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Dispositions portant sur la protection et le recouvrement des salaires

Préparé par Roderick J. Wood

Résumé

Par le passé, un employé cherchant à récupérer un salaire impayé n'avait aucun droit légal ou recours judiciaire de plus que tout autre intéressé. Bien que les lois sur les normes d'emploi aient prévu qu'un employeur omettant de payer ses employés était passible de poursuite, la réalité était que cela ne représentait une menace crédible que dans les cas extrêmes. Pour offrir un recours effectif aux employés impayés, les provinces ont créé un système administratif pour l'arbitrage et la mise en application du recouvrement des créances salariales à l'endroit d'un employeur. Ce modèle a par la suite été incorporé au Code canadien du travail en 1993. Les systèmes de recouvrement salarial en place au Canada sont relativement efficaces et efficients en comparaison avec les modèles d'autres pays qui ont tendance à faire appel à des procédures plus formelles et qui sont dotés de mécanismes exécutoires moins puissants lorsqu'un employeur sommé de verser les salaires impayés omet de le faire. Il existe néanmoins une importante variabilité pour ce qui est des lois sur les normes d'emploi. Le présent rapport examinera les différentes approches législatives par rapport à diverses questions sur le système de recouvrement salarial afin de déterminer les meilleures. Le sujet des salaires impayés en cas d'insolvabilité en est un qui occupe les législateurs canadiens depuis plusieurs décennies et qui n'a toujours pas été abordé de façon satisfaisante. Le problème et les solutions proposées seront indiqués. De plus, les effets du Programme de protection des salariés faisant partie du Projet de loi C-55 feront l'objet d'un examen approfondi.

La première partie du présent rapport examine le processus de réclamation grâce auquel les créances salariales sont présentées, examinées, arbitrées et portées en appel. La deuxième partie examine les recours disponibles lorsqu'une ordonnance de paiement a été émise, mais que l'employeur ne s'y conforme pas. La troisième partie examine les effets de l'insolvabilité sur les créances salariales des employés.

La première partie conclut que le système de base d'arbitrage des créances est fondamentalement solide. Il génère un certain nombre d'appels (dans environ 7 % des cas où une ordonnance de paiement est émise), mais dans plus de 60 % de ces cas, les décisions initiales sont confirmées. Ces taux correspondent aux statistiques provinciales. Certaines compétences limitent les mécanismes administratifs de recouvrement salarial en excluant les réclamations périmées (vieilles de plus de six mois). Une limitation similaire pourrait être ajoutée si l'on croyait que l'arbitrage des réclamations périmées ajoutait des coûts excessifs au total. Il serait également utile d'envisager l'utilisation d'amendes et de sanctions administratives. On y fait appel dans la législation sur les normes d'emploi de plusieurs compétences provinciales. Elles sont utiles dans le cadre d'une structure incitatrice appropriée d'observation des obligations statutaires de payer aux employés les sommes qui leurs sont dues. De telles décisions ne devraient cependant pas être imposées aux directeurs et ne devraient pas avoir priorité sur les créanciers garantis dans les compétences où les créances salariales se voient conférer une « superpriorité » sur les réclamations des créanciers garantis.

On suggère également que le Code devrait, de façon plus poussée, refléter les méthodes non traditionnelles de paiement au moyen des méthodes utilisées dans le cadre de certaines lois provinciales. De plus, les obligations en matière de tenue de dossiers et de remise de bordereaux de paye devraient être rédigées à nouveau afin d'obliger l'employeur à divulguer le mode de paiement lorsqu'il fait appel à une méthode non traditionnelle.

En deuxième partie, on conclut que le mécanisme exécutoire de la partie III du Code canadien du travail présente une lacune très importante. L'inspecteur tentera d'appliquer l'ordonnance au moyen d'une demande d'une tierce partie (Ordre de versement à un débiteur de l'employeur) et, dans le cas d'une personne morale, de la disposition en matière de responsabilité des administrateurs. Si cela est insuffisant pour produire un paiement, la seule autre option est de demander à l'employé s'il désire déposer l'ordonnance auprès de la Cour fédérale. Une fois cela fait, aucune autre aide n'est offerte à l'employé pour l'application de sa créance. La réalité est que la plupart des personnes demandant le versement d'un salaire impayé ne se prévaudront pas de cette possibilité, même si des recours d'application très efficaces à l'endroit des biens et propriétés personnels sont conférés en vertu des lois provinciales. Bien que l'ordonnance de paiement soit déposée auprès de la Cour fédérale, les procédures d'application visant à recouvrer les sommes dues feront appel aux lois provinciales d'application de la compétence où se trouvent les biens. La création d'une unité de collecte spécialisée ne serait donc pas faisable. Certaines compétences permettent l'utilisation d'agents de recouvrement pour appliquer les ordonnances de paiement et cette possibilité devrait être étudiée.

La procédure de demande d'une tierce partie représente une sorte de saisie-arrêt interceptant des sommes dues à l'employeur par une tierce partie. Bien que très efficace, cette méthode a un talon d'Achille. Dans plusieurs cas, d'autres créanciers tenteront aussi de recouvrer leurs fonds et tenteront de pratiquer une saisie-arrêt ou de les saisir. De plus, les parties garanties ont versé des sûretés afin de garantir leurs créances. L'avis sera donc rendu inefficace si la somme a déjà été saisie ou grevée. Il serait donc nécessaire, afin d'accorder la priorité aux détenteurs de créances salariales sous ces circonstances, de conférer à ceux-ci une sûreté réputée ayant priorité sur les autres créanciers, y compris les créanciers garantis. La question de sûreté statutaire réputée est encore plus pertinente dans un cas d'insolvabilité (c.-à-d. lorsqu'un employeur est en faillite, sous séquestre ou tente une réorganisation) et les attributs d'une telle sûreté statutaire réputée feront donc l'objet d'un examen plus approfondi à la partie III du rapport.

La procédure de demande d'une tierce partie contient quelques ambiguïtés. Bien qu'aucune action n'en ait, à date, découlé, il existe un grand potentiel pour cela à l'avenir. La disposition pourrait être améliorée en clarifiant les obligations futures qui y seraient assujetties. La formulation utilisée dans les lois modernisées d'application de décisions est recommandée. La procédure serait efficace à l'endroit des créances futures découlant d'un contrat ou d'une relation actuelle entre la tierce partie et l'employeur. Elle devrait, de plus, contenir un délai d'un an après émission de l'avis.

Les dispositions sur la responsabilité des administrateurs contiennent une exigence qui rend le recouvrement de la part d'une personne morale impossible ou invraisemblable. Certaines compétences canadiennes ne contiennent pas une telle limitation. Bien qu'il soit généralement préférable de tenter en premier une action à l'endroit de l'employeur avant de s'en prendre à la responsabilité personnelle des directeurs, dans certains cas, les délais pourraient rendre impossible tout recouvrement à l'endroit de ces derniers. Une approche différente serait d'éliminer cette restriction, mais de donner au directeur ayant payé la créance le droit d'être subrogé à la priorité du salarié lors du recouvrement de la somme payée de l'entreprise employeuse.

Il serait utile, enfin, d'ajouter des exigences de garantie afin de composer avec les employeurs ayant des antécédents.

La partie III traite du risque d'insolvabilité. Toute discussion de cette question est compliquée en raison de la récente introduction d'un projet de loi sur la réforme de la Loi sur la faillite (Projet de loi C-55). S'il est adopté, ce projet modifiera de façon importante le statut des créances salariales en situation d'insolvabilité.

Selon le droit commun, les créances salariales ne sont que des créances ordinaires et se voient donc accorder une très faible priorité. Bien qu'on y ait traditionnellement accordé priorité par rapport aux autres créanciers ordinaires, elles étaient subordonnées aux créanciers qui prenaient une sûreté sur les biens de l'employeur. Plusieurs compétences ont, afin d'augmenter la priorité accordée aux créances salariales, ajouté des dispositions à leurs lois sur les normes d'emploi qui (1) offraient au salarié une sûreté réputée sur les biens de l'employeur et (2) garantissaient à la sûreté réputée la priorité sur les autres sûretés. Le Code canadien du travail ne contient pas de disposition équivalente. En conséquence, un employé ne recouvrera en général que très peu ou rien du tout lors de l'insolvabilité de son employeur.

Ces mécanismes provinciaux ne sont cependant pas efficaces dans tous les cas d'insolvabilité. Leur efficacité varie en fonction du type de procédure d'insolvabilité en question. Dans le cas d'une faillite, les mécanismes provinciaux sont rendus inopérants en raison de la doctrine de suprématie des lois constitutionnelles canadiennes. Elles sont, en revanche, très efficaces lors d'une mise sous séquestre ou d'une réorganisation. Le présent rapport préconise l'utilisation d'un mécanisme de sûreté statutaire réputée qui accorderait en fait aux travailleurs sous compétence fédérale la même position que les travailleurs des provinces ayant adopté de telles lois.

Le Projet de loi C-55 prévoit la mise en œuvre d'un Programme de protection des salariés qui offrirait des paiements pouvant aller jusqu'à 3 000 $ aux employés impayés dans des cas de faillite ou de mise sous séquestre. Ces paiements seraient financés à partir des recettes fédérales générales. Le gouvernement fédéral serait, en revanche, en mesure de récupérer une portion de ces fonds grâce aux recettes de faillite ou de mise sous séquestre en vertu d'une créance garantie, à la faveur des employés impayés, sur la liquidité, les comptes et l'inventaire. Cette créance se verrait accorder la priorité sur toute autre sûreté. Si ce projet venait à être promulgué, le besoin d'une sûreté statutaire réputée serait amoindri lors d'une situation d'insolvabilité puisque les employés se concentreraient sur le Programme comme source de paiement. La difficulté de cette approche est que les mécanismes statutaires provinciaux visant à recouvrer les salaires impayés sont souvent beaucoup plus complexes que la créance garantie fédérale proposée (touchant et une plus grande proportion du salaire impayé, et une plus grande variété des biens de l'employeur). Tels qu'ils sont présentement, ces mécanismes seraient rendus inopérants lors d'une faillite, mais vraisemblablement pas dans tout autre cas. Il serait nécessaire, dans ce contexte, de décider s'il est désirable d'offrir une protection accrue aux employés impayés sous compétence fédérale dans des cas n'impliquant pas une faillite.

Lors de l'établissement des attributs d'une sûreté statutaire réputée pour les employés sous compétence fédérale, on doit tenir compte des intérêts des créanciers garantis qui se fient sur les biens de l'employeur à titre de sûreté pour leurs prêts et crédits. Le mécanisme devrait être assujetti à une limite financière raisonnable permettant à une partie disposant d'une sûreté appropriée de gérer sa limite de prêt afin de refléter le risque que le bien donné en garantie ne lui sera pas disponible. La « superpriorité » ne devrait pas, non plus, s'appliquer aux créanciers garantis accordant un crédit à l'employeur afin de lui permettre d'acquérir de nouveaux biens lors d'un conflit de priorité par rapport à ces mêmes biens.

   
   
Mise à jour :  3/17/2006 haut Avis importants