Les hommes victimes de violence sexuelle dans l'enfance: Guide à l'intention des survivants adultes
Série II des livrets d'information sur
la violence sexuelle
Générique
Administrateurs, VISAC
Naomi Ehren-Lis
Teri Nicholas
Coordination
Leonard Terhoch
Rédaction
John Napier-Hemy
Édition
Joanne Broatch (anglais)
Johanne Raynault (français)
Correction des épreuves
Johanne Raynault
Conception et mise en page
Jager Design Inc.
Impression
Broadway Printers Limited
Photographie
Leaping Lizard Productions
First Light Associated Photographers
Manipulation des images
Harry Bardal
Nous tenons à remercier tout particulièrement
le personnel de VISAC et de la Division de la prévention de la
violence familiale de Santé Canada, ainsi que toutes les autres
personnes qui nous ont offert leurs idées et leur appui.
Les conclusions et opinions exprimées
dans ce livret ne sont pas nécessairement celles de Santé
Canada.
Ces livrets sont publiés par le Vancouver-Richmond
Incest and Sexual Abuse Centre (VISAC), une division de Family Services
of Greater Vancouver. VISAC offre une gamme étendue de services,
dont le traitement des enfants victimes de violence sexuelle et de leur
famille, un programme de thérapie de groupe à l'intention
des adultes ayant été victimes de violence sexuelle dans
leur enfance, ainsi qu'un programme de soutien aux victimes de violence
sexuelle.
La reproduction commerciale de ces livrets est
interdite. Toutefois, nous encourageons la reproduction à des
fins non commerciales avec m,ention de la source. Tous autres droits
réservés.
Family Services of Greater
Vancouver, 1994
1616 West 7th Avenue
Vancouver, B.C. V6J 1S5
ISBN 0-662-61000-6
Financé par
La Division de la prévention de la violence
familiale, Santé Canada
Ce livret aborde les sujets suivants:
- Pourquoi ce livret ?
- Qu'est-ce que la violence sexuelle ?
- Comment savoir si j'ai été victime
de violence sexuelle lorsque j'étais enfant?
- Que puis-je faire pour obtenir l'aide dont
j'ai besoin ?
- En quoi consiste l'intervention du conseiller
?
- Quel genre de questions les survivants de
la violence sexuelle posent-ils à leur conseiller ?
- Quelle attitude adopter vis-à-vis de
l'agresseur ?
- Que dois-je dire à ma ou à mon
partenaire ?
- Peut-on guérir de la violence sexuelle
?
- Comment se procurer les livrets d'information
sur la violence sexuelle.
Pourquoi ce livret ?
Ce livret s'adresse aux milliers d'hommes qui
ont été victimes de violence sexuelle au Canada alors
qu'ils étaient enfants ou adolescents. Il s'adresse également
aux personnes qui aident ces hommes à aborder chaque nouvelle
journée avec courage: leurs partenaires, leurs amis et leurs
parents.
Si vous avez été
agressés sexuellement quand vous étiez enfant, ce livret
vous aidera à mieux comprendre les répercussions que peut
avoir cette expérience sur votre vie actuelle. Il vous aidera
aussi à tirer un trait sur votre enfance dévastée
et à guérir. Si vous consultez un conseiller ou envisagez
de le faire, ce livret vous aidera enfin à mieux comprendre en
quoi consiste son rôle.
Si vous soupçonnez
avoir été victime de violence sexuelle quand vous étiez
enfant, mais sans arriver à isoler de souvenirs précis,
vous trouverez énumérés ici quelques uns des symptômes
ou des indicateurs de violence sexuelle. Ces indicateurs peuvent parfois
aider à retrouver certains détails d'expériences
passées.
Beaucoup d'hommes ont du mal
à admettre qu'ils ont été autrefois victimes de
violence sexuelle. Dans notre culture, en effet, tout homme qui se respecte
se doit de maîtriser tous les aspects de sa vie. C'est pourquoi
les garçons victimes d'abus pensent souvent qu'ils auraient dû
être capables de se défendre contre leur agresseur; une
fois adultes, ils s'en veulent encore de s'être laissés
dominer. Les informations contenues dans ce livret vous aideront à
mettre de l'ordre dans vos idées et à faire porter les
torts là où il le doivent, soit sur l'agresseur.
Voici donc ce que vous trouverez
ici:
1
une description des indicateurs le
violence sexuelle dans l'enfance;
2
une explication des raisons pour lesquelles
les hommes ont souvent du mal à admettre qu'ils ont été
victimes de violence sexuelle;
3
un examen des questions soulevées
par le traitement, comme la honte et la peur de la sexualité;
Nous employons souvent un pronom masculin
pour désigner l'agresseur parce que ce sont le plus souvent
des hommes qui agressent le jeunes garçons et les adolescents.
Lorsqu'il s'agit d'un agresseur de sexe féminin, nous employons
bien sûr un pronom féminin. |
4
une analyse du rapport entre les victimes
d'agressions sexuelles et les auteurs adultes de ces agressions;
5
une analyse de l'impact de la violence
sexuelle subie dans l'enfance sur les relations à l'âge
adulte;
6
une analyse de la façon dont
le counseling et les groupes de soutien peuvent favoriser la guérison;
7
une analyse des arguments en faveur
et à l'encontre des poursuites judiciaires contre l'agresseur.
Si vous avez été agressés
sexuellement quant vous étiez enfant, ce livret vous aidera à
mieux comprendre les répercussions que peut avoir cette expérience
sur votre vie actuelle.
Qu'est-ce que la violence sexuelle ?
La violence sexuelle constitue un abus de pouvoir.
Si une personne plus âgée, plus forte ou plus expérimentée
que vous vous a déjà obligé à vous adonner
à une activité sexuelle lorsque vous étiez enfant
ou adolescent, vous avez été victime de violence sexuelle.
Votre agresseur peut avoir gagné votre confiance pour mieux vous
tromper et abuser de vous. Il ou elle peut avoir encore aggravé
l'abus en vous forçant à garder le secret et en vous culpabilisant.
La violence sexuelle ne désigne
pas seulement les attouchements de nature sexuelle. Si on vous a obligé,
enfant, à observer des activités sexuelles ou à
visionner les vidéos pornographiques, vous avez aussi été
victime de violence sexuelle. Vous l'avez été également
si un adulte a violé votre intimité de façon répétée
- en vous observant lorsque vous preniez votre douche, par exemple.
Votre agresseur peut encore avoir combiné violence sexuelle et
violence affective. En se moquant de la taille ou de la forme de votre
pénis, par exemple, cette personne peut vous avoir causé
autant de tort que si elle vous avait touché.
Comment savoir si j'ai été victime
de violence sexuelle lorsque j'étais enfant ?
Certains ont des souvenirs précis d'expériences
de violence sexuelle et sont capables de décrire exactement les
actes commis par leur(s) agresseur(s). Chez d'autres, ces souvenirs
sont confus ou même inexistants. Lorsque l'agression a été
particulièrement douloureuse ou humiliante, il arrive qu'on l'oublie
presque totalement pour préserver son équilibres mental.
Certaines réactions physiques ou certains comportements révélateurs
de cette expérience peuvent cependant se manifester, même
en l'absence de souvenirs précis. Ces réactions sont appelées
des indicateurs. En portant attention aux indicateurs physiques,
comme les vomissements et les réminiscence ou aux indicateurs
comportementaux, comme les comportements bagarreurs, on arrive parfois
à se souvenir plus facilement de certains détails d'une
agression.
Un conseiller peut vous aider
à interpréter ces indicateurs :
1
Confusion au sujet de l'identité
sexuelle. Il peut arriver que vous
ayez du mal à déterminer si vous êtes hétérosexuel,
homosexuel ou bisexuel. Peut-être est ce parce que vous établissez
inconsciemment un lien entre l'agression dont vous avez été
victime et votre sexualité.
On ne sait pas vraiment comment
se forme l'identité sexuelle. Par contre, on sait que l'agression
sexuelle n'est qu'un facteur parmi d'autres qui influent sur l'orientation
sexuelle. Ce n'est ni l'identité sexuelle de votre agresseur,
ni ce qu'il ou elle vous a fait, qui peut déterminer votre orientation
sexuelle indépendamment d'autres facteurs. Si vous vous êtes
senti à la fois « excité » et dégoûté
par ce que vous a fait votre agresseur, vous pouvez en effet avoir du
mal à vous fier aux messages que vous envoie votre corps.
Par exemple, si votre agresseur
a eu avec vous une relation orale, vous avez probablement éprouvé
du plaisir tout en étant dégoûté par l'expérience.
Que l'agresseur ait été un homme ou une femme ne change
rien à la situation. Le pénis répond à la
stimulation quel que soit le sexe de la personne qui le stimule.
Il n'importe donc pas de savoir
si l'agresseur était hétérosexuel ou homosexuel.
Tout comme le sexe de la victime ne change rien à l'affaire.
Les adolescents ou les adultes
qui agressent sexuellement des enfants le font parce qu'ils sont sexuellement
attirés par les enfants et ont besoin de les dominer sexuellement.
Si votre agresseur était
un homme, vous pouvez avoir une peur irraisonnée des autres
hommes, en particulier si vous les croyez homosexuels. Vous pouvez éviter
les relations d'amitié avec les hommes et développer des
relations de dépendance trop fortes avec les femmes. Cette peur
des homosexuels peut se manifester par des plaisanteries anti-gays,
mais aussi se traduire par une véritable persécution des
homosexuels. Cette crainte irraisonnée s'appelle l'homophobie.
Il faut noter par ailleurs que l'homophobie est aussi une attitude culturelle
négative courante dans notre société et qu'elle
n'est donc pas nécessairement un indicateur de violence sexuelle.
Certains cherchent aussi à
s'affirmer sexuellement en s'engageant dans une foule de relations sexuelles
éphémères et jouent les « Don Juan »
en espérant ainsi se débarrasser de cette peur de l'homosexualité.
Mais les conquêtes multiples, quel que soit leur nombre, ne viennent
jamais à bout de ce genre d'insécurité. Et elles
finissent par détruire la confiance que vos partenaires peuvent
avoir en vous...
Si vous êtes homosexuel
et avez été agressé par un homme lorsque vous étiez
enfant, vous pouvez croire à tort, comme beaucoup d'hétérosexuels,
que votre orientation sexuelle est la conséquence de cette expérience,
Bien des hommes adultes, qu'ils soient hétérosexuels ou
homosexuels, souffrent en effet de ce genre de confusion quant à
leur identité sexuelle par suite d'un abus dont ils ont été
victimes dans l'enfance. En tant qu'adulte homosexuel cependant, votre
réaction à l'abus sera probablement différente.
Phil Gray, un conseiller en
toxicomanie de Vancouver, travaille auprès des homosexuels qui
ont été victimes du violence sexuelle dans leur enfance.
Selon lui, lorsqu'ils ont été, agressés par des
hommes, ces homosexuels sont
· plus enclins que
les hétérosexuels, à croire qu'ils désiraient
être agressés;
· plus enclins que
les hétérosexuels à sexualiser tout contact personnel;
· plus enclins que
les hétérosexuels à rechercher les situations où
ils sont de nouveau agressés (c'est pourquoi ils sont davantage
exposés au VIH et au sida);
· plus enclins à
transformer leur homophobie en haine de soi-même au lieu de l'actualiser,
comme le font souvent les hommes hétérosexuels, sous forme
de harcèlement à l'endroit des gays.
La violence sexuelle constitue un abus de
pouvoir.
Si votre agresseur était
une femme, il se peut que vous vous soyez senti dominé et
humilié en tant qu'homme au moment de l'agression. Vous pouvez
vous sentir « différent » des autres du fait d'avoir
été agressé par une femme, ce qui est beaucoup
moins fréquent. Et vous pouvez vous sentir d'autant plus isolé
et honteux. Certains, par contre, préfèrent croire que
l'agression était pour eux une occasion rêvée d'avoir
des contacts sexuels et pas vraiment un abus. Pour oublier la honte
et le sentiment d'impuissance qu'ils ont éprouvés et pour
se sentir maître de la situation, ils accumulent les conquêtes
ou vont même jusqu'à commettre des viols.
2
Troubles des fonctions sexuelles.
Peut-être éprouvez-vous parfois des troubles des fonctions
sexuelles ? Érections douloureuses, difficulté à
maintenir l'érection, éjaculation précoce, absence
de désir, obsession sexuelle, tous ces problèmes peuvent
être des séquelles d'un abus sexuel datant de l'enfance.
Qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, tous les hommes
qui ont été victimes de ces abus peuvent éprouver
ce genre de problèmes.
Soulignons quand même
qu'il est tout à fait normal pour un homme d'éprouver
à l'occasion des ennuis d'ordre sexuel : il ne faut pas en déduire
automatiquement qu'il a été victime de violence sexuelle.
3 Peur de l'intimité.
Si vous avez été agressé par une personne en qui
vous aviez confiance et qui vous protégeait, il se peut que vous
ayez du mal aujourd'hui à vous fier assez à qui que ce
soit pour jouir d'une relation d'intimité à long terme.
Si vous n'arrivez à fonctionner sexuellement que dans le cadre
de rencontres de passage ou de relations éphémères,
il se pourrait que vous ayez été agressé par un
proche parent qui a exercé un pouvoir sur vous pendant longtemps.
Une relation de longue durée pourrait alors vous rappeler ce
genre de situation et c'est pourquoi vous l'évitez. Pour la même
raison, vous pouvez avoir du mal à vous engager dans une carrière
durable.
4
Toxicomanie ou mauvais usage des drogues,
de l'alcool ou des aliments. Si vous
abusez des drogues, de l'alcool ou des aliments, il se pourrait que
ce soit pour masquer le souvenir douloureux d'un abus sexuel. Votre
agresseur pourrait, par exemple, s'en être servi pour vous amener
à céder à ses demandes.
Parce qu'on peut en abuser,
ces substances peuvent empêcher la guérison. Les programmes
du genre Alcooliques Anonymes, qui viennent en aide aux personnes qui
abusent de drogues ou souffrent de troubles de l'alimentation, peuvent
s'avérer de précieux compléments au counseling
en matière de violence sexuelle.
5 Autodépréciation, remise
en situation d'agression ou agression d'autrui.
Lorsqu'on se sent dévalorisé par suite d'une agression
dont on a été victime, il arrive que l'on retourne ses
sentiments négatifs contre soi-même. Certains se blessent
ou se brûlent volontairement : c'est de l'automutilation. D'autres
se masturbent si souvent qu'ils se sentent encore plus honteux.
On peut aussi rechercher les
situations où l'agression risque de se répéter,
soit au sein d'une relation où l'on subit des agressions affectives,
soit dans le cadre de rapports sexuels où l'on joue un rôle
masochiste.
Il arrive aussi qu'on s'en
prenne à une personne plus jeune et moins forte pour l'agresser
à son tour.
Si vous vous rendez compte
que vous avez tendance à reproduire le comportement de votre
agresseur en abusant vous-même des enfants, demandez de l'aide
sans tarder, car vous risquez de faire du tort à d'autres personnes.
6 Anxiété,
perte de mémoire, réminiscences et cauchemars.
Si vous avez des crises d'angoisse ou de panique inexpliquées
et devez recourir à des médicaments pour contrôler
certaines émotions qui vous assaillent, peut-être est-ce
parce que vous revivez le même genre de sentiment de panique que
vous avez ressenti lorsque vous avez été agressé
sexuellement.
Si vous oubliez souvent le
contenu de conversations que vous venez d'avoir, certaines tâches
qu'on vous a confiées au travail ou des rendez-vous personnels,
ces oublis pourraient être le fait de pertes de mémoire
périodiques. Peut-être avez-vous appris à chasser
ainsi certaines choses de votre conscience lorsque vous étiez
victime de violence sexuelle pour vous protéger contre la douleur.
Les réminiscences
sont des images intempestives reliées à la violence sexuelle
dont on a été victime qui apparaissent soudain à
l'esprit. Ces images peuvent survenir aux moments les moins opportuns
: lorsque vous faites l'amour, par exemple. Si c'est le cas, c'est probablement
parce que l'excitation sexuelle réveille en vous certains souvenirs
reliés à l'agression sexuelle.
Certaines personnes ont aussi
des cauchemars récurrents qui leur rappellent d'une façon
ou d'une autre l'agression dont elles ont été victimes.
Un conseiller vous encouragera à vous souvenir de vos rêves
et même à les noter par écrit : les rêves
peuvent en effet aider à retrouver certaines émotions
associées à une agression.
7
Colère.
Certains hommes estiment qu'à titre de mâles, ils ont le
droit d'exprimer et de concrétiser leur colère et jugent
ce genre de comportement plus « sain » que celui des femmes
victimes d'agression, qui répriment souvent leur colère
et sombrent dans la dépression. Mais lorsqu'on ne ressent que
de la colère, c'est parfois parce qu'on refoule d'autres émotions,
le plus souvent de la honte, de la peur et de la solitude. La colère
peut aussi éloigner de vous certaines personnes qui, autrement,
pourraient vous aider. Un conseiller peut vous aider à comprendre
les raisons de votre colère et à éprouver des émotions
plus « douces », et vous amener aussi à éprouver
de la peine ou de la peur sans craindre de craquer.
8
Honte.
Si vous avez été victime de violence sexuelle lorsque
vous étiez enfant, vous partagez avec toutes les autres victimes
d'abus, hommes et femmes, le même sentiment sous-jacent : la honte.
La honte est un profond sentiment de dévalorisation de la personne.
Votre agresseur peut vous avoir privé du soutien des personnes
que vous aimiez en vous obligeant à garder le secret. Il peut
aussi vous avoir dit que personne ne voudrait plus vous fréquenter
si l'on apprenait ce que vous avez fait.
La honte est aussi associée
au fait que la victime se sent responsable en partie de l'agression.
Souvent, en effet, l'agresseur persuade l'enfant qu'il désire
se soumettre à sa volonté. Il peut, par exemple, convaincre
un adolescent qu'il lui faut apprendre à « exprimer ses
sentiments à l'endroit des personnes du même sexe que lui
», à « affirmer son autonomie sexuelle » ou
à « explorer sa sexualité ». Si c'est votre
cas, il se peut que vous ayez honte aujourd'hui de vous laisser aller
à partager ce genre d'opinions.
La première étape de la guérison
consiste à admettre que l'on a peut-être été
victime de violence sexuelle autrefois.
Vous pouvez, par exemple,
craindre d'éprouver encore plus de honte en parlant de l'agression
à un conseiller ou à quelqu'un d'autre. La honte peut
vous isoler des autres dans votre vie adulte. La participation à
un groupe de soutien, où vous pouvez parler de votre expérience
et écouter d'autres personnes parler d'expériences similaires,
peut vous aider à surmonter votre honte et à vaincre le
sentiment d'isolement qui l'accompagne.
Il est particulièrement
important de faire face à ce sentiment de honte à cause
de « l'effet boule de neige » qu'il peut avoir. Cet effet
se manifeste chaque fois que vous faites un geste relié à
l'agression, comme le fait de boire ou de vous prostituer : ces comportements
ne font qu'accroître encore votre honte.
9 Culpabilité. Associée
à la honte, la culpabilité vient de ce que l'on se croit
responsable de la violence dont on a été victime. Peut-être,
par exemple, vous sentez-vous coupable parce que vous avez accepté
des cadeaux ou de l'argent de la part de l'agresseur. Il faut pourtant
vous rappeler que cela s'est passé alors que vous étiez
enfant : les adultes sont censés protéger les enfants
et non abuser d'eux. Vous n'êtes pas responsable de ce
qui s'est passé.
10
Symptômes physiques.
Une foule de symptômes physiques peuvent être reliés
à une expérience de violence sexuelle vécue pendant
l'enfance. Les maux de tête fréquents, sensations d'étouffement,
nausées en présence de certaines odeurs vision trouble,
sensations de flottement ou douleurs au niveau des organes génitaux,
des fesses ou du dos, peuvent être des symptômes
reliés à une agression sexuelle dont vous auriez été
victime autrefois. Si votre médecin n'arrive pas à trouver
de cause médicale à ces symptômes, votre conseiller
pourrait peut-être vous aider à comprendre ce qui se passe.
Que puis-je faire pour obtenir l'aide dont
j'ai besoin ?
La première étape consiste à
admettre que l'on a peut-être été victime de violence
sexuelle autrefois. Si vous ne pouvez mettre le doigt sur un souvenir
particulier, mais présentez certains indices, vous vous devez
de pousser un peu plus loin votre investigation. Peut-être avez-vous
du mal à admettre qu'une autre personne ait pu vous dominer à
ce point. Peut-être même croyez-vous que le fait d'avoir
été agressé fait de vous un lâche. C'est
là une attitude erronée, héritée des vieilles
structures patriarcales de notre société, qui valorisent
le pouvoir, associé à la virilité, et dévaluent
la vulnérabilité, associée à la «
faiblesse » et à la féminité. Le déni
est à lui seul le principal obstacle qui empêche d'obtenir
de l'aide. Et, à cause, des valeurs qui prédominent dans
notre société, il est habituellement plus enraciné
chez les hommes que chez les femmes.
C'est pourquoi il faut du
courage pour admettre que l'on a été victime de
violence sexuelle. Mais une fois cette étape capitale franchie,
il reste encore à trouver un conseiller ou un groupe de soutien,
ou les deux. La meilleure façon de faire est de demander à
des gens en qui vous avez confiance de vous en recommander un. Lorsque
cela est impossible, vous pouvez communiquer avec des associations professionnelles
de counseling, qui vous donneront le nom de personnes qualifiées
qui s'occupent des victimes de violence sexuelle. Vous pourrez alors
faire votre choix et trouver un conseiller avec qui vous vous sentirez
assez à l'aise pour travailler.
Le counseling individuel prolongé
peut coûter cher, à moins de pouvoir consulter un psychiatre
dans le cadre d'un régime d'assurance-maladie provincial. Dans
certaines provinces, lorsqu'on porte plainte contre un agresseurs on
est parfois admissible au counseling auprès d'un psychologue,
d'un conseiller clinique ou d'un travailleur social clinique qualifié
par l'intermédiaire d'un programme d'indemnisation des victimes
d'actes criminels. Si vous ne pouvez porter plainte, informez-vous si
votre régime d'assurance-maladie complémentaire ou le
programme d'aide aux employés de l'endroit où vous travaillez
rembourse les frais de counseling. S'il vous est impossible de consulter
un conseiller, le groupe de soutien pourrait être une bonne alternative.
En quoi consiste l'intervention du conseiller
?
Une fois que vous avez avoué avoir été
victime de violence sexuelle dans votre enfance à votre conseiller,
vous avez franchi une nouvelle étape importante vers la guérison.
Toutefois, cet aveu comporte
parfois encore une part de déni. Cela se remarque aux caractéristiques
suivantes :
1
on admet qu'il y a eu agression, mais
on se dit que cela n'a pas vraiment eu de répercussions;
2
on parle de l'agression sur un plan
strictement intellectuel, abstrait ;
3
on insiste sur les aspects positifs
de sa relation avec l'agresseur en excusant en partie son comportement.
Un conseiller vous aidera
à mettre de l'ordre dans vos idées : une fois que vous
aurez complètement cessé de nier les faits, vous entrerez
plus facilement en contact avec vos émotions douloureuses.
Vous pourrez alors vous attaquer
sérieusement au traumatisme de l'agression de façon à
en éliminer les effets négatifs sur votre vie.
Votre conseiller vous interrogera
probablement sur certains indicateurs, comme l'abus d'alcool, les réminiscences
et les cauchemars. Cela peut en effet vous aider à mettre au
jour d'autres détails au sujet de l'agression. Le fait de se
rappeler ces détails et les émotions que l'on a ressenties
à l'époque peuvent s'inscrire dans le processus de guérison.
Mais votre conseiller vous invitera sans doute à ne pas aller
trop vite, car un afflux trop abondant et trop rapide de souvenirs peut
être perturbant. N'hésitez pas à le lui dire lorsque
vous avez besoin de temps pour comprendre et pour assimiler ce que vous
vivez. Votre conseiller peut aussi vous recommander de lire certains
ouvrages sur le sujet. Il peut aussi vouloir rencontrer votre conjointe
ou votre partenaire pour lui suggérer diverses façons
de vous aider à guérir. Il peut enfin vous recommander
de vous inscrire à un groupe de soutien pour victimes de violence
sexuel1e.
La relation que vous avez avec votre conseiller
est un partenariat. Vous décidez ensemble des sujets à
aborder et du moment opportun pour ralentir le rythme des séances
ou y mettre fin. Si vous n'êtes pas satisfait de votre conseiller,
vous avez le droit de changer.
Quel genre de questions les survivants de
la violence sexuelle posent-ils à leur conseiller?
« J'ai bien entendu parler de garçons
de cinq et six ans qui se faisaient agresser, mais moi, j'en avais dix
quand mon directeur m'a demandé de lui faire l'amour oral dans
la papeterie de l'école. N'étais-je pas assez vieux pour
savoir ce que je faisais ? N'aurais-je pas dû l'envoyer promener
? »
L'âge n'a rien à
voir, c'est uniquement de pouvoir qu'il s'agit ici. Les garçons
qui dépendent affectivement ou financièrement d'un adulte
ou d'un adolescent sont vulnérables à la violence sexuelle.
« J'avais dix-huit ans et j'étais
en première année au collège. Au cours d'une soirée,
le Dr Adams m'a demandé de lire un texte que j'avais écrit.
Tout le monde a levé son verre en mon honneur. J'étais
tellement fier que cela m'est monté à la tête. C'était
la gloire ! Tout ce dont je me souviens ensuite, c'est de m'être
réveillé dans un lit aux côtés du Dr Adams
profondément endormi, sa main entre mes jambes. Moi qui étais
assez âgé et assez brillant pour être au collège,
n'aurais-je pas dû me rendre compte de ce qui se passait ? »
Un professeur occupe une position
de pouvoir et peut facilement séduire ses élèves.
Les adolescent, qui sont victimes d'abus sexuels ont encore plus honte
et se sentent encore plus coupables que les jeunes garçons. Ils
ont beaucoup de mal à signaler qu'ils ont été agressés
et souvent, lorsqu'ils se décident à le faire, on ne les
croit pas. Même devenus des hommes, les garçons dont les
propos sont rapportés ci-dessus se sentaient toujours responsables
de leur malheur et en éprouvaient de la culpabilité.
Votre conseiller devra probablement
vous rappeler plusieurs fois que vous n'êtes ni responsable,
ni coupable de l'abus dont vous avez été victime.
« J'avais treize ans et j'étais
membre de l'équipe de basket-ball de septième année
à l'école. Un jour, après un match, le principal
m'a caressé. J'en ai parlé à mon oncle Georges
et il m'a dit que le principal était une tapette. Est-ce possible
? Pensez-vous que j'ai fait quelque chose pour l'attirer ? »
L'orientation sexuelle n'a
rien à voir avec la violence sexuelle. Qui plus est, ce n'est
pas une caractéristique propre à votre personnalité
qui vous rend responsable de l'agression. Les agresseurs sont des gens
qui exercent leur pouvoir sur des enfants parce que ceux-ci sont petits
et sans défense. À cet égard, la réponse
de l'oncle Georges est tendancieuse et témoigne de ses préjugés
à l'égard des homosexuels.
Un conseiller devra probablement vous rappeler
plusieurs fais que vous n'êtes ni responsable, ni coupable de
l'abus dont vous avez été victime.
« Quand monsieur Martin m'a agressé
au camp d'été, je me suis senti totalement dévalorisé.
L'autre jour, une femme que je connais et qui a été agressée
sexuellement par son beau-père pendant cinq ans m'a confié
qu'elle avait ressenti exactement la même chose. Les hommes et
les femmes victimes de violence sexuelle ressentent-ils les mêmes
choses ? »
En règle générale,
oui. Ils éprouvent tous le même sentiment de honte, d'isolement
et de dévalorisation. Ils présentent aussi beaucoup des
mêmes indicateurs. Toutefois, à cause d'un conditionnement
social différent, les hommes réagissent parfois différemment.
Les hommes sont en effet beaucoup plus susceptibles de donner libre
cours à leur colère, d'adopter des comportements anti-homosexuels
et de devenir à leur tour des agresseurs sexuels. Les femmes
retournent plus souvent leur colère contre elles-mêmes
et continuent à être victimisées dans leurs relations
adultes.
« Alors, si j'ai été agressé
sexuellement lorsque j'étais enfant, vais-je tôt ou tard
finir par m'en prendre moi aussi aux enfants ? L'autre jour, j'ai observé
deux enfants qui jouaient dans un parc. Lorsque je me suis mis au lit,
le soir, je me suis masturbé en pensant à eux. Ça
me rend complètement malade. »
De nombreux adultes et adolescents
condamnés pour violence sexuelle ont en effet eux-mêmes
été agressés sexuellement lorsqu'ils étaient
enfants. Il ne s'ensuit pas automatiquement que tous les garçons
agressés sexuellement deviennent à leur tour des agresseurs.
Vous pouvez avoir des pensées troublantes au sujet d'enfants
de temps à autre ; l'apparition de fantasmes sexuels est certes
un avertissement. Il est important de prendre conscience de ces
sentiments et de ces fantasmes et d'en discuter avec un conseiller pour
vous assurer que vous n'éprouverez pas le besoin de vous défouler
en passant à l'acte.
« Quand j'avais huit ans, ma gardienne
m'a fait mettre mon pénis dans son vagin. On ne peut certainement
pas parler ici de violence sexuelle : au contraire, cela m'a permis
d'être initié longtemps avant les autres et, encore aujourd'hui,
je fais un malheur auprès des femmes plus âgées.
Le mois dernier, par exemple, dans un congrès, l'une d'elle m'a
invité à monter dans sa chambre à l'hôtel
et m'a offert de l'argent pour que je la baise. Qu'y a-t-il de mal là-dedans
? »
Dans nos sociétés,
les hommes sont conditionnés à considérer toute
expérience sexuelle avec une femme comme « une bonne affaire
». Les jeunes garçons agressés sexuellement par
des femmes ou des adolescentes nient en général avoir
été abusés, utilisés et humilies. Il arrive
même qu'ils exploitent cette expérience pour se donner
de l'importance, sans comprendre, à quel point elle perturbe
aujourd'hui leurs relations d'adulte.
« Combien de temps ces séances
de counseling doivent-elles durer ? Je veux en finir au plus vite et
reprendre une vie normale. »
Comme la plupart des hommes,
vous avez probablement été conditionné à
agir et à obtenir des résultats rapidement. Mais on ne
traite pas une agression sexuelle de la même façon qu'on
tond le gazon ou qu'on règle une affaire commerciale. Le changement
personnel demande du temps et si vous avez été victime
à la fois de violence physique et affective, il vous faudra travailler
sur ces deux tableaux.
« Il y a autre chose..., un détail
important dont je n'arrive pas à me souvenir. Pouvez-vous m'hypnotiser
? »
Ce genre de demande est faite
par ceux qui pensent que la clé de leur problème se trouve
juste sous la surface et qu'il s'agit de mettre le doigt dessus pour
être instantanément guéri. Comme les questions précédentes,
cette demande découle du désir, fréquent chez les
hommes, de régler rapidement le problème. À mesure
que vous travaillerez avec votre conseiller, vous commencerez à
mieux comprendre la valeur du changement progressif.
L'histoire de Richard
Richard s'est adressé à un conseiller
sur les conseils du curé qui, après avoir discuté
quelque temps avec lui, le soupçonnait d'avoir été
victime de violence sexuelle dans son enfance. Richard souffrait de
sueurs nocturnes et se réveillait souvent dans des draps complètement
trempés, parfois même en criant après avoir rêvé
qu'un énorme animal l'attaquait. C'est sa femme qui l'avait imploré
d'aller parler au curé, affligée de cette habitude qu'il
avait d'interrompre l'acte sexuel avant d'atteindre l'orgasme. Richard
se plaignait souvent de douleurs au pénis pendant les rapports
sexuels et préférait les éviter.
Marié, Richard a eu trois brèves
aventures homosexuelles dans lesquelles il jouait le rôle passif.
Ces épisodes le remplissaient de honte et il se sentait indigne
de son mariage. Sa femme, craignant qu'il contracte le sida et le lui
transmette, menaçait de le quitter s'il recommençait.
Grâce au counseling, Richard a pu raconter
qu'il avait passé la majeure partie de son enfance avec sa mère
et ses cinq frères et soeurs dates un petit village de bûcherons.
Après la séparation de ses parents, sa mère s'était
mise à boire et avait eu plusieurs relations de courte durée.
Certains de ses amants étaient violents avec elle et avec ses
enfants. L'un d'eux, un travailleur de la scierie nommé Vincent,
était non seulement alcoolique et violent, mais aussi pédophile.
Les enfants ne savaient jamais quand Vincent
allait venir et vivaient dans un état de terreur permanent. Richard
s'est rappelé comment Vincent, ivre, montait dans son lit et
le masturbait avant de sombrer dans le sommeil.
À mesure que ses souvenirs remontaient
à la surface, les symptômes et les comportements de Richard
ont pris un sens nouveau. Ses sueurs nocturnes, ses cauchemars, ses
douleurs au pénis, sa crainte des relations sexuelles et ses
aventures homosexuelles étaient vraisemblablement associés
à l'agression dont il avait été victime. Le conseiller
a demandé à Richard de venir avec sa femme pour une séance,
afin d'expliquer à celle-ci le rapport qu'on pouvait établir
entre les symptômes de son mari et l'agression dont il avait été
victime dans son enfance, et de lui suggérer divers moyen de
l'aider.
Par ailleurs, il a recommandé à
Richard de s'inscrire à un groupe de soutien. Parce qu'il avait
vécu si longtemps seul dans un petit village, isolé de
ses frères et soeurs à cause de la honte que lui inspirait
les agressions dont il avait été victime, Richard a trouvé
son expérience en groupe particulièrement profitable.
Il a enfin pu s'exprimer librement parce qu'il savait que les gens qui
s'y trouvaient le comprenaient.
Il a fallu a Richard beaucoup de temps pour
guérir. Mais avec l'aide de son conseiller, de son groupe de
soutien et de sa femme, ses symptômes ont progressivement disparu.
Bien sûr, les cauchemars reviennent à l'occasion, mais
quand il se réveille, Richard comprend maintenant d'où
ils viennent et peut plus facilement se rendormir. S'il est encore craintif
sur le plan sexuel, sa femme ne tarit pas d'éloges à propos
de leur « nouvelle relation ». Leurs enfants perçoivent
d'ailleurs le changement et sont aujourd'hui beaucoup plus détendus
en présence de leurs parents.
C'est à vous de décider: pardonner
ou ne pas pardonner. Les deux options sont légitimes.
Quelle attitude adopter vis-à-vis de
l'agresseur?
Il peut être difficile de décider
des démarches à entreprendre vis-à-vis de votre
agresseur, mais vous devrez prendre une décision. Voici quelques
possibilités:
1
Les accusations au criminel. Vous pouvez
porter des accusations au criminel contre votre agresseur. La première
chose à faire est alors de signaler le cas à la police.
Les autorités policières porteront la question à
l'attention d'un procureur de la Couronne, qui décidera si les
preuves sont suffisantes pour porter la cause devant un tribunal provincial
ou fédéral. Le succès de la poursuite peut être
facilité par la présentation de preuves corroborantes
(des photographies prises par l'agresseur, par exemple) ou de preuves
de faits similaires (des renseignements fournis par d'autres victimes).
Le fait de porter des accusations
au criminel a l'avantage de faire porter le fardeau de la poursuite
au bon endroit, soit sur la société dans son ensemble.
Il est en effet contraire à la loi d'abuser sexuellement des
enfants : c'est donc un crime contre la société en plus
d'être un crime contre votre personne. Porter des accusations
au criminel est également un moyen de canaliser sa colère
de façon constructive, en obtenant justice. Par contre, le recours
aux tribunaux demande souvent beaucoup de temps et peut se révéler
très frustrant.
Vous pouvez aussi poursuivre
votre agresseur au civil. Cela peut être plus facile, car la norme
de preuve y est moindre qu'au criminel. Si le juge rend sa décision
en votre faveur, votre agresseur pourrait alors devoir vous dédommager
en argent, ce qui vous aiderait à payer votre thérapie
et vous indemniserait pour les heures de travail perdues à cause
des répercussions de l'agression.
2 La confrontation de l'agresseur.
Certains peuvent être tentés de trouver leur agresseur
et de lui dire face à face ce qu'ils pensent de lui. Cela peut
cependant se révéler plus difficile qu'il n'y paraît,
surtout si, une fois en face de lui, vous retrouvez soudainement vos
sentiments de petit garçon impuissant que vous étiez autrefois.
Il peut être satisfaisant de lui signifier de vive voix à
quel point ses actes ont été dévastateurs, mais
on risque aussi de se trouver face à quelqu'un qui nie les faits
ou qui les trouve insignifiants. Il faut donc prévoir les réactions
possibles de l'agresseur.
3 La revanche.
Certains caressent l'idée d'attaquer et de battre leur agresseur.
Si on peut se sentir justifié d'exprimer ainsi sa colère,
on risque par contre d'en payer cher les conséquences. On risque
notamment d'aggraver encore ses problèmes psychologiques ou même
d'aboutir en prison...
4
Le pardon.
On peut aussi choisir de pardonner à l'agresseur dans le cadre
du processus de guérison... ou de ne pas lui pardonner, parce
que son geste est trop grave, parce qu'il a trahi un pacte de confiance
et parce qu'il ne s'en repent pas. Certaines personnes de votre entourage
peuvent insister auprès de vous pour que vous pardonniez à
votre agresseur. Mais un pardon prématuré peut accroître
encore la culpabilité et bloquer le processus de guérison.
Si vous n'arrivez pas à pardonner à votre agresseur, vous
pouvez toujours vous dire qu'il obtiendra le pardon du dieu auquel il
croit. C'est à vous de décider : pardonner ou ne pas pardonner.
Les deux options sont légitimes.
5 L'oubli.
Vous pouvez décider de ne rien faire au sujet de l'agresseur
pour le moment et choisir de concentrer tous vos efforts à votre
propre guérison. L'oubli n'est pa, le pardon. Après vous
être occupé de vous-même pendant un certain temps,
peut-être déciderez-vous d'entreprendre quelque chose...
Sans doute voudrez-vous discuter
de ces diverses options avec votre conseiller, votre partenaire ou un
ami, mais n'oubliez jamais que c'est à vous-même que
vous devez être fidèle. La décision finale vous
revient de plein droit.
Que dois-je dire à ma ou à mon
partenaire ?
Si vous êtes membre d'un couple, votre
partenaire peut être pour vous une précieuse source de
soutien. Par soutien, on entend la capacité de partager la douleur,
de donner de l'amour, d'encourager et d'appuyer les décisions.
Mais ne prenez pas votre partenaire comme conseiller !
Cela exerce en effet une pression beaucoup trop forte sur la relation.
Et il est peut-être aussi abusif, sinon impossible, de demander
à votre partenaire de vous donner un avis objectif. Cherchez
soutien et réconfort auprès de votre partenaire et demandez
plutôt conseil à votre conseiller.
Il est important de raconter
à votre partenaire ce que vous vivez et ce que vous avez vécu.
Cela peut cependant créer certaines tensions... qui peuvent par
contre être profitables. Si votre partenaire a également
été victime de violence sexuelle, vous risquez ainsi de
lui rappeler de pénibles souvenirs ; mais vous pouvez alors profiter
de l'occasion pour consulter un conseiller tous les deux et essayer
de guérir ensemble. En exprimant en même temps les mêmes
besoins affectifs, vous risquez aussi de mettre votre relation à
rude épreuve ; pour vraiment s'aider, chacun doit être
capable de dire à l'autre quand il a besoin d'aide, quand il
est en mesure de donner de l'aide et quand il a besoin d'être
seul.
Peut-on guérir de la violence sexuelle
?
OUI, mais il faut voir cette guérison
comme un processus et non comme un projet aboutissant à un résultat
final. On ne peut espérer atteindre un moment de grâce
où, comme par magie, tous les problèmes s'évanouissent
et le bonheur s'installe en permanence. Il est plus probable qu'à
divers stades de votre vie, de nouvelles questions surgiront qui vous
inciteront peut-être à retourner voir un conseiller pendant
quelque temps.
La guérison se manifeste
plutôt par une diminution des symptômes liés à
l'agression sexuelle, par un accroissement de l'estime de soi, et par
l'instauration de relations plus satisfaisantes avec les autres. Vous
aurez davantage l'impression de maîtriser votre destinée.
En d'autres mots, au lieu de laisser le traumatisme de l'agression guider
votre vie, vous prendrez vous-même les affaires en main. Vous
pouvez certes mener une vie heureuse !
La guérison peut ressembler
à ce qui est arrivé à Richard. Richard a vu ses
symptômes pratiquement disparaître, sa relation avec sa
femme s'est améliorée, et ses enfants sont moins anxieux.
Ce n'est peut-être pas le bonheur total, mais c'est tout de même
mieux que l'enfer dans lequel il vivait avant sa guérison.
La guérison se manifeste souvent par
une diminution des symptômes liés à l'agression
sexuelle, par un accroissement de l'estime de soir, et par l'instauration
de relations plus satisfaisantes avec les autres.
Lectures suggérées
Brodie, Faithe. When the Other Woman Is His
Mother. Tacoma, Wa.: Winged Eagle Press, 1992.
Davis, Laura. Allies in Healing. New York,
New York: Harper Collins, 1991.
Engel, Beverly. Partners In Recovery: How
Mates, Lovers and Other Prosurvivors Can Learn to Support and Cope with
Adult Survivors of Childhood Sexual Abuse. Los Angeles, California:
Lowell House, 1991.
Gil, Eliana. Outgrowing the Pain Together.
New York, New York: Dell, 1992.
Graber, Ken. Ghosts in the Bedroom. Deerfield
Beach, Florida: Health Communications, 1991.
Hansen, Paul. Survivors and Partners. Longmont,
Colorado: Heron Hill Publishing, 1991.
Ce fascicule fait partie de la série
II des cinq livrets d'information sur la violence sexuelle :
Les filles victimes de violence sexuelle
Guide à l'intention des très jeunes
filles (Cat. #H72-21/101-1994)
Les hommes victimes de violence sexuelle dans
l'enfance
Guide à l'intention des survivants adultes
(Cat. #H72-21/102-1994)
Lorsque votre conjoint ou conjointe a été
victime de violence sexuelle
Guide à l'intention des conjoints (Cat.
#H72-21/103-1994)
Les adolescentes victimes de violence sexuelle
Guide à l'intention des adolescents (Cat.
#H72-21/104-1994)
Les agressions sexuelles entre frères
et soeurs
Guide à l'intention des parents (Cat.
#H72-21/105-1994)
La série I des livrets d'information
sur la violence sexuelle comprend les fascicules suivants :
Violence sexuelle - Que se passe-t-il lorsque
tu en parles ?
Guide à l'intention des enfants (Cat.
#H72-21-67-1991)
Les adolescents aux prises avec la violence sexuelles
Guide à l'intention des adolescents (Cat.
#H72-21-68-1991)
Les jeunes garçons victimes de violence
sexuelle
Guide à l'intention des jeunes garçons
(Cat. #H72-21-69-1991)
Counseling en matière de violence sexuelle
Guide à l'intention des enfants et des
parents (Cat. #H72-21-70-1991)
Les enfants sexuellement agressifs
Guide pour parents et enseignants (Cat. #H72-21-71-1991)
Les livrets sont disponibles au :
Centre national d'information sur la violence
dans la famille
Division de la prévention de la violence
familiale
Santé Canada
Ottawa (Ontario)
Canada K1A 1B5
Tél: 1-800-267-1291
Télécopieur: 1-613-941-8930
ATS: 1-800-561-5653
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