le 9 février 2004
Les Cotisations syndicales - Décision de la CRTFP
L'objectif du présent bulletin est d'orienter les ministères quant à la
mise en oeuvre de la décision rendue le 11 décembre 2003 par la Commission des
relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) (dossiers 169-2-660 à
665), dont vous trouverez une copie ci-jointe, relativement à une plainte
déposée par l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC)
au sujet des clauses de précompte dans ses six conventions collectives.
Contexte
En juin 2001, l'IPFPC a communiqué avec le Secrétariat du Conseil du
Trésor (SCT), prétendant qu'il y avait un montant de 281 500 $ en cotisations
syndicales qui était dû à l'Institut. Ce dernier a indiqué que les
problèmes étaient reliés au moment où les cotisations commençaient et
cessaient, à la gestion des cotisations des employés en affectation
intérimaire et aux retards dans l'émission des lettres d'offres. L'Institut a
fourni des rapports détaillés afin de résoudre ces problèmes.
On a avisé les ministères touchés des problèmes en question, on leur a
fourni des rapports détaillés en septembre 2001 et on leur a demandé de
remédier à la situation le plus rapidement possible.
Les ministères ont fait des efforts appréciables, tant en temps qu'en
dollars consacrés aux salaires, pour résoudre les problèmes. Malgré les
nombreux efforts, il semble que la somme des cotisations dues à l'IPFPC a
augmenté. À l'automne 2003, l'Institut a indiqué qu'on lui devait maintenant
plus de 700 000 $.
C'est un fait reconnu que les retards dans l'émission de lettres
d'offres rétroactives et dans les processus administratifs ministériels
relatifs à la déduction des cotisations sont des irritants majeurs. Selon la
politique actuelle du SCT sur la retenue des cotisations syndicales, si l'agent
négociateur change, les retenues doivent être modifiées à la date la plus
éloignée entre la date réelle de nomination et la date d'émission du
document d'autorisation (la lettre d'offre). Dans bien des cas, la lettre
d'offre est émise plusieurs mois après la date réelle de la nomination.
Depuis mai 2001, l'IPFPC insiste pour que la date de la lettre d'offre n'ait
aucune répercussion sur la date à laquelle les retenues syndicales doivent
être modifiées. L'Institut soutient que la date de modification des
cotisations syndicales doit être établie à partir de la date à laquelle
l'employé commence à occuper son poste. La jurisprudence et la décision
susmentionnée de la CRTFP appuient cette position.
Nouvelle demande
Compte tenu de la décision susmentionnée de la CRTFP, à partir de
maintenant, on ne tiendra plus compte de la date de la lettre d'offre
lorsqu'on fixera la date réelle de la modification des retenues syndicales, et
ce, pour tous les agents négociateurs. Cette date sera déterminée à
partir de la date réelle de la nomination/du changement, sauf dans les cas de
reclassification ou de transposition, où on utilisera la date du document
d'autorisation.
On modifie présentement la politique actuelle du SCT sur la retenue des
cotisations syndicales afin qu'elle traduise ce changement. Le document modifié
sera publié très bientôt.
Conditions d'emploi
Dans le passé, les conditions d'emploi n'étaient jamais rétroactives.
Lorsqu'un employé était nommé ou affecté, les conditions de la nouvelle
nomination entraient en vigueur à la date la plus éloignée de la date réelle
du changement ou de la date du document d'autorisation.
La modification de la date à laquelle la retenue des cotisations syndicales
débute, qui est désormais fixée à partir de la date réelle de la nomination
ou de l'affectation, a aussi des répercussions sur la date à laquelle les
conditions d'emploi changent.
En vigueur immédiatement, pour tous les changements, sauf
les cas de reclassification ou de transposition, les conditions d'emploi seront
modifiées à la date réelle où l'employé commence à occuper son nouveau
poste.
Ce changement aura des répercussions sur les avantages sociaux comme les
indemnités provisoires, les congés et les heures de travail.
Les cas de reclassification ou de transposition ne sont pas visés par cette
mesure, parce que le nouveau groupe et le nouveau niveau ne sont pas connus
avant l'émission du document d'autorisation. Dans ces cas-là, les conditions
relatives à la nouvelle nomination entrent en vigueur à la date où le
document d'autorisation est émis.
Modification des procédures
À la suite de la décision de la CRTFP, les processus internes des
ministères seront modifiés afin d'assurer que les conseillers en
rémunération :
- Sont avisés officiellement par écrit, le plus tôt
possible, de toute nomination ou de tout changement, afin qu'ils veillent à
minimiser les ajustements rétroactifs des cotisations syndicales.
- Commencent le recouvrement des arrérages de cotisations syndicales aussitôt
qu'il est connu que les arrérages sont en souffrance. Les
ministères ne doivent pas attendre l'approbation du remboursement des
cotisations par l'ancien agent négociateur (lorsqu'il y a un changement
d'agent négociateur).
- Fournissent au nouvel agent négociateur les cotisations syndicales
pour la période complète auxquelles il a droit. Lorsque l'ancien
agent négociateur n'autorise qu'un remboursement partiel (cotisations
soumises à cet agent négociateur par erreur), le ministère doit retenir
les cotisations syndicales du traitement de l'employé pour la période
représentée par le remboursement et soumettre le solde dû au nouvel agent
négociateur en utilisant des budgets ministériels.
On communiquera bientôt aux gestionnaires de la rémunération de plus
amples détails sur les modifications apportées aux procédures.
Mise en oeuvre de la décision de la CRTFP
La décision susmentionnée de la CRTFP doit être complètement mise en
oeuvre dans les 90 jours civils suivant le 11 décembre 2003. Le 19 janvier
dernier, l'IPFPC nous a fourni un rapport mentionnant tous les employés
touchés par cette décision. Afin de déterminer le montant dû à l'IPFPC, les
employés des unités ministérielles de la rémunération recevront bientôt le
rapport ainsi que la marche à suivre détaillée. Le rapport dûment rempli
devra nous être retourné avant le 1 mars 2004.
Les gestionnaires en rémunération et des relations de travail des
ministères doivent adresser leurs questions à leurs agents ministériels
compétents qui, si nécessaire, peuvent communiquer avec la Section de
l'administration de la paye.
Secrétaire adjoint
Relations de travail et opérations de rémunération
Bureau de la gestion des ressources humaines
Brent DiBartolo
Date : 20031211
Dossiers : 169-2-660 à 665
Référence : 2003 CRTFP 113
Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique |
Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique |
entre
INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA
FONCTION PUBLIQUE DU CANADA
agent négociateur
et
CONSEIL DU TRÉSOR
employeur
AFFAIRE :
|
Renvoi en vertu de l'article 99 de la
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique |
Devant :
|
Ian R. Mackenzie, commissaire |
Pour l'agent négociateur :
|
Dougald Brown, avocat |
Pour l'employeur :
|
Jennifer Champagne, avocate |
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 31 octobre 2003.
DÉCISION
[1] Il s'agit d'un renvoi par l'Institut professionnel de la fonction
publique du Canada (IPFPC) conformément à l'article 99 de la Loi sur les
relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) concernant la retenue des
cotisations syndicales par l'employeur. Plus particulièrement, l'agent
négociateur prétend que l'employeur contrevient aux dispositions sur les
cotisations syndicales que renferment les six conventions collectives de l'IPFPC
intervenues avec l'employeur : Sciences appliquées et génie; Systèmes
d'ordinateurs; Services de santé; Droit; Recherche; et Vérification, commerce
et achat.
[2] Dans sa demande, l'agent négociateur allègue ce qui suit :
[Traduction]
Les obligations suivantes, dont voici les détails, n'ont pas été
respectées ou exécutées : La convention collective exige que les
cotisations syndicales soient retenues et remises à l'agent négociateur à
compter du premier mois complet de la date d'entrée en vigueur de la
nomination. En contravention de la convention collective, l'employeur a retenu
et remis les cotisations à l'agent négociateur le premier jour du mois
suivant la date de prise d'effet de la nomination, ou à la date de parution
du rapport sur les opérations de dotation, selon la plus tardive de ces
dates.
[3] L'agent négociateur a demandé que la Commission rende l'ordonnance
suivante :
[Traduction]
a. Déclarer que l'employeur a contrevenu aux dispositions sur le
précompte de la convention collective.
b. Ordonner à l'employeur de ne pas commettre de telles violations.
c. Ordonner le paiement par l'employeur à l'agent négociateur d'un
montant égal aux pertes subies par ce dernier à la suite des violations de
la convention collective, intérêts en sus, rétroactivement à l'entrée en
vigueur de la convention collective.
Toute autre réparation qui peut être demandée ou nécessaire pour
indemniser intégralement l'agent négociateur.
[4] L'avocat de l'agent négociateur et l'avocate de l'employeur ont tous
deux fait des exposés introductifs. Un témoin a témoigné pour le compte de
l'agent négociateur et l'employeur n'a pas convoqué de témoins.
Témoignages
[5] L'IPFPC représente environ 30 000 fonctionnaires dont le Conseil du
Trésor est l'employeur. Edward (Eddie) Gillis est le secrétaire exécutif de
l'IPFPC depuis 1999. Il lui incombe notamment de gérer les retenues de
cotisations pour l'IPFPC. Il a témoigné que les cotisations représentent la
ressource économique essentielle de l'organisation et qu'elles sont
nécessaires pour assurer la représentation des employés qui font partie des
unités de négociation de l'IPFPC.
[6] M. Gillis a témoigné que l'IPFPC a découvert des écarts
considérables lorsqu'il s'est penché sur les chiffres des membres et sur les
retenues de cotisations. L'étude de cet écart a permis d'établir deux causes
distinctes. D'abord, il y avait des problèmes systémiques au niveau de la
retenue en temps opportun et de la remise des cotisations; des erreurs
administratives et des retards occasionnaient des arriérés très importants
dans les cotisations. M. Gillis a évalué que le montant des arriérés de
cotisations avoisinait les 500 000 $ au moment de l'examen. À l'heure actuelle,
ce montant atteint presque les 750 000 $. En outre, la politique du Conseil du
Trésor sur les retenues de cotisations (pièce C-2) et l'application de cette
politique par le ministère signifiaient qu'aucune cotisation n'était perçue
auprès d'un employé tant que cet employé n'avait pas reçu de lettre d'offre.
[7] Les dispositions concernant la retenue de cotisations syndicales sont les
mêmes dans toutes les conventions collectives de l'IPFPC (pièce C-1). La
convention collective du groupe Sciences appliquées et génie prévoit ce qui
suit :
ARTICLE 27
PRÉCOMPTE DES COTISATIONS SYNDICALES
27.01 À titre de condition d'emploi, l'Employeur retient sur la
rémunération mensuelle de tous les employés de l'unité de négociation un
montant égal aux cotisations syndicales.
[…]
27.03 Aux fins de l'application du paragraphe 27.01, les retenues
mensuelles sur la rémunération de chaque employé se font à partir du
premier mois complet d'emploi dans la mesure où il y a des gains.
[…]
27.05 Aucune association d'employés, sauf l'Institut, définie dans
l'article 2 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique,
n'est autorisée à faire déduire par l'Employeur des cotisations syndicales
ni d'autres retenues sur la paye des employés de l'unité de négociation.
27.06 Les sommes retenues conformément au paragraphe 27.01 doivent
être versées par chèque à l'Institut dans un délai raisonnable suivant la
date de leur retenue et être accompagnées de détails qui identifient chaque
employé et les retenues faites en son nom.
[8] La politique du Conseil du Trésor sur la retenue des cotisations
syndicales (« Retenue des cotisations syndicales », pièce C-2) énonce la
procédure que doivent utiliser les ministères dans les cas où des nominations
internes entraînent un changement dans la représentation syndicale. Le
changement à la représentation syndicale survient parce que le poste auquel
l'employé est nommé se trouve dans une unité de négociation différente :
4.1 Nominations ultérieures (promotions, rétrogradations, mutations)
à des postes de l'unité de négociation.
Dans le cas de nominations qui donnent lieu à un changement de
syndicat, les ministères doivent cesser les retenues de cotisations
syndicales et les recommencer aux nouveaux taux. Les ministères doivent
également remplir l'Avis de modification de l'affiliation syndicale…
Lorsqu'il n'y a qu'un changement d'agent de négociations, les
ministères doivent modifier les retenues de cotisations syndicales le premier
du jour du mois qui suit :
- la date réelle de nomination; ou
- la date d'émission du Rapport d'opération de dotation (ROD), si
celle-ci lui est postérieure.
[9] La politique prévoit que dans le cas des affectations intérimaires, les
ministères doivent retenir les cotisations comme si l'affectation était une
nomination (section 6, pièce C-2).
[10] M. Gillis a témoigné que le Rapport d'opération de dotation dont il
est question dans la politique avait été remplacé par la lettre d'offre que
chaque employé reçoit lorsqu'il est promu ou reçoit une affectation
intérimaire. Il a également témoigné que les ministères commencent à
retenir des cotisations à compter de la date figurant sur la lettre d'offre, et
non à compter de la date réelle de nomination.
[11] L'IPFPC reçoit de l'employeur une liste mensuelle des employés qui
font partie de l'unité de négociation. Cette liste est désignée sous le nom
de liste de l'indicatif d'unité de négociation. L'IPFPC a créé sa propre
base de données comportant des renvois entre cette information et l'information
sur les retenues à la source également fournie par l'employeur. L'agent
négociateur a présenté un cartable de documents ayant trait à un certain
nombre d'employés qui comportaient des renseignements sur l'indicatif d'unité
de négociation et sur la liste de paie (pièce C-6). Le document qui renferme
des renseignements sur l'indicatif d'unité de négociation indique au cours de
quel mois l'employé a fait son entrée dans l'unité de négociation. Le
document sur la liste de paie montre à quel mois chaque employé a commencé à
verser des cotisations à l'IPFPC. M. Gillis a examiné plusieurs des exemples
se trouvant dans le cartable à l'audience, qui montrent que dans chaque cas, le
ministère a refusé de retenir des cotisations pour la période précédant la
date de la lettre d'offre. M. Gillis a témoigné que les ministères ne
retiennent ni ne versent de cotisations pour les périodes intérimaires qui se
sont terminées au plus tard au moment où une lettre d'offre est produite. Il a
également témoigné que dans certains cas, la lettre d'offre est produite
jusqu'à 18 mois après la date réelle de nomination.
[12] Entre la date réelle de nomination et la date de la lettre d'offre, des
cotisations sont retenues et versées à l'agent négociateur précédent pour
le poste occupé par l'employé avant sa nomination. M. Gillis a témoigné que
dans la plupart des cas, cet agent négociateur était l'Alliance de la Fonction
publique du Canada (AFPC). M. Gillis a déclaré que l'IPFPC assume la
responsabilité de représenter un employé dès le premier jour au cours duquel
l'employé s'acquitte des fonctions rattachées à un titulaire de poste d'une
unité de négociation. L'ancien agent négociateur ne représente aucunement
cet employé, mais des cotisations sont versées à cet agent négociateur. M.
Gillis a également témoigné que l'AFPC avait pour politique interne de
restreindre les remboursements de cotisations qui lui ont été versées par
erreur à un an.
[13] M. Gillis ne pouvait quantifier en dollars la différence dans le
montant des cotisations entre la date réelle de nomination et la lettre d'offre
parce que l'IPFPC n'est pas toujours informé des dates réelles de promotions
et de nominations intérimaires. Selon lui, le montant en question atteignait
les centaines de milliers de dollars.
[14] L'IPFPC et le Conseil du Trésor se sont rencontrés le 11 mai 2001 pour
discuter de la question des cotisations non prélevées. M. Gillis a témoigné
que Steve Hindle, président de l'IPFPC, Frank Claydon, secrétaire du Conseil
du Trésor, Michael Nurse, sous-ministre adjoint de Travaux publics et Services
gouvernementaux Canada (TPSGC), Marcel Nouvet, dirigeant principal des
ressources humaines et lui-même ont participé à la rencontre au cours de
laquelle ils ont abordé certaines questions liées aux retenues de cotisations,
dont la question de la date réelle. Dans une lettre ayant précédé la
réunion (pièce C-4), M. Gillis joignait un document d'information sur le
problème des cotisations non prélevées, qui énonçait les « répercussions
négatives » suivantes :
[Traduction]
1. Des méthodes administratives lourdes doivent être lancées par
l'employeur et par l'IPFPC pour rectifier les erreurs, percevoir les
arriérés et traiter les remboursements.
2. Les employés sont confrontés à des retenues imprévues de
cotisations impayées dont ils ne sont pas responsables.
3. L'IPFPC est privé de revenus de fonctionnement importants.
4. Des relations de travail harmonieuses sont mises en péril car il
faut faire appel à un tiers pour que les obligations inscrites dans la
convention collective soient respectées.
[15] Il a été convenu, lors de la réunion du 11 mai 2001, de constituer un
petit groupe de travail qui serait chargé d'examiner les questions. Thomas
(Tom) Smith, directeur de l'administration de la paie au Conseil du Trésor,
ainsi que M. Gillis ont été chargés d'assurer le suivi de ces questions.
[16] Dans une lettre datée du 12 juillet 2001 adressée à M. Smith, M.
Gillis décrivait de manière plus exhaustive, du point de vue de l'IPFPC
(pièce C-5), les problèmes rattachés à la production de lettres d'offre. Il
a déclaré que l'expérience vécue récemment a enseigné à l'IPFPC que le
délai moyen entre la date réelle de nomination et la production d'une lettre
d'offre est d'[traduction] « environ six mois, et souvent un an ou plus ». Il
était également question de ce qui suit dans la lettre :
[Traduction]
Nous croyons fermement que la politique ou le mode d'application de
celle-ci ne peut annuler et remplacer l'obligation de l'employeur, inscrite
dans la convention collective, de retenir et de prélever des cotisations. Il
faudrait envisager la possibilité de modifier la politique de manière à
exiger la retenue et le prélèvement de cotisations à compter du premier
jour du mois qui suit la date réelle de nomination. Quoi qu'il en
soit, l'Institut professionnel ne peut plus accepter le statu quo, et nous
vous demandons de nous aider à effectuer des changements positifs. (C'est
l'auteur qui souligne)
[17] D'après le témoignage de M. Gillis, au cours des activités du groupe
de travail, il y a eu échange de renseignements concernant la situation des
arriérés et des efforts ont été déployés pour corriger les problèmes. En
contre-interrogatoire, il a reconnu que certains des problèmes d'arriérés ont
été réglés. Toutefois, la question de la date réelle de retenue des
cotisations n'a pas été traitée à fond. Il a déclaré que l'employeur a
reconnu l'existence du problème, dans la mesure où les parties ont discuté
d'un projet de politique révisée, et que l'employeur a informé l'IPFPC qu'il
serait tenu compte de ses préoccupations.
[18] La politique de l'employeur relative aux retenues de cotisations est
actuellement à l'étude. En outre, les agents négociateurs ont été
consultés concernant un nouveau projet de politique (pièce C-7). Le Conseil du
Trésor a acheminé la version finale de la politique au Conseil national mixte
(CNM) afin qu'elle soit distribuée aux agents négociateurs le 21 octobre 2003.
Dans la lettre d'accompagnement du projet de politique, Brent DiBartolo,
secrétaire adjoint, Relations de travail et opérations de rémunération, a
affirmé que cette « dernière version » serait envoyée aux ministères en
octobre 2003, pour étude et commentaires. Il a dit souhaiter que le document
approuvé soit publié d'ici le 1er janvier 2004.
[19] Le projet de politique (pièce C-7) prévoit que dans le cas des
promotions, des déploiements, des mutations et des affectations par intérim,
les ministères doivent cesser de retenir les cotisations pour l'ancien agent
négociateur et commencer à retenir les cotisations pour le nouvel agent
négociateur à compter du premier jour du mois civil complet qui suit le
changement (paragraphes 6.1.1 et 7.2). Les exemples donnés dans la politique
indiquent que la date de la lettre d'offre n'est plus considérée comme la date
à compter de laquelle les retenues de cotisations sont calculées.
Plaidoirie
Pour l'agent négociateur
[20] Dougald Brown, avocat de l'agent négociateur, a fait valoir que la
question en litige dans cette demande était simple : quand une personne
devient-elle employée d'une unité de négociation? La convention collective
crée, pour l'employeur, une obligation de retenir des cotisations déclenchée
par le premier mois complet d'emploi au sein de l'unité de négociation. La
clause de reconnaissance syndicale qui se trouve dans toutes les conventions
collectives reconnaît l'IPFPC comme agent négociateur exclusif de tous les
employés décrits dans l'attestation du groupe professionnel émise par la
Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission)
(pièce C‑3). L'effet combiné de ces deux articles consiste à exiger de
l'employeur qu'il prélève des cotisations à compter du premier mois complet
au cours duquel la personne devient employée de l'unité de négociation. Cette
obligation devient encore plus claire à l'examen de la clause 27.05 (pièce
C-1), qui énonce qu'une fois qu'un employé fait partie d'une unité de
négociation représentée par l'IPFPC, aucune cotisation ne doit être
prélevée par un autre agent négociateur.
[21] Me Brown a déclaré que les faits ne sont pas contestés. L'employeur
n'a pas répliqué à la demande, n'a pas fait citer de témoins pour contrer le
témoignage de l'agent négociateur et n'a pas contesté le témoignage de M.
Gillis.
[22] Me Brown a argué que l'employeur a produit une politique sur la retenue
des cotisations qui contrevient à l'obligation de l'employeur aux termes de la
convention collective. L'employeur ne peut produire une politique unilatérale
ayant pour effet de modifier la convention collective. Les dispositions de la
convention collective lient l'employeur.
[23] Me Brown a soutenu que la partie problématique de la politique de
l'employeur se trouve au paragraphe 4.1, qui prévoit que des cotisations
doivent être retenues à la date réelle de nomination ou à la date inscrite
sur la lettre d'offre, si cette dernière est postérieure, ce qui serait
logique si un employé est nouvellement recruté dans la fonction publique. Le
problème qui est devenu manifeste réside dans le fait que les lettres d'offre
sont maintenant émises couramment de nombreux mois après que l'employé a
commencé à s'acquitter des fonctions rattachées au nouveau poste. Les lettres
d'offre indiquent toutes une date d'effet rétroactive. L'article 22 de la Loi
sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) prévoit expressément
l'application rétroactive des lettres d'offre. Il n'y a rien d'inopportun dans
une date d'effet rétroactive. Si c'était le cas, il n'existerait pas
d'autorité de verser le salaire le plus élevé à compter de la date à
laquelle l'employé a commencé à exécuter ses fonctions.
[24] D'après Me Brown, le problème ne réside pas dans les lettres d'offre
tardives; il tient plutôt du fait que l'employeur ne reconnaît pas qu'une
personne est « employée » lorsqu'elle commence à accomplir les fonctions
rattachées à un poste au sein d'une unité de négociation. Cela découle des
définitions d'« employé » et de « fonction publique » inscrites dans la
LRTFP. C'est l'emploi dans un poste qui fait d'une personne un employé. Les
attestations émises par la Commission mentionnent « tous les employés de
l'employeur du groupe pertinent, tel qu'il est défini dans la Gazette du Canada
». C'est l'exécution des fonctions au sein de ce groupe qui fait d'une
personne un employé du groupe pertinent.
[25] Me Brown prétend que l'IPFPC a l'obligation légale de représenter ces
personnes qui font partie de l'unité de négociation. Il n'est pas contesté
que dans chacune des situations, d'après les dossiers de l'employeur lui-même,
ces personnes ont commencé à s'acquitter des fonctions d'un poste au sein de
l'unité de négociation de l'IPFPC à une date que l'employeur refuse de
reconnaître comme la date de départ. En outre, il est clair que l'obligation
légale de représenter ces personnes débute à la date à laquelle l'employé
commence à exécuter les fonctions du poste. Il s'agit de la date à laquelle
les cotisations deviennent exigibles, tant juridiquement qu'en toute logique.
[26] Me Brown a également fait valoir que les autres politiques de
l'employeur ne sont pas concentrées sur la date de la lettre d'offre comme
élément déclencheur de quoi que ce soit. La politique et le règlement sur
les modalités comportent une orientation passablement différente. Par exemple,
le paragraphe 20(1) ne met pas l'accent sur la date artificielle de la lettre
d'offre, mais bien sur les services rendus. La définition d'employé inscrite
dans la politique ne traite aucunement de la lettre d'offre. Même sans avoir
fait l'objet d'une nomination officielle, un employé conserve le droit d'être
rémunéré en vertu de la convention collective qui s'applique aux fonctions
attribuées (article 47A). Si les fonctions exécutées le sont dans le cadre de
l'unité de l'IPFPC, l'employé a le droit d'être rémunéré conformément aux
taux de rémunération inscrits dans la convention collective de l'IPFPC. La
date réelle à laquelle l'employé reçoit la lettre d'offre n'est pas
pertinente.
[27] Me Brown a fait observer qu'il est bien connu que lorsque les employés
commencent à s'acquitter de fonctions dans une unité de l'IPFPC, ils
commencent à bénéficier du traitement inscrit dans la convention pertinente
de l'IPFPC sur-le-champ. La rémunération accrue ne prend pas effet seulement
sur réception de la lettre d'offre.
[28] Me Brown a souligné qu'entre la date à laquelle une personne commence
à s'acquitter des fonctions rattachées à un poste au sein d'une unité de
négociation de l'IPFPC et la date d'émission d'une lettre d'offre, les
cotisations sont retenues et remises à l'ancien agent négociateur. Il a fait
valoir qu'il s'agit d'une violation flagrante de la convention collective
(clause 27.05).
[29] Me Brown a prétendu que le projet de politique du Conseil du Trésor
(pièce C-7) est correct. L'application de l'obligation de prélever des
cotisations est déclenchée lorsque l'employé commence à exécuter les
fonctions rattachées à un poste au sein d'une unité de négociation de
l'IPFPC.
[30] Me Brown a également fait valoir que si la date de la lettre d'offre
était la date réelle, l'employeur pourrait s'adonner à une manipulation
évidente en privilégiant un agent négociateur par rapport à un autre. Ce ne
peut être correct; l'employeur doit être complètement neutre et impartial
lorsqu'il est question des agents négociateurs. L'AFPC a reçu de nombreuses
cotisations d'employés qu'elle ne représentait pas. Pourquoi l'employeur
favorise-t-il l'AFPC? Si la politique de l'employeur est correcte, ce dernier
pourrait faire disparaître un syndicat, ce qui ne peut être correct.
[31] Me Brown a prétendu que la période de discussion de ces questions
était terminée. Deux années de discussions ne devraient pas être
nécessaires pour régler un secteur clair de la convention collective. La
réponse selon laquelle l'employeur tient encore des consultations sur la
question ne convient pas. D'autres consultations ne régleront pas cette
question. Ce n'est pas une question que l'agent négociateur devrait avoir à
négocier.
[32] Me Brown a demandé que la Commission rende une décision déclaratoire
selon laquelle la clause 4.1 de la politique qui porte sur les cotisations viole
l'obligation de l'employeur prévue dans la convention collective. De plus, il a
demandé que la Commission rende une décision déclaratoire selon laquelle
l'obligation de prélever des cotisations auprès de l'IPFPC débute lors du
premier mois complet pendant lequel l'employé commence à exécuter les
fonctions rattachées à un poste au sein d'une unité de négociation
représentée par l'IPFPC.
[33] Me Brown a également fait valoir que l'agent négociateur avait le
droit à une indemnisation intégrale et à un dédommagement pour violation de
la convention collective. Il n'existe pas de limite de temps à un renvoi en
vertu de l'article 99 de la LRTFP. Par conséquent, il n'y a pas non plus de
limite à la date jusqu'à laquelle il est possible de reculer pour établir le
dédommagement financier. L'agent négociateur ne devrait pas subir de
préjudice parce qu'il s'est efforcé de bonne foi de régler la question avant
le lancement de ces procédures. Il existe une obligation, pour le Conseil du
Trésor, de prélever des cotisations auprès de l'agent négociateur :
Association canadienne du contrôle du trafic aérien et Conseil du Trésor
(dossier de la Commission 169-2-588). L'obligation incombe au Conseil du Trésor
et non aux ministères. L'employeur ne peut répliquer en affirmant que ces
cotisations ont été versées à quelqu'un d'autre. L'IPFPC ne devrait pas
avoir à attendre jusqu'à ce que l'employeur se fasse retourner les paiements
de cotisation par l'AFPC. L'IPFPC ne perçoit pas d'intérêts sur les montants
dus et ne devrait donc pas avoir à attendre jusqu'à ce qu'un autre agent
négociateur décide de renvoyer le montant exigible. Si la Commission établit
très clairement que les cotisations sont payables à l'IPFPC immédiatement et
qu'il revient à l'employeur de récupérer les cotisations, cela créerait
l'élément incitatif nécessaire pour régler ces questions.
[34] Me Brown a prétendu que la Commission devrait rendre une ordonnance
réparatrice ordonnant que l'agent négociateur soit indemnisé intégralement
et que les parties tiennent une rencontre pour établir quel est le montant
exigible et que le paiement doit être versé dans les 60 jours. L'IPFPC a un
bon dossier et tout ce qu'il faut, c'est la date réelle à laquelle chaque
employé est entré en fonctions. Par la suite, il ne reste qu'à faire des
calculs.
[35] Me Brown a également soutenu que la Commission devrait demeurer saisie
de cette demande en règlement des questions en suspens à la fin des 60 jours.
[36] Me Brown m'a renvoyé à L'Institut professionnel de la fonction
publique du Canada et le Conseil du Trésor (dossier de la Commission 125-2-63).
Il m'a également renvoyé aux décisions rendues par la Cour fédérale dans
Eaton c. Canada, (1982) 43 N.R. 347 (C.A), et par la Cour suprême dans Doré c.
Canada [1987], 2 R.C.S. 503.
Pour l'employeur
[37] Jennifer Champagne, avocate de l'employeur, a déclaré qu'elle n'était
pas là pour s'excuser des retards dans l'émission de lettres d'offre. Elle a
fait valoir que le problème n'était pas un problème d'orientation, mais
plutôt un problème d'application de la politique. Peut-être est-il
nécessaire d'accélérer le processus. Cependant, les solutions qu'il convient
d'envisager vont au-delà de la portée de la convention collective ou de la
politique de l'employeur.
[38] Me Champagne a souligné quelques exemples du cartable (pièce C-6) afin
d'illustrer que le problème de prélèvement des cotisations allait au-delà de
la date de la lettre d'offre. De fait, le problème principal était le délai
entre l'émission de la lettre d'offre et le prélèvement des cotisations. La
question en litige ne réside pas dans le point de départ de la retenue des
cotisations, mais plutôt ailleurs dans le processus de dotation. Il s'agit d'un
problème pratique qu'il faut résoudre. Le problème a été cerné et
expliqué tant dans la correspondance que dans le projet de politique. Des
mesures ont été prises pour régler le problème. Beaucoup de travail a été
fait et il vaudrait la peine de louer les efforts déployés par les ministères
pour apaiser les préoccupations soulevées par l'agent négociateur.
[39] Me Champagne a fait valoir que des mots ne peuvent être ajoutés à la
convention collective. La convention collective ne dit mot au sujet du point de
départ de la retenue des cotisations; elle ne renvoie pas à la date réelle.
La convention collective ne peut contrevenir à la LEFP. La LEFP prévoit que
pour entrer en fonction, il faut avoir été officiellement nommé. La politique
de l'employeur intègre le libellé de la LEFP. Il ne peut y avoir de promotion
si la nomination n'a pas été effectuée en vertu de la LEFP et de ses
règlements d'application. La politique ne peut refléter rien d'autre que la
LEFP. La convention collective doit s'en tenir à la même voie.
[40] Me Champagne a convenu que les lettres d'offre devraient être produites
plus rapidement pour être plus rapprochées de la date à laquelle la personne
entre en fonction. Elle a prétendu qu'il était souhaité que la date de
production des lettres d'offre soit la plus rapprochée possible de l'entrée en
fonction. Toutefois, il doit y avoir eu une nomination officielle avant que des
cotisations soient retenues.
[41] Un certain nombre de motifs peuvent justifier le retard dans la
production d'une lettre d'offre, dont la mobilité accrue au sein de la fonction
publique et la sous-dotation des ressources humaines. Toutefois, il ne s'agit
pas d'un problème d'orientation, mais plutôt d'un problème d'application de
la politique.
[42] Il existe également des problèmes avec la thèse de l'agent
négociateur relativement à la date réelle, en ce sens qu'il est souvent
impossible d'établir quelle est la date réelle dans des cas de reclassement et
de situations provisoires, car les fonctions évoluent avec le temps. Il faut
donc disposer d'un document officiel pour déterminer la date de la nomination.
De plus, les nominations provisoires à court terme qui sont prolongées
engendreront des problèmes pour établir la date réelle, ce qui crée un flot.
Pour que cette incertitude soit évitée, un document de nomination officiel est
nécessaire. Comme le processus est le même pour tous, le traitement est
uniforme. L'utilisation de la lettre d'offre officielle permet d'éviter un
débat sur ce qu'est vraiment la date réelle. Elle permet également d'éviter
les débats entre agents négociateurs. Me Champagne a prétendu que la
politique de l'employeur est en tous points conforme au libellé de la
convention collective et de la LEFP.
[43] Me Champagne a fait observer que les deux parties collaborent afin de
trouver une solution à long terme aux problèmes et qu'une décision de la
Commission ne constituait pas une solution à long terme appropriée aux
problèmes. Les problèmes vont bien au-delà de la portée de la politique.
[44] Me Champagne m'a également renvoyé à L'Association professionnelle
des agents du service extérieur et le Conseil du Trésor, 2003 CRTFP 70,
décision portant sur la rémunération d'intérim, et a déclaré qu'elle doit
être conciliée à la plaidoirie de l'agent négociateur sur le début de
l'application de son obligation de représenter un employé.
[45] Me Champagne a prétendu que je n'étais pas habilité à accorder des
intérêts et m'a renvoyé à Eaton, supra, et Guest et Agence des douanes et du
revenu du Canada, 2003 CRTFP 89.
Réfutation
[46] Me Brown a soutenu que l'employeur n'a produit aucun élément de preuve
portant sur des zones dites « zones grises » et qu'il ne pouvait invoquer cet
argument dans sa plaidoirie. L'employeur n'a pas présenté d'exemples d'une
affaire dans laquelle il n'a pas été difficile de déterminer à quelle date
un employé commence à faire partie de l'unité de négociation.
Motifs de décision
[47] Les faits de la présente demande font l'objet de peu de conflits entre
les parties, comme le fait ressortir la décision de l'employeur de ne pas
produire d'éléments de preuve. C'est la question précise du moment
particulier ayant marqué le début du droit de l'agent négociateur aux
cotisations syndicales qui constitue la question litigieuse.
[48] Comme l'avocate de l'employeur, je conviens qu'il n'appartient pas à la
Commission de trouver une solution exhaustive aux questions qui entourent la
retenue de cotisations syndicales. Les parties devraient être en mesure de
régler des questions administratives et de surmonter les obstacles au
prélèvement opportun de cotisations sans l'aide d'une décision de la
Commission. Le projet de politique du Conseil du Trésor (pièce C-7) indique
bien les progrès qui peuvent être accomplis au moyen de consultations.
Toutefois, il est approprié que la Commission interprète les dispositions de
la convention collective et règle des prétendues contradictions entre la
convention collective et les politiques de l'employeur.
[49] Les dispositions de la convention collective concernant le précompte
des cotisations syndicales sont les mêmes dans toutes les conventions
collectives de l'IPFPC (voir le paragraphe 7 de la présente décision).
[50] La politique de l'employeur sur les retenues de cotisations prévoit que
les cotisations doivent être retenues « le premier jour du mois qui suit la
date réelle de nomination ou la date d'émission du Rapport d'opération de
dotation, si celle-ci lui est postérieure » (nous soulignons). L'article 6 de
la politique a trait aux affectations intérimaires et prévoit que les
ministères doivent retenir des cotisations « comme si l'affectation était une
nomination ». Il n'est pas contesté que la lettre d'offre a remplacé le
Rapport d'opération de dotation. Il n'est pas non plus contesté que dans les
cas de nominations intérimaires et de promotions, la lettre d'offre est souvent
émise une fois que l'employé est entré en fonction dans son nouveau poste.
Dans certains cas, cela peut signifier que l'agent négociateur ne constate pas
de retenues de cotisations si la nomination intérimaire est terminée avant que
la lettre d'offre soit produite.
[51] La convention collective renvoie au précompte pour les « employés de
l'unité de négociation » et stipule que les retenues doivent débuter au
cours du « premier mois complet d'emploi ». La convention collective ne
renvoie pas à la date d'émission de l'instrument d'autorisation. En l'espèce,
il faut tout simplement se demander quand débute l'« emploi » dans l'unité
de négociation.
[52] L'« emploi » renvoie aux modalités auxquelles une personne est
assujettie. La politique et la réglementation des modalités établissent
clairement que lorsqu'un employé accepte un poste par intérim dans une autre
unité de négociation, les modalités de cette unité de négociation
s'appliquent, sauf disposition à l'effet contraire. Dans PAFSO, supra, le poste
par intérim était dans un groupe exclu, et non dans une autre unité de
négociation. Le règlement prévoit également que lorsqu'une personne obtient
une promotion et commence à s'acquitter des fonctions dans une classification
plus élevée, l'employé devient assujetti aux modalités à compter de la date
à laquelle cette personne entreprend ces fonctions.
[53] Comme l'« emploi » débute au moins à la date réelle de nomination,
une interprétation simple des dispositions de la convention collective exige la
retenue des cotisations à cette date réelle. En termes pratiques, cela
signifie que les cotisations devraient commencer à être retenues quand le
ministère sait que l'employé s'acquitte des fonctions d'un poste dans la
nouvelle unité de négociation. Habituellement, le ministère établira cette
date dans sa lettre d'offre. Tout conflit concernant la date réelle sera
réglé par la lettre d'offre ou par un grief concernant la rémunération par
intérim ou la classification si les parties ne peuvent convenir de cette date
de début.
[54] Lorsqu'un employé accepte une nomination par intérim dans un groupe
non représenté, la politique de précompte des cotisations syndicales applique
une date différente : « les ministères doivent cesser de retenir les
cotisations le premier jour du mois qui suit la date réelle d'affectation »
(article 6, pièce C-2). Aucune explication de ce traitement différent n'a
été donnée à l'audience. Dans la situation d'une nomination par intérim
dans un groupe non représenté, l'employeur n'a pas les mêmes préoccupations
concernant l'acte de nomination. Si la plaidoirie de l'employeur selon laquelle
les retenues de cotisation pouvaient débuter seulement à la date de la lettre
d'offre était fondée, on pourrait penser que la fin de ces retenues de
cotisation pourrait survenir seulement à la date de la lettre d'offre.
[55] Il semble que l'employeur ait accepté, au moins provisoirement, que la
politique actuelle contrevient à la convention collective. Le projet de
politique (pièce C-7) est conforme à l'interprétation de la convention
collective mise de l'avant par l'agent négociateur. L'employeur n'a pas
présenté de preuve en vue d'établir le statut du projet de politique. La
lettre d'accompagnement adressée par le secrétaire adjoint des relations de
travail et des opérations de rémunération au secrétaire général du CNM
révèle que le projet devait être diffusé dans les ministères en octobre
2003 pour examen et observations. Le rôle des ministères dans la retenue et
les prélèvements est indéniable. Toutefois, une question cruciale comme le
droit aux retenues de cotisations ne préoccupe pas les ministères, car il
s'agit d'une exigence de la convention collective conclue entre l'agent
négociateur et l'employeur. Les ministères jouent un rôle primordial dans
l'application du processus de précompte, mais non dans l'établissement des
droits.
[56] Pour terminer, je conclus que la politique de l'employeur qui consiste
à faire débuter les retenues de cotisations seulement à la date d'émission
de la lettre d'offre contrevient à la convention collective. La seule valeur de
la lettre d'offre dans l'établissement des retenues de cotisations est qu'en
l'absence d'un grief relatif à la rémunération par intérim ou à la
classification, elle précise la date réelle de nomination.
[57] Dans sa demande, l'agent négociateur a demandé le paiement par
l'employeur [traduction] « d'un montant égal aux pertes subies par l'agent
négociateur par suite de violations de la convention collective …
rétroactivement au début de la convention collective ». Dans la plupart des
cas, les employés se sont fait prélever des retenues sur leur paie pour la
période entre la date de nomination et la lettre d'offre. Ces cotisations ont
été prélevées par l'employeur puis remises à d'autres agents négociateurs.
Le recouvrement de cotisations prélevées par erreur à d'autres agents
négociateurs est une question entre l'employeur et ces agents négociateurs.
Ces agents négociateurs ne sont pas parties à cette demande et je n'ai pas la
compétence nécessaire pour rendre des ordonnances qui les touchent; en effet,
ma compétence se limite au différend entre l'IPFPC et l'employeur. J'en suis
venu à la conclusion que l'employeur est responsable de la violation de la
convention collective, et, par conséquent, qu'il doit remettre à l'IPFPC un
montant égal aux cotisations dues en vertu de la convention collective.
[58] Dans sa demande, l'agent négociateur a demandé un paiement rétroactif
au début de chaque convention collective. Bien qu'il soit véridique qu'il n'y
a pas de limites de temps pour présenter des demandes en vertu de l'article 99
de la LRTFP, l'employeur ne devrait pas être pris au dépourvu par des demandes
produites longtemps après le début d'une convention collective. En l'espèce,
la disposition de la politique qui est en litige a pris effet depuis au moins le
1er mai 1995 (date de la dernière révision) et d'après la preuve déposée,
c'est l'agent négociateur qui a d'abord soulevé officiellement la question
auprès de l'employeur lors d'une réunion tenue le 11 mai 2001. Depuis cette
réunion, l'employeur a été informé de la position de l'agent négociateur.
Par conséquent, le redressement devrait être rétroactif à mai 2001. La
responsabilité de l'employeur équivaut donc à toutes les cotisations dues
pour les employés pertinents, à compter des cotisations du mois de mai 2001.
[59] L'avocat de l'agent négociateur a fait valoir que l'ordonnance devrait
englober des directives selon lesquelles l'IPFPC devrait être payé dans les 60
jours. Je laisse aux parties le soin d'instituer un processus d'établissement
du montant total exigible et de remettre à l'IPFPC le montant dès que
possible, mais au plus tard 90 jours après la date de la présente décision.
[60] Les parties ont convenu que la Commission n'avait pas le pouvoir
d'adjuger des intérêts.
[61] En conséquence, est émise une ordonnance :
- déclarant que l'employeur a violé les dispositions sur le précompte des
six conventions collectives intervenues avec l'IPFPC;
- enjoignant à l'employeur de se conformer aux dispositions sur le
précompte qui se trouvent dans les conventions collectives pertinentes et
de retenir des cotisations lors du premier mois suivant la date de
nomination;
- enjoignant de verser à l'IPFPC un montant égal aux cotisations qui lui
sont dues à la suite de la violation, rétroactivement à mai 2001, et dès
que possible, mais au plus tard 90 jours après la date de la présente
décision.
[62] Je demeurerai saisi de la présente affaire pendant une période de 95
jours à compter de la date de la présente décision.
Ian R. Mackenzie,
commissaire
OTTAWA, le 11 décembre 2003.
Traduction de la C.R.T.F.P.
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