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DISCOURS


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M. AXWORTHY - ALLOCUTION À LA RÉUNION DU CONSEIL DE L'ATLANTIQUE NORD - BRUXELLES, BELGIQUE

98/81 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

À LA RÉUNION DU CONSEIL DE L'ATLANTIQUE NORD

BRUXELLES, Belgique

Le 8 décembre 1998

(10 h 30 HNE)

Ce document se trouve également au site Internet du Ministère :

http://www.dfait-maeci.gc.ca

Au moment où s'amorce le second demi-siècle de l'Alliance, le monde a bien changé depuis 1949 ou même depuis 1989, et les problèmes de sécurité qui se posent sont bien différents de ce qu'ils étaient à ce moment-là.

Aujourd'hui, nos vies sont interreliées à un point sans précédent. Au même moment, les conflits se sont davantage tournés vers l'intérieur, ce qui a eu des effets catastrophiques sur les sociétés. La grande majorité - 90 % - des victimes de ces conflits sont des civils, surtout des femmes et des enfants, qui trop souvent sont la cible directe des combattants et trop souvent sont victimes de la prolifération alarmante des armes de petit calibre.

La progression du crime, du commerce de la drogue et du terrorisme pose de nouveaux dangers dans nos rues. Les incidents survenus dans le métro de Tokyo et au World Trade Center montrent que nous pouvons tous être victimes d'attentats terroristes à l'intérieur de nos propres frontières.

Certes, les facteurs menaçant la sécurité entre les États n'ont pas disparu, mais cet environnement changeant met plus directement en cause la sécurité des simples citoyens. Pour être plus forte et plus utile, l'Alliance doit s'adapter à ces nouvelles réalités.

Bosnie/Kosovo

Les rôles de l'OTAN dans les crises de la Bosnie et du Kosovo témoignent des efforts de l'Alliance.

Au plan politique, il reste beaucoup à faire en Bosnie. Depuis les élections de cet automne, les positions politiques se sont polarisées et on note de nouveaux signes de stagnation du processus de réconciliation.

Notre Haut Représentant, Carlos Westendorp, a besoin de notre appui et mérite d'être soutenu. Notre priorité devrait être de veiller à ce que les Bosniaques jouent un rôle central dans la reconstruction de leur propre pays, et à éviter qu'une culture de dépendance ne prenne racine. Dans les prochains mois, nous devons veiller activement à faciliter des solutions politiques durables et ne pas nous contenter de surveiller un processus stagnant.

Mme Louise Arbour, procureur en chef du Tribunal international, affiche une liste impressionnante de condamnations. L'arrestation du général Krstic par la SFOR [Force de stabilisation] la semaine dernière est particulièrement encourageante et nous félicitons les Alliés dont les forces y ont contribué.

Des progrès importants ont été réalisés dans les efforts en vue d'atténuer les effets dévastateurs des mines terrestres dans cette région, surtout par le biais de nouveaux partenariats. Dans le cadre d'une initiative conjointe destinée à fournir une assurance aux démineurs, le Canada et la Norvège ont pu presque doubler le nombre des démineurs travaillant en Bosnie. Le Fonds d'affectation spéciale pour la Slovénie, un mécanisme innovateur établi par les États-Unis, double effectivement l'apport de pays partenaires comme le Canada aux efforts de déminage en Bosnie.

Malheureusement, les réfugiés et les personnes déplacées qui sont rentrés dans leurs foyers n'ont pas été aussi nombreux que nous l'avions espéré cet été. Il faudra donc que la SFOR poursuive ses efforts.

Le Canada reste pleinement engagé à appuyer la SFOR et à lui affecter les forces nécessaires pour aider à instaurer une paix durable. Mais nous souhaitons aussi avoir l'occasion, au cours des prochains mois, de nous pencher sur diverses options de réduction des effectifs. Nous aimerions voir une stratégie précise pour le désengagement graduel de la SFOR et pour le transfert des responsabilités aux institutions locales.

Au Kosovo, les interventions de l'OTAN ont permis de mettre fin au cycle de violence et d'éviter une catastrophe humaine. Elles ont aussi montré comment les préoccupations humanitaires stimulent l'action collective. Le Canada a solidement appuyé les efforts de l'Alliance. Nos avions sont prêts à participer aux opérations si nécessaire. Nous nous employons à planifier notre contribution à la Force d'extraction pour le Kosovo.

Les premiers efforts déployés pour soutenir la paix au Kosovo ont été couronnés de succès. Pendant le déploiement de la Mission de vérification de l'OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe], l'Alliance doit toutefois rester vigilante. Il n'y a pas de place pour la complaisance. Nous devons continuer à exercer des pressions pour amener les deux parties à prendre des mesures susceptibles de contribuer véritablement à un règlement pacifique négocié.

L'absence d'entente politique est de plus en plus préoccupante. Il est à craindre qu'avec le dégel du printemps, les hostilités ne reprennent de plus belle. Nous devons donc exercer sur Belgrade toutes les pressions possibles. Ceux d'entre nous qui ont de l'influence auprès des factions albanaises devraient prendre toutes les mesures possibles pour arrêter le flot de dons et d'armes.

Armes de destruction massive

L'action de l'OTAN dans les Balkans montre la détermination et la capacité de l'Alliance à s'adapter aux nouveaux défis que soulèvent les questions de sécurité. Le plus grand de ces défis est peut-être celui que pose la prolifération des armes de destruction massive, aussi bien nucléaires que chimiques et biologiques. L'impact de ces armes est indiscutable. Pourtant, le régime de non-prolifération que nous avons mis en place pour contrer cette menace risque d'être compromis. Les dangers viennent de plusieurs sources.

L'Iraq, la Libye et le Soudan restent des sources possibles pour la mise au point d'armes chimiques et biologiques. Les transferts illicites de techniques ou de matières qui pouvent servir à la production d'armes nucléaires, chimiques et biologiques constituent une menace très réelle pour chacun de nous. La sûreté, le stockage et l'élimination des matières nucléaires provenant de systèmes d'armes démantelés suscitent des inquiétudes de plus en plus grandes.

Le danger de la prolifération des armes nucléaires - lesquelles sont, de toutes les armes de destruction massive, celles qui sont les plus mortelles - a ressurgi avec une clarté effrayante. Les programmes d'armements nucléaires de l'Inde et du Pakistan accroissent le risque d'un conflit nucléaire et aggravent les difficultés auxquelles fait face le régime de non-prolifération.

Par ailleurs, de nouveux arguments en faveur du maintien des armes nucléaires se font entendre, ce qui nuit aux efforts de désarmement et conforte les proliférateurs.

L'OTAN doit faire partie de la solution à ces problèmes. Elle devra prendre de nouvelles initiatives et modifier son approche et sa façon de penser.

C'est pourquoi nous nous réjouissons de l'initiative concernant les armes de destruction massive que proposeront les États-Unis au Sommet. Nous appuyons la proposition américaine selon laquelle les Alliés doivent faire plus pour s'échanger des renseignements.

Il faudra pour cela un cadre d'orientation et nous proposons à cette fin à l'Alliance de rétablir le Comité mixte sur la prolifération. En particulier, nous aimerions voir réunis en un seul groupe de hauts représentants politiques et militaires qui, bénéficiant du soutien technique voulu, seraient chargés d'étudier les difficultés auxquelles nous serons confrontés du point de vue des armes nucléaires, chimiques et biologiques, et de recommander les mesures à prendre ensemble. Nous serions ainsi certains de fonder nos actions sur une compréhension commune de la gravité des dangers qui se posent au chapitre de la sécurité. Cela nous permettrait aussi d'évaluer la source de ces dangers.

Nous pouvons aussi collaborer pour empêcher d'éventuels adversaires de se munir d'armes chimiques et biologiques ou d'installations pour en fabriquer. En formant et en équipant nos forces pour leur permettre de mener des opérations dans un environnement chimique ou biologique, nous renforcerons la capacité de l'OTAN de gérer les crises, de contribuer aux opérations de paix et de dissuader des adversaires potentiels de recourir à ce type d'armes.

Enfin, nous devons avoir un échange de vues approfondi sur les réalités changeantes auxquelles l'Alliance fait face, de même que sur les moyens les plus judicieux et les plus efficaces de réagir.

Nous ne sommes plus aux prises avec la menace conventionnelle écrasante que représentaient autrefois le Pacte de Varsovie, l'Union soviétique et leurs 350 000 soldats en Allemagne de l'Est. Cela doit se refléter dans les stratégies de l'Alliance. Plus que jamais, toute discussion au sujet de recours aux capacités nucléaires de l'Alliance, ne serait-ce que pour riposter, soulève des questions très délicates concernant les moyens, la proportionnalité et l'efficacité, qui suscitent chez nous de vives inquiétudes.

Le Canada estime qu'on ne peut tenir pour assurée l'issue d'un tel échange de vues. Cependant, l'ouverture d'un dialogue touchant à l'ensemble de ces questions à l'heure actuelle montrerait à nos populations et à d'autres interlocuteurs que nous prenons au sérieux la nécessité d'actualiser l'Alliance et d'adapter ses réactions à la nouvelle dynamique qui caractérise le monde d'aujourd'hui.

Concept stratégique

Le Canada souhaite que l'Alliance adopte une vision stratégique qui réponde de façon constructive à toutes ces préoccupations au sujet des armes nucléaires, biologiques et chimiques.

Nous devons examiner la tension évidente qui se manifeste entre les propos des Alliés de l'OTAN au sujet de la prolifération et nos actions en matière de désarmement. Plus de 70 % des Canadiens appuient l'OTAN et l'adhésion du Canada à l'Alliance, mais 93 % d'entre eux s'attendent à ce que le Canada et ses partenaires donnent l'exemple en ce qui a trait aux efforts en vue d'éliminer les armes nucléaires. Cette semaine, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes du Canada déposera ses recommandations sur le « Défi nucléaire ». Le gouvernement du Canada les étudiera attentivement.

De nombreux auditoires, aussi bien hors de l'Alliance qu'au sein de celle-ci, soupèseront chaque mot du nouveau Concept stratégique. Au moment de rédiger ce nouveau concept, nous devrons donc nous regarder comme les autres nous voient, de façon à ne pas envoyer de messages contraires à nos intentions. Nous devrons être prudents quant à la valeur politique que nous attachons aux forces nucléaires de l'OTAN, de crainte de fournir aux proliférateurs des arguments pour justifier leurs propres programmes nucléaires.

C'est pourquoi j'aimerais vous faire part de certaines réflexions concernant les messages que devrait véhiculer le nouveau Concept stratégique.

Premièrement, il faudra établir sans ambiguïté que l'Alliance existe pour assurer la sécurité de ses membres, ainsi que de la région euro-atlantique, et non pas pour contrecarrer qui que ce soit, et surtout pas la Russie. À cette fin, nous devrons réaffirmer les engagements de l'Alliance à défendre collectivement ses membres, à favoriser la sécurité, à prévenir et gérer les conflits, et à assurer la stabilité dans la région euro-atlantique, par ses propres moyens et dans le cadre de partenariats avec d'autres États européens. Ce faisant, nous devrons exprimer clairement que nous sommes une Alliance fondée sur des valeurs, déterminée à ce que son action contribue à la promotion de ces valeurs, en tenant compte du droit international, des impératifs humanitaires et des réalités politiques.

Deuxièmement, le Concept stratégique devra définir les relations de l'OTAN avec les autres institutions qui participent au cadre de la sécurité internationale. L'OTAN peut jouer un rôle décisif dans des situations difficiles. Nous devons reconnaître, comme le Traité le fait déjà, le caractère central du rôle et de la responsabilité des Nations Unies.

Troisièmement, le Concept stratégique devra illustrer les énormes progrès accomplis dans le domaine du désarmement depuis 1991, et porter l'engagement d'en faire davantage encore. Une attention spéciale devra être accordée aux réductions effectuées quant aux armes stratégiques, ainsi qu'à l'élimination de catégories entières d'armes en Europe. En même temps, nous devrons affirmer notre intention de renforcer le régime de non-prolifération nucléaire, surtout pour répondre aux menaces spécifiques que j'ai évoquées, et de concevoir d'autres mesures de contrôle des armements et de désarmement.

Quatrièmement, le Concept stratégique devra souligner le fait que, par suite de l'évolution du climat de sécurité, les armes nucléaires revêtent une importance bien moindre à l'égard de la stratégie de l'Alliance que ce n'était le cas durant les années 80 et au début des années 90.

Élargissement

En même temps que l'examen du Concept stratégique, la question de l'élargissement de l'OTAN retiendra l'attention au cours des prochains mois. Nous souhaitons que la République tchèque, la Hongrie et la Pologne prennent place à la table du Conseil le plus tôt possible avant le Sommet de Washington. Nous pressons donc les autorités responsables, aussi bien dans les pays concernés qu'à l'OTAN même, de prendre les mesures voulues à cette fin.

Pour le Canada, l'élargissement de l'OTAN représente l'accomplissement d'une promesse politique faite aux pays d'Europe centrale et orientale au moment de la fondation de l'Alliance. Cette question revêt donc une importance politique et la décision d'élargir ou non l'Alliance ne saurait être fondée uniquement sur la capacité des membres éventuels à contribuer à ses ressources militaires.

Inévitablement, il n'y aura pas unanimité sur la question de savoir s'il faut ou non inviter de nouveaux membres lors du Sommet de Washington. Nous appuyons bon nombre des idées proposées dans la cadre de la formule « Madrid Plus » à l'intention des pays candidats. Au-delà de cela, nous devrions nous entendre lors du Sommet sur un plan directeur politique et sur le calendrier des décisions concernant un élargissement plus poussé.

Ce point reviendra constamment à l'ordre du jour de nos travaux au cours des prochaines années. Je crois que nous devrons décider de procéder à un autre élargissement dès 2001.

Conclusion

Le Canada veut que l'Alliance franchisse le seuil de son deuxième cinquantenaire plus forte et plus utile que jamais. À l'heure où nous nous préparons pour le Sommet de Washington, n'oublions pas que ce sont les valeurs et le succès de nos démocraties qui nous unissent en tant qu'Alliés et qui nous permettront de surmonter les défis qui nous attendent. Le Sommet de Washington constituera pour l'Alliance un jalon important, et très visible, dans ce processus. J'espère que nos rencontres ici cette semaine contribueront à sa réussite.

Merci.


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Dernière mise à jour :
2005-04-15
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