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Poissons et vies aquatiques

Le monde sous-marin

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LES SAUMONS DU PACIFIQUE

photo de la page couvertureVie et histoire des saumons

Il existe sept espèces de saumons dans les eaux nord-américaines du Pacifique : le quinnat, le kéta, le coho, la truite fardée, le saumon rose, le saumon arc-en-ciel et le saumon rouge. Si chaque espèce a un aspect et des habitudes qui lui sont propres, tous ces saumons partagent de nombreuses caractéristiques communes. Ils sont anadromes - les œufs sont pondus et éclosent en eau douce, et les jeunes passent au moins une partie de leur vie en eau douce avant de descendre vers la mer pour achever leur croissance et atteindre la maturité sexuelle. Leur aptitude à retrouver le cours d'eau natal quand vient le temps de la reproduction est l'un des aspects les plus remarquables des saumons. On sait que ces poissons parcourent des milliers de kilomètres dans l'océan, affrontent les courants violents des rivières et doivent même franchir des chutes d'eau pour revenir à l'endroit où ils ont éclos. Les saumons du Pacifique, à l'exception de la truite fardée et du saumon arc-en-ciel, ne frayent qu'une fois et meurent dans les jours qui suivent la préparation des nids dans le gravier et l'accouplement. Leurs cadavres redescendent les rivières au fil de l'eau et se décomposent, chargeant ainsi l'eau de matières nutritives utiles aux autres espèces animales et végétales. Vivants ou morts, les saumons constituent aussi une importante source de nourriture pour des oiseaux comme les aigles et les goélands, et pour des mammifères comme les ours et les loutres. De cette façon, les saumons contribuent à la santé des écosystèmes d'eau douce.

Les saumons pondent dans des nids que les femelles creusent dans le gravier des cours d'eau ou, dans certains cas, du littoral des lacs. Le gravier doit être exempt de limon et bien oxygéné. Les saumoneaux ont besoin d'eau froide, propre et bien oxygénée. Ils sont très vulnérables à toutes les activités qui réduisent la qualité de leur habitat dulçaquicole. Les opérations industrielles comme l'exploitation forestière et l'agriculture, et d'autres activités humaines comme l'aménagement des routes et la construction urbaine peuvent endommager ou détruire les habitats d'eau douce des saumons si elles ne sont pas pratiquées de façon écologique.

Les saumons existent depuis des millions d'années. Ils constituent la base de la nourriture des Premières Nations qui vivent le long de la côte et à l'intérieur de la Colombie-Britannique, et cela depuis des milliers d'années. À partir de la fin du XIXe siècle, les saumons ont fait l'objet d'une intense pêche commerciale, qui est à la base de la création et de la prospérité de nombreuses collectivités côtières. La pêche sportive du saumon est aussi un loisir de prédilection tant pour les résidants que pour les visiteurs.Outre son mode de fraye, chaque saumon possède un aspect et un cycle biologique particuliers.

Figure 1. Quinnat (Oncorhynchus tshawytscha)

Figure 1. Quinnat (Oncorhynchus tshawytscha)

Le quinnat (Oncorhynchus tshawytscha), le plus grand des saumons du Pacifique, pèse entre 3 et 50 kilogrammes lorsqu'il revient frayer. Ce poisson, qu'on appelle aussi chinook ou saumon royal, est parfois qualifié de saumon de printemps parce que certaines populations ou « stocks » reviennent frayer dès le printemps. Pour de nombreuses Premières Nations de Colombie-Britannique, les quinnats étaient donc souvent les premiers saumons de l'année. D'autres stocks reviennent pendant l'été et l'automne. Dans les grands cours d'eau comme le Fraser, des quinnats appartenant à différents stocks reviennent de mars à novembre, avec des sommets au début de juillet, à la mi-août et au début d'octobre. Le cycle biologique des quinnats est varié et complexe. Les populations des petits fleuves côtiers remontent généralement à l'automne, tandis que celles qui frayent dans les eaux d'amont de grands fleuves comme le Fraser et la Skeena reviennent généralement au début du printemps. Les jeunes des populations à remonte d'automne descendent généralement vers l'océan, soit immédiatement, soit quelques mois après avoir éclos et émergé du gravier. Les jeunes des remontes du printemps et de l'été passent généralement un an en eau douce.

Même dans les petits fleuves côtiers, on peut trouver différents types de quinnats présentant diverses combinaisons de calendrier de remonte (printemps/été ou été/automne) et de début du cycle biologique (descente vers l'océan dès l'éclosion, après 90 jours ou après un an). Une fois dans l'océan, les saumoneaux passent plusieurs semaines ou plusieurs mois dans l'estuaire ou près de la côte. En général, les quinnats de type dulçaquicole à migration printanière ou estivale vont plus loin dans l'océan que les poissons de type océanique à migration précoce, dont la distribution est plus côtière. Les alevins des populations des eaux d'amont ou des rivières nordiques plus froides passent un an en eau douce après l'émergence.

Les quinnats, particulièrement lorsqu'ils sont gros et âgés, sont piscivores, c'est-à-dire qu'ils mangent du poisson. Étant donné leur grosse taille et leur présence dans les eaux côtières, les quinnats sont une des proies favorites des épaulards, mais aussi des pêcheurs sportifs et commerciaux. Ce saumon est généralement pêché à la ligne, à l'aide de leurres ou d'hameçons appâtés qui sont traînés dans l'eau. Les quinnats ont ceci de particulier que la chair des adultes est de couleur variable, puisqu'elle va du blanc au rouge vif en passant par le rose, tandis que les autres espèces présentent normalement une chair de couleur uniforme dans toutes les populations, du blanc chez le saumon kéta au rouge vif chez le saumon rouge.

Figure 2. Saumon rose (Oncorhynchus gorbuscha)

Figure 2. Saumon rose (Oncorhynchus gorbuscha)

Le saumon rose (Oncorhynchus gorbuscha) est un poisson dont les remontes atteignent un effectif prodigieux dans de nombreux cours d'eau de Colombie-Britannique. C'est le plus petit, le plus jeune à la maturité et le plus abondant des saumons du Pacifique. Les géniteurs pèsent généralement de 1,5 à 3 kilogrammes, et sont toujours âgés de deux ans. On appelle parfois ce poisson le saumon à bosse : à la maturité, les mâles sont dotés d'une grosse bosse sur le dos, ce qui les fait paraître plus gros pendant les batailles territoriales sur les frayères. Tout de suite après avoir émergé du gravier, au printemps, les alevins entrent dans l'océan et, après avoir passé quelques jours à plusieurs mois dans l'estuaire ou dans la zone côtière, ils s'éloignent vers le large en grands bancs. En pleine mer, les saumons roses se nourrissent des petits animaux presque invisibles qui constituent le zooplancton, et particulièrement de krill, qui donne à leur chair la couleur rose vif d'où est tiré leur nom. Dans de nombreux cours d'eau, les saumons roses abondent chaque année, mais dans d'autres ils n'apparaissent qu'une année sur deux. Dans le Fraser, les saumons roses abondent les années impaires (2003, 2005, etc.), mais ils sont rares les années paires. Ces saumons, qui autrefois étaient capturés exclusivement au filet maillant et à la senne, sont maintenant aussi pêchés à la ligne. Des saumons roses d'année impaire ont été accidentellement introduits en 1955 dans les Grands Lacs, et ils se sont depuis répandus dans les cinq lacs. On observe qu'une remonte d'année paire s'est également développée; il s'agit des descendants de géniteurs d'année impaire âgés de trois ans.

Figure 3. Saumon rouge (Oncorhynchus nerka)

Figure 3. Saumon rouge (Oncorhynchus nerka)

Le saumon rouge (Oncorhynchus nerka) a été la première espèce à faire l'objet d'une pêche commerciale. Ce saumon était considéré comme convenant particulièrement bien à la mise en conserve à cause de sa couleur rouge vif et de sa teneur élevée en huile; le saumon rouge est généralement appelé sockeye dans les conserves. Ce poisson est légèrement plus grand que le saumon rose, et il atteint habituellement la maturité à l'âge de quatre ou cinq ans. À la différence des jeunes des autres espèces, qui vivent en eau courante, les jeunes saumons rouges se retrouvent dans les lacs, où ils se nourrissent de zooplancton. On trouve cependant certaines populations qui se comportent tout à fait comme le saumon rose et le saumon kéta, et dont les jeunes descendent vers l'océan peu de temps après l'éclosion. Les scientifiques pensent que ces saumons rouges de type fluvial sont la forme ancestrale qui peuplait tous les lacs de la Colombie-Britannique après la fin de la dernière glaciation, il y a 14 000 ans. Le kokani, que l'on retrouve dans de nombreux lacs de la Colombie-Britannique, est en fait un saumon rouge confiné en eau douce. Dans certains cas, ce poisson vit dans des lacs dont sont absents les saumons rouges anadromes, tandis que dans d'autres lacs les deux types sont présents. Étant donné que l'océan Pacifique offre une nourriture plus diversifiée aux jeunes saumons rouges, ils grossissent davantage et plus vite que les kokanis. Bien que le saumon rouge et le kokani puissent se croiser, les jeunes issus de cette union sont mal adaptés à la vie en lac comme en mer, et ne semblent pas survivre.

L'une des caractéristiques les plus remarquables des saumons rouges est un phénomène appelé « dominance cyclique ». Dans bon nombre des lacs du Fraser, tout particulièrement, les saumons rouges abondent une année sur quatre. Un saumon rouge peut atteindre la maturité entre deux et six ans mais, dans la plupart des systèmes, un seul groupe d'âge (généralement les poissons âgés de quatre ans) domine, de sorte que la plupart des descendants issus d'une ponte reviennent frayer quatre ans plus tard. Dans de nombreuses populations, toutes les années de ponte sont d'abondance à peu près égale mais, dans bon nombre des populations du Fraser, on observe une quantité beaucoup plus grande de poissons pendant l'une des années de ponte, le « cycle dominant », que pendant les trois autres années. Cette dominance cyclique amène des remontes spectaculaires dans la rivière Adams tous les quatre ans (2002 est une année de cycle dominant). Malgré les nombreuses hypothèses formulées, on ne s'explique pas vraiment ce phénomène.

Les saumons rouges semblent parfaitement adaptés à leur lac natal. Des aspects comme l'itinéraire que l'alevin doit suivre pour aller de la frayère au lac, le calendrier de la fraye et le moment de l'émergence sont caractéristiques de chaque lac. Cela donne un caractère particulier à chaque population de saumons rouges, mais signifie aussi qu'il ne faut pas compter transférer des saumons rouges d'un lac à l'autre. Les saumons rouges sont généralement capturés au filet maillant et à la senne au cours de la migration qui les ramène vers leurs frayères.

Figure 4. Kéta</i>  (Oncorhynchus keta)

Figure 4. Kéta (Oncorhynchus keta)

Le kéta (Oncorhynchus keta), qui pèse de 3 à 10 kilogrammes, est le grand saumon qui fraye dans le cours inférieur de la plupart des cours d'eau côtiers pendant l'été et l'automne. On reconnaît facilement les kétas géniteurs à la bande horizontale sombre qui orne leurs flancs, aux grandes dents des gros mâles (ce qui leur vaut le nom de saumon-chien) et à leur livrée bigarrée. Le kéta est le plus largement répandu des saumons du Pacifique. En Amérique du Nord, on le retrouve de Monterey (Californie) jusqu'à l'est du fleuve Mackenzie, en mer de Beaufort, et l'espèce peut constituer 50 pour cent de la biomasse totale de toutes les espèces de saumons du Pacifique combinées.

Le nom « kéta », qui signifie poisson, vient de la langue des Nanaïs, peuple du Kamtchatka, dans l'est de la Russie, et révèle l'importance de cette espèce pour les peuples autochtones de toute la frange du Pacifique. Comme les jeunes du saumon rose, les alevins de kéta ne restent pas en eau douce, mais descendent immédiatement vers l'océan où ils passent de deux à six ans et accomplissent un grand périple. Le kéta est peut-être le saumon du Pacifique qui fait l'objet de l'aquaculture la plus intensive. À la différence des autres saumons du Pacifique, le kéta n'est pas un bon sauteur, et les chutes d'eau qui n'arrêtent pas les autres espèces peuvent souvent empêcher sa migration vers l'amont.

La chair du kéta, qui est relativement pauvre en huile, se prête particulièrement bien au fumage à froid, ce qui, combiné à son abondance, fait de cette espèce un aliment de base des Premières Nations des régions côtières. En général, les kétas frayent près de l'océan dans les petits fleuves côtiers, zones qui sont souvent très vulnérables à la destruction de l'habitat dans un bassin versant. Des activités comme l'exploitation forestière, l'agriculture, la construction de routes et de ponts et le développement urbain déversent des sédiments dans les cours d'eau. Le défrichage des rives fait monter la température. Tous ces effets se concentrent dans les portions inférieures des cours d'eau côtiers, et peuvent gravement nuire au kéta (et au saumon rose). Les kétas sont généralement capturés au filet devant l'embouchure des cours d'eau, mais sont aussi pris à la traîne dans le cadre de la pêche commerciale et sportive.

Figure 5. Coho  (Oncorhynchus kisutch)

Figure 5. Coho (Oncorhynchus kisutch)

Le coho (Oncorhynchus kisutch) se retrouve dans la plupart des cours d'eau qui se jettent dans le Pacifique, de sorte qu'on compte en Colombie-Britannique plus de populations de coho que de n'importe quel autre saumon du Pacifique. Les jeunes cohos passent généralement une année en eau douce mais, dans les populations du Nord, une forte proportion de juvéniles passent deux ou même trois ans en eau douce avant d'entrer dans l'océan. Les jeunes cohos recherchent les petits ruisseaux, les marais et les étangs, mais on retrouve aussi des populations de cohos dans les lacs et les grands cours d'eau. Dans certains fleuves côtiers, il semble qu'un grand nombre d'alevins nouvellement émergés descendent vers l'océan, tout comme les kétas et les saumons roses. En eau douce, les cohos juvéniles ont un fort instinct territorial, et ils défendent vigoureusement leur espace contre les autres cohos et les truites. Les jeunes cohos peuvent porter une livrée brillamment colorée, avec une teinte rouge orangé sur le corps et de spectaculaires bordures noires et blanches sur les nageoires anale et dorsale. Lorsqu'ils défendent leur territoire, ils présentent leur flanc à l'intrus de façon menaçante et étalent leurs nageoires pour apparaître aussi gros que possible. En même temps, ces petits poissons peuvent se mettre à vibrer et à s'agiter d'une façon qu'on a appelée la « danse wigwag ». Le comportement des jeunes cohos a été étudié en profondeur.

L'espace est toutefois limité dans les cours d'eau, ce qui restreint le nombre de jeunes cohos et suscite une intense compétition pour les territoires. Les individus qui ne peuvent pas trouver ou défendre un territoire survivent difficilement. Une des conséquences de cette territorialité, c'est qu'un cours d'eau produit généralement le même nombre de smolts chaque année, quel que soit le nombre des adultes qui y ont frayé. Ce nombre moyen de smolts est appelé la « capacité biotique » du cours d'eau. À la différence des autres saumons, qui accomplissent généralement une longue migration dans l'océan, le coho demeure dans les eaux côtières. Du fait de sa présence près des côtes, de la bonne volonté avec laquelle il mord à l'appât, de son agilité et de son comportement combatif, le coho est un poisson très recherché des pêcheurs sportifs. Il est aussi capturé en grande quantité par les ligneurs commerciaux. Au cours des dernières décennies, le coho a été fortement exploité, et certaines populations se sont effondrées, ce qui a amené l'imposition de restrictions sévères sur toutes les pêches.

Figure 6. Saumon arc-en-ciel (Oncorhynchus
            mykiss)

Figure 6. Saumon arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss)

Le saumon arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss) était autrefois classé dans le genre Salmo (celui des truites), mais les biologistes considèrent maintenant ce poisson comme étant plus étroitement apparenté aux saumons du Pacifique qu'aux autres truites. Tout comme le saumon rouge, le saumon arc-en-ciel a une forme d'eau douce bien connue que l'on appelle truite arc-en-ciel, et dont il existe six sous-espèces le long de la frange du Pacifique. Les jeunes saumons arc-en-ciel portent une livrée brillamment colorée avec des touches de rouge, de vert-jaune, d'orange et d'or. Le saumon arc-en-ciel peut vivre jusqu'à neuf ans, et il passe entre un et trois ans en eau douce avant de se transformer en smolt et de gagner l'océan. À la différence de la plupart des autres saumons du Pacifique, il peut dans certains cas survivre à la fraye et se reproduire plus d'une fois. Les poissons qui ont frayé et qui redescendent vers l'océan sont appelés charognards. Jusqu'à 20 pour cent des géniteurs, surtout des femelles, se reproduisent plus d'une fois, et certains individus peuvent frayer plusieurs fois (géniteurs multifraye). Comme dans le cas du quinnat et du saumon rouge, il existe des races de saumon arc-en-ciel qui se différencient par leur calendrier de migration de fraye.

Les poissons de la remonte d'hiver pénètrent dans les cours d'eau entre novembre et mai, et frayent peu de temps après. Les poissons de la remonte d'été entrent en eau douce à l'état immature entre avril et octobre. La fraye a lieu de janvier à mai pour les deux races. Une population est toujours constituée d'individus de la même race, même si les deux races peuvent se retrouver dans des cours d'eau proches. Les jeunes saumons arc-en-ciel aiment les eaux au courant rapide du cours principal des rivières, là où l'eau est froide et bien oxygénée. Les juvéniles plus âgés se tiennent plutôt dans des habitats profonds de fosse à bon écoulement. Ces préférences au niveau de l'habitat rendent ce saumon particulièrement vulnérable à certaines perturbations, notamment quand l'apport de sédiment comble les fosses, et quand le défrichage des rives fait disparaître la végétation qui ombrageait l'eau et maintenait sa fraîcheur. Après avoir pénétré dans l'océan, les saumons arc-en-ciel vont rapidement vers le large et se déplacent le long de la côte jusque dans le golfe d'Alaska. Le saumon arc-en-ciel n'est généralement pas capturé en mer par les pêches qui exploitent des espèces comme le coho et le quinnat et opèrent plutôt sur le littoral. La remonte d'été de saumon arc-en-ciel est vulnérable à la pêche aux filets qui vise la remonte d'été de saumon rouge, mais aussi à la pêche aux filets maillants de la Skeena. Des restrictions sur les engins, les lieux et les périodes de pêche ont été nécessaires pour réduire les prises du célèbre saumon arc-en-ciel de la Skeena. La remonte d'hiver des cours d'eau de l'est de l'île de Vancouver est actuellement très affaiblie à cause de la dégradation de l'habitat due au développement urbain et au déboisement, mais aussi à cause du faible taux de survie des smolts après leur entrée dans l'océan.

Figure 7. Truite fardée  (Oncorhynchus
            clarki)

Figure 7. Truite fardée (Oncorhynchus clarki)

La truite fardée (Oncorhynchus clarki) était classée dans le genre Salmo (celui des truites), mais les scientifiques ont conclu que cette espèce est plus proche des saumons du Pacifique que des truites. En Colombie-Britannique, on trouve des truites fardées anadromes ou côtières dans la plupart des cours d'eau et des lacs de la région côtière, ainsi que dans les grands fleuves comme la Skeena et le Fraser. Ce poisson est anadrome, c'est-à-dire qu'il se reproduit en eau douce mais passe une partie de sa vie dans l'océan. Toutefois, à la différence de la plupart des espèces anadromes, la truite fardée reste dans l'estuaire de son cours d'eau natal ou à proximité, et s'aventure rarement à plus de quelques kilomètres au large. À cause de ce comportement, la truite fardée n'est pas visée par les pêches en mer, mais c'est une des proies favorites des pêcheurs sportifs, qui la travaillent à la mouche et à la cuillère tournante devant l'embouchure des cours d'eau. Les jeunes truites fardées restent en eau douce pendant une année seulement, mais la plupart connaissent leur smoltification à l'âge de deux ans, tandis que certaines ne vont jamais en mer. Les adultes frayent du milieu à la fin de l'hiver, et se reproduisent pour la première fois à l'âge de trois ou quatre ans. La truite fardée, comme le saumon arc-en-ciel, peut se reproduire plus d'une fois. La longueur moyenne d'une truite fardée adulte est d'environ 45 centimètres. En eau douce, les jeunes truites fardées sont très adaptables, et occupent la plupart des types d'habitats, depuis les eaux vives jusqu'aux marais et aux étangs. Au cours des deux premières années, les jeunes truites fardées sont très difficiles à distinguer des jeunes saumons arc-en-ciel.

Le cycle de vie, de la fraye à l'éclosion, à la migration et à la croissance

Fraye
Si vous vous promenez en Colombie-Britannique le long d'un fleuve côtier pendant l'automne ou le début de l'hiver, vous aurez de bonnes chances d'observer des saumons du Pacifique. Les saumons pondent leurs œufs dans le gravier des cours d'eau ou sur les grèves des lacs alimentés par des sources. La femelle se tourne sur le côté, agite la queue et creuse ainsi une cavité qui constituera le nid où elle pondra ses œufs. Le mâle vient alors féconder les œufs avec son sperme (laitance). Parfois, plusieurs autres mâles s'approchent de la femelle au dernier moment pour féconder aussi les œufs. La femelle recouvre alors le nid de gravier. Elle peut ainsi creuser plusieurs nids avant la fin de la fraye. L'opération est épuisante - tous les saumons du Pacifique adultes, à l'exception du saumon arc-en-ciel et de la truite fardée, meurent peu de temps après s'être reproduits.

Incubation
Les œufs de saumon se développent pendant l'hiver, bien à l'abri dans leur nid, protégés du froid et de la rigueur des tempêtes hivernales. Vers le milieu ou la fin de l'hiver, les œufs éclosent, libérant de tout petits poissons appelés alevins vésiculés. Ces petits poissons ont de très gros yeux et portent une vésicule contenant le reste du sac vitellin. Ils peuvent être très actifs dans les interstices du gravier. Dans les rivières de l'intérieur ou du nord, où l'eau peut geler jusque dans le gravier, les alevins vésiculés s'enfoncent pour éviter la glace. Leur vésicule vitelline assure leur alimentation jusqu'au moment où ils émergeront du gravier au printemps pour commencer à se nourrir.

De l'alevin au smolt
Lorsque leur vésicule est résorbée, les alevins émergent du gravier, au printemps; ils mesurent seulement 2 centimètres de longueur, et sont vulnérables à des prédateurs comme les hérons, les canards et même les merles. Tandis que les alevins de saumon rose et de kéta se dirigent immédiatement vers l'océan, ceux des autres espèces se nourrissent et grandissent dans le ruisseau, la rivière ou le lac pendant une période pouvant aller jusqu'à trois ans : ce sont les tacons. Ils se préparent ensuite à la descente vers la mer, la dévalaison. À cette étape, on les appelle smolts, et ils mesurent jusqu'à 12 centimètres de longueur. Un revêtement argenté se forme sur leurs écailles, et ce camouflage les aide à échapper aux prédateurs. Ce revêtement les protège aussi pendant le passage de l'habitat d'eau douce à l'eau salée. Les smolts de toutes les espèces forment de grands bancs qui se déplacent dans les estuaires et dans les habitats littoraux. Ce comportement grégaire permet de réduire la prédation.

Saumons adultes
Un jour ou l'autre, tous les saumons se retrouvent dans l'océan ou les eaux côtières. Ils s'y nourrissent des abondantes ressources de plancton, de larves de crabes, de crevettes, de calmars et de petits poissons, ce qui leur permet de se développer rapidement. Selon l'espèce, le séjour en mer dure d'un été à cinq ans. Enfin, les saumons reprennent le chemin de leur cours d'eau natal; c'est la montaison. Ils cessent de s'alimenter avant d'entrer en eau douce. À partir de ce moment et jusqu'à leur mort après la fraye (à l'exception du saumon arc-en-ciel et de la truite fardée), les saumons survivent grâce à leurs réserves de graisses et de protéines.

L'une des caractéristiques extraordinaires des saumons du Pacifique, c'est leur aptitude à retrouver le cours d'eau où ils ont éclos. Des chercheurs ont montré que certains saumons reviennent exactement à l'endroit où ils sont sortis de l'œuf. Après des années de recherche, des scientifiques commencent à comprendre certains des aspects les plus complexes de la navigation des saumons. Pour revenir à sa rivière, un saumon semble se diriger en se servant à la fois du champ magnétique terrestre, de la navigation astronomique, de la lumière solaire polarisée et de son instinct qui le guide par rapport au rebord du plateau continental et à d'autres repères. Lorsqu'il se rapproche de son cours d'eau natal, le saumon semble se servir des odeurs particulières imprimées dans sa mémoire et datant du moment où il l'a quitté à l'état de smolt. La migration de certaines espèces, qui luttent contre la violence du courant et franchissent des chutes d'eau apparemment insurmontables pour remonter frayer, a inspiré de nombreuses histoires de persévérance et de courage. Lorsqu'enfin le saumon atteint sa frayère, son corps est couvert de blessures, ses nageoires sont déchirées, et il a perdu une bonne partie de son énergie. Mais grâce à la fraye, une nouvelle génération de saumons va voir le jour, puis redescendre vers la mer pour grandir et réécrire de nouveau tout le cycle de vie.

Les menaces qui pèsent sur les saumons du Pacifique

Les saumons sont menacés à la fois par l'homme et par la nature. Les menaces naturelles sont les conditions météorologiques extrêmes qui peuvent provoquer des crues capables d'emporter le gravier des frayères, des glissements de terrain qui bloquent les cours d'eau et même des éruptions volcaniques qui peuvent détruire des rivières entières. Les saumons du Pacifique sont remarquablement adaptés à de telles perturbations de l'habitat et peuvent facilement recoloniser les zones dégradées. En fait, quand, il y a 11 000 ans, les glaciers se sont retirés après la dernière glaciation, les saumons étaient confinés dans quelques petites zones refuges de l'est du Pacifique. Depuis, ils ont recolonisé le continent et se sont adaptés à pratiquement chaque rivière, fleuve et lac qu'ils peuvent atteindre.

Les menaces d'origine humaine sont plus graves que les menaces de la nature. Avant le contact avec les Européens, les Premières Nations pêchaient le saumon, et les ressources suffisaient amplement à leurs besoins. En 1852, la Compagnie de la baie d'Hudson a commencé à pratiquer la pêche commerciale. Dès 1870, le saumon en conserve, et particulièrement le saumon rouge, se vendait dans le monde entier. Les espèces autres que le saumon rouge étaient souvent rejetées parce que les conserveries ne les acceptaient pas. Le début du XXe siècle a vu se développer les scieries et l'exploitation forestière. Dans une bonne partie du sud de la Colombie-Britannique, les terres ont été défrichées, le plus souvent sans égard aux conséquences pour les cours d'eau. L'agriculture, l'extraction minière et les établissements humains ont continué à détruire l'habitat nécessaire au saumon. Avec la ruée vers l'or du début du XXe siècle, on a exploité des placers dans de nombreuses régions de l'intérieur de la Colombie-Britannique et du Yukon. L'extraction de l'or dans les cours d'eau est particulièrement néfaste pour les saumons, puisqu'on doit laver et tamiser de grandes quantités de gravier, opération qui libère un gros volume de sédiments qui vont colmater les frayères. La deuxième moitié du XXe siècle a vu se développer des pêches intensives, et certains stocks de saumons sont tombés à des niveaux très bas. Bon nombre de ces pêches capturaient des poissons provenant de plusieurs populations, dont certaines ne pouvaient pas soutenir une exploitation intensive. Ces populations ont été gravement affaiblies, et certaines ont même disparu.

À l'heure actuelle, grâce à l'amélioration de la gestion des pêches, à la protection de l'habitat et aux programmes de mise en valeur des stocks, on a pu réduire les impacts néfastes et compenser certains dommages du passé, mais il reste des problèmes à régler. Les changements dans les conditions océaniques, qui peuvent être liés au réchauffement planétaire, ont fait chuter le taux de survie en mer de certaines populations de saumons. L'expansion démographique demande à la fois des possibilités de pêche, et de la terre et de l'eau pour l'agriculture, la foresterie et l'urbanisation. Dans ce contexte, la gestion et la conservation des saumons du Pacifique doit relever de nombreux défis.

Gestion

Pêches et Océans Canada gère le saumon rouge, le saumon rose, le kéta, le quinnat et le coho, tandis que la province de la Colombie-Britannique est responsable du saumon arc-en-ciel et de la truite fardée. Pêches et Océans Canada élabore et met en œuvre des plans de gestion intégrée des pêches qui s'appuient sur des évaluations des stocks et sur la consultation des divers utilisateurs de la ressource. Le Ministère est aussi chargé de veiller à ce que tous les plans de pêche respectent les obligations relatives à la conservation et à la pêche autochtone. Ses activités sont les suivantes :

  • évaluation de la santé des stocks de saumons;
  • pour toutes les pêches, élaboration de plans de pêche avant la saison, en collaboration avec les pêcheurs et les Premières Nations;
  • étude des questions de politique touchant à l'élaboration des plans de pêche;
  • gestion des captures pendant la saison;
  • évaluation de la mise en œuvre des plans de gestion après la saison;
  • élaboration d'ententes de partenariat avec l'industrie;
  • mise en œuvre de nouvelles politiques de gestion des pêches; et
  • traitement des dossiers de gestion des pêches en rapport avec le Traité canado-américain sur le saumon du pacifique.

Valeur économique

Pour les habitants de la côte canadienne du Pacifique, les saumons sont beaucoup plus que des poissons - ils font partie de leur culture. Les Premières Nations possèdent des traditions fortes et anciennes qui célèbrent le retour des premiers saumons de l'année. Les saumons continuent à former une part importante et essentielle de l'alimentation des peuples autochtones. Toutes les espèces de saumons font l'objet d'importantes pêches commerciales et sportives; la salmoniculture est en plein essor. À l'heure actuelle, on consomme le saumon à l'état frais, fumé, séché ou en conserve. Au cours d'une année moyenne, environ 28 millions de saumons, dont 75 pour cent sont des saumons roses et des saumons rouges, sont capturés en Colombie-Britannique, ce qui correspond à une valeur au débarquement d'environ 250 millions de dollars. Dans le sud de la Colombie-Britannique, la pêche sportive a un impact encore plus grand, puisque son apport à l'économie est estimé à plus de 500 millions de dollars.

Les fiches d'information du Monde sous-marin sont de courts comptes rendus illustrés sur les ressources halieutiques et les phénomènes du monde marin, préparés tant pour renseigner que pour éduquer le public. On y trouve une bonne description du cycle de vie, de la distribution géographique, de l'état et de l'exploitation des stocks de poissons, de mollusques, de crustacés et d'autres organismes vivants du monde marin, ainsi que des renseignements sur la nature, l'origine et les effets de phénomènes ou de réactions du monde marin.

Les espèces de cette série sont réparties entre sept catégories :

  • Poissons de fond
  • Poissons pélagiques
  • Invertébrés
  • Espèces diadromes (anadromes et catadromes)
  • Mammifères marins
  • Poissons d'eau douce
  • Faune et flore aquatiques

À quelle catégorie cette espèce appartient-elle?

Mise à jour (2002)
Section de l'évaluation du saumon, Direction des sciences
Station biologique du Pacifique
Pêches et Océans Canada
3190, chemin Hammond Bay
Nanaimo (C.-B.) V9T 6N7

Publié par :
Direction générale des communications
Pêches et Océans Canada
Ottawa (Ontario) K1A 0E6

Télécopieur : (613) 990-1866
Courriel : info@dfo-mpo.gc.ca

DFO/6241
© Sa majesté la Reine du Chef
du Canada, 2002
No de catalogue Fs 41-36/1-2001F
ISBN 0-662-84961-2

Disponible à cette adresse : 
www.dfo-mpo.gc.ca (en format HTML et PDF)
Also available in English - Pacific Salmon

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Dernière mise à jour : 2004-08-17

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