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Table des matières1. PRINCIPES GÉNÉRAUX GUIDANT L'EXAMEN DES NORMES 2. APPLICATION UNIVERSELLE DE LA LOI 4. CONCILIATION TRAVAIL-FAMILLE : UNE URGENCE 5. MODIFICATIONS PROPOSÉES AUX NORMES ACTUELLES 6. FORMATION PROFESSIONNELLE ET APPRENTISSAGE CONTINU IntroductionLa Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) est la plus importante centrale syndicale au Québec. Elle représente plus de 500 000 travailleurs et travailleuses, dont plus de 100 000 se trouvent sous la juridiction du Code canadien du travail et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Plusieurs syndicats affiliés sont actifs dans des secteurs de compétence fédérale, notamment le transport interprovincial, les télécommunications, la poste, les banques, etc. La FTQ est heureuse que le gouvernement fédéral ait décidé, par l'entremise de votre Commission, d'initier un nouvel examen de la Partie III du Code canadien du travail. Nous croyons qu'un tel examen s'impose en raison des changements survenus au cours des dernières décennies dans les modes de production, la prestation de services et l'organisation du travail en général. Ces changements ont, en général, précarisé l'emploi et détérioré les conditions de travail. Nous croyons que des modifications importantes devront être apportées au Code afin qu'il permette de défendre les droits des travailleurs et travailleuses de façon efficace. Qu'il nous soit permis de rappeler qu'il fut un temps où le Code canadien du travail était un exemple à suivre pour les provinces et pour d'autres pays. Force est d'admettre que ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les normes canadiennes sont en dessous des normes minimales du Québec, sans compter que leur application effective laisse grandement à désirer. Souhaitons que cet examen saura renverser cette tendance de l'histoire récente. Pour l'instant, les travailleurs et travailleuses québécois sous juridiction fédérale continuent à divers égards d'être traités comme des citoyens de seconde zone. C'est une des raisons importantes qui motive notre participation à l'examen en cours. Nous voulons également nous assurer que les particularités du monde du travail québécois soient prises en considération. Le Congrès du travail du Canada (CTC), ainsi que plusieurs de nos syndicats affiliés, ont aussi soumis des mémoires à votre attention. D'entrée de jeu, nous tenons à souligner notre accord avec les propositions contenues dans ces mémoires. 1. Principes généraux guidant l'examen des normesAvant de soumettre une liste de propositions concernant des articles particuliers du Code, nous voulons porter à votre attention plusieurs principes qui devraient, à notre avis, guider l'examen en cours.
2. Application universelle de la loiLa FTQ considère que tous les travailleurs et travailleuses devraient être traités par la loi de manière équitable et égale. À cet égard, deux types de problèmes essentiels handicapent le Code canadien du travail : les problèmes liés à l'exclusion et les problèmes liés à la mise en œuvre. De notre point de vue, aucune exclusion à la loi n'est justifiable. Les dispositions qui excluent les travailleurs et travailleuses permettent aux employeurs de leur accorder un traitement inférieur aux conditions de travail minimales. Par exemple sur la base de la notion de « :service continu :», un travailleur ou une travailleuse qui n'a pas au moins trois mois de service se voit refuser le droit de s'absenter pour maladie. Autre exemple : les travailleurs et travailleuses qui ont droit à une pension de retraite sont de ce fait exclus du droit de toucher une indemnité de départ dans le cas où ils ou elles seraient licenciés. Au chapitre de la mise en œuvre, il n'est pas inutile de rappeler que le Code canadien du travail est une loi d'ordre public, c'est-à-dire que ses dispositions constituent des normes minimales qu'il est interdit d'enfreindre. Des lacunes au chapitre de la mise en œuvre (par exemple l'absence de recours appropriés) permettent à des employeurs, pratiquement en toute impunité, de priver des travailleurs et travailleuses d'avantages auxquels ils et elles ont légalement droit. Leur situation serait améliorée s'ils et elles pouvaient seulement bénéficier des droits et avantages qui existent déjà dans la loi, or ce n'est pas le cas actuellement. 2.1 En finir avec les disparités de traitement2.1.1 Inclure les travailleurs et travailleuses atypiques dans la loiLes emplois précaires sont habituellement à temps partiel, occasionnels, temporaires; ce sont également les contrats à durée déterminée, le travail à domicile, intérimaire, à la pige, etc. Les personnes qui détiennent ce type d'emploi, en majorité des femmes et des jeunes, constituent aujourd'hui près de 40% de la main d'œuvre et ont trop souvent des conditions de travail inférieures aux autres. Ce phénomène préoccupe la FTQ depuis longtemps déjà. Dans les années 80 et 90, lors de consultations visant à modifier la Loi sur les normes du travail du Québec et lors de débats sur la condition féminine ou sur les clauses dites « :orphelin :», la FTQ a réaffirmé avec force l'importance d'assurer le caractère universel de la loi. Ces débats ont finalement amené le gouvernement du Québec, en 2002, à créer un comité d'experts (Comité Bernier) afin d'analyser les besoins de protection sociale des travailleurs et travailleuses atypiques. Le rapport du comité Bernier1 reprend plusieurs des positions traditionnelles de la FTQ, en particulier sur l'importance d'assurer que les normes minimales soient appliquées sans exclusions et que les avantages sociaux conférés par la loi soient accessibles au plus grand nombre. La Commission aurait avantage à étudier les recommandations du comité Bernier.Nous n'avons pas l'intention de reprendre ici tous les articles du Code qui excluent explicitement ou implicitement ces employés et employées. Nous recommandons, cependant, que la Commission mette à l'épreuve le texte de la loi en prenant les cas concrets des travailleurs et travailleuses atypiques. Ce faisant, la Commission devrait notamment :
2.1.2 Inclure les cadres et professionnels dans la loiL'article 167 a pour effet d'exclure de l'application des normes sur la durée du travail les personnes qui exercent des fonctions de direction et celles qui exercent une profession. Cette exclusion ne nous semble pas reposer sur des fondements solides dans la mesure où leur capacité à réellement contrôler leurs heures de travail ne se vérifie pas systématiquement. Ces personnes, en particulier les cadres de bas niveau et les professionnels, sont soumis aux mêmes types de pressions nuisibles à leur santé et à leur capacité de concilier famille et travail que les autres catégories de travailleurs et travailleuses. Souvent, leur lien d'emploi n'est pas foncièrement différent de celui qui lie les autres catégories d'employés à leurs employeurs. Nous pensons que la loi ne devrait pas exclure les cadres et les professionnels de l'application des normes sur la durée du travail. 2.2 Rendre justice de façon effectiveComme nous l'avons mentionné, une des faiblesses importantes de la loi actuelle réside dans son application déficiente. Dans une étude récente2, le Réseau canadien de recherche en politiques publiques et l'Institut d'administration publique du Canada révèlent qu'une intervention majeure des autorités fédérales est nécessaire afin d'assurer le respect des normes d'emploi. Ces institutions signalent qu'il sera notamment nécessaire de :
Ce sont là des recommandations que la FTQ a déjà mises de l'avant par le passé à l'égard des normes minimales au Québec3. Nous avons notamment recommandé que les normes minimales incluent une obligation d'affichage des normes sur les lieux de travail. 2.2.1 Droit de plainte, capacité de représentation et protection pour l'exercice d'un droitLe Code canadien du travail ne confère pas à l'employé le droit de porter plainte, ne prévoit pas de mécanisme de représentation permettant d'assurer à l'employé les moyens de faire face à un processus judiciaire complexe et, au surplus, ne prévoit aucune protection de l'employé pour l'exercice d'un droit conféré par cette loi. Nous pensons que le droit de porter plainte contre un employeur devrait figurer explicitement dans le texte de loi. Ce droit devrait être accompagné d'un mécanisme conférant des ressources publiques aux travailleurs et travailleuses afin de leur garantir une représentation juste tout au long du processus de plainte. Ce droit devrait s'appliquer notamment dans les cas des travailleurs et travailleuses qui se croient injustement congédiés. Les plaintes devraient pouvoir être faites de façon anonyme. Nous proposons également que la loi inclue une protection de l'employé contre toute possibilité de congédiement, mise à pied, rétrogradation ou autre mesure disciplinaire pour avoir exercé l'un des droits conférés par la loi. 2.2.2 Étendre les pouvoirs des inspecteursLe modèle proposé par le Code canadien du travail porte à judiciariser nombre de problèmes qui pourraient être réglés en moins de temps et à moindre coût pour les parties et le reste de la société. « :Déjudiciariser :» les processus en donnant plus de pouvoirs aux inspecteurs pourrait permettre de rendre justice de façon rapide et effective. Il est notoire qu'une grande quantité des cas de plaintes provenant des employés porte sur des sommes dues par les employeurs. Il existe dans la loi un mécanisme, celui du « :recouvrement des salaires :», qui pourrait être étendu afin de régler en amont des conflits qui n'ont pas toujours besoin d'être judiciarisés. Nous proposons que les pouvoirs octroyés aux inspecteurs et inspectrices par le mécanisme de recouvrement du salaire soient étendus pour inclure tous les montants dus par l'employeur à l'employé. En raison de confusions quant à l'interprétation de ce pouvoir (certains inspecteurs ne se croient pas investis du pouvoir d'exiger les montants dus qui dépassent ceux consignés dans le Code), il est important que ce pouvoir inclue les montants dépassant les minima prévus dans la loi et qui sont accordés par contrat à l'employé (par exemple des allocations de dépenses, les augmentations, les per diem, etc.), incluant les pertes salariales encourues par les employés en raison du non-respect du Code par l'employeur. En cas de congédiement, l'inspecteur ou l'inspectrice pourrait avoir les pouvoirs nécessaires afin d'examiner tous les documents relatifs au congédiement. Ceci lui permettrait de déterminer si la procédure pour congédiement injuste doit être appliquée. 2.2.3 Exécution des jugementsLe Code canadien du travail est quasiment muet sur l'exécution des jugements, ce qui laisse croire qu'il revient à l'employeur de se conformer au jugement et à l'employé de s'assurer qu'il en est ainsi. Dans les cas d'arbitrage pour congédiement injuste, le Code renvoie l'exécution des ordonnances de l'arbitre à la Cour fédérale. Cette faiblesse du Code donne trop souvent lieu à un déni de justice pour les travailleurs et travailleuses. Il nous semble que l'existence d'un tribunal adapté et spécialisé pourrait palier à cette situation. Nous pensons que la Commission devra proposer des mécanismes qui permettront d'assurer que les jugements seront effectivement mis à exécution. Nous pensons que le mandat et les pouvoirs du Conseil canadien des relations industrielles pourraient être réévalués en ce sens. 3. La santé et la sécurité des travailleuses enceintes ou qui allaitent au travail : le retrait préventifLa FTQ revendique depuis longtemps que les travailleuses enceintes ou qui allaitent et dont le travail représente un risque pour leur santé, celle du fœtus ou du bébé, soient protégées correctement par la loi. La législation québécoise en la matière est le fruit de ce travail important des syndicats. En nous basant sur notre expérience, nous souhaitons signaler trois grands problèmes du « :retrait préventif :» fédéral. Premièrement, nous constatons un problème dans « :l'approche :» du retrait préventif fédéral. L'approche québécoise en matière de retrait préventif part du principe que les milieux de travail sont des milieux à risque pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent. Le programme québécois relève donc de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, dont l'objectif est « :l'élimination des dangers à la source :» et, contrairement au programme canadien, n'est en aucun cas relié au congé de maternité. Un problème d'application découle de ce premier constat. En effet, il n'y a aucun mécanisme ou incitatif pour amener les employeurs à modifier les conditions de travail dangereuses pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent. Aucun processus clair de mise en application n'a été défini dans la loi afin que toute la question de la réaffectation ou de la modification des tâches respecte l'amélioration des conditions de travail pour la travailleuse enceinte. Troisièmement, au chapitre de la compensation financière, le régime fédéral est nettement moins avantageux que celui du Québec. Il dirige la travailleuse soit du côté de l'assurance-emploi, à laquelle plusieurs n'ont pas accès car elles ne rencontrent pas les exigences du programme, ou soit vers un régime privé d'assurance collective si celle-ci a la chance d'être couverte. Nous pensons que l'État fédéral peut faire mieux pour les femmes enceintes ou qui allaitent. D'abord, le législateur fédéral ne devrait pas assimiler le retrait préventif à un congé, mais plutôt à une mesure de prévention. Cette mesure devrait être accompagnée de dispositions claires afin que :
Ensuite, la loi canadienne devrait garantir une assurance salariale dans les cas de retrait préventif. Les querelles de juridiction à cet égard ne sauraient servir de prétexte au laisser-faire. Nous pensons que le législateur fédéral, doit s'entendre avec les provinces qui, comme le Québec, ont un programme de retrait préventif comprenant une assurance salaire pour assurer leur salaire aux travailleuses de juridiction fédérale, comme dans le cas des lésions et maladies professionnelles. Enfin, dans les cas où le programme d'assurance salaire prévoit une période de transition d'une ou de deux semaines entre le début du retrait préventif et l'application effective d'un programme d'assurance salariale, il est nécessaire d'obliger l'employeur à verser son plein salaire à l'employée pendant cette période de transition. 4. Conciliation travail-famille : une urgenceLa FTQ promeut des mesures de conciliation du travail et de la famille depuis plus de 25 ans et a développé une expertise reconnue dans ce domaine. Depuis plus de dix ans, la FTQ participe à des projets de recherche sur ce sujet en partenariat avec l'Université du Québec à Montréal. Divers aspects de ce problème ont été traités : les problèmes de conciliation et les horaires de travail; les questions de santé et de détresse psychologique; les arrangements de garde et la flexibilité exigée; les congés de maternité, parentaux et d'adoption; etc. Malgré toutes les études, conférences et consultations la situation évolue lentement. Les mesures concrètes sont lentes à venir, alors que sur le terrain notre monde est à bout de souffle! Tel que mentionné plus haut, la présence massive des femmes sur le marché de l'emploi, l'augmentation des formes de travail atypique, la détérioration des conditions générales de travail et l'alourdissement de la tâche ont eu pour effet d'accroître la tension qui existe entre le temps consacré au travail et celui qui est consacré à la famille. Les modifications à la Partie III devront donc correspondre à cet état de fait. Il nous semble impératif, pour y arriver, d'améliorer les normes sur la durée du travail - nous y reviendrons plus loin - et de tenir compte de l'entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec au sujet de l'assurance parentale. La Loi sur l'assurance parentale (LAP) a été adoptée en 2001 et entrera en vigueur le 1er janvier 2006. Il nous semble aller de soi que cette entente caractérise la volonté du gouvernement fédéral de prendre des mesures concrètes face au problème de la conciliation travail-famille. 4.1 Tenir compte de la Loi sur l'assurance parentale (LAP)La nouvelle LAP doit s'appliquer à l'ensemble des travailleurs et travailleuses résidants sur le territoire québécois. Il nous semble important que la Commission se penche sur les problèmes de concordance qui pourrait en découler. Si le Code fédéral ne tient pas compte des avantages octroyés par la LAP, il risque de se trouver des cas difficiles à résoudre : des travailleurs ou des travailleuses pourraient vouloir se prévaloir des avantages conférés par le Régime québécois d'assurance parentale, mais en seraient empêchés par un employeur se référant au Code. Les congés de maternité et parental prévus dans la Partie III du Code permettent aux travailleurs et travailleuses d'obtenir 17 semaines de congé de maternité et 37 semaines de congé parental, la combinaison de deux ne pouvant pas dépasser 52 semaines. Dans le cas québécois, cette norme sera élevée à 18 semaines de congé de maternité et 32 semaines de congé parental et la création d'un congé de paternité non transférable de 5 semaines, ce qui permettra un total de 55 semaines de congés. Nous pensons que les normes fédérales devraient être ajustées afin de tenir compte de la création d'un congé de paternité non transférable, de l'augmentation du nombre de semaines de congé de maternité de 17 à 18 et du nombre total de semaines octroyées en congé parental, soit 55 semaines au lieu de 52. De plus, le Régime québécois d'assurance parentale s'applique également aux travailleurs et travailleuses atypiques. Comme nous l'avons mentionné auparavant, le Code devrait inclure ce genre de statut d'emploi dans l'application des normes. Les normes fédérales devront aussi permettre de suspendre temporairement un congé parental ou de maternité comme le permet la LAP. 4.2 Tenir compte des normes minimales du Québec4.2.1 Congé pour naissance, adoption ou interruption de grossesseIl est important que les normes fédérales tiennent aussi compte des normes minimales du Québec. Nous proposons que le Code fédéral prévoie, comme dans le cas québécois, le droit à un congé de cinq (5) jours, dont deux (2) rémunérés, lors de la naissance, de l'adoption d'un enfant ou de l'interruption d'une grossesse à compter de sa vingtième semaine. Ce congé devrait être fractionnable en journées à la demande de la travailleuse ou du travailleur et pris à l'intérieur des quinze (15) jours suivant l'arrivée de l'enfant ou, le cas échéant, l'interruption de grossesse. 4.2.2 Congé pour obligations familialesUne des difficultés importantes de concilier la famille et le travail résulte de l'impossibilité de prendre des congés ponctuels, des journées ou des demi-journées, pour répondre à des besoins importants de nos proches (enfants ou proches parents). Nous proposons donc que le Code prévoie une banque de congés fractionnables et sans solde pour aider les travailleurs et travailleuses à faire face à leurs obligations familiales sans grever les autres congés auxquels ils ont droit et sans les obliger à agir en dehors des normes ou de leur contrat. Cette banque de congés pourrait être de dix (10) jours par année, avec la possibilité, si l'employeur y consent, de fractionner également les journées (en demi-journées par exemple), comme le prévoit la Loi québécoise sur les normes du travail. 4.2.3 Absence pour examen médical lié à la grossesseDans le même esprit, la femme enceinte devrait avoir le droit de s'absenter pour passer des examens reliés à sa grossesse sans que cette absence vienne grever les autres congés auxquels elle a droit, ni que cette absence soit assimilée à un congé pour maladie. 4.2.4 Présomption favorable à la travailleuse enceintePar ailleurs, malgré les avancées notoires dans notre capacité collective à mieux tenir compte de la situation des femmes sur le marché du travail, il est bien connu que les femmes enceintes se trouvent en situation difficile lorsque, comme c'est le cas aujourd'hui, les normes minimales sont peu respectées. Nous pensons, qu'une des façons d'améliorer le respect des normes et, ainsi de mieux protéger les travailleuses enceintes, consiste à prévoir des dispositions favorables à ces femmes dans le Code. Nous proposons donc que le Code contienne une présomption favorable à la femme enceinte lorsque, dans les six (6) mois avant son accouchement et dans les six (6) mois après son accouchement, des modifications surviennent à ses conditions d'emploi qui sont assimilées à des mesures disciplinaires. 4.3 Tenir compte de la Loi sur les unions de conjoints de même sexeLa Loi canadienne sur le mariage civil adoptée en juillet 2005 crée une reconnaissance officielle des unions de conjoints de même sexe, un nouveau contexte dont l'examen des normes doit tenir compte. Nous pensons qu'il sera important que les normes fédérales incluent une reconnaissance des droits parentaux des conjoints de même sexe et leur octroient les mêmes droits aux congés parentaux que pour les autres travailleurs et travailleuses. 5. Modifications proposées aux normes actuelles5.1 DéfinitionsCertains termes ou expressions utilisés dans le code tels que « :employé :», « :service continu :», « :ancienneté au service de l'employeur :» et « :disponibilité pour travailler :» ont subi, quant à leur interprétation par les tribunaux, des modifications que nous identifions comme des reculs pour la protection des travailleurs et travailleuses. Par exemple, une travailleuse qui est à l'emploi du même employeur depuis six ans, mais qui a été absente pendant une année en raison d'une maladie professionnelle, aura-t-elle droit à trois semaines de congé annuel et à 6 % d'indemnité de congé tel que prévu dans le Code pour les travailleurs et travailleuses qui ont cumulé six années d'ancienneté au service de l'employeur? Il semble que pour certains tribunaux elle n'y aura pas droit et devra attendre une année supplémentaire. Dans le cas d'un travailleur auquel on exige d'être « :disponible sur appel :», se verra-t-il reconnaître le temps passé à attendre pour le calcul de ses congés annuels et de ses indemnités de congé? Aura-t-il droit à une indemnité de départ dans le cas d'un licenciement? Ce sont des questions auxquelles les tribunaux ont répondu de manières différentes, par toujours à l'avantage des travailleurs et travailleuses. De façon générale, il apparaît important que la Commission clarifie les définitions afin d'en revenir à l'intention première du législateur : assurer que ces termes confèrent une protection aux travailleurs et travailleuses. 5.2 Durée du travailIl est entendu que toutes les dispositions relatives au temps de travail sont susceptibles d'améliorer la capacité des travailleurs et travailleuses de concilier leurs obligations familiales ou sociales et le travail, ainsi que de bénéficier à leur santé générale. Les normes minimales concernant les périodes de repos et de congé devraient donc être revues à la hausse. 5.2.1 Droit de refuser le temps supplémentaireLe temps supplémentaire est un dépassement de la durée normale du travail qui confère une flexibilité accrue aux entreprises. La travailleuse ou le travailleur est compensé en raison des effets délétères de ce temps supplémentaire sur sa santé et sur sa vie sociale. Cependant, rien dans la loi ne spécifie que l'employé a le droit de refuser d'effectuer du temps supplémentaire. Nous pensons que ce droit doit être inscrit dans la loi. Nous proposons d'introduire un droit de refus de travailler en temps supplémentaire au-delà de deux (2) heures excédant le quart normal journalier de travail. Nous proposons également d'introduire le droit des employés de transformer la compensation des heures supplémentaires en heures de congé rémunéré (minimalement au taux de 1,5). 5.2.2 Droit à une pauseAucune provision de la loi ne garantit à l'employé le droit d'effectuer une pause pendant sa journée ou son quart de travail, pas même pour manger. Nous pensons que la loi devrait garantir une pause d'une durée minimale de 30 minutes pour chaque période de cinq (5) heures de travail. Comme il est prévu dans le code québécois, cette période devrait être rémunérée si la travailleuse ou le travailleur n'est pas autorisé à quitter son poste de travail. 5.2.3 Augmenter les semaines de vacancesDe manière à ajuster les normes aux pratiques et besoins actuels de notre société, il nous semble important d'ajuster à la hausse les congés annuels prévus à l'article 184 du code. D'abord, nous croyons qu'il faut, comme le prévoit le code québécois, une formule de calcul des congés annuels rémunérés pour les employés ayant moins d'un an de service. Ensuite, nous proposons également d'octroyer trois (3) semaines de congé annuel continu et rémunéré après deux (2) années de service, puis quatre (4) semaines après dix (10) années de service. 5.2.4 Augmenter les jours fériés payésDans le même esprit, les jours fériés et rémunérés devraient passer de 9 à 10 par année comme c'est le cas dans le code québécois. Aussi, à l'article 173 (Horaires de travail), le Code devrait prévoir au moins 32 heures complètes de repos par semaine, plutôt que 24 heures. 5.2.5 Augmenter les congés pour deuilNous pensons que les trois (3) jours de congé sans solde prévus pour le deuil d'un proche parent sont insuffisants. De plus, l'article 210 est rédigé de telle sorte qu'il ne permet pas d'accommoder raisonnablement l'employé qui doit se présenter à des funérailles qui seraient prévues après la période de trois (3) jours autorisés. Nous proposons que la norme soit haussée en offrant à l'employé la possibilité d'ajouter deux (2) journées de congé fractionnable au congé de décès déjà prévu. 5.2.6 Absence pour maladie et pour accidentAlors que les statistiques sur l'emploi montrent un taux élevé d'absentéisme pour cause de maladie, la FTQ déplore que le Code ne tienne pas mieux compte de cette réalité. Le Code n'établit pas expressément le droit de s'absenter pour maladie ou accident, même s'il interdit à un employeur de congédier, suspendre, mettre à pied ou rétrograder un employé qui justifie trois (3) mois de service et qui s'absenterait pour une période d'au plus douze (12) semaines en raison de maladie ou d'accident. Nous pensons que le Code devrait prévoir explicitement le droit de prendre congé sans solde pour maladie ou accident et que la norme de douze (12) semaines d'absence à l'intérieur de douze (12) mois devrait être haussée à 24 semaines (comme dans la loi québécoise des normes du travail). La jurisprudence démontre d'ailleurs que cette norme correspond mieux à la réalité. De plus, l'exclusion du droit au congé de maladie pour les travailleurs et travailleuses qui ont moins de trois (3) mois de service devrait être abolie afin de couvrir le nombre de plus en plus considérable de travailleurs et de travailleuses qui occupent des emplois précaires. Enfin, l'article 239.(1.1) devrait faire obligation à l'employeur d'affecter à un poste différent, comportant des conditions d'emploi différentes, l'employé qui, à son retour d'un congé pour maladie ou accident, n'est plus en mesure de remplir les fonctions qu'il occupait auparavant. 5.2.7 Absence pour fonctions judiciairesLe Code devrait prévoir la possibilité pour les travailleurs et travailleuses de s'absenter pour remplir des fonctions judiciaires. Des protections similaires à celles qui concernent les absences pour maladie ou accident doivent être prévues. 5.3 Droits de la personneLa section XV.1 de la Partie III du Code devrait être élargie afin d'interdire toute forme de harcèlement. La définition devrait être changée en s'inspirant des modifications récentes portées à ce chapitre de la Loi sur les normes du travail du Québec. Il est important de noter que la définition du harcèlement psychologique, telle qu'employée dans la loi québécoise, inclue le harcèlement sexuel et d'autres types de harcèlements liés, par exemple, à des attitudes racistes ou homophobes. Selon la loi québécoise, « :le harcèlement psychologique est une conduite vexatoire qui se manifeste par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes qui réunit ces quatre critères :
Il est important que, dans l'application de cette section du Code, on permette aux travailleurs et travailleuses syndiqués d'avoir le choix entre les procédures de grief contenues dans leur convention collective et les procédures prévues au Code. 5.4 Santé, sécurité et lésions professionnellesNous pensons qu'il faut modifier l'article 239 sur les accidents et maladies professionnelles afin d'y inclure :
5.5 Licenciements collectifs et indemnité de départNous croyons important de modifier la période de référence dans le cas des licenciements collectifs de 30 jours à trois (3) mois, afin de tenir compte de la capacité de certains employeurs à échelonner, au-delà des 30 jours prescrits, un licenciement de ce type. Par ailleurs, il nous semble dérisoire que le Code ne prévoie une indemnité de départ que de deux (2) jours de salaire pour chaque année de service ou cinq (5) jours de salaire, selon lequel des deux montants est le plus élevé. Nous pensons qu'il faut augmenter cette indemnité à cinq (5) jours de salaire par année de service ou dix (10) jours de salaire, selon lequel des deux montants est le plus élevé. 5.6 Ajout de nouvelles normesPour finir, le Code canadien du travail nous semble relativement inefficace lorsqu'il s'agit de protéger les travailleurs et travailleuses qui doivent faire face à des employeurs qui leur exigent une participation aux dépenses liées aux uniformes, outils et frais de voyage liés à l'emploi. Sans que la loi québécoise des normes du travail ne soit parfaite à cet égard, elle offre néanmoins une référence dont la Commission pourrait s'inspirer. La Commission notera que la notion d'uniforme a été remplacée par celle, plus large, de « :vêtement particulier :». Ainsi, il est interdit à un employeur de faire payer un vêtement particulier à un salarié payé au salaire minimum. De plus, l'employeur ne peut exiger de frais à un salarié pour l'achat, l'usage ou l'entretien d'un vêtement particulier qui aurait comme conséquence qu'il reçoive moins que le salaire minimum. Un employeur ne peut exiger d'un salarié qu'il paie pour un vêtement particulier qui l'identifie comme étant un salarié de son établissement ou exiger l'achat de vêtements ou d'accessoires dont il fait le commerce, et ce, peu importe le salaire versé au salarié. Le matériel, l'équipement, les matières premières et la marchandise exigée par l'employeur doivent être fournis gratuitement au salarié payé au salaire minimum. Il en est de même pour l'achat, l'usage ou l'entretien qui aurait pour effet que le salarié reçoive moins que le salaire minimum. L'employeur ne peut également exiger aucun paiement pour les frais d'opération (par exemple, le remplacement de la vaisselle cassée) ou pour les charges sociales. Enfin, l'employeur doit rembourser au salarié les frais raisonnables de déplacement ou de formation lorsqu'ils ont été effectués à sa demande (transport, coucher, repas). 6. Formation professionnelle et apprentissage continuAu cours des dernières décennies, la FTQ a traité à plusieurs reprises de la question de la formation professionnelle et de l'apprentissage continu avec ses membres. Des colloques, des rencontres collectives et individuelles, un sondage et des débats lors de nos Congrès ont permis d'affiner nos positions sur ce sujet important. Cependant, la FTQ considère que cet aspect du monde du travail est de juridiction provinciale. Par conséquent, si le gouvernement fédéral estimait nécessaire de légiférer ou de réglementer à ce sujet, il lui faudrait, dans le cas du Québec, respecter la juridiction du gouvernement du Québec. 7. Nos propositions en brefQue la commission fasse sienne les recommandations suivantes : APPLICATION UNIVERSELLE DE LA LOIEN FINIR AVEC LES DISPARITÉS DE TRAITEMENTInclure les travailleurs et travailleuses atypiques dans la loi
Inclure les cadres et professionnels dans la loi
RENDRE JUSTICE DE FAÇON EFFECTIVE
Droit de plainte, capacité de représentation et protection pour l'exercice d'un droit
Étendre les pouvoirs des inspecteurs
Exécution des jugements
LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DES FEMMES ENCEINTES AU TRAVAIL : LE RETRAIT PRÉVENTIF
CONCILIATION TRAVAIL-FAMILLE : UNE URGENCETENIR COMPTE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE PARENTALE (LAP)
TENIR COMPTE DES NORMES MINIMALES DU QUÉBECCongé pour naissance, adoption ou interruption de grossesse
Congé pour obligations familiales
Absence pour examen médical lié à la grossesse
Présomption favorable à la travailleuse enceinte
TENIR COMPTE DE LA LOI SUR LES UNIONS DE CONJOINTS DE MÊME SEXE
MODIFICATIONS PROPOSÉES AUX NORMES ACTUELLESDÉFINITIONS
DURÉE DU TRAVAILDroit de refuser le temps supplémentaire
Droit à une pause
Augmenter les semaines de vacances
Augmenter les jours fériés payés
Augmenter les congés pour deuil
Absence pour maladie et pour accident
Absence pour fonctions judiciaires
DROITS DE LA PERSONNE
SANTÉ, SÉCURITÉ ET LÉSIONS PROFESSIONNELLES
LICENCIEMENTS COLLECTIFS ET INDEMNITÉ DE DÉPART
AJOUT DE NOUVELLES NORMES
FORMATION PROFESSIONNELLE ET APPRENTISSAGE CONTINU
ConclusionDans ce mémoire, la FTQ a rappelé si besoin était que les normes minimales du travail sont un élément essentiel de notre capacité collective à vivre ensemble dans l'équité et la dignité. Ce sont d'ailleurs les deux mots qui devront caractériser la réforme de la Partie III du Code canadien du travail si le gouvernement fédéral souhaite en faire une réussite. Le marché du travail a été transformé depuis la première écriture de cette partie du Code. Les femmes y ont pris leur place, les emplois typiques des secteurs primaires et secondaires ont cédé le pas à l'apparition d'emplois atypiques et du secteur tertiaire. Si bien que la Partie III du Code ne reflète pas la réalité du marché du travail d'aujourd'hui. Les contestations répétées devant les tribunaux ont, si c'était nécessaire, fini de fragiliser les fondements mêmes de cette loi. Les deux dernières décennies ont été marquées de reculs nets pour les travailleurs et travailleuses sous juridiction fédérale. Il suffit d'identifier les avancées obtenues sous d'autres juridictions pour mettre en lumière ces reculs et identifier les endroits où cette loi statique et malmenée par les tribunaux offre à ces travailleurs et ces travailleuses des conditions inférieures. Avec ce mémoire, la FTQ soumet à l'attention de la Commission sur l'examen des normes du travail fédérales une série de principes permettant de guider son travail. Parmi ceux-ci, nous avons particulièrement insisté sur le caractère caduc des exceptions qui excluent des travailleurs et travailleuses des normes minimales. Alors que la norme minimale existe pour protéger les plus précaires des travailleurs et travailleuses, ces exclusions les précarisent encore plus. Nous avons également insisté sur l'urgence de « :donner des dents à la loi :» en s'assurant que justice soit rendue de façon diligente et effective, ce qui, trop souvent aujourd'hui, n'est pas le cas. Enfin, nous avons plaidé pour qu'un sentiment d'urgence anime tous les partenaires du marché du travail face au défi d'adapter les normes du travail aux nécessités de la conciliation travail-famille, plutôt que d'exiger des femmes enceintes et des parents qu'ils s'adaptent aux besoins de plus en plus stressants des lieux de travail. Cette adaptation des normes passe aujourd'hui par une amélioration des normes de protection des femmes enceintes et des normes relatives au temps consacré au travail. AL/fv Notes:1 Bernier, Jean, Vallée, Guylaine, Jobin, Carol (2003). Les besoins de protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnelle, Rapport Final. Gouvernement du Québec, Québec 2 Saunders, Ron, Dutil, Patrice (2005). Nouvelles stratégies pour assurer le respect des normes d'emploi statutaires. Collection sur les travailleurs vulnérables, no.6, RCRPP & IAPC. 3 Voir notamment le « Mémoire de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) sur la loi modifiant la loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives présenté devant la commission des Affaires sociales, février 1990. » Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec Dépôt légal - 3e trimestre 2005
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