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Faillites Syndics de faillite Révision du régime d'insolvabilité | |||||||||||||||||||||||||
GTIP Rapport finalGTIP Rapport final ( format PDF ) Nota : Pour lire un document PDF, vous avez besoin du logiciel Adobe Acrobat Reader. Le Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle
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1. | Habillement et ameublement de maison | 7 500 $ |
2. | Appareils, aides et médicaments prescrits par un médecin pour usage ou consommation par le débiteur ou sa famille | Pas de limite |
3. | Un véhicule automobile pour utilisation à des fins personnelles, pour l'entreprise ou le commerce | 3 000 $ |
4. | Outils relatifs à l'exercice d'un métier ou ouvrages professionnels, non compris le véhicule automobile utilisé pour l'activité commerciale ou l'entreprise | 10 000 $ |
5. | Résidence du débiteur, définie comme étant une maison, un appartement, une maison mobile et une péniche aménagée | 5 000 $ |
Les diverses recommandations ci-dessus ont fait l'objet de vifs débats à la fois au sein du groupe d'étude chargé des questions relatives aux exemptions et à l'échelle du groupe de travail au complet, et les recommandations formulées sont souvent le fruit d'un compromis pratique plutôt qu'une solution idéale. Les observations qui suivent aident à expliquer certaines des exemptions particulières.
Outils de travail. Il y a eu désaccord parmi les membres du groupe d'étude sur la question de savoir si les véhicules doivent être inclus sous la rubrique outils de travail, du fait que cela pourrait permettre à des débiteurs de soustraire à la saisie un véhicule en tant qu'outil de travail et un véhicule pour leur usage personnel. Une faible majorité des membres du groupe d'étude étaient d'avis que les véhicules ne doivent pas faire partie de la liste des exemptions en tant qu'outils de travail et c'est cette approche qui a été retenue par le groupe de travail.
Résidence du débiteur. Vu l'ambiguïté du terme et la terminologie variable selon la province, le groupe de travail a jugé souhaitable de préciser le sens de « résidence ». La définition adoptée indique clairement qu'il faut donner au terme résidence le sens le plus large, dans la mesure où la structure dont il est question constitue une forme reconnue d'abri pour un individu.
Exemptions visant les biens des débiteurs travaillant dans le secteur des ressources naturelles. Les provinces des Prairies et, dans une moindre mesure, certaines autres provinces se sont montrées pendant longtemps extrêmement partiales à l'égard des débiteurs tirant leur gagne-pain d'une activité en rapport avec l'agriculture. La description élargie des activités visées dans la présente recommandation se fonde sur l'idée que de nombreux Canadiens gagnent leur vie dans le cadre d'activités d'exploitation des ressources naturelles autres que l'agriculture. En optant pour une description et un niveau d'exemption étendus, on fait en sorte que les biens d'une exploitation agricole et les biens utilisés dans d'autres domaines de l'exploitation des ressources naturelles se retrouvent au moins dans une position aussi favorable que celle accordée aux outils de travail. Toutefois, il y a une différence concernant les biens liés à l'exploitation des ressources naturelles. L'exemption sur le bien peut aller jusqu'à 20 000 $ si la législation provinciale pertinente le permet alors que le plafond des exemptions applicables aux outils de travail demeure à 10 000 $.
À la différence de certaines lois provinciales, la description des biens d'une exploitation agricole dans la présente recommandation n'inclut pas la résidence en soi comme élément obligatoire, bien que les débiteurs soient libres d'inclure la résidence s'ils choisissent de le faire. Les débiteurs qui choisissent de ne pas inclure la résidence dans le cadre de cette exemption pourront encore réclamer le montant du bien dans l'exemption visant la résidence.
Produit de la vente de biens insaisissables ou exemptés. Les débiteurs vendront parfois le bien insaisissable ou l'hypothéqueront avant d'être libérés de la faillite. Lorsque cette situation se produit, il y a lieu de déterminer si le produit doit demeurer la propriété du débiteur ou s'il doit être dévolu à la masse. La question a donné naissance à bien des litiges dans les provinces des Prairies en rapport avec l'interprétation de la loi provinciale visant les exemptions. Le groupe de travail a jugé souhaitable de fournir des directives claires en ce qui a trait aux normes fédérales proposées. Le groupe de travail a adopté comme position que le débiteur devrait être en mesure de conserver le produit d'une vente ou d'une hypothèque sur un bien insaisissable selon l'hypothèse voulant que le produit sera normalement utilisé par le débiteur pour faire l'acquisition d'autres biens insaisissables ou pour satisfaire d'autres besoins essentiels.
Exceptions aux exemptions. La législation provinciale manque de rigueur dans la description de la portée de ces exceptions. Là encore, par conséquent, le groupe d'étude a jugé souhaitable de fournir certains éclaircissements. Il a discuté pour déterminer si même un conjoint défaillant devrait avoir droit à un niveau minimum d'exemptions face aux réclamations de l'autre conjoint mais, en raison du manque de temps, n'est pas parvenu à une conclusion ferme. La question mérite une analyse plus approfondie.
Renonciation aux exemptions. La législation provinciale actuelle n'est pas claire sur la question de savoir si un débiteur peut renoncer à l'avantage des exemptions prévues par la Loi. La recommandation du groupe de travail suit la formulation du Code de la faillite des États-Unis, §522(e). La formulation de la non-renonciation envisagée porte à croire qu'une renonciation à l'exemption concernant un bien garanti sera valable. Le groupe d'étude a par conséquent ajouté une mise en garde pour préciser que la distinction entre créanciers garantis et non garantis ne validera pas un privilège sur les biens du ménage et les véhicules insaisissables expressément annulé en vertu de la recommandation du groupe de travail concernant les sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition.
Exemption à la carte. La liste d'exemptions ci-dessus ne prévoit pas que le débiteur sera en mesure de faire des choix entre les différentes catégories d'exemptions. Par exemple, il ne pourra échanger l'exemption plus importante visant un véhicule contre une exemption plus petite visant les meubles. Les exemptions à la carte sont apparemment assez courantes dans la législation américaine visant les biens insaisissables, et ont acquis la faveur des spécialistes américains de la faillite parce qu'elles permettent de mieux jouer sur les variantes régionales et même locales et répondent aux besoins particuliers des débiteurs. Néanmoins, au sein du groupe de travail, on n'a pas eu un appui suffisant pour retenir le principe de l'exemption à la carte et la question n'a pas fait l'objet de discussions plus poussées. Il peut toutefois être pertinent de rouvrir le débat ultérieurement.
Il arrive fréquemment que les sociétés de crédit à la consommation accordent des prêts en acceptant une sûreté sur les biens du ménage de l'emprunteur ou sur les véhicules, même si a) le prêt n'est pas lié à l'achat de ces articles et b) les articles sont à l'abri de la saisie des créanciers judiciaires du débiteur24. Une telle sûreté, ou privilège, est appelée une sûreté autre que les sûretés en garantie du prix d'acquisition accordée sur les biens personnels insaisissables. Cette pratique est contestable et a été fort critiquée, tant au Canada qu'aux États-Unis. Ce genre de sûreté permet aux prêteurs de menacer de prendre possession de biens du ménage ou de véhicules automobiles dans l'espoir d'obtenir un meilleur traitement que les autres créanciers du débiteur. C'est-à-dire que les débiteurs peuvent être intimidés et donner ainsi la préférence au détenteur du privilège. Même si les articles n'ont aucune valeur commerciale, ils peuvent être essentiels au bien-être du débiteur et de sa famille.
En vertu des lois en vigueur dans nombre des provinces et territoires, les prêteurs peuvent accepter les sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition, même si les biens en question sont insaisissables en cas de faillite ou de présentation d'une proposition de consommateur de la part des débiteurs. Les syndics membres du groupe de travail ont déclaré que l'existence de sûretés de ce genre met fréquemment les syndics dans une position difficile étant donné qu'eux-mêmes peuvent se sentir contraints de rembourser les sociétés de prêt avant les autres créanciers de façon à ne pas priver les débiteurs de biens essentiels au ménage ou de l'utilisation d'un véhicule.
Il y aurait lieu de modifier la LFI de façon à annuler les sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition de biens personnels qui seraient autrement à l'abri de la saisie25.
L'annulation des sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition sur un véhicule est mise en évidence dans la recommandation, étant donné que les syndics membres du groupe de travail ont indiqué que, en pratique, la plupart des problèmes concernant ce genre de sûretés surviennent lorsque la sûreté est détenue sur un véhicule automobile.
Il existe bien des précédents à l'appui des recommandations. Les sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition sont annulées en vertu de l'article 522 du Code de la faillite des États-Unis et des lois sur les sûretés relatives aux biens personnels en vigueur dans les provinces de l'Atlantique26. En 1998, le comité sur la législation relative aux sûretés sur les biens personnels de l'Association du Barreau canadien Ontario a recommandé une modification similaire à la Loi sur les sûretés mobilières de l'Ontario, mais la recommandation n'a pas encore été mise en uvre. Il semble vraisemblable, par conséquent, qu'on n'obtiendra pas l'uniformité d'une province à l'autre concernant le traitement de cet aspect important de la législation sur les biens exemptés, dans un avenir prévisible. Ce manque d'uniformité justifie la mise en place d'une disposition fédérale pour assurer que tous les faillis et les personnes présentant une proposition de consommateur bénéficient d'un niveau de protection uniforme.
Le principe fondamental du système d'administration de l'insolvabilité du Canada, défini au paragraphe 178(2) de la LFI, est que les faillis ont droit à un nouveau départ une fois libérés de la faillite. À cette fin, le paragraphe 178(2) libère les faillis de toutes leurs dettes, à l'exception de celles indiquées au paragraphe 178(1).
On parle de réaffirmation lorsque le failli réactive ou réaffirme une obligation personnelle relativement à des passifs qui ont été effacés au moment de sa libération. Par conséquent, la réaffirmation n'est pas conforme au principe du nouveau départ. On distingue deux types de réaffirmation : la réaffirmation par la conduite et la réaffirmation par une entente expresse.
On parle de réaffirmation par la conduite lorsque le failli continue à effectuer des versements aux créanciers alors qu'il a été libéré des dettes en question. Dans une jurisprudence qui commence par la décision Moen en 1986, les tribunaux ont interprété cette conduite comme une réaffirmation ou un rétablissement de l'engagement du failli à effectuer les paiements27.
Si l'on veut que la loi soit conforme au principe du nouveau départ, les faillis devraient être libérés de ces promesses également intitulées « des engagements personnels » ou « engagements de payer » lorsqu'ils sont libérés de la faillite. Dans la jurisprudence Moen, les tribunaux canadiens ont plutôt statué que les faillis libérés doivent s'en tenir à leur engagement de payer établi avant la faillite, une fois qu'ils ont continué à effectuer des paiements après leur libération. Lorsque les faillis ont cessé par la suite d'effectuer les paiements, les tribunaux ont donné raison à la partie adverse. Le groupe de travail considère plutôt que les faillis n'avaient pas l'intention, règle générale, de réaffirmer leur promesse d'avant la faillite; ce qui est probable, c'est qu'ils ont continué d'effectuer les paiements de façon à conserver la possession des biens loués ou hypothéqués sans comprendre qu'ils réaffirmaient ainsi leur engagement de payer.
On parle de la réaffirmation par une entente expresse lorsque le failli conclut une entente avec ses créanciers en vertu de laquelle il s'engage à rembourser des dettes, même s'il en a été libéré par la faillite. Aux États-Unis, les ententes de réaffirmation sont réglementées par le Code de la faillite et sont assez courantes. On ne dispose pas de statistiques au Canada, mais nombre de données probantes nous indiquent que des créanciers essaient de convaincre des faillis libérés de signer des ententes de réaffirmation.
Le groupe de travail recommande que la LFI traite des réaffirmations. De façon générale, il est recommandé :
La raison d'être de chacune de ces recommandations et les détails précis concernant les deux dernières recommandations sont présentés ci-après.
Pourquoi ne doit-on pas permettre la réaffirmation par la conduite? Selon le point de vue du groupe de travail, la jurisprudence Moen nie le principe du nouveau départ et contrevient à l'esprit de l'article 178 de la LFI. Bien qu'on puisse autoriser des réaffirmations dans certains cas, le cas des faillis qui continuent à effectuer des paiements ne devrait pas être inclus. Le groupe de travail est convaincu que les faillis devraient prendre une décision consciente et éclairée avant de s'engager personnellement à rembourser des dettes dont ils ont été libérés par la faillite.
Pourquoi ne doit-on pas permettre la réaffirmation d'une dette non garantie? Le GTIP recommande que les ententes de réaffirmation visant des transactions non garanties soient interdites pour trois raisons. Premièrement, ils nient le principe du nouveau départ. Deuxièmement, ils ont pour effet de privilégier un créancier par rapport aux autres et de telles préférences sont généralement découragées par la LFI. Troisièmement, la discussion entre le failli et les créanciers concernant ce genre de réaffirmation risque de survenir à un moment où le failli est encore vulnérable et fait l'objet de pressions. Par exemple, un créancier peut offrir au failli libéré la possibilité de continuer de faire usage d'une carte de crédit en contrepartie de la signature d'un accord de réaffirmation visant des dettes contractées par carte de crédit avant la faillite. Le failli libéré peut éprouver des difficultés à obtenir du crédit et accepter inconsidérément de rembourser des dettes dont il a été libéré à sa libération.
Bien que le groupe de travail soit parvenu à la conclusion que les ententes de réaffirmation visant les transactions non garanties ne devraient pas être autorisées, quelles que soient les circonstances, il est conscient qu'il y aura des situations où les faillis libérés pourront en toute légitimité vouloir rembourser certaines dettes. Par exemple, un failli peut être désireux de rembourser un emprunt fait à un membre de sa famille, même si cette dette a été légalement effacée. Ce remboursement sera autorisé en vertu des conditions, analysées ci-après, inhérentes à la recommandation relative aux dispositions visant les infractions à la LFI.
Doit-on autoriser les ententes de réaffirmation visant une dette garantie? Le groupe de travail recommande que les ententes de réaffirmation soient autorisées en ce qui a trait aux transactions garanties, sous réserve de plusieurs conditions. La raison qui sous-tend cette recommandation est qu'elle permettra aux faillis de conserver des biens visés par un contrat de garantie et d'éviter, par conséquent, des perturbations dans leur vie. Les créanciers garantis seront dans la même situation que s'ils avaient exécuté la garantie et réalisé l'actif. Les ententes de réaffirmation concernant les transactions garanties devraient être assorties des conditions suivantes :
Quelles dispositions relatives aux infractions doit-on mettre en place? Le groupe de travail recommande qu'on considère comme une infraction à la LFI le fait qu'un créancier ayant connaissance de la libération d'un failli accepte un paiement pour un passif dont le failli a été libéré par la faillite31. L'acceptation de tels paiements devrait être une infraction, à moins :
Le groupe de travail considère que si la réception de ces paiements n'est pas considérée comme une infraction, l'unique recours du débiteur sera de demander que les paiements soient remboursés par le créancier. Mais la perspective de devoir rembourser les paiements n'est qu'un facteur de dissuasion fort mince pour des créanciers qui n'auraient pas grand-chose à perdre en essayant d'inciter le failli à effectuer des paiements non permis. On possède un dossier assez convaincant des abus de créanciers, aux États-Unis, en ce qui a trait aux ententes de réaffirmation irrégulières.
La première exception autorise simplement les paiements en vertu d'ententes de réaffirmation qui satisfont aux critères établis par le groupe de travail dans la présente recommandation.
La seconde exception permet aux créanciers garantis, comme ceux qui détiennent une hypothèque sur la résidence du débiteur, d'accepter des paiements sans exiger d'ententes de réaffirmation32. L'exception permettra aux faillis libérés de conserver des biens garantis comme leur maison ou leur voiture en continuant simplement d'effectuer leurs remboursements et elle permettra aux créanciers garantis de recevoir ces paiements sans commettre une infraction.
La troisième exception reconnaît qu'un failli libéré peut être dans l'obligation morale de rembourser des membres de sa famille, malgré l'absence d'obligation légale. Le groupe de travail pense que cela ne devrait pas être découragé. Ces paiements peuvent par conséquent être faits sans entente de réaffirmation et reçus sans qu'il y ait infraction.
La dernière exception est un mécanisme de sauvegarde intégré pour permettre au séquestre officiel d'approuver des paiements qui sont dans l'intérêt supérieur du failli et ne lui créent pas de difficulté indue33. Le groupe de travail a conclu qu'il était préférable d'avoir ce mécanisme de sauvegarde, qui permet au séquestre officiel d'approuver des paiements particuliers, plutôt que des ententes de réaffirmation particulières qui pourraient inclure des conditions autres que celles spécifiquement précisées dans la LFI. De cette manière, un failli libéré pourra faire un versement approuvé par le séquestre officiel, mais sans avoir l'obligation légale qui pourrait être créée par un accord de réaffirmation. Grâce à cette exception, le groupe de travail évite la possibilité que des créanciers ne fassent pression sur des faillis libérés afin qu'ils demandent l'approbation d'ententes de réaffirmation, étant donné que le séquestre officiel ne peut l'autoriser. Parallèlement, l'exception offre la latitude voulue pour autoriser le remboursement d'une dette connue dans des circonstances inhabituelles.
La nouvelle tendance en matière économique et politique, associée au libre-échange et à la mobilité accrue de la main-d'uvre, fait en sorte que de nombreux Canadiens travaillent et vivent à l'étranger, principalement aux États-Unis. En cas d'insolvabilité, ces personnes ont recours au Code de la faillite des États-Unis pour obtenir un répit de leurs créanciers. En pareil cas, elles font face à deux difficultés relativement à leurs créanciers canadiens. D'abord, ces personnes peuvent ne pas avoir le droit de se prévaloir de la loi sur la faillite du Canada étant donné qu'elles ne respectent pas les exigences qui sont stipulées dans la LFI pour demander la protection de la faillite au Canada. Deuxièmement, si elles font faillite aux États-Unis seulement, elles peuvent ne pas être libérées de leurs dettes au Canada sans avoir déclaré faillite au Canada. Cette situation est attribuable à la jurisprudence prévoyant que, au Canada, seule une déclaration de faillite en vertu de la loi canadienne permet la libération d'une dette ou l'annulation d'un contrat régis par le droit canadien.
Dans l'un ou l'autre de ces cas, les Canadiens qui résident et travaillent aux États-Unis, mais qui ont contracté des dettes au Canada avant de quitter le pays, sont lésés. Ces débiteurs ne peuvent déclarer faillite (ou faire une proposition au Canada), mais le dépôt d'une demande de faillite aux États-Unis n'entraîne pas l'extinction de leurs dettes au Canada. Lorsqu'ils reviennent au Canada, leurs dettes auront survécu et ils ne pourront les éteindre qu'en déposant une cession de biens au Canada. Les débiteurs perdront leurs biens deux fois et subiront à deux reprises le processus de réhabilitation. Une bonne politique en matière de faillite devrait s'efforcer d'éviter ce résultat, sans porter atteinte par ailleurs aux objectifs de la politique de la LFI.
Les règles actuelles de la LFI et la jurisprudence qui les interprète n'offrent pas de solution satisfaisante à ces problèmes. Après avoir fait la démonstration du caractère inadéquat de la situation actuelle, nous décrirons dans la présente section deux solutions envisagées par le groupe de travail. Celui-ci a rejeté l'une de ces solutions, qu'il a jugé inapplicable, mais il recommande l'adoption de l'autre solution.
Le groupe de travail s'est demandé s'il réglerait le premier problème en élargissant les exigences territoriales de la LFI de façon à permettre aux non-résidents d'avoir accès aux recours prévus par la loi. L'article 2 de la LFI définit la « localité » d'un débiteur comme étant, selon le cas, le lieu principal où le débiteur a exercé ses activités au cours de l'année précédant sa faillite, où le débiteur a résidé au cours de l'année précédant sa faillite, où se trouvent la plus grande partie des biens de ce débiteur. Il y a eu des décisions contradictoires au niveau du registraire quant à la question de savoir si les non-résidents peuvent se prévaloir de la LFI pour déclarer faillite au Canada. Le registraire Ferron a déclaré dans l'affaire Re, Granatstein, que les non-résidents continuent de mener des activités au Canada dans la mesure où ils conservent des dettes impayées en territoire canadien34. Mais dans l'affaire plus récente, Re, Purnell le registraire Waller a affirmé que cela ne s'applique pas aux dettes de consommation comme un prêt étudiant. Si tel est le cas, les non-résidents ayant seulement des dettes de consommation canadiennes, ou n'ayant pas la plus grande partie de leurs biens en territoire canadien n'ont pas qualité pour se prévaloir de la LFI35.
Ces ambiguïtés pourraient être surmontées si les dispositions de la LFI applicables à la cession étaient modifiées de façon à stipuler que les citoyens canadiens qui ne sont pas résidents au pays peuvent déposer une cession ou une proposition s'ils ont des dettes ou des obligations régies par la loi canadienne et s'ils ont un lien réel et important avec le Canada. La « localité d'un débiteur » pourrait être définie comme le lieu où le débiteur a résidé en dernier pendant une période de plus de six mois, ou comme étant le dernier lieu où le débiteur a eu son domicile permanent au Canada, ou comme le lieu où se trouvent la plus grande partie des créanciers canadiens du débiteur. Mais le groupe de travail est parvenu à la conclusion qu'une telle modification ne résoudrait pas vraiment le problème. Accorder à des Canadiens résidant à l'étranger le droit de déclarer faillite au Canada, de façon à éteindre les dettes canadiennes, est un recours qui serait rarement exercé en même temps que la déclaration d'une faillite aux États-Unis ou dans un autre pays. Les Canadiens résidant à l'étranger n'auraient pas facilement accès à l'information sur les faillites au Canada et, par conséquent, n'auraient connaissance de cette disposition qu'à leur retour au Canada, lorsque cette dernière serait devenue nécessairement inutile.
Le second problème, que s'efforce de résoudre la recommandation du groupe de travail, a trait à la reconnaissance d'une libération des dettes prononcée à l'étranger. Sur cette question, la Partie XIII de la LFI, qui porte sur l'insolvabilité en contexte international, n'est pas d'une grande aide étant donné que malheureusement pour le sujet, elle est essentiellement axée sur les actifs. La définition d'un « débiteur » est limitée aux personnes ayant des biens au Canada. Ces dispositions pourraient être interprétées d'une manière qui reconnaîtrait l'effet sur des dettes canadiennes d'une libération prononcée à l'étranger, mais ce n'est pas du tout certain.
En vertu des règles juridiques qui s'appliquent aux faillites à l'étranger, une libération de faillite étrangère n'a pas pour effet d'éteindre des dettes au Canada, lesquelles sont régies par le droit canadien. Nos tribunaux donnent effet à une libération étrangère uniquement en rapport avec des dettes qui sont régies par le même droit que celui de la faillite étrangère36. Dans le cas d'un prêt, cela signifie habituellement le pays où le prêt a été conclu. Un prêt conclu et fait au Canada ne sera pas éteint au Canada par la libération d'une faillite dans un autre pays. La même règle vaut pour la reconnaissance des ordonnances de réorganisation rendues à l'étranger qui sont censées modifier ou changer des dettes ou des contrats : elles ne sont reconnues au Canada que si le droit étranger en vertu duquel l'ordonnance a été rendue correspond au droit régissant la dette ou le contrat37. Certains exemples anciens de cette règle générale sont analysés dans la note ci-dessous38. L'exemple le plus récent de la règle de libération étrangère découle d'une cause en Ontario où le tribunal a statué qu'une libération étrangère n'éteint pas une dette en territoire canadien, ce que peut seulement faire une libération en vertu du droit régissant le contrat39.
On peut faire valoir que sous l'autorité de la Cour suprême du Canada contemporaine, les tribunaux canadiens pourraient reconnaître la validité d'une libération de faillite étrangère sur des dettes canadiennes, dans la mesure où le failli avait un « lien réel et important » avec le pays où il a déclaré faillite. Ce critère s'applique aux jugements étrangers, de façon générale40; mais les ordonnances de faillite sont un type particulier d'ordonnance qui porte sur le statut et tient compte d'une diversité de questions d'intérêt public. On ne sait pas vraiment si le critère du « lien réel et important » s'applique41. Selon un arrêt récent de la Cour suprême du Canada, les intérêts de la courtoisie internationale n'entrent en ligne de compte que jusqu'à un certain point lorsqu'il s'agit de déterminer si une ordonnance de faillite étrangère sera reconnue au Canada. Parmi les autres facteurs cités par le tribunal, mentionnons l'avantage juridique, la préséance de l'ordonnance sur l'équité, dans la courtoisie internationale, et enfin les intérêts des plaideurs et autres parties concernées au Canada42. Même si l'on considère que le critère du lien réel et important s'applique, la législation sera encore nécessaire pour préciser à quel moment et selon quels principes discrétionnaires cette reconnaissance sera accordée. Autrement, cela reviendrait à laisser aux juges un nouveau champ discrétionnaire, sans précédent national ou international pour les guider, étant donné qu'il n'existe sur la question aucune jurisprudence de common law. Ce n'est pas une façon pertinente d'apporter de la certitude en matière juridique. Il en résulterait des ajouts hétéroclites et contradictoires à la Loi, échelonnés sur plusieurs années, qui seraient coûteux et que les faillis ne pourraient supporter sans difficulté.
Le groupe de travail est parvenu à la conclusion que, dans le cas des débiteurs qui sont des personnes physiques, la LFI devrait reconnaître la libération ou parvenir à un compromis concernant les dettes non garanties, en cas de procédure de faillite à l'étranger. La règle de reconnaissance devrait être assortie de garanties contre l'abus et contre la violation de principes d'intérêt public fondamentaux. Elle ne devrait s'appliquer qu'aux endroits où les procédures de faillite étrangères ne sont pas inéquitables. Elle devrait respecter les dérogations au principe de la libération fondée sur la politique et stipulées à l'article 178 de la LFI. Enfin, le groupe de travail mentionne que certaines autorités législatives, y compris plusieurs États américains, ont adopté des politiques en matière de biens insaisissables qui peuvent être inacceptables pour les Canadiens. Le groupe de travail ne désire pas qu'on reconnaisse, par exemple, une libération étrangère accordée à des citoyens canadiens lorsque les lois locales du pays étranger permettent au débiteur de conserver un domaine évalué à un million de dollars.
Compte tenu de l'intégration accrue des marchés du travail canadien et américain, la nouvelle règle proposée doit résoudre les problèmes auxquels se heurtent des Canadiens non résidents cherchant à obtenir la protection de la faillite. Malheureusement, aucune des initiatives actuelles en matière d'insolvabilité transnationale ne semble régler cette question du point de vue du consommateur ou de la personne physique endettée43. Il n'est guère vraisemblable que cette proposition aura des répercussions sur les intérêts des prêteurs garantis étant donné que sa portée se limite à la dette non garantie de débiteurs qui sont des personnes physiques et qu'il est peu probable que l'on porte atteinte à des intérêts commerciaux de façon assez importante en accordant cette latitude aux tribunaux canadiens.
Le groupe de travail recommande que l'on modifie la Partie XIII de la LFI pour ajouter une disposition portant sur les personnes physiques. Il convient de donner aux personnes physiques, et non à leur syndic, la possibilité d'entamer une procédure pour la reconnaissance d'une libération ou l'obtention d'un compromis visant une dette non garantie, en vertu d'une procédure de faillite étrangère. Pourvu que la libération ou le compromis visant la dette non garantie touchée par une procédure de faillite à l'étranger puissent être reconnus, de façon générale ou en relation avec un créancier en particulier, et selon des conditions ou modalités que le tribunal peut imposer si :
La modification devrait clairement stipuler qu'aucune réclamation visant des dettes dont le failli ne peut se libérer en vertu de l'article 178 de la LFI ne sera éteinte par la libération étrangère.
13 Un autre problème découle de l'hypothèse, sans preuve, qu'en interdisant la libération, on réduira les pertes au titre des prêts; mais les anciens étudiants peuvent néanmoins être incapables de rembourser leur dette (dont ils ne sont pas libérés).
14 On entend par REER immobilisé un REER qui n'est pas accessible à son détenteur avant la retraite.
15 Une étude du BSF portant sur 900 faillites déclarées en 1998 et ayant donné lieu à une administration sommaire porte à croire que moins de 100 faillites comportaient des actifs sous forme soit d'assurance-vie ou de REER.
16 Ramgotra (syndic de) c. Nord-Américaine cie d'assurance-vie, [1996] R.C.S. 325, 37 C.B.R. (3e) 141, 132 D.L.R. (4e) 193, également cité sous Banque Royale du Canada c. Nord-Américaine cie d'assurance-vie (C.S.C.) La législation provinciale sur le transport frauduleux régit les transactions visant à frauder les créanciers.
17 Nelson (Trustee of) c. Nelson (1995), 33 C.B.R. (3e) 292 (Sask. Q.B.). Dans cette affaire, le failli a conservé des REER insaisissables d'une valeur de 250 000 $.
18 Voir, par exemple, Bouvier, Re, [1998] A.J. no 1588 (Alta. Q.B.), qui affirme que les actifs insaisissables ne devraient être pris en compte que lorsqu'ils sont susceptibles d'être liquidés.
19 Par exemple, voir la Loi sur les régimes de retraite de l'Ontario, par. 67(5)-(7).
20 Le plafond s'applique après déduction du montant de récupération. Autrement dit, si le REER dépasse le plafond après que le syndic a calculé le montant de récupération, c'est le syndic qui recouvrera le surplus.
21 Par exemple, la commission Colter de 1986 recommandait un plafond de 50 000 $ sur le montant de REER insaisissable en cas de faillite.
22 Il ressort d'une consultation auprès d'une compagnie d'assurance que le montant maximum pour un homme âgé de 65 ans, au taux d'intérêt actuel, équivaudrait à une rente annuelle imposable de 49 180,32 $, si le paiement en est garanti pendant 25 ans jusqu'à l'âge de 90 ans, ou de 59 555,64 $ si le paiement en est garanti à vie. À l'âge de 55 ans, le montant maximum serait égal à une rente annuelle imposable garantie à vie de 37 710,48 $ pour un homme et de 35 510,28 $ pour une femme.
23 Le traitement des REER en cas de faillite du détenteur est présenté ci-dessus dans le présent chapitre.
24 En gros, un prêteur acquiert une sûreté, également appelée privilège, lorsque le débiteur lui accorde le droit de prendre possession du bien et de le vendre s'il ne fait pas les remboursements sur le prêt conformément à l'entente contractuelle. On appelle créancier judiciaire un créancier considéré par un tribunal comme ayant des droits sur certaines ressources d'un débiteur.
25 L'utilisation du terme « annuler » dans ce contexte signifie, en gros, désavouer et frapper de nullité le privilège. La disposition qui annule la sûreté est appelée « annulation ». En vertu de cette recommandation, si un débiteur déclare faillite, après avoir accordé au préalable une sûreté à un prêteur sur un bien qui est insaisissable en vertu des dispositions de la LFI, ce dernier ne pourra prendre possession du bien.
26 L'Alberta avait une disposition similaire, mais elle a été omise dans la révision de la loi albertaine sur les exemptions au début des années 1990, apparemment à la demande du secteur des prêts à la consommation. La province de Québec ne permet pas l'établissement de sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition de biens du ménage ou de véhicules automobiles utilisés pour les besoins du consommateur.
27 La jurisprudence commence par Seaboard Acceptance Corporation c. Moen (1986), 62 C.B.R. (N.S.) 143 (B.C.C.A.) et s'est poursuivie par des décisions comme Manulife Bank of Canada c. Planting (1996), 43 C.B.R. (3e) 305 (Ont. Ct. (Gen. Div.)), CIBC Mortgage Corp c. Stenerson (1998), 4 C.B.R. (4e) 226 (Alta. Q.B.) et CIBC Mortgage Corp. c. Coleski, (1999), 13 C.B.R. (4e) 17 (N.S.S.C.).
28 On autorise un montant supérieur à la valeur courante de l'actif pour prendre en compte des choses comme les frais de vente, les frais de justice et les difficultés que subirait le failli si l'actif était saisi par les créanciers garantis.
29 Avant que le failli qui est une personne physique puisse obtenir sa libération, le syndic qui administre l'actif doit préparer et déposer un rapport concernant la demande de libération du failli. Ce rapport, intitulé Rapport en vertu de l'article 170, est déposé auprès du surintendant et remis à tout créancier qui en a au préalable fait la demande. Le rapport renferme l'évaluation faite par le syndic des causes de la faillite, et rend compte de la façon dont le failli s'est acquitté de ses obligations en vertu de la LFI, de toute condamnation pour infraction, et de tout autre problème de conduite ou autre fait qui pourraient donner lieu au refus d'une libération sans condition.
30 Le séquestre officiel peut choisir de saisir le tribunal pour qu'il statue sur la question.
31 Un membre du groupe de travail s'oppose vigoureusement à la partie d) de la recommandation et a écrit le commentaire suivant:
Je m'oppose catégoriquement à la recommandation d), soit la criminalisation des paiements effectués volontairement après la faillite par un débiteur libéré. On a toujours considéré comme moral de rembourser ses dettes, même si l'obligation légale de le faire était éteinte par la faillite. Recommander ce changement revient à pénaliser une conduite considérée depuis toujours comme hautement morale. Et cette décision a été prise sans aucun fondement statistique, alors que rien ne révèle l'existence d'un problème au Canada. Ce sont tous les créanciers qui sont ciblés, bien que les abus présumés et anticipés ne soient apparemment imputables qu'à un seul type de créancier, soit ceux du secteur de la finance et du crédit. En nous concentrant sur l'industrie du crédit, nous laissons de côté toute une foule de situations, en dehors de ce cadre, où il pourrait être dans l'intérêt du débiteur de faire un paiement volontaire pour obtenir des services par la suite (par exemple, le dentiste, l'épicier, la compagnie de téléphone afin de pouvoir continuer d'utiliser le même numéro de téléphone, un professionnel pour préserver une relation professionnelle jugée souhaitable, un ami pour préserver une relation sociale privilégiée). Et il y a quantité d'autres exemples. Nous criminalisons la conduite du failli dans tous ces cas de conduite. La conduite volontaire et consensuelle d'une personne après sa faillite sera maintenant du ressort de « big brother », représenté en l'occurrence par le bureau du séquestre officiel ou le tribunal. Nous jetons le discrédit sur la LFI en nous écartant de la morale telle qu'on la comprend généralement, puisque nous criminalisons une conduite volontaire et éthique entre adultes consentants. En contraignant les créanciers à refuser, sous peine de poursuites pénales, l'argent qui leur est volontairement offert par un failli libéré, nous imposons une norme non réaliste aux Canadiens. Nous n'avons pas exploré les autres solutions moins contraignantes (par exemple, l'interdiction des démarches des créanciers, après la faillite, afin de demander le remboursement d'une dette dont le failli est libéré, comme aux États-Unis; ou l'introduction de mécanismes d'éducation ou de conseils à l'intention des débiteurs concernant la réaffirmation). Étant donné que ce changement est si étonnant et si fondamental, on se serait attendu à des études, ou du moins à d'importants renseignements anecdotiques. En fait, les renseignements anecdotiques portent à croire que l'on pourrait en réalité prévenir les abus en retenant d'autres propositions mises de l'avant par le groupe de travail, comme l'annulation de sûretés autres que les sûretés en garantie du prix d'acquisition de biens personnels insaisissables, l'élimination des réaffirmations implicites, l'élimination de clauses de « plein droit » qui, en cas de faillite, déclenchent un manquement implicite automatique dans les contrats de garantie des consommateurs. Contrairement à la proposition visant la réaffirmation, ces propositions présentées ailleurs dans notre rapport ne nous contraignent pas à aller à l'encontre des fondements éthiques de notre droit, ni à restreindre l'autonomie individuelle des Canadiens. Elles sont à la fois préférables et suffisantes, si elles sont fondées sur des faits et une bonne politique. Si, comme certains l'affirment, la recommandation d) s'impose pour mettre en uvre en bonne et due forme les autres éléments de notre recommandation visant la réaffirmation, dans ce cas, compte tenu des commentaires présentés ci-dessus, il n'y a pas suffisamment d'avantages, de données convaincantes ou de justifications pour que la recommandation en tant que telle justifie la réglementation des réaffirmations volontaires.
32 Le failli sera en mesure de conserver le bien, mais il n'aura pas d'obligation en vertu d'un engagement personnel connexe dont il aura été relevé au moment de la libération.
33 Le séquestre officiel peut choisir de saisir la cour pour qu'elle rende une décision, comme il est habilité à le faire lorsqu'on lui demande d'approuver une entente de réaffirmation de dettes garanties qui s'écarte de celles autorisées ci-dessus. Voir le paragraphe 10 de l'analyse sur les ententes de réaffirmation visant des actifs garantis.
34 (1997), 49 C.B.R. (3e) 103 (Ont. Ct.(Masters Chambers)).
35 (1998), 5 C.B.R. (4e) 277 (Alta. Q.B.).
36 International Harvester Company of Canada, Limited c. Zarbok, [1918] 3 W.W.R. 38 (B.R. Sask.); New Zealand Loan & Mercantile Agency Co. c. Morrison, [1898] A.C. 349, 359; Cheshire et North, Private International Law, 11e édit., 1987, London, Butterworths, p. 920 à 922; E. Sykes et M. Pryles, Australian Private International Law, 2e éd., 1987, The Law Book Company Ltd., p. 740.
37 Bank of Travancore, Ltd. c. Dhrit Ram (1941), 69 L.R. 1 (C.J.C.P., en appel de l'Inde). Mentionnons une exception importante à cette règle : si le créancier canadien a participé à la procédure de faillite étrangère (qu'il a « reconnue »), peut-être en présentant une preuve de réclamation, ce créancier sera tenu de mettre à exécution, au Canada, la libération de la faillite accordée à l'étranger.
38 Marine Trust Company c. Weinig, [1935] O.W.N. 150, 16 C.B.R. 307 (S.C.) : La faillite américaine du défendeur américain a été considérée comme ne mettant pas fin à l'action du demandeur ontarien contre lui en Ontario, relativement à un billet à ordre, même si ce billet avait été établi à New York, qu'il était payable à cet endroit, où le demandeur avait un bureau, et où le défendeur résidait au moment de la signature, et que le demandeur avait prouvé sa réclamation au moment de la faillite en territoire américain du défendeur. Gibbs & Sons c. La Société Industrielle et Commerciale des Métaux (1890), 25 Q.B.D. 399 (C.A.) : Le tribunal d'appel anglais a statué qu'une compagnie française pouvait être poursuivie en Angleterre relativement à un contrat « conclu et à exécuter en Angleterre », en dépit du fait que les défendeurs avaient fait l'objet d'une liquidation judiciaire en France, le pays où leur entreprise avait été constituée en personne morale. La common law anglaise a reconnu la liquidation française, mais la libération accordée en France n'a pas eu d'effet sur le contrat anglais.
39 Re, Bialek (1994), 18 O.R. (3e) 462, 25 C.B.R. (3e) 271 (Gen. Div.). Voir également l'analyse utile de cette question dans A. Bohémier, « International Bankruptcy »,1990, Revue du Barreau 3, no 50, p. 3.
40 Morguard Investments Ltd. c. De Savoye, [1990] 3 R.C.S. 1077, 76 D.L.R. (4e) 256 (C.S.C.).
41 Voir, par exemple, Andrew Grossman, Conflict of laws in the discharge of debts in bankruptcy, INSOL International Insolvency Review, 1996.
42 Holt Cargo Systems Inc. c. ABC Containerline N.V. (Trustee of) (2001), 207 D.L.R. (4e) 577, 30 C.B.R. (4e) 6 (S.C.C.).
43 La nécessité d'une réforme dans ce domaine a été reconnue dans un récent rapport publié par Insol International. Dans le Consumer Debt Report publié par l'organisme en mai 2001, la quatrième recommandation formulée dit qu'on doit « veiller à ce que les droits relatifs à l'insolvabilité des débiteurs-consommateurs fassent l'objet d'une reconnaissance mutuelle d'un pays à l'autre et privilégier la normalisation et l'uniformité ».
Le présent chapitre fait état des recommandations du groupe de travail qui se rapportent à la structure du système canadien d'insolvabilité. Les recommandations visant la procédure sont présentées aux chapitres 4 et 5. Dans la première partie du chapitre, nous analysons les importants changements proposés à la LFI. Il s'agit notamment de préciser dans la Loi la distinction entre le revenu et les actifs ou biens et de redéfinir les critères applicables à une personne en tant que « débiteur-consommateur ». La seconde partie du chapitre recommande des changements relativement modestes, mais néanmoins importants, à la formulation de diverses dispositions de la LFI. D'autres recommandations mettent à jour la LFI en reconnaissant les pratiques modernes.
Ces recommandations portent sur des situations qui surviennent au début de la procédure d'insolvabilité le choix du syndic, les droits de vote des créanciers ayant un lien de dépendance et la convocation de l'assemblée des créanciers et sur d'autres qui se présentent en rapport avec la libération de certains types de dettes notamment les dettes engagées pour l'achat de biens ou de services de façon frauduleuse et les dettes dont le failli ne peut se libérer et dont la personne insolvable pourrait être libérée par inadvertance dans le cadre de propositions de consommateurs.
Dans la faillite, les ressources financières du failli ne sont pas toutes traitées de la même façon. On trouve à l'article 67 une définition des actifs qui sont accessibles au syndic en vue de leur répartition entre les créanciers44. De façon générale, ces actifs comprennent tous les biens non exemptés du failli, qui ont été acquis jusqu'à la date de la libération du failli. Le syndic a la haute main sur les actifs définis par l'article 67, dont il fait usage pour payer les coûts d'administration et rembourser les créanciers.
Il est toutefois stipulé à l'article 68 que certains des actifs définis par l'article 67 doivent être considérés comme un revenu et traités différemment des autres actifs. Il existe un si grand nombre de types d'actifs qui peuvent être considérés comme un revenu qu'il n'est pas réaliste de préconiser une méthode de classification. En se fondant sur la jurisprudence, cependant, le groupe de travail considère que le revenu présente trois grandes caractéristiques générales : le revenu est le produit d'une activité personnelle rémunérée sur le marché du travail, il est en général destiné à satisfaire les besoins de consommation courants et il est le plus souvent perçu régulièrement. Cette caractérisation du revenu est similaire à la définition retenue par la Loi de l'impôt sur le revenu. Par exemple, les traitements et les salaires sont de toute évidence un revenu. Et il en est de même des dommages-intérêts pour perte de revenu, liés au salaire. Les commissions de vente et les honoraires des gens exerçant une profession libérale sont également un revenu, même s'ils ne sont pas perçus sur une base régulière. En revanche, les gains de loterie et les héritages ne représentent pas un revenu puisqu'ils ne résultent pas d'une activité sur le marché du travail.
Les actifs définis à l'article 67 sont parfois appelés biens du failli; et l'article 68 définit ensuite certains de ces actifs comme un revenu. C'est-à-dire que le revenu du failli constitue une sous-catégorie de ses actifs. Si un actif est visé par l'article 68, le syndic doit se conformer à une série de démarches prescrites pour en prendre possession, en tout ou en partie, en vue d'une distribution aux créanciers. Essentiellement, il s'agit de faire une analyse du revenu du failli en fonction de ses besoins avant de le priver de toute partie de son revenu.
La raison qui préside à l'assimilation au revenu d'une catégorie particulière d'actifs est liée aux objectifs de réhabilitation de la politique en matière de faillite, laquelle stipule que le failli doit être en mesure de conserver un niveau de vie raisonnable, bien qu'il soit en faillite. C'est pourquoi la LFI exige que les syndics examinent « les charges familiales et la situation personnelle » du failli avant de demander le versement d'une partie du revenu, pour le compte des créanciers. Cet aspect exige clairement une analyse des besoins du failli. Dans la plupart des cas, cette analyse se fait aisément par l'application des normes sur le revenu excédentaire établies par le surintendant. Ces normes, définies dans l'Instruction no11R permettent en gros au failli de conserver le plein montant de son revenu jusqu'au seuil de faible revenu (SFR) de Statistique Canada et 50 p. 100 de tout montant dépassant ce seuil. Les montants versés au syndic en vue de leur répartition entre les créanciers sont appelés « paiements à même le revenu excédentaire » et forment une sous-catégorie du revenu.
Les actifs accessibles au syndic, en application de l'article 67, qui ne sont pas définis comme un revenu peuvent être réclamés dans leur intégrité par le syndic, sans qu'il lui soit nécessaire de prendre en compte les charges familiales et la situation personnelle du failli. Ces actifs un compte d'épargne du failli, par exemple sont « impérativement dévolus » au syndic, qui les distribue aux créanciers conformément aux dispositions de la LFI.
Avant 1997, l'article 68 définissait le revenu comme « les fonds que le failli reçoit à titre de traitement, de salaire ou autre rémunération d'une personne qui l'emploie ». Cette formulation a été modifiée en 1997 de façon à ce que le revenu du failli, faisant l'objet d'une analyse en fonction des besoins comme le veut l'article 68, corresponde à « ses revenus de toutes natures ou sources ».
Jusqu'à récemment, selon l'interprétation généralement admise de cette disposition on considérait dans les revenus uniquement les montants à la fois gagnés et perçus au cours de la faillite. Il était entendu que tout revenu gagné avant la date de la cession de faillite et reçu après la date de cession était impérativement dévolu au syndic et ne faisait pas partie du revenu visé par l'analyse des besoins prévue à l'article 68. Cette interprétation a été ébranlée par deux arrêts de la Cour suprême du Canada, selon lesquels c'est la caractérisation d'un actif comme « revenu » plutôt que la date d'acquisition qui détermine si l'actif est visé par l'article 6845. La jurisprudence établie après que la Cour suprême a donné l'exemple a étendu l'applicabilité de l'analyse des besoins, prévue à l'article 68, à des paiements au titre du revenu découlant d'événements survenus après la faillite. Citons à titre d'exemple les dommages-intérêts pour préjudice corporel ayant entraîné la perte de revenu, les accords d'équité salariale et les dommages pour congédiement injustifié46. Dans ces cas, les événements ayant donné lieu à un versement de revenu se sont produits avant le dépôt de la faillite, mais le revenu lui-même n'a été reçu qu'après le dépôt de la faillite ou après la libération du failli. Cette jurisprudence a eu pour effet d'intégrer au revenu visé par l'article 68 des versements forfaitaires non réguliers, liés à un événement survenu avant la faillite, mais reçus après la faillite.
Le groupe de travail a envisagé diverses méthodes pour résoudre les problèmes qui ont été soulevés ou amplifiés par la jurisprudence récente. Bien que le principal objectif de la recommandation soit de préconiser l'adoption d'une définition plus claire du revenu dans la LFI, plusieurs autres questions sont également pertinentes.
De nouvelles normes relatives au revenu excédentaire peuvent être nécessaires. Le revenu doit être réparti entre les faillis et les créanciers afin que les faillis puissent conserver un niveau de vie raisonnable. Si le revenu prend la forme d'une rémunération périodique, les normes du surintendant concernant le revenu excédentaire proposent une méthode simple pour faire la répartition entre le failli et les créanciers. Les interprétations judiciaires récentes de l'article 68, toutefois, exigent que le syndic détermine la façon de répartir les sommes forfaitaires, comme les dommages-intérêts pour perte de revenu, entre le failli et les créanciers. Mais il n'y a pas de normes indiquant au syndic comment répartir ces sommes forfaitaires et il pourrait être nécessaire d'en prévoir.
Application de l'article 68 après la libération du failli. La jurisprudence donne à penser que l'on peut faire valoir l'article 68 après la libération du failli, mais les droits exprès du syndic à le faire ne sont pas clairement précisés.
Ordonnance de protection du revenu. Les tribunaux ont évoqué la possibilité de rendre des ordonnances provisoires pour la protection du revenu, mais là encore rien n'est indiqué à ce sujet à l'article 68.
Le groupe de travail recommande les changements suivants à l'article 68 :
Le débiteur qui désire présenter une proposition de consommateur doit remplir le critère établi à l'article 66.11 de la LFI, qui définit un « débiteur-consommateur » comme étant une « personne physique qui est un failli ou est insolvable et dont la somme des dettes, à l'exclusion de celles qui sont garanties par sa résidence principale, n'excède pas 75 000 $ ou tout autre montant prescrit ». Lorsque cette définition a été rédigée dans le cadre des réformes apportées à la LFI en 1992, on prévoyait que l'administration des propositions des débiteurs-consommateurs serait relativement simple et ne justifierait pas nécessairement la formule plus rigide et coûteuse prévue pour les réorganisations d'entreprises en vertu de la Partie III, Section I de la LFI. La définition indiquée à l'article 66.11 ne comporte aucune restriction concernant la nature des dettes, et le passif peut être lié à une activité commerciale ou à des dettes de consommation.
Selon le groupe de travail, l'actuelle définition de débiteur-consommateur dans la LFI est trop restrictive. Le plafond de 75 000 $ pour le passif aiguille nombre de particuliers qui sont des travailleurs autonomes et des débiteurs à plus haut revenu vers la solution plus coûteuse de la proposition en vertu de la Section I. Le groupe de travail ne pense pas que la procédure plus complexe de la Section I soit justifiée ou nécessaire pour un grand nombre de ces débiteurs. Dans de nombreux cas, les propositions de la Section I présentées par des particuliers ne diffèrent des propositions de consommateur que par l'ampleur des versements périodiques effectués ou de l'ensemble des passifs en cause. Ces différences ne justifient pas l'adoption d'une procédure plus complexe. Les coûts d'administration plus élevés de la Section I réduisent le rendement pour les créanciers. En outre, les personnes qui déposent une proposition en vertu de la Section I s'exposent à des conséquences très différentes, si elles sont incapables d'honorer leurs obligations. L'échec d'une proposition en vertu de la Section I entraîne automatiquement la faillite, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il y a échec d'une proposition de consommateur50.
En réþéchissant à la façon de réviser la définition de débiteur-consommateur dans l'article 66.11 afin d'élargir l'accès aux propositions de consommateur, le groupe de travail savait pertinemment qu'il ne voulait pas de plafond au montant de l'endettement non commercial d'une personne. Selon lui, on ne devrait accorder aucune importance au fait qu'une personne a 2 000 $ ou 20 millions de dollars de dettes non commerciales. En revanche, le groupe de travail considère que si les dettes d'un individu liées à une entreprise sont suffisamment élevées, il y a lieu d'utiliser la procédure de la Section I.
Le groupe de travail recommande l'adoption d'une nouvelle définition de débiteur-consommateur à l'article 66.11 de la LFI. Cette définition sera pertinente pour les débiteurs qui envisagent de déposer une proposition de consommateur. Un débiteur-consommateur devrait être défini comme :
Dans cette définition de débiteur-consommateur, aucun plafond n'est prévu pour le montant d'endettement non commercial et aucune limite ne vise les actifs du débiteur.
Jusqu'à récemment, il était courant de voir des débiteurs et leur syndic conclure des ententes, au moment de la déclaration de faillite, indiquant que le débiteur bientôt en faillite ferait des paiements à l'actif. Ses paiements étaient alors répartis conformément aux dispositions de la LFI. Sauf dans des cas particuliers, la première réclamation, en vertu de ces dispositions, concerne le paiement des honoraires du syndic et des autres frais administratifs. Les paiements stipulés dans l'entente pouvaient se prolonger sur une période allant au-delà de la libération du failli. L'arrêt Berthelette en 1999, toutefois, stipule que de telles ententes ne sont pas tolérables. Ce jugement a limité la latitude visant les ententes de remboursement conclues entre le syndic et le failli, si bien que désormais les syndics n'ont plus la certitude de recevoir une juste compensation pour les services qu'ils assurent.
En réaction à la décision Berthelette, et également à d'autres décisions et jugements qui semblaient susceptibles de réduire la masse accessible à la fois aux créanciers et aux syndics, le groupe de travail s'est penché sur plusieurs options pour donner aux syndics le maximum de chances d'être rémunérés adéquatement.
Au départ, on préconisait un allongement général de la période précédant l'admissibilité du failli à la libération. Les tenants de ce point de vue ont fait observer que non seulement cela fournirait un plus long délai permettant aux faillis de contribuer à l'actif, mais aussi que cela permettrait une réhabilitation plus significative du débiteur. Toutefois, le groupe de travail s'est prononcé à l'unanimité pour le maintien de la période de neuf mois actuellement en place pour l'admissibilité à la libération, dans le cas d'une première faillite. Il y a eu également consensus sur l'idée que le manque de fonds, soit pour les honoraires du syndic ou pour les frais inhérents à l'administration de la faillite, n'était pas en soi un argument suffisant pour qu'on s'oppose à la libération d'un failli.
Le groupe de travail s'est également demandé si une garantie de rétribution pour services serait appropriée et il a conclu que ce qu'il recherchait était plutôt une plus grande probabilité de paiement qu'une garantie de paiement.
À la lumière des considérations ci-dessus, le groupe de travail recommande que la LFI permette au syndic de conclure une entente de paiement volontaire avec les faillis n'ayant pas de revenu excédentaire. Il conviendrait de prévoir un plafond concernant les paiements effectués dans le cadre de ces ententes, en rapport avec la somme des honoraires du syndic et des autres coûts d'administration de la faillite. Si les encaissements de l'actif dépassent le montant propre à une province donnée, un dividende est produit à l'intention des créanciers. Le groupe de travail recommande que le plafond visant le montant qui peut être perçu au titre des ententes volontaires conclues entre le failli et le syndic soit fixé au niveau maximum possible des encaissements de l'actif n'entraînant pas de dividendes pour les créanciers51. En déterminant les paiements après la libération, il y a lieu de prendre en compte tout autre actif réalisé pour fixer le maximum. Par exemple, si le syndic a réalisé 1 000 $, au cours de la faillite, grâce aux biens du failli, le montant maximum qui peut être perçu dans le cadre d'une entente volontaire serait le plafond dont on déduira les 1 000 $. Le failli bénéficierait d'une libération automatique à la fin des neuf mois, à moins qu'il y ait opposition.
Il y aurait lieu de prévoir dans la LFI la période maximale au cours de laquelle les paiements supplémentaires seraient versés. Par exemple, la loi pourrait exiger que les paiements volontaires soient faits pendant une période ne dépassant pas 12 mois après la libération. On exigerait également que ce genre d'entente entre le syndic et le failli ne cause pas de difficultés excessives au failli.
Lorsque le failli choisit de ne pas signer d'entente volontaire, le syndic aurait la possibilité de s'opposer à sa libération et l'ordonnance pertinente serait rendue par le tribunal. Les membres du groupe de travail qui sont des syndics ont fait valoir que la grande majorité des faillis étaient soucieux de rémunérer leur syndic pour les services rendus et que la plupart honoraient les ententes qu'ils avaient signées, même s'ils avaient déjà été libérés. Si le failli libéré ayant conclu une entente volontaire avec un syndic ne fait pas les paiements prescrits, le syndic prendra la décision d'intenter ou non une action en justice en fonction des facteurs pris en compte par tout créancier.
Bien qu'il y ait eu consensus en ce qui a trait à la démarche susmentionnée, un membre du groupe de travail n'a pas appuyé les recommandations. À son avis, les faillis nouvellement libérés qui acceptent de faire des paiements après leur libération ne bénéficient pas d'un nouveau départ.
Depuis 1992, les débiteurs canadiens ont le droit de choisir entre le dépôt d'une proposition de consommateur et la cession de biens. À la suite des modifications apportées à la LFI en 1997, les faillis ayant un « revenu excédentaire » au cours de la faillite sont tenus de verser à l'actif une partie de ce revenu pendant la période où ils sont faillis. Le syndic calcule le montant du revenu excédentaire du débiteur à partir des normes publiées par le surintendant des faillites, en tenant compte des obligations personnelles et familiales du failli. Les normes du surintendant sont fondées sur les mesures du seuil de faible revenu produites annuellement par Statistique Canada52.
Au Canada, environ 15 p. 100 des faillis disposent de ce qui est considéré comme étant un revenu excédentaire et sont tenus d'effectuer des paiements supplémentaires. On observe des exigences comparables mais non identiques dans de nombreux autres pays, notamment l'Australie et l'Angleterre. En outre, le projet de loi proposé pour la réforme de la faillite aux États-Unis prévoit « l'évaluation des moyens » des débiteurs envisageant la faillite. La législation américaine envisagée exigerait qu'il soit tenu compte de l'existence d'un revenu excédentaire dans la décision relative à la procédure le chapitre 7 ou le chapitre 13 que les débiteurs seraient habilités à utiliser pour résoudre leurs difficultés financières. On interdirait aux personnes ayant suffisamment de revenu de déclarer faillite en vertu du chapitre 7 et elles seraient tenues de faire des paiements supplémentaires à l'actif. Mais les propositions américaines concernant l'évaluation des moyens suscitent beaucoup de controverse, et n'ont pas encore été adoptées.
Une autre modification apportée à la LFI en 1998 a donné au syndic le pouvoir de recommander des conditions de libération exigeant le paiement d'un maximum de 12 versements mensuels de la part des faillis disposant d'un revenu excédentaire. Le syndic formule cette recommandation dans le rapport en vertu de l'article 170 fourni lors de la demande de libération en se fondant sur la façon dont le failli s'est acquitté de ses obligations au titre du revenu excédentaire au cours de la faillite, du montant total versé à l'actif comparativement à l'ensemble du passif, et de la question de savoir si le débiteur aurait pu faire une proposition valable au lieu de déclarer faillite53.
Les syndics n'ont pas appliqué cet article de façon uniforme. Dès le début de 2001, on n'imposait des conditions de libération que dans environ 7 p. 100 des dossiers caractérisés par un revenu excédentaire. Le groupe de travail considère que le principal problème relatif à la situation actuelle est son caractère discrétionnaire. La latitude laissée aux syndics permet aux débiteurs « de magasiner » pour trouver un syndic qui n'exigera pas de paiements supplémentaires à l'actif à même le revenu excédentaire après neuf mois. Naturellement, les faillis sont plus enclins à choisir un syndic faisant preuve d'indulgence. Les syndics qui essaient d'accroître les contributions à l'actif, et par conséquent le remboursement des dettes, en établissant des conditions plus rigoureuses, risquent fort de perdre des clients au profit de leurs concurrents.
Le groupe de travail était d'accord, en principe, avec l'idée que les faillis ayant les moyens financiers de contribuer davantage à l'actif doivent le faire, et que des paiements supplémentaires devraient être effectués dans pratiquement tous les cas pendant une période standard de 12 mois. Il y a eu des discussions sur la question de savoir si les faillis disposant d'un revenu excédentaire devaient avoir droit à une libération après neuf mois en dépit de leur obligation d'effectuer d'autres paiements à l'actif ou si cette libération devait être, comme c'est actuellement le cas, conditionnelle au paiement de tout versement supplémentaire recommandé par le syndic. L'accroissement de la période prévue habituellement avant la libération, afin de la faire passer de 9 à 21 mois pour les faillis ayant un revenu excédentaire, aurait pour effet de souligner une différence en ce qui a trait aux obligations imposées aux faillis ayant un revenu relativement élevé. Au sein du groupe de travail, on s'est donc essentiellement demandé s'il était pertinent d'imposer des obligations différentes selon que les faillis disposent ou non d'un revenu excédentaire. Selon l'opinion de la majorité, une telle distinction est appropriée.
Comme le revenu d'un failli peut varier considérablement au cours de la faillite, il importait de préciser la période à laquelle il convient de déterminer le montant des paiements supplémentaires. Une option consistait à fixer le montant au moment de la présentation du rapport en vertu de l'article 170. Une autre option consistait à prescrire que le montant des paiements supplémentaires corresponde au paiement moyen effectué à même le revenu excédentaire au cours de la faillite. Le groupe de travail a décidé de recommander que le montant soit fondé sur le calcul du revenu excédentaire au moment de la présentation du rapport en vertu de l'article 170. Dans le cadre de cette question on jugeait préoccupant le fait que le failli ignorait, au moment où il déclarait faillite, s'il serait tenu ou non d'effectuer des paiements supplémentaires.
Le groupe de travail s'est penché longuement sur la question de savoir si un syndic devait avoir la latitude de modifier soit le nombre de mois supplémentaires ou le montant du paiement exigé. Il y a eu consensus sur une présomption de 12 paiements mensuels supplémentaires et on a considéré qu'il pouvait y avoir des circonstances exceptionnelles où des paiements supplémentaires imposeraient de réelles difficultés aux débiteurs. On a par conséquent recommandé que la décision concernant le nombre de paiements supplémentaires et le montant soit prise conformément à une instruction émanant du surintendant, plutôt que selon les dispositions de la LFI.
Le groupe de travail propose que dans le cas des faillis disposant d'un revenu excédentaire, le syndic recommande le versement à l'actif de paiements à même le revenu excédentaire pendant 12 mois supplémentaires avant la libération. Cette recommandation ne touchera que les faillis ayant un revenu excédentaire, soit environ 15 p. 100 de l'ensemble des faillis, et se traduira, dans la plupart des cas, par une prolongation de la faillite qui durera 21 mois. On pourrait avoir recours à la médiation et, en cas d'échec, au tribunal pour trancher les différends.
Les critères retenus pour déterminer le nombre de paiements supplémentaires et le montant seront précisés par une instruction du surintendant. Cette instruction devrait laisser aux syndics une marge de manuvre restreinte pour statuer sur les cas particuliers où les paiements supplémentaires seraient à l'origine de graves privations pour le failli.
Le montant du paiement mensuel devrait être fixé à la date à laquelle le syndic dépose le rapport en vertu de l'article 170. Au moment où les débiteurs disposant d'un revenu excédentaire envisagent de déclarer faillite, le syndic leur expliquera qu'il est probable que 12 paiements supplémentaires seront exigés avant l'obtention d'une libération.
Lorsqu'une personne déclare faillite, une date de « fin d'année » est établie aux fins de l'impôt sur le revenu. Cette date correspond au jour de la faillite. Tout endettement envers l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) est déterminé en fonction des montants dus à cette date. De façon générale, le failli est libéré de cette dette en même temps que des autres dettes dont il peut se libérer.
Lorsqu'une personne dépose une proposition, toutefois, aucune date de fin d'année n'est établie à proprement parler. Par conséquent, l'ADRC adopte le principe selon lequel toute dette au titre de l'impôt sur le revenu entre le début de l'année civile et la date de présentation de la proposition n'est pas une dette d'avant la proposition pouvant faire l'objet d'un compromis dans le cadre de la proposition, mais constitue une dette postérieure à la proposition que le débiteur ne peut intégrer à la proposition et qu'il lui faut par conséquent rembourser au complet. Pour les personnes ayant des dettes au titre de l'impôt sur le revenu, il peut donc être plus avantageux de déclarer faillite que de présenter une proposition. Or, la logique voudrait que les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu n'encouragent pas la faillite, par rapport aux propositions.
Tant la faillite que les propositions de consommateur offrent une forme de remise de dettes. L'article 80 de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit que lorsqu'une dette commerciale est remise, une partie de la dette remise, déterminée par la formule prescrite, sera traitée comme un revenu et par conséquent, imposable. Ces dispositions ne s'appliquent pas dans le cas d'une faillite mais s'appliquent aux propositions présentées en vertu de la LFI. Par conséquent, les propriétaires d'une petite entreprise trouveront plus avantageux de déclarer faillite que de présenter une proposition. Là encore, le groupe de travail considère que les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu ne devraient pas favoriser la faillite, par rapport aux propositions.
En ce qui a trait aux propositions de consommateur, le groupe de travail recommande que la date de fin d'année établie aux fins de l'impôt sur le revenu des particuliers soit la date à laquelle la proposition est déposée auprès du séquestre officiel. Pour les propositions commerciales déposées en vertu de la Section I de la LFI, la date de fin d'année devrait être la première en date des deux dates suivantes, soit a) la date de dépôt de l'avis d'intention de déposer une proposition et b) la date de dépôt de la proposition auprès du séquestre officiel.
Par ailleurs, le groupe de travail recommande que les dispositions sur la « remise de dettes » stipulées à l'article 80 de la Loi de l'impôt sur le revenu ne soient pas applicables aux personnes présentant une proposition en vertu de la LFI.
Le Canada compte deux grandes agences d'évaluation du crédit, Equifax Canada et Trans Union du Canada. Ces agences, également appelées bureaux de crédit ou organismes de cotes de crédit, aident les fournisseurs de crédit à évaluer le degré de risque auquel ils s'exposent lorsqu'ils accordent du crédit en leur transmettant des rapports documentaires sur les demandeurs de crédit.
La faillite d'un débiteur est naturellement enregistrée par les agences d'évaluation du crédit. Systématiquement, les faillis se voient attribuer la cote R-9, soit la cote de crédit la plus faible, qui peut les empêcher d'obtenir du crédit. Même si une cote R-9 a une incidence sérieuse sur les possibilités d'emprunt, il est important de mentionner que la décision d'accorder ou non un emprunt demeure toujours celle de l'organisme de crédit. La cote de crédit défavorable demeure inscrite au dossier du demandeur pendant une période de six ans après la date de la cession de biens54.
À l'époque où l'on a introduit les propositions de consommateur, les agences d'évaluation du crédit ont décidé d'attribuer aux débiteurs présentant une proposition de consommateur la cote R-9 pendant les trois années suivant l'achèvement des remboursements prévus. On espérait à l'époque qu'ils conserveraient la cote R-9 pendant quatre ans parce qu'on pensait que les propositions ne dureraient pas plus d'un an. À l'heure actuelle, toutefois, les propositions durent la plupart du temps pendant plus d'un an et s'étendent souvent sur trois ans. Il s'ensuit que les personnes ayant mené à terme leur proposition et ayant par conséquent versé davantage à leurs créanciers qu'elles ne l'auraient fait en déclarant faillite, sont pénalisées.
C'est pourquoi les pratiques actuelles d'évaluation du crédit produisent un résultat directement opposé à la politique privilégiée par le Parlement, laquelle vise à encourager les propositions dans le cas des débiteurs qui sont des personnes physiques. Or, les personnes ayant fait une proposition conservent presque invariablement leur cote défavorable à leur dossier de crédit pendant plus longtemps parfois même beaucoup plus longtemps que celles qui ont choisi la faillite.
Cette anomalie a fait l'objet de certains pourparlers avec l'une des principales agences d'évaluation du crédit, mais on n'est parvenu à aucune entente.
Il y aurait lieu d'instaurer un dialogue sérieux entre le Bureau du surintendant des faillites et les agences d'évaluation du crédit (et les personnes ayant recours à leurs services) en vue d'établir un protocole garantissant que les débiteurs qui mènent à terme une proposition seront pénalisés pendant moins de temps par une cote de crédit défavorable que les faillis.
Si les discussions n'aboutissent pas à une entente consensuelle, il devrait être stipulé dans la loi que les agences d'évaluation du crédit doivent limiter le maintien d'une cote de crédit défavorable, dans le cas d'une personne ayant mené à terme une proposition, à un laps de temps ne dépassant pas les deux tiers du temps qu'un failli se voit attribuer une cote R-9. Si la proposition de consommateur n'est pas exécutée conformément aux conditions prescrites, la cote de crédit défavorable demeurera en vigueur pendant aussi longtemps qu'elle aurait été en vigueur en cas de faillite.
Il est stipulé au paragraphe 49(4) de la LFI que c'est le séquestre officiel qui désigne un syndic pour administrer la faillite et que, autant que faire se peut, il doit faire ce choix en tenant compte des désirs des créanciers les plus intéressés. Cependant, le paragraphe 49(4) ne rend pas compte de la pratique actuelle. Dans la grande majorité des cas, les débiteurs choisissent un syndic pour administrer leur faillite. Il arrive que le séquestre officiel détermine qu'il y a lieu de nommer un syndic différent, mais ces cas sont relativement rares.
Il y a lieu de modifier le paragraphe 49(4) de la LFI pour tenir compte du processus actuel de sélection des syndics. Le groupe de travail suggère la formulation suivante :
Lorsque le séquestre officiel accepte la production de la cession en vertu du paragraphe (1), il nomme comme syndic, soit le syndic proposé par le débiteur, soit un syndic autorisé qu'il choisira, autant que faire se peut, en tenant compte des désirs des créanciers les plus intéressés, si identifiables, à ce moment. Le séquestre officiel complète la cession en indiquant comme cessionnaire le nom du syndic.
Le paragraphe 109(6) de la LFI restreint les droits de vote des créanciers qui ont fait affaire avec le débiteur au cours de l'année précédant l'ouverture de la faillite alors qu'ils ont avec lui un lien de dépendance. Les personnes avec lesquelles le débiteur a un lien de parenté font souvent partie des créanciers ayant un lien de dépendance avec ce dernier. À la discrétion du tribunal, les droits des créanciers ayant un lien de dépendance peuvent toutefois être restaurés si ces derniers représentent plus 80 p. 100 de la valeur de l'ensemble des réclamations. L'intention de ces dispositions est de faire échec à toute collusion entre le débiteur et un créancier ayant avec lui un lien de dépendance, qui porterait atteinte aux intérêts des autres créanciers ou lui conférerait un avantage injuste par rapport à un autre parent ou à d'autres parties ayant un lien de dépendance.
Le paragraphe 109(6) de la LFI repose sur l'hypothèse que les parties ayant un lien de dépendance seront plus susceptibles de pratiquer la collusion que les créanciers n'ayant pas de lien de dépendance. Cependant, il ne tient pas compte du fait que, parmi les créanciers ayant un lien de dépendance avec le failli, on retrouve aussi des membres de sa famille qui, bien que liés au failli, au sens de l'article 4 de la LFI, sont peu susceptibles de faire collusion avec lui. Ce devrait être le cas, par exemple, lorsque les conjoints sont en litige et lorsque la faillite a été déclarée expressément pour faire échec à une réclamation du conjoint. Or, si le couple n'est pas divorcé, le conjoint non failli ne sera pas autorisé à voter en tant que créancier si sa réclamation est inférieure à 80 p. 100 de l'ensemble des réclamations. Et cette interdiction s'applique aussi aux ex-conjoints pendant une année complète après l'achèvement de la procédure de divorce. Cette disposition peut enlever tout pouvoir d'agir aux conjoints non faillis, même s'ils sont des créanciers importants.
Le groupe de travail recommande deux modifications à la LFI :
En 1992, la LFI a été modifiée pour prévoir la libération automatique des faillis qui en sont à leur première faillite. Avant ce changement, tous les faillis qui étaient des personnes physiques étaient tenus de comparaître devant le tribunal pour obtenir leur libération. L'introduction de la libération automatique a allégé de façon appréciable la tâche des tribunaux de la faillite, qui ne statuent sur la libération des faillis déclarant faillite pour la première fois que lorsqu'une opposition est introduite.
À peu près 10 p. 100 des personnes déclarant faillite ont fait faillite auparavant. Ces personnes doivent obligatoirement comparaître devant le tribunal de façon à obtenir leur libération, qu'une opposition ait été déposée ou non.
Bien que l'introduction de la libération automatique des faillis déclarant faillite pour la première fois ait allégé quelque peu la tâche des tribunaux provinciaux de la faillite qui sont surchargés, la charge de travail des tribunaux demeure élevée dans bien des régions. Dans certaines régions, les longs délais dans les dates d'audition ne sont pas rares. Et tout accroissement futur du nombre de faillites rendra encore plus difficile pour les tribunaux la prise en charge de la libération des faillis qui ne sont pas admissibles à une libération automatique.
Il y a lieu d'éviter ces délais étant donné qu'ils peuvent aboutir à un traitement inégal des débiteurs en ce qui a trait à la période d'attente requise pour obtenir la libération de leurs dettes devant le tribunal. C'est pourquoi le groupe de travail appuie un allégement supplémentaire de la tâche en préconisant la libération automatique des faillis déclarant faillite pour la deuxième fois.
Le groupe de travail recommande que l'on modifie la LFI pour permettre aux faillis qui déclarent faillite pour la deuxième fois d'être admissibles à une libération automatique 24 mois après le dépôt de la faillite, sous réserve d'une opposition. Cette modification assure le maintien d'une conséquence discernable et transparente, en cas de recours à la procédure de faillite pour une deuxième fois. Elle permet de parvenir à une plus grande uniformité dans les sanctions visant les faillis qui déclarent faillite pour la deuxième fois lorsqu'aucune opposition à la libération n'est déposée. Elle assure le maintien des droits actuellement en vigueur de s'opposer à la libération d'un failli en cas d'abus et, lorsque ces droits seront exercés, le tribunal statuera. En cas de difficultés graves, le failli aura la possibilité de saisir le tribunal pour obtenir une modification de la durée de la faillite. Il est par ailleurs recommandé que pour une troisième faillite ou pour les faillites subséquentes, on demande au tribunal de statuer sur ces libérations au cas par cas.
Les alinéas 178(1)d) et 178(1)e) de la LFI portent sur les dettes dont le failli n'est pas libéré par une ordonnance de libération. Il s'agit notamment de « toute dette ou obligation résultant de l'obtention de biens par des fausses représentations ou des présentations erronées et frauduleuses des faits ». Le groupe de travail s'est attaqué à trois problèmes liés à la modernisation de ces parties de la LFI.
Le premier problème en rapport avec ces alinéas est que certains créanciers se sont efforcés d'empêcher l'annulation de leurs réclamations dans le cadre d'une faillite en faisant valoir qu'une allégation de fraude suffit pour se prévaloir de l'article. En pareil cas, le tribunal n'a pas jugé qu'il y avait eu effectivement fraude. Un second problème a trait au fait que l'alinéa 178(1)e) s'applique à l'heure actuelle uniquement aux dettes pour des biens obtenus par de fausses représentations ou des présentations erronées. La jurisprudence a exclu de la portée de cet article les dettes pour des services obtenus par des moyens tout aussi illégaux55. Enfin, le vol de la part d'un fiduciaire est visé par l'alinéa 178(1)d) mais non le vol par une personne étrangère.
En ce qui a trait au premier point, le groupe de travail est convaincu qu'une allégation de fraude, contrairement à une décision du tribunal indiquant qu'il y a bel et bien eu fraude, n'est pas suffisante pour qu'une dette fasse partie de la liste des exceptions à la libération énoncées à l'article 178.
En ce qui a trait au second point, le groupe de travail considère que les dettes pour des services obtenus par la fraude devraient également être visées par l'alinéa 178(1)e). L'actuelle limitation aux biens est un vestige du XIXe et du XXe siècles, époque où l'on mettait l'accent sur le commerce des biens. Compte tenu de l'importance croissante des services dans son économie, le Canada devrait moderniser ces dispositions périmées pour tenir compte de l'évolution des échanges. La fraude visant un fournisseur de services Internet ou un expert-conseil devrait être traitée de la même façon par la LFI que la fraude au détriment d'un fournisseur de biens. On peut apporter cette modification en supprimant la restriction actuelle aux biens qui figure à l'alinéa 178(1)e).
En ce qui a trait au troisième point, le groupe de travail considère qu'il n'y a pas de raison politique pour inclure uniquement le vol par un fiduciaire à l'alinéa 178(1)d). Tout vol devrait être inclus. Le groupe de travail a également réþéchi sur la question de savoir si d'autres infractions pénales pourraient être incluses dans cette liste de dérogations au principe de la libération. Par exemple, on pourrait faire valoir que l'incendie criminel ou la destruction intentionnelle de biens devraient figurer sur la liste56. Comme le vol est étroitement relié à la fraude, toutefois, le groupe de travail ne considère pas que son inclusion implique qu'il y a lieu d'inclure toutes les autres infractions. Les autres infractions peuvent toujours faire l'objet d'une ordonnance d'indemnisation ou de restitution.
Dans le cas des propositions57, il existe un problème technique concernant l'article 178, en rapport avec l'extinction des arriérés de pensions alimentaires et des autres réclamations visées par l'article 178. Le problème a gagné en importance avec l'accroissement du nombre de propositions ainsi qu'avec la participation croissante, depuis 1997, de demandeurs au titre d'une pension alimentaire faisant état d'arriérés prouvables.
Il est stipulé au paragraphe 62(2) de la LFI que :
Une fois acceptée par les créanciers et approuvée par le tribunal, la proposition [commerciale] lie ces derniers relativement : a) à toutes les réclamations non garanties [...] elle ne libère toutefois pas la personne insolvable des dettes et engagements mentionnés à l'article 178, à moins que le créancier n'y consente.
Cet article déclare que si la proposition est acceptée et approuvée conformément aux exigences habituelles de la loi, la personne insolvable est libérée de toutes les réclamations prouvables non garanties, excepté celles mentionnées à l'article 178. Toutefois, même les réclamations visées à l'article 178 donnent lieu à une libération par la proposition si « le créancier y consent ». Par conséquent, la personne qui demande le remboursement d'une pension alimentaire et « qui consent » à la libération éteindra tous les arriérés au titre de cette pension datant d'avant la proposition, à l'exception de ceux payés par l'intermédiaire de la proposition. Une disposition formulée de la même façon, le paragraphe 66.28(2), s'applique aux propositions de consommateur.
Examinons l'exemple qui suit. Supposons qu'une conjointe ayant une réclamation prouvable de 25 000 $ au titre d'arriérés d'une pension alimentaire pour enfants vote en faveur d'une proposition qui lui remboursera 20 p. 100 de la dette et supposons que la proposition est par la suite approuvée. Tant le paragraphe 62(2) que le paragraphe 66.28(2) pourraient sembler stipuler que l'auteur de la proposition est libéré du solde des arriérés pour peu que la conjointe y « consente ». Et c'est ce qu'elle a manifestement fait. Par conséquent, lorsque cette personne, après avoir reçu le dividende de la proposition, s'efforce d'obtenir par la suite le remboursement du solde d'arriérés, qui s'établit à 20 000 $, elle se verra opposer l'argument qu'en acceptant la proposition elle a en fait consenti à la libération. C'est le même résultat qu'on obtient pour le créancier qui détient une créance pour fraude ou fausse représentation, ou une ordonnance de restitution, ou le paiement de dommages-intérêts pour lésion corporelle inþigée intentionnellement.
Qu'entend-on par « y consent »? L'on pourrait s'attendre à ce que les tribunaux interprètent cette disposition en exigeant que, pour qu'il y ait extinction des arriérés accumulés avant la proposition au titre de la pension alimentaire, le demandeur soit tenu d'accepter expressément une dérogation à la protection que lui accorde l'article 178. Or ce n'est pas de cette façon que les tribunaux ont historiquement interprété l'article. En plus, selon Houlden & Morawetz, « le débiteur n'est cependant pas libéré des dettes et obligations mentionnées à l'article 178, à moins que les créanciers n'acceptent la proposition »58. En vertu de la jurisprudence britannique, « consentir » signifie soit voter en faveur de la proposition, ou peut-être participer à ses avantages, ou encore veiller activement à son acceptation59. Les créanciers de pension alimentaire qui coopèrent en faisant davantage que de se contenter de déposer une preuve de réclamation dans le cadre de la procédure de proposition, risquent de faire en sorte que le solde impayé des arriérés de pension antérieurs à la proposition ne soit éteint par les paragraphes 62(2) ou 66.28(2).
Le préjudice que cette situation peut causer est important lorsque l'on considère que ce sont des enfants qui en font les frais. Or ce n'était certainement pas l'intention du législateur, lorsqu'il a modifié l'article sur les pensions alimentaires de la LFI en 1997, d'interdire ou de dissuader les demandeurs de pension alimentaire de participer aux propositions dans le cadre des faillites. Les créanciers de pension alimentaire bien conseillés ne voteront pas en faveur de propositions par ailleurs appropriées, sans prévoir une réserve, mais les créanciers de pension alimentaire mal conseillés, ou non assistés d'un avocat, peuvent voter en faveur d'une proposition de ce genre et, par conséquent, se faire du tort à eux-mêmes et à leurs enfants. On ne peut présumer, de façon générale, que le syndic en sait suffisamment concernant ces dispositions peu connues pour avertir le créancier de pension alimentaire de bonne foi. Ce problème ne fera que s'amplifier si les propositions de consommateur deviennent plus facilement accessibles, en raison de l'absence normale d'une assemblée des créanciers.
Compte tenu de l'importance des motifs d'intérêt public qui sous-tendent les dérogations à la libération énoncées à l'article 178, et en particulier celles se rapportant à la pension alimentaire, il est essentiel de protéger ces créanciers d'une extinction par inadvertance ou en toute bonne foi de leurs créances alors qu'ils ont par ailleurs une conduite responsable. Les demandeurs d'une pension alimentaire du conjoint détenant des créances d'arriérés sont souvent démunis et non assistés d'un avocat. Ces personnes ont droit au plus haut degré de protection de la procédure. Ces dispositions constituent un piège pour elles en cas de négligence de leur conseiller juridique ou de tout syndic les incitant par erreur à approuver la proposition. Les créanciers qui ont été victimes de fraude, bien qu'ils ne soient pas aussi vulnérables en tant que groupe, méritent aussi une protection contre l'extinction à leur insu de leur créance, de même que les victimes d'agression. On peut présumer que les autres créanciers visés par l'article 178, notamment les organismes de prêts aux étudiants et l'État, disposent des services voulus pour éviter ce piège.
Pour les raisons susmentionnées, il est pertinent de réviser et de clarifier ces dispositions législatives afin de stipuler que la protection accordée par l'article 178 se perd, en cas de présentation d'une proposition, uniquement si le créancier vote en faveur de la proposition prévoyant expressément et explicitement qu'il y aura un compromis en ce qui a trait aux créances visées par l'article 178. Il devrait être impossible de parvenir à ce résultat par inadvertance ou par la voie d'une proposition formulée de façon ambiguë. La formulation pour atteindre cet objectif pourrait être la suivante :
62(2) Une fois acceptée par les créanciers et approuvée par le tribunal, la proposition lie ces derniers relativement : a) à toutes les réclamations non garanties [...]
62(2.1) Nonobstant le paragraphe 62(2), une proposition acceptée par les créanciers et approuvée par le tribunal ne libère pas la personne insolvable d'une dette ou d'une obligation énoncée par le paragraphe 178(1), à moins que la proposition ne prévoie expressément et explicitement un compromis pour ces créances et que le créancier n'ait voté pour approuver la proposition.
Autrement, on pourrait insérer une disposition faisant office d'avis afin de protéger uniquement les personnes que l'on considère comme des créanciers vulnérables, visées par l'article 178. Un avis serait nécessaire pour toute proposition visant la présentation d'un compromis relativement à ces créances. Une telle disposition pourrait être formulée comme suit :
62(2.1) Nonobstant le paragraphe 62(2), une proposition acceptée par les créanciers et approuvée par le tribunal ne libère pas la personne insolvable d'une dette ou d'une obligation mentionnée aux alinéas 178(1)a.1), b) ou c), à moins que le créancier n'ait voté pour approuver la proposition et que la proposition ne renferme la disposition suivante : « La présente proposition offre un compromis visant toutes les réclamations prouvables relatives à une ordonnance alimentaire ou à une entente alimentaire [et, selon le cas, toute réclamation prouvable pour lésion corporelle inþigée volontairement et agression sexuelle] si le créancier détenteur d'une telle réclamation vote en faveur de la proposition ».
Quelle que soit l'option retenue, une disposition analogue, soit le paragraphe 66.28(2.1), serait nécessaire pour les propositions de consommateurs.
Il est courant dans les ententes conclues par les consommateurs avec certains créanciers, en particulier les banques et les sociétés de services publics, que l'on trouve une disposition habilitant l'autre partie à résilier le contrat immédiatement si le consommateur fait faillite, même si ce dernier s'acquitte de ses paiements en vertu de l'entente au moment de la faillite.
Les clauses de ce genre, appelées « clauses de plein droit » par les avocats, peuvent se révéler désastreuses et empêcher les consommateurs d'avoir accès à des installations et à des services essentiels. Après une faillite, les consommateurs n'en demeurent pas moins des êtres humains ayant encore besoin d'avoir accès comme les autres citoyens à des services bancaires et à d'autres services publics. Ils ne devraient pas être privés de la possibilité de faire une location ou d'acheter des biens à crédit, pour la simple raison qu'ils s'efforcent de restructurer leur avenir financier. Néanmoins, les membres du groupe de travail ont appris par expérience que les services bancaires sont souvent résiliés et que les services publics sont parfois débranchés dès qu'un consommateur fait faillite. Souvent, d'ailleurs, les créanciers menacent de reprendre possession des biens vendus à crédit. Un récent sondage60 mené par l'Association coopérative d'économie familiale du Nord de Montréal corrobore ces affirmations.
L'article 66.34 de la LFI règle ce problème en rendant nulles les clauses de plein droit en ce qui a trait aux propositions de consommateurs. L'article n'a cependant aucune incidence sur le droit de l'autre partie à résilier l'entente si celle-ci est violée après le dépôt de la proposition de consommateur. Il habilite également l'autre partie à saisir le tribunal de la faillite en vue d'un recours si le fait que le débiteur échappe à la clause de plein droit cause au requérant des difficultés excessives.
Malheureusement, l'article 66.34 ne s'applique pas aux faillites de consommateur, à la différence de son homologue, l'alinéa 365e) du code de la faillite des États-Unis, qui s'applique à tous les types de procédures d'insolvabilité. De l'avis du groupe de travail, rien ne justifie dans la LFI cette distinction entre proposition de consommateur et faillite de consommateur et il recommande par conséquent qu'une disposition comparable à l'article 66.34 soit ajoutée à la Partie III de la LFI. À notre avis, cette disposition devrait être insérée dans le voisinage de l'article 69.3.
44 Les ressources disponibles à répartir entre les créanciers du failli sont d'abord dépensées pour payer les coûts d'administration de la faillite, puis pour effectuer des paiements aux créanciers parties à la faillite, en fonction de leur priorité, comme le prévoit l'article 136 de la LFI et ensuite pour faire des paiements à tous les créanciers ordinaires, au prorata des sommes qui leur sont dues.
45 Marzetti c. Marzetti, [1994] 2 R.C.S. 765, 5 R.F.L. (4e) 1, 26 C.B.R. (3e) 161, 169 N.R. 161, 20 Alta. L.R. (3e) 1, [1994] 7 W.W.R. 623 (C.S.C.); Wallace c. United Grain Growers, [1997] 3 R.C.S. 701, 152 D.L.R. (4e) 1, 3 C.B.R. (4e) 1, [1999] 4 W.W.R. 86 (C.S.C.).
46 BDO Dunwoody Ltd. c. Swanson (1997), 47 C.B.R. (3e) 126 (Ont. Ct. (Gen. Div.)); Re Grier (1998), 7 C.B.R. (4e) 179 (Man. Q.B.); Re Charron, [2000] J.Q. no 527 (C.S. Qué.); Re Weinstein (syndic de), [2000] J.Q. no 2971 (C.S. Qué.); Re Hynes (2000), 20 C.B.R. (4e) 98, 187 N.S.R. (2e) 394 (N.S. S.C.); Re Landry (2000), 21 C.B.R. (4e) 58, 50 O.R. (3e) 1, 192 D.L.R. (4e) 728 (C.A.); Re Streeter (2000), 25 C.B.R. (4e) 117, 267 A.R. 398 (Alta. Q.B.); Re Théberge (Trustee of), [2000] Q.J. no 3024 (Qué. S.C.); Re Cole (2001), 25 C.B.R. (4e) 225, 193 N.S.R. (2e) 242 (N.S. S.C.). Pour plus de contexte, voir R. Klotz, Who Gets the Bankrupt's Pre-Bankruptcy Earnings?, 15 C.B.R. (4e) 153 (2000).
47 Re Laybolt (2001), 27 C.B.R. (4e) 97, 196 N.S.R. (2e) 224 (N.S.S.C.) aux paragraphes 14-16.
48 Tout autre remboursement d'impôt subséquent se rapportant à un revenu gagné au cours de la faillite sera visé par l'article 68, en vertu de la recommandation du groupe de travail, et réparti selon les normes définies par le surintendant.
49 Beattie c. Ladouceur (2001), 23 R.F.L. (5e) 33 (Ont. S.C.J.) : Si un actif est insaisissable, le revenu de cet actif est également insaisissable. Par conséquent, une ordonnance rendue en application de l'article 68 n'est pas exécutoire contre un revenu provenant d'un actif insaisissable, comme une pension.
50 Une exception à cela concerne la faillite réputée, qui survient lorsqu'il y a annulation par la cour d'une proposition de consommateur déposée par un failli.
51 Par exemple, en Nouvelle-Écosse le montant maximum pouvant être reçu, dans le cas d'une administration sommaire, avant la distribution de montants aux créanciers est de 1 864,95 $. Sur ce montant, 1 286,48 $ sont en fait destinés aux honoraires du syndic. Le reste est réparti à raison de 170 $ pour la consultation, 100 $ pour les frais administratifs, 75 $ pour les honoraires du séquestre officiel et la TVH. Ces montants sont applicables à une première faillite, lorsqu'il n'y a pas de frais pour le tribunal.
52 Avant 1998, les faillis disposant d'un revenu dépassant le seuil de faible revenu étaient censés verser un revenu excédentaire conformément aux lignes directrices publiées, mais les attentes et les résultats se sont révélés extrêmement variables, et les créanciers devaient s'opposer à la libération du failli devant le tribunal pour obtenir le versement à même le revenu excédentaire ou d'autres contributions à l'actif.
53 Le « rapport en vertu de l'article 170 » déposé par le syndic rend compte de diverses questions pertinentes pour la libération du failli. Voir la note 24 et la section IV du chapitre IV du présent rapport.
54 De façon générale, la cote R-9 est transformée en une cote R-7, à partir de laquelle nombre de fournisseurs de crédit recommenceront à approuver du crédit, deux ans après la fin d'un programme de consultation jugé fructueux. Ceci donne de bons résultats dans des provinces comme l'Alberta où il existe des programmes de consultation indépendants, mais apparemment, la consultation imposée par la loi, dans le cadre de laquelle le syndic constitue la personne-ressource, ne conduit pas à la transformation d'une cote R-9 en une cote R-7.
55 Borg-Warner Acceptance Canada Ltd. c. Northern Cycle & Machine Ltd. (1988), 71 C.B.R. (N.S.) 197 (Sask. Q.B.), Grotsky Bissonnette et Fortin c. Léveillé, [2001] J.Q. no 1277 (QL).
56 Les dommages-intérêts pour lésions corporelles infligées intentionnellement font déjà l'objet d'une dérogation à l'alinéa 178(1)a.1).
57 L'analyse de cet article concerne à la fois les propositions de consommateurs et les propositions commerciales des particuliers.
58 Houlden & Morawetz, Bankruptcy and Insolvency Law of Canada (3e éd.) à §E18, citant Trade Collection & Mercantile Agency c. Derome (1934), 16 C.B.R. 158 (Cour. circ. Qué.). Dans une récente affaire, la réclamation d'un créancier faisant état de manquement aux obligations du fiduciaire a été considérée comme ne pouvant donner lieu à une libération en application du paragraphe 62(2) et de l'article 178, malgré le fait que le créancier avait prouvé sa créance dans le cadre de la proposition, et il a obtenu gain de cause lorsqu'il a fait appel auprès du tribunal de la décision de rejeter la créance et a reçu un dividende : Skytal Ltd. c. Schiber (1997), 46 C.B.R. (3e) 275 (Ont. Ct. (Gen. Div.)). La décision présentée dans le rapport n'indique pas si le créancier avait voté en faveur de la proposition.
59 Halsbury's Laws of England (3e éd.), v. 2, Bankruptcy, 671; Re Sewell, White c. Sewell, [1909] 1 Ch. 806 à 809 : « Peu après l'approbation d'une série d'ententes [...] le créancier a apporté une preuve et accepté le compromis et par conséquent, à mon avis, il a consenti au compromis au sens de l'article »; Victor Weston (Fabrics) Ltd. c. Morgensterns, [1937] 3 All E.R. 769 (C.A.), où un créancier a été considéré comme ayant « consenti » au concordat en donnant suite à la circulaire du syndic, qui annonçait le concordat et demandait des bilans, en envoyant (son bilan) [considéré comme l'envoi d'une preuve de réclamation]; Thorp c. Dakin (1885), 52 L.T. 856 (en prenant part aux efforts à l'appui de l'acceptation du compromis).
60 Association coopérative d'économie familiale du Nord de Montréal, Étude portant sur la situation financière et les habitudes de vie des Canadiennes et Canadiens ayant déclaré faillite entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 1998, Montréal, QC., Leger Marketing, janvier 2002.
Une série de recommandations du groupe de travail, présentées au chapitre 2, a des liens importants avec d'autres domaines de la politique publique, notamment l'éducation, la retraite ou la protection du consommateur. D'autres recommandations, en revanche, présentées au chapitre 3, n'ont pratiquement aucun rapport avec les autres politiques publiques, et portent plutôt essentiellement sur la façon dont certaines situations ou certains événements sont abordés dans le cadre de la LFI. Dans le présent chapitre et dans le suivant, le groupe de travail présente un troisième type de recommandations, qui se rapporte aux procédures administratives observées dans le cadre des faillites et des propositions de consommateurs. Le présent chapitre fait état des recommandations visant la procédure de faillite et le chapitre suivant porte sur les propositions de consommateurs.
Afin que la procédure de faillite personnelle soit aussi efficace que possible, sans porter atteinte à l'intégrité du processus, le groupe de travail a déterminé d'emblée que les parties intéressées devaient être en mesure de prendre leur décision en ce qui a trait à leur propre niveau de participation, en s'appuyant sur « les exceptions plutôt que sur la règle ». Le groupe de travail a mis en évidence plusieurs points dans la procédure où les interventions ou les échanges d'information ne sont réellement nécessaires que dans certains cas. Or, en vertu de la loi actuelle, ils sont souvent exigés dans tous les cas.
Le principe consistant à s'en remettre « aux exceptions plutôt qu'à la règle » a conduit le groupe de travail à recommander qu'une plus grande quantité d'information soit fournie aux créanciers au début de la procédure de faillite, et que plusieurs documents soient envoyés aux créanciers uniquement sur demande. L'un des problèmes inhérents au fait de privilégier « les exceptions plutôt que la règle » est que les créanciers ayant décidé de ne pas participer étroitement à un dossier peuvent ne pas être au courant de nouvelles informations mises au jour au cours de la faillite. Pour atténuer les risques que cela se produise, plusieurs recommandations du groupe de travail visent à donner plus de latitude aux interventions des créanciers.
Pour les créanciers, l'ouverture d'une faillite est un moment crucial pour déterminer le niveau de participation future, en fonction du dossier. Lorsque la perspective de recevoir un dividende est faible et qu'il n'y a aucune raison de penser qu'il y a eu une action fautive de la part du débiteur, les créanciers ne sont pas enclins à consacrer beaucoup d'attention à l'administration de l'actif. En fait, il peut arriver en pareil cas que leur principal intérêt soit de radier la dette dès que le dossier est fermé. Au contraire, lorsque le rendement pourrait être important ou que le débiteur est soupçonné d'abus, les créanciers surveilleront généralement beaucoup plus attentivement le dossier, et ils s'attendront à ce que le syndic soit particulièrement diligent dans l'administration du dossier.
Les créanciers ont besoin de suffisamment d'information au début d'une faillite pour déterminer leur degré de participation ultérieure au dossier. À l'heure actuelle, plusieurs caractéristiques inhérentes à la procédure de faillite rendent l'évaluation difficile.
Lorsque les créanciers ne désirent pas participer activement à une faillite, il y aurait lieu d'apporter des changements aux documents de notification pour réduire par la suite la quantité de documents et d'avis qui leur seront envoyés. Si, dans ce genre de dossiers, les créanciers ne désirent pas habituellement recevoir les documents de routine, ils ont néanmoins besoin de savoir quand ils peuvent en toute sécurité clore leur dossier de faillite. En outre, il convient de prévoir suffisamment de sauvegardes pour s'assurer, en cas de revirement de situation, que les créanciers seront mis au courant de ces changements. Et lorsque les créanciers s'intéressent à un dossier, il doit être plus facile pour eux de faire part de leur intérêt et de leurs attentes au syndic.
Le groupe de travail recommande qu'on apporte les changements qui suivent aux premiers documents de notification des créanciers :
Au Canada, le débiteur est libre de choisir entre le dépôt d'une cession de biens ou la présentation d'une proposition. Toutefois, il peut y avoir des conséquences pour les débiteurs qui choisissent la faillite alors qu'ils ont les moyens de faire une proposition viable. L'article 173 de la LFI, qui précise les raisons pour lesquelles le tribunal peut refuser ou suspendre la libération du failli, ou lui imposer une libération sous conditions, inclut maintenant comme motif pour ne pas accorder la libération immédiate le fait que le failli a choisi la faillite et non la proposition comme solution à son endettement, alors qu'il aurait pu faire une proposition viable.
En disposant d'informations en temps opportun sur les raisons ayant incité le débiteur à déclarer faillite, les créanciers seront en mesure de prendre des décisions plus éclairées concernant leur participation au dossier. Par exemple, ils peuvent prendre la décision de s'opposer à la libération si l'état des revenus et des dépenses figurant sur le Bilan indique que le failli dispose d'un revenu excédentaire et que, néanmoins, il a choisi de faire une cession. Mais la situation peut être complètement différente, cependant. Un failli peut avoir un revenu excédentaire important au moment de la déclaration de faillite et pourtant ne pas être en mesure de déposer une proposition viable. Ce genre de débiteur peut savoir qu'il est sur le point de perdre son emploi, ou bien il peut y avoir des raisons de santé qui font que l'option de la proposition n'est pas réaliste. Si les créanciers sont au courant de ces faits dès le départ, leur décision concernant une éventuelle opposition et le niveau de vigilance requis de leur part peut être différente de celle qu'elle aurait été en l'absence de cette information.
Les débiteurs qui déposent une cession de biens devraient fournir à leurs créanciers une explication motivant leur décision de ne pas présenter une proposition, au début de la faillite. Le bilan devrait être modifié de façon à exiger une divulgation des faits au moment de la cession.
Dans le cadre d'une faillite faisant l'objet d'une administration sommaire, la première assemblée des créanciers est exigée à la demande du séquestre officiel ou des créanciers détenant au moins 25 p. 100 de la valeur des réclamations prouvées. La demande doit être présentée dans les 30 jours de la date de faillite. Or, il y a convocation d'une assemblée de créanciers dans moins de 2 p. 100 des administrations sommaires.
Si l'on s'appuie sur les « exceptions plutôt que sur la règle », cela implique que les créanciers doivent réduire leurs exigences administratives et, par conséquent, simplifier le travail des syndics dans les dossiers où leur intérêt est modeste, voire nul. En revanche, les créanciers désirent bénéficier d'une plus grande souplesse et s'attendent à une attention et à une vigilance accrues de la part des syndics dans les dossiers où ils voient des problèmes et où ils ont des intérêts particuliers. Comme des questions et des préoccupations peuvent surgir à tout moment au cours de l'administration, les créanciers ont besoin de pouvoir demander la convocation d'une assemblée de créanciers au-delà de la limite des 30 jours qui leur est imposée actuellement par la LFI.
Le groupe de travail recommande que l'on modifie l'alinéa 155d.1) de la LFI pour permettre aux créanciers représentant globalement au moins 25 p. 100 de la valeur des réclamations prouvées de demander la convocation d'une assemblée de créanciers à tout moment au cours des six premiers mois de l'administration. Cette marge de temps supplémentaire offrira un meilleur recours aux créanciers qui découvrent des problèmes plus tard au cours de l'administration, sans pour autant causer d'interférence ou de retard indus à mesure que l'on se rapproche de la date de la libération du syndic ou du débiteur.
Avant qu'une personne physique faillie puisse obtenir sa libération, le syndic qui administre l'actif doit préparer et déposer un rapport concernant la demande de libération du failli. Ce rapport, intitulé rapport en vertu de l'article 170, est déposé auprès du surintendant. Tous les créanciers qui en ont au préalable fait la demande en reçoivent copie. Dans ce rapport, le syndic présente une évaluation des causes de la faillite et de la façon dont le failli s'est acquitté de ses obligations en vertu de la LFI. Il y fait aussi état de toute condamnation pour infraction ou de tout problème de conduite ou autre pouvant motiver le refus de la libération sans condition.
Dans de nombreux cas, le rapport ne rend compte d'aucun problème susceptible d'inciter à une plus grande vigilance ou à des interventions, comme l'opposition à la libération, de la part des créanciers ou du BSF. Lorsqu'il n'y a effectivement aucun problème, le temps consacré par le syndic à établir le rapport et par les créanciers et le surintendant à l'examiner ils doivent retrouver et examiner les dossiers se rapportant à l'actif ne représente pas une utilisation optimale des ressources.
Le groupe de travail a recensé les cas où le rapport en vertu de l'article 170 devrait être déposé et les cas où il n'y a pas lieu de le déposer.
Le groupe de travail recommande qu'on n'exige pas l'établissement du rapport en vertu de l'article 170 ni son envoi au surintendant ou aux créanciers qui en ont fait la demande lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :
Le syndic établira le Rapport en vertu de l'article 170, qu'il enverra à tous les créanciers qui le demandent et au surintendant dans les cas suivants :
Il y a audition de la demande de libération par le tribunal lorsqu'une opposition a été déposée ou lorsque le failli ne s'est pas acquitté des obligations qui lui incombent, notamment celle d'assister aux séances de consultation. L'opposition est parfois le signe d'une allégation de mauvaise conduite du débiteur, ce qui pourrait intéresser les autres créanciers qui veulent protéger leurs intérêts, et pourrait aboutir à des recouvrements pour la masse alors que rien n'avait été prévu à l'origine. Il est stipulé au paragraphe 169(6) de la LFI que, lorsque la demande de libération d'un failli doit être examinée par le tribunal, le syndic doit prévenir le failli, tous les créanciers ayant prouvé leurs réclamations et le surintendant de la date et du lieu de l'audition.
Bien que les syndics soient tenus d'envoyer des avis d'opposition à tous les créanciers ayant prouvé leurs réclamations, ils ne sont pas tenus d'envoyer ce genre d'avis aux créanciers n'ayant pas prouvé leurs réclamations64. Le groupe de travail considère que si l'on s'en remet aux « exceptions plutôt qu'à la règle », certains créanciers n'auront pas déposé leur formulaire officiel de preuve de réclamation. Les créanciers qui ont reçu une information adéquate dès l'ouverture du dossier peuvent déterminer en examinant les pièces s'il est peu vraisemblable que des dividendes leur reviennent. Dans ce cas, l'effort de remplir et de déposer une preuve de réclamation en bonne et due forme peut sembler inutile puisqu'il n'en ressortira vraisemblablement aucun avantage tangible pour eux. Toutefois, il y a un certain risque à cette démarche. Si le créancier décide de ne pas déposer de preuve de réclamation, rien ne garantit qu'il sera mis au courant par la suite de dividendes éventuels, ou qu'il aura connaissance d'abus de la part du failli, qui peuvent être dévoilés au cours de l'administration de la faillite.
Le groupe de travail recommande que l'on modifie le paragraphe 169(6) de façon à faire en sorte que tous les créanciers, plutôt que seulement les créanciers ayant prouvé leurs réclamations, reçoivent l'avis d'opposition à la libération du failli. Dans le cas d'une faillite où des problèmes ou des biens sont mis en lumière au cours de l'administration, l'avis sera utile aux créanciers qui avaient décidé de ne pas présenter de preuve de réclamation dans un premier temps. Bien que cette recommandation puisse augmenter le nombre d'avis qu'un syndic est tenu d'envoyer, dans cette situation, les créanciers qui ne veulent déposer une preuve de réclamation que lorsqu'ils s'attendent raisonnablement à un dividende devraient réaliser des économies de ressources, qui seront supérieures au coût de ces avis supplémentaires.
Le paragraphe 197(6.1) de la LFI a été promulgué en 1997. L'intention du législateur était d'indemniser les créanciers qui s'opposent avec succès à la libération du failli et permettent ainsi à l'actif de bénéficier de montants supplémentaires que le failli est contraint de verser en raison d'une ordonnance du tribunal. Le fait de permettre aux créanciers ayant émis un avis d'opposition de rentrer dans leurs frais a été considéré comme une mesure propre à inciter les créanciers, en particulier ceux qui sont partie à des faillites dont l'actif est peu élevé, à soulever des préoccupations ou à apporter des preuves de méfait à l'attention du tribunal, sans être pénalisés financièrement pour leurs efforts. Mais en l'absence d'un mécanisme prévoyant une compensation pour les coûts d'intervention engagés par un créancier, on court le risque de voir diminuer le nombre d'oppositions dûment fondées, et l'intégrité de la procédure de faillite pourrait en souffrir.
L'actuelle formulation du paragraphe 197(6.1) est la suivante :
Si un créancier s'oppose à la libération d'un failli qui est, en conséquence, libéré sous condition, le tribunal peut, s'il l'estime indiqué, lui accorder des frais à concurrence des sommes versées à l'actif au titre de l'ordonnance de libération conditionnelle ou d'un consentement à jugement visant le failli.
Les syndics qui étaient membres du groupe de travail ont rapporté que cet article a été interprété au sens étroit par certains tribunaux, qui ont accordé aux créanciers ayant obtenu satisfaction l'équivalent des frais administratifs du tribunal, c'est-à-dire environ 50 $ seulement. Cette situation ne reflète pas l'intention originale du législateur.
Un problème connexe a trait à l'opposition futile à la libération d'un failli. La LFI exige la tenue d'une audition du tribunal en cas d'opposition. Comme l'insolvabilité implique par nature la présence de parties ayant des intérêts opposés, il n'est pas étonnant que, dans certains cas, les oppositions à la libération du failli soient frivoles ou vexatoires. Aucun recours n'est toutefois prévu dans la LFI pour indemniser l'actif ou le failli des coûts engagés pour la comparution devant le tribunal. Pour le failli, il peut s'agir d'une perte de salaire, de frais de déplacement ou de tout autre coût.
Il y a lieu de reformuler le paragraphe 197(6.1) pour donner des précisions et réaffirmer l'intention originale du législateur. Les créanciers devraient être en mesure de voir leurs comptes taxés par le tribunal, et les frais accordés ne devraient pas dépasser le montant récupéré par l'actif par suite d'une opposition ayant porté fruit. Les changements suggérés sont les suivants :
Comme le groupe de travail recommande également qu'on permette aux créanciers de déposer par affidavit leur opposition à la libération d'un failli, le nouveau paragraphe proposé ci-dessus garantira également qu'une plus grande facilité d'opposition ne s'accompagne pas d'un accroissement des oppositions futiles ou vexatoires déposées par les créanciers.
La majorité des demandes de libération concernent des débiteurs possédant peu de biens, lesquels ont droit à une libération automatique ou à une libération absolue. Lorsqu'un créancier dépose un avis d'opposition à la libération d'un failli, il nie la procédure de libération automatique. Le tribunal doit alors entendre la cause et accorder la forme de libération appropriée, d'après les faits qui lui sont présentés en personne par le créancier qui s'oppose à la libération. Le créancier doit acquitter des droits de 50 $ pour ouvrir le dossier.
L'exigence voulant que le créancier qui s'oppose à la libération d'un failli comparaisse en personne à l'audition de la demande a un effet dissuasif, puisque les créanciers doivent porter à l'attention de la cour des renseignements concernant la conduite du failli. Et cette exigence joue un rôle d'autant plus dissuasif que nombre de grands organismes de crédit d'envergure nationale ont tendance à centraliser leurs services d'insolvabilité ou de recouvrement de dettes. Les créanciers confrontés à l'idée d'engager des frais pour comparaître devant le tribunal dans les cas où la probabilité d'obtenir des dividendes accrus est inconnue ou faible peuvent décider de ne pas s'opposer à la libération du failli, même s'ils ont des renseignements pertinents concernant la conduite de ce dernier. Cette situation a une incidence négative sur l'intégrité de la procédure de faillite personnelle.
Le groupe de travail recommande que l'on modifie la LFI pour permettre expressément à un créancier de déposer un avis d'opposition à la libération d'un failli étayé par une preuve par affidavit, plutôt que de se présenter en personne. Le créancier serait tenu de fournir copie de l'avis d'opposition au syndic, au séquestre officiel et au failli, à une date prévoyant un nombre de jours approprié avant la date prévue de l'audition par le tribunal. Le paiement des frais judiciaires demeurerait la responsabilité du créancier qui s'oppose à la libération.
Il y a lieu de fournir certains renseignements sur l'affidavit, dont le nom de la personne faisant opposition et, dans le cas d'une opposition déposée par une personne morale, le poste de la personne qui la représente. Les coordonnées d'une personne ressource seraient également utiles, au cas où le tribunal voudrait communiquer avec elle pour obtenir au besoin un complément d'information ou pour faciliter la tenue d'une conférence téléphonique entre les parties.
L'obligation pour le créancier de payer les frais judiciaires, associée à la recommandation du groupe de travail qui habilite le tribunal à adjuger des frais, en cas d'opposition futile ou vexatoire, protégera contre l'excès d'oppositions non fondées de la part des créanciers.
Le groupe de travail a élaboré une recommandation concernant les lettres de commentaires envoyées par le surintendant aux syndics en réponse au dépôt de l'État définitif des recettes et des débours du syndic. La recommandation subséquente, sur la clôture des dossiers de failli, repose sur l'hypothèse que la recommandation sur les lettres de commentaires est adoptée. Les deux recommandations sont par conséquent présentées ensemble.
Le syndic envoie copie de l'État définitif des recettes et des débours au surintendant, avant la distribution de dividendes, le cas échéant, et la fermeture du dossier. Le surintendant peut écrire une lettre de commentaires sur l'administration de l'actif par le syndic, prenant en compte certains aspects comme la rapidité d'action et la réalisation de l'actif. En cas d'administration sommaire, le surintendant peut envoyer une lettre de commentaires au syndic indiquant qu'il n'est pas nécessaire de comparaître devant un tribunal pour la taxation des comptes. Si le surintendant détermine, toutefois, qu'il y a des problèmes d'administration ou des questions, une lettre est envoyée au syndic lui demandant de comparaître devant le tribunal pour la taxation des comptes. Dans les administrations ordinaires, le syndic comparaît devant le tribunal pour la taxation, quel que soit le cas.
Tous les dossiers donnent lieu à l'envoi d'une lettre de commentaires du bureau du surintendant. Dans les cas d'administration sommaire, la grande majorité de ces lettres ne demandent pas la comparution du syndic devant le tribunal en vue de la taxation. Dans ces dossiers, si l'on prend comme hypothèse qu'il n'y a pas d'objection subséquente de la part des créanciers, les comptes du syndic sont réputés avoir été taxés après qu'un nombre prescrit de jours se sont écoulés par suite de la réception par les créanciers de l'État définitif des recettes et des débours65. Dans les dossiers d'administration ordinaire, la Loi exige que le syndic se présente devant le tribunal pour que les comptes soient taxés. Le surintendant peut rédiger une lettre de commentaires négative concernant l'administration de l'actif par le syndic, qui doit être présentée au fonctionnaire taxateur au tribunal.
Le Bureau du surintendant des faillites dispose d'une norme de service publiée de 21 jours pour l'émission d'une lettre de commentaires, après la réception de l'État définitif des recettes et des débours du syndic. Il respecte cette norme dans à peu près 90 p. 100 des dossiers. En ce qui a trait aux 10 p. 100 restants, soit le surintendant a dû demander des renseignements supplémentaires au syndic, soit il a dû obtenir une opinion juridique, soit l'affaire nécessite une étude plus approfondie pour donner une réponse adéquate à une question. En pareil cas, les lettres sont envoyées plus de 21 jours après réception de l'État définitif des recettes et des débours.
Alors que le surintendant des faillites émet une lettre de commentaires pour chaque faillite, ce n'est que dans un petit pourcentage de cas que la lettre donne lieu à une taxation par le tribunal ou porte à l'attention du tribunal des problèmes particuliers. Par conséquent, toutes les lettres de commentaires produites et envoyées par la poste au syndic répondent à une exigence prescrite de la LFI, mais seul un petit pourcentage de ces lettres conduit à des changements concrets dans l'issue de l'administration. En outre, le groupe de travail a le sentiment que l'on pourrait raccourcir le temps requis pour cette étape finale de l'administration de l'actif sans porter atteinte aux droits des créanciers de faire opposition à la libération du syndic.
S'en tenant au principe voulant qu'on s'appuie sur les « exceptions plutôt que sur la règle », le groupe de travail recommande que l'on modifie le paragraphe 152(4) de la LFI, lequel permettra au surintendant d'émettre des lettres de commentaires de façon sélective plutôt que systématique.
Le groupe de travail propose la procédure simplifiée qui suit :
En vertu de la règle 64 de la LFI, lorsque le syndic reçoit une lettre de commentaires indiquant que le surintendant ne demande pas la taxation des comptes devant le tribunal, il dispose de 30 jours pour envoyer copie de l'État définitif des recettes et des débours à tous les créanciers ayant prouvé leur réclamation, ainsi que le bordereau de dividendes. Cette procédure s'applique, que les créanciers reçoivent ou non des dividendes. Les créanciers ont alors 30 jours suivant réception des documents pour déposer une opposition devant le tribunal.
Tous les créanciers ne sont pas intéressés à recevoir l'État définitif des recettes et des débours pour tous les dossiers pour lesquels ils peuvent avoir une réclamation. Dans certains cas, dès l'ouverture du dossier, les créanciers auront déterminé qu'ils sont peu susceptibles d'avoir un intérêt dans la faillite et, en conséquence, ne demanderont pas qu'on leur envoie copie de l'État définitif des recettes et des débours. Dans le cas où l'actif ne produit aucun dividende pour les créanciers, ceux qui veulent recevoir les documents subséquents ont des frais à assumer, notamment pour retrouver et examiner le dossier.
Le groupe de travail recommande que la Loi n'exige pas qu'on envoie copie de l'État définitif des recettes et des débours et du bordereau de dividendes à tous les créanciers ayant prouvé leurs réclamations si :
Lorsque ces trois conditions sont réunies, le syndic doit s'employer à fermer le dossier et envoyer copie du certificat de conformité au surintendant. La date à laquelle ce dernier aura le certificat en main sera réputée être la date de libération du syndic et de fermeture du dossier.
Il conviendrait d'exiger que le syndic envoie par la poste copie de l'État définitif des recettes et des débours ainsi que du bordereau de dividendes, avec les dividendes, aux créanciers ayant prouvé leurs réclamations si :
Après l'expiration d'une période supplémentaire, peut-être de 30 jours, le syndic est libre de fermer le dossier, à moins qu'un créancier ne s'y soit opposé. Le syndic envoie au surintendant le certificat de conformité, et la date de réception de ce certificat sera la date à laquelle le syndic sera réputé être libéré ainsi que la date de fermeture du dossier, comme c'est actuellement le cas.
Lorsque le surintendant envoie une lettre de commentaires négatifs, une lettre demandant la taxation des comptes par le tribunal, ou un avis indiquant qu'il a l'intention de s'opposer à la taxation ou à la libération du syndic, la procédure demeurera celle actuellement décrite dans la LFI.
Le groupe de travail considère qu'il y a apparemment une incohérence entre la règle 128 et le paragraphe 136(2) de la LFI. Il est stipulé au paragraphe 136(2) de la Loi que lorsqu'on dispose des fonds requis, on doit procéder à une distribution provisoire de l'actif, sous réserve des montants requis pour les coûts d'administration. Les fonds sont versés conformément au plan de répartition indiqué au paragraphe 136(1), lequel inclut le paiement des honoraires du syndic.
Dans le cas des administrations sommaires, le paragraphe (3) de la règle 128 établit le calendrier des retraits du compte en fiducie pour le paiement des honoraires. Le surintendant des faillites a adopté comme position qu'en raison de sa nature particulière, le paragraphe (3) de la règle 128, qui porte sur les avances au titre de l'administration sommaire, fournit les instructions complètes concernant ces dossiers tandis que le paragraphe 136(2) de la Loi s'applique uniquement aux administrations ordinaires.
Il y a des situations où une distribution provisoire, dans le cas d'une administration sommaire, est à l'avantage des créanciers. Citons à titre d'exemple le cas où certains actifs ne seront pas versés à la masse pendant une période prolongée. Il peut s'agir notamment de paiements en vertu d'une ordonnance de libération sous conditions ou de dépôts à terme qui arriveront à échéance à une date ultérieure. Dans ce cas, il peut être dans l'intérêt des créanciers qu'on distribue les fonds disponibles le plus rapidement possible. Une telle distribution signifierait que le syndic prend une avance d'honoraires au moment de la distribution, en sus des montants mentionnés à la règle 128.
Parallèlement, on ne devrait pas avoir recours à ce genre de distribution provisoire simplement pour justifier une perception accélérée des honoraires du syndic lorsqu'il n'y a pas d'avantage matériel pour l'actif ou pour les créanciers. De l'avis de certains, il faudrait prévoir des sauvegardes pour s'assurer qu'une distribution provisoire n'est autorisée que lorsqu'elle est appropriée.
Le groupe de travail recommande que l'on règle ce qu'il considère comme une incohérence entre le paragraphe (3) de la règle 128 et le paragraphe (2) de l'article 136 visant les faillites donnant lieu à une administration sommaire, de façon à permettre dans certains cas une distribution provisoire de dividendes. Cette distribution ne doit pas avoir lieu au cours des neuf premiers mois de la faillite. Il faut demander au surintendant de se prononcer sur une distribution provisoire, dans le cas d'une administration sommaire, en tant que mécanisme garantissant que la distribution est avantageuse et qu'aucune partie intéressée n'est injustement lésée. L'intention de ces recommandations n'est pas de favoriser les distributions provisoires de façon généralisée, mais seulement pour les dossiers où elles sont manifestement avantageuses.
Certains créanciers, y compris les organismes émetteurs de cartes de crédit, les entreprises de services publics, les principaux détaillants et l'Agence des douanes et du revenu du Canada, sont régulièrement partie à des faillites personnelles. Les dividendes versés à ces créanciers que l'on retrouve fréquemment dans les faillites sont souvent de petits montants et, dans ce cas, le coût du traitement des chèques de dividendes peut facilement dépasser la valeur des dividendes. Cette situation dissuade les créanciers de s'intéresser aux faillites comportant peu d'actifs et explique en partie pourquoi au cours des dernières décennies on a vu progressivement les créanciers se désintéresser des dossiers d'insolvabilité personnelle.
Bien qu'on incite les syndics à distribuer entre les créanciers tous les fonds dont ils disposent, on est conscient du fait que cette façon de procéder n'est pas réaliste pour les montants peu importants. L'instruction no8 du surintendant (portant sur les dividendes non réclamés et les fonds non répartis) établit des lignes directrices qui aident les syndics à déterminer lorsqu'il y a lieu de distribuer des fonds. En vertu de ces lignes directrices, par exemple, lorsqu'une faillite compte au moins cinq créanciers ayant prouvé leurs réclamations, il y a lieu de faire une répartition lorsque le dividende moyen dépasse 10 $ par créancier.
De façon à rendre plus rentables et efficients la répartition et le traitement des petits montants de dividendes, tant pour les créanciers que pour le syndic, le groupe de travail recommande que la LFI introduise des dispositions souples permettant aux créanciers fréquemment partie à des faillites de choisir d'accumuler les dividendes. Cela permettrait aux syndics de regrouper les petits montants de dividendes qui sont destinés au même créancier, et ressortissent à plusieurs faillites. Ces dividendes accumulés seront répartis sur une base périodique prédéterminée. Il y aura lieu d'établir des seuils pertinents tenant compte du coût de traitement d'un chèque de dividendes, de façon à définir ce qu'on entend par petit dividende.
61 Le groupe de travail a envisagé l'utilisation d'un formulaire de « reconnaissance de dette » simplifié pour remplacer le formulaire de Preuve de réclamation actuellement en vigueur, dans les dossiers où les créanciers ne s'attendent à aucun dividende. Mais il a abandonné ensuite cette idée, car on a fait valoir que si par la suite un dividende était envisagé, le créancier serait tenu de remplir de toute façon le formulaire de Preuve de réclamation.
62 Pour des raison de clarté, la date officielle de la fermeture du dossier utilisée aux fins du registre public demeurera la date de libération ou la date de libération réputée du syndic, comme c'est le cas actuellement.
63 Cette situation inclut le cas où le syndic recommande que des paiements supplémentaires à même le revenu excédentaire soient exigés, comme condition de la libération.
64 Il est stipulé à l'article 149 de la LFI qu'un syndic peut envoyer un avis à tout créancier dont la réclamation n'a pas été prouvée pour lui faire savoir qu'un dividende définitif sera établi, en lui demandant qu'il fasse la preuve de sa réclamation dans un délai de 30 jours, s'il veut recevoir une partie du dividende. Mais cet avis est à la discrétion du syndic.
65 La rémunération pour une administration sommaire est établie selon un barème fixe. Dans les cas où il n'y a aucune préoccupation relative à l'administration du syndic, le calcul des honoraires du syndic est par conséquent simple et sujet à moins de variations que dans le cas d'une administration ordinaire.
Le groupe de travail a élaboré des recommandations se rapportant aux propositions de consommateurs, de même qu'aux faillites. Nombre des recommandations visant les faillites du chapitre précédent témoignent de la volonté du groupe de travail de s'appuyer sur les exceptions plutôt que sur la règle. Dans le cas des propositions de consommateurs, toutefois, le but des efforts du groupe de travail a été de mettre en uvre des réformes fondées sur l'expérience récente de cette forme relativement nouvelle d'administration de l'insolvabilité.
Pour présenter une proposition de consommateur, un débiteur est tenu de préparer, avec l'aide de l'administrateur de la proposition, un document qui est déposé auprès du séquestre officiel. Dans les dix jours du dépôt de la proposition, l'administrateur est tenu de déposer d'autres documents, y compris un bilan faisant état des actifs du débiteur, de ses obligations, de ses revenus et de ses dépenses.
À la différence du bilan qui accompagne une cession de biens, le bilan condensé requis pour une proposition de consommateur n'est pas un formulaire prescrit. Dans le cadre des propositions de consommateurs, la plupart des administrateurs, qui, en majorité, sont également des syndics de faillite, ont recours au bilan requis pour une cession de biens. C'est toutefois plutôt pour des raisons pratiques que pour se conformer à une obligation de la Loi qu'ils utilisent ce recours. Les créanciers et les chercheurs ont tout intérêt à s'assurer que l'information est accessible, complète et normalisée, tant pour comprendre et évaluer une proposition particulière, dans le cas des créanciers, que pour parvenir à une compréhension d'ensemble de ce segment particulier de la population de débiteurs, dans le cas des chercheurs.
Le groupe de travail recommande qu'on introduise un formulaire prescrit, similaire au bilan de faillite, pour les propositions de consommateurs.
Lorsque les débiteurs déposent une proposition de consommateur, une assemblée des créanciers peut être convoquée pour discuter des questions se rapportant à la proposition. Si nul ne voit la nécessité de convoquer une assemblée des créanciers, toutefois, selon l'article 66.18 de la LFI, la proposition est réputée avoir été acceptée par les créanciers.
En vertu de l'alinéa 66.15(2)b) de la LFI, il y a lieu de convoquer une assemblée des créanciers si, dans les 45 jours suivant le dépôt de la proposition, des créanciers représentant en valeur au moins 25 p. 100 des réclamations prouvées en font la demande.
Si un créancier ayant prouvé sa réclamation fait part à l'administrateur de son désaccord par rapport à la proposition, avant l'expiration du délai de 45 jours, ce désaccord est réputé être une demande d'assemblée.
Le groupe de travail considère que cette dernière disposition est inappropriée. La décision de demander la convocation d'une assemblée de créanciers et la décision d'appuyer ou non une proposition sont des décisions distinctes et indépendantes. Un créancier qui est en désaccord avec une proposition et qui, par conséquent, est à l'origine de la convocation d'une assemblée de créanciers aux termes de l'alinéa 66.15(2)b), n'a pas nécessairement l'intention d'y assister. Et, là encore, les créanciers ayant exprimé leur désaccord ne disposent d'aucun mécanisme pour faire savoir que la convocation d'une assemblée n'est pas nécessaire.
L'administrateur est par conséquent contraint d'envoyer des avis à tous les créanciers pour qu'ils prévoient l'heure et l'emplacement de l'assemblée et qu'ils se préparent et se libèrent en vue de cette assemblée. En dépit de tous ces préparatifs, il n'est pas rare qu'aucun créancier ne soit présent.
Le groupe de travail recommande qu'un désaccord par rapport à une proposition de consommateur ne soit pas considéré automatiquement comme une demande de convocation d'une assemblée de créanciers. Les créanciers qui ne sont pas d'accord devraient indépendamment demander une telle convocation. Cette façon de faire réduira les dépenses et les efforts inutiles.
Il est stipulé au paragraphe 66.31(1) de la LFI qu'une proposition de consommateur est réputée être annulée lorsque le débiteur, dans le cas où les paiements prévus doivent être effectués mensuellement, omet de les effectuer pendant trois mois ou bien lorsque le débiteur, dans le cas où les paiements doivent être effectués moins fréquemment que sur une base mensuelle, est en défaut, depuis plus de trois mois, par rapport à n'importe quel paiement66.
Les inspecteurs nommés peuvent modifier ces dispositions visant le défaut de paiement. L'article 66.21 autorise les créanciers, dans le cas d'une proposition de consommateur, à nommer jusqu'à trois inspecteurs et il permet également l'extension ou la restriction des pouvoirs généralement conférés à un inspecteur aux termes de la Loi. En pratique, cela signifie que lorsque les créanciers sont d'accord, les inspecteurs nommés dans le cadre de propositions de consommateurs sont dotés de pouvoirs renforcés les autorisant à ne pas tenir compte d'un défaut dans l'exécution d'une proposition. En outre, les inspecteurs sont habilités à approuver, sans demander la convocation d'une assemblée de créanciers, une modification à une proposition lorsque le changement porte exclusivement sur le calendrier et le montant des paiements à effectuer, sans que le montant total à payer ne soit modifié.
L'intention de l'article 66.21 est de conférer une certaine latitude sans porter atteinte aux intérêts des créanciers ou à l'intégrité de la procédure. Il y a des situations où un débiteur ayant présenté une proposition de consommateur peut être aux prises avec des difficultés temporaires, qui l'empêchent d'effectuer ses paiements, d'autant plus que la proposition peut s'étendre sur plusieurs années. Dans les cas où, globalement, cette situation n'aura pas d'incidence négative sur l'accord conclu entre les créanciers et le débiteur, la proposition peut par conséquent se poursuivre.
En pratique, toutefois, on nomme rarement des inspecteurs dans le cadre des propositions de consommateur. Par conséquent, lorsqu'un administrateur de proposition rencontre une situation où le débiteur est temporairement incapable de faire face à ses obligations, il est difficile de sauver la proposition, même si cela peut être dans l'intérêt supérieur des créanciers et du débiteur.
En outre, les pouvoirs renforcés de l'inspecteur ne sont pas décrits de manière explicite dans la LFI, bien que le formulaire prescrit pour une proposition de consommateur renvoie à ces pouvoirs. Sans une référence plus explicite à ces pouvoirs, à l'article 66.21, il y a risque de mauvaise interprétation.
Le groupe de travail recommande :
Il n'est pas rare qu'une proposition de consommateur échoue. Lorsque cela se produit, les droits des créanciers sont rétablis et le débiteur peut se retrouver dans la même situation qu'avant le dépôt de sa proposition. Il peut alors choisir de déposer une cession de biens et désigner, comme syndic, l'administrateur de sa proposition.
La présentation d'une proposition de consommateur qui n'a pas été menée à bien et une cession de biens volontaire subséquente, par le même débiteur, sont deux faits traités séparément et font l'objet d'une procédure indépendante en vertu de la LFI. La Loi exige que le syndic de faillite envoie un avis de faillite à tous les créanciers, et que ces derniers fournissent de nouvelles preuves de réclamation. Lorsqu'il s'est écoulé peu de temps entre la date de dépôt d'une proposition et la faillite subséquente, les réclamations des créanciers peuvent être inchangées, mais à l'heure actuelle, le créancier n'en doit pas moins établir une nouvelle preuve de réclamation.
Le groupe de travail recommande que les preuves de réclamation déposées pour une proposition de consommateur ayant échoué soient acceptables pour la faillite subséquente si :
66 Il y aura ce résultat à moins que le tribunal n'en ait au préalable décidé autrement par ordonnance, ou que la proposition de consommateur ait été modifiée au préalable.
Au cours de leurs réunions, les membres du groupe de travail se sont penchés pendant un certain temps sur plusieurs questions, sans aboutir à des recommandations. En pareil cas, le groupe de travail a décidé que la façon dont le système d'insolvabilité traite à l'heure actuelle des questions était plus satisfaisante que les options disponibles. Le présent chapitre fait brièvement état de ces questions ainsi que de la raison d'être du maintien du statu quo.
Les débiteurs ayant déclaré faillite pour la première fois qui ont recours à la procédure d'administration sommaire sont automatiquement admissibles à la libération neuf mois après la cession de biens. Le groupe de travail s'est demandé si cette période de neuf mois devait être modifiée et a discuté de la question de façon approfondie. De l'avis de la majorité, il est apparu en fin de compte que la période de neuf mois était appropriée pour les faillis qui n'avaient pas été insolvables auparavant et qui n'avaient pas de revenu excédentaire, pourvu que nul ne s'oppose à leur libération.
Dans le débat au sein du groupe de travail, une partie des membres aurait voulu instaurer une plus longue période de faillite, afin d'accroître les dividendes pour les créanciers et de permettre une meilleure réhabilitation du débiteur. L'argument de ces membres était que la réhabilitation serait plus durable, car les faillis seraient moins enclins à reprendre les mauvaises habitudes à l'origine de leurs difficultés s'ils passaient plus de temps en faillite avant d'être libérés.
Une autre partie du groupe de travail avait un point de vue tout à fait différent. Ces membres considéraient au contraire que le Canada devrait adopter une période de faillite plus courte. Selon ce groupe, la période de neuf mois est arbitraire et le Canada devrait se tourner vers l'Australie et réformer le système en s'inspirant éventuellement du modèle de ce pays. Depuis 1992, les Australiens ont en effet une procédure de faillite des consommateurs qui permet la présentation d'une demande de libération après une période de faillite de six mois, sous réserve de plusieurs conditions67.
Dans le débat, on a souligné qu'au moment de l'adoption de la libération automatique dans le cas d'une première faillite, en 1992, on avait choisi le délai de neuf mois qui semblait être un compromis raisonnable entre les trois mois stipulés dans la LFI en tant que période minimale exigée pour qu'un failli puisse demander une libération et les 12 mois dont disposait le syndic pour demander une audition en vue de la libération68. Ces périodes obligatoires de trois et de 12 mois étaient alors bien établies. En fait, elles étaient demeurées en vigueur dans la LFI pendant des décennies avant l'introduction des dispositions visant la libération automatique. Le choix de la période de neuf mois ne s'écartait donc pas de façon radicale de la pratique antérieure.
Si on compare le Canada à d'autres pays en ce qui a trait à la durée des faillites des débiteurs-consommateurs, on s'aperçoit qu'il se trouve à l'extrémité « libérale » du spectre. C'est-à-dire que le Canada a une période de faillite plus courte pour les particuliers que la plupart des autres pays.
Les États-Unis et l'Australie sont les seuls autres pays à prévoir des périodes de faillite plus courtes, et ces deux pays ont récemment proposé des amendements qui augmenteraient la durée de la faillite. La procédure en vertu du chapitre 7 aux États-Unis prévoit encore une libération plus tôt, mais si les réformes envisagées sont adoptées, seuls les débiteurs ayant un faible revenu, selon les critères d'évaluation des moyens, pourront se prévaloir du chapitre 7. Les autres seront tenus de déposer un plan de remboursement, en vertu du chapitre 13, dont la durée variera généralement de trois à cinq ans. Quant à l'Australie, si elle adopte les réformes déposées devant le Parlement au cours de l'été 2001, elle retournera à sa situation d'avant 1992 qui imposait aux particuliers une période de faillite de trois ans.
D'autre part, en Angleterre et au Pays-de-Galles, la législation proposée prévoit des périodes de faillite plus courtes dans ces régions du Royaume-Uni que la durée moyenne de trois ans en vigueur, pourvu qu'il n'y ait pas d'opposition et qu'aucune enquête ne soit indiquée69.
Cette question a été l'un des sujets ayant donné lieu aux débats les plus approfondis au sein du groupe de travail. À la dernière réunion du groupe, on est parvenu à une décision unanime des personnes présentes en faveur du maintien de l'admissibilité à la libération après neuf mois pour les débiteurs en faillite pour la première fois et ne disposant pas d'un revenu excédentaire. Le groupe de travail est parvenu à ce consensus, en partie en raison de la recommandation connexe voulant que les faillis disposant d'un revenu excédentaire soient tenus de faire des paiements pendant 21 mois pour obtenir leur libération.
Le groupe de travail s'est penché sur la question de savoir s'il fallait prévoir un régime distinct pour les débiteurs dont les biens sont insaisissables, c'est-à-dire ceux qui ne possèdent que des biens et un revenu qui ne peuvent être saisis par les créanciers. Ceux-ci n'ont pas de recours légal pour obtenir le remboursement de dettes de ces personnes, mais ils n'en font pas moins des efforts de recouvrement. C'est pourquoi les débiteurs dont les biens sont insaisissables peuvent ressentir le besoin d'échapper aux efforts de recouvrement en déclarant faillite.
Le nouveau régime envisagé serait une alternative à la faillite dans les cas où la cessation des efforts de recouvrement constitue le seul impact tangible de la faillite. Par exemple, la nouvelle procédure pourrait prévoir une suspension des procédures pour mettre un terme à la pression des créanciers sur le débiteur sans prévoir une libération des dettes. La suspension pourrait demeurer en vigueur jusqu'à ce que la loi provinciale sur la prescription des actions entre en vigueur et n'efface en fait la dette, ou jusqu'à ce que le débiteur acquière des biens ou dispose d'un revenu excédentaire. L'acquisition de biens ou le fait de disposer d'un revenu excédentaire déclencherait alors une faillite. Les créanciers mis au courant de l'existence d'actifs ou d'un revenu pourraient obliger le débiteur à faire faillite. Le régime envisagé nécessiterait la supervision d'un syndic de faillite tout au long de la période de suspension, d'un maximum de six ans, jusqu'à ce qu'il y ait prescription70. Le syndic serait tenu de surveiller les affaires du débiteur pour s'assurer que ce dernier ne dispose pas de biens non exemptés ou d'un revenu excédentaire et serait chargé de prévenir les créanciers de la suspension des procédures. Il faudrait établir un registre public des débiteurs sous ce régime.
Le groupe de travail s'est penché sur le nouveau régime proposé et a déterminé qu'il ne représentait pas une alternative pratique à la faillite. La supervision des affaires d'un débiteur pendant plusieurs années poserait des difficultés pour le syndic, d'autant plus que la population visée peut se révéler extrêmement mobile. En outre, on ne savait pas très bien comment les syndics seraient rémunérés pour leur supervision et les services de notification des créanciers, alors que le niveau d'effort requis pour s'assurer que la situation financière d'un débiteur n'a pas changé pendant une période s'échelonnant sur plusieurs années serait assez important.
L'instruction 6R du surintendant exige que les syndics rencontrent les faillis au moins une fois pour évaluer leur situation financière. L'une des possibilités envisagées aux fins de la réforme administrative était que les syndics délèguent cette obligation à d'autres membres du personnel administratif. En ce qui a trait à cette instruction, toutefois, le groupe de travail souscrit au principe important selon lequel les faillis devraient rencontrer personnellement leur syndic au moins une fois au cours de la procédure de faillite. La raison d'être de la recommandation privilégiant le statu quo est que cette évaluation survient à un moment où l'expérience et la formation du syndic peuvent être les plus avantageusement mises à profit dans la procédure.
Les membres du groupe de travail ont discuté de la question de savoir si le Canada devrait autoriser le principe « cramdown » concernant le dépôt d'une proposition, soit la pratique en vigueur dans le système américain. Les tribunaux américains ont le pouvoir, dans certaines situations, d'imposer une proposition à un créancier, même si ce dernier refuse cette solution. En outre, le tribunal est en mesure de réduire les créances des créanciers garantis, s'il détermine qu'un montant réduit correspond mieux à la juste valeur marchande des biens pertinents. Cette pratique est autorisée par la procédure prévue au chapitre 13, aux États-Unis. Le groupe de travail n'a pas été favorable à l'introduction du concept « cramdown » dans le système canadien.
Le groupe de travail a envisagé une suggestion selon laquelle les achats par carte de crédit effectués trois mois avant la faillite devraient être obligatoirement remboursés. Selon une autre suggestion, on n'appliquerait pas ce principe lorsque le débiteur opte pour la proposition.
Le groupe de travail n'a pas appuyé la suggestion et a considéré que le moment approprié pour se pencher sur les questions relatives à la conduite du débiteur, y compris l'utilisation abusive de la carte de crédit, se situait au moment de la libération du débiteur.
Statistique Canada publie annuellement les normes relatives au seuil de faible revenu (SFR). Les normes sont le fruit d'une méthode qui recense les personnes qui se trouvent dans une situation nettement plus déplorable que celle du Canadien moyen. C'est à partir de ces normes que l'on détermine les contributions au titre du revenu excédentaire dans le cadre des faillites, en vertu de l'instruction 11R.
L'un des groupes d'étude du groupe de travail s'est penché sur d'autres solutions que les normes du SFR. On a fait observer que ces normes ne tiennent pas compte des différences régionales dans le coût de la vie ou les dépenses, et certains ont suggéré que le surintendant adopte un système prévoyant des ajustements en fonction des différentes villes, des régions rurales ou autre. D'autres ont proposé que le surintendant utilise une formule fondée sur les niveaux de revenu moyen établis d'après les données du recensement de Statistique Canada. Selon une autre suggestion, les syndics bénéficieraient d'une certaine latitude dans l'application des normes, leur permettant de tenir compte de la situation particulière de chaque failli. Enfin, le groupe de travail a examiné le point de vue, exprimé par un membre, selon lequel les normes visant le revenu excédentaire devraient être énoncées dans le texte même de la LFI, plutôt que dans une instruction du surintendant où elles peuvent être modifiées sans l'approbation du Parlement.
Le groupe de travail a décidé de ne pas recommander de changement à la façon dont les normes visant le revenu excédentaire sont formulées par le surintendant. Il considère toutefois que celui-ci devrait examiner toute nouvelle mesure qui pourrait être publiée et représenterait une amélioration par rapport aux normes du SFR pour déterminer le revenu excédentaire. À l'heure actuelle, le groupe de travail considère que les normes du SFR, aussi imparfaites soient-elles, constituent le meilleur outil à cet fin et devraient continuer d'être utilisées jusqu'à ce qu'on dispose d'une solution plus attrayante. Par ailleurs, le groupe de travail n'a pas jugé utile que la LFI énonce les mécanismes à utiliser pour déterminer le revenu excédentaire. En effet, si l'on compte sur l'approbation du Parlement pour établir de nouvelles normes, on se retrouvera avec des normes désuètes et on n'aura pas la certitude d'une mise à jour régulière.
67 Le gouvernement australien a adopté une période de faillite plus courte parce que le législateur a considéré comme « injuste et inutile de maintenir certains faillis dans cette situation alors que leur faillite était parfois attribuable davantage à la malchance qu'à une mauvaise action » (d'un courriel daté du 3 mai 2001, émanant de Don Costello de l'Insolvency and Trustee Service australien). Toutefois, on a observé récemment des efforts, en Australie, afin de rétablir la période de faillite de trois ans, en vigueur avant 1992.
68 Voir le paragraphe 168.1(2) de la LFI.
69 Tiré de « Insolvency A Second Chance » publié dans le site Web du service d'insolvabilité du Royaume-Uni, paragraphes 1.10 à 1.20.
70 On dit qu'il y a prescription lorsque le délai prévu par la loi pour que la partie plaignante intente une action en justice s'est écoulé.
Le groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle a entrepris son étude et ses discussions sans aucune idée préconçue quant au résultat du processus. Il s'est attaché uniquement à respecter son mandat, qui lui demandait de dégager de façon générale les attributs d'un système d'insolvabilité personnelle et d'une réglementation de la faillite pouvant convenir au Canada au XXIe siècle.
Il ressort de sa réflexion et de l'expérience pratique des participants que, globalement, le système répond de façon adéquate aux besoins des citoyens canadiens et parvient à un juste équilibre entre les besoins par nature incompatibles des débiteurs et des fournisseurs de crédit.
Néanmoins, il est apparu au fil des discussions que certaines questions de politique et de principes nécessitaient un examen plus attentif et qu'il fallait préciser certaines dispositions pour mieux équilibrer encore les besoins du régime et clarifier certaines questions de procédure et certains aspects techniques de l'administration. Le groupe de travail a considéré que d'autres éléments du système ne nécessitaient pas de changement.
Les chapitres précédents du présent rapport rendent compte de toutes ces catégories.
Aucune des recommandations du groupe de travail n'est coulée dans le béton. Les recommandations sont issues de jugements de valeurs et de l'expérience des participants et, dans certains cas, des partis pris (au sens neutre du terme) des participants. Toutefois, d'autres choix de politique pourraient être valables et il y a eu des divergences d'opinion marquées au sein du groupe de travail en ce qui concerne certains aspects de plusieurs recommandations. Le groupe de travail n'a pas essayé de rechercher l'unanimité, s'efforçant plutôt de parvenir à une décision consensuelle. Les points de vue fortement affirmés de certains membres n'ont pas été retenus.
Deux membres du groupe de travail, qui sont des universitaires respectés, ont formulé des préoccupations idéologiques qui leur apparaissaient si importantes qu'ils ont préféré se démarquer et nous en avons fait état dans le présent rapport.
En outre, nous avons laissé de côté certains aspects de la faillite personnelle, au Canada, en raison du manque de temps ou du manque de recherche adéquate ou, dans certains cas, des deux. Par exemple, le groupe de travail a reconnu qu'il y aurait lieu d'examiner et d'évaluer les pratiques d'octroi du crédit au Canada, et il a désigné un groupe d'étude chargé de se pencher sur ces questions, mais il lui est apparu impossible de formuler des recommandations sans des recherches et une étude plus approfondies. Ces recherches et cette étude se poursuivent. Le Canada a la chance de disposer de plusieurs universitaires fort compétents qui consacrent la plus grande partie de leur temps à la recherche et explorent des solutions de rechange dans le domaine de la faillite et de l'insolvabilité personnelles. Le Bureau du surintendant des faillites stimule, encourage et, dans certains cas, finance des études statistiques. D'autres établissements appuient également activement la recherche.
Les contributions faites par ces recherches aux écrits sur la question et à la réflexion critique sur ce domaine du droit continuent d'être un outil d'importance capitale pour favoriser le changement lorsque celui-ci s'impose et pour valider le statu quo lorsqu'il y a lieu de le faire. Près de 100 000 personnes au Canada font faillite chaque année, ce qui a une incidence non seulement sur les personnes en question mais également sur leur famille. On peut donc supposer que des centaines de milliers de Canadiens subissent les effets préjudiciables de la faillite et sont touchés personnellement par ce genre de situation chaque année, au sein du cercle familial. Ce chiffre ne diminuera pas vraisemblablement à court terme et, selon la situation économique, il pourrait même augmenter. Il est par conséquent essentiel que le processus de modification ne soit pas considéré comme un objectif à atteindre, pour être ensuite abandonné. Au contraire, l'amélioration et le raffinement de la Loi devraient être un processus continu. Pour un si grand nombre de Canadiens, les difficultés financières, quelle que puisse être leur origine, constituent de graves enjeux qui les minent et ont un effet déstabilisant sur leur famille. Selon le groupe de travail, ils ont le droit d'avoir le meilleur système possible et, pour ce faire, il faut s'interroger en permanence et rationaliser la procédure afin de changer judicieusement la loi lorsque le changement est pertinent.
Le groupe de travail a examiné et utilisé comme point de comparaison certains systèmes étrangers de faillite personnelle, notamment ceux de l'Australie, du Royaume-Uni et des États-Unis. Les membres connaissent particulièrement bien le système américain, puisque les États-Unis sont le partenaire commercial le plus important du Canada. Toutefois, bien que les faillites commerciales au Canada comportent fréquemment un élément transnational, qui devient de plus en plus courant et nécessite, par conséquent, davantage d'harmonisation entre certains aspects des systèmes canadien et américain, cette harmonisation est moins nécessaire pour les faillites personnelles, car il est rare que les activités financières de ces faillis s'étendent au-delà des frontières. En outre, il existe d'importantes divergences idéologiques, de nature politique, entre les points de vue canadien et américain sur l'insolvabilité personnelle. Les amendements au code de la faillite des États-Unis de 1978, actuellement à l'étude, sont considérés par les experts américains comme étant de nature plus répressive que la démarche canadienne. Ces dernières années, on considère généralement, au Canada, que l'insolvabilité personnelle, à de rares exceptions près, constitue un phénomène plutôt socio-économique, donnant souvent naissance à des considérations qui sont de nature sociale, alors que les faillites commerciales sont plutôt de nature juridique et économique.
Les considérations applicables aux faillites personnelles sont si différentes de celles applicables aux faillites commerciales que bon nombre de membres du groupe de travail auraient voulu qu'on les regroupe dans un chapitre, voire une loi. Cette séparation, de l'avis de ces membres, mettrait l'accent sur les différences fondamentales entre l'insolvabilité personnelle et l'insolvabilité commerciale et mettrait en lumière les considérations différentes d'ordre politique applicable à chaque catégorie. Toutefois, en raison des difficultés techniques inhérentes à l'établissement de chapitres distincts sans introduire des renvois complexes, et du fait que le Canada a déjà trois lois différentes portant sur l'insolvabilité et la faillite, la majorité des membres du groupe de travail ont abandonné l'idée de séparer les dispositions relatives à la faillite personnelle de celles applicables à la faillite commerciale.
Nul doute que certaines des recommandations présentées dans le rapport ne jouissent pas de l'appui unanime de tous les participants. Le contraire serait étonnant, puisque nombre de changements suggérés visent à assurer un équilibre entre des intérêts contraires. Certains intervenants se demanderont pourquoi des changements qu'ils jugeaient pertinents ne sont pas proposés. D'autres seront peut-être d'avis que des changements plus radicaux sont indiqués. Selon le point de vue de la personne, toutes ces opinions peuvent être pertinentes. Mais en dernière analyse, ce qui est pertinent c'est d'essayer de trouver le meilleur équilibre possible entre des intérêts divergents. Le groupe de travail est convaincu qu'avec l'adoption de ses recommandations, cet équilibre sera atteint, mais il est conscient qu'il s'agit d'un processus permanent.
Présenté respectueusement,
Le groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle
Le 7 août 2002
Le présent document a pour objet d'établir le mandat du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle.
Outre l'examen quinquennal prévu en 2002, lorsque le Bureau du surintendant des faillites (BSF) devra rendre compte au Parlement des résultats des réformes de 1997, c'est la montée en flèche du nombre de faillites de consommateurs au fil des ans qui constitue l'élément le plus important à l'origine de la création du groupe de travail.
Le principal objet de la législation sur la faillite demeure la protection et la maximisation de la réalisation des actifs insolvables par la liquidation des biens du débiteur et le partage rapide et efficace du produit en découlant entre ses créanciers. Toutefois, dans la société actuelle où des débiteurs-consommateurs ne possèdent guère de biens à liquider, l'objet de la législation sur la faillite revêt une nouvelle signification. L'insolvabilité et les faillites de particuliers devraient surtout être examinées d'un point de vue socio-économique plutôt que d'un point de vue strictement légal.
La Loi constitutionnelle de 1867 confère au Parlement la compétence exclusive de promulguer les lois concernant « la faillite et l'insolvabilité ». La première loi canadienne sur l'insolvabilité, qui s'applique uniquement aux commerçants, est adoptée en 1869, puis remplacée par une autre loi en 1875.
Largement critiquée, la loi de 1875 est abrogée en 1880. Entre 1880 et 1919, aucune loi concernant la faillite en général n'est en vigueur au Canada. En 1882, le gouvernement fédéral adopte une loi sur la liquidation s'appliquant aux sociétés commerciales et autres personnes morales insolvables1. Le premier projet de loi sur l'insolvabilité, promulgué en 1919, s'inspire grandement de la British Bankruptcy Act de 1883 et de sa structure générale. En 1949, la loi de 1919 fait l'objet d'une réforme approfondie. Un comité d'étude fédéral présente en 1970 des propositions visant à réviser plusieurs aspects de la loi. Toutefois, malgré le dépôt de plusieurs projets de loi entre 1975 et 1984, les propositions ne sont jamais adoptées.
En 1992, plusieurs modifications importantes sont apportées dans le but de rationaliser la procédure de faillite. On dissocie alors cette procédure de la procédure judiciaire en introduisant le principe de libération automatique des particuliers faillis dans le cas d'une première faillite pourvu que ni le syndic, ni le surintendant, ni les créanciers ne s'y opposent. Ces modifications reconnaissent en outre la nécessité de réhabiliter les débiteurs en introduisant la notion de services de consultation. De plus, en introduisant un régime distinct pour la présentation de propositions de consommateurs, les modifications offrent aux débiteurs insolvables une solution autre que la faillite.
Les modifications de 1997 visent principalement à amener les débiteurs ayant un revenu élevé à prendre conscience de leurs responsabilités en modifiant en profondeur le traitement des faillites de consommateurs. L'ancien article 68 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (LFI) est abrogé et remplacé par le nouvel article 68, lequel exige que les débiteurs à revenu élevé, entre le moment de la faillite et celui de leur libération, versent leur revenu excédentaire selon les normes établies par le surintendant des faillites. La notion d'obligation pour les débiteurs à revenu élevé de verser leur revenu excédentaire au syndic constitue un moyen d'empêcher la libération automatique des faillis n'ayant pas respecté les exigences de paiement prévues à l'article 68.
En mai et en juin 1999, dans le cadre de tables rondes tenues dans six villes du Canada, les principaux intervenants du régime d'insolvabilité sont invités à exprimer leur opinion sur les points forts et les points faibles du régime et sur les améliorations que l'on pourrait y apporter pour le rationaliser et le rendre plus efficace et efficient. Les résumés des différentes tables rondes, publiés à l'automne 1999, sont diffusés dans le site Web du BSF (http://osb-bsf.ic.gc.ca). Différentes suggestions sont alors formulées, par exemple :
Alors que le gouvernement actuel et les économistes avaient prévu qu'une économie vigoureuse se traduirait par une diminution du nombre de faillites personnelles à la fin des années 1990, le taux réel de faillites de consommateurs a en réalité atteint un sommet en 1997 et il n'a que légèrement diminué depuis2.
Dans l'ensemble, le nombre de faillites a augmenté de façon exponentielle au cours des 35 dernières années. En 1966, les faillites commerciales représentaient la majorité (59,3 p. 100) des faillites enregistrées au Canada, tandis que les faillites de consommateurs en représentaient 40,7 p. 100. Cinq ans plus tard, soit en 1971, les faillites de consommateurs étaient passées à 50,5 p. 100, contre 49,5 p. 100 pour les faillites commerciales. Cette tendance s'est maintenue tout au long des années 1970, 1980 et 1990, si bien que les faillites de consommateurs ont atteint en 1999 un sommet sans précédent, soit 87,9 p. 100 des faillites enregistrées. Selon les récentes statistiques publiées par la Banque du Canada, le ratio dettes-revenu (pourcentage de la dette au foyer par rapport au revenu personnel disponible) a atteint 99,9 p. 100 en 1999.
Il ressort des profils actuels de l'insolvabilité que les propositions de consommateurs sont en progression, tandis que les faillites semblent demeurer stables malgré les fluctuations de l'économie. D'après les statistiques, 72 997 Canadiens ont déclaré faillite en 1999; 90 p. 100 ou plus des faillis consommateurs font état d'un actif totalisant moins de 10 000 $, ce qui les rend admissibles à l'administration sommaire de l'actif; 85 p. 100 ou plus touchent un revenu ne dépassant pas le revenu minimal nécessaire au maintien d'un niveau de vie raisonnable à partir duquel ils seraient tenus de verser des paiements au syndic en vertu de l'article 68 de la LFI.
Le groupe de travail a été créé pour examiner les dispositions de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité se rapportant aux faillites de consommateurs. Sans idées préconçues, il explorera différents modèles de procédures d'insolvabilité personnelle permettant de corriger les lacunes perçues du régime canadien d'insolvabilité. Ce faisant, il examinera les attentes des débiteurs et des créanciers, tout en tenant compte de l'intérêt public.
Le groupe de travail a pour objectif de formuler des recommandations en vue de l'adoption d'une nouvelle procédure d'insolvabilité ou de l'intégration de mécanismes de redressement de la procédure actuelle pour faire en sorte :
En outre, le groupe de travail déterminera les modifications législatives qu'il serait souhaitable d'apporter concernant le régime canadien d'insolvabilité et recommandera des mécanismes appropriés pour faire en sorte :
Le groupe de travail respecte les critères suivants au moment d'établir ses priorités et d'évaluer les recommandations finales :
Équité : Il s'agit de la façon dont le régime est perçu par les gens de l'extérieur, qu'ils le connaissent bien ou non.
Accessibilité : Au Canada, le fait de pouvoir déclarer faillite est un droit et non un privilège. C'est pourquoi le régime de faillite et d'insolvabilité doit être simple et accessible à peu de frais dans toutes les régions du pays.
Prévisibilité : Les débiteurs et les créanciers doivent comprendre le résultat de la procédure cohérence.
Efficience : Le coût social et le coût économique du régime sont directement liés à son efficience. On peut donc se demander si un syndic doit participer à tous les aspects de la procédure d'administration de l'insolvabilité personnelle et, de façon plus générale, si le régime dans son ensemble est aussi efficient qu'il pourrait ou qu'il devrait l'être.
Responsabilité : Le régime devrait inciter les débiteurs et les organismes de crédit à prendre leurs responsabilités sur le plan social et économique.
Compréhension : Il s'agit de déterminer si la procédure et ses résultats sont transparents et faciles à comprendre, tant pour le débiteur que pour le créancier.
Efficacité : Il faut s'assurer que le régime d'insolvabilité répond adéquatement aux besoins perçus de ses utilisateurs et qu'il tient compte du tissu socio-économique du pays.
L'équipe du groupe de travail
Le groupe de travail se compose d'un grand éventail d'intervenants qui portent un vif intérêt au domaine, c'est-à-dire des créanciers ou leurs représentants, des représentants des débiteurs, des membres de l'appareil judiciaire, des syndics, d'un membre de l'Association canadienne des professionnels de l'insolvabilité, ainsi que de plusieurs universitaires spécialistes du droit de la faillite.
Le groupe de travail se réunira quatre ou cinq fois au cours de l'année à venir. Les cinq sous-groupes qui ont été formés se pencheront sur des sujets précis et formuleront des recommandations à cet égard au groupe de travail.
Un rapport détaillé du groupe de travail présentera de solides justifications à l'appui des modifications recommandées à la LFI ainsi qu'aux règles et instructions connexes, et tout autre aspect du régime d'insolvabilité. En outre, le rapport servira en quelque sorte de point de référence, car il sera utilisé pour établir la position du Canada et comparer le régime canadien d'insolvabilité avec celui de l'Australie, des États-Unis et du Royaume-Uni en tenant compte de la politique et des éléments fondamentaux qui caractérisent le régime d'insolvabilité personnelle au Canada. Le rapport final sera publié pour susciter un nouveau débat public avant la présentation des recommandations finales au Ministre.
Les membres du groupe de travail s'acquitteront de leurs tâches bénévolement. Toutefois, le BSF remboursera leurs dépenses.
Maître Yoine Goldstein
Goldstein, Flanz & Fishman
Montréal (Québec)
M. Jonathan R. Smith
Vice-président, Recouvrement CIBC
Toronto (Ontario)
M. Raymond Bérubé
Fédération des Caisses populaires
Desjardins du Québec
Lévis (Québec)
M. John Owen
Omega One Limited
Mississauga (Ontario)
Mme Mary Jefferson
Directrice du crédit conseil
Catholic Family Services
Hamilton (Ontario)
M. John D. Eisner
Credit Counselling Canada
Directeur exécutif
Credit Counselling Services of Atlantic Canada Inc.
Saint John (Nouveau-Brunswick)
M. Martin Poirier
Action Réseau Consommateurs
Montréal (Québec)
Mme Hélène Talbot
Association coopérative d'économie familiale du Nord de Montréal
Montréal (Québec)
M. Paul Stehelin
Quispamsis
(Nouveau-Brunswick)
Mme Guylaine Houle
Litwin Boyadjian Inc.
Montréal (Québec)
M. Bob Sanderson
KPMG
Toronto (Ontario)
M. Bob Fontaine
Fontaine & Associates Inc.
Sudbury (Ontario)
M. Paul Goodman
Goodman Associates Incorporated
Halifax (Nouvelle-Écosse)
M. Robert Cordy
PriceWaterHouseCoopers Inc.
Halifax (Nouvelle-Écosse)
M. David Johnson
PriceWaterHouseCoopers
Winnipeg (Manitoba)
M. Jacob Ziegel
Professeur de droit
Université de Toronto
Toronto (Ontario)
M. Iain Ramsay
Professeur de droit
Osgoode Hall Law School
Université York
Toronto (Ontario)
M. Saul Schwartz
School of Public Policy and Administration
Université Carleton
Ottawa (Ontario)
Le juge James Farley
Cour supérieure de justice
Osgoode Hall
Toronto (Ontario)
Le juge Donald Cameron
Palais de justice
Administration des juges
Toronto (Ontario)
M. Robert Klotz
Klotz Associates
Toronto (Ontario)
L'honorable Pierrette Rayle
Cour supérieure du Québec
Palais de Justice
Montréal (Québec)
Le juge David F. Tysoe
Palais de justice
Vancouver (Colombie-Britannique)
Stéphanie Blondin
Jim Buchanan
Lynda Colley
Evan DeBoice
Ellen Henderson
Jean-Guy Lafleur
Michel Ohayon
Chantal Quesnel
Micheline Raymond
Maurice Roy
David Stewart
1 Houlden et Morawetz, Bankruptcy and Insolvency Law of Canada, 3e édition, Carswell, p. 1-1.
2 Plusieurs études menées en 1998 et 1999 présentent diverses explications ou analyses à l'égard de la montée en flèche du nombre de faillites de consommateurs voir « Symposium Consumer Bankruptcies in a Comparative Context », Osgoode Hall Law Journal, vol. 37, nos1 et 2, printemps et été 1999.
Accord de réaffirmation : Accord en vertu duquel un débiteur réactive une dette d'avant-faillite dont il a été libéré en vertu de l'article 178 de la Loi, en s'engageant à l'égard d'un créancier.
Administrateur de propositions de consommateurs : Syndic ou autre personne chargée, par le surintendant des faillites, de l'administration des propositions de consommateurs.
Administration sommaire : Procédure simplifiée pour les petits actifs où le failli n'est pas une personne morale et où les biens réalisables du failli ne dépassent pas 10 000 $. En général, dans ces dossiers, le séquestre officiel n'exigera pas du syndic le dépôt d'un cautionnement; aucun avis de faillite ne sera publié dans le journal local; on convoquera la première assemblée des créanciers uniquement à la demande du séquestre officiel ou des créanciers détenant dans l'ensemble 25 p. 100 de la valeur des réclamations prouvées; aucun inspecteur n'est nommé; les cessions conjointes sont autorisées; dans certains cas, les syndics peuvent utiliser un seul compte en fiducie; un seul avis peut être publié pour la faillite et la libération automatique imminente, ou la demande de libération du failli; les comptes du syndic sont taxés uniquement sur demande ou en cas d'objection; et le syndic peut être libéré sans avoir à comparaître devant le tribunal. Les honoraires et débours du syndic sont prescrits.
Biens : Biens de toute nature, meubles ou immeubles, en droit ou en équité, qu'ils soient situés au Canada ou ailleurs. Leur sont assimilés les sommes d'argent, marchandises, droits incorporels et terres, ainsi que les obligations, les servitudes et toute espèce de droits, d'intérêts ou de profits, présents ou futurs, acquis ou éventuels, dans des biens, ou en provenant ou s'y rattachant.
Bilan : Aux premières étapes, le débiteur est tenu de déposer un document sous serment appelé Bilan, où il fait état, en la forme prescrite, de ses actifs et de ses obligations, indiquant ses biens, le nom et l'adresse de tous ses créanciers et les montants de leurs réclamations respectives, ainsi que la nature de chacune d'elles, que ces réclamations soient garanties, privilégiées ou non garanties. Le Bilan fournit également de l'information sur la situation du débiteur et sur son budget. Conformément au paragraphe 19(3), le syndic doit vérifier ce document.
Cession : Cession déposée chez le séquestre officiel par les personnes insolvables qui cèdent l'ensemble de leurs biens au profit des créanciers.
Cession conjointe : Il est stipulé à l'alinéa 155 f) de la Loi que dans les circonstances prévues par les instructions du surintendant, les actifs de certaines personnes peuvent être traités comme un seul actif lorsque la nature des rapports qui existent entre elles le justifie.
Dévolution des biens au syndic : Tous les biens appartenant au failli ou dans lesquels le failli peut détenir un intérêt financier, sauf certaines exceptions, sont cédés au syndic de faillite.
Cote de solvabilité : Les agences d'évaluation du crédit recueillent de l'information sur la situation financière du consommateur, puis vendent cette information à leurs clients. La cote de solvabilité est fixée par les créanciers, qui transmettent cette information aux agences d'évaluation. Il s'agit d'une échelle de notation de neuf points, où 1 indique que le paiement a été effectué à temps, 2 que le paiement a été effectué avec un retard de 30 à 60 jours, et 9 une créance irrécouvrable ou dont le recouvrement est exigé. Cette cote s'applique aussi à la faillite.
Créancier : Personne, établissement ou entreprise à qui l'on doit de l'argent. Les créanciers appartiennent à trois catégories : garantis, privilégiés et non garantis.
Créanciers garantis : Créanciers qui ont pris des mesures pour se protéger et qui détiennent une hypothèque, un nantissement, un privilège ou un instrument similaire sur ou contre les biens du débiteur ou du failli. S'ils ne sont pas payés, ils peuvent mettre à exécution leur garantie en récupérant les biens sur lesquels ils détiennent une garantie.
Créancier non garanti : Créancier qui ne dispose d'aucune garantie sur la créance qui lui est due.
Créancier privilégié : Créancier dont la créance n'est pas garantie, mais qui est privilégié en vertu de l'article 136 de la Loi. Mentionnons à titre d'exemple les salaires et la réclamation pour des montants périodiques de pension alimentaire dus pendant l'année précédant la date de la faillite qui sont payables, plus tout montant forfaitaire également payable.
Débiteur : Est considéré comme un débiteur toute personne insolvable ou toute personne qui, à l'époque où elle a commis un acte de faillite, résidait au Canada ou y exerçait des activités. S'entend en outre, lorsque le contexte l'exige, d'un failli.
Débiteur-consommateur : Dans le contexte des propositions de consommateurs, personne physique qui est un failli ou est insolvable et dont la somme des dettes, à l'exclusion de celles qui sont garanties par sa résidence principale, n'excède pas 75 000 $ ou tout autre montant prescrit.
Dettes non annulées par l'ordonnance de libération : En vertu du paragraphe 178(1) de la Loi, une ordonnance de libération ne libère pas le failli de toute indemnité accordée en justice pour agression; de toute dette ou obligation pour pension alimentaire ou au profit d'un conjoint ou d'un enfant; de toute dette résultant de la fraude; de toute amende imposée par le tribunal; ou de toute dette ou obligation découlant d'un prêt étudiant lorsque la faillite est survenue alors que le failli était encore étudiant ou dans les dix ans suivant cette date.
Dividende : Part du produit qui revient aux créanciers, le cas échéant, par suite de la réalisation des biens du failli et est réparti au prorata par le syndic.
Entrevue d'évaluation : Entrevue effectuée par un syndic ou administrateur de propositions de consommateurs avant la déclaration de faillite ou le dépôt d'une proposition de consommateur. Elle a pour but d'évaluer la situation financière du débiteur, de lui expliquer les options possibles et de discuter des avantages et des inconvénients de chaque option ainsi que des conséquences de son choix.
État définitif des recettes et des débours : Ce document, préparé par le syndic, doit renfermer le montant exact de toutes les sommes reçues par le syndic pour les biens du failli, le montant des intérêts reçus par le syndic, les débours et les dépenses et la rémunération demandée par le syndic, ainsi que des détails complets, la description et la valeur de tous les biens du failli qui n'ont pas été vendus ou réalisés, expliquant pourquoi le bien n'a pas été vendu ou réalisé et comment on en a disposé. Une fois approuvé par les inspecteurs, le document est soumis au surintendant à des fins de commentaires.
Failli : Personne qui a fait une cession ou contre laquelle une ordonnance de séquestre a été rendue. Peut aussi s'entendre de la situation juridique d'une telle personne.
Instruction : En vertu du paragraphe 5(4) de la Loi, le surintendant est habilité à publier des instructions. Toute personne à qui s'adresse l'instruction doit s'y conformer. Des instructions peuvent porter sur la consultation, l'administration de la Loi, toute décision du surintendant en vertu de la Loi, le respect des buts et dispositions de la présente Loi et des Règles générales, les critères que doit appliquer le surintendant pour déterminer si une licence de syndic doit être délivrée à une personne et régir la qualification et activités des syndics; et la forme de tout document prescrit par la Loi et l'information que ces documents doivent renfermer. En vertu du paragraphe 68(1), le surintendant est tenu de fixer, par instruction, les normes visant l'établissement du montant du revenu total du failli qui excède ce qui est nécessaire au maintien d'un niveau de vie raisonnable.
Lettre de commentaires : S'entend de la lettre du surintendant commentant l'État définitif des recettes et des débours du syndic. Lorsqu'il faut taxer l'État définitif des recettes et des débours, cette lettre doit être soumise par le syndic au taxateur.
Libération automatique : Les particuliers qui font faillite pour la première fois bénéficient d'une libération automatique neuf mois après la faillite sauf si un créancier, le syndic ou le surintendant des faillites s'y oppose.
Libération du failli : Pour les faillis non admissibles à la libération automatique, le syndic est tenu, dans les 12 mois suivant la date de la faillite, de demander au tribunal une convocation pour l'audition de la demande de libération.
Le fonctionnaire du tribunal peut faire son choix parmi plusieurs options. À l'audition, le tribunal décide de reporter l'audition à une date ultérieure, de refuser la libération ou de rendre l'une des ordonnances suivantes :
Localité du débiteur : Lieu principal où :
Médiation en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité : La médiation est une méthode de résolution de conflits entre deux ou plusieurs particuliers. Elle est plus rapide et moins onéreuse que la décision officielle des tribunaux. Elle permet aux gens touchés par la faillite de participer directement à la décision quant à la façon de régler leur désaccord. En cas de faillite, on peut avoir recours à la médiation pour régler deux types de différends :
Date de la faillite : La faillite ou la mise en faillite d'une personne survient à la date :
Personne insolvable : Personne qui n'est pas en faillite et qui réside au Canada ou y exerce ses activités ou qui a des biens au Canada et dont les obligations, constituant à l'égard de ses créanciers des réclamations prouvables aux termes de la Loi, s'élèvent à 1000 $ et, selon le cas :
Première assemblée des créanciers : La première assemblée des créanciers n'est pas obligatoire en cas de proposition de consommateur ou d'administration sommaire d'une faillite, mais on convoque une assemblée à la demande du séquestre officiel ou des créanciers détenant dans l'ensemble au moins 25 p. 100 de la valeur des créances prouvées.
En cas de faillite, toute assemblée convoquée a pour but d'examiner la situation du failli, de confirmer la nomination du syndic ou de son remplaçant, de nommer des inspecteurs, le cas échéant, et de donner au syndic des directives jugées pertinentes par les créanciers relativement à l'administration de l'actif.
En cas de proposition, toute assemblée convoquée a pour but d'examiner les modalités de la proposition, d'en discuter et de se prononcer à son sujet.
Preuve de réclamation : Formulaire prescrit envoyé en même temps que l'avis de faillite ou l'avis de proposition. Les créanciers sont tenus de remplir le formulaire et de le renvoyer au syndic ou à l'administrateur de la proposition de consommateur afin de prouver leur réclamation. Si une assemblée des créanciers est convoquée, les créanciers souhaitant voter à l'assemblée doivent présenter leur preuve de réclamation au syndic avant l'heure d'ouverture prévue de l'assemblée.
Proposition de consommateur : Proposition faite par un débiteur-consommateur à ses créanciers au titre de la Section II de la Partie III de la Loi en vue d'un concordat, d'un atermoiement ou d'un accommodement.
Rachat de la garantie : En vertu du paragraphe 128(3) de la Loi, le syndic peut racheter une garantie sur paiement au créancier garanti de la créance ou de la valeur de la garantie telle qu'elle est fixée par le créancier garanti dans la preuve de garantie. Avant de le faire, le syndic s'assurera que cette mesure est au bénéfice de la masse.
Rapport du syndic sur la demande de libération du failli (également connu sous le nom de rapport en vertu de l'article 170) : Le syndic doit préparer en la forme prescrite un rapport sur la situation du failli, les causes de la faillite, la manière dont le failli s'est acquitté de ses obligations en vertu de la Loi ou a obéi aux ordonnances du tribunal et la conduite du failli avant et après l'ouverture de la faillite. Il doit également y faire état de la condamnation éventuelle du failli pour toute infraction en vertu de la Loi, et de tout autre fait, question ou circonstance qui justifierait le refus, par le tribunal, d'une ordonnance de libération sans condition. Ce rapport doit être approuvé par les inspecteurs ou préciser les raisons pour lesquelles les inspecteurs ne l'ont pas approuvé. Le syndic doit envoyer copie du rapport aux créanciers qui en ont fait la demande.
Réclamation prouvable : Toute réclamation ou créance pouvant être prouvée dans des procédures intentées sous l'autorité de la Loi par un créancier.
Région désignée : On retrouve cette expression dans l'instruction 6R, qui porte sur l'évaluation d'un débiteur particulier. Par « région désignée », on entend toute région qui est désignée de temps à autre par le surintendant adjoint de division comme ne disposant d'aucun syndic pour effectuer les évaluations en personne et dans laquelle aucun syndic d'une autre région ne désire se rendre pour effectuer les évaluations en personne.
Rémunération du syndic : En cas d'administration sommaire et de proposition de consommateur, les honoraires et débours du syndic ou de l'administrateur sont établis par les Règles sur la faillite et l'insolvabilité.
Dans tous les autres cas, la rémunération du syndic est régie par les dispositions de l'article 39 de la Loi. Il est stipulé au paragraphe 39(1) que la rémunération du syndic est celle que lui vote une assemblée de créanciers par résolution ordinaire. Lorsque la rémunération n'a pas été établie en vertu du paragraphe 39(1), le paragraphe 39(2) stipule que la rémunération ne peut dépasser 7,5 p. 100 du montant qui subsiste de la réalisation des biens du débiteur après que les réclamations des créanciers garantis ont été honorées ou acquittées. Le paragraphe 39(5) autorise le tribunal à augmenter ou à réduire la rémunération.
Revenu excédentaire : Paiements que doit effectuer, le cas échéant, un failli au syndic en vue de la distribution entre les créanciers. Le montant du paiement est fixé par le syndic, au début de la faillite, compte tenu des normes établies par le surintendant et de la situation personnelle et familiale du failli. Ce montant peut être modifié en cas de changements importants dans la situation personnelle ou familiale du failli, ou si le séquestre officiel le recommande.
Revenu total : Aux fins de l'établissement du revenu excédentaire, le revenu total inclut tous les revenus d'un failli, quelles que soient leur source ou leur nature, qu'ils soient exemptés ou non.
Séquestre officiel : Employé fédéral du Bureau du surintendant des faillites et fonctionnaire du tribunal qui exerce des fonctions spéciales en vertu de la Loi. Mentionnons entre autres parmi les obligations prévues par la loi : recevoir les documents pour le dépôt de propositions et les faillites, interroger les faillis sous serment et présider les assemblées de créanciers.
Services de consultation : La Loi exige que les particuliers qui font une proposition de consommateur ou déclarent faillite bénéficient de services de consultation. Selon l'instruction du surintendant, les consultations se font en deux séances. Au cours de la première, on fournit de l'information aux débiteurs sur la gestion du budget, les dépenses et les habitudes de magasinage, les signes avant-coureurs des difficultés financières et l'obtention et l'utilisation du crédit. Ensuite, on aide les débiteurs à mettre en évidence et à comprendre les causes de leur insolvabilité ou de leur faillite, puis à établir un plan de redressement en les aidant à mettre au point des recommandations et des solutions de rechange en vue d'un plan d'action financier.
Seuil de faible revenu : Chaque année, Statistique Canada analyse les données sur les dépenses des familles pour établir le seuil de faible revenu en deçà duquel ces dernières consacreront probablement une part plus importante du revenu que ne le ferait la famille moyenne aux nécessités de base que sont la nourriture, le logement et les vêtements. Le Bureau du surintendant des faillites emploie ce seuil pour établir les normes sur le revenu excédentaire.
Surintendant des faillites : Fonctionnaire, nommé par le gouvernement fédéral, qui surveille l'administration de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité au Canada. Le surintendant supervise l'administration des actifs en cas de faillite, les réorganisations commerciales, les propositions de consommateurs et les mises sous séquestre; il tient à jour un registre des procédures de faillite et d'insolvabilité qui est accessible au public; il enregistre les plaintes faisant état de méfaits de la part de personnes participant à la procédure d'insolvabilité et enquête sur ces plaintes; il délivre les licences aux syndics du secteur privé qui administrent les dossiers et nomme les administrateurs des propositions de consommateurs; il établit et applique les normes professionnelles en vigueur pour l'administration des dossiers et veille à leur application.
L'adresse du site Web du surintendant est (http://osb-bsf.ic.gc.ca).
Suspension des procédures : Sans l'autorisation du tribunal, lors du dépôt d'une proposition, d'un avis d'intention de faire une proposition ou d'un avis de faillite, les créanciers ayant une réclamation prouvable n'ont aucun recours contre le débiteur ou contre ses biens et ne peuvent intenter ou poursuivre aucune action, exécution ou autre procédure en vue du recouvrement de réclamations prouvables en matière de faillite avant que :
Syndic de faillite : Personne à laquelle le surintendant des faillites a délivré une licence pour administrer les propositions et les faillites. Le syndic représente les créanciers dans le dossier et est un fonctionnaire du tribunal. Il est tenu de fournir de l'information et des conseils au débiteur sur les procédures de faillite et de proposition et de s'assurer que les droits des débiteurs et créanciers sont respectés.
Tribunal : En général, désigne le tribunal de la faillite où un juge ou un registraire se prononcera sur la demande de libération du failli et d'autres questions d'insolvabilité.
Trois membres du groupe de travail ont soumis des désaccords au rapport. Le premier désaccord fait l'objet de la note 31 en bas de page et les deux autres sont reproduits ci-après.
Le rapport du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle renferme certaines recommandations fort utiles en ce qui concerne le système de faillite personnelle au Canada, malgré les contraintes d'un délai irréaliste pour la présentation du rapport et l'absence de budget ou de plan de recherche. En raison de la nature de ces contraintes, le groupe de travail n'a ni été en mesure d'analyser certains enjeux au cur du système de faillite actuel ni d'évaluer l'efficience et l'équité d'importants changements apportés au système d'insolvabilité personnelle par les réformes de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (LFI) en 1997.
Le Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle tire sa raison d'être des modifications à la LFI apportées en 1992 et 1997. Les changements essentiels apportés en 1992 sont l'introduction de la libération automatique des débiteurs, l'imposition aux débiteurs de séances de consultation obligatoires et l'introduction de la proposition de consommateur destinée à inciter les particuliers à éviter la faillite en présentant à leurs créanciers une proposition de remboursement d'une partie ou de l'ensemble de leurs dettes. Les modifications de 1997 ont introduit les paiements obligatoires pendant neuf mois pour les débiteurs disposant d'un « revenu excédentaire »1, avec possibilité de prolongation jusqu'à 21 mois. La réforme visait également à inciter les débiteurs ayant un « revenu plus élevé » à choisir la proposition de consommateur leur permettant de faire des remboursements sur une plus longue période (généralement trois ans). Le Bureau du surintendant des faillites a également augmenté de façon appréciable les honoraires payables aux syndics pour l'administration d'une proposition, ce qui incite par conséquent les syndics à recommander les propositions. L'introduction d'une période de deux ans au cours de laquelle les titulaires d'un prêt étudiant ne peuvent être libérés de leur dette a été un autre changement important. Cette période a été portée à dix ans dans la loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 1998. Les réformes de 1997 ont été motivées par l'idée qu'il était « trop facile » de déclarer faillite et que les débiteurs ayant un revenu élevé étaient en mesure de profiter du système. Ces arguments ont été avancés principalement par les créanciers. On n'a pas mené de recherches systématiques pour étayer ces affirmations, on a seulement attiré l'attention sur l'augmentation du taux de faillite au cours des années 1990.
Le processus qui a conduit aux réformes de 1997 a fait l'objet de critiques importantes, en particulier au cours de l'adoption par le Parlement des modifications de 1997. Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a attiré l'attention sur le manque de données, qui faisait qu'on ne pouvait disposer des éléments de base pour alimenter un débat valable sur la politique. Il a fait observer qu' « en ce qui concerne les faillites de consommateurs, il n'existe tout simplement pas de base de données suffisante pouvant servir à l'élaboration d'une politique bien fondée. Industrie Canada a modestement amorcé une collecte de renseignements, mais on est encore loin du compte ». Le Comité a critiqué également le fait que les propositions semblaient le résultat de « compromis » entre des « initiés » qui étaient des experts techniques, et il a attiré l'attention sur l'absence de représentants d'intérêts importants. Le Comité espérait qu'Industrie Canada entreprendrait une étude exhaustive de la faillite des consommateurs qui permettrait une saine évaluation de la politique publique concernant la faillite des consommateurs et des étudiants2.
Compte tenu de ce contexte, la mise sur pied du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle à l'automne 2000 semblait opportune. L'idée d'un groupe de travail suppose l'exploration systématique d'un domaine et le regroupement des études et des analyses théoriques portant sur les questions d'intérêt primordial pour ce domaine, en l'occurrence la faillite des consommateurs. Le Groupe de travail sur l'avenir du secteur des services financiers canadien est un bon exemple de ce type d'engagement. Il n'y a pas eu d'examen systématique de la faillite des consommateurs au Canada depuis le comité Tassé en 1970 et l'on a pu observer des changements majeurs dans les pratiques d'octroi du crédit, de même que dans le filet de sécurité sociale, depuis cette époque. Parmi les questions sur lesquelles un groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle aurait pu se pencher, mentionnons : qu'est-ce que la faillite personnelle au début du XXIe siècle : s'agit-il d'une forme de protection du consommateur, d'une substitution à l'assistance sociale, d'un remède pour les créanciers? et quelles sont les implications de l'adoption de modèles particuliers au niveau de la structure et du libellé de la LFI? Dans quelle mesure la faillite se compare-t-elle à d'autres stratégies face au problème social et économique du surendettement, tel que le rôle des organismes de conseils en crédit? Quel est le rôle de la faillite au sein du système actuel d'octroi du crédit, notamment en raison du développement de systèmes complexes de cotes de solvabilité permettant aux créanciers institutionnels de prédire avec une certaine exactitude le risque des différents marchés de consommation? Quel est l'équilibre optimal entre les propositions de consommateurs et les faillites et quelle a été l'incidence des modifications de 1997? La mise en pratique des propositions de consommateurs donne-t-elle à penser qu'elles répondent aux objectifs définis en 1992? Le système d'administration de la faillite des consommateurs au Canada, constitué d'un système de prestation de services privés réglementé par l'État est-il efficient? Et il y aurait eu lieu d'intégrer à cette problématique la question de l'accès à la faillite et de se demander si le système canadien, unique en son genre, qui permet au syndic de représenter à la fois les créanciers et les débiteurs, est souhaitable.
De façon à répondre aux questions susmentionnées, il est nécessaire d'entreprendre a) une recherche théorique explorant certains des principaux concepts du droit actuel en matière d'insolvabilité personnelle, b) des analyses économiques des différents modèles de faillite et de prestation de services, c) des analyses de données sur le fonctionnement du système actuel, comprenant des entrevues avec des personnes ayant fait l'expérience de la procédure, d) la collecte de données sur la façon dont le public perçoit la procédure de faillite. Une analyse comparative systématique ferait également partie intégrante du processus.
D'après certains des éléments de départ du groupe de travail, on aurait pu penser que cette vaste étude aurait lieu. D'entrée de jeu, le mandat du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle indiquait : « sans idée préconçue, le GTIP explorera différents modèles de procédures d'insolvabilité personnelle permettant de corriger les lacunes perçues du régime canadien d'insolvabilité ». Cependant, ce n'est pas ce qui s'est produit. Les grandes contraintes qui ont pesé sur le groupe de travail étaient inhérentes aux délais irréalistes qui lui étaient impartis pour l'établissement de son rapport et à l'absence de budget et de plan de recherche. Il est vrai que certains travaux de recherche ont été effectués, mais il n'y a pas eu d'orientation générale à cette démarche et on n'a pas non plus essayé d'explorer systématiquement les implications de ces travaux et d'autres études pour les recommandations en matière de politique. Il s'ensuit que la recherche n'a pas éclairé les recommandations, ni fourni de cadre pour analyser l'incidence des recommandations particulières.
À titre d'exemple du caractère contestable de la méthode de travail, mentionnons l'importante question de l'équilibre optimal entre les propositions de consommateurs et les faillites et l'évaluation de l'incidence des modifications apportées en 1997. L'une des conséquences des modifications de 1997 a été, selon le Bureau du surintendant des faillites, une augmentation abrupte du nombre de propositions de consommateurs, qui sont passées d'environ 5 p. 100 à 14 p. 100 des dossiers de faillite. Ce phénomène soulève plusieurs questions qui méritent d'être analysées de façon plus approfondie. Premièrement, d'où vient cette augmentation? Est-elle attribuable à la demande des débiteurs ou aux directives des syndics, dans les cas où il existe un choix réaliste entre faillite et proposition, compte tenu de l'importante augmentation des honoraires inhérents à l'administration des propositions? Deuxièmement, les propositions de consommateurs étaient destinées à offrir une solution librement choisie par les personnes qui désiraient éviter la faillite. Or, il est possible qu'elles soient devenues obligatoires pour les débiteurs qui gagnent plus qu'un certain niveau de revenu excédentaire. Cette situation découle de l'introduction en 1997 d'une formule qui constitue en substance un « critère d'évaluation des moyens », lequel détermine l'accès à la faillite individuelle. Troisièmement, il y a la question du succès ou de l'échec des propositions. Il n'existe pas de données nationales fiables sur les taux d'échec des propositions, et les statistiques citées dans le rapport du groupe de travail doivent être considérées avec prudence étant donné qu'elles ne décrivent pas la gamme complète des propositions menées à bien. Il est important de s'interroger sur la raison de l'échec de nombreuses propositions. Parmi les hypothèses, mentionnons le manque de vigilance des syndics, l'optimisme excessif des débiteurs ou le recours aux propositions à des fins parallèles par les débiteurs. Enfin, il semble qu'il y ait un niveau nettement plus élevé de propriétaires de maison parmi les personnes présentant des propositions, comparativement à ceux qui déposent une cession de biens. Cela soulève la question de la capacité des débiteurs qui sont des particuliers à inclure des créanciers garantis dans une proposition, alors que cette possibilité existe pour les entreprises dans le cadre des propositions commerciales. Malheureusement, aucune de ces questions n'a été analysée systématiquement par le groupe de travail.
Une autre question d'importance concerne la prestation de services de faillite aux consommateurs et le rôle du syndic dans la faillite. La croissance de l'industrie des faillites de consommateurs, constituée de syndics de faillite spécialisés dans le traitement des dossiers de faillite des particuliers, est une situation significative qui a fait son apparition au cours des vingt dernières années. Ces firmes, qui peuvent traiter annuellement un grand nombre de faillites de particuliers, font valoir à travers une large publicité l'intérêt de leurs services à des consommateurs potentiels. On n'a guère enquêté sur la question de savoir si cette industrie, qui sert des personnes se trouvant souvent dans une situation vulnérable et n'ayant pas accès à un avis juridique, constitue la méthode optimale pour assurer des services de faillite. Le système canadien met le syndic dans une situation où il est à la fois le conseiller et la personne-ressource d'un débiteur et, parallèlement, le représentant des créanciers. Quand on lit la publicité des syndics, on a l'impression que le syndic est l'ami du débiteur, et pourtant, le syndic est également le représentant impartial des créanciers. Cette ambiguïté place le syndic dans une situation de conflit d'intérêts évident. Reste à déterminer si les risques éventuels d'un tel système reposant sur un conflit d'intérêts inhérent sont compensés par la réduction des coûts des opérations relatives à la procédure de faillite. Malheureusement, le groupe de travail a évité le débat ou l'analyse de ces questions malgré l'existence d'études qui ont soulevé des questions concernant l'efficacité du système actuel.
L'échec du groupe de travail face à cette problématique se rattache à un thème plus vaste, qui a trait à l'incidence de la composition du groupe de travail sur les questions explorées. Il est devenu courant au Canada de créer des « comités d'intervenants » dans des domaines comme celui-ci, auxquels des problèmes techniques se posent. On prend pour hypothèse que ces comités peuvent associer le savoir-faire et la politique en réunissant autour d'une table des groupes d'intérêts et des experts.
Le droit de la faillite semble une branche du droit relativement ésotérique, servie par un groupe spécialisé de professionnels qui administrent les faillites et par un organisme spécialisé indépendant, le Bureau du surintendant des faillites (BSF), qui supervise l'administration de la procédure de faillite. Le citoyen ordinaire n'a qu'une connaissance relativement limitée de la procédure de faillite et ce n'est qu'occasionnellement que des reportages dans les médias parlent des enjeux de la faillite personnelle. Les politiciens élus n'ont guère manifesté d'intérêt, de façon générale, pour la question. Ces caractéristiques, que je viens de mentionner rapidement, créent peut-être une situation où les professionnels exercent une influence appréciable sur le développement du droit. De façon générale, l'élaboration de politiques dans le domaine de la faillite des consommateurs a été le fait de groupes « d'initiés », dont les syndics, le Bureau du surintendant des faillites et les créanciers regroupés en associations constituent les principaux acteurs.
Les comités d'intervenants, composés en grande partie de professionnels du domaine, n'ont pas tendance à remettre en question l'organisation actuelle de services ni à s'attaquer à des intérêts professionnels établis. Cette observation ne vise pas à mettre en doute la bonne foi des professionnels, mais simplement à reconnaître la dynamique de cette forme de processus d'examen. Dans le cas du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle, le fait qu'on a confié les initiatives de réforme au « milieu de l'insolvabilité » a manifestement limité la portée et la vision du rapport du groupe de travail.
Disons, pour conclure, que le groupe de travail a émis certaines propositions fort valables. Toutefois, il serait dommage que le rapport du Groupe de travail sur l'insolvabilité personnelle soit considéré comme répondant aux vux du Comité sénatorial qui, en 1997, jugeait nécessaire la réalisation d'une étude exhaustive sur la faillite des consommateurs et son administration au Canada. Peut-être que la Commission de réforme du droit du Canada serait l'organisme pertinent pour mener une telle entreprise.
J'ai été heureux d'être membre du groupe de travail et j'ai beaucoup retiré de cette expérience. J'ai aussi beaucoup apprécié l'atmosphère détendue des réunions du groupe de travail, le grand tact avec lequel maître Goldstein a présidé ces réunions, et les services de soutien extrêmement utiles assurés par Dave Stewart, surintendant adjoint des faillites, et les autres membres du BSF à Ottawa. Néanmoins, à l'instar de M. Ramsay, j'ai d'importantes réserves à formuler concernant la façon dont le groupe de travail s'est acquitté de son mandat et je ne partage pas les principes qui ont inspiré certaines des décisions fondamentales du groupe.
Si l'on en croit le rapport du groupe de travail, la majorité des membres sont fondamentalement satisfaits de la structure actuelle du système canadien d'administration de l'insolvabilité2 et considèrent qu'il n'a besoin que de légères « modifications » ou de réformes progressives pour mieux fonctionner. Or, nombre de recommandations du groupe de travail sont plus que de simples perfectionnements des dispositions actuelles, mais ce n'est pas là une critique. Bien au contraire. Je ne suis pas non plus en désaccord avec l'idée que le système canadien d'administration de l'insolvabilité des consommateurs est généralement humain et progressiste et qu'il se compare favorablement avec le système d'autres démocraties occidentales ayant une économie de marché3. Cependant, je considère que le rapport du groupe de travail présente au moins une importante lacune et que certaines des recommandations, en particulier celles ayant trait au statut des syndics du secteur privé et au financement de leurs services, posent vraiment problème. C'est sur ces caractéristiques du rapport que je désire en grande partie me pencher dans le reste de l'exposé de mes réserves.
Au cours des 25 dernières années, on a assisté à une augmentation spectaculaire du nombre de faillites de consommateurs au Canada. Dans le monde occidental, le Canada a le privilège discutable de n'être dépassé que par les États-Unis pour le nombre d'insolvabilités de consommateurs, à la fois en nombre absolu et en fonction du nombre d'habitants. En 1966, le nombre d'insolvabilités de consommateurs au Canada était de 1 9034 soit un chiffre inférieur au nombre d'insolvabilités d'entreprises. En 1997, le nombre d'insolvabilités de consommateurs (c'est-à-dire les faillites proprement dit et les propositions de consommateurs) avait atteint le nombre record de 90 034. Il était 45 fois plus élevé. D'après le nombre d'habitants, entre 1976 et 19975, le taux d'insolvabilité des consommateurs canadiens est passé de 0,43 à 3 par 1 000 habitants, soit une augmentation de 600 p. 100 en 21 ans. Le nombre d'insolvabilités de consommateurs a reculé légèrement en 1998 et en 1999, mais a repris sa courbe ascendante en 2000. En 2001, le nombre d'insolvabilités de consommateurs s'établissait à 92 8366. Fait significatif, l'étude des chiffres des années 1990 nous révèle qu'avant 1998, les faillites ont continué de progresser alors que le Canada connaissait une période de mini-boom économique.
D'importantes études empiriques menées au Canada au cours des 20 dernières années nous ont également donné une bonne idée du profil démographique des personnes insolvables, de leur revenu, des structures d'endettement et des facteurs qui contribuent à la ruine des consommateurs. En tête de liste, on retrouve habituellement le chômage et le surendettement des dettes découlant d'emprunts consentis par les institutions financières. Le crédit à la consommation est monté en flèche, passant de 2,5 milliards de dollars en décembre 1956 à 140 milliards de dollars en décembre 1999. Il s'agit d'une augmentation de 5 600 p. 100. Entre 1982 et 1998, on observe un accroissement de près de 300 p. 100 du volume de crédits à la consommation en cours. L'augmentation de l'endettement à partir des cartes de crédit est encore plus considérable, de même que le nombre de cartes de crédit détenues par les Canadiens. On sait qu'il existe une étroite corrélation entre le nombre d'insolvabilités de consommateurs au Canada et le montant des crédits en cours.
Ces statistiques facilement accessibles auraient dû alerter le groupe de travail et l'amener à dépasser la question de l'utilité du système canadien d'insolvabilité pour les consommateurs ayant atteint le point de rupture et à s'interroger également sur ce qu'on devrait ou pourrait faire pour arrêter cette escalade de l'endettement et réduire le nombre d'insolvabilités, et à demander des comptes à l'industrie du crédit pour le rôle qu'elle joue dans le malaise actuel de même qu'en ce qui concerne le coût élevé du crédit à la consommation.
Malheureusement, le groupe de travail ne s'est pas penché avec rigueur sur cette question, laquelle ne figurait même pas dans son cahier des charges original. Et il a fallu attendre plusieurs mois pour qu'il l'inscrive à son programme, et ce, seulement à notre demande. Lorsque la question a été abordée par la suite par le groupe de travail7, elle n'a guère suscité d'intérêt et les réactions ont été mitigées. La seule conséquence a été que le président a établi un groupe d'étude chargé de se pencher sur les problèmes et de présenter un rapport8. À ma connaissance, ce groupe n'a jamais présenté son rapport9.
La seule référence à ce sujet important dans le rapport du groupe de travail est une mention, indiquant avec réticence que le nombre d'insolvabilités de consommateurs a augmenté considérablement, de même que le volume de crédits en cours. Mais on n'exprime aucune préoccupation et on ne formule pas de recommandation.
La passivité du groupe de travail s'écarte fortement des réactions des comités et des groupes de travail antérieurs chargés, dans les années 1990, de se pencher sur les modifications à apporter à la LFI en 1992 et en 1997. Ces groupes avaient exprimé une vive préoccupation face au nombre croissant de faillites de consommateurs mais, de façon erronée à mon avis, ils en avaient imputé la faute aux débiteurs qui ne savaient pas gérer leurs finances et abusaient du système en recourant à la faillite alors qu'ils avaient un revenu excédentaire et auraient pu à leur avis conclure d'autres arrangements avec leurs créanciers.
Les modifications apportées à la LFI en 1992 ont conduit à l'introduction de séances de consultation obligatoires imposées aux particuliers comme condition de leur libération de la faillite10. Quant aux modifications de 1997, elles ont débouché sur l'obligation, pour les faillis, de remettre une partie de leur revenu excédentaire en vue de sa distribution entre les créanciers11. Malheureusement, le rapport du groupe de travail n'évalue pas l'incidence de ces initiatives, même si des données sont maintenant disponibles12, pour nous permettre de tirer au moins des conclusions préliminaires en ce qui a trait aux modifications de 199713. Il appert qu'environ 90 p. 100 des faillites de consommateurs donnent lieu à une administration sommaire de la masse, ce qui signifie que la valeur nette des biens que l'on peut saisir est inférieure à 10 000 $, et que seulement 15 p. 100 de ces personnes disposent d'un revenu excédentaire, selon la définition de l'instruction du surintendant. Et même dans ces cas, le remboursement net aux créanciers dans le cadre des faillites de particuliers déclarées en 1998 n'était que de 17,3 p. 100 de tous les débours, et le montant moyen découlant de la réalisation de l'actif de toutes sources s'élevait à 2 460,84 $, le montant médian étant de 1 795,13 $.
À mon avis, plusieurs facteurs expliquent que le groupe de travail ne se soit pas penché sur ces questions avec sérieux. L'un a trait au calendrier irréaliste qui lui a été imposé pour clore ses débats soit un peu plus d'un an du début à la fin. Un autre a trait à la taille du groupe de travail, qui le rendait difficilement gérable et qui compliquait la tâche pour la tenue et le déroulement des débats d'idées d'envergure. Le troisième facteur a trait à l'absence, parmi les membres, de parties intéressées et à la surreprésentation d'autres parties. Le groupe de travail ne comprenait pas de sociologues ni de psychologues du comportement, et on n'y trouvait pas non plus de registraires des faillites, bien que ces personnes soient beaucoup plus au courant que les juges des cours supérieures provinciales des problèmes quotidiens inhérents aux faillites de consommateurs au niveau judiciaire et administratif.
Le rapport fait valoir que des décisions récentes des tribunaux et d'autres événements menacent gravement la viabilité du système de faillite du Canada et précise par ailleurs que le groupe de travail a consacré plus de temps à cette question qu'à toute autre. Il mentionne aussi les préoccupations, exprimées par M. Ramsay et l'auteur, du fait que le système actuel d'administration de la faillite place les syndics en situation de conflit d'intérêts, mais il explique que les autres membres ne considèrent pas qu'il y a conflit. Par conséquent, le rapport n'explore pas plus avant cette question et, manifestement, n'offre aucune solution. Dans les commentaires suivants, nous présentons d'abord une analyse de la question du conflit d'intérêts, laquelle éclaire à notre avis la question des honoraires des syndics.
La charge de syndic de faillite a été introduite au XIXe siècle dans la législation anglaise de la faillite et elle a par la suite été adoptée par la Loi sur la faillite du Canada de 1919. Elle s'est maintenue au fil des révisions subséquentes et des modifications de la législation canadienne. En Angleterre, le syndic est nommé par les créanciers du débiteur après que le débiteur déclare faillite de son propre chef ou qu'il a été mis en faillite involontairement14. Par ailleurs, si les créanciers ne prennent pas la peine de nommer un syndic du secteur privé et qu'on ne peut trouver un syndic pour agir, le séquestre officiel fait office de syndic et administre la masse.
Au Canada, le tableau se complique dès le départ étant donné qu'une faillite volontaire en vertu de la LFI ne nécessite pas d'audience du tribunal, mais seulement une « cession » du débiteur à la masse de ses créanciers, qui est déposée auprès du séquestre officiel de la localité du débiteur15. La cession n'est menée à bien qu'après que le séquestre officiel a nommé un syndic pour administrer la masse. La Loi exige que le séquestre officiel qui nomme le syndic tienne compte des désirs des créanciers les plus intéressés, « s'il est possible de s'en rendre compte à ce moment »16. En pratique, un syndic est nommé au moment de la cession et il est presque invariablement accepté par le séquestre officiel17. En conséquence, le syndic qui est nommé est également la personne qui a préparé la cession et les documents justificatifs, qui a discuté avec le débiteur de sa situation financière et qui lui a conseillé la meilleure ligne de conduite possible.
Le tableau s'est compliqué encore davantage au cours des dix dernières années, du fait que les syndics font une large publicité de leurs services, et par conséquent, incitent les débiteurs à penser que le syndic est au service de l'intérêt supérieur du débiteur qui le consulte et lui demande d'être son syndic. Toutefois, il existe une règle bien établie selon laquelle, une fois que la faillite survient et que le syndic a été officiellement nommé, ses principales obligations sont à l'égard des créanciers et du tribunal de la faillite et non à l'égard du débiteur.
Et c'est ce qui se passe lorsque le syndic applique l'article 68 de la Loi à la situation du débiteur et détermine si ce dernier dispose d'un revenu excédentaire, le montant de ce revenu ainsi que les paiements qu'il est tenu de faire au syndic. Des dispositions prévoient la médiation et un droit d'appel devant le tribunal si les parties ne peuvent parvenir à une entente concernant les obligations au titre de l'article 68. Le syndic se trouve dans une situation de conflit d'intérêts encore plus manifeste lorsqu'il dépose le rapport en vertu de l'article 170, à la fin de la période de neuf mois suivant l'ordonnance de faillite. Selon l'article 170, le syndic doit faire état, entre autres, des causes de la faillite, de la façon dont le débiteur s'est acquitté de ses obligations en vertu de la Loi, de la conduite du failli à la fois avant et après l'ouverture de la faillite, et « de tout autre fait, incident ou circonstance qui justifierait que le tribunal refuse une ordonnance de libération pure et simple. »18 Le syndic est par ailleurs tenu en vertu de l'article 170.1 de la Loi d'inclure une recommandation indiquant si le failli, compte tenu de sa conduite et de sa capacité d'effectuer des paiements, devrait être libéré sous conditions. À mon avis, il y a également conflit d'intérêts lorsque, comme cela est souvent arrivé par le passé19, le syndic s'oppose à la libération du débiteur parce qu'il n'a pas perçu l'intégralité de ses honoraires et de ses débours.
Il y a plusieurs solutions possibles au conflit que je viens de décrire, dont je m'attacherai à donner les grandes lignes sans essayer d'entrer dans le détail. Une de ces solutions consisterait à adopter la procédure en vigueur aux États-Unis, en Australie et en Angleterre où la personne ou l'organisme chargé de préparer la requête de faillite volontaire n'agit pas en qualité de syndic20. Une autre possibilité serait de modifier la LFI de façon à ce que les décisions susceptibles de créer les plus grands conflits soient prises par le séquestre officiel plutôt que par le syndic. La troisième solution, beaucoup plus difficile, consisterait à faire signer au débiteur une renonciation au moment de la nomination du syndic reconnaissant le fait qu'après sa nomination, le syndic n'agira plus pour le compte du débiteur, mais sera régi par les dispositions de la LFI. L'objet de nos remarques n'est pas de trouver la solution la plus adéquate, mais d'indiquer pourquoi, à notre avis, il existe un problème qu'il faut résoudre.
À juste titre, les syndics s'attendent à être rémunérés pour leurs services et à rentrer dans leurs frais. Il s'agit là d'objectifs parfaitement légitimes. La difficulté réside dans le fait qu'un haut pourcentage de consommateurs faillis ne sont pas en mesure de faire un paiement forfaitaire unique. En vertu de la LFI, le syndic arrive en tête, parmi les créanciers non garantis, pour le paiement de ses honoraires et de ses débours21, mais cela n'est pas toujours suffisant pour garantir le paiement de sa facture. Comme nous l'avons noté au préalable, dans environ 90 p. 100 des faillites de consommateurs, le montant des biens que l'on peut saisir est inférieur à 10 000 $. Les dispositions de l'article 68 de la LFI relatives au revenu excédentaire sont peut-être également insuffisantes pour combler cette lacune étant donné qu'environ 15 p. 100 seulement des faillites visées par l'administration sommaire donnent lieu à des paiements au titre du revenu excédentaire.
C'est la raison pour laquelle le syndic exige fréquemment du débiteur qu'il signe une entente indiquant qu'il assumera la responsabilité du paiement de ses honoraires et débours, et s'oppose fréquemment à la libération du débiteur si une partie de ses honoraires et débours demeure impayée. Toutefois, ces dernières années, les registraires et les juges des cours supérieures de l'Alberta, du Manitoba, du Québec et de la Nouvelle-Écosse ont jugé non exécutoires les ententes visant les honoraires du syndic et considèrent également d'un il désapprobateur l'opposition du syndic à la libération du débiteur, surtout lorsque ce dernier ne dispose pas de revenu excédentaire22. On peut supposer que c'est à ces décisions que le rapport du groupe de travail fait allusion lorsqu'il évoque la menace pesant sur la viabilité du système de faillite.
Je pense que la principale question à trancher consiste à déterminer s'il y a lieu de passer outre aux objections des tribunaux pour protéger le droit des syndics à leurs honoraires et au remboursement de leurs débours ou s'il y a lieu d'imaginer d'autres solutions pour les consommateurs faillis au bas de l'échelle économique. Le rapport recommande23 une modification à la LFI rendant exécutoires les ententes de paiement d'honoraires, même après la libération du débiteur et même si ce dernier ne dispose pas d'un revenu excédentaire. Le rapport indique également que les ententes de paiement d'honoraires ne devraient pas être autorisées en cas de difficultés graves et que l'entente en question ne devrait demeurer exécutoire que pendant une période prescrite, après la libération du débiteur. À mon avis, ces garanties sont trop vagues et ne résistent pas à l'objection fondamentale fréquemment articulée dans les décisions récentes, selon laquelle les consommateurs faillis ne devraient pas être tenus de payer d'honoraires si leur revenu est inférieur au seuil de faible revenu.
D'autres options pour assurer des services de faillite aux débiteurs dont le revenu est inférieur au seuil de faible revenu ont été élaborées dans d'autres pays, notamment en Australie, et sont à l'étude en Angleterre, mais n'ont malheureusement pas été explorées par le groupe de travail. De même, on n'a pas fait l'effort de se pencher sur l'expérience menée au Canada dans le cadre du programme fédéral d'aide aux personnes insolvables en place avant 1978. Les membres du groupe de travail ont préféré indiquer que le Canada avait développé un système « unique » de collaboration avec les syndics du secteur privé qui donnait satisfaction, sauf dans un petit pourcentage de cas, et ne nécessitait que des ajustements mineurs. Il est difficile d'accepter ces affirmations sans nuances. Si elles correspondaient à la réalité, le rapport ne déplorerait pas la menace que représentent les décisions récentes des tribunaux et le groupe de travail n'aurait pas consacré autant de temps à discuter de solutions aux difficultés actuelles.
L'insolvabilité constitue un phénomène d'envergure au Canada, qui soulève de nombreuses questions relativement à la politique sociale, économique et juridique. Il est tout à l'honneur du groupe de travail qu'en un cours laps de temps d'environ 12 mois il ait réussi à produire un rapport abordant un large éventail de questions, même si nombre d'entre elles étaient d'ordre pratique. J'ai exprimé mes préoccupations concernant le fait que le groupe de travail ne s'était pas penché sur les conséquences du nombre croissant d'insolvabilités de consommateurs et j'ai indiqué mon désaccord avec la solution recommandée à l'imbroglio des honoraires du syndic.
Je ne voudrais toutefois pas donner l'impression que je suis d'accord avec les autres recommandations ou non-recommandations du groupe de travail. Ce serait plutôt le contraire24.
Mes propres idées sont toutefois beaucoup moins importantes que la nécessité d'un vigoureux débat public sur tous les aspects du rapport et que la tenue d'autres études empiriques sur les effets du système canadien d'insolvabilité en place.
1 Le concept de revenu excédentaire est fondé sur le seuil de faible revenu de Statistique Canada.
2 Le Douzième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, février 1997, p. 3-4 et 8.
1 Professeur de droit émérite, Université de Toronto.
2 J'ai choisi le terme « insolvabilité » dans ces observations, pour embrasser à la fois les propositions de consommateurs en vertu de la LFI et les faillites de consommateur proprement dit. Dans le Code de la faillite des États-Unis, toutes les procédures relatives à l'insolvabilité, soit les procédures du chapitre 13, de même que celles du chapitre 7, sont désignées comme étant des procédures relatives à la faillite, ce qui introduit de la confusion lorsqu'on compare les statistiques canadiennes et américaines en matière de faillite.
3 Toutefois, il ne faut pas pousser trop loin la comparaison. Nombre de pays d'Europe continentale adoptent un point de vue beaucoup plus strict que le Canada concernant l'accès au crédit à la consommation et le remboursement des dettes, et le contexte social et juridique diffère nettement du contexte canadien.
4 BSF, International Consumer Insolvency Statistics, juin et octobre 1999, p. 2.
6 BSF, Bankruptcy Statistics for Calendar Year 2001, tableaux 2 et 4B.
7 Grâce à un mémoire de l'auteur.
8 L'auteur n'était pas membre du groupe de travail.
9 Toutefois, M. Iain Ramsay a rédigé et diffusé un document de travail sur les cartes de crédit.
11 LFI, article 68 et Instruction du surintendant des faillites no 11R, du 3 octobre 2000.
12 Voir, par exemple, BSF, Study of Receipts and Disbursements[ : ] Sample of 900 Summary Administration Estates. Preliminary Results (document non daté, mais distribué aux membres du groupe de travail en janvier 2001. Fait ironique, étant donné que l'étude a été demandée par le groupe de travail, il est regrettable que ses résultats et les résultats d'autres études réalisées de façon fort judicieuse par le BSF en 2001 n'aient pas été analysées dans le rapport). Les 900 dossiers de faillite ont été ouverts en 1998 et ils étaient tous clos le 8 décembre 2000. Les dispositions sur le revenu excédentaire de la LFI ne sont entrées en vigueur que le 1er mai 1998 et, par conséquent, il est possible que les résultats de l'étude ne prédisent pas avec exactitude cette source de revenu pour la période d'après 1998.
13 Le BSF a également commandé une enquête pour évaluer auprès des particuliers ayant fait faillite l'intérêt des séances de consultation exigées par la LFI. À ma connaissance, M. Schwartz établira un rapport qu'il présentera pour étude au BSF.
14 Ian F. Fletcher, The Law of Insolvency, Sweet & Maxwell, 1996, 2e éd., p.38-39.
17 À tel point que le rapport recommande la modification du paragraphe 49(4) de façon à ce que la Loi soit conforme à la pratique établie.
19 On trouvera une analyse convaincante de ce phénomène, du point de vue de l'Alberta, en se reportant au jugement du registraire Funduk dans In the Matter of Applications for Discharge by First Time Bankrupts, Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, le 27 mars 2001.
20 Voir par ailleurs J.S. Ziegel, « Financing Consumer Bankruptcies, Re Berthelette, and Public Policy », 2000, Canadian Business Law Journal, no 33, p. 294, 304 et suiv.
22 Outre le jugement du registraire Funduk, supra note 19, voir Re Berthelette (1999) 174 D.L.R. (4e) 577 (C.A. Man.) et la jurisprudence qui y est citée, ainsi que Re Threasa Georgina Weatherbee (2001), 25 C.B.R (4e) 133 (N.S.S.C.) et Re John Alex Macdonald (Reg. Hill, 27 mars 2001).
24 Pour donner des exemples, disons que je nourris de graves doutes quant à la possibilité de mettre en uvre les recommandations concernant la réaffirmation des dettes dont le failli peut être libéré et concernant la nécessité de dispositions complexes portant sur la reconnaissance des ordonnances d'insolvabilité étrangères pour la libération des faillis par rapport a des dettes régies par la loi canadienne. Je suis également préoccupé de voir que le rapport n'a pas recommandé de changement à la Section II de la Partie III de la Loi en ce qui a trait à la situation des créances garanties et qu'il propose de rendre inapplicable aux créanciers garantis la suspension automatique des procédures prévue à l'article 69.3, à moins que le débiteur n'ait d'abord obtenu une ordonnance du tribunal en sa faveur. La façon dont le rapport a traité ces deux questions laisse beaucoup à désirer.
L'approche adoptée par le Canada en matière de faillite est à mi-chemin entre le respect du souci légitime du créancier de recouvrer l'argent qui lui est dû (de même que de l'intérêt général pour ce qui est du respect des engagements contractuels) et la nécessité pour le débiteur de se libérer du fardeau écrasant de la dette pour reprendre sa place de membre financièrement responsable de la communauté. La législation canadienne vise à aider le créancier « honnête mais malchanceux » qui est en proie à des difficultés sans qu'il y ait eu faute de sa part. D'autres pays ont une approche différente.
Le régime juridique des faillites du Canada a sa source dans les lois de Grande-Bretagne, mais il est le plus souvent comparé au régime américain par suite des liens économiques étroits entre le Canada, les États-Unis et des valeurs culturelles communes que partagent les deux pays. La législation australienne présente aussi une grande similitude avec celle du Canada, en raison très probablement des origines communes et des similarités entre les deux économies. L'approche de l'Europe continentale est bien différente, étant davantage centrée sur le remboursement que sur la réhabilitation du débiteur.
Les différents régimes de faillite des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de l'Australie et de l'Europe continentale méritent notre examen, que ce soit comme source d'inspiration ou comme modèle à éviter. Les États-Unis sont le seul pays où l'incidence des faillites est comparable à celle relevée au Canada, ce qui s'explique probablement par les mêmes usages dans le domaine du crédit à la consommation. L'Australie semble se hisser rapidement au niveau du Canada, à mesure que le crédit y devient plus facilement disponible. La Grande-Bretagne a une plus faible incidence de faillites personnelles qu'au Canada, en raison peut-être de l'attitude sociale et des usages dans le domaine du crédit ainsi que du coût élevé de la procédure de faillite. Les pays de l'Europe continentale accusent une incidence encore plus faible. Dans certains cas, les particuliers ne peuvent pas prétendre à la faillite personnelle telle que nous la connaissons. Un bref aperçu du régime juridique réservé à l'insolvabilité du consommateur dans certains pays éclairera les recommandations du groupe de travail touchant le système canadien.
Le Canada partage avec les États-Unis la frontière non défendue la plus longue, et les économies et les cultures des deux pays sont intimement liées. L'éléphant influe forcément sur les pratiques et les usages de la souris dans les questions économiques, y compris les usages en matière de crédit et les habitudes de dépense des consommateurs. Le filet de sécurité aux mailles plus serrées (relativement) du Canada affecte cependant les causes de faillite et indique que certaines leçons qu'on peut tirer de l'expérience américaine doivent être considérées avec prudence.
Les États-Unis sont connus, depuis la fin du XIXe siècle, comme le pays du « nouveau départ ». Le régime est destiné à donner au débiteur la possibilité de se réhabiliter bien que, sous le régime du Code de la faillite actuellement en vigueur, le particulier failli soit tenu à un certain nombre de dettes non libérables ainsi qu'à d'autres restrictions de libération, au point qu'au moins un auteur a qualifié ce régime de faillite de « stale start »1 (nouveau départ freiné). Les modifications actuellement à l'étude sont encore plus restrictives, à tel point que certains commentateurs les considèrent comme « punitives » à l'égard du particulier endetté, ou comme un « retour » aux siècles précédents. Cette perspective était telle que le président Clinton a exercé son pouvoir de veto de poche contre le projet de loi quand il a été réintroduit après l'élection de 2000.
Les particuliers ont essentiellement deux choix sous le régime du Code de la faillite américain : ils peuvent invoquer soit le chapitre 13 pour proposer un plan de paiement sur leur salaire (ce qui équivaut à la proposition de consommateur dans le système canadien), soit le chapitre 7 pour déclarer faillite. Aux États-Unis, les tribunaux de la faillite forment un système distinct; ils sont présidés par des juges spécialisés à plein temps. Les avocats y jouent un rôle dans la préparation des documents et dans le dépôt de la pétition au nom du débiteur. Le surintendant et les séquestres officiels du système canadien correspondent à peu près au syndic fédéral et au bureau de ce dernier, lesquels constituent une division du département de la Justice des États-Unis. Le syndic fédéral est investi du pouvoir de désigner les « panel trustees » (syndics inscrits au tableau) pour les faillites déclarées en application du chapitre 7 et les « standing trustees » (syndics permanents) pour les concordats soumis en vertu du chapitre 13.
À l'opposé de son homologue canadien, un débiteur américain peut, à l'heure actuelle, déclarer volontairement faillite par le dépôt d'une « pétition » en application du chapitre 7 sans avoir à faire la preuve d'un niveau minimum de dette ou de son état d'insolvabilité. Il n'est pas tenu de désigner un syndic par cette pétition, laquelle déclenche automatiquement une ordonnance de protection et la désignation d'un syndic provisoire parmi ceux qui figurent au tableau dans le district. Le syndic convoque une assemblée des créanciers, à laquelle le débiteur est tenu d'assister, et informe celui-ci des conséquences de la faillite.
Les catégories de biens insaisissables sont régies par les lois de l'État concerné et peuvent être, par comparaison aux normes canadiennes, extrêmement généreuses. Le Texas, la Floride et l'Iowa, par exemple, prévoient la protection pratiquement absolue de la ferme familiale. Une telle situation, selon certains critiques, a fait de ces États des abris pour ceux qui entendent protéger de gros actifs contre l'atteinte de la faillite. De même, le débiteur américain jouit d'une plus grande protection contre les créanciers garantis que son homologue canadien. Aux États-Unis, il y a suspension automatique de toute action en recouvrement de la garantie. Le failli doit choisir soit de racheter, soit d'abandonner la garantie, soit de réaffirmer l'accord de garantie en négociant de nouvelles conditions avec le prêteur.
La liste des dettes non libérables est plus longue aux États-Unis qu'au Canada, et bien plus longue que dans les autres pays de common law. Aux dettes non libérables prévues par la législation canadienne, le Code de la faillite actuellement en vigueur aux États-Unis ajoute encore les dommages-intérêts pour blessure corporelle causée par la conduite d'automobile en état d'ébriété, la dette due au défaut délictuel ou négligent de maintenir le capital d'un établissement fédéral de dépôt, et la dette pour charges ou évaluation dues à une association de copropriété ou de logement coopératif. Au total, ces exceptions ont un effet considérable sur le concept de « nouveau départ » adopté à l'origine au bénéfice du débiteur américain.
Un débiteur peut lancer la procédure prévue au chapitre 13 en déposant une pétition, qui se traduit par la suspension automatique de toute procédure contre l'intéressé et déclenche la désignation d'un syndic permanent. Le concordat adopté en application du chapitre 13 doit prévoir le versement du revenu à venir entre les mains du syndic, l'acquittement intégral des créances prioritaires, et le traitement égal de tous les créanciers dans une même catégorie. L'exécution d'un concordat peut durer trois ans à moins qu'un tribunal n'en ordonne la prolongation (jusqu'à un maximum de cinq ans). Sous le régime du chapitre 13, le débiteur peut étirer les paiements, remédier à un défaut ou réduire un privilège au prix du marché aux fins de rachat. Il y a une exception à la modification des réclamations sur la résidence personnelle du débiteur : pour protéger l'intégrité du marché immobilier, les privilèges garantis sur cette résidence ne peuvent être modifiés. C'est le tribunal qui confirme le régime de concordat, à la différence des dispositions de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité qui subordonnent la proposition de consommateur à l'approbation de la majorité des créanciers. Aux États-Unis, le tribunal approuvera normalement le concordat du chapitre 13 si celui-ci a été soumis de bonne foi, si les créanciers non garantis recouvrent autant qu'ils auraient pu en cas de faillite déclarée sous le régime du chapitre 7, et si ce concordat traite équitablement les créanciers garantis. Un concordat approuvé a force obligatoire pour tous les créanciers.
Si des créanciers non garantis ou le syndic s'opposent au concordat, le tribunal ne peut l'approuver à moins que tout le revenu disponible du débiteur n'y soit engagé pour trois ans. Une fois le concordat venu à terme, le débiteur est libéré de toutes les dettes à l'exception des obligations qui surviennent suite au dernier paiement dans le cadre de ce concordat, de ses obligations alimentaires, des prêts étudiants, des dommages-intérêts pour blessure corporelle causée par la conduite d'automobile en état d'ébriété, des ordonnances de réparation ou des amendes. Il y a lieu de noter que la gamme des dettes non libérables est bien plus réduite que sous le régime du chapitre 7, ce qui encourage les débiteurs à opter pour le régime du chapitre 13 dans certains cas.
Un débiteur peut demander la libération sans que le concordat soit mené à terme, à la différence de ce qui se passe au Canada. Le tribunal peut le libérer si la non-exécution du concordat tient à des circonstances imprévues dont il n'est pas responsable et que le total des sommes distribuées aux créanciers est aussi important que s'il avait été recouvré sous le régime du chapitre 7. Dans ce cas cependant, le débiteur est responsable de toutes les dettes non libérables.
Les dispositions de la loi américaine sur les faillites personnelles ont fait ces dernières années l'objet de nombreuses critiques. Des rapports ont été publiés et des projets de loi présentés au Congrès pour resserrer des dispositions du Code de la faillite de façon à en changer le caractère pour ce qui est du principe du nouveau départ. Dans l'ensemble, ces critiques étaient que la faillite était trop facile aux États-Unis et que les débiteurs en abusaient pour se soustraire aux créanciers. Les faillites, de 700 000 en 1990, avaient atteint le chiffre de 1 200 000 en 2000. Qu'un tel état de choses se soit produit en période de croissance économique a suscité une certaine inquiétude. Les faillites répétitives sont aussi un sujet de préoccupation, tout comme au Canada d'ailleurs. Un intense effort de lobbying a été déployé auprès du Congrès et du public, en particulier par les établissements de crédit à la consommation. Selon un rapport, « les compagnies de cartes de crédit et même les grands constructeurs d'automobiles ont fait des démarches en faveur d'une réforme et ont contribué à la campagne de candidats républicains. MBNA American Bank, un important établissement de cartes de crédit, était le plus gros donateur à la campagne de Bush lors des dernières élections... »2.
Le 1er mars 2001, un projet de loi portant réforme du Code de la faillite a été adopté par la Chambre des représentants, et le 15 mars 2001, un projet semblable a été adopté par le Sénat. Le président Bush a publiquement fait savoir qu'il signerait le moment venu le projet de loi résultant d'un compromis entre le Sénat et la Chambre. Les deux textes prévoient la prise en compte des ressources du débiteur et visent à le diriger vers le régime du chapitre 13. Le nouveau projet de loi :
Les dispositions les plus controversées sont celles qui prévoient la prise en compte des ressources du débiteur, qui peuvent coûter extrêmement cher à administrer vu le petit pourcentage d'Américains invoquant le chapitre 7 qui semblent avoir des actifs suffisants pour justifier le recours au concordant du chapitre 13. La nouvelle législation représentera cependant un grand changement dans la philosophie du « nouveau départ ».
La législation canadienne en matière de faillite a son origine dans les lois britanniques, bien que ces dernières années, les deux systèmes aient bifurqué dans une certaine mesure. Tout comme au Canada, on enregistre en Grande-Bretagne un nombre croissant de faillites, mais la proportion des faillites personnelles y est nettement plus faible (0,47 % de la population, contre 2,72 % au Canada en 1998). Cette différence peut être imputable au fait qu'en Grande-Bretagne, les gens ne savent pas que la faillite est une option, à l'opprobre social qu'est la faillite, et au coût élevé de la procédure. Il y aussi une autre voie possible; il s'agit de l'ordonnance d'administration, déposée auprès des cours de comté, qui vient en aide aux débiteurs tenus à moins de 5 000 £ de dettes.
Les ordonnances d'administration s'apparentent aux propositions de consommateurs. Le débiteur peut demander à la cour de délivrer une ordonnance d'administration si le total de ses dettes est inférieur à 5 000 £ et qu'une dette au moins ait été reconnue par jugement. Le débiteur produit les renseignements sur ses dettes, son revenu et ses autres actifs, ainsi que sur ses dépenses de subsistance. Le personnel de la cour évalue l'aptitude de l'intéressé à payer les dettes en tout ou en partie. Si un créancier s'y oppose, la demande sera entendue dans une audience. Sinon, l'ordonnance sera rendue telle qu'elle a été proposée. La durée de l'ordonnance n'est soumise à aucune limite. Certaines devaient durer même 70 ans4!
Pour ceux qui ont un endettement plus élevé, la faillite est déclenchée par une pétition soumise à la cour, qui décide à sa discrétion s'il y a lieu on non à ordonnance de faillite. Dans le cas où le total des créances non garanties est inférieur à 20 000 £ et où la valeur du patrimoine est supérieure à 2 000 £, la cour peut désigner un enquêteur pour savoir si le cas se prête à un concordat personnel selon la partie VIII de la loi dite Insolvency Act. En cas d'ordonnance de faillite, les patrimoines de peu d'importance peuvent être administrés par une procédure simplifiée, qui a été l'inspiration du système d'administration sommaire en vigueur au Canada. Les biens exemptés sont essentiellement ceux dont le débiteur a besoin pour gagner sa vie et pour satisfaire ses besoins essentiels et ceux de sa famille. Le pouvoir d'appréciation discrétionnaire en la matière appartient au syndic et à la cour. Le revenu excédentaire peut être remis au syndic. À cet égard encore, le syndic et la cour sont investis d'un large pouvoir d'appréciation discrétionnaire, à la différence des prescriptions de l'article 68 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et des projets de loi en cours d'adoption aux États-Unis.
Une personne qui n'a pas fait faillite au cours des quinze années précédentes a normalement droit à la libération trois ans après la date de l'ordonnance de faillite et deux ans après l'administration sommaire. Le syndic peut demander à la cour de modifier le délai ou d'imposer des conditions si le débiteur manque à ses obligations de failli. Une ordonnance de paiement sur le revenu peut demeurer en vigueur après la date de la libération, mais ce délai est limité à trois ans. Les dettes non libérables comprennent la responsabilité civile pour conduite frauduleuse, les amendes à titre pénal, les obligations alimentaires, les dommages-intérêts pour blessure corporelle, et les dettes non prouvées dans la faillite. La cour peut libérer le débiteur des réclamations pour blessure corporelle ou au titre des obligations alimentaires.
L'Australie5 présente beaucoup de points communs avec le Canada pour ce qui est de la population, de l'économie, des habitudes de consommation, du mode de vie et du système de gouvernement. Pour l'un et l'autre pays, les lois en matière d'insolvabilité sont basées sur le modèle britannique. Tout comme au Canada, on a enregistré en Australie une croissance rapide des faillites, encore qu'à un niveau bien plus bas.
L'Insolvency and Trustee Service Australia (ITSA) est l'autorité de régulation en matière de faillite. Sous la direction d'un inspecteur général (qui est l'équivalent du surintendant au Canada), l'ITSA administre la loi dite Bankruptcy Act (1966). Il est relativement facile de déclarer faillite en Australie, ce qui n'est pourtant pas encouragé. Le débiteur peut faire une déclaration d'intention de déposer une pétition, ce qui a pour effet de le protéger des créanciers non garantis pendant sept jours, durant lesquels il pourra revoir sa situation. La faillite est déclenchée par dépôt d'une pétition auprès du séquestre officiel et les documents peuvent être versés au dossier par la poste. Bien que la déclaration initiale de faillite ne soit assujettie à aucuns frais, des frais réglementaires sont perçus pour nombre de services assurés par l'ITSA. Certains de ces frais ne sont pas négligeables, tels les honoraires de 4 000 $ imposés en cas de faillite ou de concordat régi par la partie X. L'argent effectivement perçu est bien entendu fonction du produit disponible des actifs du failli. L'ITSA ne perçoit pas de frais pour l'administration des propositions régies par la partie IX de la Loi.
Le débiteur n'est pas tenu de consulter un syndic, et se fait souvent conseiller par des services de consultation en matière de crédit ou par des organismes d'assistance sociale. De même, il n'est pas nécessaire que le pétitionnaire ait commis un acte de faillite ou fait la preuve de son insolvabilité.
Les biens exemptés comprennent les biens du ménage, les indemnités pour blessure corporelle et les biens achetés au moyen de ces fonds protégés, les fonds de pension enregistrés, ainsi que les biens utilisés pour gagner un revenu et les véhicules jusqu'à concurrence d'une certaine valeur. À l'instar de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, le Bankruptcy Act d'Australie prévoit les paiements au moyen du revenu excédentaire. Puisque le patrimoine des faillis, dans la plupart des cas, ne comprend guère d'actifs d'importance, le revenu excédentaire sera généralement la seule source de paiement aux créanciers.
Le syndic en Australie doit évaluer le revenu du failli pour une période de paiement de 12 mois. Dans les faits, juste un peu plus de 4 p. 100 des faillis en 1998-1999 étaient tenus de faire des paiements. Le débiteur peut faire appel contre l'évaluation en raison de difficultés.
En Australie, le failli a droit à la libération automatique après trois ans, sauf objection du syndic ou du séquestre officiel. En cas d'objection, la libération peut être retardée jusqu'à huit ans, selon les motifs d'objection. Il n'y a pas de libération conditionnelle. Les débiteurs qui n'ont guère d'actifs (près de 60 p. 100 du total des cas) peuvent demander la libération avant terme après six mois; à peu près la moitié qui y sont admissibles en font la demande. Les dettes non libérables comprennent les pensions alimentaires pour enfants et conjoint, l'obligation en cours de paiement sur le revenu, les dettes encourues par conduite frauduleuse, et les amendes.
La partie IX du Bankruptcy Act d'Australie prévoit une autre voie que la faillite pour les débiteurs à faible revenu. Il faut que les dettes et le revenu soient inférieurs à un montant déterminé (à peu près 50 000 $AU et 27 000 $AU, respectivement). Un syndic vérifie l'admissibilité et les créanciers votent sur la proposition soit par la poste, soit dans une assemblée. Il faut que la proposition soit approuvée par une majorité représentant 75 p. 100 de la valeur des dettes. Les propositions ne sont pas en vogue en Australie, peut-être en raison du pourcentage élevé de débiteurs qui n'ont guère ou pas d'actifs.
Le 11 mai 2000, le ministre de la Justice et des Douanes a annoncé un projet de réforme du Bankruptcy Act visant à renforcer la confiance du public dans le système d'administration des faillites. Deux projets de loi ont été déposés par le procureur général le 7 juin 2001 : le Bankruptcy Legislation Amendment Bill et le Bankruptcy (Estate Charges) Bill 2001. Ces modifications visent à prévoir de nouveaux cas de rejet des pétitions de débiteur; à instituer un délai de réflexion de 30 jours avant la déclaration de faillite, au cours duquel le débiteur peut retirer sa pétition; à supprimer la disposition relative à la libération avant terme (6 mois); à faciliter la preuve à l'appui de l'opposition à la libération; à relever le niveau de revenu à prendre en compte dans les concordats visés à la partie IX; à réduire la durée automatique de la faillite de trois à deux ans; et à simplifier diverses formalités administratives. Ces réformes n'ont pas été votées par le Parlement avant la convocation des élections de novembre 2001; il faudra que le nouveau gouvernement appuie le projet de loi et le présente de nouveau lors de la prochaine session.
Les systèmes d'administration des faillites sont à peu près les mêmes dans les pays de common law ci-dessus, où la législation respective prévoit les pétitions en faillite, les paiements sur le revenu excédentaire, les biens exemptés, les dettes non libérables, et les autres voies que la faillite comme les concordats ou les propositions. La consultation en matière de crédit est prévue, officiellement ou non. Des pénalités frappent ceux qui abusent du système soit par des manuvres frauduleuses soit par non-observation des conditions imposées au failli par la législation. Dans l'ensemble, la politique de libération est bien libérale, l'accent étant mis sur la réhabilitation ou un nouveau départ pour le débiteur, sur l'importance de le réadmettre dans la société en tant qu'individu pénétré de ses responsabilités financières, et libéré du fardeau débilitant de la dette.
Par contraste, les systèmes régissant l'insolvabilité dans les pays d'Europe continentale sont davantage centrés sur le remboursement et sur la restriction des faillites personnelles. L'élément moral est encore prédominant. Niemi-Kiesilainen relève trois différences fondamentales entre l'approche européenne et celle des pays de common law6. En premier lieu, la faillite personnelle n'est acceptée que pour les débiteurs reconnus méritoires. En deuxième lieu, les arrangements de remboursement allant de cinq à sept ans sont obligatoires, et il n'y a pas de libération automatique. Enfin, l'accent est mis sur la consultation en matière d'endettement pour décourager les débiteurs d'avoir recours au crédit et leur apprendre à se débrouiller avec le budget limité qu'il leur reste après fixation des remboursements obligatoires sur le revenu.
Au Danemark, la Loi de 1984 sur les concordats (la première des lois sur l'insolvabilité en Europe) prévoit que le remboursement se fait au moyen du revenu excédentaire, après satisfaction des besoins essentiels qui y sont définis. L'exécution du concordat peut durer cinq ans ou davantage. Le débiteur prend l'initiative en proposant un régime de remboursement, dans lequel tous les créanciers non garantis sont sur le même pied. Les créances garanties ne sont pas incluses. Le réaménagement de la dette est une procédure différente du concordat. Un juge examine la situation financière du débiteur pour déterminer s'il y a lieu à réaménagement; la plupart des demandes de réaménagement sont rejetées d'emblée. Même des personnes lourdement endettées en raison de la perte d'emploi ou d'autres difficultés inévitables peuvent être déclarées irrecevables.
En Allemagne, la Loi sur l'insolvabilité de 1994 prévoit le cas du petit débiteur, ce qui s'entend également du consommateur, auquel il incombe au premier chef de négocier avec ses créanciers et de joindre une proposition de paiement complète à la demande. Le concordat est approuvé si la majorité des créanciers y consentent ou s'il n'y a pas d'objections de leur part. Par ailleurs, la faillite est possible dans des cas déterminés. L'admissibilité à la procédure de faillite donne le droit de mettre en place un régime de remboursement de sept ans. Les obligations de paiement correspondent aux dispositions de saisie-arrêt, et le débiteur est tenu de s'en tenir à un niveau de subsistance. Il est soumis à la surveillance du syndic et des créanciers durant les sept années, pour ce qui est du remboursement et de l'obligation de trouver un travail et de le garder. La libération peut faire l'objet d'une opposition si le débiteur ne respecte pas ses obligations de paiement.
En France, la Loi Neierz, adoptée en 1989, constitue le cadre légal du rééchelonnement de la dette. Elle est administrée par des commissions locales, composées des représentants de la Banque de France, des banques locales, des organisations de consommateurs et des autorités municipales. Il s'agit de négocier et d'éviter le recours à la justice. Cependant, la commission peut, au besoin, proposer un plan de rééchelonnement au tribunal compétent. La durée moyenne de ces plans et de presque dix ans, et le tribunal n'a pas compétence pour réduire le capital de la dette. La libération est possible après trois ans pour les débiteurs qui n'ont pas les moyens de faire des paiements.
1 William Whitford, Changing Definitions of Fresh Start in U.S. Bankruptcy Law, 1997, Consumer Policy, vol. 20, no 178, page 191, cité dans OHLJ Ziegel, page 241.
2 CNN.com, « Senate marches toward sweeping bankruptcy overhaul », le 15 mars 2001.
3 Highlights of the Bankruptcy Reform Bill, Bankrate.com.
4 La loi qui aurait limité les ordonnances à trois ans n'a pas été promulguée; voir Ziegel, Comparative Consumer Insolvency Regimes, page 143.
5 Cette section est basée sur Rosalind Mason, Consumer Bankruptcy : An Australian Perspective, 1999, Osgoode Hall Law Journal, no 37, p. 451, et Jacob S. Ziegel, Comparative Consumer Insolvency Regimes.
6 Johanna Niemi-Kiesilainen, The Role of Consumer Counselling as Part of the Bankruptcy Process in Europe, 1999, Osgoode Hall Law Journal, no 37, p. 409; Johanna Niemi-Kiesilainen, Consumer Bankruptcy in Comparison : Do We Cure a Market Failure or a Social Problem?, 1999, Osgoode Hall Law Journal, no 37, p. 473.
Durant toutes les délibérations, un certain nombre de personnes des praticiens dans le domaine juridique, comptable et de la faillite ont présenté des exposés au groupe de travail. Nous leur sommes très reconnaissants pour leur intérêt et leurs suggestions réfléchies. Les divers groupes d'étude ont tenu compte de ces opinions lorsqu'ils ont examiné les questions dont ils étaient saisis. Nous remercions les personnes mentionnées ci-dessous, ainsi que les organismes qu'elles représentent, pour leur participation utile dans notre processus d'examen :
M. Alain Bilodeau
Centre populaire de Roberval
Roberval (Québec)
M. Andy Fisher
Alan Lawson, Fisher Inc.
Syndic de faillite
Oshawa (Ontario)
M. Kenneth D. Grant
Legal Services Society of B.C.
Williams Lake (Colombie-Britannique)
M. Guy Legault
Association des comptables
généraux accrédités du Canada
Vancouver (Colombie-Britannique)
M. Chee-Kong Leong, CA
Syndic de faillite
Toronto (Ontario)
M. Joseph A. Okalita
Cameron Okalita Inc.
Syndics de faillite
Regina (Saskatchewan)
M. Ken Tessis
Soberman Isenbaum Colomby Tessis Inc.
Séquestres et syndics
Toronto (Ontario)
M. Douglas Welbanks
Ministère du procureur général
Community Justice Branch
Debtor Assistance Division
Burnaby (Colombie-Britannique)
M. David S. Wood
KPMG Inc.
Syndic de faillite
Vancouver (Colombie-Britannique)
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Création : 2005-05-29 Révision : 2005-07-06 |
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