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Notes pour
M. Thomas G. Flanagan, É.C.,
de la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire
pour la
Réunion annuelle de l’Association canadienne de surveillance civile du maintien de l’ordre
tenue à St. John’s (Terre-Neuve)
le 19 septembre 2002



SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

Table des matières

Introduction

Merci Gary (l’animateur Gary Mumford, Commission de police de la Nouvelle-Écosse), et Bonjour à tous! Je suis honoré de représenter la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire et d’être invité à parler de ce sujet crucial devant un auditoire sélect.

On doit considérer l’intégrité et la crédibilité des enquêtes sur les plaintes pour inconduite de policiers comme l’un des fondements de services de police responsables, qui assure la confiance du public envers les organismes d’application de la loi.

Ces facteurs sont également un élément essentiel d’une surveillance civile efficace des organismes d’application de la loi. Envers le public et les organismes que nous surveillons, nous avons la responsabilité de promouvoir des pratiques qui font en sorte que les enquêtes sur les plaintes pour inconduite de policiers soient non seulement complètes et impartiales, mais qu’elles soient perçues comme telles par tous.

Selon Paul Monty de CACOLE, la surveillance n’est pas une fonction statique; la communauté des organismes de surveillance civile qui en est chargée, afin de demeurer efficace, doit continuer d’être ouverte aux nouvelles idées et apprendre des autres juridictions.

Dans cet esprit, j’aimerais aujourd’hui traiter de quelques facteurs à considérer pour déterminer si, lors de plaintes pour inconduite de policiers, on doit procéder avec une équipe d’enquêteurs internes, faire appel à un organisme externe, ou recourir à une combinaison de ces deux méthodes. Je ne prétends pas avoir toutes les réponses, mais j’espère au moins permettre une réflexion et une discussion.

Avant d’examiner plus à fond ces questions, je vais vous parler quelques minutes de la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire et ce, pour deux raisons : premièrement, la Commission a été créée il y a à peine plus de deux ans et certains d’entre vous la connaissent mal. Deuxièmement, le mandat particulier de la Commission a des répercussions sur la façon dont nous examinons les enquêtes au sujet des plaintes pour inconduite de policiers.

La Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire

La Commission a vu le jour en décembre 1999 dans le cadre d’une réforme majeure de la Loi sur la défense nationale. De fait, il s’agissait de la révision la plus importante de la Loi depuis plus de 50 ans et elle portait presque exclusivement sur le système de justice militaire.

Je suis sûr que la plupart d’entre vous connaissent bien quelques-uns des événements qui ont mené à cette réforme de la Loi sur la défense nationale; le plus notoire d’entre eux est sans conteste le meurtre d’un adolescent somalien par des militaires canadiens affectés en Afrique orientale dans le cadre d’une mission humanitaire.

Le gouvernement du Canada a convoqué une commission d’enquête sur la mission en Somalie; en outre, l’ancien juge en chef de la Cour suprême, le regretté Brian Dickson, a été invité à présider deux groupes consultatifs spéciaux qui ont examiné le système de justice militaire.

La commission d’enquête a pris fin avant d’avoir terminé ses travaux; toutefois, le rapport qu’elle a produit de même que les rapports des groupes consultatifs spéciaux faisaient clairement état du besoin urgent de réformes du système de justice militaire. L’ancien juge en chef a été particulièrement insistant lorsqu’il a fait part du besoin d’un mécanisme d’examen qui soit indépendant afin de susciter la confiance et le respect envers le système de justice militaire.

Voilà donc le rôle qui a été attribué à la Commission lors de sa création.

La Commission présente beaucoup de points communs avec les autres organismes de surveillance civile; cependant, elle est unique de diverses façons. La Commission est indépendante du ministère de la Défense nationale; elle répond aux Canadiens par l’intermédiaire du Parlement. Sa présidente et ses membres sont des civils. La Commission est à la fois enquêteur et tribunal administratif.

La Commission a une portée d’action unique : elle a compétence au Canada et dans toutes les parties du monde où la police militaire des Forces canadiennes peut être déployée.

Une autre particularité de la Commission est que non seulement elle examine les plaintes relatives à la conduite des policiers militaires, mais elle a également compétence exclusive pour faire enquête sur les plaintes pour ingérence dans les enquêtes de la police militaire. Si un membre des Forces, quel que soit son grade, ou un cadre supérieur du ministère de la Défense nationale tente de s’ingérer dans une enquête d’un membre de la police militaire ou de l’entraver, ce dernier peut porter plainte à la Commission.

Tandis que les enquêtes suite aux plaintes d’inconduite d’un policie r militaire sont du ressort du Grand prévôt des Forces canadiennes, la présidente de la Commission surveille le déroulement de ces enquêtes, passe en revue les conclusions de celles-ci et, à sa discrétion, à toute étape du processus, elle peut décider d’assumer la responsabilité de l’enquête, si elle estime que cette démarche est dans l’intérêt public. Par ailleurs, même si elle n’a jamais exercé cette option en pratique, la présidente peut demander au Grand prévôt de se charger de l’enquête relative à une plainte pour ingérence.

La présidente est également habilitée à initier une enquête, que l’affaire concerne une plainte pour inconduite d’un policier militaire ou une plainte pour ingérence, qu’une plainte officielle ait été déposée ou même lorsqu’une plainte a été déposée puis retirée. Contrairement à de nombreux autres organismes de surveillance civile, la Commission ne peut imposer de mesures disciplinaires; cependant, à titre de chef d’un organisme quasijudiciaire, la présidente dispose de pouvoirs d’enquête considérables, notamment le droit de convoquer des audiences publiques et de contraindre des personnes à témoigner. La présidente peut également faire des recommandations fondées sur les conclusions des enquêtes de la Commission; si ses recomma ndations ne sont pas suivies, les responsables doivent motiver leurs décisions auprès du ministre de la Défense nationale et de la présidente. Cette dernière peut diffuser ses rapports au grand public, sous réserve des exigences de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Voila en bref ce qu’est la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire.

Les plaintes pour inconduite

Lors de plaintes pour inconduite de policiers, il y a trois types d’enquête que j‘ai mentionnés précédemment :

  • une enquête effectuée par des enquêteurs internes;
  • une enquête effectuée par un organisme externe;
  • une enquête faisant appel à des enquêteurs internes et externes.

Le choix le plus logique, qui permet que l’enquête soit complète et impart iale - et qu’elle soit perçue comme telle – semble être une enquête effectuée par un organisme externe. Toutefois, nous ne pouvons l’affirmer de manière catégorique car nous nous limiterions trop. Cependant, est-ce qu’une enquête menée par le service peut être adéquate, voire souhaitable dans certaines situations?

L’enquête interne

Quelquefois le public considère que l’enquête interne est biaisée; on réfère à cette méthode de manière un peu péjorative « les policiers qui font enquête sur eux-mêmes ». Dans les cas d’infractions relativement mineures qui ne mettent pas en cause des officiers supérieurs ou en l’absence de circonstances qui pourraient donner à l’affaire un caractère sensible particulier, un recours judicieux à l’enquête interne peut être la meilleure marche à suivre.

Pour maintenir de bonnes relations à long terme avec les services de police que nous surveillons, il est important que les « surveillants civils » évitent les chasses aux sorcières. Une surveillance ne peut être efficace que si le « surveillant et le surveillé » se font confiance et se respectent.

L’organisme de surveillance doit être considéré comme un intervenant impartial qui permet d’améliorer le professionnalisme de l’agence chargée de l’application de la loi et il doit être respecté à ce titre. En l’absence de coopération entre l’organisme de surveillance et le service de police, il peut en découler une baisse du moral et une diminution de l’efficience, ce qui peut nuire à la communauté que nous servons. D’autres facteurs entrent en considération. Les enquêtes internes peuvent être initiées rapidement, en faisant appel aux ressources existantes. Si vous me permettez de contredire la croyance populaire, je dirais qu’elles peuvent même être plus complètes qu’une enquête effectuée par un organisme externe.

Si je me fie à mon expérience de policier, il existe sans conteste un lien de solidarité entre les agents de police et ce, partout dans le monde. C’est le fameux « tous pour un ». Il importe de comprendre cependant que ce sentiment agit dans les deux sens : si un policier déshonore son uniforme, tous ses collègues se sentent déshonorés.

Selon mon expérience, les responsables des enquêtes internes font des efforts – et même souvent de trop gros efforts – pour mener des enquêtes très approfondies sur les allégations d’inconduite.

De fait, il s’agit là d’une des difficultés que présente une enquête effectuée par une organisation externe. Il est très probable que les policiers du service qui fait l’objet de l’enquête réagissent mal et considèrent qu’on doute de leur impartialité. Dans certains cas, il se peut qu’une enquête interne soit la seule solution pratique.

Parfois, il faut des compétences particulières ou des connaissances spécialisées pour procéder à une enquête adéquate; ou encore, on doit trouver une solution à des problèmes de temps, de distance et de coût.

Cette affirmation vaut certainement dans le cas de la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire; en effet, celle-ci peut être tenue de traiter des plaintes aux endroits où des membres de la police militaire des Forces canadiennes sont déployés, n’importe où, notamment des théâtres de guerre, comme l’Afghanistan.

Naturellement, ces situations peuvent créer des problèmes particuliers. Dans une zone de combat, les préoccupations opérationnelles de la mission de même que la sécurité du personnel affecté à la mission doivent avoir priorité sur le souhait de confier l’enquête à des spécialistes externes qui viendraient recueillir des preuves et faire des entrevues avec des témoins.

En outre, on doit parfois résoudre des questions de juridiction : lors de certaines affectations, les règles des Forces canadiennes peuvent devoir céder le pas à celles des Nations Unies, par exemple.

L’enquête externe

Ceci dit, en cas de plainte pour inconduite de policiers, les enquêtes internes présentent des désavantages inhérents que nous connaissons bien – tout comme les organisations de police que nous surveillons.

Les administrateurs des services de police sont de plus en plus conscients de l’importance de la perception du grand public envers la police; ils sont donc très heureux, voire soulagés, que des organisations externes soient chargées des enquêtes sur les allégations d’inc onduite, en particulier celles qui touchent des officiers supérieurs ou qui portent sur des questions délicates. Je crois que la surveillance civile a joué un rôle crucial dans cette évolution. Plus que jamais, la police comprend la nécessité d’être considérée comme étant au-dessus de tout soupçon. Par exemple, dans certaines circonstances, on doit faire appel à une organisation externe, comme l’Unité des enquêtes spéciales en Ontario. Pendant que j’étais chef de police à Ottawa, le procureur de la Couronne local a été soupçonné de voies de fait dans la voie d’accès de son garage. On a allégué qu’il avait appliqué le bout de sa botte à l’arrière-train d’un adolescent qui, à son avis, harcelait un voisin âgé. Même si, à proprement parler, il ne s’agissait pa s d’un cas d’inconduite d’un policier, j’étais très conscient du lien que le public ne manquerait pas de faire entre la police et le procureur. Je n’ai donc pas hésité à demander à un service de police externe d’effectuer l’enquête.

Néanmoins, je répète mon avertissement antérieur à propos de l’exigence d’une enquête externe dans tous les cas.

Outre les risques pour les relations entre l’organisation d’application de la loi et l’organisme de surveillance civile, le fait de confier à une organisation externe toutes les enquêtes relatives aux allégations d’inconduite a l’effet non souhaité, selon le professeur Stenning de l’Université de Toronto :

(traduction)
de permettre aux officiers supérieurs de police d’éviter toute responsabilité à l’égard des situations qui ont donné lieu aux plaintes et de la réaction à ces situations.

La tentation est forte. Il est rassurant de pouvoir toujours dire aux journalistes la même réponse: « Sans commentaire; je regrette. Vous devrez vous adresser aux agents de … qui sont chargés de l’enquête ». Ceci dit, il faut éviter d’agir de manière frivole ou nuisible et évaluer soigneusement toutes les options.

L’enquête conjointe

La troisième possibilité est l’enquête conjointe; on fait alors appel aux enquêteurs d’une organisation externe d’application de la loi, qui apportent leur aide aux enquêteurs internes.

Cette méthode présente également des avantages. Entre autres, l’enquête sur une plainte pour inconduite peut commencer immédiatement comme une enquête interne; puis, lorsque le représentant de l’organisation externe arrive, il peut revoir le travail accompli jusque là et poursuivre l’enquête avec le concours du personnel interne. À mon avis, il est préférable que l’organisation interne ne procède qu’à la collecte préliminaire des faits et des documents et que l’enquête proprement dite soit effectuée conjointement. Une enquête conjointe peut également être utile lorsqu’on doit faire appel à des compétences ou connaissances locales, notamment dans les cas de plainte pour inconduite concernant un membre de la police militaire des Forces canadiennes. Un enquêteur d’une organisation externe pourrait perdre beaucoup de temps à comprendre les acronymes ainsi que les particularités de la culture militaire et de la chaîne de commandement.

Pour ce qui est de la perception du public, l’enquête conjointe permet à une organisation d’application de la loi de manifester sa volonté d’être soumise à un examen externe, sans éviter sa responsabilité à l’égard de la conduite d’ un de ses propres membres. Dans ces cas, on doit choisir soigneusement l’enquêteur externe; ce dernier doit être véritablement considéré comme indépendant. Par exemple, un policier détaché auprès de l’organisation primaire et placé sous le commandement de celle-ci, ne serait pas considéré comme un enquêteur externe.

Conclusion

Bref, lorsqu’il s’agit de choisir une méthode d’enquête concernant une plainte pour inconduite d’un policier, on doit tenir compte de toutes les circonstances. Parfois, une enquête interne est la méthode la plus adéquate ou la seule qui soit pratique; dans certains cas, il est très évident que seule une enquête externe pourra répondre aux critères obligatoires d’une enquête qui sont, en apparence et dans les faits, la minutie et l’impartialité. Dans d’autres cas, une enquête conjointe permet de combler ce besoin. Le mot-clé est donc la souplesse. Les organismes de surveillance civile doivent collaborer avec les organisations d’application de la loi pour déterminer un ense mble de lignes directrices qui aideront les deux parties à choisir le type d’enquête le mieux adapté à la situation. À mon avis, il est crucial qu’existe un dialogue entre « surveillés et surveillants » qui permet compréhension mutuelle et entente.

Dans les Forces canadiennes, ces lignes directrices sont fondées sur un certain nombre de facteurs relatifs à l’infraction alléguée, notamment la gravité et le caractère délicat de celle-ci. Habituellement, on qualifie de « délicate » une infraction qui met en cause un officier supérieur ou un fonctionnaire du ministère de la Défense, ou encore, une infraction qui porte sur du matériel qui pourrait jeter le discrédit sur l’organisation. Vous avez sans doute remarqué que j’ai utilisé l’expression « lignes directrices » et non le mot « règlement ».

Chaque cas est différent; en outre, divers facteurs permettent de déterminer si une affaire peut être considérée comme délicate ou grave. Par exemple, si un officier est accusé d’une indiscrétion mineure mais qu’il s’agit de la vingtième infraction de ce genre depuis deux ans, on peut alors décider que ce n’est plus un incident mineur et qu’une enquête externe est justifiée.

Enfin, je dois dire, en terminant, que si l’on fait une erreur en choisissant la méthode la plus efficace de faire enquête sur une plainte pour inconduite, il est préférable de pêcher par excès de prudence.

Je vous remercie. Il me fera plaisir de répondre à vos questions après la pause.

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Mise à jour:  2003-12-21 Retour au haut de la pageAvis Importants