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Notes pour une allocution

Louise Cobetto

Présidente

Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire

« Surveillance civile dans un contexte international et national : droits de la personne et maintien responsable de l’ordre »

Conférence conjointe CACOLE / IACOLE 2001
Québec, Québec
15 juin 2001

Bonjour.

Avant toute chose, j’aimerais dire que je suis très heureuse et honorée d’avoir été invitée à prendre part au présent forum, aux côtés de mes distingués collègues de ce panel.

Comme vous le savez sans doute, la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire du Canada que j'ai l'honneur de présider depuis sa création est responsable de la surveillance civile de la police militaire des Forces canadiennes au Canada et où que ces dernières soient déployées à l’étranger.

Ainsi, la portée de la Commission est à la fois nationale et internationale. Dans ce contexte, il existe plusieurs défis associés à l’accomplissement de mes responsabilités à titre de présidente de la Commission.

J’aimerais aborder certains de ces défis cet après-midi, mais je commencerai par quelques considérations au sujet de la Commission même.

La Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire a vu le jour en décembre 1999, dans le cadre d’une réforme majeure de la Loi sur la défense nationale du Canada. C’est un organisme externe et autonome, indépendant des Forces canadiennes et du ministère de la Défense nationale. La Commission se rapporte directeme nt au Parlement du Canada, et aux Canadiens, par l’entremise du ministre de la Défense nationale.

La Commission, dont tous les membres sont des civils, a pour mandat d’assurer une plus grande imputabilité publique de la conduite de la police militaire et de la chaîne de commandement lors d’enquêtes concernant la police militaire.

Bien que sans pouvoir exécutoire, la Commission peut formuler des recommandations qui peuvent avoir un impact considérable à l’égard des personnes faisant l’objet de plaintes.

À quelques variations près, la procédure d’examen des plaintes et les pouvoirs qu’a la Commission en matière d’enquête des plaintes pour inconduite contre des membres de la police militaire sont caractéristiques d’un organisme de cette nature.

Ce qui distingue la Commission des plaintes concernant la police militaire, c’est qu’elle peut enquêter au sujet de plaintes d’ingérence. Il s'agit d'une première dans le monde.

Tout membre de la police militaire qui a des motifs raisonnables de croire qu’un officier, militaire du rang ou un cadre supérieur civil du ministère de la Défense nationale, a tenté de manière abusive d’infléchir ou d’entraver une enquête peut déposer une plainte. Il faut noter que les plaintes d’ingérence concernent non seulement des situations liées à la chaîne de commandement, mais aussi des allégations d’intimidation par un membre des Forces canadiennes ou un cadre supérieur civil du ministère.

L’enquête initiale ayant trait à une plainte d’inconduite relève du grand prévôt des Forces canadiennes. En revanche, l’enquête relative à une plainte d’ingérence est une responsabilité exclusive de la Commission.


La Commission a d’autres pouvoirs spéciaux. Elle peut, entre autres, sans qu’une plainte ait été déposée, ordonner la tenue d’une enquête si la présidente juge qu’il en va de l’intérêt public. La Commission peut également tenir une audience publique dans le cadre d’une enquête et contraindre des personnes à témoigner lors de l’audience.

Bien que peu de gens contestent le fait que la surveillance civile engendre un maintien plus responsable des forces de l’ordre et, par conséquent, l’amélioration des droits de la personne et de la crédibilité de la police, l’introduction de la surveillance civile au sein de tout organisme d’application de la loi peut se révéler difficile pour les deux parties.

En tant que société, nous exigeons beaucoup de nos services de police. Nous nous attendons à ce qu’ils soient à notre service, qu’ils assurent notre protection et qu’ils règlent les situations dangereuses pour nous. En retour, nous leur confions des pouvoirs spéciaux et nous escomptons qu’ils les exerceront dans le plein respect des droits de la personne et de la dignité.

L’idée d’une commission composée uniquement de civils pour examiner les intentions et juger de la conduite de la police suscitera, à tout le moins, un certain ressentiment.

De plus, il semble que la mise sur pied d’un organisme de surveillance civile fait rarement partie d’une planification stratégique. Au contraire, elle survient fréquemment en réaction à une quelconque crise, ce qui accroît la perception que c’est une sorte de punition.

C’est le cas pour la création de la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire du Canada.

Durant les années 1990, une série d’incidents auxquels des membres des Forces canadiennes étaient mêlés a soulevé de sérieuses questions au sujet des militaires canadiens en général, et de l’administration de la justice militaire canadienne en particulier.

Les Forces canadiennes, depuis longtemps une source de fierté pour les Canadiens en raison de l’excellence de leur travail en situation de crise nationale et internationale, sont vite devenues une source de malaise après qu’il a été révélé que des soldats canadiens déployés en mission de paix en Somalie au début des années 1990 avaient torturé et battu à mort un jeune Somalien.

Par la suite, le système de justice militaire s’est retrouvé dans la lumière des projecteurs et les Canadiens n’ont pas apprécié ce qu’ils ont vu.

Une enquête publique exhaustive présidée par l'honorable Gilles Létourneau a été tenue sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie.

De plus, le regretté très honorable Brian Dickson, ancien juge en chef de la Cour Suprême du Canada, a été chargé de présider le Groupe consultatif spécial sur la justice militaire et les services d’enquête de la police militaire.

Les deux rapports du Groupe consultatif spécial et le rapport de la Commission d’enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Soma lie étaient on ne peut plus clair et faisaient état de la nécessité d’apporter des changements majeurs si les militaires et leur système de justice voulaient se conformer aux notions d’équité, de transparence et de responsabilité auxquelles on s’attend dans une société moderne et démocratique.

Le rapport sur l’enquête en Somalie en particulier a révélé des conflits d’intérêt, l’influence du commandement et un manque d’indépendance dans les enquêtes portant sur l’inconduite durant la mission.

Le gouvernement du Canada a réagi à ces rapports en 1998 avec la révision la plus importante en cinquante ans de la Loi sur la défense nationale.

Presque tous ces changements visaient une réforme afin de moderniser l’administration de la justice au sein des Forces canadiennes – de la police militaire aux tribunaux militaires.

C’est dans ce contexte de bouleversement et de perte de confiance de la population envers les militaires et la justice militaire que la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire est apparue dans la loi révisée sur la Défense nationale. À tort ou à raison, sa création a presque certainement accentué l’impression que les militaires avaient de se sentir assiégés par le gouvernement et la population du Canada.

Afin de réussir, la Commission se devait d’agir rapidement pour dissuader les membres des Forces canadiennes que sa mise sur pied équivalait à une quelconque chasse aux sorcières et, du même coup, persuader la population canadienne que la Commission était plus qu’une initiative de relations publiques pour le compte des Forces canadiennes.

Autrement dit, il était impératif d’établir la crédibilité et l’identité de la Commission.

Pour une organisation aussi jeune que la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire, se montrer à la hauteur de cette tâche demeure un processus incessant.

Outre d’engager du personnel, de trouver de l’espace à bureaux et de l’équipement, et de parcourir les eaux mystérieuses de la bureaucratie fédérale – sans compter l'ouverture de dossiers relatifs à 83 plaintes pour notre première année d'opération – nous avons entrepris des activités de promotion.

Ces activités visent principalement à démontrer aux membres des Forces canadiennes comment la Commission peut être un partenaire, plutôt qu’un adversaire, et ainsi contribuer à rétablir la confiance et la fierté envers les Forces canadiennes et à engendrer un nouveau sentiment de professionnalisme au sein de la police militaire.

Ces activités de promotion ont aussi pour but de sensibiliser les gens au rôle et au mandat de la Commission et de faire en sorte que tous – le personnel militaire comme les civils – soient au courant de leur droit à faire entendre et examiner leur plainte. Comme le veut le dicton, c’est bien d’avoir des droits, mais encore faut-il savoir lesquels et comment s’en prévaloir, sinon ils ne vous sont pas très utiles.

À titre de présidente de la Commission, j’ai prononcé des discours lors d’un certain nombre de réunions des Forces canadiennes durant la dernière année, et j’ai fait des présentations dans plusieurs bases des Forces canadiennes où j’ai discuté avec des membres de la police militaire et les commandants des bases.

J’ai visité les membres de la police militaire des Forces canadiennes déployés au sein de la Force de stabilisation de l’OTAN en Bosnie.

Chaque fois, j’ai été enchantée de la cordialité de l’accueil. Nombre de membres de la police militaire, en particulier ceux qui sont en service en Bosnie, m’ont fait part de leur appréciation pour l’intérêt que la Commission leur porte.

Je tiens à souligner la collaboration importante de la chaîne de commandement des Forces canadiennes et de leur personnel. Le chef et le vice-chef de l’état-major de la défense, le grand prévôt et d’autres ont su favoriser les occasions pour que je puisse rendre visite aux membres des Forces et de la police militaire et m’entretenir avec eux.

Les échanges entre la Commission et les Forces canadiennes durant la dernière année sont très encourageants et absolument essentiels au succès de la Commission.

Le besoin d’apporter des changements était manifeste et urgent. Que les militaires soient capables de considérer la Commission comme un agent de changement positif est des plus prometteurs.

Cela ne signifie pas qu’il ne reste plus de défis à relever :

  • Depuis le début de ses activités, la Commission a reçu une seule plainte pour ingérence. Je me demande si c’est le reflet de la réalité ou d’une crainte d’être l’objet de représailles de la part de ceux qui pourraient avoir une plainte légitime. Nous devons trouver le moyen d’assurer les membres de la police militaire que le dépôt d’une plainte pour ingérence ne mettra pas en péril leur carrière ou leurs possibilités d’avancement.
  • Nous devons trouver le moye n d’informer les citoyens de pays où les Forces canadiennes sont déployées qu’ils ont aussi le droit de déposer des plaintes liées à l’inconduite. C’est particulièrement important dans des régions où l’ordre public n’est pas respecté, où il n’est pas toujours possible d’inclure les termes « police » et « respect des droits de la personne » dans une même phrase – bref, des régions où la police militaire, de par sa conduite, influe non seulement sur la façon dont les autres perçoivent les Canadiens mais aussi sur notre propre perception de nous-mêmes.
  • La surveillance d’un service de police déployé dans un vaste pays et partout dans le monde suppose forcément des difficultés logistiques. Nous devons trouver le moyen de traiter de questions comme l’accès aux témoins et d’autres aspects des enquêtes de manière pratique et rentable.
  • Dans un contexte militaire, le défi de faire observer les principes d’ouverture et de transparence pendant les enquêtes, sans entraver la sécurité ou les opérations, existera toujours.
  • De plus, il nous reste quelques mises au point à faire à l’organisation de la Commission, du personnel à engager et dans l’élaboration de politiques et de procédures.

C’est une entreprise exigeante, mais avec l’appui et la collaboration des Forces canadiennes et de la police militaire, je suis persuadée que nous réaliserons notre vision : faire en sorte que la police militaire se conforme aux normes déontologiques les plus élevées et dissuader toute ingérence dans les enquêtes de la police militaire.

Cela étant, la Commission estime pouvoir contribuer sensiblement à améliorer la protection des militaires et de la population, et favoriser un plus grand respect pour les droits et libertés de la personne partout où la police militaire est en service.

Je vous remercie de votre attention.

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Mise à jour:  2003-12-21 Retour au haut de la pageAvis Importants