivre de telles réformes aussi fondamentales.

9.71 Les réformes ont progressé dans la bonne direction, mais il faut s'attaquer aux problèmes sous-jacents. Des mesures sont prises pour accroître l'efficience et améliorer les systèmes et les pratiques de gestion actuels, mais le cadre législatif et institutionnel qui les sous-tend limite les changements qui peuvent être apportés.

9.72 Cependant, dans le contexte actuel, les rôles et les responsabilités peuvent être précisés, et la transparence et l'obligation de rendre compte, améliorées. Si les systèmes de gestion sont plus transparents et que l'information communiquée à ce sujet est améliorée, le Parlement sera mieux en mesure d'examiner les progrès réalisés dans la réforme du régime de gestion des ressources humaines.

9.73 Certains domaines, comme la dotation, exigent des changements en profondeur - voire des changements législatifs. Des tels changements exigeront l'examen de tous les éléments du cadre législatif et du cadre stratégique directeur. Par exemple, des contraintes législatives et autres empêchent la Commission de la fonction publique d'introduire, sur une vaste échelle, le concept de la « nomination à un niveau déterminé », malgré les modifications législatives apportées en 1993.

9.74 Le passage d'un système de « nomination à un poste » à un système de « nomination à un niveau déterminé » avait été recommandé pour la première fois il y a plus de 25 ans. Les changements apportés en 1993 visaient à permettre l'adoption d'un tel système, un système qui offrirait une plus grande souplesse pour apparier les emplois et les personnes. Il devait permettre d'améliorer les perspectives d'avancement des employés et de doter les postes plus rapidement qu'à l'heure actuelle.

9.75 Toutefois, les changements de 1993 n'ont touché que les mécanismes de nomination. Ils n'ont pas influé sur les autres aspects de la gestion des ressources humaines qui sont fondés sur les postes, comme la classification des emplois et l'application de la Directive sur le réaménagement des effectifs. La Commission a reconnu que la nomination à un niveau déterminé ne pouvait être implantée sur une vaste échelle sans que des changements complets aient été apportés à ces aspects fondamentaux du régime de gestion des ressources humaines. Ces changements nécessiteraient des mesures législatives outre la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, et toucheraient des politiques soumises à la négociation collective ou exigeant la consultation du Conseil national mixte.

Les systèmes de gestion des ressources humaines sont lourds, coûteux et désuets

9.76 Les principaux systèmes de gestion des ressources humaines sont prescrits par le cadre législatif ou y sont étroitement liés. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique établit le régime de négociation collective (qui touche environ 85 p. 100 des employés du « noyau » de la fonction publique). Elle précise les questions qui sont exclues de la négociation, comme la classification des emplois et la dotation. Le système de dotation de la fonction publique est prescrit, dans une certaine mesure, par la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

9.77 Le système de classification des emplois utilisé depuis 1967 avait été conçu en grande partie pour servir de base à l'établissement des unités de négociation aux fins de la négociation collective. L'introduction de la nouvelle Norme générale de classification a entraîné nécessairement des modifications à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, modifications qui ont été apportées par la Loi sur la réforme de la fonction publique.

9.78 Les systèmes actuels sont trop complexes, inefficaces et doivent être réformés. Déjà, en 1983, le Bureau signalait que, selon les gestionnaires, les systèmes existants - particulièrement les systèmes de classification des emplois et de dotation - étaient les principales entraves à une gestion productive.

9.79 Ces systèmes sont très coûteux à administrer, comme l'a indiqué en 1990 le Livre blanc sur Fonction publique 2000. Il indiquait qu'en 1985, il fallait proportionnellement trois fois plus de personnes pour administrer le régime de gestion des ressources humaines dans la fonction publique que chez les principaux employeurs du secteur privé. Les réformes de la classification des emplois proposées alors visaient à obtenir « une réduction importante du nombre de classifications, d'activités de dotation et de rémunération, d'où la possibilité d'économies considérables. »

9.80 Les données préliminaires d'une étude comparative réalisée pour le compte du Secrétariat du Conseil du Trésor et qui sera publiée en l'an 2000 montrent que la fonction publique compte un professionnel de la gestion des ressources humaines pour 28 employés. Une source indique que la norme dans le secteur privé est d'environ un professionnel pour 100 employés. On soutient dans l'étude que le ratio plus élevé dans la fonction publique peut être attribué à la fois à la « structure de la fonction » et à ses interventions qui exigent beaucoup de personnel.

9.81 Malgré les importantes tentatives de réforme, ces systèmes continuent de poser des problèmes. En 1995, quand l'ampleur des changements rendus nécessaires par l'Examen des programmes est devenue évidente, les spécialistes de la fonction publique ont qualifié le régime de la gestion des ressources humaines de régime « massivement axé sur les contrôles... [et ayant] un caractère prescriptif. » Ils ont déclaré qu'il n'était « pas adapté sous les angles de la ponctualité et de l'économie et [qu'il était] de moins en moins efficace quand il [s'agissait] de relever les défis de l'heure. » Le rapport d'étape de La Relève de 1998 reflète le même point de vue. Il qualifie le système de classification des emplois de « lourd et compliqué [et indique qu'il] constitue ...un obstacle à l'avancement et à la mobilité du personnel ». Il indique aussi que le système de dotation « prend trop de temps, est trop rigide et trop axé sur les règles, et [qu'il] est une source de litiges. »

9.82 D'ici à ce que la nouvelle Norme générale de classification soit en place, le système de classification des emplois demeurera très complexe. Il comprend 72 groupes professionnels (106 sous-groupes), et une norme distincte d'évaluation des emplois pour chacun d'entre eux. Le système actuel n'est pas jugé équitable. Moins de la moitié des répondants au sondage de 1999 auprès des fonctionnaires fédéraux jugent que leur poste est classifié équitablement par rapport à celui d'autres personnes exécutant un travail semblable au sein de leur organisation ou ailleurs dans la fonction publique.

9.83 Le régime de la négociation collective ne fonctionne pas bien. Les droits relatifs à la négociation collective ont été modifiés ou suspendus pendant des périodes qui, ensemble, représentent plus de la moitié des deux décennies précédant 1997. Comme première étape de la mise en oeuvre de la Norme générale de classification, les groupes professionnels, restructurés à des fins de négociation collective, sont passés de 72 à 29. Selon le Secrétariat du Conseil du Trésor, cette mesure a eu un effet bénéfique à la table des négociations.

9.84 Le système de classification et le processus de négociation collective ont rendu les systèmes de dotation, de paye et d'avantages sociaux plus complexes. Il existe des normes de sélection pour chacun des divers groupes professionnels et des échelles salariales distinctes pour les divers niveaux de chaque groupe, ainsi que de nombreuses conditions propres à chacun des groupes.

9.85 Des pressions importantes sont exercées pour qu'il y ait changement. Le Secrétariat du Conseil du Trésor reconnaît que des changements substantiels au cadre de la négociation collective sont inévitables. Il a annoncé récemment la création d'un conseil consultatif, dirigé par un dirigeant syndical chevronné, qui a pour mandat d'examiner la négociation collective et de recommander des changements.

9.86 Les politiques des organismes centraux et des ministères ajoutent à la complexité administrative. Après 1967, de nouvelles dispositions législatives, qui se sont ajoutées au cadre de gestion des ressources humaines, ont accru les obligations des gestionnaires et des superviseurs. Les employés ont bénéficié de nouveaux mécanismes de recours et de plainte. Les ministères et organismes, liés par cette mesure, ont dû consacrer plus de temps au processus plutôt qu'aux questions d'importance stratégique.

9.87 Cependant, la majeure partie du fardeau administratif imposé aux ministères et organismes découle des politiques et des systèmes établis par le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique pour interpréter et appliquer la loi dans des domaines comme les langues officielles et la dotation. Ces politiques ne s'appliquent pas toujours aux autres entités du secteur public fédéral. Par conséquent, le fardeau - complexité, coût, délai - est plus lourd pour les gestionnaires du « noyau » de la fonction publique que pour ceux qui travaillent dans d'autres parties du secteur public fédéral.

9.88 Toutefois, diverses études ont souligné que les ministères et organismes ont eux-mêmes établi des politiques et des systèmes qu'ils considèrent nécessaires pour avoir l'assurance qu'ils respectent les exigences des organismes centraux. Ces politiques et systèmes sont jugés comme une contrainte additionnelle importante pour les gestionnaires et un facteur de la complexité et du coût de la gestion des ressources humaines.

Des pas dans la bonne direction

9.89 Pendant les années 1970 et 1980, le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique ont tenté d'assouplir les processus de gestion, et ce, afin de s'adapter à la taille et à la complexité croissantes de l'administration fédérale, aux pressions exercées pour améliorer l'efficience dans un environnement en constante évolution et à la volonté de régler les problèmes systémiques décelés par de nombreuses études. Lorsque le Secrétariat et la Commission se sont davantage mis à donner des directives et des orientations plutôt qu'à contrôler les opérations, ils ont délégué des pouvoirs importants en matière de classification des emplois et de dotation.

9.90 En 1999, le Secrétariat du Conseil du Trésor a publié le « Cadre pour une saine gestion des ressources humaines dans la fonction publique ». Ce cadre décrit une vision des ressources humaines et les éléments de base à l'appui de la vision - le leadership et un effectif qui reposent sur des valeurs, un effectif productif, un milieu de travail habilitant et un effectif durable. Le cadre renferme aussi des critères et des indicateurs de rendement ainsi que des sources d'information possibles sur chaque élément.

9.91 Parallèlement, la nature des mécanismes de surveillance, d'évaluation et d'examen et leur utilisation par les organismes centraux ont évolué. Au départ, les ministères investis de pouvoirs en matière de personnel étaient tenus de suivre des procédures complexes et de tenir des dossiers détaillés que le Secrétariat ou la Commission pouvaient examiner. Ces dernières années, le Conseil du Trésor s'est fié aux vérifications et aux examens menés par les ministères et dont ils avaient communiqué les résultats; la Commission, quant à elle, a commencé à faire de même.

9.92 Alors que l'approche du Conseil du Trésor en matière de gestion des ressources humaines évoluait et que la Commission poursuivait ses efforts pour réformer et accélérer le système de dotation, le rôle du Bureau du Conseil privé changeait également.

9.93 À la fin des années 1960, le Bureau du Conseil privé a commencé à mettre de plus en plus l'accent sur la coordination des politiques et à s'intéresser de plus près à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Au milieu des années 80, comme les études Lambert et D'Avignon n'avaient pas réussi à susciter de changements, le Bureau du Conseil privé a lancé une initiative visant à simplifier le système de dotation devenu complexe et légaliste.

9.94 Sous l'impulsion du greffier du Conseil privé, on a établi une approche plus collective de la gestion avec la participation du Comité des hauts fonctionnaires (CHF) et de ses sous-comités spéciaux. Cette approche a été adoptée au cours de la dernière décennie en réponse à l'évolution de l'environnement. Des pressions s'exerçaient pour que l'on s'éloigne des règles, que l'on s'oriente davantage vers les clients et les résultats, et que l'on optimise les ressources. On reconnaissait de plus en plus l'importance des ressources humaines pour l'atteinte des résultats et le fait que la réalisation des objectifs gouvernementaux dépendait, dans une grande mesure, de la résolution des problèmes de gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Cette approche reflétait aussi le fait que ces problèmes exigeaient des mesures dépassant la compétence d'une seule entité.

9.95 Dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a réitéré son intention au sujet de la fonction publique comme suit : « Le gouvernement mettra aussi l'accent sur le recrutement, le maintien en poste et l'apprentissage permanent à la fonction publique du Canada, afin qu'elle demeure forte, représentative, professionnelle, non partisane et capable de fournir aux Canadiens et aux Canadiennes les services de la plus haute qualité à l'orée du XXIe siècle. »

9.96 Tous les sous-ministres se sont investis davantage dans la gestion collective de la fonction publique. En 1989, par exemple, dix groupes de travail dirigés par des sous-ministres ont été créés dans la foulée de Fonction publique 2000 pour examiner la gestion des ressources humaines et d'autres questions du domaine. De plus, le Greffier a commencé à tenir des réunions hebdomadaires des sous-ministres pour discuter de questions clés concernant le gouvernement et la fonction publique. Plus récemment, un certain nombre de comités spéciaux ont examiné des questions comme les valeurs et l'éthique, la nécessité de renforcer la capacité de la fonction publique d'élaborer des politiques et divers modèles de prestation de services. Trois sous-comités du CHF, créés à l'automne de 1999, se penchent sur le recrutement, le mieux-être en milieu de travail, et l'apprentissage et le perfectionnement.

Le système de dotation : une importante source de frustration

9.97 Une loi normative et la jurisprudence en matière d'appel des nominations ont rendu le système de dotation plus rigide. La dotation est régie par la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP). La Loi confère à la Commission de la fonction publique le pouvoir de nommer des personnes dans le « noyau » de la fonction publique, personnes de la fonction publique ou d'ailleurs. Toutefois, elle lui permet de déléguer le pouvoir de dotation aux sous-ministres. Les sous-ministres ont, selon la Loi, le pouvoir de muter du personnel dans le cadre de mutations latérales.

9.98 La Loi est à la fois souple et normative. Sa souplesse vient des dispositions qui accordent un pouvoir discrétionnaire à la Commission de la fonction publique. Par exemple, la Commission peut demander au gouverneur en conseil un « décret d'exemption », en vertu duquel certaines mesures de dotation peuvent être soustraites à la Loi ou à certaines de ses dispositions.

9.99 Parallèlement, la Loi prescrit des exigences que le système de dotation doit respecter, comme celles qui ont trait à l'étude des demandes et à l'établissement des listes d'admissibilité. Le processus d'appel prévu par la Loi, qui exige que l'on tienne compte de « toute irrégularité » du processus, en est un autre exemple.

9.100 La jurisprudence en matière d'appel des nominations complique encore la dotation dans la fonction publique. Le processus d'appel se voulait un mécanisme administratif simple et efficace d'examen des nominations. Cependant, en 1971, la Cour fédérale a reçu le mandat d'examiner les décisions administratives de conseils et de certains autres organismes fédéraux, y compris les décisions prises en matière d'appel des nominations conformément aux dispositions de la LEFP.

9.101 Avec le temps, les jugements rendus par la Cour ont eu une incidence majeure. Depuis 1971, le processus d'appel est devenu quasi judiciaire, et maintenant le règlement des appels peut même s'avérer très long.

9.102 Malgré les modifications apportées à la LEFP en 1993 pour redonner à la Commission de la fonction publique son pouvoir discrétionnaire et d'autres pouvoirs - que les décisions de la Cour avaient progressivement restreint au fil des ans - ces jugements ont rendu tout le système de dotation beaucoup plus difficile à administrer. De nouvelles règles interprétées et appliquées de façon rigide en vue de minimiser le nombre d'appels ont rendu un processus de sélection déjà normatif encore plus lent et plus lourd. La pièce 9.5 illustre l'incidence d'une décision de la Cour.

9.103 Une réforme de la dotation s'impose. La plupart des mesures de dotation ont été déléguées aux sous-ministres et à leur personnel depuis près de deux décennies. En 1993, la Loi a conféré aux sous-ministres le pouvoir de muter du personnel. Pourtant, l'Examen consultatif de la dotation réalisé en 1996 pour la Commission de la fonction publique, et nos propres travaux, indiquent que les fonctionnaires sont frustrés par le système de dotation.

9.104 De nombreuses études, y compris celles effectuées par ou pour le compte de la Commission, ont recommandé des changements fondamentaux du système de dotation et du cadre législatif qui le régit (voir la pièce 9.6). De nombreuses initiatives, y compris les modifications législatives apportées en 1993, ont visé à améliorer le système.

9.105 Néanmoins, les gestionnaires de la fonction publique considèrent toujours le système de dotation comme un système indûment complexe, inefficace et peu souple. En outre, de nombreux employés craignent malgré tout que le système ne soit pas juste. Selon le sondage de 1999 auprès des fonctionnaires fédéraux, seulement 60 p. 100 des répondants croient que le processus de sélection est équitable dans leur unité de travail.

9.106 Un examen récent montre que le système de dotation dans le « noyau » de la fonction publique est lent par rapport à celui de certaines organisations quasi publiques, même si la plupart d'entre elles appliquent également le principe du mérite afin de nommer la personne la plus qualifiée. Il faut environ deux fois plus de temps, en moyenne, pour doter un poste dans le « noyau » de la fonction publique, malgré les nombreuses initiatives de la Commission de la fonction publique pour rationaliser et simplifier le système, et les nombreuses années d'efforts consentis par les ministères pour améliorer la gestion de la dotation.

9.107 L'examen montre qu'il faut 119 jours civils en moyenne pour mener à bien un concours interne dans le « noyau » de la fonction publique, sans compter le temps de traitement des appels. Pour un nouveau poste qui doit être classifié, la dotation exige 230 jours civils en moyenne - près de huit mois (voir la pièce 9.7).

9.108 On s'entend généralement sur la nécessité d'une réforme du système de dotation, et la Commission abonde dans le même sens. Les notions que voici recueillent aussi un large consensus : le système doit être davantage axé sur les valeurs et moins sur les règles; l'obligation de rendre compte du pouvoir discrétionnaire doit être claire, quel que soit le système; et les intérêts de toutes les parties concernées doivent être respectés.

9.109 L'Examen consultatif de la dotation laissait présager la nécessité de modifications législatives pour créer un système fondé sur les valeurs. Les auteurs ont proposé des lignes directrices qui s'appliqueraient à l'échelle nationale, mais qui seraient suffisamment souples et générales pour permettre aux ministères et aux régions d'établir divers niveaux de procédures répondant à leurs besoins et conditions.

9.110 La Commission de la fonction publique juge également souhaitable que le système de dotation soit moins axé sur les règles et davantage sur des valeurs communes. Cependant, elle croit que la Loi sur l'emploi dans la fonction publique est suffisamment souple pour permettre des aménagements dans cette voie. Selon elle, il faut définir les problèmes plus clairement avant de conclure à la nécessité d'une réforme législative. Au moment où nous avons réalisé notre étude, la Commission entreprenait une autre réforme de la dotation en réponse aux constatations et recommandations de l'Examen de 1996 et à d'autres pressions. Toutefois, certaines dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et d'autres lois limitent la mesure dans laquelle la Commission peut adapter le système de dotation.

9.111 Il est urgent de moderniser et de rationaliser le système de dotation et les mécanismes de recours dans la fonction publique.

Le rôle du greffier du Conseil privé dans la coordination des changements nécessaires

9.112 Le greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet est devenu visiblement le chef de file de la fonction publique, particulièrement au cours de la dernière décennie où il a obtenu, de par la loi, le titre de chef de la fonction publique.

9.113 En qualité de chef de la fonction publique, le Greffier est en mesure d'en évaluer les besoins et de rendre compte de son rendement. Le Greffier peut ouvertement, insuffler le leadership, élément essentiel au sein de toute organisation moderne où le moral des employés et l'engagement individuel sont cruciaux pour attirer et maintenir un effectif motivé.

9.114 Le rôle renforcé de chef de file du Greffier, ainsi que la responsabilité conférée par la loi de présenter un rapport annuel sur la fonction publique, sont des pas dans la bonne voie. Les sous-ministres que nous avons rencontrés ont reconnu que l'engagement accru du Greffier envers la gestion des ressources humaines avait été positif. Cela avait amené les sous-ministres à s'investir davantage et à mieux comprendre les problèmes.

9.115 Au cours des dernières années, le Greffier a consacré énormément de temps aux questions liées à la gestion des ressources humaines. Ainsi, l'initiative de renouvellement, La Relève, a été lancée pour s'attaquer à ce que le Greffier avait décrit en 1997 comme des « signes de malaise » dans la fonction publique.

9.116 La Relève exigeait que les ministères, les organismes centraux et d'autres organismes, y compris les spécialistes de la gestion des ressources humaines, élaborent des plans d'action pour le renouvellement de la fonction publique. Un comité de sous-ministres présidé par le Greffier a étudié ces plans. La pièce 9.8 montre quelques-uns des points qui ont fait l'objet d'un nouveau consensus. Ces plans sont importants et appuieront un changement positif, mais ils ne s'attaquent pas à certains problèmes structurels sous-jacents qui doivent être réglés.

9.117 Le Comité des hauts fonctionnaires (CHF) existe depuis de nombreuses années. Présidé par le Greffier, il comprend maintenant 12 sous-ministres, notamment le secrétaire du Conseil du Trésor et le président de la Commission de la fonction publique. Bien qu'au départ, son rôle ait été de conseiller le Greffier sur le choix des sous-ministres et sur leur rendement, son mandat en matière de gestion des ressources humaines a évolué considérablement.

9.118 Depuis les années 1980, le CHF conseille le Greffier sur le renouvellement de la fonction publique et sur un éventail de questions stratégiques liées à la gestion des ressources humaines. Ainsi, en 1987, on a chargé un sous-comité du CHF de cerner les valeurs de la fonction publique et de faire rapport à ce sujet. Plus récemment, on a confié à un sous-comité la charge d'étudier l'état de la collectivité des spécialistes en gestion des ressources humaines de la fonction publique. Parmi d'autres fonctions stratégiques, les membres du Comité veillent, ensemble, au choix et au perfectionnement des hauts fonctionnaires au niveau des sous-ministres adjoints. Le CHF est appuyé par le Bureau du Conseil privé, qui est doté d'un secrétariat restreint, chargé des priorités de gestion et du personnel supérieur. Ses sous-comités spéciaux, au nombre variant toujours entre cinq et sept, font appel au besoin à du personnel des organismes centraux et des ministères responsables.

9.119 De plus, au cours des deux dernières années, des sous-ministres « champions » ont été nommés et chargés d'examiner diverses questions essentielles et d'en rendre compte au CHF. Ces champions dirigent la recherche de solutions et présentent aux organismes centraux et au CHF les intérêts et les préoccupations de segments particuliers de l'effectif auprès desquels ils assurent un rôle soutenu de chef de file. Les champions se penchent, entre autres, sur la gestion des ressources humaines dans les collectivités suivantes : le personnel scientifique et technique de la fonction publique, les spécialistes en ressources humaines et le personnel de la réglementation et de l'inspection.

9.120 En fait, en tant que sous-ensemble de la collectivité des sous-ministres, le CHF est devenu un forum pour établir les grandes orientations en matière de gestion des ressources humaines. Il reflète l'approche collective de la gestion des ressources humaines dans l'administration fédérale. Cependant, la responsabilité et l'obligation de rendre compte de la rationalisation et de la simplification du régime existant - à savoir d'engager le Parlement à apporter les changements nécessaires à la structure de régie et aux systèmes et pratiques connexes - n'ont pas été établies clairement.

9.121 Le Secrétariat du Conseil du Trésor fait aussi appel à un comité consultatif supérieur, formé de sous-ministres (CCSCT). Ce comité veille à ce que le point de vue des ministères opérationnels soit considéré dans le traitement des questions de gestion des ressources humaines et des autres questions administratives soumises au Conseil du Trésor. Le Secrétaire du Conseil recourt au CCSCT comme à un organe consultatif au sujet de toutes les questions d'importance pour le Conseil du Trésor. Le CCSCT est actuellement composé de 12 sous-ministres, dont six sont également membres du CHF. Il est appuyé par les hauts fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor et le personnel responsable des aspects précis étudiés. Certaines questions ne sont soumises qu'au CCSCT ou au CHF; d'autres, aux deux comités ou aux réunions de tous les sous-ministres. Des hauts fonctionnaires ont indiqué que le CHF étudie les questions stratégiques liées aux ressources humaines, souvent plus vastes que les questions de gestion soumises au CCSCT.

9.122 Par conséquent, de nombreux comités supérieurs étudient différents aspects de la gestion des ressources humaines au gouvernement. Ces comités ont des membres et des cadres hiérarchiques différents, mais sont composés pour la plupart de sous-ministres. La structure de l'organisation globale et des comités supérieurs - la responsabilité « éparpillée » - complique l'étude des questions sous-jacentes d'obligation redditionnelle.

9.123 Les responsabilités dans la fonction publique sont divisées de plusieurs façons : entre les représentants élus et les fonctionnaires nommés, entre les organismes centraux, et entre les organismes centraux et les organisations responsables. Aucune organisation - ni le Secrétariat du Conseil du Trésor, ni le Bureau du Conseil privé, ni le CHF, ni le CCSCT, ni la Commission de la fonction publique - n'a la pleine responsabilité du cadre législatif et institutionnel qui régit la gestion des ressources humaines. De fait, au fil des ans, la responsabilité de la gestion des ressources humaines est devenue beaucoup plus complexe.

9.124 Un autre aspect dont aucun des intervenants n'est clairement ni entièrement responsable, et qui est par conséquent difficile à gérer, est le dynamisme de la collectivité des spécialistes de la gestion des ressources humaines. Fait reconnu : ce groupe a joué un rôle essentiel pour ce qui est de relever les grands défis de la gestion au cours de la dernière décennie.

9.125 Au cours des années 1960 et 1970, la Commission de la fonction publique et le Secrétariat du Conseil du Trésor ont géré activement ce groupe « d'administrateurs du personnel ». Au fur et à mesure que les ministères ont assumé une plus grande responsabilité à cet égard, leur rôle a commencé à changer.

9.126 Jusqu'au début des années 1990 à tout le moins, il était largement admis qu'il fallait une approche plus stratégique pour régler des problèmes connus relatifs aux compétences et à l'expérience de bon nombre des membres de ce groupe et à leur capacité générale. Pourtant, il y a toujours lieu de s'inquiéter du fait que les mesures nécessaires n'ont pas été prises. Régler ces problèmes est devenu prioritaire pour la fonction publique.

9.127 La responsabilité et l'obligation de rendre compte des changements nécessaires pour simplifier, rationaliser et renforcer le régime actuel de gestion des ressources humaines doivent être attribuées clairement et appuyées adéquatement. Cela revêt une importance particulière dans les domaines où la responsabilité est divisée.

Le rôle du sous-ministre dans la gestion du ministère

9.128 Certains ministères sont très gros. Par exemple, Développement des ressources humaines Canada compte environ 23 000 employés. Étant donné la taille, la complexité et la diversité de la fonction publique, le régime de gestion a évolué de telle sorte que l'on s'attend à ce que les ministères gèrent maintenant leurs propres employés. Ils doivent alors travailler conformément au cadre législatif et à celui des politiques des organismes centraux. Pourtant, la loi ne confère au sous-ministre que très peu de pouvoirs en matière de gestion des ressources humaines (autre que le pouvoir de muter le personnel depuis 1993). Le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique délèguent plutôt les responsabilités propres à des fonctions précises aux sous-ministres qui, à leur tour, délèguent à leurs subalternes des responsabilités en matière de gestion des ressources humaines. L'éventail des responsabilités de la direction des ministères au chapitre de la gestion des ressources humaines comprend le recrutement, la rémunération, la mutation, le perfectionnement, la motivation, la promotion et la gestion des relations. Des politiques des organismes centraux régissent la plupart de ces questions et ces organismes ont un rôle à jouer.

9.129 On s'entend généralement pour dire qu'il vaut mieux assurer certaines fonctions de la gestion des ressources humaines au niveau collectif; par exemple, la négociation collective, la conception des systèmes d'évaluation des emplois et la gestion des nominations à l'entrée dans la fonction publique et dans le Groupe de la direction. Par ailleurs, on s'accorde pour dire aussi que la plupart des activités liées aux ressources humaines devraient être menées dans les ministères et que la participation des organismes centraux devrait être réduite le plus possible et fondée sur des besoins évidents. Certains hauts fonctionnaires soutiennent que les ministères devraient être responsables de certains aspects de la négociation collective.

9.130 L'approche de la gestion et du contrôle centraux qui existait a évolué considérablement au cours des trois dernières décennies. Les organismes centraux ont débattu au fil des ans de la façon dont les fonctions déléguées aux ministères devraient être surveillées et contrôlées et des modalités de reddition de comptes. Cela continue d'être un point litigieux - la dotation n'est qu'un exemple parmi d'autres.

9.131 Les sous-ministres eux-mêmes reconnaissent la nécessité d'attacher une plus grande importance à la gestion des ressources humaines. En 1998, un sous-comité du CHF a souligné le rôle primordial des sous-ministres dans la promotion des changements nécessaires à la philosophie de gestion. Le sous-comité avait indiqué que les sous-ministres devaient appliquer ce qu'ils prêchent et assumer un leadership responsable, accorder une attention soutenue à la gestion des ressources humaines et tenir leurs gestionnaires responsables de leur rendement à ce chapitre. La responsabilité et l'obligation de rendre compte des sous-ministres à l'égard des nombreux aspects de cette gestion demeurent vagues et indirectes.

9.132 Les préoccupations au sujet de la reddition de comptes ne sont pas nouvelles. Pour les apaiser, il faut clarifier toute l'étendue de la responsabilité des sous-ministres quant à la « santé » de leurs organisations. Il est possible de fonctionner par délégation de responsabilités, mais la reddition de comptes à l'égard de ces responsabilités et la capacité du ministère d'obtenir constamment les résultats souhaités doivent être démontrées de façon cohérente et avec la transparence voulue. Comme l'indiquait, en 1990, le Livre blanc sur Fonction publique 2000, la fonction publique dans son ensemble dépend d'une reddition de comptes efficace, appliquée de façon cohérente aux sous-ministres. Il y était précisé que « L'obligation de rendre efficacement compte... a tout simplement été le chaînon manquant... et [que] bon nombre des mesures de responsabilisation [nécessaires], bien qu'existant déjà plus ou moins actuellement, sont toutefois appliquées indifféremment... » et l'on enchaînait : « La responsabilité véritable dans l'ensemble de la fonction publique... dépend très largement de la responsabilité des sous-ministres... ».

9.133 Au cours de la dernière décennie, le gouvernement fédéral s'est efforcé de mettre davantage l'accent sur les résultats et d'améliorer la gestion et le processus d'appréciation du rendement des sous-ministres. Cela voulait dire répondre à une préoccupation des sous-ministres, à savoir que, dans l'appréciation de leur rendement, l'importance donnée à la gestion des ressources humaines, particulièrement à des questions comme le moral du personnel, n'était pas claire. On a donné des directives aux sous-ministres au sujet de La Relève et, selon des fonctionnaires, on a amélioré les ententes de rendement et les cadres redditionnels. On s'est également efforcé de renforcer le processus d'appréciation du rendement des gestionnaires aux niveaux inférieurs.

9.134 Au cours des trois dernières années, le renouvellement de la fonction publique est devenu prioritaire pour les sous-ministres. Comme nous l'avons indiqué, ils appuient l'accent mis depuis peu sur le renouvellement de la fonction publique et la gestion des ressources humaines. Selon eux, leur participation accrue a enrichi considérablement leur connaissance des problèmes à régler pour que les objectifs du gouvernement puissent être atteints.

9.135 Cependant, changer la culture de gestion et corriger d'autres faiblesses dans la gestion des ressources humaines exigeront une vision à long terme et un engagement soutenu. Il sera plus difficile d'y parvenir vu l'important taux de roulement chez les sous-ministres. Sur les 28 sous-ministres qui ont signé le document de La Relève, Un parti pris pour l'action, en octobre 1997, 16 seulement étaient toujours en fonction en décembre 1999, et trois d'entre eux dirigeaient d'autres organisations.

9.136 L'excellence dans la gestion des ressources humaines doit demeurer une priorité dans la fonction publique et s'appuyer sur une structure cohérente et clairement définie. La planification des ressources humaines doit constituer l'un des principaux éléments des plans d'activités des ministères. L'obligation de rendre compte doit être réelle pour que les changements nécessaires puissent être menés à bien dans les rangs de la direction et des superviseurs.

9.137 Le rôle des sous-ministres doit évoluer énormément pour que l'on cesse véritablement de s'appuyer sur un système où les sous-ministres ne sont responsables, essentiellement, que de l'administration d'un cadre prescrit par les organismes centraux. Les sous-ministres doivent être perçus comme les premiers responsables de l'élaboration et du maintien d'un milieu de travail sain dans leur ministère. Pour ce faire, ils doivent faire de la gestion des ressources humaines une partie intégrante de la planification du ministère; de plus, leur rendement à cet égard doit être évalué.

9.138 La philosophie sous-jacente devrait donner aux sous-ministres le pouvoir d'agir avec toute la latitude voulue dans tous les domaines, sauf dans les cas où les organismes centraux choisissent de prescrire la politique, et ces cas doivent être limités au minimum essentiel. Il est crucial que soient clairement précisées les nouvelles responsabilités et l'obligation redditionnelle des sous-ministres.

9.139 Les responsabilités des sous-ministres à l'égard de la gestion des ressources humaines, comme dirigeants des grandes organisations du gouvernement, doivent être énoncées officiellement dans le contexte de leur responsabilité globale de gestion. Les sous-ministres doivent clairement avoir à rendre compte de la façon dont leurs ministères respectifs s'acquittent de ces responsabilités.

Le rôle de la Commission de la fonction publique

9.140 La Commission de la fonction publique est un mandataire du Parlement, indépendant du Cabinet, qui doit rendre compte directement au Parlement. La Commission possède le pouvoir législatif exclusif de « nommer » des personnes, de la fonction publique ou d'ailleurs, au sein de la fonction publique, et les responsabilités connexes à l'égard des mécanismes de recours. Elle a également des responsabilités au chapitre de la formation et de l'équité en matière d'emploi et s'occupe d'autres affaires qui lui sont confiées par le Conseil du Trésor ou par le gouverneur en conseil.

9.141 Le rôle que doit jouer la Commission de la fonction publique a fait l'objet d'un grand nombre d'études, particulièrement au sujet de sa relation avec le Conseil du Trésor en qualité d'employeur. Ainsi, la Commission Glassco avait recommandé fortement que son rôle en matière de dotation soit limité à la certification des nominations initiales. De même, la Commission Lambert et le Comité D'Avignon ont soutenu que la responsabilité de la dotation devrait être confiée à l'« employeur » et aux ministères. Le Comité D'Avignon a proposé que la Commission de la fonction publique agisse comme vérificateur du Parlement, non seulement pour les mesures de dotation, mais pour toute la gestion globale des ressources humaines.

9.142 Toutefois, le gouvernement n'a pas accepté ces changements. La Commission de la fonction publique continue d'exercer ses multiples responsabilités : en tant que mandataire du Parlement, elle doit maintenir une fonction publique professionnelle et impartiale; en tant qu'organisme central du gouvernement, il lui faut aussi assurer la formation et d'autres questions; en tant qu'organisme de prestation de services, elle est tenue d'offrir des services et expertise et d'assurer une présence dans les régions.

9.143 Depuis l'adoption de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, la Commission a délégué aux sous-ministres la plupart des mesures de dotation. De plus, elle s'est efforcée de rendre le système de dotation plus efficace et s'est attaquée aux problèmes au fur et à mesure qu'ils se sont présentés, tout en maintenant le principe du mérite. Malgré ces efforts, y compris les réformes législatives de 1993, l'insatisfaction à l'égard du système de dotation persiste. En réponse à cette insatisfaction et à d'autres préoccupations, la Commission a amorcé en 1996 des consultations avec les parties intéressées et entrepris de nouvelles réformes qui, selon des fonctionnaires, comprennent le renforcement de la reddition de comptes.

9.144 Ses consultations ont amené la Commission à proposer de se retirer des divers secteurs d'activités qui n'étaient pas essentiels à son mandat principal, qui est de protéger le principe du mérite. Elle proposait de déléguer de nouvelles responsabilités aux ministères au cours d'une période convenue avec chacun des sous-ministres et de mettre l'accent sur les divers aspects de sa responsabilité de surveillance. La Commission a fait valoir qu'elle pouvait se trouver en conflit d'intérêts, car elle « se retrouve de plus en plus aux mêmes tables où siègent également les personnes qui prennent des décisions de dotation qu'elle pourrait être appelée à juger, à examiner ou à vérifier. » Par conséquent, « c'est une question de principe, la CFP ne peut surveiller de façon optimale l'exercice des pouvoirs qu'elle a délégués tout en étant partie intégrante du système d'administration de programmes. »

9.145 En 1999, après avoir consulté les sous-ministres, les syndicats et les autres parties intéressées au sujet de ses propositions, la Commission a fait état d'un large consensus sur l'importance du mérite comme valeur fondamentale à protéger et sur le « statut unique et l'indépendance essentielle » de la Commission. La question de savoir comment le rôle de surveillance exercé par la Commission serait modifié et si son rôle opérationnel serait limité devait faire l'objet de plus amples études. Selon la Commission, le consensus veut qu'elle ne doit pas se retirer entièrement de son rôle opérationnel pour le moment.

9.146 Il est essentiel que la Commission, comme mandataire indépendant du Parlement, discute avec les parlementaires de tout changement de rôle qu'elle pourrait juger nécessaire. Pour ce faire, la Commission a exposé ses propositions dans son rapport annuel de 1998-1999. En décembre 1999, elle a lancé le débat en écrivant aux greffiers du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales de la Chambre des communes et du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Aucun dialogue n'a encore été instauré.

9.147 Dans ses rapports au Parlement, la Commission doit faire état de son rendement dans l'exécution de ses responsabilités, particulièrement celles qui sont exécutées directement pour le Parlement. Les rapports de la Commission ne renferment pas assez d'information ni sur les activités qu'elle mène pour assurer la protection du principe du mérite, ni sur ses plans et ses attentes, ni sur la mesure dans laquelle la fonction publique et chacune des entités respectent les dispositions et les principes de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Les rapports de la Commission contiennent souvent de l'information qui, même si elle est utile, porte moins sur son mandat principal que sur de grandes questions liées à la gestion des ressources humaines.

9.148 Une fonction publique fondée sur le principe du mérite semble jouir d'un vaste appui, et l'on s'accorde également sur le rôle vital que la Commission de la fonction publique doit jouer pour protéger ce principe. La Commission doit indiquer clairement comment elle y parvient de sorte que le Parlement puisse avoir l'assurance nécessaire que ce principe du mérite est protégé. De plus, il reste toujours à déterminer la mesure dans laquelle la Commission devrait jouer un rôle opérationnel ou assurer la prestation de services qui ne sont pas essentiels à la protection de ce principe.

9.149 Dans le dialogue avec le Parlement, il sera important de discuter de la nécessité d'une réforme législative de la dotation. On s'entend généralement pour dire que le système existant est trop complexe et inefficace. Les fonctionnaires favorisent largement, avec l'appui de la Commission, un système de dotation qui serait fondé davantage sur les valeurs et moins lié par des règles et procédures - un système où les sous-ministres et leurs gestionnaires exerceraient plus de pouvoirs et seraient plus clairement responsables de leur rendement. La Commission a d'ailleurs commencé à faire appel aux ministères pour l'élaboration d'un tel système.

9.150 La Commission de la fonction publique doit engager un dialogue avec le Parlement sur les changements qu'elle souhaite apporter à ses activités et sur la façon de s'acquitter de ses responsabilités pour assurer la protection du principe du mérite. Ce dialogue devrait porter aussi sur une réforme législative de la dotation. La Commission doit améliorer l'information communiquée sur le rendement des ministères quant au respect des dispositions et des principes de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Le rôle du Conseil du Trésor et de son secrétariat

9.151 Sur le plan juridique, le Conseil du Trésor est le principal responsable de la gestion du « noyau » de la fonction publique. En matière de gestion des ressources humaines, il possède presque tous les pouvoirs législatifs, à l'exception notable des pouvoirs conférés à la Commission de la fonction publique. Pour s'adapter à une évolution importante et de plus en plus rapide et pour tenir compte du besoin accru de souplesse dans la gestion des ministères, le Conseil du Trésor et son secrétariat se sont éloignés de la philosophie du « pouvoir hiérarchique et du contrôle » et des contrôles centraux détaillés.

9.152 L'accent accru mis par le Conseil du Trésor sur la « gestion axée sur les résultats » et son nouveau rôle plus stratégique l'ont amené à déléguer davantage des responsabilités aux sous-ministres et à rationaliser les politiques et les systèmes. Le Conseil a également réduit son contrôle sur les activités ministérielles en adoptant, plutôt que des règles, de vastes lignes directrices. Pour prendre ses décisions, il met davantage l'accent sur le milieu de fonctionnement propre à chaque ministère. Le Conseil vise à offrir un cadre de gestion commun, suffisamment souple pour répondre aux besoins particuliers de chacun des ministères et organismes du « noyau » de la fonction publique.

9.153 Les changements dans les contrôles centraux font que le Conseil du Trésor et son secrétariat possèdent beaucoup moins d'information détaillée au sujet du rendement des ministères. Au fil du temps, il leur est devenu de plus en plus difficile de surveiller ce rendement et de communiquer de l'information au Parlement sur les nombreuses questions administratives dont ils sont responsables en vertu de la loi. Par conséquent, ils se fient de plus en plus aux autoévaluations du rendement effectuées par les ministères.

9.154 Selon les dispositions actuelles, bien qu'ils aient délégué certains pouvoirs aux sous-ministres et aux administrateurs généraux, le Conseil et son secrétariat sont chargés de veiller à ce que les sous-ministres rendent compte de la façon dont ils exercent ces pouvoirs.

9.155 Le Conseil et son secrétariat doivent rendre compte du fonctionnement global du régime. Le Conseil conserve le pouvoir d'établir des politiques en matière de gestion du personnel. À titre d'employeur responsable du « noyau » de la fonction publique, il négocie avec les syndicats de la fonction publique par l'entremise de son secrétariat. Par conséquent, le Conseil doit rendre compte de l'efficacité du cadre de gestion global et des politiques et systèmes particuliers ainsi que des dispositions des conventions collectives qu'il approuve.

9.156 Les rapports sur le rendement communiqués au Parlement tant par le Secrétariat du Conseil du Trésor que par les ministères fournissent très peu d'information sur la façon dont ils s'acquittent de leurs responsabilités en matière de gestion des ressources humaines. Ces rapports ne contiennent que peu d'information sur leurs attentes pour l'année à venir et, par la suite, sur leurs réalisations.

9.157 Le Conseil du Trésor doit améliorer l'information qu'il communique au Parlement sur les questions dont il est responsable au chapitre de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. De plus, il faut préciser la responsabilité des sous-ministres quant à l'information communiquée sur la qualité et l'efficacité de la gestion des ressources humaines de leurs ministères.

Conclusion

9.158 Nous avons entrepris cette étude afin de déterminer les changements aux rôles et responsabilités et aux mécanismes redditionnels connexes dans la gestion des ressources humaines qui sont nécessaires pour améliorer la capacité de la fonction publique dans un environnement qui évolue rapidement. Nous voulions également informer le Parlement des progrès réalisés pour régler les questions persistantes quant à l'efficacité du cadre régissant la gestion des ressources humaines dans le « noyau » de la fonction publique.

9.159 Une fonction publique efficiente et efficace est essentielle au bien-être de la nation. La fonction publique du Canada fait face à de fortes pressions et à des défis importants en matière de gestion des ressources humaines, entre autres l'évolution de la population active et l'accroissement de la concurrence pour les travailleurs qualifiés. Une action visant à assurer le maintien d'une institution saine et forte pouvant répondre aux besoins du Canada et des Canadiens est d'une importance primordiale.

9.160 Les mesures pour éliminer ces pressions devront porter sur quelques-uns des problèmes de longue date du régime lourd et complexe de gestion des ressources humaines. Il faut un système souple et adaptable qui favorise et assure l'amélioration continue.

9.161 La fonction publique a réussi à se serrer les coudes en période de crise, comme celle de la réduction des effectifs au cours de la deuxième moitié des années 1990, pour obtenir les résultats souhaités par le gouvernement. Mais cela ne masque pas l'inefficience fondamentale du système, ou le fait que des tensions de longue date persistent et nuisent à la rationalisation et à la modernisation efficaces du régime, lesquelles permettraient une adaptation constante de ce dernier.

9.162 Le cadre législatif et institutionnel qui régit la gestion des ressources humaines est devenu plus complexe, tout en conservant la plupart des caractéristiques essentielles établies dans les années 1960. Les changements apportés au cadre administratif n'ont pas suivi le rythme de l'ample évolution du milieu de travail et de l'effectif, ni des exigences organisationnelles. Au cours des dernières décennies, de nombreuses études ont fait état de la nécessité d'apporter des changements fondamentaux au régime de gestion des ressources humaines. Bon nombre des problèmes relevés par ces études ne sont toujours pas réglés, malgré les efforts considérables déployés par les fonctionnaires. Bien que le « noyau » de la fonction publique soit beaucoup plus petit, le poids et la complexité du régime de gestion des ressources humaines ne sont pas moindres qu'auparavant.

9.163 Le moment est propice pour intervenir maintenant, alors que la fonction publique commence à recruter et à former une nouvelle génération de fonctionnaires en prévision du nombre important de retraites prévues au cours de la décennie. Il est urgent de régler rapidement certains des problèmes structurels et systémiques de longue date. Il faut s'attaquer en priorité à la réforme de la dotation, qui est beaucoup trop lente et lourde et qui ne répond pas du tout aux nouvelles réalités.

9.164 Les responsabilités dans le « noyau » de la fonction publique ont évolué considérablement. Plus particulièrement, la délégation de pouvoirs aux sous-ministres a augmenté considérablement et la gestion des ressources humaines fait appel à une approche plus collective sous la direction du greffier du Conseil privé. Si l'on veut que cette approche se révèle efficace pour surmonter les difficultés historiques, il est essentiel que les responsabilités soient clairement attribuées, que des ressources appropriées et des structures et des pratiques d'appui rationalisées soient mises en place et que l'on rende pleinement compte des résultats. Il est essentiel aussi que les sous-ministres soient clairement responsables de la gestion des ressources humaines - si l'on veut avoir un milieu de travail sain et une main-d'oeuvre hautement compétente. Ainsi, les gestionnaires et les superviseurs à tous les niveaux pourront mieux rendre compte de leur planification, de leurs décisions et de leurs actions. Un engagement à long terme s'impose afin de favoriser un changement nécessaire de la culture de gestion.

9.165 L'information communiquée au Parlement sur le rendement de la gestion des ressources humaines doit être améliorée considérablement. Pour exercer son intendance sur cet aspect des activités gouvernementales, le Parlement doit obtenir de l'information de meilleure qualité sur le rendement des systèmes et sur la façon dont les hauts fonctionnaires s'acquittent de leurs responsabilités. Il est urgent que le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique améliorent l'information communiquée au Parlement sur leurs responsabilités respectives en matière de gestion des ressources humaines.

9.166 La Commission de la fonction publique a entrepris un certain nombre d'examens pour déterminer comment elle peut s'acquitter de son mandat plus efficacement. Une partie importante de celui-ci exige qu'elle agisse au nom du Parlement pour assurer la protection d'un système impartial fondé sur le mérite dans la fonction publique. La Commission doit instaurer un dialogue avec le Parlement sur la façon d'équilibrer ses différentes responsabilités et sur la question de savoir s'il est souhaitable de modifier son rôle.

9.167 Le gouvernement doit simplifier le cadre législatif et administratif de gestion des ressources humaines, accroître la transparence des activités du régime et inciter le Parlement à apporter les changements nécessaires.

Réponse du gouvernement : Nous convenons de l'importance que revêt l'existence d'un cadre solide de gestion des ressources humaines, et de l'attention portée par le vérificateur général sur le sujet. Comme il l'a lui-même indiqué dans son chapitre, le gouvernement du Canada a reconnu, dans le discours du Trône d'octobre 1999, la nécessité d'une fonction publique saine qui sera en mesure d'offrir aux Canadiens et Canadiennes une meilleure qualité de vie.

Nous sommes beaucoup plus optimistes que le Vérificateur général en ce qui a trait, par exemple, à la responsabilisation individuelle aussi bien que collective des sous-ministres, aux progrès accomplis au chapitre de la réforme de la dotation, ainsi qu'à la flexibilité inhérente au cadre législatif actuel. Plusieurs initiatives récentes - la classification simplifiée des postes et le sondage mené auprès de tous les fonctionnaires, pour ne donner que ces deux exemples - ont réellement contribué à « moderniser » la gestion des ressources humaines sans pour autant qu'il faille modifier la législation. En outre, les Sous-comités du CHF sur le recrutement, le bien-être en milieu de travail et l'apprentissage et le développement travaillent actuellement à identifier des actions et des domaines spécifiques où des progrès peuvent être faits à court, à moyen et à long termes.

Veiller à ce que la fonction publique réponde toujours aux besoins des Canadiens et Canadiennes constitue pour nous un défi de tous les jours en même temps qu'un objectif à poursuivre toutes les fois que nous procédons à une évaluation de nos systèmes de gestion des ressources humaines. Il est encourageant de constater que le Vérificateur général est conscient de ce défi.

Réponse complémentaire de la Commission de la fonction publique : En outre, la CFP aimerait souligner que, pour que les Canadiens et les Canadiennes aient confiance en la compétence, la représentativité et l'impartialité de leur fonction publique, il faut garantir un standard élevé de transparence et d'équité au regard des processus de dotation. Ainsi, bien qu'elle soit sans aucun doute importante, l'efficience fait partie d'un éventail plus grand de valeurs. De notre côté, nous cherchons à renforcer le système de dotation en mettant l'accent sur les valeurs qui sous-tendent les règles. Pour ce faire, nous avons tiré profit de consultations avec plusieurs intervenants importants, y compris les représentants du personnel, et nous avons fait part de notre désir d'entamer un dialogue avec le Parlement.

À propos de l'étude

Objectif

L'objectif de l'étude était de cerner les problèmes liés aux rôles, aux responsabilités et aux mécanismes redditionnels de la gestion des ressources humaines, et les changements nécessaires pour améliorer la capacité actuelle et future de la fonction publique de répondre aux besoins des ministres et de la population canadienne dans un environnement qui évolue rapidement.

Étendue

Cette étude a porté sur le régime de gestion des ressources humaines de la partie du secteur public fédéral appelée « noyau » de la fonction publique, dont le Conseil du Trésor, au nom du gouvernement, est l'employeur. Le noyau comprend 20 ministères et quelque 60 organismes qui sont également soumis à l'autorité de la Commission de la fonction publique.

Nous avons mis l'accent sur les structures qui régissent la gestion des ressources humaines - à savoir le cadre législatif et les rôles et les responsabilités des principaux intervenants comme le Conseil du Trésor et son secrétariat, la Commission de la fonction publique et les ministères responsables.

Les organisations du secteur public fédéral exclues de l'étude sont les « employeurs distincts », en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, les militaires et les sociétés d'État. L'étude n'a pas porté sur l'interaction entre « l'employeur » et la direction, et les syndicats de la fonction publique.

Pour effectuer cette étude, nous avons fait un examen approfondi de la documentation et nous nous sommes appuyés sur des travaux précédents du Bureau. Nous avons mené des entrevues et discuté avec des sous-ministres et d'autres hauts fonctionnaires, y compris les dirigeants des ressources humaines de grands ministères. Nous avons aussi interviewé d'anciens hauts fonctionnaires.

Équipe de l'étude

Vérificatrice générale adjointe : Maria Barrados
Directeur principal : John Holmes

Claude Brunette
Ernie Glaude
Jacques Maziade
Denis Poirier

Pour obtenir de l'information, veuillez communiquer avec M. John Holmes.