COMMUNIQUÉS
LE CANADA N'EST PAS PARVENU À S'ASSOCIER AU CONSENSUS LORS DE LA CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME
Le 8 septembre 2001 (19 h 50 HAE) Nº 129
LE CANADA N'EST PAS PARVENU À S'ASSOCIER AU CONSENSUS LORS DE LA
CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME
Le ministre des Affaires étrangères, M. John Manley, et la secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la
femme), Mme Hedy Fry, ont déclaré aujourd'hui que le Canada jugeait nécessaire d'émettre une déclaration de
réserves ferme à l'égard de la Déclaration et du Programme d'action qui ont résulté de la Conférence mondiale
contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, qui s'est tenue à
Durban en Afrique du Sud.
Les préoccupations canadiennes portaient sur le retrait d'un libellé jugé inacceptable concernant le Moyen-Orient, et sur l'inclusion d'une définition élargie énonçant toutes les formes de racisme.
« Il est dommage que les parties à une conférence visant à combattre le racisme aient choisi cette rare
enceinte, mise sur pied une fois tous les dix ans, pour aggraver le conflit israélo-palestinien plutôt que de faire
avancer des stratégies pour venir en aide à des citoyens du monde qui, chaque jour, subissent le racisme et la
discrimination raciale, a déclaré M. Manley. Le Canada demeure engagé dans la lutte contre la discrimination
sous toutes ses formes, et il poursuivra ses efforts à l'échelle internationale auprès des Nations Unies jusqu'à
ce qu'un consensus auquel le Canada pourra s'associer soit atteint. »
« Il est regrettable de constater que l'aigreur et les dissenssions ont détourné les parties de l'objectif de la
Conférence, a soutenu Mme Fry. Toutefois, cela ne doit pas éclipser les éléments positifs des documents finaux
ni le rôle important joué par le Canada pour ce qui est d'influencer des stratégies évolutives à l'égard des
peuples indigènes, et d'encourager la société civile, surtout les jeunes, à combattre le racisme, et
particulièrement les propos à caractère haineux véhiculés dans Internet. »
Le Canada s'est rendu à la Conférence pour y promouvoir des valeurs d'égalité, de respect et d'équité pour
tous, et pour donner voix au chapitre à toutes les personnes qui supportent le poids du racisme et d'autres
formes d'exclusion.
Le Canada est demeuré à la Conférence afin de tenter de faire en sorte que le contenu de la Déclaration et du
Programme d'action soit digne d'un soutien global, et pour s'élever contre des éléments contenus dans les
textes finaux que nous jugeons inappropriés et inacceptables.
M. Manley et Mme Fry ont également remercié le gouvernement de l'Afrique du Sud d'avoir accueilli la
conférence et du leadership dont il a fait preuve tout au long de celle-ci.
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La déclaration de réserves du Canada accompagne ce communiqué.
Pour de plus amples renseignements, les représentants des médias sont priés de communiquer avec :
Jennifer Sloan
Directrice des Communications
Cabinet du ministre des Affaires étrangères
(613) 995-1851
Pascal Charron
Adjoint aux Communications
Cabinet de la secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme)
011-27-82-858-0351 (Durban)
819-997-9900
Service des relations avec les médias
Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international
(613) 995-1874
DÉCLARATION DE RÉSERVES
de la délégation canadienne à la
Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et
l'intolérance qui y est associée
Durban, Afrique du Sud
Le 8 septembre 2001
Madame la présidente,
Étant donné sa lutte contre l'apartheid, l'Afrique du Sud était un lieu tout désigné pour accueillir la Conférence.
Le monde tire encore une grande impulsion du courage et de la détermination dont le peuple sud-africain a fait
preuve dans sa réconciliation des différences et dans son établissement d'une société plus inclusive. Nous
remercions le gouvernement de l'Afrique du Sud de son leadership et de son hospitalité, et nous nous
engageons à continuer avec lui de promouvoir et de protéger l'ensemble des droits et libertés de la personne.
De même, nous continuerons de considérer les Nations Unies comme le principal lieu de discussion et d'action
sur ces enjeux importants.
Une Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est
associée n'est pas qu'un acte comme les autres sur la scène itinérante, multilatérale et diplomatique
d'aujourd'hui. C'est beaucoup plus que cela; du moins, cela devrait l'être.
Voilà pourquoi le Canada a poursuivi ses efforts de négociation à la table.
Nous avons relevé les défis de la dispute et de la dissension à cause de notre sens élevé du devoir à l'égard
des Nations Unies, de la communauté mondiale, des Canadiens qui dépendent de nous pour leur donner voix
au chapitre et des millions de personnes de par le monde qui vivent dans la pauvreté et le désespoir à cause
du racisme.
Nous ne sommes pas satisfaits de la Conférence. On n'y a pas consacré assez de temps à promouvoir ses
objectifs, soit l'élaboration de stratégies prospectives orientées sur l'action afin d'éradiquer toutes les formes de
discrimination qui existent aujourd'hui. Au lieu de cela, on a passé trop de temps sur une question qui n'a pas
sa place ici.
Madame la présidente, le Canada est encore ici aujourd'hui parce que nous voulions que notre voix s'élève
contre les tentatives faites à la Conférence d'enlever toute légitimité à l'État d'Israël et de déshonorer l'histoire
et les souffrances du peuple juif. Nous croyons, et nous l'avons déjà dit dans les termes les plus clairs
possible, qu'il est inadmissible - incorrect - de discuter du conflit palestino-israélien dans le cadre de ce forum.
Nous avons dit et nous continuerons d'affirmer que tout processus, toute déclaration, tout language présentés
dans un forum, quel qu'il soit, et qui ne servent pas à promouvoir une paix négociée capable d'assurer la
sécurité, la dignité et le respect aux gens de la région sont et seront toujours inacceptables pour le Canada.
C'est pourquoi la délégation canadienne enregistre sa plus vive opposition et se dissocie intégralement de
toute portion de ce document qui concerne directement ou indirectement le Proche-Orient. Nous affirmons avec
emphase que ce texte est ultra vires, qu'il est étranger à la compétence et au mandat de la Conférence.
Le paragraphe 7, par exemple, touche le cœur de la légitimité de l'État d'Israël. Lorsqu'on le lit dans le contexte
du Proche-Orient, ce que nous croyons être l'intention de ce passage, le mot « Israël » est implicite. Par
conséquent, la formulation relative au droit de retour des réfugiés n'est pas conforme à la résolution 194 de
l'Assemblée générale de l'ONU.
Ce paragraphe équivaut à un appel à la violation unilatérale des accords de paix déjà conclus. Son application
serait contraire à l'entente entre les parties selon laquelle le retour des réfugiés se fera aux termes d'un
règlement final négocié.
À ce titre, il s'agit d'une intrusion inutile et irresponsable de la Conférence dans l'un des conflits les plus
dangereux du monde. En outre, tel que le propose le projet de document, le Canada croyait et continue de
croire tout à fait approprié pour nous tous que la Déclaration contienne une référence indépendante et
autonome aux caractères essentiels de notre lutte contre l'antisémitisme. Le Canada est venu à la Conférence
avec des positions très claires sur ce que nous jugeons important. Nous ne sacrifierons pas nos principes, pas
plus que nous ne déformerons notre politique appliquée de longue date dans un esprit d'équité à l'égard du
conflit au Proche-Orient.
Madame la présidente, le Canada regrette que la Conférence mondiale n'ait pas été en mesure de reconnaître
qu'il y a une relation étroite, parfois même inséparable, entre la discrimination fondée sur la religion et la langue
et celle qui est fondée sur le racisme et la xénophobie.
Cela est d'autant plus regrettable qu'en 1994, l'Assemblée générale des Nations Unies, dans sa résolution
décrétant la 3e Décennie de lutte contre le racisme et la discrimination raciale, exprimait une profonde
préoccupation à l'égard de l'évolution du racisme en pratiques discriminatoires fondées sur la religion, la
langue, la nationalité ou la culture. À cet égard, nous sommes d'avis que la Conférence mondiale a fait un pas
important en arrière. À ce stade, nous aimerions souligner que pour le Canada, la discrimination multiple
fondée sur « d'autres secteurs » comprend l'orientation sexuelle, les handicaps et les barrières culturelles.
Madame la présidente, sur la question des injustices passées aucun doute ne subsiste : le Canada croit que la
traite transatlantique des esclaves était une activité moralement répugnante et qui a entaché le tissu de
l'histoire.
En ce qui concerne le texte traitant des injustices passées, le Canada aimerait enregistrer clairement qu'à son
sens, le paragraphe 10 de la Déclaration signifie que l'esclavage généralisé et systématique à l'endroit d'une
population civile constitue aujourd'hui un crime contre l'humanité et que si la traite transatlantique des esclaves
se faisait aujourd'hui, elle constituerait un crime contre l'humanité.
En outre, le Canada comprend, en ce qui concerne les paragraphes 117, 118 et 119 de la Déclaration, qu'il
n'existe aucun recours en droit international à des réparations pour des actions historiques qui n'étaient pas
illégales au moment où elles se sont produites.
C'est pour ces raisons, Madame la présidente, que le Canada demande que la présente déclaration soit versée
aux dossiers de la Conférence et que nos réserves soient reflétées explicitement dans le document officiel.
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