Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien

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Introduction

11.1 La Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, adoptée en 1970, définit l'étendue des responsabilités du ministère. Ce dernier assure l'application de cette loi et de 40 autres lois du Parlement. Selon l'énoncé des rôles et des responsabilités que l'on retrouve dans la Partie III du Budget des dépenses de 1985-1986, le ministère :

11.2 En décembre 1984, il y avait 581 bandes indiennes au Canada et environ 349 000 Indiens inscrits. La plupart des bandes indiennes installées au sud du 60e parallèle se trouvent dans des réserves. Au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, seul un petit nombre d'Indiens vivent dans des réserves. Il y a 2 254 parcelles de terre ayant ce statut de réserve au Canada, qui ont une superficie totale de 2,6 millions d'hectares (6,5 millions d'acres). Il y a, au Canada, environ 25 400 Inuit regroupés en quelque 50 collectivités. Des facteurs géographiques, culturels et autres font que les collectivités indiennes offrent un éventail de buts, de talents et de priorités très divers. L'action du ministère s'inscrit donc dans un contexte à la fois complexe et délicat à cause de la formulation, par des groupes clients différents, d'une vaste gamme de demandes divergentes. (Voir les pièces 11.1 et 11.2.)

(Ces pièces ne sont pas disponibles)

La vérification intégrée de 1980

11.3 Nous avons examiné, au cours de notre première vérification intégrée du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC), en 1980, les systèmes de planification et de contrôle qui appuyaient la gestion financière, la gestion du personnel et la gestion des programmes. Les principales recommandations que présentait le rapport des vérificateurs portaient sur le mandat et le rôle du ministère en ce qui a trait à la gestion des fonds des bandes indiennes et des fonds destinés aux jeunes Indiens.

11.4 Mandat. Le mandat du ministère n'était pas clair. Les rapports qu'il devait entretenir avec les Indiens et les Inuit demeuraient, par conséquent, trop imprécis pour circonscrire ce dont le MAINC était responsable devant le Parlement. Le ministère, en particulier, ne savait pas s'il lui incombait d'améliorer la situation sociale et économique des autochtones ou s'il avait simplement pour rôle d'assurer une juste répartition de l'aide financière entre divers groupes d'autochtones qui poursuivent des objectifs qui leur sont propres. Ces deux orientations présentent de grandes différences et, à notre avis, ce point devait être éclairci avant que le ministère ne se dote des mécanismes qui lui permettent de rendre compte de ses activités. L'évaluation du respect du mandat reposerait, par conséquent, sur des données très différentes dans l'un ou l'autre cas.

11.5 Le Comité permanent des comptes publics, dans son Sixième rapport (23 juin 1981) à la Chambre des communes, a recommandé que le ministère prenne les mesures nécessaires pour préciser son mandat, compte tenu notamment de l'absence d'objectifs, de plans ou de buts précis en regard desquels pourraient être évaluées ses réalisations.

11.6 Le ministère, en mai 1985, avisait le président du Comité permanent des comptes publics que le ministre avait ordonné une révision en profondeur du mandat de son ministère, des moyens qui servent à sa mise en oeuvre, ainsi que des rapports du ministère avec les Indiens.

11.7 Contributions versées aux bandes indiennes. Nous avons signalé au Parlement, en 1980, que le ministère n'avait pas la certitude que les contributions versées aux bandes indiennes avaient été utilisées aux fins pour lesquelles elles avaient été versées, comme l'exige le Conseil du Trésor. Le ministère a répondu que les mécanismes de contrôle requis pour respecter les exigences du Conseil du Trésor allaient peut-être au-delà des possibilités administratives de plusieurs bandes. Il a amorcé des négociations avec le Conseil du Trésor afin de mettre au point un système d'obligation de rendre compte du respect de son mandat, qui conviendrait mieux aux Indiens et au gouvernement. Au moment où nous étions à rédiger le présent rapport, il y avait négociation d'une autre "convention de financement" avec le Conseil du Trésor. L'objectif de cette convention est de mettre en place un nouvel ensemble de mécanismes qui permettrait aux collectivités indiennes de prendre en charge les fonds octroyés et de rendre compte de leur utilisation. Les contributions aux bandes indiennes, en 1986-1987, totaliseront plus d'un milliard de dollars, mais le ministère n'a cependant pas encore établi un système approprié de contrôle des contributions.

Étendue de la présente vérification

11.8 Cette année, notre vérification a porté sur les secteurs que nous n'avions pas examinés en détail lors de notre dernière vérification intégrée. Nous avons examiné l'activité "Réserves et fidéicommis" du Programme des affaires indiennes et inuit, et plus particulièrement la gestion des terres indiennes, l'administration des successions des Indiens, l'administration des comptes de capital et des comptes de résultats des bandes indiennes et celle des comptes en fidéicommis établis pour les mineurs. Nous avons également vérifié l'activité "Enseignement primaire et secondaire". Vingt-six pour cent (409 millions de dollars) du budget global du Programme des affaires indiennes et inuit (1986-1987) est réservé à l'enseignement primaire et secondaire qui sera donné aux jeunes Indiens qui vivent dans des réserves ou sur des terres de la Couronne. Nous avons également examiné les activités du Bureau des revendications des autochtones, les grands systèmes, méthodes et contrôles de gestion utilisés pour deux projets d'aménagement ainsi que la gestion des ressources renouvelables prévue au Programme des affaires du Nord.

11.9 Nous avons utilisé dans une certaine mesure les travaux de la Direction de la vérification du ministère. Cette utilisation, par la force des choses, a été restreinte puisque les travaux de cette direction n'avaient pas une étendue aussi grande que les nôtres.

Les réserves et les fidéicommis

Introduction

11.10 La Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et la Loi sur les Indiens autorisent le ministère, par l'entremise de son ministre, à administrer les terres des réserves, les fonds des bandes et les successions de certains Indiens ainsi qu'à déterminer le droit au statut d'Indien et le droit d'appartenance à une bande. Le ministère a donc comme mandat de voir à ce que les terres et les successions des Indiens soient administrées en conformité avec les dispositions des lois et à ce que toutes les personnes qui ont droit au statut d'Indien soient dûment enregistrées. Ces diverses activités sont confiées à neuf bureaux régionaux répartis sur l'ensemble du territoire national et à deux bureaux des ressources minérales, l'un à Ottawa et l'autre à Calgary. L'administration centrale, à Ottawa, assure l'orientation générale des activités.

11.11 Le mandat de la Direction générale des réserves et des fidéicommis, ainsi que celui du ministère dans son ensemble découlent des diverses lois que ce dernier a charge d'appliquer. Le sens exact de ce mandat a fait l'objet de débats et en a dérouté plusieurs au cours des années. La confusion vient de l'imprécision des textes de loi. Le ministère ne peut sans doute pas décrire avec clarté quel est son rôle légal, mais il ne fait pas de doute qu'il a charge, dans le domaine de la gestion immobilière, d'administrer les terres mises de côté à l'usage et au profit des Indiens et des bandes. Une décision de la Cour suprême du Canada, à la fin de 1984, est venue confirmer le fait que le ministère doit jouer un rôle de fiduciaire pour les Indiens en ce qui a trait à la cession des terres des réserves. (Selon la Loi sur les Indiens, "terres cédées" signifie une réserve ou partie d'une réserve, ou tout intérêt y afférent, dont le titre juridique demeure attribué à Sa Majesté et que la bande, à l'usage et au profit de laquelle il avait été mis de côté, a abandonné ou cédé.")

Étendue de la vérification

11.12 Nous avons procédé à un examen détaillé de la manière dont le ministère interprète et exerce son rôle ainsi que sa capacité générale à assumer les responsabilités qui s'y rattachent. Nous avons plus particulièrement vérifié la mesure dans laquelle le ministère respectait le mandat que lui impose la loi, à la lumière de la récente décision rendue par la Cour suprême, ainsi que les méthodes et ressources utilisées pour réaliser ce mandat.

11.13 Nous avons retenu, pour notre vérification, trois secteurs de la Direction générale des réserves et des fidéicommis : la gestion des terres, l'administration des successions et l'administration des fonds des bandes. Dans un premier temps, nous avons cherché à nous faire une idée précise du mandat légal du ministère et, pour ce faire, nous avons dépouillé des textes de loi, nous avons lu les décisions récentes rendues par les tribunaux et nous nous sommes enquis de la perception que le ministère a de son mandat. En deuxième lieu, nous avons examiné la procédure administrative du ministère, puis nous avons comparé ses obligations légales et ses méthodes d'intervention avec celles de sociétés de fiducie privées dont le mandat fiduciaire est semblable. En dernier lieu, nous avons examiné l'utilisation que le ministère fait des ressources humaines et évalué leurs qualifications, en tenant compte des exigences légales et des usages établis en droit et mis en pratique par les sociétés privées de fiducie.

La gestion des terres

11.14 Le mandat légal. Il n'est pas facile de préciser le mandat légal confié au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien en ce qui a trait aux réserves et fidéicommis. En 1984, dans la cause Guérin et al. v. la Reine , la Cour suprême du Canada a examiné le rôle du ministère en ce qui a trait aux opérations de cession de terres indiennes et a déclaré que la Couronne avait une obligation fiduciaire à l'égard des peuples indiens du Canada. Un fiduciaire est une personne à qui l'on a confié, pour le bien d'une autre personne, certains pouvoirs et qui est tenue en tout temps, lorsqu'elle exerce ces pouvoirs, d'agir en toute honnêteté lorsque sont en jeu ce qu'elle considère être les intérêts de l'autre personne et de respecter certaines normes de loyauté et de fidélité. Dans la cause Guérin, le tribunal a déclaré que les fonctionnaires du ministère, lors de la location à bail de terres au nom de la bande des Musqueams de la Colombie-Britannique, avaient agi à titre de fiduciaire pour ces Indiens. Ces fonctionnaires toutefois, parce qu'ils avaient loué les terres à des conditions moins avantageuses que celles approuvées par la bande, n'avaient pas agi au mieux des intérêts des Indiens et avaient par conséquent failli à leur tâche de fiduciaire.

11.15 Le ministère, jusqu'à ce que soit rendue cette décision, jugeait l'obligation qui lui était faite, en vertu des lois, comme constituant une obligation de fiducie "politique" en vertu de laquelle les bénéficiaires ne pouvaient avoir recours aux tribunaux si le ministère ne s'acquittait pas de ses responsabilités. À la suite du jugement rendu dans cette cause, le ministère sait qu'il doit assumer des responsabilités fiduciaires, à tout le moins en ce qui concerne les cessions de terre, et qu'un tribunal peut lui enjoindre de s'acquitter de ces responsabilités. Il lui faut maintenant, et il le sait, revoir ses procédés et politiques dans un certain nombre de secteurs afin d'assumer entièrement ces responsabilités.

11.16 La Direction des terres de la Direction générale des réserves et fidéicommis administre les terres de la Couronne mises de côté pour l'usage et le profit des bandes indiennes. Elle conseille également les bureaux régionaux, les bureaux de district et les bandes indiennes sur la façon d'administrer les réserves indiennes, de céder certaines terres de ces dernières, de louer les terres cédées et de louer les terres des réserves aux membres des bandes et à d'autres personnes. La Direction des terres aide les bandes à dresser des titres de cession qui permettent de louer les terres. Sans ces titres, les bandes, habituellement, ne peuvent louer des terres à des personnes qui ne sont pas membres des bandes. Ces dernières se fient donc à la compétence des fonctionnaires de la direction pour obtenir la réalisation rapide et efficiente des cessions lorsqu'elles ont en vue des locataires. Elles comptent également sur cette direction pour que l'on tienne compte de leurs voeux et désirs dans toutes les opérations.

11.17 Inventaire des terres et des ressources naturelles. L'une des fonctions de la Direction des terres est de tenir un inventaire de toutes les terres des réserves. Malgré l'obligation qui est ainsi faite à cette direction, il n'existait, au moment où nous avons effectué notre vérification, aucun inventaire national, complet et précis, des terres des réserves et des ressources naturelles, ventilées par bande. À notre avis, un tel inventaire, accompagné de la présentation des recommandations sur l'utilisation des terres, est nécessaire au ministère s'il veut s'acquitter de ses responsabilités de fiduciaire à ce titre. Le manque à gagner, à cause des occasions ratées et du défaut de tirer un rendement optimal des terres des réserves, pourrait être important si le ministère ne possède pas d'inventaire du genre. Le ministère reconnaît l'existence du problème, mais il n'y a pas encore trouvé solution.

11.18 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait compiler et tenir à jour un inventaire complet et précis des terres et des ressources naturelles des Indiens.

Commentaire du ministère : Le ministère voit cette question sous deux aspects - un service d'enregistrement des terres indiennes et une indication des possibilités d'ordre économique.

La Direction des terres a une Division du registre des terres indiennes où sont inscrits les détails des opérations relatives aux terres situées dans des réserves et aux terres cédées, conformément aux articles 21 et 55 de la Loi sur les Indiens. Toutefois, l'intégralité et l'exactitude des dossiers que l'on trouve dans cette Division varient considérablement d'une réserve à l'autre. Dans de nombreux cas, les pouvoirs sur les terres indiennes sont passés au gouvernement fédéral - soit au moment de la Confédération ou par la suite - et nous n'avons qu'une description générale de leur emplacement exact, de leur superficie, ainsi que des restrictions ou des exclusions qui s'appliquaient à l'époque. En 1978, on estimait qu'il faudrait plus de 300 années-personnes pour effectuer une recherche détaillée nécessaire à l'établissement d'un inventaire complet et à jour des terres; à l'heure actuelle, étant donné les ressources limitées, nous effectuons cette recherche cas par cas, afin de résoudre les problèmes individuellement, au fur et à mesure qu'ils se présentent.

Le second aspect de la question se rapporte à l'évaluation des possibilités d'ordre économique que présentent les terres indiennes et les ressources naturelles. Dans le cadre de la restructuration récente du ministère, il y a eu la nomination d'un sous-ministre adjoint au Développement économique; le ministère pourra ainsi faire davantage à cet égard. Il est particulièrement intéressant de relever le fait qu'il y a eu hausse importante des ressources du ministère à qui nous avons confié des responsabilités concernant le gaz et le pétrole, y compris l'instauration et le maintien d'un inventaire des ressources pétrolières et gazières sur les terres des Indiens. En outre, il existe des plans en vue d'achever l'inventaire d'autre ressources minières en Colombie-Britannique et dans les provinces de l'Atlantique. Il en sera de même à une date ultérieure pour les autres provinces.

11.19 Accessibilité à des services juridiques. La Direction des terres éprouve des difficultés à obtenir les services juridiques dont elle a besoin. Les employés des régions et de l'administration jugent ne pas pouvoir assez facilement consulter les avocats du ministère de la Justice. Ces avocats ne sont pas toujours libres pour s'occuper des questions indiennes. Il s'ensuit que les avis juridiques sur les questions de location et de cession des terres ne peuvent pas toujours être obtenus aussi rapidement que requis. Certaines occasions sont ainsi ratées puisque marché et opérations immobilières ne peuvent attendre. Cela augmente également les risques, pour le ministère, de ne pas fournir aux Indiens des services appropriés.

11.20 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, compte tenu du risque de ne pouvoir fournir des services appropriés, devrait, en collaboration avec le ministère de la Justice, évaluer la somme des services juridiques dont il a besoin aux niveaux fédéral et régional et trouver le meilleur moyen de combler ce besoin.

Commentaire du ministère : Les deux ministères sont au courant du problème et ils tâchent de le résoudre.

11.21 Formation et supervision des agents de la gestion des terres. Un des devoirs d'un fiduciaire, en ce qui a trait au choix et à la supervision des agents qui agiront en son nom, est de vérifier si ces personnes possèdent la compétence requise pour effectuer les tâches pour lesquelles elles sont embauchées. Sans cela, le fiduciaire peut être tenu responsable des actes de ses agents qui portent atteinte à la relation du fiduciaire avec ses clients.

11.22 Les employés qui doivent s'occuper de l'évaluation des terres, de l'arpentage des lots, des contrats et des baux doivent posséder une formation hautement spécialisée s'ils veulent dûment exercer leurs responsabilités de fiduciaire. Les connaissances acquises doivent leur permettre non seulement d'effectuer le travail qui leur est assigné, mais également de cerner les problèmes qui se présentent.

11.23 Nous avons constaté, au cours de notre examen des méthodes auxquelles ont recours les sociétés privées de fiducie, que ces dernières avaient soin de confier ces responsabilités à des personnes qui possèdent une solide formation. Toutefois, au sein de la Direction générale des réserves et des fidéicommis, certains employés qui s'occupaient des locations et des cessions ne possédaient ni les connaissances théoriques, ni les connaissances pratiques requises pour assumer ces responsabilités de manière à répondre aux normes qualitatives élevées du fiduciaire. La plupart d'entre eux avaient le plus souvent commencé comme commis et avaient gravi les échelons au sein du ministère. La formation qu'ils y avaient reçue était fort mince.

11.24 Depuis la décision rendue dans l'affaire Guérin, des efforts ont été faits dans la région de la Colombie-Britannique pour engager du personnel plus spécialisé et pour améliorer le programme de formation. Néanmoins, les gestionnaires, dans cette région, estiment qu'il y a encore fort à faire pour résoudre ce problème. Pour le moment, des employés sans formation s'occupent des locations et ne font appel au ministère de la Justice que dans les seuls cas où "quelque chose sort de l'ordinaire". Erreurs et omissions sont fréquentes parce que les employés ne possèdent pas la compétence requise pour savoir quand faire appel aux services des avocats. Dans de telles circonstances, des mesures non convenables sont prises, comme ce fut le cas dans l'affaire Guérin.

11.25 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait s'assurer que les employés auxquels il confie des responsabilités fiduciaires possèdent les connaissances et la formation requises pour les assumer.

Commentaire du ministère : Le ministère est d'accord avec cette recommandation.

11.26 Supervision du personnel. Un fiduciaire, après avoir choisi des agents compétents, doit en outre superviser ces personnes afin d'avoir la certitude qu'elles fournissent un travail de qualité satisfaisante. Le fiduciaire doit accorder à l'administration des affaires de sa fiducie le même soin et le même souci professionnel que les gens d'affaires avisés dans la conduite de leurs activités. Il n'y a pas de gens d'affaires avertis qui confieraient une mission à un agent sans en faire la supervision ou sans obtenir la certitude que leur agent connaît ses responsabilités et la manière dont il doit les assumer. Dans la pratique, les sociétés privées de fiducie possèdent des manuels qui précisent pour leurs employés les politiques et la procédure à suivre pour le déroulement des opérations. En outre, ils disposent de systèmes de contre-vérification qui leur permettent de vérifier si les tâches ont réellement été effectuées dans les délais prévus et de la manière voulue. Les ventes de biens, la réduction du capital d'une fiducie et les investissements sont examinés à plusieurs niveaux dans la société et certaines de ces opérations ne peuvent être autorisées définitivement que par les membres du conseil de direction ou par les directeurs généraux. Une personne seule ne peut prendre de décisions et pratiquement tout ce que fait un employé est révisé à un échelon supérieur, habituellement par un spécialiste. Nous avons constaté que le ministère ne supervise pas son personnel de manière appropriée et ne possède pas de mécanismes satisfaisants de contrôle de la qualité du travail effectué.

11.27 Le ministère reconnaît l'existence de certains des problèmes susmentionnés et s'affaire à les cerner et à les résoudre. Nous croyons néanmoins qu'il doit agir rapidement s'il veut assumer entièrement ses responsabilités et réduire les risques de bévues qui pourraient entraîner des poursuites judiciaires.

11.28 Arpenteurs et évaluateurs compétents. La consultation juridique n'est qu'un des secteurs qui requiert, pour la gestion des terres, le recours à des spécialistes. Il faut faire arpenter et, souvent, évaluer les terres des réserves avant qu'elles ne puissent être louées à des personnes qui ne sont pas membres des bandes. Les bureaux régionaux ont donc reçu plus de demandes d'arpentage et d'évaluation qu'ils ne peuvent en traiter. Dans une région, on nous a indiqué qu'une somme de 40 000 $ était mise de côté chaque année pour les évaluations. Puisqu'une évaluation peut coûter jusqu'à 20 000 $, il va sans dire que la liste des demandes en attente est longue. Le coût de l'arpentage des lots, mesure souvent nécessaire, est également élevé et les demandes en attente sont également nombreuses. Tout cela indique que les Indiens reçoivent des services dont la qualité est médiocre et que le ministère risque de rater des locations et de perdre des revenus à cause de retards excessifs. Les sociétés privées font appel à des experts de l'extérieur, par exemple des arpenteurs ou des évaluateurs indépendants, lorsque ce genre de situation se présente. Nous croyons qu'il conviendrait que le ministère fasse de même.

11.29 Passif éventuel. Le jugement rendu dans la cause Guérin a permis de préciser les devoirs fiduciaires de la Couronne en ce qui a trait à la "cession des terres" des Indiens. Toutefois, au 30 juin 1985, une centaine d'autres poursuites avaient été intentées contre la Couronne et étaient pendantes devant les tribunaux, indication de l'urgence de porter une attention plus grande à cette question. Dans 75 p. 100 des cas, aucun montant d'argent en compensation n'est précisé, mais dans les autres cas (25 p. 100), les demandes représentent pour le ministère un passif éventuel de 1,77 milliard de dollars. Certaines des réclamations ont été formulées il y a un bon moment. Le jugement, dans la cause Guérin, peut les réactiver et susciter d'autres réclamations. Nous avons signalé ce passif éventuel dans une note de vérification publiée dans notre Rapport de 1985.

L'administration des successions

11.30 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a juridiction et autorité sur les successions des Indiens décédés qui ont vécu dans les réserves, exception faite des cas où le ministre consent à transférer sa juridiction aux tribunaux provinciaux. Cela se produit dans le cas des successions importantes et complexes ou dans les cas de décès dans un accident, lesquels donnent lieu à des demandes d'indemnités auprès des assureurs. Habituellement, le ministère assume la responsabilité du règlement des successions et de ce fait, il peut être tenu responsable, par les héritiers d'une personne, des irrégularités et des erreurs dans l'administration de la succession de cette personne.

11.31 Le ministère, une fois avisé du décès d'une personne, doit dresser un inventaire détaillé des biens de la succession, relevé qui doit énumérer tous les biens mobiliers et immobiliers du défunt et préciser leur valeur ainsi que les dettes et les réclamations qui grèvent la succession. Il doit également obtenir une déclaration attestant l'existence ou l'absence d'un testament ainsi que la liste de tous les bénéficiaires. Il a également charge de prendre toutes les mesures requises pour protéger l'actif du défunt et recouvrer les sommes qui étaient dues à ce dernier. Le ministère, si la personne décédée possédait un testament et avait désigné un exécuteur testamentaire, sera appelé à approuver le testament et à autoriser l'exécuteur testamentaire à régler la succession. Le ministère, dans le cas contraire, nommera un administrateur de la succession.

11.32 De fait, le ministère ne dresse d'inventaires et ne protège l'actif des successions que dans un petit nombre de cas. La raison en est, semble-t-il, que les fonctionnaires du ministère n'ont pas le temps de se rendre dans les réserves et de dresser eux-mêmes les inventaires, sans compter que les réserves se trouvent bien souvent en régions éloignées. À cause de cela, les employés du ministère font souvent appel à des volontaires, par exemple les amis ou les proches du défunt. Cela pose un problème du fait que le ministère est responsable des mesures prises par les volontaires recrutés, c'est-à-dire qu'il est responsable des erreurs dans l'inventaire ou des pertes d'éléments de l'actif de la succession qui découlent d'une protection non convenable.

11.33 Dans le secteur privé, les sociétés de fiducie qui s'occupent, à titre d'exécuteurs ou de coexécuteurs testamentaires, du règlement des successions de leurs clients ont soin de prendre rapidement les mesures requises. La plupart de ces sociétés ont recours à des listes de contrôle des mesures à prendre et elles établissent un calendrier d'intervention qui débute à la date de réception de la notification du décès et se termine à la date à laquelle ont été réglés les derniers détails de la succession. Elles dressent un inventaire détaillé des biens, établissent la valeur de l'actif de la succession, en assurent les éléments et prennent toutes les mesures requises pour les protéger.

11.34 Le système et les procédés que le ministère utilise pour le règlement des successions n'ont pas la même qualité que ceux qu'utilisent les sociétés privées. Le rapport d'une étude demandée par le ministère confirme nos dires et suggère que ce dernier consacre plus de ressources au programme du règlement des successions afin que ce programme puisse offrir toutes les garanties requises. Pour le moment, le règlement des successions n'a qu'une faible priorité et le ministère n'a pas augmenté les ressources du programme de manière à répondre aux besoins ou à améliorer la qualité de l'administration des successions.

11.35 Formation en administration des successions. La Couronne, lorsqu'elle administre les successions des Indiens, agit à titre de fiduciaire, de fidéicommissaire et, comme tel, elle doit mettre le plus grand soin à réaliser cette mission, comme nous l'avons déjà indiqué dans la section qui traite de la gestion des terres. L'obligation de choisir des agents compétents et de superviser leur travail vaut également dans ce cas-ci. Nous avons constaté que, de manière générale, le personnel n'a pas une formation suffisante et qu'il ne cherche pas assez souvent à obtenir l'opinion et les conseils des experts en ce domaine. Les règlements de successions accusent des retards excessifs. En outre, les règlements, procédés et politiques sont désuets et demeurent incomplets, les dossiers sont pauvres et il n'existe aucun système officiel à utiliser pour l'administration des successions. Ces problèmes ont été signalés dans les rapports des études qu'a commandées le ministère, mais rien n'indique que ce dernier a pris les mesures nécessaires pour corriger la situation.

11.36 Les préposés aux successions n'ont comme compétence élémentaire qu'une expérience qui dépasse rarement le niveau du travail de bureau en ce qui a trait à l'administration des successions. Malgré ce manque d'expérience, ils ont de fait, dans les régions, dès que débute leur travail, plein pouvoir d'administrer les successions. Ils doivent prendre des décisions et donner des conseils au personnel des districts sans pouvoir, ou en pouvant fort peu, obtenir conseils et aide d'experts en la matière. Leurs supérieurs ont une certaine connaissance des grands problèmes que présente l'administration des successions, mais ils connaissent peu la routine quotidienne. Il est possible de demander conseil à l'administration centrale ou au ministère de la Justice mais, dans les régions, plusieurs employés jugent que cette démarche est peu facile, peu opportune ou peu pratique.

11.37 Le ministère n'offre pas une formation suffisante aux préposés aux successions qui sont en poste. À cause de leur manque de compétence et de formation, ces personnes peuvent, sans le savoir, commettre des erreurs graves dont le ministère pourra être tenu responsable devant les tribunaux. Certains agents des bureaux de district, par exemple, ne possèdent pas une bonne connaissance des dispositions pertinentes de la Loi sur les Indiens ou de son Règlement. Les erreurs commises sont souvent des omissions; le règlement des successions traîne souvent parce qu'on manque de personnel ou que ce dernier ne possède pas les connaissances nécessaires. Au Manitoba, à l'heure actuelle, le règlement de plusieurs successions est en suspens parce que les postes d'agents préposés aux successions sont sans titulaire et qu'il n'y a pour le moment que des commis pour s'occuper de la Section des successions.

11.38 Le ministère des Affaires indienne et du Nord canadien devrait voir à ce que les employés affectés à l'administration des successions possèdent les connaissances théoriques et pratiques qui leur permettront de maîtriser toutes les facettes de leur travail.

11.39 Retards. Un autre problème amoindrit la qualité de l'administration des successions. À cause d'un manque de personnel, le traitement des successions accuse des retards excessifs et il devient à peu près impossible d'éliminer le surplus de travail accumulé. En Ontario, par exemple, une seule personne au bureau régional s'occupe des successions avec l'aide des seuls surintendants des districts qui font office d'administrateurs. Au Manitoba, le règlement des successions est confié à deux commis seulement. En Ontario, le manque de personnel a entraîné de longs retards dans l'administration des successions et un accroissement constant du travail accumulé. Au moment de notre vérification, de 550 à 600 successions attendaient d'être réglées. Le règlement d'une succession n'est pas considéré en retard s'il ne s'est pas écoulé plus de trois ans depuis l'ouverture du dossier. Certains règlements traînent depuis vingt ans. Au Manitoba, le manque de personnel a entraîné des retards tels que le dossier d'une succession dort souvent sur les tablettes tant qu'une plainte n'est pas déposée. Chaque année, le bureau régional du Manitoba se voit confier l'administration de 300 nouvelles successions alors qu'il ne peut régler, chaque année, avec tout le personnel dont il peut disposer, que 150 dossiers.

11.40 En Colombie-Britannique, la situation est meilleure, et cela à cause d'une étude récente des systèmes de gestion et de la réorganisation qui a suivi. Le bureau régional a éliminé le travail accumulé et il réussit maintenant à se libérer du volume de travail. En outre, le bureau régional et les bureaux de district recrutent des personnes plus compétentes et ils ont mis sur pied des ateliers et des séminaires qui portent sur le domaine des successions. Le bureau régional n'a pas réglé tous ses problèmes en ce qui a trait à l'administration des successions, mais il s'efforce de fournir un meilleur service.

11.41 On a envisagé que le volume de travail des préposés aux successions pourrait être substantiellement réduit si la part préciputaire d'une succession, c'est-à-dire celle qui revient automatiquement au conjoint, était portée du seuil actuel de 2 000 $ au seuil en vigueur dans les provinces, lequel varie de 40 000 $ à 75 000 $. Les cadres du ministère y voient là un moyen d'améliorer la procédure administrative.

11.42 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait examiner la possibilité d'améliorer sensiblement les procédés d'administration des successions par une augmentation du montant de la part préciputaire allouée au conjoint, lors du règlement des successions. Si cela s'avère possible, il faudra prendre les mesures requises pour apporter les modifications utiles aux textes de loi.

11.43 Dossiers. Nous avons constaté que les dossiers tenus sur certaines successions étaient incomplets. Il semble qu'il n'y ait pas eu utilisation d'une liste de contrôle des mesures à prendre. Il est donc souvent difficile de savoir quelles mesures ont été prises. En Ontario, par exemple, on nous a signalé qu'il n'existait pas de système de vérification de l'exactitude du montant des chèques destinés aux bénéficiaires et de l'expédition réelle de ces pièces. La direction des bureaux régionaux admet l'existence du problème, mais souligne que l'on ne peut effectuer cette vérification à cause d'un manque de personnel et de temps. Sans dossiers correctement tenus, il sera difficile, lorsque des poursuites seront intentées contre le ministère ou des administrateurs des successions, de prouver que les mesures requises ont réellement été prises, et cela en temps opportun, pour assurer le règlement d'une succession.

11.44 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait exiger l'utilisation d'une liste de contrôle dans le cadre de l'administration des successions afin d'avoir la certitude qu'il y a des preuves documentaires des mesures prises et l'assurance que toutes les interventions requises ont été effectuées dans des délais raisonnables.

Commentaire du ministère : Le ministère est d'accord avec la recommandation formulée au sujet de l'administration des successions. Étant donné toutefois que l'on prévoit réduire la taille du ministère, il deviendra encore plus difficile d'assurer l'administration efficace des successions des Indiens. Nous étudions en ce moment la méthode globale de cette fonction, dans le but d'améliorer les procédés actuels et de modifier la loi.

11.45 Le ministère, jusqu'à maintenant, n'a accordé qu'une faible priorité au règlement des successions des Indiens, surtout parce qu'il y a eu peu d'accusations de mauvaise gestion des successions. Toutefois, il se peut que tout cela change puisque les bandes sont de plus en plus riches et que leurs relations avec la Couronne deviennent plus complexes. L'affaire Guérin peut inciter les bandes à recruter des avocats et à exiger des compensations de la Couronne. Le ministère, s'il veut éviter cela, se doit d'agir de manière à assumer ses responsabilités légales à l'égard des Indiens.

L'administration des deniers des Indiens

11.46 Fonds des bandes indiennes. La Direction générale des réserves et des fidéicommis a charge d'administrer les deniers des Indiens. La Loi sur les Indiens définit les "deniers des Indiens" comme étant "toutes les sommes d'argent perçues, reçues ou détenues par Sa Majesté à l'usage et au profit des Indiens et des bandes".

11.47 Les fonds des bandes indiennes sont conservés dans le Trésor (Fonds du revenu consolidé) et sont administrés en conformité avec les dispositions de la Loi sur les Indiens. Un compte de capital et un compte de résultats (revenu) sont établis pour chaque fonds. L'établissement de ces comptes avait pour but de doter les Indiens d'assises économiques permanentes. Chaque fois qu'une parcelle des terres réservées à une bande est cédée et vendue ou louée, ou chaque fois que des ressources provenant des terres d'une réserve sont vendues, les produits de ces opérations sont portés à ces comptes afin de financer les activités présentes et futures de la bande. Comme l'exige la loi, le gouvernement du Canada verse dans ces comptes des intérêts dont le taux est fixé par le gouverneur en conseil. Jusqu'à récemment, la vente ou la location de terres constituait la principale source des fonds versés dans les comptes de capital. Au cours des dix dernières années, le solde des fonds de certaines bandes a augmenté de façon spectaculaire à cause des redevances sur le pétrole et le gaz versées à leur compte de capital.

11.48 Le ministère, en plus d'administrer les comptes de capital et les comptes de résultats des bandes, tient 15 000 comptes pour les mineurs, pour les successions non réglées, pour les personnes jugées mentalement incapables et pour des héritiers non retracés. La plupart des fonds conservés en fidéicommis pour les mineurs proviennent d'une répartition par personne des sommes versées aux comptes de capital des bandes.

11.49 Au 31 mars 1986, il y avait 635 comptes de capital dont le solde total était supérieur à 765 millions de dollars et quelque 592 comptes de résultats dont le solde total se chiffrait à plus de 47 millions de dollars. Ces fonds des bandes imposent des responsabilités financières au gouvernement du Canada. La pièce 11.3 présente le nombre de comptes que tient le ministère et la valeur des deniers des Indiens qu'il avait à administrer, au 31 mars 1986.

(Cette pièce n'est pas disponible)

11.50 Comptes de résultats. La loi stipule que " tous les deniers des Indiens autres que les deniers au compte de capital sont tenus pour des deniers de revenu de la bande." Quelque 75 p. 100 des bandes indiennes ont été autorisées à gérer elles-mêmes leurs propres comptes de résultats, en conformité avec l'article 69 de la loi.

11.51 Ce transfert de pouvoir, du ministère aux bandes, peut être perçu comme équivalant, après la décision rendue dans l'affaire Guérin, à une délégation des responsabilités relatives à la gestion des fonds en fidéicommis. Le ministère, lorsqu'il procède à une délégation de pouvoir de ce genre, doit être, comme fiduciaire, aussi prudent que le seraient des gens d'affaires avertis dans le choix et la supervision de leur fondé de pouvoir. Sans cela, la Couronne pourrait être accusée par son fondé de pouvoir de mauvaise administration. Le ministère, afin d'éviter cela, a besoin d'un système et de procédés afin d'exercer une surveillance et d'exiger des rapports sur la gestion, par les bandes, des deniers de revenu.

11.52 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait voir à préciser quelles sont la nature et l'étendue de ses responsabilités consécutives au transfert, à des bandes indiennes, du pouvoir de gérer leurs propres comptes de résultats.

11.53 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait, s'il transfère à des bandes indiennes sa responsabilité relative à la gestion des comptes de résultats et que cela est jugé être un délégation de responsabilité, se doter de procédés qui lui donnent l'assurance que chaque bande produira un rapport sur le succès avec lequel elle gère ses deniers de revenu, ou il devrait obtenir que soit modifiée la Loi sur les Indiens de manière à ce que le ministre puisse renoncer à toute responsabilité consécutive au transfert susmentionné.

Commentaire du ministère : Le ministère examine cette question pour faire en sorte que les bandes puissent administrer leurs propres deniers de revenu sans être tenues de lui en rendre compte. Au cours de cette étude, le ministère tente de clarifier la nature et l'étendue de ses responsabilités légales.

11.54 Comptes de capital. La Loi sur les Indiens définit "les deniers au compte de capital" comme étant "tous les deniers des Indiens tirés de la vente de terres cédées ou de biens de capital d'une bande". Selon l'interprétation du ministère, cette expression désigne également les sommes provenant de la vente de terres, de bois et de gravier ainsi que de l'exploitation de gisements pétrolifères et gazifères.

11.55 L'article 64 de la loi stipule que le ministre peut, si cela avantage une bande indienne et si cette dernière lui donne son consentement, autoriser la dépense, à des fins très précises, de deniers versés au compte de capital de la bande. Le consentement doit être formulé dans une résolution de conseil de bande qui demande l'engagement de la dépense et en amorce le processus. Cette résolution est l'élément de base de l'évaluation et de l'approbation de la demande et de l'engagement subséquent de la dépense. Dans la réalité, l'information fournie au ministère manque souvent de précision. Cela s'explique du fait qu'il n'existe aucune directive qui précise l'information à fournir et le ministère n'a pas fait connaître clairement aux bandes ce qu'il exigeait à ce titre.

11.56 En outre, à cause des délais imposés par les bandes et à cause du volume restreint des ressources dont dispose le ministère, l'évaluation des dépenses proposées n'est pas effectuée avec la même rigueur que celle effectuée par les fiduciaires du secteur privé. Par exemple, nous avons constaté qu'il n'existe pas, en ce qui a trait au processus d'évaluation, de procédés et de directives normalisés qui permettraient de vérifier si la dépense a été engagée aux fins prévues par la loi, si elle a été approuvée par un agent autorisé (selon les critères établis pour la délégation des pouvoirs) et si, une fois dégagés, les fonds sont utilisés de la manière prescrite.

11.57 Les deniers au compte de capital doivent être utilisés en conformité avec les dispositions de l'article 64 de la Loi sur les Indiens. Nous avons déclaré, dans notre Rapport de 1984, que le ministère avait libéré des fonds provenant des comptes de capital, geste qu'il justifiait en misant sur une interprétation large, et peut être inexacte, des dispositions de l'article 64. Afin de réduire les risques que ces lacunes pouvaient représenter pour la Couronne, nous avons suggéré au ministère qu'il suive le conseil formulé par le Comité des comptes publics et obtienne des tribunaux un avis juridique sur l'interprétation à donner des dispositions de l'article 64. Le Comité permanent des comptes publics, dans son premier rapport daté du 11 février 1985, recommandait que :

11.58 Le ministère, à la date où nous avons commencé la rédaction du présent rapport, n'avait pas encore donné suite à ces recommandations.

Commentaire du ministère : La recommandation du Comité permanent se rapporte à une observation faite par le vérificateur général. Nous croyons savoir que l'énoncé qui apparaît dans le Rapport de 1984 du vérificateur général (par. 3.58) et qui traite d'une référence possible à la Cour fédérale du Canada, conformément à l'article 17 de la Loi sur la Cour fédérale , portant sur l'étendue et l'interprétation de l'alinéa 64 (1) k), est fondé sur une lettre provenant d'un ancien sous-ministre associé de la Justice. Cette lettre traitait en partie d'un plan administratif possible, par rapport à l'alinéa 64 (1) k), qui autorise le ministre à approuver les dépenses de deniers tirés des comptes de capital qui, à son avis, sont dans l'intérêt de la bande. On a envisagé que s'il surgissait des questions au sujet de ce plan , c'était là une façon de les résoudre.

Nous nous sommes reportés à l'article 17, là où la Couronne est en conflit avec une autre partie au sujet de l'incidence qu'a un statut sur une situation de fait - non seulement la simple interprétation d'un statut.

Il faudrait également signaler qu'une décision rendue par la Cour fédérale (même si c'était possible) au sujet d'une question générale comme celle-ci ne lie pas la Cour dans des cas futurs où d'autre faits sont en cause. Donc, même si une question de cette nature était renvoyée à la Cour, la valeur d'une interprétation judiciaire, par rapport à de futures propositions examinées en vertu de l'alinéa 64 (1) k), serait limitée.

Ainsi, selon notre conseiller, il ne conviendrait pas de renvoyer à la Cour fédérale la question qui se rapporte à l'alinéa 64 (1) k). Donc, en tenant compte de ce qui précède et d'autres éléments qui nous préoccupent, nous examinons le besoin de modifier la section afin de clarifier son étendue et son objet.

Les comptes en fiducie des mineurs

11.59 Le ministère, avec l'assentiment du conseil de bande, peut autoriser une distribution, per capita, aux membres d'une bande, d'une somme ne dépassant pas 50 p. 100 des deniers au compte de capital de la bande qui proviennent de la vente de terres cédées et des redevances sur le pétrole et le gaz. Des centaines de millions de dollars ont ainsi été distribués à des particuliers, en vertu de ces dispositions de la Loi sur les Indiens.

11.60 En vertu des dispositions de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes, toutes les redevances sur le pétrole et le gaz tirés des terres indiennes sont conservées en fiducie par Sa Majesté au nom des bandes à qui appartiennent les terres. Le ministre, lorsqu'il autorise, en tant que fidéicommissaire, une distribution, per capita, de ces sommes, se trouve par le fait même à assumer ses responsabilités en ce qui a trait aux redevances. Le ministre doit toutefois, dans le cas des mineurs, tenir pour eux des comptes en fiducie jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de leur majorité. Au 31 mars 1986, il y avait 14 331 comptes en fiducie au nom de mineurs et la valeur totale de ces comptes était de 99 millions de dollars.

11.61 Le ministère, malgré l'obligation qui lui est faite de garder en fiducie, pour les mineurs, jusqu'à leur majorité, une fraction de ces redevances, a coutume de verser un maximum de 3 000 $ par année aux parents ou au tuteur de chaque enfant mineur. Le ministère s'appuie, pour ce faire, sur des dispositions des lois provinciales sur les fiducies, en vertu desquelles les revenus d'une fiducie peuvent être utilisés, sur demande, pour assurer la subsistance d'un bénéficiaire. Une circulaire que le ministère a publiée sur le programme, afin d'apporter des précisions sur sa façon de faire, signale que le versement du 3 000 $ exige la présentation d'une demande écrite par les parents ou par le tuteur du mineur. Néanmoins, il y a paiement chaque année, pour tous les mineurs, d'une somme de 3 000 $ sans attendre la demande écrite des parents ou du tuteur et sans tenir compte des besoins de chacun.

11.62 À ces paiements s'ajoutent des distributions, per capita, des deniers de revenu. Dans ce dernier cas, la part entière de l'enfant est versée à ses parents ou à son tuteur.

11.63 Nous nous sommes interrogés sur le bien-fondé de ces pratiques et nous avons décidé de consulter un juriste indépendant sur cette question. Ce dernier a corroboré notre opinion selon laquelle ces fonds étaient versés sans garanties satisfaisantes.

11.64 Le ministère, afin de respecter ses obligations fiduciaires, devrait, à tout le moins, faire une vérification raisonnable des besoins qui justifient le versement des sommes. En outre, puisque les paiements de ce genre doivent, en vertu des lois provinciales régissant l'administration des fiducies, être approuvés par les tribunaux, le ministère devrait obtenir l'approbation des tribunaux, ou verser les fonds par l'entremise des tribunaux ou les verser au curateur public de chaque province.

11.65 Une autre solution serait d'obtenir la modification de l'article 52 de la Loi sur les Indiens de manière à donner explicitement au ministre l'autorisation, pour assurer la subsistance et l'éducation des Indiens mineurs, d'avancer des fonds tirés des deniers de revenu ou des deniers au compte de capital auxquels ces mineurs ont droit. Les dispositions relatives à cette question pourraient être semblables à celles qui traitent des Indiens jugés mentalement incapables.

11.66 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait réviser sa procédure régissant le paiement aux parents ou aux tuteurs de fonds conservés en fiducie au nom de mineurs afin que les modalités de cette procédure soient conformes aux lois provinciales sur l'administration des fiducies, ou il devrait chercher à obtenir la modification de l'article 52 de la Loi sur les Indiens afin que le ministre soit dûment autorisé à avancer des fonds dans le but d'assurer la subsistance et l'éducation des Indiens mineurs.

Commentaire du ministère : Le ministère réalise qu'il y a un problème. Il tente d'obtenir une opinion juridique sur le caractère et l'étendue de ses responsabilités.

L'enseignement primaire et secondaire

11.67 La Loi sur les Indiens autorise le ministre des Affaires indiennes à fournir des services d'enseignement déterminés aux enfants âgés de 6 à 17 ans, inclusivement, qui résident habituellement sur une réserve ou sur des terres de la Couronne. Les autorisations requises pour administrer des programmes d'enseignement déterminés se retrouvent dans les lois de crédits, les délibérations du Conseil du Trésor et le texte des décrets du conseil.

11.68 Le Budget des dépenses 1985-1986 donne, pour les activités d'enseignement primaire et secondaire, l'objectif suivant :

Faire en sorte que tous les Indiens et tous les Inuit admissibles aient accès, en matière d'enseignement primaire et secondaire, à une qualité et une gamme de services correspondant aux besoins et à la situation des particuliers, des bandes et des collectivités desservis sur les plans social, économique et culturel.
11.69 L'enseignement et les autres activités du ministère sont assurés par l'entremise de l'administration centrale logée dans la région de la Capitale nationale, de sept bureaux régionaux et de 37 bureaux de district et centres régionaux de services. Quelque 80 000 enfants, au total, reçoivent les services d'enseignement offerts dans les écoles fédérales, les écoles provinciales et les écoles des bandes. Comme nous l'avons déjà indiqué, le coût de ces services, mises à part les dépenses en immobilisations, se chiffre à 409 millions de dollars, soit 26 p. 100 du coût du Programme des affaires indiennes et inuit. La pièce 11.4 montre l'importance des activités d'enseignement primaire et secondaire par rapport aux autres activités du Programme des affaires indiennes et inuit.

(Cette pièce n'est pas disponible)

Données de base

11.70 Contrôle par les Indiens de l'enseignement offert. Au milieu des années 60, sauf dans de rares cas, les élèves indiens fréquentaient des écoles dont l'enseignement s'inspirait en grande partie des programmes d'étude des provinces et était axé sur les valeurs, les buts, les apprentissages, la langue et les attitudes de la population non autochtone. Les groupes autochtones et les parents indiens ont fait connaître leur insatisfaction en ce qui a trait à ces programmes d'enseignement qui n'offraient que peu de notions sur l'histoire, la culture et les valeurs des peuples autochtones. Selon eux, un enseignement qui ne développe pas le sens du partage d'un vécu et d'un dessein commun n'enrichirait en rien la vie et l'avenir des jeunes Indiens. L'aliénation des élèves entraîne un fort taux d'absence, un fort taux de décrochage et un faible taux de réussite. Ces réalités sont perçues comme des symptômes du manque d'intégration de l'école au milieu.

11.71 Le ministère était conscient de ce problème et il a mis en place des programmes visant à favoriser la participation du milieu à l'enrichissement et à la modification des programmes d'études. La Fraternité des Indiens du Canada, dans sa déclaration de principe publiée en 1972 et présentée devant le Comité permanent des Affaires indiennes, s'attaquait à cette question et traitait du contrôle, par les Indiens, de l'enseignement à offrir aux Indiens ("La maîtrise indienne de l'éducation indienne"). Le ministre a sanctionné, en 1973, les principes formulés dans ce document. Toutefois, puisque la Loi sur les Indiens n'a pas été modifiée, le transfert aux bandes indiennes du contrôle de l'enseignement qui leur est offert n'a aucun fondement juridique. Le ministre, en vertu des dispositions de la loi, demeure responsable de la qualité de l'enseignement donné aux jeunes Indiens.

11.72 Orientation qu'apporte le ministère. Le ministère a rédigé, au milieu des années 70, une série de circulaires sur les questions d'enseignement afin de doter son personnel de directives opérationnelles. Ces documents devaient expliquer les politiques, décrire les normes régissant l'application du programme, dépeindre les procédés de mise en application et préciser les limites du financement offert. Ils étaient également destinés aux bandes indiennes qui assument le contrôle du processus. Toutefois, les bandes n'acceptèrent pas ces directives parce qu'elles n'avaient pas participé à leur rédaction.

11.73 Le ministère, en 1978, a tenté une nouvelle fois de fournir des lignes directrices et, à cette fin, il a publié sa politique d'enseignement et décrit les normes et procédés à utiliser en ce qui a trait à la prestation de l'enseignement. Le document a été élaboré en collaboration avec des représentants des Indiens. Des organismes politiques indiens ont exercé de fortes pressions pour que ne soit pas adoptée officiellement cette politique et cette dernière a été abandonnée. Nous n'avons pu relever d'autres tentatives du ministère de préciser la politique et les procédés à utiliser pour la prestation de l'enseignement. Il est devenu évident que l'échec du ministère, dans sa tentative d'établir des principes directeurs et des normes pour l'application du programme et de consigner les procédés de mise en application, a nui à la prestation efficace de l'enseignement aux jeunes Indiens.

11.74 Enseignement dispensé. Bien que le ministère soit responsable de la prestation d'un enseignement "correspondant aux besoins et à la situation des particuliers, des bandes et des particuliers desservis sur les plans social, économique et culturel", il ne le fait que pour les 25 p. 100 de jeunes Indiens qui fréquentent les écoles fédérales. Cinquante et un pour cent des jeunes Indiens environ fréquentent les écoles provinciales. Le ministère, dans ce dernier cas, a pour rôle de fournir les fonds et, dans une moindre mesure, de voir à ce que la province et les commissions scolaires locales tiennent compte des besoins particuliers des jeunes Indiens. Les autres enfants indiens (24 p. 100) fréquentent les écoles administrées par les bandes dans les réserves. Le ministère, même quand il accepte que les Indiens contrôlent leurs programmes d'éducation, demeure l'entité responsable de fournir à tous les Indiens admissibles "une qualité et une gamme de services" d'éducation qui répondent à leurs besoins.

Étendue de la vérification

11.75 La vérification de cette activité avait pour objectif d'évaluer la valeur des systèmes et procédés qu'utilise le ministère pour administrer l'enseignement donné aux Indiens. Selon nous, la prestation de ces services, par l'entremise d'écoles provinciales, d'écoles des bandes et d'écoles fédérales ainsi que le vaste éventail de besoins particuliers à satisfaire réquéraient l'utilisation d'un système qui fournisse des directives opérationnelles claires et précises sur la manière de répondre aux besoins et aux désirs des groupes locaux tout en imposant le respect de normes minimales de qualité.

11.76 En outre, puisque le ministère doit répondre devant le Parlement de l'utilisation des deniers publics et des résultats obtenus, nous nous attendions à trouver des buts précis et mesurables quant au type et à la qualité de l'enseignement à offrir aux jeunes Indiens, les programmes et les procédés pédagogiques requis pour assurer la réalisation des buts énoncés ainsi qu'un système fiable d'information qui devait permettre aux administrateurs du programme de mesurer les résultats obtenus et de les faire connaître.

11.77 Nous avons également examiné le processus de transmission, aux groupes indiens, des pouvoirs de gestion de l'enseignement qui leur est destiné.

L'absence d'orientation

11.78 Introduction. Les lois et règlements provinciaux régissant l'enseignement décrivent clairement le cadre administratif à l'intérieur duquel les diverses administrations scolaires des provinces doivent assumer leurs responsabilités administratives et professionnelles. Les articles de la Loi sur les Indiens, qui comportent des dispositions sur l'enseignement, ne donnent aucune définition de ce que doit être cet enseignement et ne précisent pas la manière dont il doit être offert. Il n'existe donc pas de fondement solide à partir duquel il serait possible de formuler une politique d'enseignement cohérente et stable. Le ministère, dans une étude effectuée en 1982, a fait l'évaluation de son système d'enseignement destiné aux Indiens et il a pu se rendre compte que plusieurs des problèmes étaient directement liés à l'absence de directives claires et précises sur l'orientation et l'utilisation du système.

11.79 Les provinces ont juridiction première en matière d'enseignement et elles ont le pouvoir, dans les limites de leur champ d'intervention, d'édicter des normes. Le ministère, en règle générale, utilise les éléments principaux du programme d'études établi par chaque province afin d'assurer le respect du principe de mobilité. Il doit, cependant, adapter certains secteurs des programmes d'études, les modifier, afin qu'ils puissent répondre aux besoins langagiers et culturels des jeunes Indiens. Nous avons constaté un manque général de coordination en ce qui a trait à l'adaptation, dans les écoles administrées par le fédéral ou par les bandes, des programmes d'études provinciaux. Cela s'explique en grande partie par le fait que les sujets d'études autres que les sujets principaux sont avant tout adaptés aux besoins spécifiques du groupe et, par conséquent, il serait difficile d'en normaliser le contenu.

11.80 Il y a donc dédoublement des efforts pour l'élaboration des programmes d'études et il n'existe pas de contrôle uniforme de la qualité des programmes élaborés hors des systèmes provinciaux. Dans le cas des écoles provinciales, le rôle du ministère consiste à s'entendre avec les provinces ou avec les commissions scolaires sur les frais de scolarité à payer pour l'instruction des jeunes Indiens.

11.81 Nous avons constaté que le ministère n'était pas en mesure d'évaluer de façon systématique et coordonnée les programmes d'études provinciaux. Les Indiens participent peu à la conception, à l'application, à l'administration, au contrôle, à la révision et à l'évaluation des programmes provinciaux d'enseignement destiné aux jeunes Indiens.

11.82 Normes et directives opérationnelles. Nous avons constaté qu'il est pratique courante au ministère d'utiliser les normes pédagogiques des provinces dans les écoles indiennes, mais qu'il n'existait aucune déclaration officielle à ce sujet. Nous n'avons trouvé que de brefs textes qui présentent des directives sur la manière d'administrer les écoles, de mettre au point les programmes d'études ou de donner l'enseignement des matières. Toutefois, dans certains secteurs d'application du programme, la mise en oeuvre et le contrôle des activités sont confiés à des bureaux régionaux qui ne possèdent aucune norme ou aucun procédé opérationnel comme balise.

11.83 L'absence de consensus ainsi que les pressions exercées par les organisations politiques indiennes ont amené le ministère, à la fin des années 70, à abandonner l'idée de fournir une orientation administrative officielle. Le ministère a donc dû continuer à jouer son rôle d'administrateur, malgré l'absence de normes ou de procédés de mise en oeuvre du programme. L'évaluation que le ministère pouvait faire de son propre rendement s'en trouvait ainsi affaiblie. En conséquence, rien ne prouve avec certitude qu'il respecte son objectif qui consiste à fournir à tous les jeunes Indiens admissibles un enseignement de qualité qui offre une gamme de services pédagogiques qui correspondent à leurs besoins.

11.84 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait élaborer, à l'intention du personnel de ses bureaux régionaux et de ses bureaux de district, des normes, des directives et des procédés opérationnels. Il devrait également implanter un système de contrôle qui permettrait de renseigner les gestionnaires des divers paliers administratifs sur la qualité et le volume des services pédagogiques offerts dans les écoles fédérales et les écoles administrées par les bandes indiennes, ainsi que sur les résultats scolaires des jeunes Indiens.

Les systèmes d'information

11.85 Le ministère utilise deux systèmes nationaux d'information sur ses activités d'enseignement. Il s'agit de la Liste nominative - un relevé annuel de tous les jeunes Indiens admissibles qui sont inscrits dans les écoles au début du mois d'octobre - et d'une banque de Données de base (éducation) - système qui fournit l'information utile à la planification financière et à l'attribution des fonds.

11.86 La Liste nominative fournit de l'information générale sur chaque élève : son lieu de résidence, son inscription sur la liste de la bande, le genre d'école fréquentée et son niveau scolaire, ainsi que d'autres données scolaires comme l'abandon hâtif des études ou la fréquentation de cours spéciaux. Afin d'éviter l'inscription en double des noms, tous les noms des élèves sont vérifiés par comparaison avec la liste de la bande. On se fonde sur ce système d'information pour calculer le nombre d'élèves à inscrire dans la banque des Données de base (éducation) et pour produire des rapports sur la fréquentation scolaire.

11.87 Les méthodes de gestion utilisées dans le cadre du programme sont nombreuses et nous avons constaté qu'il n'existe pas, malgré cela, de méthodes systématiques de collecte des données sur place ou de méthodes systématiques de vérification des données entrées, ce qui réduit l'efficience de la collecte et de l'utilisation des données. En outre, l'exactitude des données recueillies ne pouvait être certifiée.

11.88 Information sur l'efficacité du programme. Le ministère, s'il veut administrer correctement son programme d'enseignement, en surveiller l'application et en évaluer l'efficacité, doit pouvoir compter sur une information fiable au sujet d'un certain nombre d'éléments de son programme d'enseignement. Certains facteurs, par exemple la persévérance scolaire, le nombre de finissants et le taux de fréquentation scolaire, donnent quelques indications de l'efficacité globale des écoles. L'évaluation du programme exige également de l'information sur d'autres éléments comme les retombées des dépenses supplémentaires engagées ou la manière dont la modification des programmes d'études a permis de réduire l'écart, au plan de la réussite scolaire, entre les jeunes Indiens et les autres enfants.

11.89 Les instruments de mesure pédagogique qu'utilisent la plupart des commissions scolaires sont habituellement conçus en fonction de populations urbaines et on ne juge pas qu'ils conviennent, au plan pédagogique, aux jeunes Indiens qui habitent surtout dans des régions rurales et isolées. Il en découle que les écoles ont souvent réduit leur utilisation de ces instruments.

11.90 Nous avons constaté qu'il n'existait pas de données ou de statistiques homogènes sur les résultats scolaires des jeunes Indiens relativement aux divers programmes d'enseignement utilisés. Le ministère n'a donc pu évaluer l'efficacité ou le rendement des écoles fédérales et des écoles administrées par les bandes. L'absence de données fiables a également empêché l'évaluation précise des besoins et a rendu pratiquement impossible la mesure des progrès accomplis dans certains domaines, par exemple celui de la réussite scolaire des jeunes Indiens.

11.91 Information financière. La banque des Données de base (éducation) est un système qu'utilise le ministère depuis cinq ans pour établir sa planification financière et procéder à l'attribution des fonds. Il y a planification financière deux fois par année : en juin, lorsqu'il faut obtenir des crédits supplémentaires à la suite de modifications apportées au coût et à la quantité des ressources requises et en novembre, lorsqu'il faut prévoir les sommes requises pour le prochain exercice et apporter des rajustements au coût et à la quantité des ressources requises pour l'exercice en cours.

11.92 Les définitions des divers services sont si larges qu'elles permettent des interprétations qui varient d'un bureau de district, ou d'un bureau régional, à l'autre, ce qui fait qu'il est impossible de comparer les services entre eux. On peut citer, comme exemple du manque d'uniformité d'une province à l'autre, le fait que dans certaines régions, on inclut dans les services d'enseignement les services du directeur de l'enseignement aux enfants d'une bande alors que dans d'autres régions, on y inclut les services des conseillers en orientation, malgré qu'en vertu de la politique du ministère, aucun de ces services ne doive officiellement être compris dans les services d'enseignement. Il a été impossible d'établir une base de données fiables à cause de ces lacunes. Les bureaux régionaux et les bureaux de district ne veillaient pas à ce que soit versée dans la Base de données (éducation) l'information que toutes les écoles leur fournissaient sur leurs besoins financiers. En outre, le ministère n'utilisait pas ces données pour répartir les ressources nécessaires entre les écoles.

11.93 Le ministère travaille présentement à améliorer le fonctionnement de cette base de données. Certains gestionnaires, dans les régions, tentent de leur propre initiative, sans y être amenés par l'administration centrale, de corriger la situation. Le personnel de l'administration centrale tente également de trouver le moyen d'améliorer le système ou d'en bâtir un neuf. Le ministère, s'il ne dispose pas d'une information fiable, ne peut vérifier s'il y a utilisation optimale des fonds consacrés aux programmes d'enseignement.

11.94 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait enrichir l'information que présente la Liste nominative par l'addition, notamment, d'information sur les résultats scolaires, ce qui fournirait des indications sur la qualité et l'étendue des services d'enseignement.

11.95 Il devrait améliorer sa banque des Données de base (éducation) et, pour ce faire, il devrait uniformiser sa définition des services et voir à ce que les besoins financiers soient établis au niveau des écoles, puis il devrait utiliser cette information pour établir sa planification financière et assurer une plus juste répartition des ressources.

La transmission des pouvoirs

11.96 Le gouvernement a déclaré, en 1973, que sa politique au chapitre de l'éducation des Indiens était de favoriser le contrôle, par les Indiens, de leur système d'éducation. Le ministère n'a pas précisé ce qu'il entendait par "contrôle, par les Indiens". On ne savait trop si cela voulait dire que l'on confiait aux Indiens l'utilisation et l'administration des écoles dans le cadre des politiques et des règlements établis par le ministère ou qu'ils seraient libres d'exercer leurs responsabilités et de prendre des décisions de la même manière que les membres élus des commissions scolaires des provinces.

11.97 Le ministère n'a pas précisé les étapes du processus de transmission des pouvoirs. En conséquence, il semble qu'il y ait un écart considérable entre ce que les regroupements indiens espèrent obtenir et ce que le ministère est prêt à leur céder.

11.98 Le ministère ne possède pas de critères, ou de liste de contrôle, qui lui permette d'avoir l'assurance, avant qu'il n'y ait transfert de contrôle à une organisation indienne, qu'existe une infrastructure appropriée qui permette à la bande indienne en question d'assurer l'administration et le fonctionnement d'une école. Les accords de transfert demeurent une question épineuse puisqu'il n'existe pas d'énoncés fermes des politiques et de la procédure à suivre, ni de directives opérationnelles précises, et que les parties intéressées n'ont pas réussi à s'entendre sur la manière dont les bandes devaient prendre la relève.

11.99 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait préciser ce qu'il entend par "contrôle par les Indiens" afin que l'on sache si l'organisation indienne qui prend la relève ne se voit confier que l'administration des écoles ou leur gestion complète de l'enseignement. Il devrait se doter d'un énoncé précis des politiques et de la procédure à suivre pour la transmission, aux organisations indiennes, des pouvoirs de contrôle sur les systèmes scolaires.

Le Programme des revendications des autochtones

Introduction

11.100 Le ministre des Affaires indiennes, dans une déclaration faite à la Chambre des communes, le 8 août 1973, sur la question des revendications des Indiens et des Inuit, a déclaré que le gouvernement du Canada reconnaissait deux grandes catégories de revendications : les revendications globales et les revendications particulières. Les revendications globales ont trait aux droits ancestraux des aborigènes. Les revendications particulières portent sur l'administration des terres et des autres biens qui appartiennent aux Indiens, par exemple les deniers des Indiens tels que définis dans la Loi sur les Indiens, et sur le respect des traités (pièce 11.5) et d'autres ententes conclus avec les Indiens.

(Cette pièce n'est pas disponible)

11.101 Le ministère fournit une aide financière aux groupes autochtones afin qu'ils puissent étayer leurs revendications territoriales et en négocier le règlement. Il a ainsi fourni, au cours des treize dernières années, 35 millions de dollars, sous forme de contributions, afin que puissent être effectuées des recherches sur les droits des Indiens et des Inuit et sur les traités, et pour la communication des dossiers des revendications. Des prêts remboursables qui se chiffrent à 99 millions de dollars ont aussi été accordés aux réquérants autochtones.

Étendue de la vérification

11.102 Nous avons choisi l'une des trois revendications globales qui avaient été réglées et nous avons examiné les activités qui ont conduit au règlement de la réclamation. Nous n'avons examiné en détail aucune réclamation particulière, mais nous avons examiné les méthodes de gestion utilisées dans le cadre de l'aide financière octroyée aux requérants autochtones pour que soient effectuées les recherches requises et que soient établis et présentés les dossiers des revendications globales et particulières ainsi que les méthodes utilisées relativement aux prêts accordés aux requérants autochtones pour leur permettre de négocier le règlement de leurs revendications.

Les revendications globales

11.103 La politique et les objectifs du gouvernement en ce qui a trait aux revendications globales sont présentés dans une brochure intitulée En toute justice que le ministère a publiée en 1981. En voici les trois points essentiels :

...le gouvernement exige que les négociations et la formule de règlement abordent tous les aspects voulus pour éviter que la revendication puisse être représentée plus tard. En d'autres termes, tout règlement de revendication foncière doit être final.
Les négociations visent à traiter les questions non politiques reliées à l'idée des droits fonciers des Autochtones, comme les terres, les compensations, les droits sur la faune et dans certains cas l'autonomie administrative locale.
La politique a pour objet premier l'échange de droits fonciers autochtones qui sont non définis contre des droits et des avantages concrets. La loi qui consacre le règlement garantit ces droits et ces avantages.
11.104 La Convention de la Baie James et du Nord québécois prévoit des indemnités pécuniaires qui totalisent 232,5 millions de dollars (34 millions versés par le gouvernement fédéral et 198,5 millions par le gouvernement du Québec) et octroie aux autochtones un droit particulier d'utilisation des terres. La Convention décrit également certaines obligations précises.

11.105 Toutefois, plusieurs dispositions importantes qui ont trait à ces obligations particulières ne sont pas suffisamment précises pour engager le Canada à fournir un niveau de financement et de services ou à réaliser les buts fixés avant une date précise. La Convention, par exemple, stipule que la province de Québec et le gouvernement fédéral doivent fournir, à chaque communauté Cree, une aide financière et technique pour la construction ou l'acquisition a) d'un centre communautaire, b) d'installations sanitaires et c) d'installations et de matériel de lutte contre les incendies. Toutefois, cette aide ne sera fournie, selon la Convention, que dans la mesure où les moyens financiers du gouvernement fédéral et de la province de Québec le permettront. Aucun des deux gouvernements n'est engagé à réaliser ces projets dans un laps de temps donné.

11.106 Au niveau fédéral, le MAINC assume la responsabilité générale du contrôle du respect de la Convention et a charge de l'application de certains de ses articles. Plusieurs autres ministères y sont également engagés, notamment le ministère de l'Environnement, le Secrétariat d'État, le ministère des Transports, celui de l'Emploi et de l'Immigration ainsi que celui de l'Expansion industrielle régionale, et la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Ces ministères et organismes ont participé à la négociation des articles de la Convention qui les intéressent, mais ils n'ont pas tous fourni le même effort en ce qui a trait au respect de leurs obligations.

11.107 Il est essentiel qu'un ministère soit chargé de coordonner la mise en vigueur des ententes. Bien qu'il s'agisse là du rôle du MAINC, ce dernier, avons-nous pu constater, ne peut exercer sur les autres ministères et organismes fédéraux l'influence requise pour les obliger à remplir les obligations que leur imposent les ententes.

11.108 La Convention précise les obligations du gouvernement et cela a suscité chez les autochtones l'espoir que tout cela se concrétiserait dans des délais raisonnables. Toutefois, le manque de précision, le fait de ne pas mettre de côté les ressources requises pour tenir ses engagements et le fait également de ne pas toujours les confier à un ministère particulier dans le cadre d'un plan de mise en oeuvre approuvé, ont sérieusement fait obstacle à la réalisation de certains éléments de la Convention. Le ministère a évalué à 190 millions de dollars le coût, en dollars constants, de la réalisation des obligations auxquelles on n'a pas encore donné suite. Le Cabinet, après avoir pris connaissance des résultats d'une étude mixte sur l'application de la Convention, étude effectuée par le ministre des Affaires indiennes et par celui de la Justice, a approuvé que l'on accroisse de 61,4 millions, pour la période allant de 1982-1983 à 1986-1987, les sommes consacrées à la réalisation de certaines obligations prévues dans la Convention.

11.109 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait voir, lorsqu'il a à négocier le règlement de revendications produites par les autochtones, à ce que l'entente officielle soit accompagnée d'un plan de mise en oeuvre détaillé. Ce plan devrait énumérer toutes les obligations, préciser l'attribution des responsabilités et fournir une estimation raisonnable des délais et des coûts prévus. Il faudrait que le Cabinet prenne connaissance du plan avant que ne soit signée l'entente finale, afin qu'il puisse connaître toutes les dispositions de l'entente, les engagements prévus par celle-ci et les coûts qu'entraînera la réalisation de ces engagements.

11.110 Rapport au Parlement. L'article 10 de la Loi sur le règlement des revendications des autochtones de la Baie James et du Nord québécois oblige le ministre des Affaires indiennes à présenter à la Chambre des communes un rapport annuel sur l'application des dispositions de la loi, au cours de la période écoulée. Ce rapport, au cours de la période qui s'étend de 1978 à 1998 inclusivement, doit être présenté dans les 60 jours suivant le premier de l'An de chaque année.

11.111 Nous nous attendions donc à trouver huit rapports annuels. Nous n'en avons trouvé que deux : un rapport déposé à la Chambre le 18 novembre 1980 et le rapport d'une étude effectuée en 1982 sur la mise en application de la Convention, rapport déposé le 8 juillet 1982.

11.112 Nous avons appris que le Secrétariat aux affaires de la Baie James et du Nord Canadien avait rédigé un rapport provisoire qui couvre la période allant de 1982 à 1985, inclusivement. Ce rapport n'a toutefois pas été présenté au Parlement.

11.113 Le ministère n'a donc pas respecté les dispositions de la loi. Le mécanisme des comptes rendus qui devait permettre au Parlement de contrôler la mise en application du règlement des revendications a donc eu de sérieux ratés.

11.114 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, en conformité avec les dispositions de l'article 10 de la Loi sur le règlement des revendications des autochtones de la Baie James et du Nord québécois, devrait présenter chaque année au Parlement un rapport sur l'application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

L'aide financière accordée aux requérants

11.115 Un groupe d'Indiens qui désire obtenir des fonds relativement à la présentation et au règlement d'une revendication globale ou d'une revendication particulière doit présenter son plan de travail et ses budgets. Le ministère en fait ensuite l'analyse. Il y a par la suite attribution de fonds tirés des crédits disponibles. Un accord est ensuite signé dans lequel sont précisées les modalités du financement ou du remboursement du prêt consenti ainsi que l'obligation pour le groupe de présenter la documentation à l'appui de la revendication. Des vérifications antérieures auprès du ministère ont révélé certains problèmes, par exemple des lacunes du système de comptabilité financière, le versement des prêts avant que ne soient reçus les billets à ordre et le défaut de déduire le montant des prêts du montant du règlement des revendications. Le ministère a corrigé ces failles et il semble contrôler de manière satisfaisante le processus de règlement des revendications et veiller ainsi à ce que l'aide financière octroyée soit raisonnable.

Le Programme des affaires du Nord

Le rôle du fédéral dans le Nord

11.116 L'objectif du Programme des affaires du Nord (PAN), énoncé dans la Partie III du Budget des dépenses de l'exercice 1985-1986, est de "favoriser, en collaborant avec les gouvernements territoriaux et en coordonnant l'activité des ministères et organismes fédéraux, le développement social, culturel et politique et l'expansion économique du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest, en mettant l'accent sur les besoins des autochtones du Nord et sur la protection de l'environnement du Nord."

11.117 Le gouvernement fédéral demeure propriétaire des terres du Nord. Il est le propriétaire de la majorité des terres et des ressources qui existent au nord du 60e parallèle. Le ministère, dans l'application du PAN, est l'agent principal du gouvernement en ce qui concerne la conception et la mise en application des programmes de développement social, culturel et économique et, partant, fait en quelque sorte office de gouvernement provincial, situation unique au sein du régime fédéral. Ses activités sont, pour la plupart, régies par des lois.

11.118 Transfert de responsabilités. Bien que le ministère assume la responsabilité principale des affaires du Nord, plusieurs autres ministères, par exemple les ministères de l'Environnement, des Pêches et des Océans, des Transports, et de la Santé nationale et du Bien-être social, ont également un rôle important à jouer. En outre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien délègue une fraction importante de ses pouvoirs et de ses responsabilités aux gouvernements du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest afin qu'ils puissent administrer leur territoire. Le Programme des affaires du Nord est quelque peu freiné par l'incertitude qui existe quant à l'étendue des responsabilités que ses administrateurs doivent assumer au sein du régime fédéral, notamment en ce qui concerne la délégation de ces responsabilités aux gouvernements des territoires du Nord. Ces administrateurs doivent, en outre, comme les gouvernements provinciaux, voir à satisfaire le mieux possible des intérêts rivaux et souvent incompatibles, c'est-à-dire répondre aux demandes des citoyens, assurer une utilisation rationnelle des ressources et veiller à la protection de l'environnement.

11.119 Au total, en 1985-1986, 127,7 millions de dollars et 870 années-personnes ont été consacrés au PAN. De ces ressources, 9,4 millions de dollars et 123 années-personnes ont été affectés à l'Administration du pétrole et du gaz des terres du Canada (APGTC). Le reste de ces ressources, soit 118,3 millions de dollars et 747 années-personnes, a servi à diverses activités dont plusieurs étaient liées au contrôle des ressources.

11.120 Le ministère verse également des paiements de transfert aux gouvernements des territoires. Ces paiements se sont chiffrés, en 1985-1986, à 440 millions de dollars pour les Territoires du Nord-Ouest et à 138 millions pour le Yukon.

Étendue de la vérification

11.121 Notre Bureau n'avait jamais auparavant fait une vérification intégrée du Programme des affaires du Nord. Au cours de notre vérification, nous avons examiné les systèmes, les méthodes et les contrôles principaux de gestion utilisés relativement à deux projets de développement économique - la société minière Nanisivik, dans les Territoires du Nord-Ouest, et la société minière Cyprus Anvil au Yukon. Nous avons examiné la gestion des ressources renouvelables et les activités de protection de l'environnement qui s'y rattachent. Nous n'avons pas examiné le transfert de ressources à l'APGTC, les ressources consacrées aux routes du Nord ou les paiements de transfert versés aux gouvernements territoriaux. Une vérification distincte sera effectuée dans les deux premiers cas. Le Bureau, en ce qui a trait aux paiements de transfert, fait chaque année des vérifications d'attestation.

La planification et le développement économique

11.122 La société minière Nanisivik. Au début des années 70, à la demande de la société Nanisivik Mines Ltd, le gouvernement fédéral a consenti une aide financière se chiffrant, au total, à 24,4 millions de dollars afin que puisse être exploitée, à Strathcona Sound, North Baffin Island, dans les Territoires du Nord-Ouest, une mine de plomb-zinc. Cette aide consistait à fournir un aéroport de type B pour régions arctiques et un quai public (8,3 millions de dollars versés par le ministère des Transports), 21 milles de routes (3,2 millions versés par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien), et, par l'intermédiaire du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, les plans et devis ainsi que la construction d'une agglomération (12,9 millions de dollars). De cette somme totale, 6,5 millions étaient récupérables. La pièce 11.6 décrit le processus de coordination et de contrôle utilisé dans le cas de la société minière Nanisivik.

(Cette pièce n'est pas disponible)

11.123 Le gouvernement, en contrepartie de son aide, a reçu des actions représentant une participation de 18 p. 100 dans la société. Au 31 mars 1985, les bénéfices non répartis de la société se chiffraient à plus de 57 millions de dollars. Dans une étude technique effectuée pour le compte du ministère, en 1985, on calculait que les bénéfices non répartis se situeraient à 70 millions de dollars à la fin de la durée de production de la mine, cette estimation étant basée sur la situation financière actuelle de la société et calculée à l'aide de la valeur actualisée des rentrées nettes de fonds prévues. Toutes proportions gardées, la participation du gouvernement (18 p. 100) est présentement évaluée à quelque 10 millions de dollars, si l'on se fonde sur certaines projections relatives au prix futur du zinc.

11.124 Le gouvernement, lorsqu'il a consenti à octroyer cette aide, avait pour objectifs : de promouvoir le développement des régions du Nord, de créer des possibilités d'emploi et d'autres avantages pour les habitants du Nord, de se donner l'expérience de l'exploitation des ressources dans l'Arctique et d'accroître le rôle du Canada dans le transport maritime dans l'Arctique.

11.125 Nous avons examiné les systèmes, les méthodes et les contrôles principaux de gestion utilisés pour les projets et nous les avons jugés satisfaisants.

11.126 Nous avons relevé le fait, cependant, que la participation (18 p. 100) du gouvernement au capital-actions de la société Nanisivik Mines Ltd, acquise en échange de l'aide financière fournie, n'avait pas été signalée dans les Comptes publics de 1984-1985. Il pourrait être difficile pour le gouvernement de réaliser cet actif à sa valeur puisque sa participation minoritaire ne lui permet pas d'exiger le versement des fonds. Il n'en reste pas moins que c'est là un actif qui s'ajoute à l'avoir du Canada.

11.127 Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien devrait voir à ce que la participation du gouvernement dans la société Nanisivik Mines Ltd apparaisse dans l'état de l'actif et du passif publié dans les Comptes publics.

11.128 La mine Cyprus Anvil. Avant le second semestre de 1982, la société minière Cyprus Anvil, de Faro, au Yukon, fournissait annuellement 740 emplois directs et générait, directement et indirectement, 40 p. 100 du produit territorial brut du Yukon. Vers le milieu de 1982, la mine a connu des difficultés financières et a mis fin à ses opérations. Ces difficultés étaient attribuables au fardeau trop lourd de sa dette, à des coûts d'exploitation élevés (la société n'avait pas enlevé une couche suffisante de morts-terrains, ce qui aurait permis l'extraction continue du minerai), et à la chute des prix internationaux du plomb et du zinc en 1981. Le gouvernement a alors fourni une aide financière afin que la mine puisse continuer d'être exploitée et d'être viable et afin qu'elle renforce ainsi l'économie du Yukon. En 1983, le gouvernement fédéral a accepté de fournir une aide allant jusqu'à 25 millions de dollars afin que la mine puisse poursuivre son exploitation et fournir de l'emploi continu. De ce montant, 19,6 millions de dollars avaient été versés comme prêt sans intérêt; le reste, soit 5,4 millions, était une contribution versée en puisant aux fonds réguliers du programme. L'aide du gouvernement devait permettre de financer 50 p. 100 du coût de l'enlèvement de 8,6 millions de verges cubes supplémentaires de morts-terrains afin que la mine puisse retrouver, à long terme, un rythme d'exploitation à découvert qui rende l'entreprise viable. Ce projet devait fournir de l'emploi à 210 personnes pour deux ans.

11.129 Nous avons examiné les systèmes, les méthodes et les contrôles principaux utilisés pour la gestion de cette aide et nous les avons jugés satisfaisants.

11.130 Nous avons constaté que le programme d'extraction à découvert donnait de bons résultats. Les morts-terrains étaient enlevés en plus grande quantité, plus rapidement et à un coût moindre que celui qui était inscrit au plan de relance de la mine. Du total du prêt, seulement 17,3 millions de dollars furent utilisés.

La gestion des ressources renouvelables et la gestion de la protection de l'environnement

11.131 Gestion des ressources renouvelables. Le Programme administre l'application de quatre lois et des règlements connexes sur l'utilisation et l'aménagement des terres, des plans d'eau et des forêts du Nord. Les processus centraux de gestion sont les suivants : le tri, par des agents du ministère ou par des comités consultatifs, au sein desquels sont représentés les principaux groupes d'intérêts, des projets d'utilisation des ressources; la délivrance des permis requis et l'exposé des modalités d'exploitation; le contrôle, par des inspecteurs, du respect des modalités imposées. Les responsables du programme voient également à ce que soit appliqué dans le Nord le Processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement (PEEE) et à ce que soient effectuées et financées des recherches sur les ressources renouvelables du Nord. Ils ont également mis en place récemment un système de planification de l'utilisation des terres.

11.132 En 1984-1985, on a consacré à cette activité 40,8 millions, soit 26 p. 100 des dépenses du PAN, exception faite des subventions et des contributions, et 359 années-personnes, soit 43 p. 100 des années-personnes de ce programme. Nous avons vérifié la mesure dans laquelle le ministère avait respecté les dispositions des lois et les modalités du PEEE.

11.133 Nous n'avons relevé aucune faiblesse importante en ce qui a trait aux systèmes de réglementation et de contrôle de responsabilités exercées dans le cadre du Programme des affaires du Nord relativement aux ressources renouvelables. Toutefois, l'utilisation des systèmes ne s'est faite jusqu'à maintenant que dans des situations sans grands problèmes. Le seul grand projet réalisé dans ce cadre, le pipe-line Norman Wells, était relativement modeste en comparaison des autres projets entrepris dans le Nord.

11.134 Un mécanisme d'importance qui permettra au PAN d'encadrer avec efficacité les projets futurs de développement consistera dans l'établissement d'un contrôle des répercussions. Dans ce contexte, le contrôle des répercussions signifie analyser les conditions imposées aux exploitants au moment de la délivrance des permis afin de vérifier si elles mènent aux résultats voulus et, dans le cas contraire, trouver comment il faudrait modifier ces conditions pour obtenir les résultats escomptés. Ce genre d'analyse est une activité encore récente, la raison première en étant que ce n'est qu'au cours des dernières années qu'il a été possible d'obtenir un volume suffisant de données pour l'effectuer.