Droit canadien
Une marque de commerce ne peut être enregistrée au Canada
que si elle a déjà été employée au Canada ou, sous certaines
conditions, dans un autre pays.
La règle de base du droit canadien est qu'un requérant doit,
au moment de la production de sa demande d'enregistrement,
déclarer qu'il a déjà employé la marque au Canada et indiquer à
compter de quelle date il l'a ainsi employée, ou déclarer qu'il a
l'intention d'employer la marque au Canada. Dans ce dernier cas,
il doit, après que sa demande a été admise mais avant que sa
marque puisse être enregistrée, produire une déclaration portant
que la marque a commencé à être employée au Canada. Il y a deux
cas dans lesquels l'emploi de la marque au Canada n'est pas exigé
avant son enregistrement.
En premier lieu, lorsqu'un requérant a enregistré sa marque
dans un pays de l'Union de Paris ou dans un pays membre de l'OMC,
il peut se contenter de déclarer que la marque a été employée
quelque part dans le monde. Il est généralement entendu qu'elle
doit avoir été ainsi employée avant la production de la demande
d'enregistrement au Canada, bien que la LMCC ne le prévoie pas
expressément.
En deuxième lieu, un requérant est exempté de l'exigence
concernant l'emploi antérieur de la marque au Canada lorsque la
marque, bien qu'elle n'ait pas été employée au Canada, a été
employée dans un pays de l'Union de Paris ou dans un pays membre
de l'OMC et est devenue bien connue au Canada (p. ex. par une
publicité de débordement); dans ce cas, le requérant n'a qu'à
déclarer que la marque a été employée dans un pays de l'Union de
Paris ou dans un pays membre de l'OMC.
Dans la LMCC, l'obligation d'employer la marque avant son
enregistrement est liée à quatre motifs sur lesquels toutes les
demandes d'enregistrement d'une marque présentées au Canada
doivent être fondées. Ainsi, comme l'indique l'article 16 de la
LMCC, l'enregistrement d'une marque de commerce peut être fondé
sur :
i) l'emploi de la marque au Canada avant la production de
la demande (par. 16(1));
ii) la révélation de la marque au Canada avant la
production de la demande (par. 16(1));
iii) l'enregistrement de la marque dans le pays d'origine du
requérant et l'emploi antérieur de la marque dans un
pays quel qu'il soit (par. 16(2));
iv) l'emploi projeté de la marque (par. 16(3)).
En ce qui concerne le point i), lorsqu'une marque a été
employée au Canada avant la production d'une demande
d'enregistrement, l'alinéa 30b) de la LMCC exige que la date à
compter de laquelle elle a été ainsi employée soit fournie. Selon
une certaine jurisprudence, un requérant peut fournir une date
postérieure à la date réelle à compter de laquelle la marque a
été employée, mais le défaut de fournir une date peut justifier
le refus d'une demande dans le cadre de la procédure
d'opposition. Un tel défaut ne constitue cependant pas un motif
d'invalidation suivant l'article 18 de la LMCC.
En ce qui concerne le point ii), une marque ne peut être
révélée au Canada au sens de l'article 5 de la LMCC que si elle a
déjà été employée dans un pays de l'Union de Paris ou dans un
pays membre de l'OMC. Lorsqu'une marque n'a pas été employée au
Canada mais qu'elle a été révélée dans ce pays, l'alinéa 30c) de
la LMCC exige que la demande précise le nom d'un pays de l'Union
de Paris ou d'un membre de l'OMC dans lequel elle a été employée,
la date à compter elle a été révélée au Canada et la manière dont
elle l'a été.
Pour ce qui est du point iii), il n'est pas nécessaire, dans
le cas d'une demande d'enregistrement d'une marque fondée sur
l'enregistrement et l'emploi de la marque à l'étranger, que
l'enregistrement existe à la date de production de la demande. Il
suffit qu'une demande d'enregistrement ait été déposée à
l'étranger. La preuve de l'enregistrement étranger doit toutefois
être fournie avant la date de l'annonce de la demande canadienne
(art. 31 de la LMCC).
Finalement, en ce qui concerne le point iv), une déclaration
d'emploi doit être produite avant que la marque puisse être
enregistrée (par. 40(2) de la LMCC).
Protocole
Les règles 9.5)f) et 7.2) du Règlement de Madrid permettent
à une partie contractante d'exiger une déclaration d'intention
d'utiliser la marque sur son territoire. Comme il a été mentionné
dans la section intitulée « Enregistrement et emploi de la marque
dans un autre pays », le Canada pourrait exiger qu'une telle
déclaration d'intention comprenne une déclaration portant que la
marque a été utilisée dans un pays étranger, lequel devrait être
nommé. Autrement, le Protocole ne renferme aucune disposition
prévoyant que les autres renseignements sur l'emploi de la marque
qui sont exigés actuellement par le Canada doivent être inclus
dans une demande internationale.
En théorie, rien dans le Protocole n'empêcherait le Canada
d'exiger qu'une marque ait été employée avant d'accepter de
l'enregistrer. Le Canada pourrait délivrer un refus provisoire à
l'égard de toute demande internationale le désignant qui lui a
été notifiée par le BI et qui ne satisfait pas aux conditions
relatives à l'emploi prévues par la LMCC. Ce refus provisoire ne
pourrait être retiré que lorsque ces conditions seraient
remplies. Cependant, une telle façon de faire alourdirait
considérablement la charge de travail du BMCC et pourrait être
critiquée par les autres parties contractantes, puisque aucune de
celles-ci n'adoptera probablement une telle approche.
Compte tenu de ce qui précède, s'il décidait d'adhérer au
Protocole, le Canada pourrait étudier la possibilité d'exempter
les enregistrements internationaux le désignant de toutes les
exigences relatives à l'emploi qui sont préalables à
l'enregistrement d'une marque au Canada, sauf à celle que le
déposant inclue dans la demande internationale une déclaration de
son intention d'utiliser la marque au Canada. De cette façon, les
exigences prévues aux alinéas 30b) à d) et au paragraphe 40(2) de
la LMCC ne seraient pas applicables aux demandes internationales
désignant le Canada et un requérant international ne serait pas
limité à l'un des quatre fondements de l'enregistrement prévus à
l'article 16 de la LMCC.
Les exigences relatives à l'emploi préalables à
l'enregistrement qui sont prévues par la LMCC semblent avoir été
adoptées pour décourager ce qui est parfois appelé le « trafic de
marques de commerce » et pour assurer que les déposants sont
raisonnablement sérieux et emploient de bonne foi la marque avant
de pouvoir en obtenir l'enregistrement. Le Canada devrait en
particulier évaluer l'ampleur du problème que pourraient poser,
au regard du trafic de marques de commerce, les déposants qui
déposent des demandes internationales désignant le Canada et
déterminer si d'autres mesures pourraient être prises pour
contrebalancer les abus potentiels. Le Canada pourrait, par
exemple, envisager la possibilité d'exempter de certaines
conditions relatives à l'emploi tous les déposants visés par le
système de Madrid qui désignent le Canada, mais d'obliger tous
les déposants qui se prévalent de cette exemption à déposer une
déclaration d'usage effectif dans un certain délai après
l'enregistrement (p. ex. après trois ans). (Voir ci-dessous les
commentaires concernant l'obligation d'employer la marque après
son enregistrement.)
Les sections intitulées « Emploi ou révélation de la marque
au Canada », « Enregistrement et emploi de la marque dans un
autre pays » et « Emploi projeté », figurant ci-dessus, traitent
aussi de l'impact du Protocole sur différentes exigences
relatives à l'emploi préalables à l'enregistrement qui sont
prévues par le droit canadien.
Droit canadien
Aux termes de l'article 45 de la LMCC, le registraire peut,
et doit sur demande écrite présentée après trois ans à compter de
la date de l'enregistrement d'une marque de commerce, à moins
qu'il ne voie une raison valable à l'effet contraire, donner au
propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de prouver que la
marque est employée. Le défaut de fournir cette preuve ou de
démontrer que la marque de commerce n'a pas été employée au
Canada en raison de circonstances spéciales justifiant ce défaut
d'emploi peut entraîner la modification ou la radiation de
l'enregistrement.
Suivant les articles 18 et 57 de la LMCC, l'enregistrement
d'une marque peut être radié si la marque a été abandonnée. Pour
qu'une marque de commerce soit abandonnée, il faut que le
titulaire de l'enregistrement ait eu l'intention de l'abandonner.
Cette intention peut être déduite, comme les tribunaux l'ont déjà
fait, du non-emploi de la marque pendant une longue période.
Cette obligation d'employer la marque après son
enregistrement est compatible avec la Convention de Paris,
l'Accord sur les ADPIC, l'ALÉNA, le TDM et le Protocole.