DISCOURS
NOTES FOR AN ADDRESS BY
Le 5 décembre 2005
MONTRÉAL (Québec)
2005/43
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE PIERRE PETTIGREW,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L’OCCASION DE LA JOURNÉE SUR
LE FINANCEMENT DU CARBONE,
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES
SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES
Il me fait grandement plaisir de tous vous accueillir à Montréal. Je suis reconnaissant à
l’AIEDE [Association internationale pour l’échange de droits d’émissions] et à la Banque
mondiale de m’avoir invité à inaugurer cette Journée sur le financement du carbone
dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques.
Comme l’a rappelé le maire Tremblay il y a une semaine, ce n’est pas la première fois
que Montréal accueille une conférence mondiale sur l’environnement qui marque un
point tournant. C’est en effet ici même qu’a été signé, en 1987, le premier traité
international visant à protéger l’atmosphère contre les effets de l’intervention humaine. Il
s’agissait, bien sûr, du Protocole de Montréal sur la couche d’ozone, qui a remporté un
grand succès.
Le Protocole de Cartagena sur la biosécurité a également été adopté ici, en 2000. C’est
donc dire qu’à Montréal, nous avons l’habitude d’écrire l’histoire. Je suis persuadé que
nous pourrons le faire de nouveau cette semaine.
La Convention-cadre des Nations Unies et le Protocole de Kyoto ont institué une
structure de mesures incitatives et de mécanismes destinés à limiter les effets
destructeurs du réchauffement de la planète. Ces deux instruments fournissent
également la souplesse nécessaire pour adapter cette structure à la transformation des
marchés, aux progrès de la science et à la marche de l’histoire.
C’est là précisément ce que nous nous efforçons d’accomplir cette semaine, c’est-à-dire
de commencer à planifier l’avenir du régime relatif aux changements climatiques.
Comme l’a déclaré le premier ministre à l’Assemblée générale de l’ONU en septembre,
nous devons, au cours de cette conférence, engager des discussions en vue de la mise
sur pied d’un régime véritablement mondial, un régime qui mènera à des réductions
réelles et profondes des émissions de gaz à effet de serre.
En venant ici, ce matin, je me suis rappelé une autre rencontre internationale où je
dirigeais la délégation canadienne, qui se déroulait il y a exactement six ans. Il
s’agissait du Troisième Sommet ministériel de l’Organisation mondiale du commerce, à
Seattle. Certains d’entre vous se rappellent sûrement de cette conférence.
À plusieurs égards, le contraste entre la présente conférence et celle de Seattle ne
pourrait être plus marqué. Je suis heureux de constater qu’ici, les manifestants sont
plus gentils. Ils exhortent les gouvernements à aller plus loin, et non pas à battre en
retraite, un sentiment que partagent d’ailleurs de nombreuses personnes à travers le
monde.
La réalité, c’est qu’en matière de changements climatiques, les gouvernements n’ont
plus la longueur d’avance qu’ils avaient autrefois sur la population. En fait, les
gouvernements doivent faire face à la réalité et se doter des outils qui leur permettront
d’aider l’humanité à faire face au danger que représentent les changements
climatiques.
En octobre, un groupe de Canadiens préoccupés par la question des effets des
changements climatiques a écrit au premier ministre. Voici ce qu’ils lui ont demandé :
• des mesures énergiques en réaction aux données scientifiques de plus en plus
nombreuses;
• le maintien des mécanismes du Protocole de Kyoto au-delà de 2012;
• la mise en place de cibles à court et à moyen terme pour guider le Canada vers
l’avenir;
• le lancement, lors de la présente conférence, d’un processus et d’un plan de
travail destinés à mettre au point, d’ici à 2008 ou 2009, un régime inclusif et
respectueux du climat pour la période au-delà de 2012.
Peut-être vous imaginez-vous que les auteurs de cette lettre étaient des représentants
de groupes environnementaux? Bien au contraire, il s’agissait de dirigeants de certaines
des plus grandes entreprises du Canada, notamment dans les secteurs des ressources
et de l’énergie. Pourquoi ont-ils formulé de telles demandes? Parce que, en tant que
cadres dirigeants tournés vers l’avenir, ils sont conscients du fait que les progrès
enregistrés dans le domaine de l’environnement constituent de plus en plus un facteur
déterminant de la réussite économique.
Ils comprennent aussi, tout comme vous le faites vous-mêmes aujourd’hui, qu’on peut
se servir des forces du marché de façon à engendrer des effets favorables à notre
planète.
Autrement dit, en réalisant le potentiel du marché mondial du carbone, nous pourrons
trouver des solutions concrètes aux problèmes débattus depuis de nombreuses années
dans ces négociations internationales.
C’est pourquoi je trouve inspirant que nous puissions réunir autant d’acteurs clés des
milieux industriels et financiers à l’occasion d’un événement comme celui-ci, qui se tient
dans le cadre plus vaste des négociations internationales.
Ici, nous pourrons échanger des connaissances et des conseils sur les nouvelles
tendances et les développements les plus récents dans le marché mondial du carbone.
Ces échanges favoriseront une collaboration plus étroite entre tous les acteurs et leur
permettront de tirer parti de nouveaux débouchés commerciaux.
Bien sûr, l’efficacité des efforts que nous déployons pour réduire les émissions
dépendra en grande partie de l’architecture et de l’efficacité du régime international.
Le mécanisme de développement propre [MDP], l’application conjointe et l’échange de
droits d’émission sont les mécanismes de base de ce régime.
Le MDP est un mécanisme grâce auquel des projets peuvent être mis sur pied dans les
pays en développement. En plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, les
projets de MDP doivent également contribuer au développement durable du pays
d’accueil.
Le MDP doit devenir l’un des outils employés par les pays développés pour veiller à ce
que les pays en développement aient accès à des sources d’énergie plus propres. Ce
mécanisme permettra également à tous les pays de réaliser une forme de
développement plus durable.
Les projets d’application conjointe seront mis sur pied dans des pays industrialisés qui
ont établi des cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre en vertu du
Protocole de Kyoto. Avec le MDP, l’application conjointe permettra aux pays
industrialisés de s’échanger des technologies plus propres.
L’efficacité des ces instruments est essentielle à la réussite des efforts mis en œuvre à
l’échelle de la planète en vue d’atténuer les effets des changements climatiques. Il faut
se réjouir des premières réussites du marché du carbone, notamment les premières
réductions certifiées d’émissions réalisées grâce au MDP. Il est merveilleux qu’on ait
réussi à faire autant de progrès en si peu de temps grâce à ce mécanisme.
Il faut néanmoins se rappeler que pour assurer l’efficacité opérationnelle et économique
du marché mondial du carbone, il faut renforcer et simplifier le MDP. Il faut notamment
mettre en place des procédures d’approbation plus simples et plus rapides. Pour
atteindre ces objectifs, il faut accroître le financement du MDP et le rendre plus
prévisible, et instaurer une meilleure structure de gouvernance.
Le Canada et bon nombre d’autres États parties se sont engagés à renforcer et à
simplifier le MDP. Nous souhaitons que des décisions qui vont dans la bonne direction
soient prises ici, à Montréal.
Enfin, permettez-moi de vous entretenir brièvement de l’échange de droits d’émissions.
Je n’ai pas besoin de vous dire que le potentiel du marché mondial du carbone est
énorme. Les questions abordées dans les négociations qui se déroulent ici créeront sur
ce marché des conditions favorables à une participation élargie des pays, des
entreprises et des institutions financières de toutes les régions du monde.
Les pays qui reconnaissent la valeur d’une participation à ce marché et qui s’y
implanteront tôt ne manqueront pas d’en tirer de nombreux bienfaits et pourront y
occuper la place des pays qui hésitent encore.
Le gouvernement du Canada est conscient de la responsabilité qu’il partage avec
d’autres parties au Protocole de Kyoto en ce qui a trait à l’élimination ou la réduction
des obstacles à l’échange international de droits d’émissions sans compromettre
l’intégrité de l’environnement.
De fait, le gouvernement canadien a de bonnes raisons de favoriser un marché du
carbone vigoureux. Le Canada veut diversifier les options dont disposent les grands
émetteurs finaux pour se conformer à leurs obligations, et il entend acheter du carbone
dans un avenir rapproché. Le Canada prévoit que le Fonds pour le climat, un élément
essentiel de son plan sur les changements climatiques, sera pleinement opérationnel
dès le début de 2006. Le Fonds servira à acheter des réductions d’émissions de gaz à
effet de serre découlant de projets innovateurs, au pays et à l’étranger.
Je profite de l’occasion pour féliciter M. Allen F. Amey, président désigné du Fonds pour
le climat, qui est avec nous aujourd’hui, et lui offrir mes meilleurs vœux.
Depuis un an, le premier ministre Martin a donné un élan sans précédent à la politique
environnementale du Canada. En avril, le gouvernement a publié un plan détaillé pour
respecter ses engagements envers les objectifs du Protocole de Kyoto — un plan qui,
je me dois de le préciser, a été applaudi par de nombreux pays à travers le monde.
Le Plan du Canada sur les changements climatiques vise à stimuler l’innovation et le
progrès technologique. Ces deux éléments sont essentiels si l’on veut assurer la
transformation à long terme nécessaire pour soutenir une économie durable et
compétitive au XXIe siècle.
Le plan cherche également à aider le secteur privé à conserver sa vigueur économique
tout en participant aux actions destinées à relever le défi du changement climatique. Il
faut des entreprises en bonne santé financière non seulement pour trouver des
solutions aux effets des changements climatiques, mais aussi pour soutenir la
compétitivité du Canada sur les marchés mondiaux.
Je suis convaincu que l’approche adoptée dans le Plan du Canada sur les
changements climatiques, qui repose à la fois sur les forces du marché et sur le
principe de la responsabilité sociale, réunit les conditions nécessaires pour assurer
l’efficacité du plan. Au cours des mois et des années qui viennent, le Canada
continuera d’œuvrer diligemment à la réalisation de son programme d’action national et
de veiller au respect intégral des engagements pris dans le cadre du Protocole de
Kyoto.
Sur le plan international, les changements climatiques ont été sous les projecteurs au
cours de la dernière année. Au sommet du G8 de Gleneagles, les dirigeants des
économies les plus puissantes de la Terre ont reconnu que le changement climatique
est bien réel et qu’il faut s’en occuper.
Dernièrement, les ministres se sont rencontrés au Groenland et à Ottawa pour discuter
de la poursuite des efforts, aussi bien à la présente conférence qu’au-delà.
Toutes ces démarches de la communauté internationale témoignent du caractère
prioritaire qu’on attache à la nécessité d’agir dans le domaine des changements
climatiques, mais les difficultés restent nombreuses.
Le gouvernement du Canada a récemment publié son Énoncé de politique
internationale, dans lequel il met en relief l’importance de promouvoir le développement
durable à l’échelle de la planète. L’Énoncé souligne également à quel point il importe de
trouver des solutions efficaces aux problèmes soulevés par le changement climatique,
et fait état de la détermination du Canada à jouer un rôle de premier plan dans ce
domaine sur la scène internationale.
Tous les pays conviennent qu’ils doivent accroître la viabilité et la sécurité de leurs
économies en adoptant des technologies et des sources d’énergie plus efficaces et
moins polluantes. Cet objectif acquiert même un caractère de priorité car la demande
d’énergie à travers le monde croît à un taux exponentiel alors même que nous sommes
aux prises avec l’ascension des coûts énergétiques, tout en sachant qu’à un moment
quelconque au cours du siècle actuel, la production mondiale de pétrole atteindra son
point culminant.
Il faut se rappeler que le changement climatique n’est pas simplement une question de
protection des ressources. Les conditions climatiques ont un impact profond sur nos
vies; aussi les changements qu’on prédit aujourd’hui interagiront-ils de façon
dramatique avec d’autres dynamiques mondiales, entraînant des bouleversements
économiques et la destruction d’infrastructures et de systèmes matériels, et
compromettant la sécurité humaine.
C’est pourquoi la question du changement climatique n’est pas qu’une simple question
environnementale. Avec des conséquences possibles de cette envergure, nous
sommes visiblement aux prises avec des forces gigantesques.
Et c’est aussi pourquoi je crois qu’il importe que la politique étrangère du Canada
encourage le développement d’un nouveau multilatéralisme fondé sur une multitude de
responsabilités, y compris la responsabilité collective d’assurer le bien-être des
générations futures.
Nous avons accompli des choses étonnantes ici au Canada. Mais nous savons que ce
n’est pas parce que nous accueillons toute la planète à Montréal que nous allons faire
des progrès chez nous comme par magie.
Nous savons que pour réussir, nous devons, en tant que communauté mondiale, nous
aventurer dans le vaste territoire inconnu qui nous attend au-delà de l’échéance de
2012.
Nous savons tous que la mise au point du Protocole de Kyoto a été un processus
complexe, plein d’embûches et de difficultés, et souvent même de désaccords. Nous
reconnaissons tous qu’il a des lacunes aussi bien que des côtés positifs. Mais nous ne
nous sommes certainement pas lancés dans ce processus pour le voir prendre fin dans
sept ans.
Il faut d’ailleurs voir les choses bien en face : ce qui nous attend au-delà de Kyoto est
un défi de gouvernance environnementale d’une ampleur encore jamais vue par la
communauté des nations.
Nous devons cependant nous rappeler que, malgré ses lacunes, le protocole trace une
feuille de route vers l’avenir. Il permet de s’adapter aux changements qui surviendront
sûrement, et il offre au secteur privé et aux marchés la sécurité dont ils ont besoin pour
jouer un rôle crucial dans la recherche de solutions aux problèmes soulevés par les
effets des changements climatiques.
Comme je l’ai signalé au départ, nous sommes à Montréal pour aider à donner à
l’humanité les moyens de relever le défi le plus urgent auquel elle doit faire face.
Nous savons que des difficultés nous attendent, et nous savons quel sera le prix d’un
échec. Si complexes qu’aient été les difficultés qui ont entouré l’élaboration du
Protocole de Kyoto, je prédis qu’elles paraîtront insignifiantes face à celles qui
présideront à la création d’un régime qui soit véritablement mondial, inclusif, équitable
et efficace pour contrer les effets des changements climatiques après 2012.
C’est ici même, à Montréal, que se pose déjà ce défi.
Je crois que, tous ensemble, nous pouvons le relever.
Je vous remercie.
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