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DISCOURS


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M. AXWORTHY - ALLOCUTION À L'OCCASION DELA CONFÉRENCE RÉGIONALE DE BUDAPESTPOUR L'ACTION CONTRE LES MINES - BUDAPEST (HONGRIE)

98/22 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

À L'OCCASION DE

LA CONFÉRENCE RÉGIONALE DE BUDAPEST

POUR L'ACTION CONTRE LES MINES

BUDAPEST, Hongrie

Le 26 mars 1998

Ce document se trouve également au site Internet du Ministère : http://www.dfait-maeci.gc.ca

C'est pour moi un plaisir et un honneur de prendre la parole à l'occasion de cette conférence qui fera date, et dans ce magnifique immeuble chargé d'histoire.

Je salue le gouvernement de la Hongrie pour avoir ainsi mobilisé toute la région en faveur de l'essentielle action mondiale contre les mines. Grâce à sa vision et à son leadership, voici à nouveau rassemblés aujourd'hui tous les éléments de la formule magique qui a fait le succès de nos efforts des dernières années en vue de l'interdiction des mines -- éléments qui sont représentés par les orateurs réunis à cette table.

Mme Williams, au nom de la Campagne internationale contre les mines terrestres [CIMT], a été l'interprète de millions de personnes en veillant, événement après événement, à ce que la force et l'insistance de leurs voix soient entendues. Le Comité international de la Croix-Rouge [CICR], qui s'exprime au nom des victimes innocentes des conflits dans le monde entier, nous a rappelé que la société civile peut et doit avoir des règles, même sur le champ de bataille. Et, dans toutes les régions du monde, des gouvernements courageux, tels ceux de la Hongrie et de la Norvège, se sont avancés pour prendre position en faveur de l'humanité, sans se préoccuper de ce que pourraient faire les autres.

La Convention sur les mines terrestres

Ce partenariat de forces a entraîné le mouvement -- soit le processus d'Ottawa -- qui a abouti il y a quatre mois à peine à la signature à Ottawa, par les représentants de 122 pays, d'une convention sur l'interdiction des mines antipersonnel.

La convention a recueilli depuis une 124e signature, et elle a déjà été ratifiée par un certain nombre de pays. Je suis heureux d'annoncer qu'avec l'aide de nos partenaires dans le monde, en particulier l'UNICEF [Fonds des Nations unies pour l'enfance], la CIMT et le CICR, nous brûlons les étapes vers les 40 ratifications requises pour donner vie à la convention cette année. En fait, avec un peu de chance, ces 40 ratifications pourraient être acquises en juillet, ce qui constituerait le processus d'entrée en vigueur le plus rapide de l'histoire.

Je viens à Budapest aujourd'hui avec un message très simple : l'interdiction des mines terrestres est fermement établie, et elle est là pour rester, car ils sont des millions dans le monde à demander qu'il en soit ainsi. Avec ses 122 signataires de la première heure, la convention a recueilli l'adhésion de deux fois plus de pays que ne l'avait fait au départ le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, aujourd'hui considéré comme le pilier du régime de non-prolifération et de désarmement nucléaire. L'entrée en vigueur de la convention devant vraisemblablement survenir dans quelques mois à peine, il m'apparaît évident que cette idée toute simple -- interdire complètement les mines antipersonnel -- exerce une attraction irrésistible.

Même les pays qui n'ont pas signé la convention ont radicalement modifié leur comportement pour se conformer à la norme qu'elle a établie. Les plus gros producteurs ont réduit, et dans bien des cas complètement cessé, leurs exportations de mines antipersonnel. Pour la plupart des gouvernements, l'emploi de ces engins ne représente plus guère aujourd'hui qu'une possibilité théorique, peu susceptible d'être exercée par crainte de l'opprobre international qui en résulterait.

Les mines antipersonnel pourront continuer d'être stockées pour un temps, mais elles deviendront de plus en plus embarrassantes pour leurs détenteurs, devant être dissimulées à la vue si ce n'est pour faire publiquement étalage de leur destruction. On pourrait soutenir que l'ostracisme dont nous avons voulu frapper ces armes est déjà consacré dans le droit international humanitaire.

De toute façon, c'est, comme on dit, le début de la fin. Ceux qui n'ont pas encore signé la convention devront bientôt admettre que ces armes ont une efficacité trop limitée, que leur emploi est trop fortement stigmatisé, et que le prix de l'attente est trop élevé. Ils auront à choisir : soit signer la convention, soit demeurer en arrière, du mauvais côté de l'histoire et de l'humanité.

L'application de la convention

Le fait est que,

en interdisant complètement et sans ambiguïté la production, le transfert et l'emploi des mines antipersonnel,

en stipulant la destruction des stocks dans un délai de quatre ans à compter de son entrée en vigueur et le nettoyage des zones minées dans un délai de 10 ans, et

en prévoyant des engagements concernant le déminage et l'assistance aux victimes,

la convention établit un cadre à la fois complet et juridiquement contraignant pour le règlement systématique et définitif de la crise occasionnée par ces armes. L'adhésion universelle à la convention et la pleine application de ses dispositions nous permettront d'éliminer une fois pour toutes le danger des mines antipersonnel.

À notre réunion d'Ottawa, en décembre, les gouvernements, les ONG [organisations non gouvernementales] et les représentants d'organisations internationales et régionales avaient indiqué clairement que les efforts mondiaux pour assurer l'application de la convention souffraient de l'absence d'un chaînon essentiel : la coordination. De débat en débat, les participants n'ont cessé de faire valoir la nécessité de coordonner les activités internationales visant l'application de la convention, le déminage et l'assistance aux victimes.

Pour répondre à leur appel, le Canada a décidé d'organiser l'Atelier international sur la coordination de la lutte contre les mines, qui a eu lieu à Ottawa plus tôt cette semaine. J'ai le plaisir de vous faire savoir que cette rencontre nous a permis de faire d'importants progrès quant au recensement des défis à venir et des moyens à prendre pour les relever.

Premièrement, nous avons reconnu qu'il faut que nous fassions porter nos efforts sur l'application du traité. Ce qui veut dire que nous devons nous attacher à obtenir les 40 ratifications requises cette année, et aussi nous employer à universaliser la convention.

Deuxièmement, les participants ont fortement appuyé les mesures que prend l'ONU, par l'intermédiaire de son service de lutte contre les mines, pour devenir le point de convergence des actions internationales dans ce domaine. Ils ont aussi exprimé le ferme désir d'ouvrir aux ONG -- qui sont le moteur de notre mouvement -- le système des Nations unies, voire l'ensemble du système mondial des donateurs d'aide. J'ai annoncé lors de l'Atelier que le Canada accordera cette année une contribution de 2 millions de dollars au Fonds de contributions volontaires des Nations unies pour le déminage afin de renforcer les capacités du service d'action contre les mines. J'invite les autres gouvernements à faire de même.

Troisièmement, les donateurs et autres intervenants se sont fermement engagés à coordonner leurs efforts de lutte contre les mines, et ce, à la fois en termes de coordination horizontale et d'intégration verticale, pour faire le lien entre le niveau international et la base.

Quatrièmement, nous avons convenu que les enquêtes de niveau un et deux dans les pays affectés par les mines doivent figurer en tête de notre programme d'action contre les mines. Nous pourrons ainsi nous assurer que sont établies les données de base et de référence nécessaires pour évaluer les progrès et exigées par la convention, que nous comprenons l'ampleur du problème et que nous répartissons nos ressources de façon efficace. La contribution du Canada au titre du Fonds de contributions volontaires des Nations unies sera en bonne partie consacrée à ce genre d'activité.

Cinquièmement, nous avons reconnu que l'efficacité de notre action contre les mines dépendra de l'établissement de normes communes pour garantir la sécurité, l'interopérabilité et l'imputabilité. Enfin, sixièmement, nous avons confirmé la nécessité d'avoir une technologie qui soit à la fois abordable, disponible et appropriée.

L'action contre les mines en Europe

À l'instar de l'atelier d'Ottawa, votre réunion ici aujourd'hui viendra promouvoir encore davantage l'inexorable mouvement international contre les mines antipersonnel.

L'Europe centrale et de l'Est, où certains estiment que l'on retrouve le plus important arsenal de mines antipersonnel au monde -- dans les dizaines de millions, facilement --, est une région absolument cruciale pour l'avenir de l'interdiction. Permettre que même une petite fraction de cet arsenal se retrouve sur le marché noir et soit utilisé constituerait un recul majeur. Les mines entreposées sont relativement inoffensives et ne coûtent que quelques dollars à détruire. Enfouies dans le sol, elles détruisent des vies et coûtent une petite fortune à enlever.

C'est pourquoi j'applaudis aux efforts unilatéraux de pays comme l'Ukraine, qui a récemment commencé à détruire son stock de mines. J'espère que tous les pays de la région reconnaîtront, comme l'ont fait ceux d'Afrique et d'Amérique latine, que les mines terrestres ont déjà exigé un tribut trop lourd. En se concertant, les pays de l'Europe peuvent débarrasser la région de ce fléau.

Certains pays sont résolus à respecter les termes de la convention, mais ne disposent pas des moyens techniques ou des ressources voulus pour y parvenir. Je crois que, dans leur cas, nous arriverons à mobiliser l'aide de la communauté internationale des donateurs.

Pour sa part, le Canada lance un programme d'action contre les mines doté d'un financement de 10 millions de dollars. Ce programme, qui portera d'abord sur le nord-ouest de la Bosnie, constituera l'un des premiers projets à être mis sur pied dans le cadre de notre fonds d'action contre les mines, dont le budget a été établi à 100 millions de dollars. Les gardiens de la paix canadiens ont la responsabilité de ce secteur de la Bosnie. Ils connaissent très bien le problème et participeront à sa solution.

Notre objectif est de travailler avec les autorités bosniaques et la communauté internationale, dont les ONG et les pays donateurs, afin de réduire substantiellement au cours des cinq prochaines années les risques que les mines terrestres font courir à la population bosniaque. Il ne s'agit pas simplement d'un projet de déminage, mais plutôt d'un programme intégré comportant des activités de reconstruction et le renforcement des capacités locales.

Je crois que nous pouvons, par une action concertée avec nos partenaires, réduire de 50 p. 100 le nombre de mines terrestres dans la zone de 100 kilomètres carrés de la Bosnie désignée comme hautement prioritaire à cet égard par l'ONU -- et je suis convaincu que nous pouvons accomplir ce travail essentiel et important d'ici cinq ans.

Le programme a été conçu sur le mode de la coopération. Il s'agit d'« adopter une équipe », et nous demanderons à d'autres donateurs de se joindre au Canada pour appuyer des équipes de déminage composées de 30 personnes. Pour 500 000 dollars par année, ces équipes de déminage humanitaire pourront opérer en Bosnie sans interruption. Cette formule accroîtra l'efficacité des efforts de déminage sur le terrain, dans le cadre d'un programme coordonné à l'échelle nationale. J'invite donc les autres pays donateurs, petits et grands, à s'unir à nous pour « adopter une équipe ». Nous souhaitons que ce programme devienne un modèle du genre de coordination dont nous avons besoin pour atteindre les ambitieux objectifs de notre action mondiale contre les mines.

De nombreux autres efforts coopératifs sont en cours qui méritent aussi des éloges. Le travail du gouvernement slovène en Bosnie et le projet conjoint entrepris par les gouvernements de la Hongrie, de l'Allemagne et de la Croatie pour déminer la Slavonie orientale sont de bons exemples de la coopération et de la coordination qui permettront la réalisation de nos objectifs.

Des années et non des décennies

Nous franchirons sous peu le seuil d'un nouveau millénaire, et je voudrais que dès maintenant nous nous fixions de nouveaux objectifs, que nous commencions à innover dans nos interventions et que nous nous affranchissions à jamais des vieux schèmes de pensée. L'Atelier tenu à Ottawa plus tôt cette semaine a montré que nous pouvons viser des objectifs beaucoup plus grands que ce que nous avions imaginé jusque-là. Il est raisonnable, je crois, de souhaiter entamer le nouveau siècle en ayant la certitude qu'aucune mine terrestre ne sera plus utilisée. Et de souhaiter aussi résoudre dans les 10 premières années du siècle nouveau la crise humanitaire que ces armes provoquent. La concertation des efforts, le sens commun et la coordination, voilà les moyens qui nous permettront de relever le défi des mines terrestre en quelques années, et non en quelques décennies.

Le système des Nations unies est en voie de devenir, et rapidement, le centre de coordination de l'action mondiale contre les mines. Mais ce n'est pas la seule organisation à s'impliquer dans cette cause. L'Organisation des États américains, l'Organisation de l'unité africaine et d'autres tribunes, comme la Banque mondiale, trouvent des moyens novateurs de lutter contre le problème des mines terrestres. L'Europe peut elle aussi contribuer pour beaucoup au consensus qui se dessine actuellement dans le monde.

Prenons aujourd'hui l'engagement de faire disparaître dès la première décennie du siècle qui s'annonce les problèmes que traîne encore celui qui s'achève. Insufflons dans le processus d'action contre les mines l'espoir, la détermination et un sens nouveau de l'engagement et de la coopération, une coopération dont l'ONU renforcée sera le pivot, et dans le cadre de laquelle la société civile travaillera en symbiose avec les gouvernements pour relever un défi commun.

La décision de chacun des gouvernements représentés ici de poursuivre la lutte contre les mines ou de s'en retirer est vitale pour la santé de milliers de personnes, sans parler du destin de la convention elle-même. Si nous adoptons la bonne attitude, si nous mobilisons la volonté politique, si nous la couplons aux ressources voulues, enfin, si nous faisons intervenir les bons instruments, nous éliminerons le fléau des mines antipersonnel. Nous pouvons transformer cette région de l'Europe, et nous pouvons transformer le monde.

Merci.


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Dernière mise à jour :
2005-04-15
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