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DOCUMENT DE RÉFÉRENCE

Rapport de recherche sur le droit de la famille au Nunavut

2003-FCY-3F

Préparé par
Kelly Gallagher-Mackay

Présenté à la
Section de la famille, des enfants et des adolescents
Ministère de la Justice du Canada

Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles de l'auteur et ne représentent pas nécessairement les opinions du ministère de la Justice du Canada.

Also available in English
Résumé aussi disponible en InuktitutAide PDF

Version PDFAide PDF

Le présent rapport peut être reproduit, en tout ou en partie, par quelque moyen que ce soit, sans frais et sans qu’il soit nécessaire d’en demander la permission au ministère de la Justice du Canada, pourvu que toutes les précautions raisonnables soient prises pour assurer l’exactitude de la matière reproduite, que le ministère de la Justice du Canada soit désigné comme source et que la reproduction ne soit pas présentée comme la version officielle du rapport d’origine.

©  Sa Majesté la Reine du chef du Canada
    représentée par le ministre de la Justice et
    procureur général du Canada, 2003


TABLE DES MATIÈRES

LISTE DES TABLEAUX

LISTE DES FIGURES

REMERCIEMENTS

RÉSUMÉ

1    INTRODUCTION

2    CONTEXTE

3    RÉSULTATS DE LA RECHERCHE : ASPECTS PRINCIPAUX

4    RÉSULTATS DU PROGRAMME DE RECHERCHE : FAÇONS DE FAIRE, SERVICES ET INFORMATION

5    CONCLUSIONS

ANNEXE I : MÉTHODOLOGIE ET RECOMMANDATIONS POUR LES RECHERCHES À VENIR

ANNEXE II : OUTIL DE L’ENQUÊTE — ENQUÊTE AUPRÈS DES MÉNAGES

ANNEXE III : OUTIL DE L’ENQUÊTE — RÉPERTOIRE DES SERVICES

ANNEXE IV : LA STRATÉGIE DU NUNAVUT EN MATIÈRE DE DROIT DE LA FAMILLE

ANNEXE V : LISTE PARTIELLE DES PARTICIPANTES ET PARTICIPANTS À L’ENQUÊTE

BIBLIOGRAPHIE

LISTE DES ARRÊTS

NOTES


LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1  Répartition des ménages du Nunavut d’après le nombre de leurs membres

Tableau 2  Répartition des membres des ménages du Nunavut en fonction de leur relation avec les participants à l’enquête

Tableau 3  Répartition des participants à l’enquête en fonction de la composition des ménages

Tableau 4  Répartition de la composition des ménages des participants à leur naissance

Tableau 5  Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur relation avec leurs parents adoptifs, selon le sexe

Tableau 6  Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur situation matrimoniale au moment de l’entrevue

Tableau 7  Répartition des participants à l’enquête selon leur situation matrimoniale actuelle, couples mariés ou en union de fait

Tableau 8  Répartition des participants à l’enquête ayant déjà vécu en union de fait

Tableau 9  Répartition des participants à l’enquête en fonction d’une union de fait antérieure du conjoint/de la conjointe et en fonction de la nature actuelle de la relation du couple

Tableau 10  Répartition des relations de couple en fonction de la situation matrimoniale du conjoint/de la conjointe au début de la relation

Tableau 11  Répartition des participants à l’enquête en fonction des conjoints ayant eu des enfants d'une relation de couple antérieure

Tableau 12  Attentes liées au mariage des participants à l’enquête non mariés ou vivant en union de fait

Tableau 14  Répartition des participants à l’enquête en fonction de la source de revenu

Tableau 15  Répartition des types d’habitation des participants à l’enquête, selon le type de relation de couple et selon le sexe

Tableau 16  Répartition des participants, chefs de famille monoparentale, selon leur situation matrimoniale

Tableau 17  Types de contacts entre l’enfant et le parent vivant hors du domicile familial selon le sexe du participant à l’enquête

Tableau 18  Répartition des types de contacts entre les parents non résidents et les enfants, en fonction de la distance qui les sépare

Tableau 19  Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur niveau de connaissance du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires et des services relatifs aux pensions alimentaires pour enfants

Tableau 20  Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur connaissance de certains services choisis du droit de la famille

Tableau 21  Répartition des services utilisés par les participants selon le type de service et le sexe du participant

Tableau 22  Répartition des participants à l’enquête en fonction des sources d’information privilégiées

Tableau 23  Répartition des participants à l’enquête en fonction du média préféré pour transmettre l’information


LISTE DES FIGURES

Figure 1  Répartition des participants à l’enquête en fonction de l’âge auquel ils sont devenus parents pour la première fois

Figure 2  Répartition des relations de couple actuelles en genre et en durée

Figure 3  Structure des familles avec enfants

Figure 4  Répartition des participants à l’enquête en fonction des arrangements existants au sujet des enfants


REMERCIEMENTS

Ce rapport a été rendu possible grâce à la participation active et au soutien indéfectible d’un grand nombre de personnes.

Louise Anaija, ma collègue au ministère de la Justice du Nunavut, a consacré beaucoup de temps et d’énergie à l’élaboration de l’enquête auprès des ménages. Elle a organisé toutes les visites dans les collectivités, procédé au recrutement et à la formation des enquêteurs et coordonné les communications; elle a aussi analysé les formulaires d’enquête une fois remplis et mené toutes les entrevues pour le répertoire des services. Ses commentaires nous ont été précieux tout au long de la préparation de ce rapport. Sa contribution a été inestimable et la recherche n’aurait pu être menée à terme sans son aide.

La production de ce rapport a nécessité le soutien de plusieurs gouvernements et organismes ainsi que la participation de divers services gouvernementaux. Le Fonds de mise en œuvre des pensions alimentaires pour enfants (fédéral), en accordant des fonds à la Division des politiques du ministère de la Justice du Nunavut, a permis de financer la recherche initiale et la Division nous a servi de base, à Louise Anaija et à moi, au moment de la planification et de la recherche sur le terrain. Stephen Dulude, Scott Clark, Kelly-Ann Fenney et Louisa Arsenault ont apporté leur aide précieuse au parachèvement du projet. Nora Sanders, Rebecca Williams, Mary-Lou Sutton-Fennell, Andrejs Berzins, Siobhan Arnatsiaq-Murphy, Regilee Adla, Sally Gunn et Gwen Healey ont également apporté leur contribution à diverses étapes du projet. Charlene Johnson, directrice du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, n’a pas ménagé ses efforts pour nous décrire les fonctions de son service, lequel venait juste d’entamer ses activités. Jack Hicks, directeur du Bureau de la statistique du Nunavut, nous a fait de nombreuses et utiles suggestions.

Nous avons aussi bénéficié de la collaboration de la Maliganik Tukisikniakvik et de certains membres de la Commission des services juridiques du Nunavut. En particulier, nous tenons à souligner l’enthousiasme qu’a manifesté Lynn Wheatley dès le début, ses commentaires sur l’enquête et son soutien logistique et autres de tous les instants. Bonnie Tulloch, Peter Allison et Patrick Smith ont alimenté les travaux de leurs idées et de leurs discussions.

Nous avons eu dès le début l’appui du ministère de la Justice du Canada. Les membres de l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants, Section de la famille, des enfants et des adolescents, sont venus au Nunavut pour la première fois en avril 1999 pour faire une évaluation générale des besoins du Territoire. George Kiefl, de l’Unité de recherche sur la famille, les enfants et les adolescents, a apporté son soutien enthousiaste et efficace tout au long des différentes étapes de la recherche et de la rédaction. Ses conseils, ses commentaires et ses encouragements ont été d’une aide inestimable.

La Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice du Canada, nous a accordé son soutien financier pour l’analyse des données. John Clement nous a aidés à cerner les problèmes et à trouver des solutions, en plus de coordonner la sous-traitance de la saisie des données et de l’analyse statistique. Susan Woodley a effectué la saisie des données recueillies dans les formulaires de l’enquête auprès des ménages. Bob Hann en a fait une analyse statistique rigoureuse et méticuleuse; son discernement, par rapport à des données parfois difficiles à interpréter, sa rigueur dans l’analyse quantitative, son humour et sa vivacité d’esprit dans des circonstances parfois difficiles ont été grandement appréciés.

Au cours de l’élaboration de ce rapport, j’ai reçu, sur divers sujets, les commentaires de certains membres du groupe de travail sur le droit de la famille et en particulier de : Marie Irniq; de Sandra Omik (commissaire principale de la Maligarnit Qimirrujiit); de Simona Arnatsiaq (Conseil du développement social du Nunavut); de Anne Crawford (ministère de l’Exécutif et des Affaires intergouvernementales du Nunavut); de Susan Hardy (ministère de la Justice du Nunavut); et de tous les participants à la consultation des intervenants, menée en juin 2001.

Pour m’aider dans la rédaction de ce rapport, j’ai eu recours à Alexander Sasha Burton et à Erica Gilles. Je tiens aussi à remercier chaudement les représentants des villages et autres hameaux qui, partout, nous ont aidées, Louise et moi, de bien des façons dès notre arrivée, en nous fournissant des lieux de réunion, en nous aidant à créer des contacts, en nous recommandant certaines personnes-ressources ou certains interprètes. Nos enquêteurs ont été les intervenants de première ligne et ont mené 342 entrevues en six semaines. Merci à toutes et à tous : Slias, Mary et Celia à Pond Inlet, Donna et Hillary à Chesterfield Inlet, Heather à Coral Harbour, Annie et Annie à Iqaluit, et Sandra et Rose à Cambridge Bay. Nous tenons, Louise et moi, à remercier tout particulièrement toutes celles et tous ceux qui ont accepté de répondre aux questions des entrevues et qui nous ont ainsi permis de recueillir les données nécessaires à notre étude.

Ce rapport est le fruit de nombreuses discussions, tant publiques que privées. Je tiens à exprimer ma profonde reconnaissance à toutes celles et à tous ceux qui y ont participé.


RÉSUMÉ

Ce rapport de recherche sur le droit de la famille au Nunavut a été préparé pour le ministère de la Justice du Nunavut et la Section de la famille, des enfants et des adolescents du ministère de la Justice du Canada. La recherche a été menée en collaboration avec la clinique des services juridiques de la Maliganik Tukisiniakvik, laquelle fait partie de la Commission des services juridiques du Nunavut.

Globalement, les objectifs de cette recherche étaient de :

  • rassembler des données sur des questions se rapportant au droit de la famille, telles que l’adoption, le divorce, la séparation, l’utilisation des services;
  • recueillir des témoignages sur la façon dont les familles du Nunavut, en particulier au sein de la population inuite, gèrent et traitent les questions de droit de la famille au niveau des collectivités;
  • mieux comprendre les problèmes d’accès au droit de la famille et, aussi, améliorer les communications pour sensibiliser la population au droit de la famille, aux droits découlant du droit de la famille et aux services juridiques connexes offerts au Nunavut.

La recherche comprenait un examen de statistiques existantes, une enquête détaillée sur les antécédents familiaux de 342 ménages du Nunavut, un répertoire des services établi par téléphone dans 17 collectivités du Nunavut. Elle s’appuyait en outre sur des assemblées publiques et des entrevues menées dans cinq collectivités, sur des discussions et sur un travail de collaboration avec la Commission d’examen des lois du Nunavut, la Maligarnit Qimirrujiit.

Contexte

Le chapitre 2 examine les facteurs contextuels qui ont une influence déterminante sur les antécédents familiaux, sur la prestation des services et sur l’application du droit de la famille dans le Territoire.

Nous avons entrepris la préparation de ce rapport à un moment où le Nunavut traversait une période de changements politiques importants, soit peu après la création du nouveau gouvernement territorial, en avril 1999. Le nouveau gouvernement s’est engagé à apporter des changements politiques et, en particulier, à élaborer des lois et des services mieux adaptés au mode de vie de la majorité inuite, à instaurer une philosophie de l’ « Inuit Qaujimajatuqangit » (IQ), soit des façons traditionnelles et plus appropriées de faire les choses. Des énoncés de principes récents comme des études sociologiques passées indiquent clairement que la consolidation de la famille constitue l’un des aspects essentiels du QI.

Les rigueurs du climat, l’isolement relatif et les liens très étroits qui unissent les membres des petites collectivités du Nunavut ont d’importantes répercussions sur la planification et la prestation des services et sur la mise en place d’un centre commun d’information juridique. La culture et la langue inuites sont bien vivantes et offrent un fondement normatif à celles et à ceux qui cherchent à régler les questions de droit de la famille. Par ailleurs, quand on cherche à régler ce genre de questions, il arrive souvent qu’on ait affaire aussi à d’autres problèmes sociaux graves tels que la pauvreté, le chômage, le surpeuplement des logements et les ennuis de santé. Les taux de violence rapportés contre les femmes sont extrêmement élevés et cela influe grandement sur les perceptions de la population locale quant à la nécessité de trouver des solutions dans le droit de la famille.

Il existe d’importants obstacles à l’élaboration, au sein même du système juridique actuel, d’un système de droit de la famille adapté aux besoins du Nunavut. Là encore, par suite de l’isolement et des distances, toutes les collectivités, à l’exception d’Iqaluit, sont desservies par une cour de circuit; les avocats et le personnel judiciaire viennent de loin et par intermittence seulement. En raison du grand nombre des cas inscrits au rôle et du peu d’importance accordé au droit de la famille, les causes en la matière sont rarement entendues. De plus, le lien étroit qui existe entre la protection de l’enfance et les dispositions civiles du droit de la famille peut décourager certaines personnes de recourir au tribunal pour résoudre leurs problèmes. Tous ces facteurs contribuent à éloigner du système d’éventuels usagers. Quelques réformes, comme la mise sur pied de comités de justice communautaire plus forts, des juges de paix plus nombreux et mieux formés, l’embauche en région d’avocats spécialisés en droit de la famille et l’implantation d’un tribunal unifié doté d’un plus grand nombre de juges résidents, sont autant de mesures qui pourraient, à long terme, faciliter l’accès aux services d’une justice familiale.

Un examen du contexte juridique entourant la recherche axée sur la communauté du Nunavut comprend un aperçu de la récente réforme du droit implantée dans le Territoire et un aperçu du processus de réforme de la garde et du droit de visite au niveau fédéral. La nouvelle législation territoriale a créé en principe un nouveau cadre d’application du droit de la famille; il reste cependant beaucoup à faire avant que ces changements n’aient des répercussions concrètes.

Résultats de la recherche : la vie familiale

La famille élargie

La composition et la structure des ménages au Nunavut reflètent les normes culturelles inuites. Les ménages comprennent généralement plus de membres dans le reste du Canada. Ils comptent pour la plupart de trois à cinq membres, et près du tiers des participants à l’enquête vivent dans des ménages composés de six personnes ou plus.

Il est extrêmement fréquent d’avoir des ménages qui incluent des membres de la famille élargie. On trouve dans 13 p. cent des ménages un parent, le conjoint ou la conjointe du parent naturel, un parent adopté ou un beau-parent du participant à l’enquête. Un peu moins du cinquième des participants à l’enquête ont indiqué la présence d’un frère ou d’une sœur ou d’un demi-frère ou d’une demi-sœur. Près de 10 p. cent des participants à l’enquête vivaient avec une petite-fille ou un petit-fils et un peu plus de 10 p. cent des ménages comptaient un autre membre apparenté d’une façon ou d’une autre. Très peu de gens (seulement 3 p. cent des participants à l’enquête) ont indiqué vivre avec une personne qui ne leur était pas apparentée.

Un des facteurs de la prédominance de la famille élargie au Nunavut pourrait bien être l’âge relativement jeune des nouveaux parents. Près de 20 p. cent des participants à l’enquête ont eu leur premier enfant à l’âge de 17 ans ou même avant; plus de la moitié ont eu leur premier enfant avant l’âge de 21 ans. Le fait de rassembler sous le même toit la famille élargie a de nombreuses répercussions au niveau du droit de la famille et de l’information. Par exemple, la plupart des gens ignoraient que, sans être parent, on pouvait quand même demander la garde ou le droit de visite ou une pension alimentaire pour les enfants qu’on élève. Le système d’aide sociale (logement, soutien du revenu) semble reposer sur des ententes factuelles de soins à donner plutôt que sur des modalités juridiques.

L’adoption

L’adoption selon les coutumes est sans doute l’aspect le plus singulier du droit de la famille au Nunavut : elle est extrêmement répandue. Vingt-deux p. cent des participants à l’enquête ont indiqué avoir élevé des enfants adoptés. Dans une bonne moitié des cas, les participants à l’enquête ont élevé plus d’un enfant. Un autre quart des personnes ont affirmé avoir donné un enfant en adoption, et un bon tiers des femmes ayant répondu à l’enquête ont affirmé avoir « donné un bébé en adoption ». Vingt-trois p. cent des participants ont affirmé avoir été eux-mêmes adoptés. Parmi ces personnes, 93 p. cent ont signalé avoir été adoptées en vertu des coutumes autochtones et seulement 7 p. cent à la suite d’un processus judiciaire.

L’adoption selon les coutumes se fonde sur un régime juridique distinct reconnu par la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest. Elle diffère au niveau du processus : le rôle du tribunal se limite à produire la preuve qu’une adoption est survenue entre deux parties, sans exigences particulières comme l’évaluation du foyer d’accueil, par exemple. De plus, l’adoption selon les coutumes semble s’appuyer sur un certain nombre de considérations de fond, et pas seulement sur le critère unique de l’intérêt supérieur de l’enfant. Même si la Commission d’examen des lois fait mention d’un certain nombre de préoccupations concernant l’adoption selon les coutumes, il semble qu’il s’agisse là, à l’heure actuelle, de la seule pratique largement répandue et bien comprise du droit de la famille sur le Territoire.

Le mariage et l’union de fait

Près du tiers (31 p. cent) des participants à l’enquête ont affirmé vivre en union de fait, ce qui excède, de loin, la norme canadienne. Et, fait encore plus étonnant, un nombre très important de personnes ont déclaré avoir vécu en union de fait à un moment donné (63 p. cent des participants à l’enquête). Par ailleurs, 38 p. cent des participants à l’enquête ont indiqué être actuellement mariés; ce chiffre est en dessous de la moyenne canadienne. Moins de la moitié des participants non mariés prévoient se marier tôt ou tard.

À l’instar du reste du Canada, les mariages semblent survenir plus tardivement et durer plus longtemps que les unions de fait. Signalons que l’âge moyen du mariage (24 ans) ou de l’union de fait (21 ans), selon les données recueillies auprès des participants à l’enquête, est sensiblement plus élevé que l’âge auquel ces personnes affirment avoir eu un premier enfant.

La plupart des participants mariés (88 p. cent) ou en union de fait (83 p. cent) ont affirmé que leur conjoint était célibataire avant la relation actuelle. Douze p. cent des personnes mariées et vingt p. cent des personnes en union de fait ont indiqué que leur conjoint avait des enfants d’une relation antérieure. Presque deux fois plus d’hommes que de femmes ont affirmé que leur partenaire avait introduit dans la relation des enfants d’une union précédente.

La séparation et le divorce

Dans l’ensemble, les taux de séparation et de divorce au Nunavut sont inférieurs à la moyenne canadienne; le taux de divorce est sensiblement plus bas et reflète sans doute certains problèmes d’accès à la justice. Dans notre enquête, environ 4 p. cent des personnes ayant déjà été mariées ont indiqué s’être séparées et près de 4 p. cent avoir divorcé. Cinq p. cent des participants affirment avoir vécu un veuvage. Il a été plus difficile de déterminer le nombre des personnes se séparant à la suite d’une union de fait.

Les agents des services sociaux ont signalé un nombre considérable de séparations temporaires, mais il nous a été impossible d’obtenir beaucoup de données quantitatives à ce sujet. Parmi les raisons invoquées pour reprendre la vie commune, mentionnons la difficulté de quitter la collectivité, l’incapacité de trouver un logement ou un emploi, l’amour, et des préoccupations concernant les enfants. Les histoires que l’on raconte, ou unikattuaq, renforcent le fait que les séparations temporaires ne sont pas un phénomène nouveau au Nunavut.

Bien qu’il y ait peu de données à ce sujet, les participants à l’enquête ont invoqué de multiples raisons pour expliquer leur propre séparation ou divorce, notamment l’incompatibilité avec leur partenaire, l’adultère et des problèmes de dépendance aux drogues et à l’alcool. Au cours des discussions publiques, les raisons invoquées étaient passablement différentes, la violence étant le motif qui revenait le plus souvent. Il est important de mentionner ici que la plupart des services publics qui traitent de séparations et de divorces insistent sur la sécurité à court terme plutôt que sur l’autonomie à long terme.

Un très petit nombre des personnes divorcées ou séparées ont signalé recevoir ou payer une pension alimentaire, peu importe qu’elles aient été mariées ou en union de fait. Un nombre légèrement plus élevé de personnes divorcées, comparativement aux conjoints de fait, ont déclaré payer ou recevoir une pension alimentaire.

Seulement la moitié des participants à l’enquête connaissait les droits des conjoints de fait à une pension alimentaire et au partage des biens au moment de la rupture d’une relation. À l’occasion de rencontres communautaires, nous avons constaté que peu de personnes faisaient la différence entre la pension alimentaire pour conjoint et la pension alimentaire pour enfant. L’écart des revenus entre les hommes et les femmes au Nunavut n’est pas aussi considérable que dans le sud et, dans l’ensemble, les faibles revenus peuvent expliquer le fait que les pensions alimentaires sont rarement versées. De plus, le rôle actif de la famille élargie réduit peut-être l’importance de l’obligation alimentaire.

Deux-tiers environ des participants à l’enquête connaissaient l’existence du droit au partage des biens matrimoniaux même si, à notre connaissance, aucun partage de ce type n’a été signalé au Nunavut. Comme le domicile conjugal est le bien le plus important de la majorité des familles au Canada, il est important de signaler qu’un quart seulement des résidents du Nunavut sont propriétaires de leur maison. L’occupation du domicile conjugal donne lieu à des différends et à des problèmes souvent difficiles à résoudre compte tenu de la grave pénurie de logements et des longues listes d’attente pour les logements sociaux.

Les enfants dans les familles

Dans l’ensemble, au Nunavut, les familles avec enfants constituent un plus gros pourcentage de la population que dans le reste du Canada (77 p. cent, et le nombre d’enfants par famille y est plus élevé), soit en moyenne 3,5 selon notre enquête. Nous constatons également des différences substantielles en ce qui a trait à la structure familiale : les couples mariés avec enfants représentent 43 p. cent de toutes les familles avec enfants tandis que les conjoints de fait avec enfants représentent 27 p. cent de toutes les familles avec enfants.

Les familles monoparentales, y compris les parents divorcés ou séparés ainsi que ceux qui n’ont jamais été mariés, forment un groupe important, soit 22 p. cent de toutes les familles avec enfants. En général, dans les trois quarts des cas environ, le chef de la famille monoparentale au Nunavut est une femme. Les célibataires (n’ayant jamais été mariés) forment une proportion plus importante de chefs de famille monoparentale au Nunavut que dans le reste du Canada. Près de la moitié des chefs de famille monoparentale vivent avec d’autres membres de leur parenté, ce qui modifie sensiblement la perception largement répandue de la monoparentalité comme la responsabilité d’une seule personne.

Nous avons eu quelques difficultés avec les données sur les antécédents familiaux des enfants, ce qui limite l’exactitude des chiffres ci-dessous. Mais, de façon générale, nous croyons que ces chiffres sont représentatifs. Nous avons demandé aux participants à l’enquête de préciser s’ils vivaient avec leurs enfants à temps plein, à temps partiel ou pas du tout. Quatre-vingt-cinq p. cent des participants ont répondu qu’ils vivaient en tout temps avec un enfant, 2 p. cent qu’ils vivaient à temps partiel avec au moins un enfant et 12 p. cent qu’au moins un de leurs enfants ne vivait pas avec eux. Parmi les personnes qui ont affirmé avoir au moins un de leurs enfants ne vivant pas avec elles, 8 p. cent ont indiqué avoir donné l’enfant en adoption.

Environ 60 p. cent des parents vivant avec leurs enfants en tout temps ont affirmé que l’autre parent de cet enfant faisait aussi partie du ménage. Un nombre important (près du tiers) des parents qui ne vivaient pas avec leur enfant ont affirmé que cet enfant vivait avec une personne qui n’était pas l’autre parent.

Quatre-vingt p. cent des parents résidant hors du domicile conjugal ont indiqué maintenir des liens avec leurs enfants. Les visites effectuées durant la journée représentent le type de contacts le plus courant. Un plus petit nombre de personnes ont déclaré passer la nuit auprès de leurs enfants ou simplement communiquer avec eux par téléphone. À peine plus de la moitié des parents ont affirmé vivre dans la même collectivité que leurs enfants. Les parents n’ayant plus de contacts avec leurs enfants vivaient pour la plupart (mais non pour la totalité) dans une autre collectivité. Près de la moitié des parents vivant loin de leurs enfants maintenaient des liens par téléphone ou par correspondance.

Nous avons constaté que, dans l’ensemble, les modalités concernant les contacts suscitaient très peu de critiques. Seulement quatre des 32 participants à l’enquête n’ayant pas auprès d’eux au moins un de leurs enfants à temps plein se sont dits mécontents de ces arrangements. Dix-huit participants ont affirmé être satisfaits et huit autres ont dit ne pas avoir d’opinion sur le sujet. Un très petit nombre de participants (4 sur 31 ayant répondu à cette question), ont tenté de modifier les modalités concernant les contacts avec les enfants ne vivant pas avec eux, parfois en en discutant simplement avec l’autre parent. Les deux-tiers environ des participants à l’enquête connaissaient la possibilité de recourir aux tribunaux pour contester une décision sur la garde ou le droit de visite.

La question des pensions alimentaires pour enfants constitue depuis plusieurs années une priorité du Territoire et du gouvernement fédéral. Pourtant, un très petit nombre de participants à l’enquête ont indiqué payer ou recevoir une pension alimentaire pour enfant. Parmi les personnes bénéficiant d’une telle pension, la plupart ont indiqué la recevoir assez régulièrement (sur une base mensuelle) mais un nombre important de personnes ont affirmé ne recevoir cette pension que de façon aléatoire.

Nous avons demandé aux parents résidant hors du domicile conjugal pourquoi ils payaient ou ne payaient pas de pension alimentaire pour enfant. Les parents ont dit payer la pension alimentaire parce qu’ils se sentaient responsables de leurs enfants, parce que ceux-ci continuaient de faire partie de la famille ou parce qu’ils étaient liés par une entente. Plusieurs motifs ont été invoqués pour expliquer le non-paiement de la pension alimentaire. La plupart des parents ont déclaré ne pas payer de pension alimentaire parce qu’on ne leur en avait pas demandé. Plusieurs parents ont dit ne pas payer parce qu’ils n’en avaient pas l’obligation ou parce qu’ils ne vivaient plus avec l’enfant. Quelques personnes ont affirmé ne pas payer de pension alimentaire parce qu’elles faisaient vivre une autre famille. Parmi les personnes admissibles au versement d’une pension alimentaire et qui n’en recevaient aucune, les deux-tiers environ n’en avaient jamais fait la demande.

Ces résultats peuvent se comparer à ceux des ordonnances et des ententes enregistrées auprès du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires (PEOA). En janvier 2001, le bureau du Nunavut comptait 166 dossiers dont un tiers seulement concernaient des cas où le payeur et le bénéficiaire étaient tous deux résidents du Nunavut. Dans l’ensemble, moins de la moitié des bénéficiaires (seulement 81) vivent au Nunavut.

Le nombre des personnes qui versent une pension alimentaire excède, semble-t-il, le nombre des personnes qui font enregistrer une ordonnance ou une entente auprès du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, mais il est impossible de chiffrer le montant des transferts monétaires entre les parents. Le manque d’information expliquerait l’utilisation relativement restreinte des services du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. Environ 16 p. cent seulement des participants à l’enquête avaient entendu parler du PEOA. Un nombre passablement plus élevé de personnes (27 p. cent) savait que le gouvernement offrait des services d’exécution des ordonnances alimentaires. En dépit de progrès marqués dans le recouvrement des arrérages au cours des deux dernières années, le niveau élevé de ces arrérages et le nombre considérable des ordonnances qui devraient être modifiées pour refléter un changement de situation continuent de représenter un problème de taille.

Résultats de la recherche : les façons de faire, les services et l'information

Près de 60 p. cent des participants à l’enquête, chefs de famille monoparentale, séparés ou divorcés avec enfants, ont signalé n’avoir jamais conclu d’entente ou négocié d’arrangements concernant leurs enfants avec une autre personne. Et, ce qui est tout aussi étonnant, seulement deux personnes (moins de 3 p. cent) ont déclaré avoir obtenu une ordonnance de la cour pour régler des questions de garde ou de pension alimentaire pour enfant. En ce qui concerne les autres, 16 personnes avaient une entente écrite et 10 une entente verbale (soit respectivement environ 23 p. cent et 15 p. cent).

Un peu moins du tiers (21) des participants à l’enquête ont déclaré avoir eu recours à une aide extérieure au moment de leur séparation; les deux-tiers restants (45) ont dit ne pas avoir cherché à obtenir de l’aide. Parmi les personnes ayant reçu de l’aide, neuf ont consulté un travailleur social, huit ont consulté un avocat et quatre ont recherché l’appui d’un ami, d’un parent ou d’un aîné (ces groupes se chevauchent parfois).

La dure réalité de la vie au Nunavut est qu’il n’existe que très peu de services sociaux disponibles dans la plupart des collectivités. Ces services sont plutôt concentrés dans les collectivités plus importantes ou dans les centres régionaux mais, encore là, les ressources y sont limitées. Les services sont rarement spécialisés et leurs agents sont généralement débordés. Les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé mentale, les comités de justice communautaire, les groupes de jeunes et les groupes paroissiaux sont les principales ressources accessibles au niveau des collectivités, sans pour autant être toutes disponibles dans chaque collectivité.

Dans l’ensemble, 72 p. cent des participants à l’enquête ont déclaré n’avoir jamais utilisé les services que nous leur avons mentionnés pour résoudre leurs problèmes familiaux. La notion de « problème familial » dans l’esprit des participants débordait la définition que nous lui avions donnée et allait bien au-delà du cadre du droit privé de la famille.

Dans les rencontres communautaires, nous avons constaté que les gens s’entendaient largement sur le type de services qu’ils jugeaient utiles. Nous avons retenu trois messages principaux. Tous ont souligné la nécessité d’obtenir davantage de services d’orientation. Les participants étaient d’avis que des renseignements juridiques sans services connexes n’étaient pas de nature à améliorer grandement les situations relevant du droit de la famille. Enfin, il est ressorti au moment de l’enquête que les services juridiques ne semblaient pas être disponibles quand on en avait besoin.

En se fondant sur les difficultés énoncées ci-dessus, notre rapport insiste sur la nécessité de travailler à la mise en place d’un système hors du cadre judiciaire et accessible au niveau des collectivités pour traiter des problèmes relevant du droit de la famille. Dans sa stratégie en matière de droit de la famille (et cette tendance se dessine également dans la présente recherche), le ministère de la Justice du Nunavut s’est engagé (avec l’appui du gouvernement fédéral) à assurer la formation de médiateurs déjà au fait des principes du droit de la famille, et possédant des compétences en médiation. Plusieurs aspects de ce projet devront être approfondis.

Dans notre enquête, l’avocat constituait la source privilégiée de renseignements sur le droit de la famille. Certaines difficultés pratiques persistent quand il s’agit de se faire représenter par un avocat, notamment le manque d’avocats, les conflits d’intérêts et la nature du système itinérant.

Le manque d’information est un réel problème, mais ne constitue pas le principal obstacle auquel sont confrontés les Nunavummiuts qui cherchent à résoudre leurs problèmes familiaux. Cependant, il serait certainement utile de sensibiliser davantage les membres des collectivités à leurs droits, et notamment :

  • au droit de tous les enfants à une pension alimentaire suffisante (Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants), mais aussi à l’importance des contributions non financières;
  • aux droits des conjoints de fait;
  • aux droits des parents substituts dans la famille élargie;
  • au droit à l’Aide juridique pour les questions familiales.

Nous avons recueilli un large éventail de suggestions sur les façons d’informer les gens de leurs droits et sur les moyens qu’ils privilégient pour obtenir des renseignements sur la séparation et le divorce. La plupart des personnes ont recommandé la radio comme moyen de vulgarisation et d’information juridiques. Il a clairement été dit que toute information sans possibilité de suivi actif serait inutile. Cela est conforme aux résultats de notre enquête qui montrent que l’avocat est le moyen privilégié pour obtenir de l’information.

Conclusions

La recherche a démontré la nécessité de procéder à des études beaucoup plus poussées sur les questions de droit de la famille dans les collectivités autochtones. Des différences marquées entre les normes du Nunavut et celles du Canada suscitent d’intrigantes questions sur les ressemblances et les différences entre les divers groupes autochtones. Il est certainement souhaitable d’approfondir la recherche qualitative sur l’IQ (concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit) et les critères de la famille traditionnelle. Enfin, il faudra grandement étoffer le cadre théorique et recueillir davantage de données sur l’incidence des structures de la famille élargie sur la doctrine et les services liés au droit de la famille. À court terme, cependant, une étude quantitative plus fouillée devrait, au Nunavut, céder la place à l’implantation de services.


1  INTRODUCTION

Le 1er avril 1999, le nouveau Territoire du Nunavut était créé, dans la partie orientale des Territoires du Nord-Ouest. Les lois existantes des Territoires du Nord-Ouest y ont été maintenues, avec quelques modifications. Le Nunavut est alors devenu admissible à l’obtention de fonds du ministère de la Justice du Canada, par l’entremise de l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants. Ces fonds devaient être affectés à la mise en oeuvre des Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants. Le ministère de la Justice du Nunavut, après avoir fait siennes ces lignes directrices à travers la législation des Territoires du Nord-Ouest, et après avoir utilisé le financement de base pour mettre en place un Programme d’exécution des ordonnances alimentaires pour le Territoire en 1999-2000, a proposé d’utiliser les fonds prévus pour la mise en œuvre à des recherches essentielles à l’élaboration du futur droit de la famille au Nunavut.

Le ministère de la Justice du Nunavut y a vu l’occasion d’explorer un domaine où peu de recherches encore n’avaient été faites. Le droit de la famille semble être éclipsé par deux facteurs principaux. D’abord, la nécessité pressante, dans le Nord canadien, de devoir procéder à une réforme de la justice pénale laisse souvent peu de place aux interventions dans d’autres secteurs. Ensuite, comme le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest n’ont toujours disposé que de très peu de ressources pour le droit de la famille, les gouvernements ont eu tendance à se fier aux études, au droit, aux politiques et aux modèles juridiques du reste du Canada. C’est ce qui s’est passé avec la réforme nationale en matière de droit de la famille même si celle-ci n’est pas toujours compatible avec la vie de la famille ou le caractère distinct de la culture dans le Nord.

1.1  Objectif de la recherche

Le nouveau gouvernement du Nunavut a voulu mieux comprendre comment les membres des collectivités percevaient le droit de la famille et son utilisation. Bien que le Nunavut ait hérité des lois du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, il a pour mandat de réexaminer ces lois et ces programmes pour s’assurer qu’ils conviennent au Territoire et plus précisément à sa majorité inuite. Ce mandat a incité certains groupes à se demander s’il était possible de concilier d’une part le droit de la famille actuel et les services existants qui s’y rattachent et, d’autre part, les intérêts et les besoins de la communauté. Bien que l’on reconnaisse généralement l’existence de certaines difficultés concernant par exemple l’accès au droit de la famille au Nunavut, on comprend mal, par ailleurs, certains des autres problèmes et solutions possibles de sorte que la nécessité d’un tel projet de recherche s’est avérée évidente. Voici certaines des questions auxquelles il fallait répondre :

  • Quels sont les principaux besoins des collectivités en matière de services de justice familiale actuellement non satisfaits?
  • Quelle serait la meilleure façon de répondre à ces besoins, d’après les membres des collectivités?
  • Quels sont les services disponibles et quels sont ceux qu’on utilise au niveau des collectivités?
  • Le gouvernement peut-il remanier les services existants pour mieux les adapter à la vie d’un plus grand nombre de personnes vivant dans les collectivités?
  • Quels sont les aspects satisfaisants ou non satisfaisants des lois et des services actuels?
  • A-t-on déjà mis en place certains modèles?
  • Comment les membres des collectivités souhaitent-ils résoudre les problèmes découlant de l’éclatement de la famille et quel rôle, le cas échéant, les tribunaux peuvent-ils jouer à cet égard?
  • Quel est le rôle de l’information juridique dans l’accès à la justice?
  • Qu’est-ce que les membres des collectivité savent, ignorent ou souhaitent savoir?
  • Que faudrait-il pour que l’information sur le droit de la famille devienne utile aux membres des collectivités?
  • Comment ce droit pourrait-il venir renforcer les valeurs communautaires de soins et d’aide à donner aux enfants?
  • Comment ce droit pourrait-il favoriser la sécurité des femmes et des enfants victimes de violence au foyer?
  • Quelles instances du droit de la famille seraient-elles susceptibles de promouvoir l’objectif d’équité entre partenaires au moment d’une séparation ou d’un divorce?

Globalement, les objectifs de cette recherche étaient de :

  • rassembler des données sur des questions se rapportant au droit de la famille, telles que l’adoption, le divorce, la séparation, l’utilisation des services;
  • recueillir des témoignages sur la façon dont les familles du Nunavut, en particulier au sein de la population inuite, gèrent et traitent les questions de droit de la famille au niveau des collectivités;
  • mieux comprendre les problèmes d’accès au droit de la famille et, aussi, améliorer les communications pour sensibiliser la population au droit de la famille, aux droits découlant du droit de la famille et aux services juridiques connexes offerts au Nunavut.

La liste des questions pouvant donner lieu à une recherche potentielle était longue et il était clair que l’entreprise ne serait pas des plus faciles. Du point de vue du ministère de la Justice du Nunavut, il était toutefois important de trouver des réponses — mêmes incomplètes — à ces questions comme point de départ d’une réforme éventuelle du droit de la famille et de l’implantation de services. Nous espérons que l’information contenue dans cette étude permettra d’améliorer l’accès au droit de la famille et l’efficacité du processus tout en haussant le niveau de satisfaction des personnes vis à vis du droit de la famille et des services connexes offerts dans le Territoire.

Ce rapport a été conçu et rédigé principalement en fonction de deux auditoires principaux. Il constitue d’abord une tentative pour regrouper l’information sur le droit de la famille dont se serviront les décideurs et autres intervenants du Nord. L’objectif de ce rapport est de fournir des renseignements pertinents à l’élaboration de programmes et de politiques qui soient ancrés dans l’expérience concrète des familles du Nunavut plutôt que fondés sur les abstractions d’un système juridique ou sur des critères utilisés dans le sud. En second lieu, ce rapport deviendra une source de renseignements sur les questions de droit de la famille propres au Nord, et il s’adressera en cela aux décideurs du sud du pays qui conçoivent des programmes ayant des répercussions à l’échelle nationale. Un lecteur du Nord pourra très bien se passer du chapitre sur le contexte entourant les conclusions de notre étude, alors qu’un lecteur du sud devra d’abord se familiariser avec ce contexte avant d’examiner les ressemblances et les différences que révèlent les conclusions de la recherche entre les normes du Nunavut et les normes nationales.

1.2  Partenariat et recherche participative

Le fait d’avoir un petit gouvernement présente de précieux avantages, dont la possibilité extraordinaire de faire participer de nombreux intervenants de milieux différents à l’élaboration des décisions et des recommandations sur l’orientation de la politique relative au droit de la famille, et notamment à l’élaboration de ce projet de recherche.

Au départ, le gouvernement du Nunavut a voulu s’associer à la Commission des services juridiques chargée, pour le Territoire, de la vulgarisation juridique[1]. Il fut conjointement proposé de consacrer la première année des fonds importants de l’Initiative relative aux pensions alimentaires pour enfants, à la recherche, à l’évaluation des besoins, à l’étude des lois et aux questions que soulèvent les services et l’information. Le ministère de la Justice du Nunavut travaille aussi étroitement avec la Maligarnit Qimirrujiit, soit la Commission d’examen des lois du Nunavut.

Le ministère de la Justice du Canada a soutenu la proposition du Nunavut de procéder à cette étude et a largement contribué à son élaboration. Le service de recherche de l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants a mis à notre disposition un chercheur dont nous avons grandement utilisé l’aide et les conseils. Le financement provenant de l’Initiative relative aux pensions alimentaires pour enfants a rendu possible la réalisation de ce projet en nous permettant de recruter un avocat à mi-temps et un chercheur à temps plein recruté localement. Ce dernier, un Inuit bilingue ayant l’expérience du développement communautaire, a aidé à la conception et à la mise en œuvre de différents projets sur une période de plusieurs mois. Comme nous le mentionnons ci-dessous dans la description des projets de recherche, les études ont été entreprises avec l’entière participation de la communauté. En plus du présent rapport d’ensemble, la recherche a permis l’élaboration d’une nouvelle Stratégie en matière de droit de la famille au Nunavut (Voir l’annexe IV).

1.3  Programme de recherche[2]

En 1999, le Nunavut a proposé de mener cette étude dans un délai correspondant à l’exercice financier 1999-2000 (du 1er avril 1999 au 31 mars 2000). Les projets décrits ci-dessous ont été menés à terme au cours de cette période bien que certains suivis et certaines tâches aient eu lieu ultérieurement. Par exemple, la saisie et l’analyse des données de l’enquête menée auprès des ménages ont été effectuées vers la fin de l’an 2000 grâce au financement et aux ressources du ministère de la Justice du Nunavut, de la Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada, et de l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants. Le programme de recherche consistait à réunir des données provenant de cinq sources principales :

  • des données existantes;
  • une enquête auprès des ménages;
  • des rencontres avec des intervenants ou des membres des collectivités;
  • un répertoire des services établi dans la plupart des collectivités;
  • des commentaires préliminaires de la Maligarnit Qimirrujiit.

1.3.1  Examen des données existantes

Afin d’évaluer nos besoins en matière de données, nous avons brièvement examiné un large éventail de statistiques sociales disponibles pour le Nunavut. Cet examen avait trois objectifs : premièrement, nous ne voulions pas reproduire dans notre étude le travail de recherche déjà fait. Deuxièmement, nous voulions être capables d’évaluer certains aspects de notre étude en comparant nos propres données à d’autres données disponibles pour le reste du Canada. Enfin, nous voulions replacer les questions liées au droit de la famille au Nunavut dans le contexte plus large des problèmes sociaux qui affectent les Nunavummiuts (les habitants du Nunavut). En effet, il fallait absolument examiner certains facteurs comme les tendances démographiques, le taux d’occupation des logements, l’existence d’une criminalité violente et le chômage, autant d’éléments qui ont de graves répercussions sur les ressources dont diposent les personnes aux prises avec un éclatement de la famille, si l’on voulait privilégier une approche holistique des questions liées au droit de la famille.

1.3.2  Enquête auprès des ménages

L’enquête auprès des ménages a été conçue pour fournir des renseignements quantitatifs et en partie qualitatifs sur les relations familiales, et plus précisément sur les conséquences de l’éclatement familial sur ces relations, et des difficultés qui s’y rattachent. Des entrevues menées localement ont permis de procéder à une enquête détaillée auprès de 342 ménages des collectivités du Nunavut. Celles-ci ont été choisies dans toutes les régions du Nunavut et étaient de différentes tailles. Le matériel d’enquête (Annexe II) se fondait dans l’ensemble sur l’Enquête sociale générale, cycle 10, de 1995. L’échantillon comprenait 311 Inuits, soit 91 p. cent de l’échantillon total, proportion légèrement au-dessus de la proportion d’Inuits dans l’ensemble de la population. Parmi les participants à l’enquête, il y a eu 193 femmes et 149 hommes. Bien que l’échantillon ne soit pas tout à fait représentatif, cette vaste enquête nous renseigne sur de nombreuses questions fondamentales.

1.3.4  Répertoire des services

Afin de mieux saisir l’ampleur des services d’aide aux familles disponibles au Nunavut, nous avons mené des entrevues auprès de responsables municipaux dans dix-sept collectivités du Nunavut. Nous leur avons demandé leur point de vue sur les problèmes relevant du droit de la famille et sur les services existants. Les renseignements recueillis dans le cadre de l’enquête auprès des ménages nous ont permis de mieux situer les réponses obtenues en termes de ressources disponibles pour répondre aux problèmes familiaux de chaque collectivité. (Le questionnaire se trouve à l’annexe III.)

1.3.3  Rencontres communautaires et entrevues

Dans le cadre de l’enquête auprès des ménages, au moins un responsable du secteur des politiques au ministère de la Justice du Nunavut, et le plus souvent deux responsables, se sont rendus dans chacune des cinq collectivités visées par l’enquête pour y tenir des rencontres communautaires, mener des entrevues et procéder à des interventions directes. À l’extérieur de la capitale, Iqaluit, des assemblées publiques ont eu lieu dans chaque collectivité pour expliquer la nature de l’enquête et solliciter de l’information sur les problèmes éprouvés par chacun à l’intérieur du cadre actuel du système de droit de la famille. Nous avons annoncé les assemblées à la radio et sur la chaîne de télévision locale et avons communiqué à l’avance avec un certain nombre de responsables locaux pour les inviter à participer. Bien que la participation ait varié d’une collectivité à l’autre, nous avons rencontré de très nombreuses personnes, dont des agents de services sociaux, des membres du grand public, des femmes et des hommes issus de tous les groupes d’âges. (La liste partielle des participants se trouve à l’annexe V.)

Dans chaque collectivité, nous avons mené des entrevues individuelles avec les personnes souhaitant faire part de leur expérience particulière. Enfin, nous avons mené un certain nombre d’interventions directes dans chaque collectivité, notamment des visites dans des écoles secondaires et des collèges, et des annonces dans les églises locales et à la radio. En fonction du contexte, nous avons expliqué à la population la nature de nos recherches, fourni des renseignements sur le droit de la famille et sollicité des commentaires et des réactions.

1.3.5  Commentaires préliminaires de la Commission d’examen des lois

Comme nous l’avons mentionné précédemment, le droit de la famille a été défini comme un secteur d’action prioritaire pour que la majorité inuite dispose de lois et de lois conformes au QI, soit la façon inuite de faire les choses. En 1999, le gouvernement du Nunavut a créé la Commission d’examen des lois, organisme composé de cinq commissaires provenant de trois régions, pour consulter les collectivités et procéder à un examen global du cadre législatif du Territoire afin de s’assurer que les lois s’appliquent aux Inuits de façon appropriée. Au moment de mettre sur pied la commission, le premier ministre Paul Okalik a déclaré que le rôle de cette commission était d’éliminer les obstacles législatifs que rencontraient les Inuits. Les commissaires ont examiné un certain nombre de stratégies pour évaluer la pertinence globale des lois dans un certain nombre de secteurs clés. Leur premier rapport a porté sur les changements de noms[3]. Au cours des dix-huit derniers mois, le droit de la famille est devenu l’une de leurs priorités. À cet effet, les commissaires vont se rendre dans chacune des collectivités du Nunavut. Ce rapport leur fournira un contexte et une analyse statistiques qui facilitera la production de leur rapport final.

1.4  Vue d’ensemble du rapport

L’essentiel de ce rapport comprend quatre chapitres :

  • un aperçu du contexte du droit de la famille;
  • un examen des résultats des programmes de recherche sur les questions juridiques de fond;
  • un examen de la recherche entourant le processus juridique;
  • des conclusions.

Dans le premier chapitre, sont abordés différents facteurs contextuels qui auront immanquablement un effet sur l’élaboration du droit de la famille et des programmes connexes dans le Territoire. Parmi ces facteurs, mentionnons la géographie du Territoire, des indicateurs démographiques et plusieurs indicateurs sociaux importants, des changements politiques survenus dans le Territoire et notamment l’importance donnée au QI et à la vie familiale. Le rapport comprend également un bref examen de la situation juridique sur le Territoire : les institutions, dont la cour de circuit et les comités de justice communautaire, certains problèmes comme la violence faite aux femmes, problème qui au Nunavut semble dominer les discussions sur le système juridique. Un examen du contexte juridique de la recherche au niveau de la communauté comporte un aperçu de la réforme récente du droit sur le Territoire et de la réforme de la garde et du droit de visite à l’échelle nationale. Comme nous l’avons mentionné précédemment, les lecteurs nordiques peuvent décider de sauter ce chapitre puisque les aspects qui y sont abordés leur sont plutôt familiers.

L’aperçu des résultats de la recherche se divise en deux parties principales : un examen des questions juridiques de fond et une discussion du processus de recherche.

En ce qui a trait aux questions juridiques de fond, les conclusions relatives à l’unité familiale portent sur la taille et le caractère largement multigénérationnel des familles du Nunavut. Le rapport discute des deux principaux modes de constitution des familles. Tout d’abord, il couvre le mariage et les unions de fait (et notamment la fréquence de ces types d’union), les relations antérieures des participants, l’âge auquel on se marie et les attentes par rapport au mariage. Ensuite, il aborde l’adoption (tant l’adoption selon les coutumes que l’adoption traditionnelle) comme un phénomène à part étant donné sa fréquence et les régimes juridiques distincts qui la régissent. Puis, le rapport étudie l’éclatement des ménages en considérant, une fois de plus, la fréquence, les motifs qui mènent à la séparation et les questions propres aux séparations temporaires. Les questions économiques (pension alimentaire pour conjoint et propriété) qui découlent de la séparation ou du divorce sont discutées en mettant particulièrement l’accent sur la question du domicile conjugal dans un contexte de pénurie de logements. Le chapitre suivant traite des questions concernant les enfants. La première porte sur le type de famille : quelles sont les structures familiales dominantes dans le Territoire? Ensuite, lorsque les parents sont séparés ou divorcés, le rapport étudie les ententes qui régissent les types de contacts que les enfants entretiennent avec le parent résidant hors du domicile conjugal et la question de l’aide financière destinée à ces enfants.

Le quatrième chapitre porte sur tout ce qui touche au processus, aux services et à l’information juridique. Certaines données reflètent la façon dont les membre de la communauté traitent des questions concernant leurs enfants ainsi que la présence ou l’absence d’ententes ou d’ordonnances judiciaires. Un examen des services existants et de l’utilisation de ces services donne une idée des difficultés réelles que pourrait rencontrer tout modèle de réforme fondé sur des services spécialisés. Il existe une préférence marquée pour certains types de services. Enfin, un examen de l’information et des connaissances juridiques révèle de sérieuses lacunes, met en lumière l’importance que revêt l’information sur le droit de la famille, tout comme une attitude positive vis à vis de la vulgarisation juridique.

Le dernier chapitre, celui des conclusions, tente de replacer les résultats de la recherche dans un contexte plus large. Il propose un certain nombre de conclusions et de recommandations. Certaines concernent la recherche proprement dite : des considérations méthodologiques, des secteurs pouvant faire l’objet d’études à l’avenir et la pertinence de pousser plus loin la recherche, par exemple. D’autres conclusions et recommandations visent des domaines où une réforme — législative notamment — mais surtout l’élaboration de programmes et de services pourraient être envisagées, tout en discutant des risques potentiels liés à ces réformes éventuelles.


2  CONTEXTE

L’une des principales raisons pour lesquelles nous avons entrepris cette recherche tient au fait que le Nunavut est un cas particulier au chapitre du développement du droit de la famille. Il bénéficie d’un contexte politique unique, d’un vaste Territoire et d’une majorité autochtone à la culture distincte et forte. Néanmoins, ce territoire fait partie du Canada et participe à nombre des institutions nationales. Les contextes, tant local que national, ont des répercussions considérables sur l’élaboration et la mise en œuvre du droit de la famille au Nunavut.

2.1  Profil du Territoire

2.1.1  Le contexte politique

Le Territoire du Nunavut — patrie des Inuits au sein de la confédération canadienne — est né d’une loi[4]promulguée aux termes d’un accord politique conclu entre la Fédération Tunngavik du Nunavut, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Territoire. Le nouveau Territoire dont il est fait mention dans l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut[5] a été créé dans le cadre de la résolution officielle sur les revendications territoriales des Inuits de l’Arctique de l’Est. L’accord sur les revendications territoriales de 1993 et la création du Territoire, le 1er avril 1999, furent le fruit d’une lutte intense, menée de longue date et largement appuyée par les membres de la communauté en faveur de l’autodétermination[6].

Le nouveau gouvernement du Nunavut tente d’atteindre un équilibre unique en son genre. D’une part, il s’agit d’un gouvernement populaire avec des législateurs élus et responsables devant tous les citoyens, et des institutions gouvernementales (pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire) semblables à celles qui existent dans le reste du Canada. Les lois et règlements des Territoires du Nord-Ouest ont été maintenus et sont en vigueur au Nunavut depuis le 1er avril 1999; mais, plutôt que d’entreprendre la tâche immense de tout recommencer, le gouvernement a prévu d’apporter progressivement les changements nécessaires à la structure existante. D’autre part, afin de refléter son histoire unique et sa population, le gouvernement s’est engagé à faire du savoir et du savoir faire traditionnels des Inuits — concept connu sous l’expression « Inuit Qaujimajatuqangit » — la pierre angulaire du développement de toute la politique sociale et de toutes les institutions du Territoire[7]. L’élaboration des politiques sur le droit de la famille comme les réponses aux données fournies par ce rapport devront s’inspirer de ce contexte politique.

2.1.2  La géographie

Le Nunavut est un territoire qui s’étend sur près de deux millions de kilomètres carrés (1 994 000 kilomètres carrés). Il forme près du cinquième de la masse terrestre du Canada. Plus de la moitié du Territoire se situe au-dessus du cercle polaire et connaît une période où la nuit dure 24 heures l’hiver et une période où la lumière du jour brille 24 heures l’été. La majorité de la population vit dans 28 petites collectivités disséminées sur le Territoire dans trois régions principales qui sont, d’est en ouest, l’île de Baffin, le Kivalliq (également connu sous le nom de Keewatin) et le Kitikmeot.

La géographie du Territoire a des répercussions importantes sur l’implantation des services sociaux. Les collectivités sont extrêmement isolées et ne peuvent être rejointes que par avion ou par bateau ou encore par des routes terrestres extrêmement difficiles. Cet éloignement réduit l’accès aux services, élève considérablement le coût de leur prestation et nuit souvent à la capacité des membres de la communauté de sentir qu’ils participent à la conception ou à l’élaboration de ces services locaux. Dans le contexte juridique, le phénomène du tribunal itinérant, qu’est la cour de circuit, illustre très bien ce genre de problème.

Qui plus est, les petites collectivités fondées sur des structures sociales aux liens très étroits engendrent des problèmes particuliers au plan juridique et au plan du droit de la famille. Plusieurs rapports ont dénoncé l’importance que jouait la géographie dans la violence faite aux femmes[8]. Les victimes de violence déclarent souvent n’avoir nulle part où aller, ce qui accroît terriblement leur vulnérabilité. Il est bien connu que les conflits au sein d’une collectivité mettent généralement en cause d’autres personnes que les personnes directement concernées. Les membres de la famille élargie peuvent prendre parti, ce qui représente un problème de taille dans une collectivité où l’anonymat est impossible à respecter et où les nécessités de l’existence s’obtiennent grâce aux contacts personnels. Le comportement des couples et leurs problèmes se retrouvent bien souvent sur la place publique. Le milieu social peut aussi exercer suffisamment de pression pour forcer les conjoints à rester ensemble. En cas de rupture, il arrive souvent qu’un des conjoints, ou même les deux, doive quitter la collectivité et renoncer de ce fait au soutien de son réseau social.

2.1.3  Les indicateurs démographiques et sociaux

Selon les données de Statistique Canada, on estimait à 27 700 personnes la population totale du Nunavut en l’an 2000. Cette population diffère de celle du reste du Canada de bien des façons. L’une des différences les plus importantes est sans aucun doute qu’elle est composée en grande majorité d’Inuits (83 p. cent en 1996) et que cette proportion continue de croître[9]. Les Inuits sont l’un des peuples autochtones du Canada et la plupart des Inuits du Canada vivent à l’intérieur des frontières du Nunavut, dans l’Arctique canadien[10].

L’usage largement répandu des langues autochtones, l’inuktitut et l’inuinaqtun, est un indicateur de la force et de la résistance de la culture inuite. De toutes les langues autochtones, c’est l’inuktitut qui se porte le mieux au Canada : selon le recensement de 1996, l’inuktitut était la langue maternelle de 17 660 personnes au Nunavut (71,6 p. cent). Quelque 14 740 personnes (59,8 p. cent) parlent l’inuktitut à la maison et 19 595 (79,5 p. cent de la population totale) peuvent s’exprimer dans cette langue. Un pourcentage important de la population parle uniquement l’inuktitut : 3 640 personnes (14,8 p. cent) ne parlent ni le français ni l’anglais[11]. L’usage répandu de l’inuktitut et de l’inuinaqtun et le pourcentage non négligeable de la population unilingue ont eu des répercussions importantes sur le système judiciaire et la mise en place de services sociaux dans le Territoire.

Une autre caractéristique propre à la population du Nunavut est sa forte proportion de jeunes. Le Nunavut a l’une des populations les plus jeunes et les plus rapides en expansion de toutes les provinces ou territoires du Canada. Près de la moitié (48 p. cent) de la population est âgée de moins de 15 ans et 56 p. cent de moins de 25 ans. Le jeune âge relatif de la population a des conséquences évidentes : un plus grand pourcentage des Nunavummiuts sont des parents, les ménages comptent plus de membres et les personnes deviennent parents plus tôt dans leur vie. Nous examinerons ces tendances plus en détail ci-dessous.

Les réalités sociales auxquelles sont confrontées les Inuits sont semblables à celles des autres peuples autochtones du reste du Canada et sont bien souvent très dures. Mentionnons entre autres les problèmes de pauvreté, de mauvaise santé et de pénurie de logements.

Le taux de chômage des Inuits est beaucoup plus élevé qu’ailleurs au Canada, et beaucoup plus élevé que dans la population non inuite du Nunavut. Selon les chiffres de l’Enquête sur la population active au Nunavut (1999), 28 p. cent des Inuits y étaient sans emploi comparativement à 2,7 p. cent pour les non-Inuits. Le taux de chômage chez les hommes inuits y était légèrement plus élevé que chez les femmes (29,1 p. cent comparativement à 26,7 p. cent).

Dans plusieurs des collectivités de petite taille du Nunavut, seulement 40 p. cent ou moins de la population avaient un emploi au moment de l’enquête[12].

De graves problèmes de santé minent la population du Nunavut et ont des effets considérables sur le fonctionnement des familles. On ne peut séjourner au Nunavut sans prendre conscience de la réalité tragique que cache un taux de suicide six fois plus élevé que celui de la moyenne nationale[13]. Cette statistique stupéfiante montre clairement l’existence de graves problèmes de santé mentale dans les collectivités. Bien que les Inuits soient en bonne santé physique à bien des égards, un trop grand nombre d’entre eux meurent de traumatismes[14] et tant l’alcoolisme que la toxicomanie causent d’énormes problèmes qui ont provoqué l’adoption d’une réglementation parmi les plus sévères du genre au Canada. L’accès à l’alcool est interdit ou contrôlé dans la plupart des collectivités nordiques. Résultat, le profil de la consommation d’alcool dans le Territoire est étrange : dans l’ensemble, les taux de consommation d’alcool au Nunavut sont sensiblement inférieurs à la moyenne canadienne, (57,8 p. cent par rapport à 78,4 p. cent)[15]. En revanche, la consommation excessive d’alcool (plus de cinq consommations en une seule occasion) chez les personnes qui boivent est très fréquente (25,6 p. cent par rapport à 8,8 p. cent). Mentionnons aussi que l’abus d’alcool est souvent signalé comme un facteur aggravant dans les cas de violence familiale et qu’il est l’une des principales causes d’intervention dans les ménages pour protéger les enfants.

On s’accorde en général pour dire que le manque de logements au coût abordable constitue l’un des problèmes les plus pressants. Le coût du logement au Nunavut est très élevé. Compte tenu du faible revenu des particuliers et des ménages, les résidents du Nunavut ont de la difficulté à trouver où se loger sans l’aide du gouvernement. Près de 60 p. cent des Nunavummiuts occupent des logements sociaux. Plus de 99 p. cent des locataires des logements sociaux du Territoire sont des Autochtones et plus de 96 p. cent des ménages du Nunavut dans le besoin sont également des Autochtones[16]. Le Territoire du Nunavut dispose actuellement de 3 579 logements sociaux[17], mais au mois d’août 2000, environ 1 100[18] familles attendaient une aide quelconque à l’habitation. Si l’on ajoute à cela les 2 579[19]jeunes âgés entre 14 et 18 ans, il faut s’attendre à ce que la demande augmente de 260 habitations par année au cours des cinq prochaines années.

2.2  Le concept de l’inuit Qaujimajatuqangit (iQ) et les familles inuites

Dans son premier énoncé de principes, le Mandat de Bathurst, le Cabinet du gouvernement du Nunavut a affirmé que le concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit fournirait le cadre dans lequel il entendait bâtir un gouvernement ouvert et responsable20. On a souvent imputé l’échec de nombreux programmes sociaux à l’incompatibilité entre des programmes imposés et conçus par le sud du pays et la manière de vivre des Inuits.

Affirmer l’importance du concept du IQ ne contredit pas pour autant l’importance de la diversité chez les Inuits, hier comme aujourd’hui. Il existe une diversité régionale considérable. L’âge, le sexe, la religion, la situation sociale et la langue sont autant de facteurs qui façonnent l’expérience personnelle des Inuits et leur participation à leur culture. Nous remarquons souvent que chaque collectivité est unique et que chacune a sa propre histoire, ses propres problèmes, objectifs et ressources. Le fait de ne pas avoir tenu compte de cette diversité a constitué une autre entrave importante à la création de programmes sociaux. Ce problème a été exacerbé par une optique socio-scientifique — particulièrement marquée dans les études juridiques — où l’on décrivait la structure sociale inuite comme « simple » ou même comme « anarchique » car elle ne reflétait pas les institutions gouvernementales de type occidental21. Ces mêmes spécialistes ont étudié le mode de vie inuit sans prêter beaucoup d’attention au rôle déterminant de la dynamique familiale dans le maintien de l’ordre et du bien-être. Une planification des programmes imposée de l’extérieur a reproduit les thèses des spécialistes en sciences sociales sans tenir compte de l’opinion des membres de la communauté.

Au risque de généraliser, on peut cependant avancer que la famille a toujours été l’un des piliers importants du mode de vie inuit. Jusqu’au milieu du XXe siècle, les Inuits ont vécu en groupes de familles élargies. Une ou deux familles se déplaçaient, se regroupaient et chassaient ensemble tout au long de l’année. L’été, quelques familles pouvaient se rassembler. L’histoire nomade des Inuits, et surtout l’importance de la famille tout au long de cette histoire, se reflète dans la vie contemporaine de la communauté. Au sein de pratiquement toutes les grandes collectivités, la population se compose d’une poignée de familles, et les liens solidaires entre les membres d’une même famille y sont parfois très forts. Ila- est la racine du mot désignant la « famille élargie », ilagiit, signifie « qui appartient » ou « qui est avec moi, qui n’est pas mon ennemi »22. Quand surgit un désaccord important, la pression sociale peut perturber l’accès aux services et aux occasions possibles, en plus de miner le respect de la collectivité pour un de ses membres. La personne visée peut se voir forcée de ne plus fréquenter la coop (ou magasin local) ou un programme donné d’éducation pour adultes de manière à ne pas avoir à rencontrer les membres de la famille de sa conjointe ou de son conjoint; les membres de la famille d’un individu au « comportement inconvenant » peuvent craindre des représailles s’ils travaillent pour un parent de la personne que l’on perçoit comme ayant été lésée.

La collectivité de Chesterfield Inlet représente un exemple patent de l’empiètement de la collectivité sur la famille et vice versa. Dans le cadre de notre recherche, nous devions avoir une rencontre communautaire dans chaque lieu où nous menions notre enquête. Au cours de la rencontre à Chesterfield Inlet, il est vite apparu évident que la collectivité se composait, en fait, d’une seule famille. Chaque personne était la descendante d’un seul couple ou était mariée à l’un des descendants de ce couple. La famille de cette collectivité s’étendait sur cinq générations. Un des anciens allait déclarer vers la fin de la rencontre que l’occasion qui se présentait de parler de droit de la famille était en fait une occasion d’aborder les problèmes de tous ordres que soulèvent les relations entre les membres de la collectivité dans son ensemble.

Un message revenait sans cesse au cours des entrevues et des rencontres : l’éclatement de la famille était indissociable de tout un ensemble de problèmes sociaux. Les réponses à l’enquête ont abondé également en ce sens. Le Mandat de Bathurst, qui prévoit qu’en 2020, le Nunavut sera un endroit où :

  • « Des collectivités à visage humain, sûres d’elles-mêmes, savent répondre aux besoins des individus et des familles ;
  • L’éducation et l’instruction des enfants, les "Iilagiinniq" (liens de parenté) et les "Innuqatigiinniq" (liens avec la collectivité) s’insèrent dans un processus communautaire collectif. »23.

reconnaît aussi ce fait.

Un droit de la famille qui tenterait d’aborder les problèmes d’aide, de garde des enfants ou de propriété sans égard à la vie des personnes, à la structure unique de la famille inuite élargie et aux questions concernant la collectivité dans son ensemble, risquerait de ne pas répondre au concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit et, par conséquent, manquerait d’efficacité.

Au sein des familles, les Inuits ont des traditions bien définies en ce qui concerne l’éducation des enfants, les rôles et responsabilités des membres de la famille immédiate et de la famille élargie, les difficultés relationnelles et même la violence24. Nous avons consigné ces traditions, quand cela s’avérait possible, dans la discussion sur les résultats de notre étude. Plus précisément, nous avons examiné le rôle actif de la famille élargie dans l’éducation des enfants. L’expression la plus commune de ce phénomène est celle de la tradition de l’adoption selon les coutumes. Il existe également un certain nombre d’ententes moins officielles concernant la garde des enfants et régulièrement appliquées par les membres de la famille. Un autre point important est le rôle central des parents dans les décisions relatives aux mariages et aux ruptures.

Dans l’ensemble, il ressort de la recherche ainsi que des données et des conclusions du présent rapport qu’il est nécessaire d’explorer davantage le concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit dans la mesure où il peut être rattaché au droit de la famille. Notre étude montre qu’il est essentiel de procéder à un examen systématique de ces questions tant avec les anciens qu’avec les membres intéressés de la communauté.

2.3  Le système juridique du Nunavut

2.3.1  Tribunal unifié, cour de circuit et droit de la famille

Le Nunavut représente un cas à part dans l’élaboration du système juridique au Canada puisqu’il est le premier Territoire à s’être doté d’une structure judiciaire unifiée comportant un tribunal de première instance à palier unique. Depuis le 1er avril 1999, les pouvoirs, obligations et fonctions précédemment attribués aux tribunaux, aux juges et aux juges de paix des T.N.-O. sont désormais dévolus à la Cour de justice du Nunavut25. Comme nous l’avons souligné précédemment, la Cour de justice du Nunavut fonctionne sur une base itinérante, comme une cour de circuit. Sauf dans le cas de Iqaluit, les collectivités n’ont accès au système judiciaire que tous les trois à six mois, quand une cour de circuit, composée d’un juge de la Cour de justice du Nunavut, d’avocats, d’interprètes et d’autres fonctionnaires judiciaires, se rend sur place. Il existe de nombreux récits sur les activités de la cour de circuit, et plus précisément sur les débuts de ce système26, qui jettent une lumière crue sur la nature étrange que représente le processus pour la communauté.

Pour ce qui est des questions familiales, le système judiciaire a connu d’autres problèmes systémiques qu’ont décrits de nombreuses études, notamment The Justice House: Report of the Special Advisor on Gender Equality 27,le rapport du Groupe de travail sur la réforme du droit de la famille dans les T.N.-O28,et les options concernant l’organisation judiciaire au Nunavut29. Ces rapports ont tous, sans exception, dénoncé le manque d’accès à la justice, quand il s’agissait de questions touchant le droit de la famille, avec les structures judiciaires actuelles.

Ces lacunes découlent de plusieurs facteurs dont beaucoup sont indépendants de la volonté de quiconque. Pour n’en mentionner qu’un seul, principal responsable de l’absence d’accès aux services de justice familiale, disons que la justice du Nunavut accorde la priorité au droit criminel30. Ce choix de priorité reflète à la fois la réalité d’un taux très élevé d’actes criminels signalés sur le Territoire mais aussi les graves inquiétudes de la communauté à l’égard de cette criminalité et des réponses que peut lui apporter le système juridique. Toutefois, le fait de mettre ainsi l’accent sur la justice pénale engendre d’autres problèmes qui ont des conséquences néfastes sur le droit de la famille.

Les avocats spécialisés en droit de la famille sont peu nombreux. Pour l’instant, un seul avocat spécialisé en droit de la famille occupe un poste à temps plein à la Commission des services juridiques. On espère que deux autres postes d’avocat spécialisé en droit de la famille seront comblés. Aucun des avocats de pratique privée au Nunavut s’intéresse beaucoup au droit de la famille. Mis à part les deux avocats recrutés, les Nunavummiuts doivent recourir, pour se faire représenter, à un avocat des T.N.-O. ou parfois d’une province. Ces services seraient hors de prix pour quiconque devrait engager un procès au Nunavut. En ce qui a trait aux ressources communautaires, les travailleurs sociaux auprès du tribunal (en poste dans bien des collectivités, mais pas dans toutes les collectivités du Nunavut) n’ont encore reçu aucune formation en droit de la famille et les juges de paix ne traitent pas des affaires relevant du droit de la famille.

La structure de la cour de circuit a aggravé les difficultés dans la prestation des services de justice familiale. Les questions familiales ont systématiquement été reléguées au dernier rang de l’interminable liste du rôle, et on ne les aborde que si l’on a épuisé toutes les causes criminelles. Les avocats de la cour de circuit sont extrêmement occupés, surtout quand ils arrivent dans une collectivité où ils doivent souvent rencontrer les clients pour la première fois, le jour même où ils doivent les représenter. Très peu d’avocats — à supposer même qu’il y en ait — qui accompagnent la cour de circuit pratiquent le droit de la famille, de sorte que les personnes aux prises avec des conflits familiaux sont dans l’impossibilité d’obtenir des conseils juridiques. Dans le passé, il appartenait aux procureurs de la couronne de s’occuper de l’exécution des ordonnances alimentaires.

Au cours de nos visites dans les collectivités, nous avons appris que très peu des résidents du Nunavut considèraient la cour de circuit comme le lieu où traiter des questions liées au droit de la famille. Cette perception des choses se reflète clairement dans la réalité. En 1992, selon Katherine Peterson, conseillère spéciale sur l’égalité des sexes dans les T.N.-O., seulement dix des femmes de l’Arctique de l’Est vivant à l’extérieur d’Iqaluit bénéficiaient d’une ordonnance de pension alimentaire pour enfants, enregistrée auprès du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires (PEOA) des Territoires du Nord-Ouest31. Au cours des neuf dernières années, la situation s’est cependant grandement améliorée et 81 bénéficiaires, dont 65 vivent à l’extérieur d’Iqaluit, profitent actuellement d’ordonnances en vertu du programme du Nunavut32. En revanche, comme le montre notre recherche, ce chiffre est encore bien en deçà des dix p. cent de personnes susceptibles d’être admissibles à cette aide.

Cette structure judiciaire unifiée a pour effet de simplifier considérablement les questions liées au droit de la famille. Les causes relatives à la garde des enfants et aux droits de visite, aux pensions alimentaires, à la propriété et à la protection de l’enfance seront toutes entendues par le même tribunal. Dans les cas de violence familiale, le même tribunal se chargera aussi des poursuites criminelles, il sera ainsi plus difficile d’ignorer la violence s’il y a eu des accusations criminelles. Les jeunes contrevenants seront eux aussi jugés par ce tribunal quand des programmes de déjudiciarisation ne seront pas disponibles ou lorsqu’ils ne seront pas appropriés. Cette compétence multiple du tribunal pourra être intéressante si elle simplifie les questions de compétence et si elle se concentre sur les questions de pouvoir et de sécurité, dans les causes de droit de la famille, qui empiètent sur le système de justice pénale. Mais, il faudra élaborer des règles de procédure et des structures de soutien pour que les parties soient capables de pouvoir encore accéder au tribunal inférieur dans le contexte de ce qui constitue aujourd’hui une juridiction supérieure plus complexe. Et surtout, le risque est réel de voir le droit de la famille occuper encore et toujours le dernier rang des priorités, compte tenu du volume écrasant des demandes qui pèsent sur le système de justice pénale. Enfin, il faut souligner que ce tribunal unifié ne comprendra pas les services sociaux qu’on associe parfois aux tribunaux unifiés de la famille dans le sud du Canada.

2.3.2  L’essor de la justice communautaire

Parallèlement à la structure judiciaire, le système juridique du Nunavut met l’accent sur l’élaboration de projets de justice communautaire33. Pratiquement chaque collectivité a son comité de justice communautaire (« CJC ») malgré des différences énormes entre les collectivités en termes de ressources, d’histoire et d’aspirations. Les CJC ont pour mission de travailler à la réconciliation et au ressourcement, quand un acte criminel a été commis (et, dans certaines collectivités, quand des personnes ou des couples prennent contact avec eux de leur propre chef). La consultation, sur une base individuelle (souvent avec la participation d’un aîné) ou sur une base familiale, est leur principal outil d’intervention.

Les CJC sont composés de bénévoles qui se réunissent régulièrement pour mettre au point des solutions de rechange au système judiciaire actuel. La plupart des cas concernent des contrevenants que leur ont référés la Gendarmerie royale du Canada et, à l’occasion, les procureurs de la Couronne. Les CJC ont l’appui du ministère de la Justice du Nunavut et du ministère de la Justice du Canada. Ils négocient actuellement des protocoles de déjudiciarisation avec la GRC, la Couronne et le ministère de la Justice du Nunavut pour chacune des collectivités.

Parmi les autres projets de justice communautaire, mentionnons le recrutement et la formation d’un plus grand nombre de juges de paix (89 au Nunavut en 1996)34, le renforcement du programme des gendarmes communautaires (en ce moment, 22 gendarmes communautaires sont de service dans 15 collectivités du Nunavut), et tout un ensemble d’activités de prévention de la criminalité. Actuellement, les travailleurs sociaux supervisent les services de probation bien que l’on tente de mettre en place, dans chaque collectivité, des mécanismes de supervision communautaire distincts des services sociaux.

L’une des principales questions est de savoir comment mettre en place des services de droit de la famille conformes à ces initiatives sans toutefois utiliser à outrance des ressources déjà surexploitées. Peut-être faudra-t-il, à une date ultérieure, étudier plus à fond le rôle que pourraient éventuellement jouer les juges de paix ou les comités de justice communautaire dans la prestation d’une partie des services envisagés ci-dessous. On ne peut toutefois présumer pour l’instant que les CJC ou les juges de paix seront les instances appropriées pour faire ce travail.

2.3.3  La violence, les familles et la police

Le Nunavut est aux prises avec un problème de criminalité violente qui a fait l’objet de rapports solidement documentés sur la violence en général et sur la violence faite aux femmes en particulier35.

La violence n’est évidemment pas un phénomène nouveau dans le Nord. De nombreuses histoires inuites déplorent le sort des victimes de violence. D’après l’une de ces histoires, le narval (mammifère marin qui apparaît aujourd’hui sur les armoiries du Nunavut) représente en réalité une victime de violence qui a grimpé sur une falaise pour échapper à son agresseur. Quand elle a vu qu’il allait l’attraper, elle a tressé ses cheveux pour en faire une longue natte dont elle s’est servi pour descendre de la falaise jusqu’à la mer; la célèbre défense du narval est le vestige de cette natte torsadée; et les taches sur sa peau blanche seraient en fait, dit-on, des traces d’ecchymoses.

En 1996, les Territoires du Nord-Ouest avaient le taux le plus élevé de crimes avec violence au Canada; le Centre canadien de la statistique juridique signalait un taux d’agression de 560 p. cent plus élevé que la moyenne nationale, et ce chiffre atteignait 730 p. cent dans les cas d’agressions sexuelles36. De plus, d’après les statistiques du Canada sur les peuples autochtones, les femmes autochtones sont beaucoup plus souvent victimes de violence que les femmes non autochtones. Huit p. cent des femmes non autochtones ont signalé avoir été victimes de violence conjugale au cours des cinq dernières années comparativement à 25 p. cent des femmes autochtones37. La différence statistique sur la violence conjugale faite aux hommes autochtones comparativement aux hommes non autochtones est moins importante. Les chiffres sont respectivement de 12 p. cent et de 7 p. cent.

Malgré la masse des preuves bien documentées sur la fréquence des agressions sexuelles dans certaines collectivités du Nunavut38, un rapport au moins indique que « les taux d’agressions sexuelles signalées, avérées et classées sont particulièrement bas. »39 Non seulement le nombre des cas donnant lieu à des poursuites est peu élevé, mais peu se soldent par une condamnation ou autre mesure. C’est peut-être pour cette raison, et en dépit d’un taux de condamnation somme toute très élevé dans les Territoires40, qu’on persiste à croire, surtout parmi les groupes de défense des femmes, que les agressions sexuelles et la violence faite aux femmes ne sont pas prises au sérieux par le système juridique du Territoire41. Les statistiques les plus englobantes sur la criminalité n’indiquent pas à l’heure actuelle si les agressions surviennent à la suite d’une scène de ménage, pas plus qu’elles ne donnent de précisions sur les victimes et notamment sur leur sexe. Toutefois, il est certain que le plus souvent, les poursuites sont intentées contre des hommes adultes; à l’occasion, un rapport peut indiquer que les cas de violence familiale sont nombreux au Nunavut.

Notons également que des collectivités plus petites, comme Chesterfield Inlet, Whale Cove, Grise Fjord, Hall Beach, Repulse Bay et Umingmaktok, ont un taux de criminalité déclaré sensiblement plus bas. Cette situation peut s’expliquer de différentes façons. La pression sociale informelle y est peut-être plus forte, ou peut-être y déclare-t-on moins souvent les infractions, en partie parce qu’il n’y a pas d’agent de la GRC dans plusieurs de ces collectivités.

Le problème de la violence sous-tend une grande partie du débat sur le droit de la famille dans le Territoire et sera discuté dans plusieurs chapitres de ce rapport.

2.3.4  La protection de l’enfance et la prise en charge par l’État des responsabilités parentales

Le droit de la famille qui régit les séparations et les divorces veille aussi à la protection de l’enfance. Bien que ce soit le cas dans tout le Canada, ces deux facettes du droit se chevauchent particulièrement souvent dans le Nord. Le taux des enfants pris en charge y est très élevé. Quand le Nunavut faisait partie des T.N.-O., ce taux était le plus élevé du Canada. En 1997, environ 2,2 p. cent de tous les enfants de moins de 18 ans étaient pris en charge par le ministère de la Santé et des Services sociaux des T.N.-O., soit près de 573 enfants42. Dans la mesure où la population considère le droit de la famille comme un phénomène distinct du droit criminel, on l’associe souvent au processus de retrait des enfants du foyer familial.

On peut expliquer de bien des façons les taux élevés d’enfants pris en charge. L’expérience des parents inuits s’inscrit dans le contexte plus large du retrait des enfants autochtones de leur famille ou de leur collectivité. Comme l’ont souligné de nombreuses études, ce phénomène du retrait, amplement répandu dans le passé, a eu de graves répercussions de génération en génération; de nombreux adultes ayant eu durant leur enfance des contacts limités ou dommageables avec leurs parents, leur propre expérience de parents peut représenter un défi43. Qui plus est, même si les internats n’étaient pas aussi répandus dans l’Arctique de l’Est que dans le reste du Canada, et même si l’expérience de l’internat a pu varier d’un individu à l’autre, nombreux sont les survivants des internats qui font le lien entre l’expérience qu’ils ont vécue quand on les a retirés de leur famille pour les mettre à l’école, le manque de confiance dans leurs propres aptitudes parentales et la perte de ces aptitudes. Ces facteurs peuvent influencer grandement la capacité d’un individu d’affirmer qu’il agit, en sa qualité de parent, dans l’intérêt supérieur de son enfant.

2.3.5  Réforme du droit de la famille : dans le Territoire et au Canada

Le gouvernement fédéral et le gouvernement du Territoire se partagent les compétences en matière de droit de la famille au Nunavut. Le gouvernement fédéral régit les mariages et les divorces, en vertu de l’article 91 (26) de la Constitution; le gouvernement territorial détient aussi, en vertu de la Loi sur le Nunavut, de larges pouvoirs comparables à ceux des provinces en matière de droit de la famille. Le gouvernement territorial régit la garde des enfants et le droit de visite, les pensions alimentaires et le partage du patrimoine familial, sauf dans le contexte d’un divorce. Il régit également la protection de l’enfance, l’adoption et la tutelle. Au cours des quelques dernières années, les deux ordres de gouvernement ont entamé un processus de réforme.

2.3.4.1  Le processus territorial

Au terme d’une longue période d’étude menée par le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille44,le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a refondu son droit de la famille à la suite d’un certain nombre de mesures législatives. En 1994, la première loi, la Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones45, était adoptée et créait un corps de commissaires à l’adoption issus de la communauté, dont la tâche était d’officialiser les adoptions qui avaient eu lieu conformément aux coutumes autochtones (Voir la discussion sur l’adoption, ci-après). Tout un nouvel ensemble de lois est entré en vigueur en 1998 avec la promulgation de la Loi sur le droit de l’enfance46, de la Loi sur le droit de la famille47, de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille48 et de la Loi sur l’adoption49 qui régit les cas d’adoption privée visés par une ordonnance du tribunal. Seule une loi en matière de droit de la famille a été largement épargnée par ces changements, la Loi sur l’exécution des ordonnances alimentaires50, laquelle donne au directeur du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires le pouvoir de faire appliquer les ententes et les ordonnances alimentaires.

La Loi sur le droit de l’enfance porte sur presque toutes les questions juridiques se rapportant aux enfants dans le contexte du droit « privé » de la famille. Elle prévoit l’égalité des droits des enfants, sans égard aux parents ou à toute question de légitimité. Elle porte sur la preuve de paternité, quand celle-ci est mise en doute. Elle comporte des dispositions sur la tutelle des enfants et sur leur part du patrimoine familial. Elle régit les pensions alimentaires pour enfants, établit l’obligation pour les parents de subvenir aux besoins de leurs enfants, et voit à l’application par les tribunaux des Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants. Cette loi permet l’élaboration d’« ententes parentales » et d’autres types de contrats familiaux qui peuvent être annulés par décision judiciaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

La Loi sur le droit de l’enfance régit également la garde des enfants et le droit de visite. Les deux parents ont, en principe, des droits égaux en ce qui a trait à la garde, à moins que le contexte de départ ne soit modifié. Une personne qui obtient le droit de garde « a tous les droits et toutes les responsabilités d’un parent », y compris le pouvoir d’agir pour l’enfant et en son nom. Lorsque plusieurs personnes ont la garde de l’enfant, l’une ou l’autre de ces personnes peut exercer ces droits et accepter d’assumer les responsabilités de parent. La loi stipule que l’exercice du droit de garde et des droits accessoires à la garde est « suspendu », sous réserve d’une entente ou d’une ordonnance de la cour, si les parents viennent à se séparer et ne vivent plus au même endroit. Cette « suspension » survient avec l’accord ou l’assentiment du parent qui ne vit plus avec l’enfant. Le droit de visite n’est pas suspendu dans ce cas. Ce droit comprend le droit de visite proprement dit et la possibilité de s’informer de la santé de l’enfant, de son cheminement scolaire et de son bien-être.

Toute personne peut demander la garde d’un enfant, mais doit obtenir l’autorisation de la cour si elle n’est pas un parent de cet enfant. À l’occasion d’une requête pour la garde ou le droit de visite d’un enfant, toute décision doit être prise en fonction de « l’intérêt supérieur de l’enfant, et […] du respect des différentes valeurs et pratiques culturelles »51. Il faut tenir compte d’une longue liste de considérations quand il s’agit de déterminer les besoins de l’enfant et le contexte dans lequel il va vivre. La cour doit aussi examiner « toute preuve » concernant le comportement violent d’une personne qui demande la garde d’un enfant ou un droit de visite, quand cette violence s’exerce contre une conjointe ou un conjoint actuel ou passé, un enfant ou un membre du ménage ou de la famille. La cour doit en outre tenir compte des effets réels ou possibles de ce comportement sur l’enfant, mais elle doit s’abstenir de considérer la situation financière des parents. De plus, on exige explicitement de lier toute preuve du comportement passé du parent à la capacité de ce dernier de s’acquitter de ses responsabilités parentales. La cour a le pouvoir de rendre une ordonnance sur la garde et le droit de visite ou sur toute situation incidente.

Il existe encore tout un éventail de dispositions concernant la garde des enfants et le droit de visite, y compris le pouvoir de la cour d’émettre une ordonnance de visite surveillée, de nommer un expert des questions de garde des enfants ou de droit de visite, et celui de faire respecter les dispositions sur le droit de visite tant par le parent qui a la garde des enfants que par celui qui a le droit de visite. Il existe aussi certaines limites aux pouvoirs que peut exercer le tribunal quand les litiges concernant la garde relèvent de plus d’une juridiction, mais aussi vis à vis des dispositions sur l’enregistrement des ordonnances.

La Loi sur le droit de la famille prévoit des contrats familiaux exécutoires et des dispositions en cas d’éclatement des ménages, régis par le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Cette loi représente un changement considérable par rapport à la loi précédente. Elle prévoit des droits identiques pour les couples qui se séparent, peu importe qu’ils soient mariés ou vivent en union de fait, celle-ci étant définie par une cohabitation de deux années au moins ou une cohabitation présentant une certaine permanence avec enfant. La loi prévoit le versement d’une pension alimentaire au conjoint sur la base d’un partage équitable de l’actif et du passif de la relation conjugale, la reconnaissance de la contribution des deux conjoints à cette relation et la reconnaissance de l’impact de la garde des enfants sur la capacité du conjoint de gagner sa vie et de poursuivre une carrière. La loi donne une définition ample du patrimoine familial et prévoit la répartition égale des biens familiaux nets entre conjoints. Les dispositions sur le domicile conjugal traitent de propriété et de possession. La loi prévoit également des ordonnances de médiation judiciaire et des ordonnances de ne pas faire.

Une demande en divorce suspend automatiquement toute procédure entreprise en vertu de la Loi sur le droit de l’enfance ou de la Loi sur le droit de la famille. Les parties peuvent demander au tribunal de poursuivre une procédure en cours distincte de la procédure de divorce.

2.3.4.2  Le processus national

À l’échelle nationale, depuis l’adoption et la mise en oeuvre des Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, la population s’interroge de plus en plus sur les moyens prévus par le système juridique pour régler les litiges, entre parents séparés, soulevés par la garde des enfants et le droit de visite. Ce problème a fait l’objet d’études sérieuses dans de nombreuses juridictions. En décembre 1997, le gouvernement du Canada a créé le Comité mixte spécial sur la garde des enfants et le droit de visite. Ce comité a fait des recherches et mené des consultations publiques pour analyser ces questions et leur trouver les réponses les plus favorables aux enfants. Les consultations publiques et le rapport qui en est résulté, Pour l’amour des enfants52, ont suscité un large consensus sur le besoin de changements, tout en révélant à bien des égards des points de vue divergents sur le type de changements nécessaires. Le gouvernement du Canada s’est engagé à apporter certaines modifications à la Loi sur le divorce53.

On reconnaît sans difficulté à tous les niveaux du système que, pour les enfants, l’éclatement de la famille n’est pas perçu dans ses aspects juridiques mais comme une expérience troublante et difficile, déstabilisante et remplie d’incertitudes. Il est certain que des réformes juridiques qui n’instaureraient pas de mesures visant à combler ces besoins socio-émotionnels seraient inefficaces. Des mesures efficaces pour venir en aide aux familles aux prises avec un divorce et faire en sorte que les intérêts des enfants soient protégés requièrent le soutien de la communauté et les efforts conjugués d’intervenants dans un ensemble de disciplines. La collaboration entre les ordres de gouvernements est, elle aussi, nécessaire du fait qu’ils se partagent les compétences en matière de droit de la famille.

En réaction au débat public croissant sur cette question, on a pris la décision de mettre sur pied un projet fédéral-provincial-territorial (FPT) de recherche multidisciplinaire et de consultation pour :

  • cerner les problèmes relatifs à la garde et au droit de visite qui surgissent avant, pendant et après les conflits familiaux;
  • définir des choix possibles de réformes des lois et de création de services;
  • promouvoir la création de services intégrés multisectoriels pour répondre à l’ensemble des besoins des enfants;
  • élaborer une stratégie de mise en œuvre de ces réformes et services.

Le Comité FPT actuel sur le droit de la famille, organisme d’orientation stratégique à long terme, s’est vu confier le projet. Le comité, composé de conseillers en politique de droit de la famille du gouvernement fédéral et de chaque province et territoire, a élaboré une déclaration de principes et des objectifs sur la réforme de la garde des enfants et du droit de visite54. L’objectif premier du projet est de recommander des ententes sur la garde et le droit de visite qui favorisent avant tout l’intérêt supérieur de l’enfant. À la lumière de cet objectif, les réformes devraient :

  • réduire les conflits et les procès entre parents et membres de la famille élargie;
  • encourager des relations positives entre les enfants, leurs parents et les membres de la famille élargie;
  • au besoin, protéger les enfants des conséquences néfastes de situations hautement conflictuelles et génératrices de violence.

Ce rapport s’inscrit à la base du processus mixte. Comme nous l’avons mentionné précédemment, avec la création du gouvernement territorial du Nunavut, il fut décidé que l’une des priorités, en matière de droit de la famille (en plus de la création d’un nouveau Bureau d’exécution des ordonnances alimentaires) était de mener une recherche sur l’évaluation des besoins d’information sur le droit de la famille et les services connexes dans le Territoire. Cette recherche devait aussi être l’occasion d’évaluer les récentes lois territoriales en vigueur.

Le ministère de la Justice du Nunavut a jugé qu’il serait prématuré de se pencher sur les questions de la garde et du droit de visite sans examiner par la même occasion d’autres problèmes connexes. À l’heure actuelle, le droit de la famille est rarement discuté au niveau de la communauté, et une enquête exagérément technique sur la garde et le droit de visite uniquement aurait probablement engendré du mécontentement chez les personnes désireuses de participer à l’élaboration du droit de la famille dans le Territoire. Comme il y avait eu peu de recherches de ce genre dans les territoires, le ministère de la Justice du Nunavut a décidé de profiter de l’occasion qui s’offrait pour recueillir de l’information sur l’ensemble des questions touchant au droit de la famille afin de raffiner ses propres priorités. Le ministère de la Justice du Canada a soutenu cette approche.

La présente recherche devrait faciliter le processus FPT car il s’agit du seul document rédigé dans les territoires sur leurs besoins vraisemblablement uniques en services de justice familiale. La recherche facilitera en particulier la préparation des consultations sur la garde et le droit de visite, qui se tiendront au Nunavut en 2001. Au Nunavut, la Commission d’examen des lois, la Maligarnit Qimirrujiit (MQ), a la responsabilité de mener les consultations au niveau des collectivités. Au cours du printemps, les cinq commissaires se rendront dans au moins la moitié des collectivités du Nunavut pour sonder la population sur la question de la garde et du droit de visite ainsi que sur d’autres aspects plus généraux du droit de la famille. En outre, un groupe de travail élargi sur le droit de la famille au Nunavut, comprenant les deux avocats du Nunavut travaillant sur le terrain, des représentants de la magistrature, la directrice des adoptions, le directeur de la Protection de l’enfance, la directrice du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires auprès des services sociaux d’Iqaluit ainsi que des représentants du Conseil du développement social du Nunavut et un certain nombre de travailleurs sociaux, entreprendront aussi des consultations sur la garde et le droit de visite. Les commissaires de la MQ participeront eux aussi à ces consultations centralisées.

2.4  Résumé du contexte

Un certain nombre de questions contextuelles incontournables façonnent la vie familiale et, indirectement, le droit de la famille au Nunavut. La chose la plus importante est peut-être de déterminer non seulement les liens qui existent entre le concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit et les modèles de comportements familiaux qui transparaissent dans les résultats de la recherche, mais aussi de voir dans quelle mesure les principes juridiques et les services existants peuvent répondre à ce QI.

Ces questions fondamentales peuvent être subdivisées en fonction des sujets abordés dans ce chapitre. D’abord, le contexte géographique domine la vie — et la question de la prestation des services — au Nunavut. La répartition de la population en de petites collectivités isolées dont les membres entretiennent entre eux des liens très étroits est un fait social fondamental qui régit tant le mode de vie des personnes et des familles que les activités du secteur public. En cherchant à comprendre pourquoi certains comportements existent de façon récurrente et comment répondre aux besoins sociaux, il est essentiel de garder à l’esprit le contexte dans lequel évolue la communauté.

Il faut également porter une attention particulière aux problèmes sociaux graves que connaît le Nunavut. La croissance de la population et la forte proportion de jeunes auront des conséquences importantes sur la formation des familles. Certains problèmes sociaux graves peuvent contribuer à l’éclatement de la famille ou en compliquer l’issue. Le chômage, la pénurie de logements, la pauvreté endémique et d’autres problèmes de santé graves, dont la dépression, le suicide, l’alcoolisme et la toxicomanie constituent autant de problèmes auxquels sont confrontés les Nunavummiuts, mais leurs effets directs et indirects sur la vie de la famille et le droit de la famille n’ont pas encore fait l’objet d’une étude adéquate. L’un de ces problèmes sociaux relève directement du droit de la famille : l’ampleur de la violence faite aux femmes. À ce jour, on a surtout répondu à ce problème par des mesures de criminalisation. Trouver des mesures civiles qui répondront à la violence tout en permettant de régler de façon constructive le cas des relations destructrices et abusives, voilà tout un défi pour le droit de la famille.

Le système judiciaire actuel, en particulier la cour de circuit, est souvent l’objet de critiques car il ne répond pas aux besoins du droit de la famille. En revanche, certains changements récents, notamment la structure judiciaire unifiée et le renforcement des institutions judiciaires communautaires, comme les juges de paix et les comités de justice communautaire, pourraient permettre d’améliorer l’accès au système. Les lois sur la famille ont aussi connu des changements importants, notamment la simplification de la reconnaissance de l’adoption selon les coutumes, l’élargissement substantiel des droits des conjoints de fait, une définition plus précise du rôle des contrats familiaux, la clarification des droits de garde et de visite et des facteurs liés à l’« intérêt supérieur de l’enfant ». En prévision d’une réforme possible de la législation fédérale sur le divorce, et compte tenu du processus mixte de consultation, il est primordial d’examiner l’incidence éventuelle du cadre législatif en pleine évolution; de voir si les changements apportés ont ou devraient avoir une incidence sur les services au niveau du Territoire et des collectivités; et d’évaluer ce que la population connaît du système judiciaire.


3  RÉSULTATS DE LA RECHERCHE : ASPECTS PRINCIPAUX

Afin de préparer des mesures législatives renforcées ou des options de services pour le Territoire, il faut d’abord recueillir des renseignements de base sur la vie de la famille d’aujourd’hui : à quoi ressemble une famille type au Nunavut? Les aspects concernant la composition et la taille des familles du Nunavut sont tout particulièrement importants. L’étude aborde également la question du mariage et des unions de fait, leur fréquence et l’expérience des personnes parties à ces relations. Elle traite aussi du deuxième mode le plus fréquent de la formation des familles, l’adoption, et en particulier l’adoption selon les coutumes. Enfin, la recherche examine un certain nombre de questions se rapportant à la séparation et au divorce, notamment des questions d’ordre économique et factuel concernant les ménages dans lesquels se trouvent les enfants, tant après une séparation que dans les familles originelles.

L’enquête auprès des ménages est la principale source d’information pour ce chapitre de la recherche. Les problèmes que soulèvent les données et les limites des résultats sont, le cas échéant, consignés dans le texte ou dans les notes. Tous les pourcentages sont exprimés en nombres entiers ce qui, à l’occasion, donne des chiffres qui ne correspondent pas à cent p. cent. Il est arrivé souvent que les participants à l’enquête ne répondent pas à certaines questions. Nos tableaux indiquent alors « données manquantes » pour permettre au lecteur de tirer ses propres conclusions sur la signification de l’absence de réponse. Mis à part les résultats de l’enquête, nous avons intégré à l’étude certaines données puisées dans d’autres recherches ou empruntées à des anecdotes pour illustrer ou expliciter certains des résultats.

3.1  La cellule familiale au Nunavut

La structure de base de la cellule familiale au Nunavut reflète les normes culturelles inuites. La structure familiale est élargie, souple et de composition plus dynamique que dans le reste du Canada. Si l’on compare cette structure à la « norme » canadienne, où prédomine le ménage constitué d’au moins un parent et des enfants naturels, notre enquête révèle que la composition de la famille au Nunavut est beaucoup plus variée, et peut comporter un grand nombre de membres de la famille ayant différents liens avec les enfants et les parents sans lien de sang, les parents et leurs enfants adultes, les frères et les sœurs, tous vivant sous un même toit.

Les données du recensement révèlent que la taille moyenne des ménages au Nunavut est légèrement supérieure à la moyenne canadienne, dans l’ensemble. Notre enquête a révélé que, bien que la plupart des gens vivaient dans des ménages comprenant de trois à cinq personnes, près du tiers des participants à l’enquête vivaient dans des familles de plus de six personnes (Voir le tableau 1). Assez peu de ménages ne comptent qu’une seule personne ou un couple (sans oublier, bien sûr, qu’un ménage de deux personnes ne constitue pas nécessairement un couple). Ces deux types de ménages combinés ne représentent environ que 15 p. cent de tous les ménages du Nunavut.

Ce qui est encore plus surprenant, c’est de constater à quel point la composition des ménages est variée au Nunavut. Ces ménages reflètent la structure de la famille élargie dont il est sans cesse question dans les récits de la tradition orale et dans les études anthropologiques55. Les résultats de l’enquête auprès des ménages indiquent qu’un très grand nombre de ménages comptent des personnes autres que les parents et leurs enfants naturels. Un pourcentage important de ménages comptent des grands-parents, des enfants adoptés et des frères ou sœurs adultes des participants à l’enquête. En fait, l’inuktitut fait la différence entre qatangutigiit ou « famille immédiate », soit la mère, le père, le fils, la fille, les grands-parents, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants et ilagiit ou « famille élargie » qui comprend les oncles, les tantes, les cousins et cousines, les neveux et nièces, les grands-parents, les grands-oncles, les grands-tantes et, encore une fois, les petits-enfants56.

Tableau 1
Répartition des ménages du Nunavut d’après le nombre de leurs membres

Nombre de personnes par ménage

Nombre de
ménages
(N)
Pourcentage du
total des ménages
(%)

1

19

6

2

32

10

3

53

17

4

59

19

5

52

16

6

40

13

7

39

12

8

7

2

9 ou plus

16

5

Pas de réponse

25

7

Total

342

100

Le tableau 2 donne un aperçu de la diversité des relations au sein des ménages du Nunavut. Plusieurs éléments en ressortent. D’abord, le phénomène de l’adoption y est très courant, et beaucoup plus que dans l’ensemble du Canada. Au moins 15 p. cent des participants à l’enquête ont indiqué que leur ménage comptait au moins un enfant adopté (Voir ci-dessous pour une discussion plus détaillée des adoptions).

Tableau 2
Répartition des membres des ménages du Nunavut en fonction de leur relation avec les participants à l’enquête

Personne participante* et au moins :

Sexe

Total

 

Femmes

Hommes

 

1 épouse ou époux de la personne participante
68
35 %
50
34 %
118
35 %
1 conjoint(e) de fait de la personne participante
51
26 %
36
24 %
87
25 %
1 enfant naturel de la personne participante
140
73 %
77
52 %
217
64 %
1 enfant adopté de la personne participante
30
16 %
22
15 %
52
15 %
1 enfant de conjoint(e) de la personne participante
6
3 %
14
9 %
20
5 %
1 enfant sous la tutelle de la personne participante
3
2 %
3
2 %
6
2 %
1 parent naturel (père ou mère) de la personne participante
15
8 %
20
13 %
35
10 %
1 parent adoptif (père ou mère) de la personne participante
1
1 %
 
1
0 %
1 beau-parent (c.-à-d. conjoint du père ou de la mère) de la personne participante
2
1 %
5
3 %
7
2 %
1 sœur naturelle ou frère naturel de la personne participante
21
11 %
23
15 %
44
13 %
1 sœur ou frère par alliance (enfants du conjoint) de la personne participante
6
3 %
6
4 %
12
4 %
1 demi-sœur ou demi-frère de la personne participante      
1 sœur adoptive ou frère adoptif de la personne participante
2
1 %
1
1 %
3
1 %
1 petite-fille ou petit-fils de la personne participante
18
9 %
13
9 %
31
9 %
1 grand-parent de la personne participante
1
1 %
2
1 %
3
1 %
1 bru ou gendre de la personne participante
6
3 %
10
7 %
16
5 %
1 belle-mère ou beau-père de la personne participante  
1
5 %
1
3 %
1 belle-sœur ou beau-frère de la personne participante
5
3 %
4
3 %
9
3 %
1 nièce ou neveu par alliance de la personne participante
7
4 %
6
4 %
13
4 %
1 oncle ou tante de la personne participante
2
1 %
1
1 %
3
1 %
1 cousin (e)de la personne participante
1
1 %
2
1 %
3
1 %
1 conjoint de même sexe que la personne participante      
1 autre parent de la personne participante
1
1 %
 
1
1 %
1 personne non apparentée à la personne participante
7
4 %
4
3 %
11
3 %
Total des participants à l’enquête
193
100 %
149
100 %
342
100 %

*  Chaque participant(e) à l’enquête présente des caractéristiques uniques. L’un d’eux peut être un garçon de 16 ans à la charge de ses parents, un autre peut être une grand-mère ou un grand-père. Quoi qu’il en soit, ce tableau montre la grande diversité de la composition des ménages au Nunavut.

Deuxièmement, dans un nombre important de ménages, les participants à l’enquête ont signalé vivre avec un parent ou avec une sœur ou un frère. Cette constatation est importante car tous les participants à cette enquête ont plus de quinze ans. Treize p. cent des ménages comptent un père ou une mère, une belle-mère ou un beau-père (conjoint du père ou de la mère) ou un parent adopté ou un beau-parent du/de la participant(e) à l’enquête. Un peu moins du cinquième des participants à l’enquête ont signalé la présence d’une sœur ou d’un frère naturel, ou par alliance. Presque 10 p. cent des participants à l’enquête vivaient avec une petite-fille ou un petit-fils (9 p. cent) et un peu plus de 10 p. cent des ménages comptaient un parent d’un autre type. Enfin, très peu de personnes (seulement 3 p. cent des participants à l’enquête) ont déclaré vivre avec une personne avec laquelle elles n’avaient aucun lien de parenté.

Il est difficile de comparer ces résultats aux moyennes canadiennes car il existe peu d’études sur l’importance de la famille élargie. Il ne semble faire aucun doute que la famille au Nunavut diffère sensiblement, dans sa composition, de la famille typique du sud du Canada. Les chiffres pour le Canada indiquent qu’un peu plus de la moitié des familles entre dans la catégorie « parent/conjoint/enfant »57. Par contre, près du tiers des participants à l’enquête au Nunavut ont déclaré vivre avec des membres de leur parenté en plus (ou au lieu) de leur conjoint(e) ou des enfants.

Tableau 3
Répartition des participants à l’enquête en fonction de la composition des ménages

La personne participant à l’enquête vit avec...
Sexe
Total

 

Femmes

Hommes

 

Le/la conjoint(e) seulement
7
4 %
 
7
2 %
Le/la conjoint(e) et ses propres enfants seulement (famille nucléaire type)
95
49 %
65
44 %
160
47 %
Le/la conjoint(e), ses propres enfants et d’autres membres de la famille
16
8 %
17
11 %
33
10 %
Le/la conjoint(e) et d’autres membres de la famille seulement
 
4
3 %
4
1 %
Ses propres enfants seulement (famille monoparentale type)
22
11 %
5
3 %
27
8 %
Ses propres enfants et d’autres membres de la famille
19
10 %
5
3 %
24
7 %
D’autres membres de la famille seulement
16
8 %
26
17 %
42
12 %
Des personnes sans lien de parenté seulement
2
1 %
3
2 %
5
2 %
Aucune autre personne ou aucune réponse
16
8 %
24
16 %
40
12 %
Total des ménages
193
100 %
149
100 %
342
100 %

NB : Chaque pourcentage a été arrondi au nombre entier le plus proche de sorte que le total des pourcentages peut ne pas égaler 100 p. cent.

Ces résultats sont encore plus marqués quand on questionne les personnes sur la structure du ménage dans lequel elles sont nées (Voir le tableau 4). Comme il ressort de ce tableau, la famille élargie était encore plus présente dans les ménages du Nunavut, il y a de cela une génération à peine. Une tendance vers l’apparition d’une famille nucléaire au Nunavut du vivant des participants à l’enquête semble donc se dessiner. En revanche, il existe peu d’indices d’un changement suffisamment radical de la norme prévalant au Nunavut pour y voir une baisse significative de l’importance de la famille élargie.

Tableau 4
Répartition de la composition des ménages des participants à leur naissance

À sa naissance, la personne participant à l’enquête vivait avec...

Sexe

Total

Femmes

Hommes

Les deux parents naturels seulement, aucun membre de la famille élargie
37
19 %
30
20 %
67
20 %
Les deux parents adoptifs seulement, aucun membre de la famille élargie
26
14 %
14
9 %
40
12 %
La mère naturelle seulement, sans le père, aucun membre de la famille élargie
8
4 %
7
5 %
15
4 %
La mère adoptive seulement, sans le père, aucun membre de la famille élargie
 
1
1 %
1
0 %
Le père naturel seulement, sans la mère, aucun membre de la famille élargie
1
1 %
1
1 %
2
1 %
La mère et la famille élargie, sans le père
3
2 %
 
3
1 %
Le père et la famille élargie, sans la mère
1
1 %
 
1
0 %
Les parents naturels/
adoptifs et la famille élargie
91
47 %
85
57 %
176
52 %
Famille mixte : parents naturel/ adoptif/ conjoint(e) du parent naturel, aucun membre de la famille élargie
3
2 %
4
3 %
7
2 %
Famille élargie seulement, sans la mère/le père/les frères et sœurs
16
8 %
6
4 %
22
6 %
Les frères et sœurs seulement, sans les parents/la famille élargie
3
2 %
 
3
1 %
Autre/pas de réponse
4
2 %
1
1 %
5
2 %
Totaux
193
100 %
149
100 %
342
100 %

Enfin, il est important de signaler que les Inuits reconnaissent un « palier » supplémentaire de relations familiales qui s’inscrit dans le développement de relations « éponymes » ou tuqlluraniq. À leur naissance, les enfants reçoivent toujours le nom d’une autre personne, généralement décédée peu avant. En recevant ce nom, l’enfant fait sienne toute la famille de la « relation éponyme ». Il s’ensuit qu’un petit enfant se faire appeler « époux » par la veuve du défunt éponyme ou « père » par les enfants de celle-ci. Ces relations cimentées par le nom sont à notre époque largement reconnues et respectées58. On croit que les noms transportent avec eux les caractéristiques de la personne éponyme. De plus, deux individus qui reçoivent le nom d’un troisième entretiendront une relation particulière. La recherche n’a pas porté sur les relations éponymes ni sur leur incidence en matière de droit de la famille, mais plusieurs personnes ont souligné leur importance par rapport au IQ. Il serait utile d’examiner l’impact de ces relations éponymes et les responsabilités qui en découlent afin de mieux comprendre la dynamique complexe qui lie les membres de la famille élargie et afin de mieux en saisir les répercussions en cas de problèmes relationnels.

3.1.1  Les familles multigénérationnelles, les soins aux enfants et leur l’éducation

Lors des rencontres communautaires et des entrevues, on nous a souvent répété que les membres de la famille élargie avaient d’importantes responsabilités à l’égard des soins et de l’éducation des enfants de leur ménage. Nous avons entendu d’innombrables histoires où les grands-parents étaient les principaux pourvoyeurs des soins apportés aux enfants de leurs enfants. Dans certains cas, les grands-parents vont adopter l’enfant selon les coutumes. Dans d’autres cas, les grands-parents interviendront pour prendre soin des petits-enfants à l’occasion d’une période difficile que traversent leurs enfants. Nous avons aussi entendu des histoires analogues à propos de frères ou de sœurs qui se chargeaient des enfants en période de crise. On nous a bien sûr parlé des membres de la famille qui contribuaient aux soins des enfants de façon générale, en s’occupant d’eux après l’école par exemple ou simplement en offrant aux jeunes de tous âges un lieu accueillant où ils peuvent se retrouver.

L’un des facteurs évidents qui contribue au rôle actif de la famille élargie dans l’éducation des jeunes enfants est le fait que de nombreux Nunavummiuts deviennent parents à un très jeune âge. Les statistiques relatives aux grossesses d’adolescentes tendent à confirmer que les femmes ont des enfants beaucoup plus jeunes au Nunavut que dans le reste du Canada, et que dans les autres territoires. Un article récent paru dans le Nunatsiaq News d’Iqaluit rapportait qu’il y avait au moins 25 grands-mères âgées d’à peine 30 ans dans la ville d’Arviat (dont la population est de 1 676 personnes)59. Le jeune âge des nouveaux parents au Nunavut ressort clairement de la recherche. Dix-sept p. cent des participants à l’enquête ont eu leurs enfants à dix-sept ans ou moins et plus de la moitié des participants à l’enquête étaient parents avant l’âge de 21 ans (Voir la figure 1)60.

Le rôle de la famille élargie, en particulier celui des grands-parents, dans l’éducation des enfants met en relief un certain nombre d’éléments. En ce qui a trait par exemple à la garde et au droit de visite, certaines des personnes présentes à nos réunions ont contesté la présomption selon laquelle seuls les parents pouvaient automatiquement se prévaloir de ce droit sans ordonnance de la cour. Les participants ne connaissaient pas les dispositions législatives qui permettent à toute personne (et pas seulement aux parents de l’enfant) de demander la garde avec autorisation du tribunal61. On a également soulevé la question de l’aide sociale pour les grands-parents. Plusieurs membres de la communauté ont fait part de leurs inquiétudes face aux contraintes excessives, financières ou autres, qui pèsent sur les personnes qui élèvent des enfants de membres de leur famille. Dans les cas où les membres de la famille n’avaient pas d’emploi rémunéré, on ne semblait pas très au courant de la possibilité de recevoir une aide sociale pour les enfants qui viennent vivre avec eux.

Figure 1
Répartition des participants à l’enquête en fonction de l’âge auquel ils sont devenus parents pour la première fois

(Cliquer pour voir Figure 1)

Du strict point de vue du droit de la famille, ces résultats semblent indiquer que l’éclatement de la famille aura des répercussions pour bon nombre de personnes, au-delà des parents et de leurs enfants. Qui plus est, ces résultats sous-entendent l’existence d’une structure de soutien élargie au moment d’une séparation. Le groupe des personnes qui participent de façon importante à l’éducation d’un enfant est considérable et, par conséquent, le groupe qui voudra maintenir la relation avec cet enfant après l’éclatement de la famille l’est aussi. Il sera intéressant d’examiner à l’occasion d’études ultérieures les moyens mis en œuvre par les membres de la famille élargie pour maintenir leur présence dans la vie des enfants après la séparation, le type de soutien qu’ils apportent, et les conséquences du maintien de ces relations pour les deux parents ou d’autres membres de la famille.

L’âge relativement jeune des parents a également d’autres conséquences. En tant que groupe, les parents plus jeunes sont généralement plus pauvres tandis que s’accroît pour eux la probabilité de vivre à un moment donné une situation de monoparentalité. En outre, ils ont des difficultés d’accès à la justice disproportionnées comparativement aux personnes qui attendent la fin de la vingtaine pour avoir des enfants. En termes de stratégies du droit de la famille, il ne fait aucun doute qu’il faudra établir une collaboration étroite avec les services sociaux pour que les parents plus jeunes aient plus facilement accès au soutien disponible et soient mieux renseignés sur les droits que leur confère le droit de la famille. On porte beaucoup d’intérêt au travail qui pourrait se faire avec d’autres intervenants pour inciter les jeunes à patienter quelques années avant de songer à devenir parents.

3.2  L’adoption selon les coutumes autochtones

L’une des différences les plus marquées entre le Nunavut et le reste du Canada est la fréquence de l’adoption selon les coutumes. Dans l’introduction, nous avons souligné le caractère unique du régime de la reconnaissance de l’adoption selon les coutumes que prévoit la Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones, promulguée en 1996. Ce genre d’adoption constitue le point de contact le plus fréquent entre les familles et le système juridique du Nunavut. Depuis 1996, on estime que près de 2 000 cas d’adoption selon les coutumes ont été officialisés par les tribunaux, en grande majorité dans l’Arctique de l’Est62. En comparaison, au cours de la même période, on comptait en moyenne cinq adoptions par année de type ministériel (où l’enfant est placé sous la tutelle permanente du gouvernement) et peut-être 35 adoptions de type privé par des personnes autres que des Inuits. Comme nous l’avons mentionné précédemment, 22,5 p. cent des participants à l’enquête ont déclaré avoir élevé des enfants adoptés. Dans plus de la moitié des cas (40 sur 77), les participants à l’enquête ont élevé plus d’un enfant. Vingt-six pour cent (62 sur 237) ont déclaré avoir donné un enfant en adoption; un bon tiers des femmes ayant participé à l’enquête ont affirmé avoir « donné un bébé en adoption » (51 sur 150). Vingt-trois pour cent des participants ont dit avoir eux-mêmes été adoptés. Et parmi ceux-là, 93 p. cent (69) ont affirmé avoir été adoptés en vertu des coutumes autochtones, et seulement 7 p.cent (5) ont signalé un recours aux tribunaux.

Un seul cas d’adoption en vertu de la Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones (S.K.K. v. J.S.63) a eu des conséquences juridiques. Dans ce cas particulier, une grand-mère maternelle qui avait adopté sa petite-fille a cherché à obtenir une pension alimentaire pour enfant du père naturel de l’enfant. La juge Schuler de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a statué au paragraphe 30 que :

(traduction) « Les conséquences de l’adoption dépendront du droit coutumier autochtone. Ces conséquences pourraient en fait être les mêmes que celles qui découlent de… la Loi sur l’adoption ou être différentes. Elles pourraient aussi varier en fonction des collectivités ou des régions du Nunavut64 ».

La juge soutenait plus loin que le tribunal était tenu d’appliquer le droit coutumier autochtone et qu’elle demanderait une expertise en la matière avant de rendre sa décision sur la pension alimentaire pour enfant.

Plusieurs caractéristiques importantes de l’adoption selon les coutumes autochtones la distinguent sensiblement de l’adoption ordonnée par la cour en vertu de la Loi sur l’adoption65. Premièrement, l’adoption selon les coutumes est le plus souvent une adoption ouverte où chaque individu concerné, et souvent même la collectivité entière, connaît les différentes relations parentales en cause. La plupart du temps, les parents naturels continueront d’entretenir une relation avec l’enfant et parleront même de l’enfant adopté comme de « leur » fils ou de « leur » fille. Le mot qiturngaqati a été utilisé dans le sens d’« avoir le même enfant » et on l’emploie pour désigner la relation entre enfants naturels et enfants adoptés.

Deuxièmement, dans la plupart des cas (mais certainement pas tous) d’adoption selon les coutumes survient entre personnes d’une même famille; les parents, les frères et sœurs et les cousins adoptent tous des enfants sur une base régulière. Cette réalité transparaît dans nos données, où 70 p. cent de nos participants à l’enquête ayant eux-mêmes été adoptés ont signalé l’avoir été par des personnes de leur famille (Voir le tableau 5 ci-dessous).

Troisièmement, il semble que l’adoption selon les coutumes autochtones ne survienne qu’entre Inuits. Les personnes non inuites ne peuvent adopter selon les coutumes que si elles sont mariées à un(e) Inuit(e). Cela permet à une femme inuite qui épouse un qallunaat de ne pas perdre son droit d’adopter selon les coutumes autochtones.

Tableau 5
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur relation avec leurs parents adoptifs, selon le sexe

Relation entre le parent adoptif et le parent naturel

Femmes

Hommes

Totaux

Parents de la mère naturelle
17
34 %
8
29 %
25
32 %
Parents du père naturel
6
12 %
2
7 %
8
10 %
Autre parent de la mère naturelle
6
12 %
4
14 %
10
13 %
Autre parent du père naturel
7
14 %
4
14 %
11
14 %
Non apparenté(e)
5
10 %
7
25 %
112
15 %
Inconnu(e)
9
18 %
3
11 %
12
15 %
Totaux
50
100 %
28
100 %
78
100 %

N=78 participants à l’enquête ont affirmé avoir été adoptés (selon les coutumes autochtones ou sur autorisation de la cour).

Quatrièmement, dans la plupart des cas, les personnes qui « donnent un enfant en adoption » prennent l’initiative de chercher une famille disposée à « adopter » le bébé. Qui plus est, comme de nos jours les gens voyagent beaucoup d’une collectivité à l’autre, il n’est pas rare que la personne qui « adopte » soit un ami ou un parent qui ne vit pas dans la même collectivité.

En général, notre étude indique que les décisions relatives à l’adoption ne s’appuient pas sur un seul critère, par exemple « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Lors des discussions avec les commissaires de la MQ, l’un des aînés et de nombreuses autres personnes ont fait valoir qu’il n’était pas bon pour la vie de l’enfant qu’il fasse l’objet de conflits66. Il existe plusieurs rapports indiquant que l’enfant adopté est « davantage aimé » ou particulièrement choyé. Le bien-être de l’enfant est certainement pris en compte, mais les décisions liées à l’adoption se prennent plus vraisemblablement en fonction de considérations liées à la situation de la famille tout entière. L’adoption selon les coutumes autochtones survient dans de nombreux contextes. Dans la situation la plus courante, une jeune femme donne naissance à un enfant et les parents de celle-ci l’adoptent et l’élèvent comme si c’était le leur. Très souvent, ce type d’arrangement survient alors que la mère naturelle vit encore sous le toit de ses parents, et elle s’acquittera d’une part importante des soins prodigués à l’enfant adopté. Dans d’autres cas, on utilisera l’adoption comme une sorte de méthode de planification des familles pour s’assurer, par exemple, qu’il existe suffisamment « d’espace temps » entre deux enfants dont les naissances sont trop rapprochées. L’adoption peut aussi permettre de venir en aide à un parent ou à un ami qui n’a pas d’enfant, ou qui n’a pas d’enfant d’un sexe en particulier. On rapporte aussi des cas de personnes plus âgées pour qui l’adoption est une façon de s’assurer que quelqu’un prendra soin d’elles au moment de leur vieillesse.

Certains rapports font état de cas d’adoption selon les coutumes autochtones qui, à l’instar de certains cas d’adoption judiciaire, ne se déroulent pas comme prévu; soit que les personnes qui « donnent l’enfant » changent d’avis, soit que la famille d’adoption connaît des difficultés imprévues. Le recours judiciaire alors ne vise pas à annuler l’adoption, mais à la remplacer par une autre. L’enfant peut être ré-adopté par ses parents naturels ou encore être adopté par un tiers. Selon nos données, environ 5 p. cent des personnes ont affirmé avoir été adoptées plus d’une fois.

Au plan de la procédure, l’adoption selon les coutumes diffère sensiblement du processus prévu par la Loi sur l’adoption. En premier lieu, l’adoption selon les coutumes autochtones est officialisée entre les deux parties. Un commissaire à l’adoption de la région — qui, invariablement, parle l’inuktitut — consigne l’intention des parties et recueille toute l’information nécessaire pour traiter du dossier de l’adoption, en n’utilisant qu’un seul formulaire. Il existe dans chaque collectivité un commissaire à l’adoption, mais tous n’ont pas de rôle actif et certains manquent de formation, ce qui pose certains problèmes. Quand tous les renseignements ont été rassemblés, le commissaire fait parvenir le dossier à la cour, pour l’enregistrement. La cour a pour rôle de s’assurer que toutes les formalités ont été remplies; elle ne se penche en aucune façon sur le bien-fondé de l’adoption. Une fois satisfaite, la cour enregistre l’adoption. Cela étant fait, le commissaire dépose une demande de modification d’état civil et obtient un certificat de naissance modifié.

À l’opposé, le processus d’adoption tant de type privé que de type ministériel ressemble beaucoup plus à la norme qui prévaut dans le sud. Pour ces adoptions, il faut soumettre une demande à la cour. En raison de la complexité relative du processus, dans la plupart des adoptions de type privé, la personne qui fait la demande d’adoption est représentée par un avocat, que l’adoption soit contestée ou non. Il est essentiel que le consentement du parent naturel (ou, dans le cas des adoptions de type ministériel, le consentement du directeur des Services à l’enfance et à la famille) soit solidement documenté. Sauf dans le cas de l’adoption par un beau-parent, un travailleur social doit procéder à une évaluation du foyer d’accueil. Les décisions finales en matière d’adoption demeurent la prérogative du juge, qui a également le pouvoir d’imposer des conditions à l’adoption; par exemple, le parent naturel peut demander et obtenir un droit de visite permanent. Ironiquement, le juge peut être parfois tenté de reproduire, à travers les ordonnances, les conditions de l’adoption selon les coutumes autochtones.

En somme, l’institutionnalisation de l’adoption selon les coutumes autochtones au Nunavut est unique au Canada67. Ce phénomène est également unique dans le contexte du droit de la famille du Nunavut. L’adoption selon les coutumes autochtones semble une institution juridique bien comprise, accessible et couramment utilisée à l’échelle du Territoire. Par ce processus, la prise des décisions appartient à la famille et aux collectivités, et non à des institutions extérieures. Les paramètres décisionnels relatifs à l’adoption semblent assez bien définis et les différentes parties au processus semblent plutôt bien comprendre les responsabilités qui leur incombent. Bien que l’adoption selon les coutumes soit un processus beaucoup plus ouvert que l’adoption judiciaire, on ne semble pas vouloir imposer d’obligations parentales aux parents qui ont « donné l’enfant » de sorte qu’il y a peu de recoupements entre l’adoption selon les coutumes autochtones et le reste du droit de la famille. Le temps dira si d’autres institutions relatives au droit de la famille parviendront à s’adapter pour tenir compte de ce genre de réussites.

Il est important par ailleurs de ne pas idéaliser l’adoption selon les coutumes autochtones. La Commission d’examen des lois fait actuellement des sondages auprès de la communauté pour connaître sa perception des forces et des faiblesses du processus. La commission a décelé de nombreuses inquiétudes face à ces adoptions, et elle tente actuellement de trouver des façons de les « réglementer » afin d’éviter les écueils (Consulter le rapport de la Commission d’examen des lois à venir). La commission consulte aussi la communauté pour évaluer dans quelle mesure elle comprend bien les obligations de toutes les parties. Ses recommandations pourraient refléter l’expérience — positive ou négative — acquise à partir de cet important aspect du droit de la famille dans le Territoire.

3.3  Le mariage et l’union de fait

Les données du recensement montrent que 50,3 p. cent des familles du Nunavut sont composées de couples mariés, tandis que 31 p. cent des familles sont des couples en union de fait. Ces données correspondent grosso modo aux résultats de notre enquête. Nous avons carrément demandé aux participants à l’enquête s’ils vivaient en couple marié ou en union de fait. Il est important de remarquer le taux élevé d’absence de réponse dans les parties du questionnaire portant sur le mariage68.

Comme semblent l’indiquer les données des tableaux 6 et 7, un grand nombre de Nunavummiuts vivent en union de fait. La fréquence des unions de fait dépasse de baucoup la norme canadienne69, bien que légèrement inférieure à celle qui prévaut chez les peuples autochtones de l’ensemble du Canada70. Par ailleurs, le nombre de mariages y est moins élevé que pour le reste du Canada (malgré cela, le nombre de mariages y est encore plus élevé que pour l’ensemble des peuples autochtones du Canada). Quant au nombre des participants à l’enquête qui ont déclaré avoir vécu en union de fait à un moment ou à un autre de leur vie, les chiffres sont encore plus éloquents : 63 p. cent.

Tableau 6
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur situation matrimoniale au moment de l’entrevue

Situation matrimoniale

Femmes

Hommes

Total

Marié(e) légalement et non séparé(e)
62
41 %
47
42 %
109
41,3 %
Marié(e) légalement et séparé(e)
7
5 %
7
6 %
14
5 %
Divorcé(e)
5
3 %
7
6 %
12
5 %

Veuf/veuve

11
7 %
5
5 %
16
6 %
Jamais marié(e)
68
44 %
45
41 %
113
43 %
Totaux
153
100 %
111
100 %
264
100 %

N=264 participants à l’enquête ont précisé leur situation matrimoniale (aucune donnée = pas de réponse ou sans objet).

Tableau 7
Répartition des participants à l’enquête selon leur situation matrimoniale actuelle, couples mariés ou en union de fait

Situation actuelle
Femmes
Hommes
Total des participants à l’enquête
Pourcentage de l’échantillon total
Actuellement marié(e), non séparé(e), divorcé(e) ou veuf/veuve
62
38 %
47
39 %
109
38 %
32 %
Marié(e), séparé(e), divorcé(e) ou veuf/veuve — pas en union de fait
21
13 %
14
12 %
35
12 %
10 %
Union de fait
49
30 %
38
32 %
87
31 %
25 %
Jamais marié(e) et non en union de fait
32
20 %
21
18 %
53
19 %
16 %
Aucune donnée
-
-
-
58
17 %
Totaux
164
100 %
120
100 %
284
100 %
342
100 %

Tableau 8
Répartition des participants à l’enquête ayant déjà vécu en union de fait

En union de fait à un moment donné?
Femmes
Hommes
Total des participants à l’enquête
Pourcentage de l’échantillon total
Oui
8
50 %
58
59 %
126
54 %
37 %
Non
68
50 %
40
41 %
108
46 %
32 %
Aucune donnée
-
-
-
108
32 %
Totaux
136
100 %
98
100 %
234
100 %
342
100 %

3.3.1  L’âge au début des relations de couple

D’après les résultats de notre enquête, nous avons observé un certain nombre de différences possibles entre les participants mariés et ceux qui vivaient alors en union de fait. Les participants mariés étaient généralement plus âgés (31 ans, en moyenne) que les participants en union de fait (24 ans, en moyenne)71. De plus, si l’on compare l’âge moyen des participants au moment de leur mariage (âge moyen : 24 ans) à l’âge moyen des participants au début de leur union de fait (âge moyen : 21 ans), il semble que les gens retardent le moment de se marier72. Cette tendance est d’autant plus significative que les participants à l’enquête ne retardent pas le moment d’avoir des enfants.

Bien que l’on doive considérer les statistiques avec prudence, elles montrent aussi, qu’en général, les mariages durent plus longtemps que les unions de fait. Parmi les participants à notre enquête, la durée moyenne du mariage était d’un peu plus de dix-sept ans tandis que l’union de fait durait à peine plus de sept ans (Voir la figure 2).

Figure 2
Répartition des relations de couple actuelles en genre et en durée

(Cliquer pour voir Figure 2)

3.3.2  Relations de couple antérieures

Il semble que pour cette partie du questionnaire, comme pour plusieurs autres, les participants à l’enquête aient hésité à répondre. Bon nombre des personnes qui auraient dû répondre à cette question ne l’ont pas fait73. Par conséquent, il est difficile d’avoir une idée précise du nombre de personnes ayant eu des relations de couple avant le mariage ou l’union de fait actuelle (au moment de l’enquête). Il serait intéressant de savoir pourquoi cette information semblait de nature si délicate que les personnes ont préféré ne pas en parler.

Les réponses étaient légèrement plus précises quand les questions portaient sur la situation familiale et les relations de couple antérieures du conjoint actuel du/de la participant(e), plutôt que sur les propres antécédents du/de la participant(e). À une écrasante majorité, tant chez les personnes mariées qu’en union de fait, les participants ont répondu que leur partenaire était célibataire avant la relation actuelle.

Comme l’indiquent les tableaux 10 et 11, un plus grand pourcentage de personnes actuellement en union de fait que de personnes mariées ont déclaré que leur conjoint avait vécu une relation de couple importante avant la relation actuelle; cependant, les chiffres sont très bas. Moins de 10 p. cent des participants à l’enquête vivant en union de fait ont affirmé que leur partenaire précédent(e) avait été marié(e), était veuf/veuve, divorcé(e) ou séparé(e). Moins de 5 p. cent des personnes mariées ont affirmé que leur conjoint(e) avait déjà été marié(e), mais les résultats sont douteux car 15 p. cent des participants n’ont pas répondu à la question. Quinze p. cent des personnes vivant en union de fait ont dit savoir que leur partenaire avait déjà vécu une autre union de fait, mais seulement environ 2 p. cent des personnes mariées ont répondu savoir que leur partenaire avait déjà vécu en union de fait.

Tableau 9
Répartition des participants à l’enquête en fonction d’une union de fait antérieure du conjoint/ de la conjointe et en fonction de la nature actuelle de la relation du couple

 

Actuellement marié(e), séparé(e) ou divorcé(e)

Femmes

Hommes

Total des participants à l’enquête

% de l’échantillon total

Union de fait antérieure
2
3 %
1
2 %
3
3 %

2 %
Aucune union de fait antérieure
59
88 %
44
88 %
103
88 %

76 %
Ne sait pas
6
9 %
5
10 %
11
9 %

8 %
Aucune donnée      
18
13,3 %
Totaux
67
100 %
50
100 %
117
100 %
135
100 %

 

Vivant actuellement en union de fait

Femm.

Hom.

Total des
participants à l’enquête

% de
l’échant. total

Union de fait antérieure
9
18 %
4
11 %
13
15 %

15 %
Aucune union de fait antérieure
39
80 %
34
90 %
73
83,9 %

83,9 %
Ne sait pas
1
2 %
0
1
1 %

1 %
Aucune donnée    
 
0
Totaux
49
100 %
38
100 %
87
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

Tableau 10
Répartition des relations de couple en fonction de la situation matrimoniale du conjoint/de la conjointe au début de la relation

 

Actuellement marié(e), séparé(e) ou divorcé(e)

Femmes

Hommes

Total des participants à l’enquête

Total de l’échant.

Veuf/veuve
0
0
0
0
Séparé(e)
0
0
0
0
Divorcé(e)
2
3 %
2
4 %
4
4 %
4
3 %
Célibataire
62
95 %
48
96 %
110
96 %
110
82 %
Ne sait pas
1
2 %
0
1
1 %
1
1 %
Aucune donnée
-
-
-
20
15 %
Totaux
65
100 %
50
100 %
115
100 %
135
100 %

 

Vivant actuellement en union de fait

Femmes

Hommes

Total des participants à l’enquête

Total de l’échant.

Veuf/veuve
0
1
1
1
Séparé(e)
3
6 %
2
5 %
5
6 %
5
Divorcé(e)
2
4 %
0
2
2 %
2
Célibataire
44
90 %
35
92 %
79
91 %
79
Ne sait pas
0
0
0
0
Aucune donnée
-
-
-
0
Totaux
49
100 %
38
100 %
87
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

3.3.3    Les enfants d’une relation de couple antérieure

Il est révélateur d’examiner le contraste entre ces résultats et le nombre beaucoup plus élevé de participants à l’enquête qui déclarent que leur conjoint(e) a eu des enfants de relations antérieures. De plus, les taux supérieurs de réponse indiquent que les participants se sentaient plus à l’aise pour aborder le sujet.

Les données du tableau 11 semblent indiquer que les Nunavummiuts qui vivent en union de fait ont généralement plus d’enfants d’une relation antérieure que ceux qui vivent une relation de personnes mariées. Un nombre sensiblement plus élevé d’hommes que de femmes ont affirmé que leur partenaire avait introduit dans la relation des enfants issus d’une relation antérieure (environ deux fois plus)74. Quand ces données se conjuguent à celles portant sur des relations de couple antérieures, il semble que, dans un nombre important de cas, les parents ont des enfants en dehors de toute relation de couple. Nous aborderons à nouveau ce sujet dans le chapitre sur les enfants.

Tableau 11
Répartition des participants à l’enquête en fonction des conjoints ayant eu des enfants d'une relation de couple antérieure

 

Actuellement marié(e), séparé(e)
ou divorcé(e)

Femmes
Hommes
Total des participants à l’enquête
Total de l’échant.
Enfants d’une relation antérieure
3
5 %
9
18 %
12
11 %

9 %
Aucun enfant d’une relation antérieure
55
90 %
39
81 %
94
86 %

74 %
Ne sait pas
3
5 %
1
2 %
4
4 %

3 %
Aucune donnée
-
-
-
25
19 %
Totaux
61
100 %
49
100 %
110
100 %
135
100 %

 

Vivant actuellement en union de fait
Femmes
Hommes
Total des participants à l’enquête
Total de l’échant.
Enfants d’une relation antérieure
9
20 %
13
38 %
20
28 %

23 %
Aucun enfant d’une relation antérieure
34
74 %
20
59 %
54
68 %

62 %
Ne sait pas
3
7 %
1
3 %
4
5 %

5 %
Aucune donnée
-
-
-
7
8 %
Totaux
46
100 %
34
100 %
80
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives. Certaines personnes vivant actuellement en union de fait peuvent également être représentées dans la catégorie des personnes mariées, séparées ou divorcées.

Comme il a été indiqué précédemment, de récentes réformes législatives au Nunavut (à l’instar de lois adoptées presque partout au Canada) reconnaissent l’importance des unions de fait en accordant aux conjoints des droits pratiquement égaux aux droits des personnes mariées en ce concerne la pension alimentaire pour conjoint, le partage des biens matrimoniaux et un éventail d’avantages sociaux75. Cette reconnaissance vise à faire en sorte que les personnes qui vivent en union de fait ne soient pas privées des moyens juridiques leur permettant, au moment d’une séparation, de partager équitablement les avantages accumulés pendant la relation. Cependant, comme nous le verrons plus loin, ce cadre juridique semble avoir, dans les faits, une portée bien limitée.

3.3.4    Les attentes liées au mariage

On peut se demander si l’égalité juridique qui prévaut entre les personnes mariées et celles qui vivent en union de fait modifie la perception qu’ont les gens du mariage comme une option souhaitable ou du moins comme une option probable.

Le groupe le plus important a dit penser se marier un jour; mais ces personnes comptaient pour moins de la moitié des personnes non mariées. À peine un peu plus du quart des autres ne s’attendaient pas à se marier un jour et un nombre important de participants ignoraient ce que leur réservait l’avenir. (Voir le tableau 12). On peut interpréter ces résultats de bien des façons.

Tableau 12
Attentes liées au mariage des participants à l’enquête non mariés ou vivant en union de fait

Le mariage est-il une option pour vous?

Femmes

Hommes

Total

Oui
35
39 %
36
54 %
71
46 %

Non

26
29 %
17
25 %
43
28 %

Peut-être

8
9 %
3
5 %
11
7 %

Ne sait pas

20
23 %
11
16 %
31
20 %

Total

89
100 %
67
100 %
156
100 %

N=156 participants à l’enquête célibataires ou vivant en union de fait. Aucune de ces personnes n’a jamais été mariée.

3.4  Les séparations et les divorces au Nunavut

Il est difficile d’évaluer le nombre de ruptures au Nunavut. Notre échantillon est trop restreint pour donner des résultats statistiques représentatifs sur la question. D’après les réponses obtenues, les personnes séparées ou divorcées ne comptent que pour une minorité, ce qui limite notre capacité d’esquisser sans risque d’erreur une tendance générale au sein de ce segment de population. De plus, comme nous l’avons signalé précédemment, les participants à l’enquête semblaient aborder avec beaucoup de réticence les relations de couple antérieures, ce qui nous prive d’une source d’information secondaire importante. Mais nous avons insisté sur cette question dans une partie de notre étude qualitative. Les discussions lors des rencontres communautaires et des conversations que nous avons eues nous ont fourni des renseignements utiles sur les perceptions de la population à l’égard des ruptures.

3.4.1  L’ampleur du phénomène des séparations et des divorces

Dans notre enquête, sur les 151 personnes ayant été mariées, 14 ont affirmé être séparées (environ 4 p. cent), et 12 ont déclaré être divorcées (là encore environ 4 p. cent). Parallèlement, seize personnes (5 p. cent) ont répondu avoir vécu un veuvage. Il a été plus difficile de déterminer le nombre des cas de séparation au terme d’une union de fait. Les personnes qui ont affirmé avoir déjà vécu en union de fait dans le passé (215 ou 63 p. cent) étaient beaucoup plus nombreuses que celles qui ont affirmé se trouver en situation d’union de fait au moment de l’enquête (126 ou 37 p. cent). Toutefois, un nombre beaucoup plus faible de personnes vivant en union de fait (15 seulement) ont en fait déclaré être séparées et ont répondu aux questions connexes de l’enquête.

Ces statistiques, d’après notre enquête auprès des ménages, sont en gros comparables aux données du recensement de 1996 pour la région, qui indiquaient que 3 p. cent des personnes de plus de 15 ans étaient divorcées et que 3 p. cent étaient séparées76. Les données du recensement indiquaient que 3,4 p. cent de ces personnes étaient veuves. En revanche, les données du recensement de 1996 pour l’ensemble du Canada, et là encore pour les personnes âgées de plus de quinze ans, indiquaient des niveaux de séparation inférieurs et des niveaux de divorce supérieurs. Près de 589 000 personnes (3 p. cent) dans l’ensemble du Canada avaient indiqué avoir connu une séparation, et 1 171 (7,2 p. cent) avaient déclaré avoir vécu un divorce. Environ 6 p. cent des personnes avaient dit avoir vécu un veuvage — 1 422 000 (6,4 p. cent)77. Les chercheurs de Statistique Canada avaient aussi éprouvé certaines difficultés à obtenir des données claires sur les séparations au terme d’une union de fait, pour les études d’envergure nationale.

Deux éléments ressortent clairement quand on compare les chiffres de l’ensemble du Canada à ceux du Nunavut. Premièrement, dans l’ensemble, il semble y avoir moins de séparations au Nunavut. Deuxièmement, des personnes qui se séparent peu d’entre elles obtiennent en fait un divorce au Nunavut. Cette tendance fait écho aux nombreux rapports publiés sur les problèmes d’accès au système juridique dès qu’il est question de droit de la famille.

3.4.2  Les séparations temporaires

Nous avons aussi posé des questions sur les couples qui se séparent, et reprennent ultérieurement la vie commune. Les participants ont abordé le sujet avec beaucoup de réticence. Parmi les personnes mariées, 60 p. cent n’ont pas répondu à la question. Parmi celles qui ont répondu, 15 ont déclaré avoir connu une séparation puis une réconciliation, et 34 ont dit n’avoir jamais vécu de séparation. Sept des personnes qui ont rapporté une séparation temporaire ont révélé s’être séparées à plus d’une occasion. Bien que nous ayons demandé pourquoi les partenaires reprenaient la vie commune, nous n’avons obtenu que peu de réponses à cette question.

Les responsables des refuges pour victimes de violence familiale et autres agents des services sociaux ont affirmé que les séparations temporaires étaient plutôt fréquentes. Souvent, surtout dans les cas où sévit la violence, la séparation signifie quitter la collectivité pour trouver espace ou sécurité. Il arrive que ces départs nécessitent la participation des agents des services sociaux car les femmes, avec ou sans enfants, n’ont pas les moyens financiers de quitter la collectivité — et il n’existe que trois refuges de ce type au Nunavut. Les agents des services sociaux attribuent la réunification des familles au Nunavut, après une séparation temporaire, à un certain nombre de facteurs, dont : des obstacles réels et souvent imprévus qui entravent la volonté de prendre un nouveau départ dans la vie sans le/la conjointe, l’amour, la conviction que les enfants ont besoin de l’autre parent et la solitude, exacerbée par le fait que la séparation peut signifier non seulement la rupture avec le/la conjointe, mais avec la collectivité tout entière et le réseau de soutien que procure la famille élargie.

Les histoires de séparations temporaires où sévit la violence familiale font partie des histoires que racontent les aînés dans l’unikkaaqtuaq (fables et récits issus de la tradition). L’une de ces histoires parle d’une femme qui, incapable d’enfanter, et au comble du désespoir en raison des agressions répétées de son mari, le quitte finalement et s’enfuit dans la neige pour implorer la lune de venir la chercher. La lune répond à son appel et l’emmène dans le ciel, en traîneau à chiens. La femme voit le soleil — une femme embrasée, tatouée — et les étoiles. Elle vit avec taqqiq, la lune, et a un fils. Quelque temps plus tard, ayant la nostalgie de son foyer et éprouvant de la pitié pour son mari, elle sent le besoin de rentrer chez elle. Le traîneau la ramène à son foyer, avec ordre de ne pas manger de viande ni de brûler de l’huile d’animaux marins pendant toute une année après son retour. Sa marmite et sa qulliq (lampe à l’huile) seraient toujours pleines. La femme retrouve son mari qui est ravi de son retour. Pourtant, avant que ne s’écoule l’année, la colère le gagne parce qu’elle ne veut pas manger la viande qu’il lui apporte ni utiliser la graisse pour faire l’huile, et il recommence à la battre. Elle tente de l’ignorer, mais au bout du compte, elle ne peut plus supporter les coups et elle mange un tout petit morceau de viande. C’est alors qu’après l’avoir allaité, son fils meurt et sa marmite et sa qulliq cessent de se remplir. Le récit se termine par ces mots : « Aittaa, quelle tristesse78. »

3.4.3  Les motifs de séparation et de divorce

Parmi les 40 participants à notre enquête qui ont admis avoir vécu une séparation ou un divorce, un petit nombre (16) ont répondu à nos questions sur les raisons qui les ont mené à la séparation ou au divorce. Cinq personnes ont déclaré que la relation avait pris fin parce qu’elles n’avaient plus grand-chose en commun avec leur partenaire. Quatre ont indiqué que l’alcoolisme ou la toxicomanie avait constitué un facteur et quatre ont affirmé que leur partenaire entretenait une relation avec une autre personne. Une personne a mentionné la violence.

Même si ces chiffres ne peuvent pas être considérés comme représentatifs de la population dans son ensemble, ils contredisent néanmoins l’idée largement répandue dans la population du Nunavut selon laquelle la violence, et en particulier la violence faite aux femmes, constitue la principale raison de l’éclatement des ménages. Il ne fait aucun doute que la violence familiale constitue un grave problème au Nunavut. Certaines comparaisons avec d’autres données semblent indiquer qu’elle est nettement sous-estimée dans notre enquête79. S’assurer que la loi protège les victimes de violence et leur procure un recours possible est une importante priorité du droit de la famille. Il est fondamental que les services mis en place soient sensibilisés aux besoins particuliers des personnes qui ont survécu à la violence afin que, par inadvertance, ils ne reconduisent à la victimisation.

Cela étant dit, presque toutes les discussions publiques sur l’éclatement des ménages portent sur des cas de violence. Il existe peut-être un certain nombre de raison à cela. Par contre, l’absence de débat public sur les motifs de rupture dans les situations ne comportant pas de violence témoigne peut-être implicitement d’un sentiment général selon lequel la séparation est inacceptable sur le plan social, sauf dans des cas extrêmes. De nombreux membres de la communauté ont clairement exprimé qu’à leur avis le nombre des séparations était trop élevé et que la fréquence des ruptures constituait un problème social grave. Les discussions sur le droit de la famille pourront aussi porter sur la violence car la population associe en général le « droit » ou le système juridique au système de justice pénale. On a peut-être aussi tendance à penser qu’une intervention juridique en milieu familial ne se justifie que dans les cas où un acte criminel a été commis.

Quoi qu’il en soit, les résultats de notre enquête, bien que fragmentaires, laissent fortement supposer que les ruptures ne sont pas toutes motivées par des actes de violence. Cela, aussi, a d’importantes répercussions sur la mise en place des services. À l’exception du programme d’exécution des ordonnances alimentaires, la plupart des services qui traitent des cas de séparation et de divorce abordent également les problèmes de violence, y compris les refuges et les maisons de transition dans quelques collectivités, de poursuites des agresseurs au criminel, des ordonnances de bonne conduite et des ordonnances de ne pas faire. Même si ces services se sont considérablement améliorés, ils ne comblent pas la totalité des besoins des couples qui vivent une séparation, et encore moins ceux des familles monoparentales. Qu’il y ait eu ou pas violence dans le couple, il demeure nécessaire d’aborder des questions pratiques, telles que la responsabilité des soins et de la pension alimentaire à fournir aux enfants, le partage équitable des biens matrimoniaux et la pension alimentaire pour l’époux qui a été désavantagé par la relation. On ne peut s’attendre à ce que des services conçus principalement dans le but de préserver la sécurité des femmes et des enfants et de voir à l’imputabilité des criminels répondent entièrement aux besoins des parents séparés et de leurs enfants.

3.5  Le patrimoine et la pension alimentaire pour conjoint

Nous avons posé un certain nombre de questions pour recueillir de l’information sur les finances et des couples mariés et des couples en union de fait ainsi que sur les ententes en matière de pension alimentaire ou autres transferts lors d’une séparation.

3.5.1  Le paiement de la pension alimentaire pour conjoint

Selon les données de notre enquête, seul un petit nombre des personnes séparées ou divorcées reçoivent ou paient une pension alimentaire, peu importe qu’elles aient été mariées ou qu’elles aient vécu en union de fait. Il existe des différences entre les réponses des personnes divorcées par rapport à celles qui ont vécu une séparation au terme d’une union de fait. Toutefois, notre échantillon est trop petit pour être représentatif. La plupart des participants divorcés n’ont pas répondu à la question (8 personnes sur 12); deux des personnes qui ont répondu ont déclaré avoir payé ou reçu une pension alimentaire et les deux autres, non. Il y a eu un plus grand nombre de réponses de la part des personnes séparées après avoir vécu en union de fait (12 sur 15). Onze d’entre elles ont dit ne pas avoir payé ou reçu de pension alimentaire, et une seule a répondu par l’affirmative.

Le faible pourcentage de réponses et le nombre réduit des cas où les personnes recevaient ou payaient une pension alimentaire correspondaient à nos prévisions. Quelques facteurs pertinents nous avaient permis de faire des prédictions en ce sens, entre autres le manque d’information juridique et l’égalité relative des revenus.

3.5.2  La connaissance des droits

Dans notre enquête auprès des ménages, nous avons posé des questions sur l’existence d’un certain nombre de droits, notamment le droit à une pension alimentaire et au partage du patrimoine. En raison d’un problème de conception de l’enquête, seules les personnes ayant déjà eu recours à des services (par exemple, à un travailleur social, un groupe paroissial ou un avocat), ont répondu aux questions portant sur l’information juridique (31). Nous avons posé des questions sur le droit de présenter une demande au tribunal pour le partage du patrimoine. Parmi les participants ayant répondu, 19 ont dit connaître ce droit. Environ les deux tiers de ces personnes (22 sur 31) étaient d’avis qu’il s’agissait là d’une information juridique importante. Quand on le leur a demandé, presque tous les participants ont dit que le droit de demander le partage du patrimoine était important entre personnes mariées ou conjoints de fait pour des questions de justice et d’égalité. Une poignée de personnes a affirmé considérer ce droit comme un moyen important d’obtenir l’égalité, « le moyen d’obtenir ce qui vous appartient » après la séparation ou d’établir les règles d’un soutien financier pour la famille après la rupture.

Un nombre sensiblement moins élevé de participants à l’enquête (16 sur 31) ont déclaré savoir qu’une personne vivant en union de fait pouvait s’adresser à la cour pour obtenir une pension alimentaire. Onze d’entre eux ont déclaré l’ignorer. Plus de 80 p. cent (26 sur 31) ont dit penser qu’il était important pour les gens de connaître ces renseignements. Les participants ont énuméré pour cela toute une série de raisons, la plupart liées au bien-être des enfants. Peu d’entre eux y ont vu une façon de satisfaire les besoins d’un conjoint de fait après le divorce ou de répondre à certaines difficultés particulières. Une ou deux personnes ont invoqué l’équité. Deux personnes étaient d’avis que cette information était importante simplement parce que peu de gens étaient au courant et qu’il était important de connaître ses droits.

Dans l’ensemble, d’après les rencontres et les entrevues, nous avons constaté qu’au niveau des collectivités, les gens comprenaient mal leurs droits et le concept de pension alimentaire pour conjoint. Les réponses à notre enquête semblent, elles, plutôt exagérer le niveau de connaissance de ces droits. La plupart des personnes ayant assisté aux rencontres communautaires, y compris des dirigeants de collectivités, étaient apparemment peu familiers avec l’expression « pension alimentaire pour conjoint » ou avec le principe du partage des biens matrimoniaux dans le but de refléter la contribution de chacun durant la relation.

Néanmoins, lors de nos rencontres, les gens ont dit approuver la notion selon laquelle un mariage ou une union de fait constitue, entre autres choses, une association économique, et qu’un partage égal entre partenaires était tout à fait approprié. Les documents sur le sujet indiquent clairement que le partage égal entre conjoints et la reconnaissance d’une contribution égale sont compatibles avec le IQ80. Dans la culture inuite, on se représente souvent les conjoints du mariage comme les deux ailes d’un oiseau qui ne peut pas voler sans la contribution de chaque partie et sans qu’un équilibre s’installe entre elles81. L’idée d’interdépendance est très forte dans la tradition inuite et ce concept semble être fortement valorisé aujourd’hui.

3.5.3  Le revenu relatif

Le fossé somme toute négligeable entre le revenu des hommes et celui des femmes au Nunavut et la faiblesse du revenu des Nunavummiuts en général constituent un autre facteur qui affecte le versement des pensions alimentaires au conjoint et fort probablement, par la même occasion, les niveaux très bas des pensions payées ou reçues.

Environ 20 p. cent des participants à l’enquête, tant mariés que conjoints de fait, ont signalé que leur partenaire gagnait « à peu près autant » qu’eux-mêmes. À peine plus de 35 p. cent des personnes mariées ou en union de fait ont révélé un écart extrême de revenu, leur partenaire gagnant soit beaucoup plus soit beaucoup moins qu’elles-mêmes (Voir le tableau 13). Bien qu’il soit risqué de généraliser, compte tenu de la petite taille de notre échantillon, il semble que plus de femmes mariées que de conjointes de fait ont un revenu nettement supérieur ou nettement inférieur à celui de leur partenaire. Dans l’ensemble, comme pour le reste du Canada et dans les deux types de relations, plus de femmes que d’hommes ont indiqué gagner moins que leur partenaires.

Tableau 13
Répartition des participants à l’enquête en fonction du revenu relatif, selon le sexe

Partenaire gagne…
Marié(e), non séparé(e) ou divorcé(e), non veuf/ non veuve
 Femm.
 Hom.
Total des participants à l’enquête
Total de l’échant.
Beaucoup moins que participant(e)
10
19 %
3
8 %
13
15 %

10 %
Un peu moins que participant(e)
2
4 %
8
22 %
10
11 %

7 %
À peu près autant que participant(e)
13
25 %
6
17 %
19
22 %

14 %
Un peu plus que participant(e)
8
15 %
10
28 %
18
21 %

13 %
Beaucoup plus que participant(e)
15
29 %
8
22 %
23
26 %

17 %
Ne sait pas
4
8 %
1
3 %
5
6 %

3,7 %
Aucune donnée
-
-
-
47
34,8 %
Totaux
52
100 %
36
100 %
88
100 %
135
100 %

Partenaire gagne…
Conjoint(e) de fait
 Femm.
 Hom.
Total desparticipants à l’enquête
Total de l’échant.
Beaucoup moins que participant(e)
14
29 %
11
29 %
25
35 %

29 %
Un peu moins que participant(e)
4
8 %
5
13 %
9
13 %

10 %
À peu près autant que participant(e)
10
20 %
7
18 %
17
24 %

20 %
Un peu plus que participant(e)
7
14 %
6
16 %
13
18 %

15 %
Beaucoup plus que participant(e)
6
12 %
2
5 %
8
11 %

9 %
Ne sait pas
1
2 %
1
3 %
2
3 %

2 %
Aucune donnée
-
-
-
13
15 %
Totaux
49
100 %
38
100 %
71
100 %
87
100 %

Remarque : les données ne sont pas cumulatives.

Ces résultats diffèrent considérablement des chiffres obtenus dans le Sud du Canada où l’écart des salaires entre les hommes et les femmes est plus prononcé. Statistique Canada signalait, dès 1998, que les femmes gagnaient 64,4 p. cent du salaire des hommes82. De plus, dans le Sud du Canada, l’écart entre les hommes et les femmes se retrouve également dans la répartition des revenus entre les couples mariés et les conjoints de fait.

En revanche, ces résultats surprennent moins quand on les examine à la lumière des taux relatifs d’emploi (et de scolarité) des femmes et des hommes au Nunavut. Au moins une étude semble indiquer que les femmes inuites s’ajustent mieux à l’économie fondée sur les salaires que leurs partenaires masculins, et que les femmes ont une situation plus enviable que les hommes, particulièrement dans les emplois du gouvernement et les emplois de bureau mieux rémunérés83.

Par ailleurs, la pauvreté généralisée au sein de la majorité inuite et le caractère disparate des stratégies économiques de nombreux Nunavummiuts (une minorité de personnes ont un emploi à temps plein rémunéré, à peu près autant ont un soutien du revenu et près du cinquième des participants affirment tirer un revenu de sources multiples; voir le tableau 14) sont des facteurs qui expliquent l’absence relative d’écart de revenu entre les sexes et entre les différents types de relation de couple.

Tableau 14
Répartition des participants à l’enquête en fonction de la source de revenu

Source de revenu

Femmes

Hommes

Total

Emploi à temps plein
55
30 %
51
35 %
106
32 %
Emploi à temps partiel
30
16 %
21
14 %
51
15 %
Soutien du revenu
40
22 %
34
23 %
74
22 %
Membres de la famille
20
11 %
5
3 %
25
8 %
Activités traditionnelles
4
2 %
9
6 %
13
4 %
Emploi à temps partiel et soutien du revenu
7
4 %
2
1 %
9
3 %
Emploi à temps partiel et activités traditionnelles
5
3 %
4
3 %
9
3 %
Emploi à temps plein et activités traditionnelles
2
1 %
 
2
1 %
Activités traditionnelles et soutien du revenu
5
3 %
7
5 %
12
4 %
Autres (notamment « sans travail »)
16
9 %
15
10 %
31
9 %
Totaux
184
100 %
148
100 %
332
100 %

Enfin, le phénomène de la famille élargie tend sans doute à réduire l’importance accordée à la comparaison des revenus entre les deux partenaires d’une relation conjugale. La présence au sein du ménage d’autres pourvoyeurs ou d’autres adultes responsables de l’éducation des enfants a vraisemblablement de profondes répercussions sur les ressources de l’ensemble de la famille.

En résumé, d’après notre recherche, relativement peu de personnes versent ou reçoivent une pension alimentaire au Nunavut. Néanmoins, la communauté semble appuyer fortement les lois qui prescrivent le versement de ces pensions et le partage du patrimoine familial comme une question d’équité et comme une ressource importante pouvant profiter aux enfants. Le faible nombre de demandes d’aide financière est sans aucun doute dû au manque de connaissances relativement aux droits à une pension alimentaire pour conjoint et au partage du patrimoine. Dans la même veine, comme nous le verrons plus loin, l’accès aux tribunaux pose également un problème sérieux. La rareté des demandes de pension alimentaire est peut-être aussi liée à des facteurs sociaux plus généraux, qui n’ont rien à voir avec les droits des personnes mariées ou des conjoints de fait qui vivent une séparation. En particulier, il est peu probable de voir survenir des transferts monétaires substantiels entre conjoints puisque dans la plupart des cas l’écart des revenus est relativement faible et que ces revenus eux-mêmes sont relativement faibles. Au gré des changements qui surviendront au Nunavut dans les années à venir — surtout grâce au développement d’une classe moyenne inuite plus nombreuse (ou d’une élite) — nous verrons sans doute ce droit prendre de plus en plus d’importance. Pour l’instant, il ne semble pas constituer une priorité dans le cadre du droit de la famille.

3.6  Le domicile conjugal

Quand les revenus sont faibles, la principale question d’ordre économique que soulève la séparation est celle du domicile conjugal. Pour de nombreuses familles, il s’agit là du seul bien dont elles disposent et tout règlement portant sur le patrimoine familial tient lieu de toute autre forme de règlement.

De l’ensemble des provinces et des territoires du Canada, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ont mis au point les droits de propriété les plus larges pour les conjoints de fait, leur accordant les mêmes droits qu’aux personnes mariées pour la jouissance et la propriété du domicile conjugal. Il existe cependant des différences considérables dans les modèles de propriété entre les conjoints de fait et les couples mariés. La grande majorité des deux groupes confondus sont locataires (les trois quarts des participants à l’enquête ont affirmé être locataires de leur logement). Cette situation n’a rien de surprenant puisque la plupart des 60 p. cent des Nunavummiuts qui vivent dans des logements sociaux sont locataires (à l’exception des résidents d’environ 500 unités d’« accès à la propriété » dont les paiements hypothécaires sont établis en fonction du revenu). En revanche, un nombre légèrement plus important de participants mariés étaient propriétaires de leur lieu de résidence (environ 20 p. cent des personnes mariées comparativement à 15 p. cent des conjoints de fait). Nous avons observé une différence plus marquée venant du fait qu’un nombre considérable de conjoints de fait ayant participé à l’enquête (environ 7 p. cent) ont affirmé vivre dans la maison de quelqu’un d’autre (Voir le tableau 15). Dans l’ensemble, au Nunavut, le pourcentage de propriétaires correspond à moins de la moitié du pourcentage national. Le recensement du Canada indique qu’à l’échelle nationale, 64,5 p. cent des ménages sont propriétaires de leur maison (avec ou sans hypothèque) tandis que 36 p. cent sont locataires84.

Tableau 15
Répartition des types d’habitation des participants à l’enquête, selon le type de relation de couple et selon le sexe

Type d’habitation
Marié(e), non séparé(e) ou divorcé(e), veuf / veuve
Femme
Hom.
Total des participants à l’enquête
Total de l’échant.
Propriété
13
26 %
8
26 %
21
26 %

16 %
Location
34
68 %
23
74 %
57
70 %

42 %
Maison de quelqu’un d’autre
-
-
-
-
Autre
3
6 %
0
3
4 %

2 %
Aucune donnée
-
-
-
54
40 %
Totaux
50
100 %
31
100 %
81
100 %
135
100 %

Type d’habitation
Conjoint(e) de fait
Femme
Hom.
Total des participants à l’enquête
Pourcent. échant. total
Propriété
5
10 %
8
22 %
13
15 %

15 %
Location
42
88 %
22
60 %
64
75 %

74 %
Maison de quelqu’un d’autre
1
2 %
5
14 %
6
6 %

7 %
Autre
 
2
2 %
2
2 %

2 %
Aucune donnée
-
-
-
2
2 %
 Totaux
49
100 %
38
100 %
85
100 %
87
100 %

Remarque : ces chiffres ne sont pas cumulatifs.

Dans ce contexte, bien qu’il soit nécessaire de prévoir des mécanismes pour le partage équitable du patrimoine conjugal, et de protéger les personnes contre une appropriation indue des biens, la plupart des Nunavummiuts sont touchés bien plus directement par les dispositions législatives concernant la propriété de la maison. Dans la nouvelle Loi sur le droit de la famille85, les dispositions relatives au domicile familial s’appliquent aux logements locatifs comme aux logements sociaux du Territoire. Il est possible d’obtenir du tribunal la jouissance exclusive du domicile. Plusieurs facteurs entrent alors en ligne de compte, dont l’intérêt supérieur des enfants, la disponibilité d’autres lieux de résidence, la situation financière des parties, la violence et les ordonnances déjà émises par le tribunal.

Il s’agit d’un sujet qui semble grandement préoccuper les membres de la communauté. Comme pour d’autres questions touchant le droit de la famille, ils ne semblent pas très bien informés de leurs droits. Qui plus est, les difficultés d’accès aux tribunaux et les périodes d’attente ont de graves répercussions sur la volonté du conjoint ou de la conjointe de revendiquer la jouissance du domicile auquel il ou elle peut avoir droit, démarche qui peut s’avérer être dans l’intérêt supérieur des enfants.

Certaines considérations pratiques créent aussi des difficultés quand il s’agit de faire reconnaître ses droits à l’occupation exclusive d’un logement. Premièrement, la cour doit examiner la possibilité de solutions de rechange en matière de logement. Étant donné la crise du logement qui sévit au Nunavut, il peut être très difficile d’émettre une ordonnance qui obligerait une personne à quitter son domicile si elle doit se retrouver sans abri ou si elle doit emménager dans la demeure déjà surpeuplée d’un autre membre de sa famille. Les organismes locaux d’habitation ont la responsabilité de gérer les demandes de logement au sein de la collectivité et la plupart de ces organismes ont recours à des critères d’urgence pour accorder à certaines personnes une priorité d’accès aux logements disponibles. Dans la plupart des cas, d’après le personnel de la société d’habitation, ces critères seraient appliqués pour venir en aide à un parent sans domicile et à ses enfants86. Mais, il y a des limites à la capacité de ces organismes locaux d’établir des priorités puisqu’« il n’existe pas un seul logement social disponible au Nunavut. »87

La pénurie de logements, et le fait de dépendre de comités locaux pour obtenir des unités d’habitation peut aussi poser des problèmes aux personnes qui envisagent une séparation. Car cette situation peut permettre aux membres du comité de logement, surtout s’ils ont des liens familiaux ou amicaux avec le conjoint qui refuse la séparation, d’exercer des pressions dans le sens d’un maintien de la relation du couple. Ce problème ne nous a pas été rapporté directement au cours des rencontres communautaires, mais le cas s’est présenté dans d’autres communautés autochtones88. Il correspond à certaines des préoccupations exprimées par Pauktuttit (l’association des femmes inuites) et d’autres intervenants face aux difficultés que rencontrent les femmes qui, vivant dans de petites collectivités où les membres entretiennent entre eux des liens très étroits, cherchent à obtenir de l’aide pour quitter un partenaire violent.

Ces questions pratiques ne seront pas résolues, tant s’en faut, par la loi. En revanche, il pourrait s’avérer utile d’examiner la possibilité de modifier la loi pour en faciliter les objectifs actuels. Il ne fait aucun doute que la possibilité de rester dans le domicile familial a un effet déterminant sur les conflits portant sur la garde et le droit de visite; c’est aussi une importante question de sécurité. À la lumière de l’importance de cette question, il serait bon d’examiner des choix susceptibles de faciliter des prises de décision rapides, sans délai, sur la prise de possession du domicile. Il pourrait même s’avérer approprié de déléguer ces décisions, sous réserve d’une révision de la cour de justice du Nunavut, à des décideurs locaux, tels que les juges de paix ou les membres des CJC, s’ils sont prêts à en prendre la responsabilité. Des CJC, dont la composition serait suffisamment diversifiée, pourraient représenter un forum adéquat pour ce genre de situation; ils pourraient négocier de façon originale et satisfaisante une solution dans laquelle le parent qui n’a pas la garde des enfants pourrait rester dans le logement. Les décisions des autorités locales (juges de paix ou CJC) sur la jouissance exclusive du domicile devraient être exécutoires, au même titre que les décisions de la cour, et soumises à un contrôle judiciaire.

3.7  Les enfants et leur famille

Chez les Inuits, les enfants représentent une grande richesse. Avec l’essor démographique que connaît actuellement le Nunavut, un plus grand nombre de familles ont des enfants et le nombre d’enfants par famille se multiplie. Dans l’ensemble, les familles avec enfants constituent un plus grand pourcentage de la population que dans le reste du Canada. Les données du recensement de 1996 indiquaient que 11 835 enfants vivaient chez eux au Nunavut dans 5 275 familles. Le nombre moyen d’enfants vivant dans leur famille, selon les données du recensement, était de 2,2, et tout le monde s’entend pour dire que ce nombre est en hausse depuis. Ces chiffres tranchent avec les données de Statistique Canada pour l’ensemble du Canada où les familles avec enfants constituent 67 p. cent de l’ensemble des ménages, avec en moyenne 1,2 enfant à la maison89.

Les données de notre enquête concordent avec les chiffres du recensement. Quatre-vingt-un participants à l’enquête (23 p. cent environ) ont affirmé ne pas avoir d’enfants. Soixante-dix-sept p. cent des participants (261), chiffre bien supérieur à la moyenne canadienne, ont dit avoir des enfants. De plus, selon l’information recueillie au cours de notre enquête, chaque participant avec enfants a un nombre d’enfants plus élevé, soit 3 enfants (3,5) en moyenne.

3.7.1  La structure des familles avec enfants

Il existe aussi des différences substantielles entre les types de famille au Nunavut et les types de famille dans le reste du Canada. Au Nunavut, selon les résultats de notre enquête, les conjoints de fait ont des enfants dans une proportion équivalant aux deux tiers (61, ou 27,4 p. cent de toutes les familles avec enfants90) des chiffres correspondant aux personnes mariées (96, ou 43 p. cent de toutes les familles avec enfants). Le nombre des familles monoparentales, y compris les parents divorcés ou séparés et les personnes n’ayant jamais été mariées, est assez considérable (49, soit 22 p. cent de toutes les familles avec enfants) (Voir la figure 3).

En revanche, dans l’ensemble du Canada, les couples mariés avec enfants comptent pour 69 p. cent des familles avec enfants tandis que les conjoints de fait sont parents dans une proportion de 8,5 p. cent et que les familles monoparentales représentent 22 p. cent des familles91.

Figure 3
Structure des familles avec enfants

(Cliquer pour voir Figure 3)

Bien qu’il soit impossible de mesurer directement les tendances, nos données semblent indiquer que les types de famille se sont grandement modifiés avec le temps au Nunavut. La plupart des participants à l’enquête dont les parents formaient un couple au moment de leur naissance ont indiqué avoir vécu avec leurs deux parents tout au long de leur enfance (80 p. cent ou 197 des 247 participants). Qui plus est, 85 p. cent de ces personnes ont déclaré que leurs parents étaient mariés devant la loi.

3.7.1.1  Les familles monoparentales

Au Nunavut, comme dans l’ensemble du Canada, les chefs de famille monoparentale sont la plupart du temps des femmes. Notre échantillon est beaucoup trop petit pour être représentatif mais il semble, selon notre enquête, que les trois quarts des ménages à un seul parent (34 sur 46) soient dirigés par des femmes. Ce résultat est comparable à ce qui existe dans le reste du Canada et indique que quatre fois sur cinq, les chefs de famille monoparentale sont des femmes92.

Notre enquête donne un aperçu général de la situation matrimoniale des personnes actuellement chefs de famille monoparentale. Bien que certaines soient divorcées (3 sur 51) ou séparées (5 sur 51), une proportion beaucoup plus grande de l’échantillon n’a jamais été mariée, ne vit pas actuellement en union de fait (18 sur 51) ou est veuve ou veuf (13 sur 51) (Voir le tableau 16)93. Par contre, dans le reste du Canada en 1991, seulement 22 p. cent des chefs de famille monoparentale étaient célibataires et n’avaient jamais été mariés94.

Tableau 16
Répartition des participants, chefs de famille monoparentale, selon leur situation matrimoniale

 

Situation matrimoniale

A déjà été marié(e) mais séparé(e), divorcé(e) ou veuf/veuve

Jamais marié(e) ni conjoint(e) de fait

Non précisé*

Fem.

Hom.

Total

Fem.

Hom.

Total

Fem.

Hom.

Total

Avec enfants seulement

7

4

11

9

1

10

6

0

6

Avec d’autres membres de la famille

7

3

10

7

1

8

5

1

6

Totaux

14

7

21

16

2

18

11

1

12

N=51 participants à l’enquête ont dit avoir des enfants mais ne pas avoir de conjoint dans le ménage.
* « Non précisé » se rapporte aux participants à l’enquête qui n’ont pas déclaré leur situation matrimoniale, et les personnes qui ont défini leur situation actuelle comme étant mariées ou conjointes de fait (N=3, toutes ces personnes vivent avec d’autres membres de la famille).

La forte proportion des familles vivant sous le même toit qu’un autre membre adulte de la famille, près de la moitié (24 sur 51) est également typique des familles monoparentales du Nunavut. Cette situation a un certain nombre de conséquences possibles. D’abord, l’éducation et le soin des enfants pèsent moins lourd sur le chef de la famille monoparentale qui vit avec sa famille. Deuxièmement, le fardeau financier du parent peut ainsi être réparti entre plusieurs membres, même quand le parent non résident n’y participe pas.

Dans le reste du Canada, la famille monoparentale type a été grandement associée à tout un ensemble de tendances sociales importantes95 :

  • Les chefs de famille monoparentale ont, dans l’ensemble, un revenu familial plus faible que les couples mariés ou les conjoints de fait ayant des enfants.
  • Les enfants nés de conjoints de fait sont « surreprésentés » parmi les enfants qui vivent un éclatement de la famille.

3.7.1.2  Les familles reconstituées

Au Nunavut, un pourcentage de personnes légèrement supérieur à la moyenne canadienne affirme vivre dans des « familles reconstituées ». En 1995, dans environ un couple sur dix comptant des enfants jamais mariés et vivant à la maison, au moins l’un des enfants était élevé par un parent naturel ou adoptif, et une belle-mère ou, en général, un beau-père. De ces 10 p. cent des couples, un sur trois avait des enfants de différents parents96. Nous n’avons pas obtenu de chiffres facilement comparables. Toutefois, notre enquête indique que 8,1 p. cent des participants ont affirmé avoir élevé un enfant de leur conjoint. Et, comme l’indique le tableau 11, au moins 32 personnes (9,4 p. cent) ont déclaré que leur conjoint avait eu des enfants d’une relation de couple antérieure. Considérées dans leur ensemble, ces données indiquent qu’un nombre significatif d’enfants du Nunavut grandissent dans des familles reconstituées. De plus, selon leur propre expérience, un très grand nombre de participants à l’enquête ont signalé avoir un demi-frère ou une demi-sœur (34 p. cent)97.

3.7.2  Le lieu de résidence des enfants

Même si, au départ, l’enquête visait à obtenir de l’information pour nous permettre d’énoncer des résultats sur le nombre d’enfants vivant avec un ou deux ou aucun des deux parents, nos données sur les enfants se sont révélées moins complètes que prévu. Les enquêteurs devaient poser certaines questions aux participants à propos de leurs enfants. Si l’expérience de vie des enfants différait grandement d’un enfant à l’autre sur certains points (l’enfant a un parent différent, il a quitté le foyer, il a été adopté, il a un tuteur, etc.), l’enquêteur posait à nouveau la même série de questions pour chacun des enfants ayant des antécédents différents. Les enquêteurs devaient indiquer le nombre d’enfants couverts par chacune de ces parties de l’enquête. Or, les participants ont rempli un nombre considérablement plus faible que prévu de parties portant sur les « autres enfants ». Par conséquent, malheureusement, nos hypothèses ne se rapportent directement qu’à nos participants et nous avons dû parfois exprimer nos résultats de façon détournée.

Afin de pouvoir utiliser les données de cette partie, nous avons dû émettre des hypothèses sur le nombre de participants à l’enquête dans une situation donnée, plutôt que sur le nombre d’enfants concernés. De plus, comme nous avions de sérieuses réserves au sujet des parties concernant près de 40 « autres enfants », nous avons décidé, pour être conséquents, de n’utiliser que les renseignements consignés dans la première partie sur les enfants des participants à l’enquête, renonçant ainsi à un nombre important de données.

Tout bien considéré, l’enquête a été conçue de façon inutilement complexe.

Nous avons demandé aux participants à l’enquête s’ils vivaient avec leurs enfants tout le temps, une partie du temps ou jamais. Dans un premier groupe de réponses, 222 personnes ont répondu vivre avec un enfant tout le temps (85 p. cent), six ont déclaré vivre avec au moins un enfant une partie du temps (2 p. cent ) et 32 personnes (12 p. cent) ont affirmé qu’au moins un de leurs enfants ne vivait pas avec elles98. Parmi les personnes ayant affirmé qu’au moins un de leurs enfants ne vivait pas avec elles, huit ont indiqué avoir donné l’enfant en adoption99.

Des personnes qui ont déclaré qu’au moins un de leurs enfants vivait avec elles en tout temps, 123 ont dit que l’autre parent de l’enfant ou des enfants vivait également sous le même toit. Soixante-trois personnes ont affirmé que l’autre parent ne vivait pas sous le même toit, et sept ont répondu que l’autre parent était décédé. Un nombre important de personnes n’ont pas répondu à cette question (43), ce qui empêche d’énoncer avec certitude le pourcentage de parents qui ont des enfants ne vivant pas avec eux. Toutefois, ce résultat donne à penser qu’un grand nombre de participants — plus du tiers et peut-être même la moitié — ont des enfants qui, au moment de l’enquête, ne vivaient pas avec leurs deux parents.

Les participants ont signalé qu’un grand pourcentage des enfants qui ne vivaient pas avec eux ou qui vivaient avec eux une partie du temps seulement, ne vivaient pas non plus avec l’autre parent. Il semble au contraire que près de la moitié des 38 participants100 qui se sont reconnus dans ce groupe ont indiqué qu’un enfant ne vivant pas avec eux vivait avec un membre de la famille autre qu’un parent. Seize personnes ont indiqué qu’au moins un de leurs enfants vivait avec l’autre parent naturel ou adoptif. Trois participants ont indiqué qu’au moins un de leurs enfants vivait avec un conjoint101. Sept personnes ont indiqué qu’au moins un de leurs enfants vivait avec un autre membre de la famille (un frère ou une sœur, un grand-parent, une tante). Trois personnes ont affirmé que l’enfant vivait avec une personne ne faisant pas partie de la famille.

La question des ententes relatives à l’éducation et l’aide financière des enfants qui ne vivent pas avec leurs deux parents pourrait, du moins en théorie, être tranchée dans le cadre des responsabilités découlant du droit de la famille. Les données dont nous disposons semblent esquisser un certain nombre de tendances significatives. Premièrement, il est rare que les parents signalent l’existence d’ententes sur le partage de l’éducation des enfants. Notons également que pas un seul des participants à l’enquête ayant un enfant ou plus vivant avec lui au moins une partie du temps, ou qui a déclaré rendre visite très souvent à l’enfant ou aux enfants visés dans la première partie, n’a décrit sa relation avec l’enfant en termes de « garde partagée ». Lors des rencontres communautaires également, à peu près personne n’était familier avec cette expression. Bien entendu, il faut aussi souligner que parmi les participants à l’enquête ayant un enfant vivant avec eux une partie du temps, pas un seul n’a signalé avoir eu recours au système judiciaire. Lors des rencontres, on ne semblait pas faire la distinction entre la garde physique et la garde légale des enfants, et on utilisait l’expression « garde des enfants » simplement pour désigner les ententes sur le lieu de résidence des enfants.

Aussi, les résultats de l’enquête soulignent l’importance de tenir compte de la famille élargie au moment de prendre des décisions sur la garde et le droit de visite. Il faut s’attendre à ce que les membres de cette famille élargie ne se contentent pas de faire valoir leur droit de visite. Que ces cas soient ou non déférés à la cour, un nombre important de personnes autres que les parents naturels ont la garde physique d’enfants qui ne vivent pas avec leurs parents.

3.8  Les contacts avec les parents qui vivent hors du domicile familial

L’une des principales questions liées aux situation de rupture est de savoir dans quelle mesure les enfants continuent d’avoir des contacts avec les parents qui ne vivent plus auprès d’eux. Les données sont faussées en ce sens que nombre des participants à l’enquête n’ont pas répondu à ces questions. Nous avons toutefois pu esquisser quelques conclusions générales.

Les participants à l’enquête ont semblé indiquer que, dans la plupart des cas, les contacts étaient maintenus entre les enfants et leurs parents vivant hors du domicile familial. Néanmoins, près de 20 p. cent des participants à l’enquête ont affirmé avoir perdu le contact avec au moins un de leurs enfants. Ces chiffres sont à peu près les mêmes qu’à l’échelle du pays. Une importante étude nationale révèle qu’environ le sixième des pères affirment avoir perdu tout contact avec leurs enfants et environ un quart des mères signalent que leur enfant n’a plus aucun contact avec leur père102.

La visite aux enfants durant la journée représente le type de contact le plus fréquent. Un nombre plus restreint de personnes ont affirmé passer la nuit auprès des enfants ou avoir simplement des contacts téléphoniques. À l’échelle nationale, les chiffres ont démontré que les enfants qui n’ont pas de rapports directs, en personne, avec le parent qui n’en a pas la garde n’entretiennent pas non plus de liens téléphoniques ou épistolaires avec ce parent103. Malgré le caractère restreint de l’échantillon, près de la moitié des parents vivant loin de leurs enfants ont dit maintenir un lien par téléphone ou par lettre (Voir le tableau 17).

Nous espérions être en mesure d’indiquer le temps que les participants à l’enquête consacraient à leurs enfants ne résidant pas avec eux. Or, nous n’avons pas suffisamment de données pour que les résultats soient pertinents. Nous sommes malheureusement incapables de déterminer combien de temps en moyenne les participants à l’enquête consacrent à leurs enfants qui ne résident pas avec eux au cours d’un mois ou au cours d’une année.

Tableau 17
Types de contacts entre l’enfant et le parent vivant hors du domicile familial selon le sexe du participant à l’enquête*

 

Femmes

Hommes

Total des participants à l’enquête

Total de l’échantillon

Visite durant la journée
5
42 %
2
18 %
7
30 %

22 %
Téléphone/lettre
2
17 %
4
36 %
6
26 %

19 %
Aucun lien
3
25 %
4
36 %
7
30 %

22 %
Nuitée
2
17 %
1
10 %
3
10 %

9 %
Données manquantes
-
-
-

28 %
Totaux
12
100 %
11
100 %
23
100 %
32
100 %

N=32 participants à l’enquête ont dit avoir des enfants qui ne vivaient pas avec eux tout le temps.
* Le tableau ne reflète que l’information consignée dans la première partie sur les enfants, qu’ont remplie les participants à l’enquête.

3.8.1  L’éloignement

Nous avons pu recueillir des données sur un facteur qui affecte particulièrement la permanence du droit de visite des parents, soit la proximité relative du domicile des enfants de celui des parents non résidents. En raison des distances et des dépenses considérables qu’entraînent les déplacements par avion, les déménagements ont des conséquences particulièrement bouleversantes et insolubles. Nos résultats montrent que près de la moitié des participants à l’enquête qui ne vivaient pas avec leurs enfants ne pouvaient rejoindre le domicile de ces derniers que par la voie des airs (Voir les tableaux 17 et 18).

Les avocats spécialisés en droit de la famille au Nunavut ont indiqué que le droit de visite est un des problèmes les plus difficiles à résoudre quand un des parents décide de quitter la collectivité où habitait le couple. Les avocats nous ont affirmé qu’il existe assez peu de latitude pour en venir à un compromis sur cette question dans la plupart des familles, vu le manque de ressources nécessaires aux déplacements réguliers sur de longues distances. Lors des rencontres communautaires à Pond Inlet et à Coral Harbour, nous avons entendu des gens mécontents exprimer le sentiment d’avoir perdu leurs enfants du fait qu’ils avaient quitté la collectivité avec un parent, sans possibilité d’y revenir en visite sur une base régulière.

Tableau 18
Répartition des types de contacts entre les parents non résidents et les enfants, en fonction de la distance qui lessépare

 

< 10 km(même collectivité)
collectivité des environs accessible par voie de terre (10 hres)
Collectivité plus au nord (NU/T.N.-O., accessible par avion
Visites de jour
P. cent/rang
P. cent/colonne
5
71 %
50 %
 
2
29 %
22 %
Téléphone/lettre
P. cent/rang
P. cent/colonne
 
1
17 %
50 %
4
67 %
44 %
Aucun lien
P. cent/rang P. cent/colonne
3
43 %
30 %
1
14 %
50 %
3
43 %
33 %
Nuitées
P. cent/rang
P. cent/colonne
2
100 %
20 %
 
 
Données manquantes
-
-
-
Totaux
P. cent/rang
P. cent/colonne
10
45 %
100 %
2
9 %
100 %
9
41 %
100 %

 

Au Canada ou aux É.-U., hors NU/T.N.-O.
Total des participants à l’enquête
Total de l’échant.
Visites de jour
P. cent/rang
P. cent/colonne
 
7
100 %
32 %

-
22 %
Téléphone/lettre
P. cent/rang
P. cent/colonne
1
17 %
100 %
6
100 %
27 %

-
19 %
Aucun lien
P. cent/rang
P. cent/colonne
 
7
100 %
32 %

-
22 %
Nuitées
P. cent/rang
P. cent/colonne
 
2
100 %
9 %

-
6 %
Données manquantes
-
-
-
31 %
Totaux
P. cent/rang
P. cent/colonne
1
5 %
100 %
22
100 %
100 %
32
-
100 %

Il est intéressant de noter qu’il n’existe aucune relation étroite entre les cas de parents ayant affirmé que l’enfant vivait loin d’eux et les cas de parents qui ont indiqué n’avoir aucun contact avec leurs enfants. Le nombre de parents vivant dans la même collectivité que leurs enfants et n’ayant aucun contact avec eux est le même que dans les cas où les enfants vivent loin. Il semble donc évident que la relation entre les parents, et entre les parents et leurs enfants, demeure la clef de voûte du maintien des contacts.

Néanmoins, la distance reste importante en ce sens que la plupart des parents qui vivent loin de leurs enfants ont indiqué n’avoir aucun lien avec eux, ou seulement des liens par téléphone ou par lettre104. Dans un cas seulement, un parent a rapporté que ses enfants n’avaient pas seulement quitté la communauté mais le Nord. Ce fait peut surprendre quand on sait que la communauté, très réticente à voir les enfants quitter le Grand Nord lorsque les parents se séparent, redoute les conséquences possibles de ces départs, surtout pour les enfants inuits. Le droit essaie aussi de prévenir ce phénomène puisque les tribunaux, aux termes de la Loi sur le droit de l’enfance, doivent obligatoirement tenir compte de la continuité des liens entre les enfants, leur culture et leur réseau familial. Cette obligation revêt une importance beaucoup plus grande pour les gens d’ici que pour les parents confrontés au même problème dans le reste du Canada, quand un parent désire s’installer dans un endroit éloigné, car la plupart du temps les quelques réinstallations possibles entraînent des déplacements par avion. En dépit d’un mécontentement évident de la communauté face au statu quo, la question n’a pas été tranchée par les tribunaux. On ne trouve aucune jurisprudence sur le sujet découlant soit de la Loi sur le droit de l’enfance soit de la Loi sur le divorce depuis 1998, année de l’adoption de ces mesures législatives dans les Territoires.

3.8.2  Le degré de satisfaction et les efforts pour modifier les ententes

Dans l’ensemble, les participants à l’enquête se sont montrés assez satisfaits des ententes relatives aux contacts avec les enfants. Seuls quatre, des 32 participants ne vivant pas avec au moins un de leurs enfants en tout temps, ont dit ne pas être satisfaits à cet égard. Dix-huit ont affirmé être satisfaits et huit n’avaient pas d’opinion. Trop peu de personnes ont répondu à cette question pour que nous puissions en déduire avec précision les raisons de leur satisfaction ou de leur insatisfaction. La plupart des personnes qui ont déclaré être satisfaites pouvaient voir leurs enfants à volonté et avaient toujours l’impression d’appartenir à la famille. Parmi les participants insatisfaits, l’un a déclaré que la mère ne lui permettait par de voir son enfant, et un autre a déclaré que son enfant habitait trop loin (deux n’ont pas répondu à la question).

Enfin, on a demandé à ces mêmes parents s’ils avaient déjà cherché à modifier les ententes sur le lieu de résidence de leurs enfants. Peu d’entre eux (seulement quatre des 31 participants à l’enquête qui ont répondu à cette question) avaient déjà cherché à modifier les ententes concernant les contacts avec les enfants qui ne vivaient pas avec eux. Bien qu’on le leur ait demandé, aucun d’entre eux n’a indiqué pourquoi il avait ou n’avait pas essayé de modifier l’entente.

Nous avons demandé aux participants séparés ou divorcés s’ils savaient qu’une personne pouvait avoir recours au tribunal pour obtenir la garde ou le droit de visite. La majorité des participants à l’enquête (22 sur 31) ont déclaré savoir qu’on pouvait s’adresser au tribunal mais six ont répondu l’ignorer. Un groupe un peu plus important a répondu à une question sur l’importance de connaître l’existence d’un recours judiciaire; 29 ont affirmé que cette information était très importante et seulement trois ont déclaré ne pas accorder beaucoup d’importance aux décisions judiciaires.

En résumé, les parents n’ont pas exprimé un mécontentement généralisé à l’égard des ententes sur les contacts entre les parents résidant hors du domicile familial et leurs enfants. La majorité des visites ont lieu pendant la journée et un plus petit nombre de parents affirment passer la nuit auprès de leurs enfants ou n’avoir que des contacts par téléphone. Dans un nombre considérable de cas, cependant, les parents résidant hors du domicile familial ont indiqué perdre de vue leur(s) enfant(s). Les avocats et les membres de la communauté s’entendent pour dire que l’une des principales raisons de cette situation est un problème d’éloignement, problème pratiquement insoluble dans les collectivités isolées du Nunavut. Par contre, le problème de la distance n’est pas le seul facteur explicatif du manque de contacts ou d’autres problèmes.

3.9  Le paiement des pensions alimentaires

Depuis les dix dernières années, les pensions alimentaires pour enfants sont une importante priorité du droit de la famille au Nunavut. La mise sur pied du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires est le seul projet en matière de droit de la famille à avoir été institutionnalisé et financé de façon régulière. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a adopté les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, lesquelles ont été reprises dans les lois du Nunavut, et les deux ordres de gouvernement ont alloué des sommes substantielles à la diffusion de ces lignes directrices et à des campagnes de sensibilisation visant à promouvoir leur utilisation au sein de la population. Néanmoins, il est clair que dans la majorité des cas où les parents ne vivent pas avec leurs enfants, la pension alimentaire n’est pas versée; les lignes directrices ne sont pas bien connues et on utilise peu les services d’exécution, compte tenu du nombre possible de cas ouvrant droit à des obligations alimentaires.

Dans notre enquête, une petite minorité de parents ont indiqué recevoir une pension alimentaire pour au moins un de leurs enfants. Sept seulement ont affirmé recevoir une aide financière, tandis que 18 participants à l’enquête ont dit ne recevoir aucune pension. Quatre parents ont indiqué recevoir différents types d’aide matérielle autres que de l’argent, et 20 parents ont affirmé n’obtenir aucune aide matérielle105. Jusqu’à présent, dans les recommandations de la réforme du droit de la famille, on a insisté pour faire de l’aide non financière une aide tout à fait appropriée, qui s’inscrit dans l’obligation de subvenir aux besoins des membres de la famille selon les modes traditionnels (en procurant de la viande, par exemple) particulièrement quand les personnes ont de faibles revenus106. Toutefois, nos résultats tendent à démontrer que cette pratique n’est pas très répandue au Nunavut107. Voilà un domaine où une certaine forme d’éducation de la population pourrait être utile et en même temps perçue comme culturellement appropriée.

Une minorité plus importante de parents non résidents ont, par contre, signalé verser une pension alimentaire pour au moins un de leurs enfants. Quinze parents ne vivant pas avec leurs enfants ou seulement à l’occasion, ont indiqué payer une pension alimentaire. Dix-sept personnes du même groupe ont affirmé ne pas avoir payé de pension alimentaire108. Les membres de ce groupe ont affirmé, dans des proportions identiques, avoir fourni ou ne pas avoir fourni d’aide matérielle à leurs enfants. Les participants ont également déclaré qu’une minorité de leurs conjoint(e)s avaient contribué au soutien financier d’enfants de moins de 18 ans : huit personnes ont affirmé que leur conjoint avait fourni une aide financière et douze ont affirmé le contraire109.

Il semble y avoir plus de cohérence entre les réponses de ceux (celles) qui versent les pensions et les réponses de ceux(celles) qui les reçoivent, en termes de fréquence des paiements. La majorité des personnes de ces deux groupes ont déclaré qu’elles recevaient ou versaient une pension régulièrement, ce qui signifie au moins une fois par mois110. Un plus petit nombre de personnes dans ces deux groupes ont dit verser ou recevoir une pension alimentaire « assez régulièrement »111, au moins plusieurs fois par année. Un nombre encore plus restreint de personnes ont affirmé verser ou recevoir une pension alimentaire « à l’occasion » ou quand la personne dans l’obligation de payer avait un emploi112.

On a demandé aux parents résidant hors du domicile familial pour quelle raison ils payaient ou ne payaient pas de pension alimentaire pour enfant. Les parents qui versent une pension alimentaire ont invoqué une certaine responsabilité envers les enfants, le fait que les enfants restaient des membres de la famille, et l’existence d’une entente. Plusieurs raisons ont été aussi invoquées pour justifier l’absence de versement d’une pension alimentaire. Le plus grand nombre des parents de ce groupe ont déclaré ne pas payer de pension alimentaire parce qu’on ne leur en avait pas fait la demande. Plusieurs personnes ont dit ne pas payer parce qu’elles n’en avaient pas l’obligation ou parce qu’elles ne vivaient plus avec l’enfant. Quelques personnes ont affirmé ne pas payer parce qu’elles devaient subvenir aux besoins d’une nouvelle famille. Notons que parmi les personnes admissibles à une pension alimentaire mais qui n’en recevaient pas, le tiers environ (sept participants à l’enquête) avaient demandé une pension alimentaire tandis que les deux autres tiers ne l’avaient pas fait (13 participants à l’enquête).

3.9.1  Exécution des ordonnances et des ententes

On peut comparer ces résultats à ce qui se passe à l’heure actuelle au niveau de l’exécution des ordonnances et des ententes dans le cadre du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires113. En janvier 2001, le bureau du Nunavut comptait 166 dossiers actifs. Parmi ces dossiers, un tiers seulement (56) concernait des cas du Nunavut exclusivement, c’est-à-dire que la personne qui versait et la personne qui recevait la pension alimentaire vivaient toutes deux au Nunavut. Dans l’ensemble, moins de la moitié des destinataires de l’aide (81 seulement) vivaient au Nunavut. Parmi les destinataires vivant au Nunavut, le cinquième (16) vivait à Iqaluit et les autres étaient disséminé(e)s dans tout le Territoire. Les dossiers prévoyaient en majorité (85) une exécution réciproque des jugements quand le (la) destinataire vivait dans une autre province ou un autre territoire. Un nombre beaucoup plus faible de cas comportaient l’exécution réciproque des jugements par une autorité différente du Nunavut, quand la personne ayant l’obligation de payer vivait hors du Territoire et que le (la) destinataire résidait au Nunavut (25 dossiers, soit 15 p. cent).

Cette information soulève un certain nombre de questions.

Premièrement, bien qu’il soit difficile de d’obtenir des chiffres précis, il semble qu’il y ait entre trois et huit fois plus de personnes qui versent des pensions alimentaires que d’ordonnances ou d’ententes enregistrées dans le cadre du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires114. Selon l’interprétation que l’on donne aux questions demeurées « sans réponse », il semble qu’entre 12 p. cent et 28 p. cent des participants à l’enquête reçoivent une pension alimentaire pour enfant. En revanche, les destinataires des pensions enregistrés auprès du PEOA ne représentent que 5 p. cent du tiers des familles du Nunavut (environ 1 750) où l’un des parents a quitté le domicile familial.

Cette situation est encourageante car elle permet de croire que les enfants du Nunavut qui reçoivent, au moins partiellement, la pension alimentaire qui leur est due sont plus nombreux que les cas où le gouvernement doit intervenir. Il n’y a bien entendu que peu de renseignements disponibles sur le montant ou la régularité des versements dans ces cas, de sorte qu’il est impossible de savoir si les personnes n’ayant pas eu recours au système reçoivent en fait des montants comparables à ceux que fixerait une ordonnance de la cour ou à ceux qui seraient obtenus dans le cadre du programme.

Les statistiques sur l’exécution réciproque des jugements fournissent elles aussi matière à réflexion. En fait, près de la moitié des personnes qui ont recours au programme pour obtenir une pension alimentaire ne vivent pas au Nunavut. Cette situation soulève certaines questions sur comment développer le principal programme de droit de la famille du Territoire de façon à ce qu’il serve d’abord les Nunavummiuts, sans venir contrecarrer les engagements fédéraux.

Notons au passage que peu de Nunavummiuts demandent l’exécution des ordonnances contre les personnes résidant hors du Territoire. La communauté a le sentiment que nombre des enfants des femmes célibataires sont conçus par des individus « de passage », lesquels viennent bien souvent du sud. Nous avons appris que ces mères célibataires — ainsi que leurs parents — se sentaient incapables d’obtenir une aide de ces pères absents. De nombreux membres de la communauté, même parmi les plus réticents vis à vis de l’exécution des obligations alimentaires, ont fortement soutenu le recours à la loi pour obliger les pères qui font des enfants « à la sauvette » à prendre leurs responsabilités. Vu la complexité, tant sur le plan juridique que logistique, des efforts à déployer pour retrouver ces pères, prouver leur paternité, faire valoir ses propres droits dans leur province de résidence, il est de première nécessité de mettre sur pied des services traitant tout particulièrement de ces problèmes.

Le manque d’information sur le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires est l’un des principaux facteurs expliquant son usage relativement peu fréquent. On a demandé aux participants à l’enquête ce qu’ils savaient de ce Programme et des activités du gouvernement en vue de recouvrer les pensions alimentaires pour enfant. En général, la population connaît assez mal ces services. Seulement 16 p. cent des participants à l’enquête ont affirmé avoir entendu parler du PEOA115. Un nombre de personnes sensiblement plus important (27 p. cent) savaient que le gouvernement fournissait des services d’exécution des ordonnances alimentaires pour enfant (Voir le tableau 19).

Tableau 19
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur niveau de connaissance du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires et des services relatifs aux pensions alimentaires pour enfants

 
Entendu parler des services?
Pourcentage de l’échantillon total
Programme d’exécution des ordonnances alimentaires Oui
56
19 %

16 %
Non
236
81 %

69 %
Services relatifs aux pensions alimentaires pour enfant Oui
93
32 %

27 %
Non
199
68 %

58 %
Total des participants à l’enquête  
292
100 %
342
100 %

Même si les gens n’étaient pas familiers avec l’existence des services du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, de nombreux participants ayant connu une séparation (21 sur 30) ont dit savoir que la loi exigeait des parents qu’ils subviennent aux besoins de leurs enfants. Et même parmi ce groupe de parents séparés, à peine la moitié (16 sur 29) ont dit connaître les services d’exécution des ordonnances fournis par le gouvernement. Pratiquement la totalité des participants à l’enquête (28 sur 31) étaient d’avis que ces services étaient très importants. On a invoqué à cela de nombreuses raisons, notamment les difficultés pour un parent seul de pourvoir aux besoins d’un enfant, le coût élevé de l’éducation et l’obligation pour chaque personne de travailler pour subvenir aux besoins de ses enfants.

Ces résultats évoquent fortement le besoin de mieux faire connaître sur le Territoire les services du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. De plus, le nom du programme « Programme d’exécution des ordonnances alimentaires » est un nom que peu de Nunavummiuts semblent reconnaître ou associer aux activités du bureau. Il serait peut-être préférable de nommer différemment ces services pour que la population puisse les reconnaître et les identifier plus facilement.

De plus, il est également clairement ressorti qu’il était important d’aborder la question de la perception négative des pensions alimentaires pour enfant ou du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. Bien que les membres des collectivités s’entendent fortement sur le principe selon lequel les parents doivent subvenir aux besoins de leurs enfants, ils pensent aussi qu’il n’est pas juste d’exiger des sommes importantes de personnes ayant peu de moyens. Ils étaient très inquiets que des personnes à faible revenu puissent accumuler de grosses dettes qu’elles ne pourraient jamais rembourser. Ce point a été clairement défini comme le problème majeur associé au PEOA et, bien sûr, au principe de la pension alimentaire pour enfant. Plusieurs personnes ont également soulevé le cas de la personne qui doit payer de grosses sommes en vertu d’une ordonnance antérieure et qui ne peut plus subvenir à ses propres besoins ou à ceux de sa nouvelle famille.

Dans une large mesure, le problème de l’incapacité de payer vise surtout les arrérages. La majorité des payeurs (47) avaient de lourds arrérages. La moyenne des arrérages dus aux parents ayant la garde des enfants pour chacun des 166 dossiers était de près de 10 200 dollars, pour un total de 1 690 417 dollars. Des efforts soutenus ainsi que l’exécution rigoureuse des ordonnances depuis la création du bureau au Nunavut, il y a un an, ont permis de réduire considérablement le problème116. À l’heure actuelle, on constate dans un grand nombre de dossiers du PEOA que les versements, au Nunavut, se font régulièrement. Ainsi, sur 56 dossiers, des paiements mensuels sont versés dans 43 cas.

Il faudra aborder ces questions, ne serait-ce que pour assurer la crédibilité du système. Les personnes dans l’obligation de payer devraient faire modifier leurs ordonnances ou leurs ententes pour qu’elles tiennent compte de leur situation véritable. Au cours des quelques dernières années, les ordonnances n’ont pratiquement pas été modifiées. Il pourrait s’avérer utile de faire connaître la possibilité d’obtenir une modification d’ordonnance de la cour ou de permettre aux personnes dans l’obligation de payer et aux destinataires de s’entendre pour effacer une partie des arrérages, ou encore d’accepter une aide matérielle, comme par exemple de la nourriture, plutôt qu’une contribution financière. Le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires devrait reconnaître ce genre d’ententes, lesquelles devraient être enregistrées à la cour. Pendant des années, il n’y a pas eu non plus au Nunavut d’audiences pour défaut de paiement. On espère que les premières audiences auront lieu cette année. Au fil du temps, elles fourniront aux personnes dans l’obligation de payer l’occasion de faire modifier des ordonnances impossibles à respecter, en plus de fournir un mécanisme de recouvrement efficace des sommes non versées par les personnes qui négligent volontairement leurs obligations alimentaires.

En résumé, les résultats de la recherche sur les pensions alimentaires pour enfants sont assez troublants. Une minorité de parents ayant la garde des enfants affirment recevoir une pension alimentaire et une minorité à peine plus grande de parents n’ayant pas la garde des enfants affirment en verser une. Nous avons insisté dans cette enquête sur l’aide financière aux enfants et non sur d’autres formes d’aide, telle qu’une aide sous forme de nourriture, par exemple. Le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires n’intervient que dans une minorité de cas où une pension alimentaire est versée. Il a considérablement élargi ses activités au cours des dix dernières années et connaît désormais un certain succès pour la perception des versements prévus pour ses dossiers actifs. Toutefois, la recherche a révélé certaines failles du programme, notamment que les Nunavummiuts n’en sont pas pour l’instant les premiers bénéficiaires, et que la population dans son ensemble en ignore les tenants et les aboutissants.


4  RÉSULTATS DU PROGRAMME DE RECHERCHE : FAÇONS DE FAIRE, SERVICES ET INFORMATION

La question des façons de faire sous-tend les principales questions abordées dans notre étude. Même dans le contexte de l’enquête, les participants nous ont ouvertement dit comment ils en étaient venus à conclure des ententes pour régler les questions de pensions alimentaires et de garde de leurs enfants. Cette information s’est avérée un élément quantitatif utile qui est venu s’ajouter à la mine de renseignements recueillis lors des rencontres communautaires. Il est clair que tout converge vers l’évolution du droit et la création de services.

4.1  Résoudre les problèmes liés aux pensions alimentaires et à la garde des enfants

Dans notre étude, 78 parents ne vivaient pas avec au moins un de leurs enfants. Ce nombre excède celui des personnes qui ont déclaré être séparées ou divorcées, et comprend vraisemblablement des chefs de famille monoparentale et quelques personnes qui ont mis fin à une union de fait mais qui ne se décrivent pas comme étant « séparées ». Nous avons demandé à ces parents s’il leur était arrivé de conclure une entente avec une autre personne sur la pension alimentaire ou la garde de leurs enfants. Dix d’entre eux n’ont pas répondu. Pour les autres, nous avons obtenu des résultats surprenants : près de 60 p. cent (40) ont affirmé n’avoir jamais conclu d’entente. De façon tout aussi surprenante, seulement deux parents (moins de 3 p. cent) ont déclaré avoir obtenu une ordonnance de la cour pour la garde et la pension alimentaire des enfants. Parmi les participants restants, 16 disposaient d’une entente écrite, et 10 d’une entente verbale (environ 23 p. cent et 15 p. cent respectivement)117 (Voir la figure 4).

Il est essentiel d’envisager ces statistiques plutôt surprenantes à la lumière des recherches menées à l’échelle nationale, lesquelles montrent des résultats tout aussi surprenants sur les nombreux cas résolus sans l’intervention du tribunal. Selon deux enquêtes récentes, le quart environ des parents séparés au Canada n’ont aucune entente initiale sur la garde, le droit de visite ou sur la pension alimentaire118. Selon l’enquête relative aux pensions alimentaires pour enfants, la plupart des parents qui n’avaient pas d’entente n’avaient jamais cherché à obtenir de pension alimentaire pour leurs enfants, soit pour des motifs économiques, soit parce que les enfants avaient atteint l’âge adulte, soit en raison des tracasseries liées aux négociations pour parvenir à une entente. Ces constatations ont d’énormes répercussions sur le système judiciaire.

Figure 4
Répartition des participants à l’enquête en fonction des arrangements existants au sujet des enfants

(Cliquer pour voir Figure 4)

Le fait qu’il n’existe que peu d’ententes sur les pensions alimentaires pour enfant soulève plusieurs questions. Nous ne savons pas exactement ce qui se passe quand aucune entente n’a été négociée. Les besoins des enfants sont-ils satisfaits? A-t-on négocié une entente verbale non équivoque et bien comprise de part et d’autre? A-t-on utilisé la contrainte ou la fuite? Ce phénomène semble refléter une caractéristique généralement perçue comme inhérente à la culture inuite, soit le désir d’éviter toute confrontation 119.

Les facteurs pouvant inciter une personne à recourir ou non au tribunal dans une cause relevant du droit de la famille ont fait l’objet de longues discussions lors des rencontres communautaires. Tous les participants à l’enquête ont reconnu que peu de personnes recouraient au tribunal. En plus des difficultés pratiques que cela soulève, il semble que les gens croient que les disputes au sujet des enfants sont mauvaises pour les enfants, que cela peut même les tuer, si bien qu’on tente à tout prix d’éviter ces disputes. Un certain nombre des intervenants consultés ont également invoqué d’autres facteurs.

  • Un déséquilibre des pouvoirs entre conjoints, dans les cas de violence ou d’intimidation de la part de l’un des partenaires. Un avocat a rapporté avoir été témoin du cas répété où une mère exprimait facilement ses attentes chaque fois qu’elle se trouvait seule dans son bureau, mais modifiait systématiquement son comportement et n’osait plus exprimer quoi que ce soit en présence de son conjoint.
  • L’influence du régime des pensionnats sur plusieurs générations ou l’intervention de l’aide sociale à l’enfance dans les familles. Une intervenante a soutenu que certains parents inuits n’osaient pas demander la garde de leurs enfants parce qu’ils doutaient de leur propre capacité de les élever, et parce qu’on leur avait souvent laissé entendre ou même affirmé qu’ils n’étaient pas faits pour être parents. Pour cette personne, il s’agissait d’un problème courant et grave en cas de conflits sur la garde des enfants si les parents étaient de races différentes.
  • Les enfants jouent un rôle exceptionnellement important. Plusieurs personnes ont indiqué qu’à leur avis les conflits sont rares parce que la plupart des gens considèrent que c’est aux enfants qu’il appartient de décider, même à un âge beaucoup plus jeune que dans le reste du Canada, de l’endroit où ils veulent vivre. Pour la plupart des participants à la session, il n’était pas rare de voir un enfant de cinq ans décider lui-même de l’endroit où il voulait vivre120.

Chose certaine, ces résultats confirment la perception générale selon laquelle, au Nunavut, la majorité des gens n’ont pas recours aux tribunaux pour régler des questions mettant en cause leurs enfants. L’étude nationale sur la garde et le droit de visite a montré qu’à l’échelle du Canada le tiers des parents environ recouraient aux tribunaux121, soit dix fois le pourcentage des personnes qui y recourent au Nunavut. Si le régime légal en place — la Loi sur le divorce et la Loi sur le droit de l’enfance — a un effet sur la majorité des Nunavummiuts ce n’est pas à travers les décisions judiciaires mais bien en sensibilisant les gens au besoin de négocier des ententes justes et raisonnables pour le bien de leurs enfants. Il est tout aussi probable, par ailleurs, que d’autres normes qui ne découlent pas de la loi, des normes culturelles ou autres, aient aussi un rôle à jouer. Une certaine cohérence dans l’établissement des ententes informelles semblerait indiquer l’existence d’un ensemble structuré de normes; l’absence d’une telle cohérence pourrait être le signe de normes concurrentes ou circonstancielles.

La réponse à la question de savoir si les gens cherchaient à obtenir de l’aide au moment de la séparation révèle là aussi un haut niveau d’autonomie. Soixante-six personnes ont répondu à la question. Un peu moins du tiers des participants (21) ont déclaré avoir demandé de l’aide au moment de la séparation; les deux autres tiers (45) ont affirmé ne pas en avoir demandé. Peut-être a-t-on mal compris la question, mais il n’en reste pas moins que la plupart des gens ne s’attendaient pas à obtenir une aide extérieure au moment de leur séparation. Neuf des personnes qui ont obtenu de l’aide ont déclaré avoir eu recours à un travailleur social, huit se sont tournées vers un avocat, et quatre vers un ami, un parent ou un aîné (ces groupes se recoupaient parfois). Deux personnes ont demandé l’aide d’un travailleur social auprès des tribunaux, et une autre a demandé assistance à un agent de liaison communautaire, un ancien responsable de la localité qui servait souvent de lien entre les membres de la collectivité et les différents services gouvernementaux.

4.2  Les services du droit de la famille

La question de la présence ou de l’absence de façons de faire conduit directement à celle de la présence ou de l’absence de services. La dure réalité au Nunavut, c’est que les services sociaux sont très rares dans la plupart des collectivités. Les services se concentrent généralement dans les centres régionaux ou dans les collectivités importantes et, même là, les ressources y sont limitées. Les services sont rarement spécialisés et leurs agents sont presque toujours surchargés de travail. Il en résulte que la plupart des Nunavummiuts n’ont pas accès aux services auxquels ils pourraient normalement s’attendre. Nous avons aussi, dans cette enquête, essayé de voir quels sont les services, informels ou généraux, qui pourraient combler les lacunes en l’absence de services spécialisés.

4.2.1  Les services du droit de la famille disponibles au Nunavut

Pour établir le répertoire des services, nous avons mené des entrevues téléphoniques avec des agents principaux d’administration de la plupart des collectivités du Nunavut, à l’exclusion des très petits centres et des centres régionaux (consulter la méthodologie pour plus de détails). Nous leur avons demandé avec quelle fréquence, à leur avis, une séparation ou un divorce pouvait entraîner des difficultés pour les membres de leur collectivité, et quels étaient les services dont disposaient les personnes aux prises avec ces difficultés. Selon la plupart de ces agents, la séparation était un problème assez courant alors que le divorce l’était beaucoup moins. La majorité des agents (11 sur 17) connaissaient des personnes ou des familles aux prises avec des problèmes de séparation ou de divorce. Le problème le plus fréquemment mentionné à leur avis était celui de la violence (16 sur 17 participants à l’enquête); près de la moitié des personnes interrogées ont également parlé de difficultés reliées à la garde, au droit de visite et à la pension alimentaire pour enfant. Leur point de vue est important, car ces agents principaux d’administration continuent de jouer, avec les membres du conseil de la localité, un rôle crucial dans la planification et l’établissement des budgets des collectivités.

Les résultats ont aussi révélé une grave pénurie de services. Dans la plupart des collectivités (14 sur 17), c’est sur un travailleur social que repose l’ensemble des services sociaux, notamment la protection de l’enfance, la surveillance des probations et tous les autres services prioritaires. Or, il semble difficile de retenir les travailleurs sociaux dans leur emploi : six collectivités ont déclaré qu’au cours des deux dernières années, elles avaient dû se priver de leur travailleur social pour des périodes allant d’un mois à un an. Sept des treize agents principaux d’administration, appartenant à une collectivité qui bénéficie actuellement des services d’un travailleur social, ont déclaré que cette personne s’occupait des problèmes familiaux, deux autres ont dit qu’elle n’abordait pas ce type de problèmes et quatre ne savaient pas si elle fournissait des services de soutien aux familles.

On a signalé dans pratiquement le même nombre de collectivités la présence d’un professionnel du mieux-être communautaire ou d’un professionnel de la santé mentale (12 sur 17). Ces personnes fournissent un ensemble de services liés à l’alcoolisme et à la toxicomanie ainsi qu’à d’autres types de problèmes de santé mentale. Quatre autres collectivités ont un conseiller résidant sur place. On a mentionné dans une poignée de collectivités l’existence de services peu courants, par exemple un centre de ressources familiales géré par la société Ilisaqsivik à Clyde River ou un groupe pour le mieux-être des hommes à Pangnirtung. Il existe d’autres collectivités, comme Whale Cove, dans le Keewatin, qui n’ont ni agent de la GRC, ni travailleur social à temps plein, ni conseiller, ni garderie, ni refuge pour victimes de violence.

Les services mentionnés le plus fréquemment s’adressaient aux personnes aux prises avec de la violence : six des 17 collectivités disposaient de maisons d’hébergement et deux autres collectivités hors des centres régionaux avaient un refuge d’urgence. Dans une autre collectivité, on a mentionné la présence d’un refuge d’urgence « improvisé ». Plusieurs personnes ont affirmé que la GRC offrait des services aux familles. Un agent administratif a déclaré que le comité de justice communautaire procurait certains services aux personnes éprouvant des difficultés relevant du droit de la famille.

En ce concerne les services offerts aux jeunes, les étudiants peuvent avoir accès aux services d’un conseiller en orientation (10 collectivités sur 17) ou à un comité de jeunes (10 collectivités sur 17); il s’agit là d’une source importante de planification pour les jeunes qui ne vont pas à l’école. Moins de la moitié des comités de jeunes comptaient un responsable chargé de la coordination de ces groupes. Dans l’ensemble, ces comités mettent l’accent sur les programmes de loisirs mais n’offrent pas de soutien aux jeunes aux prises avec les difficultés de la vie, comme l’éclatement de la famille, par exemple. Quand nous avons visité les écoles, nous avons rapidement pris conscience du besoin criant d’information sur le fonctionnement du droit de la famille qu’ont les adolescents, non seulement en tant que personnes touchées par les difficultés de couple de leurs parents, mais également en tant que parents eux-mêmes. L’école, et en particulier la classe, grâce au programme d’études, continue d’être l’un des seuls moyens dont on dispose pour rejoindre les enfants et les jeunes dans leurs collectivités.

L’autre institution communautaire et universelle de chaque village ou hameau du Nunavut est l’église. Dans la plupart des collectivités, l’église, contrairement à de nombreux autres programmes, est dirigée par les Inuits. Nous avons entendu beaucoup d’anecdotes sur des groupes paroissiaux participant au travail d’orientation des couples traversant une séparation ou un divorce. Mais plusieurs des personnes interrogées ont mentionné que l’aide de l’église était limitée, car la séparation et le divorce sont contraires aux principes religieux de la plupart des principaux groupes organisés. C’est la raison pour laquelle plusieurs personnes ont affirmé qu’elles n’iraient pas chercher de l’aide à l’église si elles faisaient face à un problème de séparation ou de divorce.

Mis à part ces services, mentionnons une poignée de groupes divers (groupe d’aînés, parents-substituts); dans l’ensemble, les autres agents d’administration n’ont fait état d’aucun autre service dans les collectivités.

Cette pénurie de services a des conséquences évidentes pour toute réforme législative. Toute réforme qui tend à prévoir le recours à des services comme mesure préalable au divorce ou à l’intervention du tribunal risque d’ériger une barrière que pourront difficilement franchir les petites collectivités du Nord. Pour elles, il sera impossible d’offrir ces services obligatoires sur une base régulière. Les collectivités ne disposent d’aucun service de médiation; les programmes de sensibilisation parentale devront se limiter à la présentation de documents vidéos; les services d’orientation ne sont pas toujours présents et, dans bien des cas, les conseillers disposent de connaissances limitées ou sont en situation de conflit d’intérêts.

4.2.2    Connaissance de l’existence des services du droit de la famille et utilisation de ces services

Dans notre enquête auprès des ménages, nous avons posé des questions sur la connaissance et l’utilisation de plusieurs types de services importants tout particulièrement orientés vers le droit de la famille. Les réponses ont révélé de façon constante que les répondants ne connaissaient pas l’existence de ces services122.

La majorité des personnes ne connaissaient que les services offerts par les travailleurs sociaux et les groupes paroissiaux pour venir en aide aux personnes aux prises avec des difficultés liées au droit de la famille. Environ la moitié des participants à l’enquête savaient que l’Aide juridique pouvait représenter les individus lors de différends familiaux. Curieusement, les personnes sachant pouvoir obtenir de l’aide des comités de justice communautaire étaient plus nombreuses que celles connaissant le recours au Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. Cette constatation a de quoi surprendre, car les CJC n’ont ni pouvoir officiel en matière de droit de la famille ni formation particulière à cet égard. Néanmoins, la présence de ces comités dans la collectivité attire de toute évidence un certain nombre de personnes et en font une ressource (Voir le tableau 20).

Tableau 20
Répartition des participants à l’enquête en fonction de leur connaissance de certains services choisis du droit de la famille

Avez-vous entendu parler de…  
Fem.
Hom.
Total des participants à l’enquête
Pourcentage de l’échantillon total

Aide juridique (différends familiaux)

Oui
94
56
64
52
158
54 %

46 %
Non
74
44 %
60
48 %
134
46 %

39 %

Programme d’exécution des ordonnances alimentaires

Oui
36
21 %
20
16 %
56
19 %

16 %
Non
133
79 %
103
84 %
236
81 %

69 %

Services relatifs à la pension alimentaire pour enfant

Oui

55
33 %
38
31 %
93
32 %

27 %
Non
114
68 %
85
69 %
199
68 %

58 %

Travailleurs sociaux (comme conseillers familiaux)

Oui
124
73 %
78
63 %
202
69 %
59 %
Non
45
27 %
46
37 %
91
31 %

26 %

Avez-vous entendu parler de…

 

Fem.

Hom.

Total des participants à l’enquête

Pourcentage de l’échantillon total

Groupes paroissiaux (comme conseillers familiaux)

Oui
94
55 %
81
65 %
175
60 %

51 %
Non
75
44 %
43
35 %
118
40 %

35 %

Comités de justice communautaire (différends familiaux)

Oui
74
44 %
50
40 %
124
43 %

36 %
Non
94
56 %
74
60 %
168
58 %

49 %

Total

 

168

124

292

342

Nous avons ensuite demandé lesquels de ces services avaient été utilisés par les participants. Là encore, on utilisait peu les services, mais cette constatation n’a rien de surprenant vu le nombre de ruptures, dans l’ensemble.

Globalement, 72 p. cent123 des participants à l’enquête ont dit n’avoir jamais eu recours à l’un ou à l’autre des services mentionnés. Le plus grand nombre, et de loin, des personnes restantes ont dit avoir eu recours à un travailleur social (certaines personnes ont dit avoir utilisé plus d’un de ces services, donc certains sont comptés deux fois) (Voir le tableau 21).

Nous avons demandé aux participants de nous dire dans quel but ils avaient utilisé ces services, et nous avons obtenu un éventail de réponses beaucoup plus large que prévu. La définition d’un problème familial, dans l’esprit des participants à l’enquête, débordait le cadre de nos prévisions. Nous pouvons affirmer que les gens ont utilisé les services tant pour porter des accusations criminelles contre leur enfant que pour résoudre des problèmes de famille d’accueil, de violence, de santé mentale, de garde, de droit de visite ou de pensions alimentaires pour enfants ou encore pour obtenir des services de consultation et d’orientation. D’autres personnes n’ont pas voulu décrire leurs problèmes en détail et ont répondu, par exemple, par « problème conjugal » ou « enfants » à la question de savoir pourquoi elles avaient eu recours aux services. Par conséquent, nous n’avons pas pu créer de catégories d’utilisation des services. Les gens n’étant pas en mesure d’obtenir des services spécialisés, il n’est pas surprenant de les voir définir leurs problèmes familiaux en termes généraux. C’est là un exemple des difficultés que l’on rencontre lorsque l’on tente d’obtenir des renseignements précis sur un problème ou un service juridique particulier dans le Nord.

Tableau 21
Répartition des services utilisés par les participants selon le type de service et le sexe du participant

 

Femme
Homme
Total des
participants à l’enquête
(Réponses multiples acceptées)
Pourcentage de l’échantillon total
Services sociaux
31
60 %
12
44 %
43
54 %

13 %
Aide juridique
18
35 %
7
26 %
25
32 %

7 %
Groupes paroissiaux
9
17 %
5
19 %
14
18 %

4 %
Programme d’exécution des ordonnances alimentaires
10
19 %
3
11 %
14
18 %

4 %
Comités de justice communautaire
4
8 %
5
19 %
9
11 %

3 %
Tribunal
4
8 %
 
3
5 %

1 %
Autre
 
2
7 %
2
3 %

1 %
Total
52
27
79
342

4.2.3  Les services prioritaires

Nous avons constaté lors des rencontres communautaires que tout le monde s’entendait sur un certain nombre de services jugés utiles. Nous avons retenu trois messages principaux. La plupart des gens ont identifié comme utiles les services de consultation et d’orientation pour les personnes aux prises avec des difficultés conjugales. La demande pour ce type de service est générale. Ensuite, les participants n’ont pas véritablement exprimé un besoin d’information sur le plan juridique. Pour eux, une information sans services adéquats n’améliorerait pas beaucoup la situation du droit de la famille. Enfin, au moment de l’enquête, les participants ont affirmé que, pour eux, les services juridiques ne semblaient pas disponibles quand on en avait besoin.

Les membres de la communauté ont abondamment discuté de l’importance de pouvoir recourir à des services de consultation, surtout pour les personnes qui envisagent une séparation. Toutefois, nous avons constaté des divergences de vue sur l’objectif de ces services. Pour certains, les services de consultation devraient avoir pour fonction d’encourager les conjoints à faire le nécessaire pour tenter de sauver le couple. Les personnes exprimant cette opinion étaient souvent parmi les plus âgées. D’autres y voyaient une façon d’intervenir à un moment de crise pour amener un changement de comportement : si le problème découlait en partie d’un abus d’alcool, de l’usage de drogues ou même d’actes de violence perpétrés par l’un des conjoints, on estimait que les services de consultation pourraient faciliter le changement de ces modèles de comportements destructeurs. Des hommes et des femmes d’âges différents étaient de cet avis. Souvent, pour eux l’objectif était de sauver la relation, mais seulement par le « ressourcement ». Certains membres du groupe ont aussi insisté sur les questions de sécurité. D’autres encore ont considéré les services de consultation au moment d’une crise entre conjoints comme le moyen d’apporter un soutien à ces personnes pendant une période difficile de leur existence, sans envisager nécessairement le retour à la vie commune comme la panacée à leurs problèmes conjugaux.

Bien que nous n’ayons pas examiné la question à fond, il ne semblait pas y avoir eu de consensus quant à la forme que devraient prendre ces services. Les gens ne semblaient pas plus privilégier les consultations individuelles que les consultations en couple. Nous n’avons pas abordé la question de la sécurité ou des déséquilibres de pouvoirs dans le contexte des consultations; cette question n’a pas été soulevée au niveau de la communauté. Nous n’avons pas non plus abordé les services de consultation ou les séances d’information obligatoires. Tout type de programme obligatoire aurait sans doute soulevé beaucoup de résistance, vu l’inquiétude omniprésente que représente la violence124. De plus, comme nous l’avons mentionné précédemment, tout programme de services obligatoires poserait d’énormes problèmes logistiques équivalant à un véritable déni de justice. Enfin, vu le faible nombre de personnes qui utilise le processus judiciaire, les programmes obligatoires n’atteindraient de toute façon qu’un nombre limité d’individus.

En ce qui a trait à la demande de services juridiques, les gens ont exprimé du mécontentement face à la méconnaissance de leurs droits, mais plus encore face à cette incapacité de ne pas pouvoir compter sur le système du droit de la famille pour trouver des solutions à leurs problèmes125. De nombreuses personnes ont exprimé des doutes sur la pertinence de recevoir de l’information sous forme de publicité ou de dépliant, sans accès aux services qui leur permettraient d’exercer les droits énoncés. Sans aide, les personnes qui comprenaient leurs droits ont signalé se sentir complètement impuissantes lorsqu’elles essayaient d’obtenir une pension alimentaire pour leurs enfants ou voulaient régler une autre question de droit de la famille.

La volonté d’être représenté par un avocat n’exprimait pas nécessairement un désir de confrontation. En fait, l’aspect accusatoire du système est toujours considéré, par tous ceux qui se sont exprimés sur le sujet, comme un problème en soi.

Les membres de la communauté s’entendaient généralement sur les type de cas nécessitant les services d’un avocat : quand l’autre partie vit à l’extérieur de la collectivité et bien souvent hors du Territoire, quand une femme demande une pension alimentaire pour ses enfants ou quand une personne est défenderesse dans une procédure engagée par quelqu’un d’autre. Les femmes qui recourent à un avocat (et au droit) pour obtenir une pension alimentaire pour leurs enfants, y voient là un moyen de faire valoir leurs droits. Dans les autres cas (la majorité), les gens recourent aux services d’un avocat davantage pour gérer une situation trop complexe que pour faire valoir un droit en particulier.

Les difficultés pratiques pour se faire représenter par un avocat restent nombreuses. La pénurie d’avocats dont nous avons parlé dans le premier chapitre continue d’être le principal obstacle. La Commission des services juridiques a engagé deux avocats à temps plein, spécialisés en droit de la famille, en l’an 2000. Moins d’un an plus tard, ils devaient gérer près de 250 nouveaux dossiers126. Cependant, même si l’on dispose d’un avocat spécialisé en droit de la famille dans chaque région, le problème d’une représentation adéquate ne sera pas réglé. Les conflits d’intérêts représentent toujours un énorme problème. De nombreuses personnes qui auraient pu faire valoir leurs droits n’ont pu le faire parce que la même clinique juridique représentait leur conjoint dans une cause criminelle — où, bien souvent, elles étaient la victime. Les délais trop courts pour l’échange de documents ne tiennent pas compte de l’isolement des collectivités en termes de ressources juridiques, et les retards inévitables pour obtenir un avocat peuvent parfois causer de graves préjudices. Le coût des services d’un avocat représente aussi un grave problème pour les personnes non admissibles à l’Aide juridique.

La difficulté d’obtenir une représentation adéquate découle directement des problèmes généraux d’accès à la justice que connaît le Nord. Les tribunaux siégeant très peu souvent dans la plupart des collectivités, les occasions d’entendre une cause en présence de toutes les parties sont rares. La Commission d’examen des lois a constaté que le processus de gestion des procédures de droit familial non contestées comportait souvent des échanges de requêtes entre avocats en l’absence des parties. Comme ces affaires sont entendues en dehors de la collectivité, ses membres encore moins l’occasion de comprendre le déroulement du processus ou d’intervenir. Malgré la formation d’interprètes, la langue est aussi un obstacle pour beaucoup, étant donné qu’à l’heure actuelle, un seul avocat au Nunavut parle l’inuktitut. Les avocats qui travaillent avec les Inuits n’ont pas toujours les aptitudes transculturelles nécessaires, ce qui peut entraîner aussi de graves malentendus. Car, si les victimes de violence ont une mauvaise expérience du tribunal, elles peuvent cesser de le considérer comme l’endroit approprié pour résoudre adéquatement leurs problèmes.

Compte tenu de ces résultats, nous croyons fortement qu’il nous faut travailler à mettre en place, pour gérer les problèmes du droit de la famille, un système indépendant des tribunaux et accessible au niveau de la collectivité. Dans sa Stratégie en matière de droit de la famille (annexe IV), qui découle aussi de cette recherche, le ministère de la Justice du Nunavut s’est engagé, avec le soutien du gouvernement fédéral, à former des médiateurs. Cette formation mettra l’accent sur le respect du concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit et s’appuiera sur une collaboration entre des médiateurs formés dans le Sud et des membres respectés de la communauté. L’élaboration d’un processus non judiciaire au niveau des collectivités pourrait permettre à la plupart des Inuits d’obtenir plus que de l’information sur le droit de la famille, il pourrait aussi leur permettre d’obtenir une certaine forme d’aide par le biais d’ententes exécutoires par le tribunal.

Plusieurs aspects de ce projet devront être précisés au fur et à mesure des consultations menées par la MQ et par le ministère. Comme l’indique le répertoire des services, la plupart des services du Nunavut ne sont pas « autonomes » mais intégrés à un ensemble. Des médiateurs formés au droit de la famille peuvent faire partie d’un autre groupe, par exemple, des comités de justice communautaire. Selon la commissaire en chef, les CJC dans le Nord de Baffin se sont dits très intéressés par les questions familiales, si on leur conférait suffisamment de pouvoirs. D’autres comités ont toutefois exprimé des réserves considérables quant à la possibilité de se voir conférer plus de responsabilités, en particulier, pour régler des conflits familiaux127. Lors de notre consultation, un travailleur social a suggéré que ces médiateurs travaillent avec les comités de prise en charge qui doivent être mis sur pied en vertu de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille.

4.3  L’information juridique

C’est une travailleuse sociale de Pond Inlet qui a le mieux résumé notre principale conclusion sur l’information juridique à fournir à la population : « Quel peut bien être l’avantage de voir ses droits imprimés sur une affiche ou sur un dépliant, a-t-elle demandé, si l’on n’a même pas de numéro de téléphone où appeler pour tenter de les exercer? » Le manque d’information est un grave problème même s’il ne constitue pas le principal obstacle auquel sont confrontés les Nunavummiuts quand ils cherchent à résoudre leurs conflits familiaux. Malgré un niveau relativement élevé de connaissances dans les réponses aux questions posées dans notre enquête auprès des ménages, nous avons été frappés par le besoin constant toujours plus grand d’information sur tout un ensemble de questions liées au droit de la famille et aux droits de la personne. En voici quelques exemples :

  • le droit de tous les enfants à une pension alimentaire et les niveaux acceptables de l’aide financière (Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants), y compris l’importance des contributions non financières;
  • les droits des conjoints de fait;
  • les droits des « parents substituts » dans la famille élargie;
  • le droit à l’Aide juridique pour les affaires familiales.

Les membres de la communauté avaient tout un éventail de suggestions sur la manière d’informer la population sur ces droits et sur les sources privilégiées d’information en cas de séparation et de divorce. Bien qu’un nombre important de personnes n’aient pas indiqué quelles étaient, à leur avis, les sources d’information les plus adéquates, celles qui l’ont fait ont manifesté leur choix de façon claire : la plupart des personnes consulteraient un avocat ou un travailleur social pour avoir de l’information sur le divorce. Très peu tenteraient d’obtenir cette information d’un ministre du culte, d’un groupe paroissial ou d’un travailleur social auprès des tribunaux (Voir le tableau 22).

Tableau 22
Répartition des participants à l’enquête en fonction des sources d’information privilégiées

Source d’information privilégiée  
Total des participants à l’enquête (Réponses multiples acceptées)
Pourcentage de l’échantillon total

Avocat(e)

Oui
119
43 %

35 %
Non précisé
158
58 %

46 %

Travailleur social*

Oui
97
35 %

28 %
Non précisé
178
65 %

52 %

Aîné(e)

Oui
67
24 %

20 %
Non précisé
207
76 %

61 %

Ami(e)

Oui
58
21 %

17 %
Non précisé
216
79 %

63 %

Famille

Oui
42
15 %

12 %
Non précisé
232
85 %

68 %

Travailleur social auprès des tribunaux*

Oui
28
10 %

8 %
Non précisé
247
90 %

72 %

Groupe paroissial

Oui
20
7 %

6 %
Non précisé
254
93 %

74 %

Centre communautaire

Oui
16
6 %

5 %
Non précisé
258
94 %

75 %

Autre

Oui
11
4 %

3 %
Non précisé
263
96 %

77 %

Totaux

 
274
100 %
342
100 %
* N=275 participants à l’enquête.

Pour ce qui est de la transmission de l’information sur le droit de la famille par les médias, de nombreuses personnes ont dit préférer la radio. Les gens écoutent beaucoup la radio au Nunavut. Elle ne coûte pas cher et est en grande partie gérée par les Inuits. Elle constitue assurément un type privilégié de communication. La télévision et les journaux comptaient un nombre égal d’adeptes. Ces deux médias coûtent beaucoup plus chers que la radio. De plus, les journaux ont un public moins large en raison de l’analphabétisme. L’Internet n’est pas perçu comme un choix fiable, ce qui n’est pas surprenant étant donné la rareté relative des connexions Internet dans les Territoires, leur lenteur et le coût élevé du service en dehors d’Iqaluit et de Rankin Inlet, où se trouvent les seuls fournisseurs de services Internet.

Les participants à l’enquête avaient également tout un éventail de suggestions créatives pour permettre la diffusion de l’information, notamment des aimants pour réfrigérateur avec des numéros de téléphone, l’utilisation d’organismes et de réseaux communautaires, des brochures, des rencontres communautaires, et ainsi de suite (Voir le tableau 23).

Tableau 23
Répartition des participants à l’enquête en fonction du média préféré pour transmettre l’information

Média

 

Total des participants à l’enquête

Pourcentage de l’échantillon total

Internet Préféré
51
16 %

15 %

 

Non préféré
262
83 %

77 %
Journal Préféré
136
43 %

40 %

 

Non préféré
177
57 %

52 %
Affiches Préféré
70
23 %

20 %

 

Non préféré
239
77 %

70 %

Radio

Préféré
210
69 %

61 %

 

Non préféré
104
33 %

30 %

Télévision

Préféré
143
46 %

42 %

 

Non préféré
171
54 %
50 %


5  CONCLUSIONS

En ces temps de renouveau politique, tous les efforts sont mis en œuvre pour que le droit et les services satisfassent les besoins de la majorité inuite et s’harmonisent avec le concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit. On s’est fortement engagé à ce que les Inuits participent largement tant à la réforme législative qu’à la réforme des programmes, et à ce que la participation et l’orientation des collectivités soient liées à des programmes accessibles tant sur le plan culturel que sur le plan linguistique. Tout aussi important est le besoin de considérer les objectifs de la justice familiale dans une optique holistique.

La solidité et le bien-être des familles reflète presque toujours les conditions sociales et personnelles de ceux qui les composent. La répartition de la population en petites collectivités isolées dont les membres entretiennent entre eux des liens étroits est une réalité sociale qui sous-tend aussi bien les mœurs familiales et le mode de vie individuel que les activités du secteur public. Une forte proportion de la population du Nunavut est aux prises avec de graves problèmes sociaux qui recoupent le droit de la famille. Ces problèmes peuvent non seulement contribuer à l’éclatement de la famille mais ils le compliquent : le jeune âge des parents, la violence familiale, le chômage, la pénurie de logements et la pauvreté généralisée ainsi que de graves problèmes de santé, notamment la dépression, le suicide, l’alcoolisme et la toxicomanie. Des modifications au droit de la famille et aux façons de faire ne pourront améliorer la situation que dans le cadre d’un réseau plus large et englobant de ressources communautaires.

Le cadre juridique du droit de la famille a été profondément remanié au cours des cinq à dix dernières années. Depuis la création du Nunavut, les changements au système juridique officiel ont créé une structure judiciaire unifiée et des institutions communautaires renforcées, notamment un élargissement du rôle des juges de paix et des comités de justice communautaire. À ce jour, toutefois, ces développements n’ont pas eu d’incidence significative sur les questions liées au droit de la famille. En même temps, d’importants changements se produisaient dans le droit de la famille. Au niveau du Territoire, la première loi reconnaissant officiellement l’adoption selon les coutumes était adoptée et entrait en vigueur. En 1998, c’était au tour de la loi qui accordait aux conjoints de fait des droits élargis, prévoyait plus de latitude en matière de contrats familiaux et apportait des précisions substantielles sur la garde et le droit de visite, ainsi que sur les facteurs permettant de déterminer « l’intérêt supérieur de l’enfant. » Les lignes directrices fédérales et territoriales sur les pensions alimentaires pour enfants sont aussi entrées en vigueur; elles permettent de calculer plus simplement et de façon plus équitable les montants des pensions alimentaires pour enfants dus dans chaque cas.

Notre recherche montre toutefois que jusqu’à présent, ces changements substantiels n’ont pas nécessairement eu une incidence réelle sur la vie des familles. Dans la plupart des cas, celles-ci n’ont pas recours aux tribunaux quand survient une rupture pas plus qu’elles ne recourent à la loi pour officialiser la création d’une nouvelle famille. Il est également étonnant que la loi ne prévoie aucune disposition sur les liens entre les membres de la famille élargie, dont l’importance est vitale au Nunavut.

5.1  Résultats de la recherche : la famille en mutation

Nos résultats montrent clairement que la famille élargie est, au Nunavut, le centre de la réalité. Dans différents ménages, un large éventail de liens se tissent bien au-delà de la famille nucléaire. Presque la moitié des ménages du Nunavut comptent des membres de la famille élargie comme des grands-parents, des frères et sœurs d’âge adulte et autres. Il est surprenant qu’un phénomène social d’une telle ampleur soit si peu reconnu sur le plan juridique. Une réforme du droit n’est peut-être pas nécessaire pour changer la situation, mais il est certainement possible de trouver le moyen de faire connaître les droits existants — en particulier l’admissibilité des « non-parents » aux demandes de pensions alimentaires ou de droit de garde, le cas échéant — pour reconnaître le travail accompli au sein de ces unités familiales élargies. Comme un grand nombre de personnes participent activement à l’éducation de l’enfant, il est essentiel d’agir prudemment à l’égard de réformes qui pourraient avoir un effet négatif sur l’intérêt réel de ces personnes à maintenir une relation continue avec l’enfant après l’éclatement de la famille.

Si l’on considère le modèle familial intergénérationnel du Nunavut, l’âge extrêmement précoce auquel de nombreux Nunavummiuts deviennent parents pour la première fois ne surprend guère. Cette situation suscite des problèmes à bien des égards car la jeunesse des parents va souvent de pair avec une plus grande pauvreté et l’impossibilité de recourir à la justice. Il est absolument nécessaire d’incorporer un volet éducatif sur le droit de la famille aux programmes scolaires et de s’assurer que toute tentative planifiée de sensibilisation juridique ait lieu tant au niveau des études secondaires que collégiales, afin d’améliorer la possibilité, pour ces jeunes parents, d’accéder au système du droit de la famille.

Un des aspects les plus importants de cette étude a porté sur l’institutionnalisation, au Nunavut, de l’adoption selon les coutumes, vu que ce type d’adoption y est extrêmement répandu sur le Territoire. Un quart environ des Nunavummiuts sont adoptés selon les coutumes autochtones. De plus, notre recherche nous permet de croire que l’adoption selon ces coutumes est bien comprise et largement utilisée dans tout le Territoire. Les décisions semblent appartenir à la famille et se faire dans le cadre de la collectivité, et non dans celui de systèmes extérieurs. Les paramètres des décisions sur l’adoption semblent assez clairs, tout comme les responsabilités des parties au processus. Mais, alors que l’adoption selon les coutumes est un processus beaucoup plus « ouvert » que l’adoption judiciaire, aucune obligation parentale n’est imposée aux parents qui « donnent l’enfant », de sorte que les recoupements possibles avec le reste du droit de la famille sont rares.

Un indicateur du rôle limité que joue le système juridique officiel dans la vie de la famille est le nombre toujours croissant des unions de fait. Celles-ci sont, de loin, beaucoup plus nombreuses au Nunavut que dans le reste du Canada. Au Nunavut, les unions de faits diffèrent sensiblement des mariages à plusieurs égards, sur le plan qualitatif. Elles semblent débuter à un plus jeune âge et ne pas durer aussi longtemps qu’un mariage. Dans l’ensemble, les conjoints de fait ont un revenu sensiblement supérieur à celui des époux et partagent beaucoup plus souvent un ménage existant que les couples mariés. Du point de vue de notre recherche, nous avons éprouvé des difficultés à recueillir certains faits importants sur les unions de fait. Par exemple, les personnes affirmaient rarement avoir connu de précédentes unions de fait, et leur définition de l’union de fait ne correspondait pas toujours aux critères de la loi (par exemple l’exigence de deux années de vie commune).

5.2  Résultats de la recherche : la séparation et le divorce

Les résultats de la recherche indiquent des niveaux légèrement moins élevés de séparation et de divorce au Nunavut que dans le reste du Canada. Nous n’avons recueilli que peu de renseignements sur les antécédents des couples participants à l’enquête et sur les causes de leur séparation. Toutefois, de nombreux répondants ont abordé avec nous d’importantes questions associées aux séparations temporaires et à la décision des partenaires du couple de reprendre la vie commune.

Notre recherche révèle qu’à l’heure actuelle, peu de personnes paient ou reçoivent une pension alimentaire pour conjoint, au Nunavut. Néanmoins, la plupart des gens semblent appuyer fortement le principe de l’aide financière et du partage du patrimoine dans un objectif d’équité et de ressources pour les enfants. Les demandes limitées de pensions alimentaires témoignent d’un manque de connaissances des droit du conjoint à une pension alimentaire ou au partage du patrimoine, ainsi que de l’absence d’accès aux tribunaux. Le petit nombre de demandes de pensions alimentaires pourrait aussi refléter certains facteurs sociaux plus larges, en particulier la rareté des paiements entre conjoints, étant donné l’écart à peu près inexistant entre les revenus, un revenu global faible et la complexité de l’économie des familles élargies.

Un problème beaucoup plus grave concernant la séparation est celui du logement.. La pénurie de logements au Nunavut est en soi un problème important du droit de la famille. La personne qui décide de quitter son conjoint se retrouve littéralement à la rue. Ce problème est encore exacerbé quand la relation est soumise à des luttes de pouvoirs et à un déséquilibre de ces pouvoirs, quand par exemple un seul des conjoints désire mettre un terme à la relation et que le couple a des enfants. Il s’agit là d’un exemple de cas où une intervention précoce au niveau communautaire pourrait s’avérer un moyen utile de gérer l’un des principaux problèmes pratiques que soulève une séparation. Il est possible qu’une ordonnance civile de protection des enfants, y compris certains recours judiciaires, comme une ordonnance écartant du domicile familial la personne ayant perpétré des actes violents, puisse aider à réduire au minimum le déplacement des enfants au moment d’une rupture avec violence.

Le grave problème de la violence dans les relations de couple n’a pas été examiné a fond dans notre étude. Même si l’on manque de services pour répondre aux besoins des victimes de violence, il ne fait pas de doute que, jusqu’à ce jour, il s’agit d’un des principaux secteurs ayant donné lieu à la création de services du droit de la famille. Il faudrait envisager une meilleure intégration des programmes de droit pénal, pour protéger les membres de la famille contre la violence, et des recours civils. Renforcer l’accès au système juridique pour régler certains problèmes pratiques, tels que la responsabilité du soin et du soutien financier des enfants, le partage équitable du patrimoine familial et le soutien financier du conjoint désavantagé par la relation, ne pourrait que profiter aux couples qui vivent une séparation, en plus d’aider les victimes de violence à s’affranchir de leurs agresseurs.

Notre étude montre que les familles du Nunavut comptent davantage d’enfants, en moyenne, que la plupart des familles du reste du Canada. De plus, les enfants y sont élevés dans toute une variété de types de familles. Bien que la proportion des enfants élevés dans des familles biparentales soit dans l’ensemble comparable au reste du Canada, beaucoup plus d’enfants au Nunavut que dans le reste Canada sont élevés par des parents qui vivent en union de fait — presque trois fois plus, proportionnellement à la population. Les chefs de famille monoparentale continuent d’être surtout des femmes, au Nunavut comme ailleurs au Canada, même s’il existe des différences importantes quand on compare les chiffres du Territoire aux moyennes canadiennes. Un grand nombre de chefs de famille monoparentale déclarent n’avoir jamais été mariés ou n’avoir jamais vécu en union de fait. Cela peut expliquer la fréquence, sur le Territoire, des « familles reconstituées » (comparativement à la moyenne canadienne), même si les taux de séparation et de divorce y sont plus faibles que dans le reste du Canada. Soulignons également qu’environ la moitié des familles monoparentales vivent avec d’autres adultes membres de la même famille.

De nombreux parents affirment avoir des enfants qui ne résident pas avec les deux parents. Vu la taille de l’échantillon, nous avons eu des difficultés à tirer des conclusions précises sur les relations entre les enfants et les parents vivant hors du domicile familial. Quand les parents non résidents continuent de voir régulièrement leurs enfants, c’est souvent à l’occasion de visites durant la journée; un moins grand nombre de parents déclarent passer la nuit auprès de leurs enfants ou n’avoir avec eux que des contacts par téléphone. Dans près du cinquième des cas toutefois, les parents qui résident hors du domicile familial affirment ne plus avoir de liens avec leurs enfants. Les avocats et les membres de la communauté s’entendent sur le fait qu’un des motifs importants de cette perte de contact est l’éloignement qui séparent les collectivités du Nunavut, isolées les unes des autres par de grandes distances. Les parents ayant participé à notre enquête n’ont en général pas exprimé de mécontentement prononcé à l’égard des ententes sur les contacts entre les enfants et les parents résidant hors du domicile familial.

Les résultats, bien que provisoires, sur les pensions alimentaires pour enfants sont assez troublants, tant au plan du niveau de l’aide financière que de l’efficacité des services en place. Une minorité de parents ayant la garde des enfants affirment recevoir une pension alimentaire pour enfant et une minorité légèrement plus nombreuse de parents n’ayant pas la garde des enfants affirment en verser une. Le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires a pris beaucoup d’expansion au cours des dix dernières années et parvient sans trop de difficultés à percevoir les sommes dues dans le cadre de ses dossiers actifs. En revanche, notre étude révèle certains faits troublants à propos du PEOA. Ainsi, le programme ne s’occupe que d’un faible pourcentage de cas où les parents affirment qu’une pension alimentaire leur est réellement versée Mentionnons que les Nunavummiuts ne comptent à l’heure actuelle qu’une minorité de bénéficiaires. Enfin, la population connaît assez mal le programme.

Un des résultats les plus surprenants de la recherche concerne la fréquence d’utilisation, somme toute faible, du tribunal, mais aussi la rareté des ententes conclues entre parents pour le soutien financier des enfants suite à une séparation. Ce problème ne semble pas découler purement et simplement d’un manque de connaissance de la part des membres de la communauté à l’égard de leurs droits, car de nombreux participants à l’enquête semblaient assez au courant, du moins dans leurs grandes lignes, des principes juridiques régissant les questions clés que sont les pensions alimentaires pour enfants ou le partage du patrimoine familial. Dans l’ensemble, les participants à l’enquête ont indiqué ne recourir que rarement aux services. Cette situation résulte vraisemblablement de la rareté des services disponibles dans chaque collectivité. Confrontées à la nécessité de choisir entre un travailleur social (qui peut également être un agent de libération conditionnelle), un travailleur social préposé à la protection de la jeunesse, la paroisse, un agent de la GRC ou un travailleur social auprès des tribunaux spécialisés en droit pénal, un grand nombre de personnes décident bien souvent de résoudre leurs problèmes sans aide extérieure. En même temps, nous avons été surpris de constater que si peu de participants à l’enquête avaient déclaré avoir eu recours à des réseaux informels, par exemple des amis ou la famille.

5.3  L’application des résultats

Il y a eu relativement peu de recherche sur le droit privé de la famille chez les groupes autochtones au Canada. Le plus gros de la recherche en ce domaine porte plutôt sur l’état critique de la protection de l’enfance dans les différentes provinces ou territoires. D’après les documents que nous avons consultés, il semble que notre recherche soit la première étude du genre et de cette ampleur, auprès d’une population majoritairement autochtone, sur la question de la formation et de la composition de la famille, de la séparation et du divorce, et des services qui s’y rapportent. Au niveau du droit civil, l’information actuelle n’a pas encore été ventilée entre ce qui concerne les populations autochtones dans leur ensemble et ce qui concerne certains groupes particuliers128.

L’étude permet de croire qu’il existe un écart important entre les normes qui prévalent au sein de la communauté à majorité inuite du Nunavut et celles qu’on retrouve à l’échelle du pays. Les données que nous avons recueillies corroborent dans une certaine mesure les données recueillies pour d’autres groupes autochtones. La rareté du recours au système juridique civil, la fréquence de la famille élargie, les problèmes engendrés par la pénurie de logements et la pauvreté, et le manque de services disponibles représentent autant de difficultés que connaissent toutes les communautés autochtones. Il est possible que certaines des incidences de ces données sur l’élaboration de politiques — dont il a été brièvement question dans cette étude — puissent aussi s’appliquer à d’autres groupes autochtones.

Cela dit, il ne conviendrait pas de présumer qu’il existe trop de similitudes entre les résultats de la présente étude et d’autres résultats s’appliquant à d’autres groupes du Canada. Comme l’ont conclu la plupart des études importantes sur les peuples autochtones au Canada, il ne faut jamais sous-estimer l’importance des différences qui existent au sein même des Premières nations, et entre les Premières nations, les Inuits et les Métis. Et n’oublions pas que le contexte géographique, politique et social du Nunavut est unique. Tous les Autochtones ne vivent pas dans des collectivités relativement homogènes et isolées. La plupart des groupes s’appuient sur des modèles politiques différents et conservent des vestiges d’une organisation du genre de celle qui structure les bandes. Aucun autre peuple autochtone ne dispose de pouvoirs aussi étendus aux termes des lois qui régissent son territoire. Il va sans dire que l’histoire des communautés varie, comme varie l’histoire de la colonisation.

Les résultats de cette enquête tendent à confirmer fortement la nécessité de mener des recherches additionnelles dans un ensemble de collectivités et de régions autochtones à l’échelle du Canada. C’est un fait largement admis que la plupart des peuples autochtones et des individus issus de ces groupes considèrent que leur expérience a déjà fait l’objet de trop d’études qui, trop souvent, n’ont engendré aucun résultat ou alors la prise de mesures qui ne les concernaient pas. Par conséquent, il est important de trouver un équilibre entre la nécessité d’élaborer une base de recherche suffisante pour permettre de répondre aux besoins des peuples autochtones en matière de droit de la famille, et l’obligation de veiller à ce que la recherche s’applique bien aux groupes concernés, ou soit perçue comme telle.

5.4  Les conséquences sur l’élaboration de programmes et de politiques

Nous devons nous rendre à l’évidence : la législation actuelle régissant le droit civil de la famille (la Loi sur le divorce, la Loi sur le droit de l’enfance ou la Loi sur le droit de la famille) n’intéresse pas la majorité des Nunavummiuts, vu le nombre des décisions judiciaires. Au plus, elle permet de sensibiliser les personnes à des normes qui, au moment d’une rupture, pourront se refléter dans des ententes justes et raisonnables pour elles-mêmes, leurs conjoints et leurs enfants.

Il est tout aussi plausible, par ailleurs, que d’autres normes qui ne découlent pas de la loi — des normes culturelles ou autres — aient aussi un rôle à jouer. Une certaine cohérence dans l’établissement des ententes actuelles semblerait indiquer l’existence d’un ensemble structuré de normes; l’absence d’une telle cohérence pourrait être le signe de normes concurrentes ou circonstancielles. Bien que ces normes « informelles » soient quelquefois évidentes — l’adoption, la participation des membres de la famille élargie — notre recherche n’a pas révélé de modèles récurrents en ce qui a trait à l’éclatement de la famille. Sauf pour les pensions alimentaires pour enfants, la présente recherche ne tire aucune conclusion ferme sur la question de savoir si les familles du Nunavut gèrent la rupture de leur ménage conformément à la loi ou aux principes qui la sous-tendent. De plus, une recherche qualitative ciblée serait nécessaire pour mieux comprendre les facteurs qui influencent les décisions relatives au bien-être des enfants et aux obligations des conjoints au moment d’une séparation.

L’une des conclusions importante de ce rapport met l’accent sur la nécessité de travailler à la mise sur pied, au niveau communautaire, d’un système judiciaire indépendant, pour régler les problèmes de droit de la famille. Pour améliorer l’accès au système, il faudra tant améliorer la vulgarisation et l’information juridiques que les services du droit de la famille.

À bien des égards, les données suggèrent fortement que la création de services permanents dans les collectivités constitue l’un des éléments essentiels de la réussite du programme. Les personnes utilisent plus spontanément des programmes qui sont à portée de main et qui permettent l’établissement de contacts personnels. C’est le succès et l’usage largement répandus du processus de l’adoption selon les coutumes dans le Territoire qui nous amènent à cette conclusion, tout comme l’utilisation assez peu fréquente et la méconnaissance des services plus centralisés. Ces services permanents auraient pour avantage non seulement d’informer les collectivités mais aussi de facilier aux Nunavummiuts l’accès aux solutions et à l’aide auxquelles ils ont droit.

Dans la Stratégie en matière de droit de la famille (annexe IV), qui découle aussi de cette recherche, le ministère de la Justice du Nunavut s’est engagé — avec l’appui du gouvernement fédéral — à former des médiateurs au sein même des collectivités. Cette formation mettra fortement l’accent sur le respect du concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit et soutiendra le principe d’une collaboration étroite entre des médiateurs formés dans le Sud et des membres respectés de la communauté.

La médiation est une démarche qui offre d’importants avantages dans le contexte du Nunavut. Elle a, entre autres, l’avantage de comporter moins d’aspects formels et accusatoires que le système judiciaire officiel. Elle peut aussi prévenir les conflits d’intérêts auxquels sont confrontés les agents des services sociaux ou les travailleurs sociaux auprès des tribunaux, déjà surchargés de travail, quand ils doivent représenter une personne. Il est certain que dans le contexte du droit de la famille, surtout quand la violence peut constituer un problème important, des mesures de protection devront être mises en place. Par ailleurs, les solutions de médiation communautaire — peu importe dans quelle mesure elles améliorent l’accès à la justice et transforment l’expérience qu’ont les gens de la justice — ne pourront dans certains cas remplacer la représentation par avocat et l’intervention du tribunal.

Le Nunavut a besoin d’un plus grand nombre d’avocats pratiquant le droit de la famille. Il s’agit d’une priorité tant à court terme qu’à long terme. Espérons qu’avec le temps, nous y trouverons des avocats inuits qui contribueront à modifier le visage et le langage de la pratique du droit dans le Territoire, tout en y renforçant sa présence. Il est également probable que lorsque se produira ce changement de personnel — tant au niveau des spécialistes du droit que des para-professionnels et des personnes participant à l’élaboration des politiques — l’orientation du droit de la famille évoluera encore.

À l’avenir, des consultations devraient avoir lieu sur la façon dont — en pratique comme en principe — les nouvelles ressources communautaires en matière de droit de la famille pourront allier les normes imposées par la loi au concept de l’Inuit Qaujimajatuqangit et à d’autres normes informelles. Espérons que cette façon de faire permettra d’élaborer une approche holistique ou pluraliste à la solution des problèmes, de protéger le bien-être des enfants et d’instaurer l’équité dans les questions relevant du droit de la famille.


ANNEXE I
MÉTHODOLOGIE ET RECOMMANDATIONS POUR LES RECHERCHES À VENIR

Ce projet de recherche a utilisé une variété d’approches méthodologiques. Les résultats diffèrent pour chacune des quatre composantes. Un examen plus détaillé des sources suit, accompagné d’un examen des pièges à éviter et des améliorations possibles pour les recherches à venir, particulièrement si les chercheurs se proposent de procéder à une étude quantitative dans le Nord.

1.  Examen des statistiques existantes : les sources

Notre examen des statistiques a tenu compte des données du Recensement de 1996 sur les familles et les ménages, de l’Enquête sur l’usage des drogues et de l’alcool dans les T. N.-O. de 1998 et de l’Enquête sur la population active du Nunavut de 1999. Nous avons aussi consulté d’autres recueils de données, notamment le Rapport du ministère de la Justice sur les statistiques choisies relatives au crime (2000) (qui donne, au niveau de la communauté, les données relatives aux taux d’inculpation et au taux de libération de la Gendarmerie royale du Canada); le Rapport du gouvernement du Nunavut sur le logement au Nunavut (2000); et d’autres données compilées par le Bureau de la statistique du Nunavut et par celui des T.N.-O., tel qu’il existait avant le partage en deux du territoire nordique.

Nous n’avons pas été en mesure de tirer partie de plusieurs études nationales importantes portant plus directement sur le droit de la famille car elles n’incluaient pas les territoires du Canada. Il s’agit, en particulier, de l’Enquête sociale générale, incluant le Cycle 10 sur la famille et les amis (1995) et de l’Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes (enquête biennale menée depuis 1994). Les coûts élevés de la recherche quantitative dans le Nord, joints à certaines difficultés logistiques, n’ont pas permis d’accumuler suffisamment de données sur la vie de la famille dans les territoires. Le gouvernement du Nunavut a donc décidé qu’une étude quantitative portant sur le détail des relations familiales et sur l’éclatement des familles serait un outil de planification utile et pourrait contribuer à combler le fossé entre ce que l’on sait au Sud du Canada et ce que l’on sait au Nord.

2.  L’enquête auprès des ménages

L’échantillon

L’enquête a été administrée dans le cadre d’entrevues individuelles menées auprès de 342 personnes dans cinq collectivités du Nunavut.

Nous avons appliqué la méthodologie de l’ESG de sorte que, dans chaque ménage, une seule personne âgée de plus de quinze ans a participé à l’entrevue. Dans chacune des entrevues, le ou la participant(e) à l’enquête a été choisi(e) en fonction de sa date d’anniversaire, laquelle devait être la plus rapprochée, en aval, de la date de l’entrevue. En tout, 193 femmes et 149 hommes ont participé à l’enquête. Le plus âgé de tous avait 82 ans.

Les cinq collectivités devaient être aussi représentatives que possible des différences géographiques du Nunavut. Chaque région du Nunavut a été représentée. L’enquête a été menée dans deux collectivités de l’île de Baffin, deux collectivités de la région du Kivalliq (Keewatin) et une collectivité du Kitikmeot. La taille des collectivités variait de la plus grande, Iqaluit (la capitale, 4 627 habitants)129, à l’une des plus petites, Chesterfield Inlet (363 habitants). Comme la plupart des résidents du Nunavut vivent dans des collectivités comptant entre 1 000 et 1 500 habitants, nous avons choisi, dans deux régions différentes, deux collectivités ayant une population comprise dans cette fourchette : Pond Inlet (1 276 habitants), dans la région de Baffin et Cambridge Bay (1 387 habitants) dans la région du Kitikmeot. Enfin, Coral Harbour (822 habitants), dans la région du Kivalliq, a été choisie pour représenter les collectivités de petite à moyenne envergure sur le Territoire.

Dans chaque collectivité, la taille de l’échantillon était à peu près proportionnelle au pourcentage de Nunavummiuts résidant dans une collectivité d’envergure comparable. Nous avions à l’origine l’intention de procéder à 500 entrevues. Compte tenu de la population totale, nous avons estimé qu’environ 20 p. cent des participants à l’enquête devaient être d’Iqaluit puisque près de 5 000 personnes y habitent. Vingt p. cent des participants devaient provenir de Cambridge Bay, puisque près de 5 000 personnes résident dans les deux centres régionaux. À peine moins de 10 000 Nunavummiuts vivent dans huit collectivités importantes qui ne sont pas des centres régionaux, chacune d’elles comptant de 1 000 à 1 500 résidents. Par conséquent, environ 30 p. cent des participants devaient résider à Pond Inlet. Comme les sept collectivités de moyenne envergure comptant de 500 à 1 000 habitants représentent un autre 20 p. cent de la population du Territoire, 20 p. cent de notre échantillon a donc été choisi à Coral Harbour. Enfin, les petites collectivités ayant une population inférieure à 500 habitants constituent environ 10 p. cent de la population du Nunavut, et Chesterfield Inlet a représenté ce 10 p. cent de l’échantillon.

Pour nombre de raisons, la répartition finale des réponses n’a pas correspondu exactement à la structure originale de l’enquête. Dans quelques collectivités, en particulier à Cambridge Bay, nous avons obtenu un nombre de réponses considérablement plus faible que prévu. Le fait que Cambridge Bay se soit retrouvée avant-dernière sur la liste des collectivités que nous avons visitées explique peut-être son faible taux de réponses. Mais, cette situation peut aussi refléter des problèmes liés au recrutement des enquêteurs. À Iqaluit, la collecte des données a pris fin abruptement après qu’un hypothétique participant à l’enquête eut enfermé l’enquêteur dans une maison et l’eut menacé. Nous avons été très heureux de constater que les enquêteurs avaient mené le nombre d’enquêtes prévu à Pond Inlet et à Chesterfield Inlet130. Aux fins de ce rapport d’ensemble, les données n’ont pas été réparties en fonction des collectivités. Bien que trop fragmentaires pour être représentatifs du Nunavut dans son ensemble, les résultats n’en fournissent pas moins un échantillon significatif sur de nombreuses et importantes questions liées à la vie de la famille.

L’outil de l’enquête

L’enquête s’appuie dans une large mesure, sur l’Enquête sociale générale (ESG), Cycle 10, « la famille et les amis », menée par Statistique Canada. L’ESG de 1995 portait sur un large éventail de questions touchant la famille, notamment la composition des ménages, le mariage, les unions de fait, les antécédents familiaux et la mutation des rôles familiaux. Elle examinait les attitudes et les opinions sur un éventail de questions liées à la vie de la famille, et cherchait à recueillir des renseignements financiers détaillés sur les membres de la famille. Il a fallu en adapter certains aspects pour pouvoir mener dans le Nord une enquête similaire à l’ESG. Nous avons choisi d’abandonner certaines des orientations de la recherche portant sur les attitudes, les perceptions et la situation financière des participants à l’enquête. Nous avons augmenté le nombre des questions relevant directement du droit de la famille comme tel. Nous avons posé des questions sur les rapports entre les enfants et les parents, sur l’aide financière et matérielle, et sur les connaissances de la population vis à vis du système juridique. Autant que possible, nous avons essayé d’identifier les domaines dans lesquels il était important d’incorporer des normes culturellement différentes. Par exemple, les questions relatives à l’adoption et à la tutelle ont été redéfinies pour tenir compte des différences entre l’adoption ordonnée par la cour, l’adoption selon les coutumes autochtones et les ententes informelles de tutelle.

Le dernier changement important a été d’adapter l’enquête, conçue sous la forme d’une entrevue téléphonique assistée par ordinateur, pour en faire un questionnaire sur papier, afin de faciliter les entrevues individuelles.

L’outil de l’enquête a été traduit en inuktitut, mais ne l’a pas été en inuinaqtun, dialecte du Nunavut occidental. Les enquêteurs avaient en main un exemplaire de la traduction en inuktitut pour fins de référence.

Les entrevues et les enquêteurs

Des enquêteurs inuits bilingues ont été choisis dans les collectivités où nous avons mené notre enquête. La plupart du temps, pour recruter les enquêteurs, nous avons suivi les recommandations des dirigeants de la localité. L’inconvénient inhérent à ce choix — les participants à l’enquête devaient partager certains renseignements privés avec des personnes qu’ils connaissaient — fut largement compensé, à notre avis, par une réduction importante des coûts et une confiance accrue des participants envers les enquêteurs. Nous avons été très heureux d’apprendre que les enquêteurs à l’extérieur d’Iqaluit n’avaient eu aucune difficulté pour convaincre les personnes de participer à l’enquête. À notre avis, le fait d’utiliser des enquêteurs locaux a facilité les échanges d’information et permis aux Nunavummiuts de percevoir cette enquête comme utile pour la population du Nunavut.

Les concepteurs de l’enquête ont sillonné chaque collectivité pour diriger un atelier d’une journée dans le but d’aider les enquêteurs à se familiariser avec l’outil de l’enquête. On a ensuite demandé aux enquêteurs d’effectuer leurs entrevues sur la base d’un échantillonnage pris au hasard. En fonction de la collectivité concernée, nous avons obtenu cet échantillonnage de différentes façons. À Iqaluit, nous avons simplement utilisé une liste d’adresses établie au hasard, fournie par la Division de la recherche et de la statistique du gouvernement du Nunavut. Dans les collectivités de moindre envergure, où l’échantillon représentait une proportion plus importante des ménages, nous avons utilisé un échantillonnage plus approximatif. Par exemple, à Pond Inlet, nous devions mener 150 entrevues pour 325 habitations. Nous avons donc demandé aux enquêteurs de mener l’entrevue toutes les deux maisons dans une région en particulier que nous avons désignée sur la carte, et nous avons partagé la carte entre trois enquêteurs. Nous avons adopté une démarche comparable dans toutes les autres collectivités : il y a eu une enquête toutes les quatre habitations à Chesterfield Inlet, et ainsi de suite. Les enquêteurs ont reçu une rémunération pour chaque questionnaire rempli.

L’analyse des données

Une sous-traitante a procédé à la saisie des réponses au questionnaire, dans une base de données SPSS (progiciel de statistiques pour les sciences sociales) de sa conception. Par la suite, nous avons dû effectuer un travail considérable pour calculer les données cumulatives et les structurer de manière à ce qu’elles répondent à nos principales préoccupations.

3.  Le répertoire des services

Nous avons établi le répertoire des services par téléphone, peu avant le début de l’enquête auprès des ménages. Les chercheurs ont mis au point les questionnaires en fonction de ce qu’ils savaient des services existants dans plusieurs collectivités. Les questionnaires ont ensuite été remis aux responsables municipaux, soit à l’agent principal d’administration (APA), soit à son adjoint (APAA) et, dans certains cas, à l’un et à l’autre. Comme en général cet agent était un qallunaat (non-Inuit), et que l’adjoint était un Inuit, nous avons voulu savoir si ces deux groupes avaient des connaissances différentes des services disponibles et si leur perception des problèmes différait, ce qui ne s’est pas vraiment concrétisé.

Nous avons mené des entrevues dans 17 des 23 collectivités du Nunavut, ce qui ne comprend pas les cinq collectivités visées par l’enquête auprès des ménages, où nous avons pu dresser par nous-mêmes un tableau assez complet de la situation. Nous avons aussi exclu les collectivités de très petite taille dont la population était inférieure à 150 habitants. Vu certaines des difficultés que nous avons eues pour en rencontrer les responsables, nous ne sommes pas allés au centre régional Rankin Inlet de Kivalliq.

4.  Les groupes de consultation et les entrevues individuelles

Dans chaque collectivité où nous nous sommes rendus pour mener notre enquête, nous avons aussi utilisé tout un éventail de stratégies de recherche qualitative et d’interventions directes.

Par-dessus tout, nous avons tenu des rencontres communautaires. Ces rencontres avaient lieu soit dans les centres communautaires, soit au bureau de la localité. Avant de nous adresser à une collectivité, nous avons communiqué avec un certain nombre de personnes et annoncé la tenue des rencontres à la radio locale. Nous avons obtenu à ces rencontres des taux de participation très variables, allant d’un important groupe de 40 personnes à Pond Inlet à un petit groupe de cinq personnes à Cambridge Bay, où la rencontre a dû être reportée en raison des funérailles d’un aîné. La composition de l’assistance était très variée : certains militants et militantes de la collectivité, bien sûr, mais aussi des gens de tout âge (des bébés aux grands-parents) qui avaient entendu parler des rencontres à la radio ou par le bouche à oreille.

Les rencontres étaient structurées de façon assez libre et comportaient une courte présentation des principes de base du droit de la famille au Nunavut (les pensions alimentaires pour conjoint ou pour enfant, les décisions concernant la garde et le droit de visite, et les droits des conjoints de fait), suivie d’une période de questions et de commentaires. Les réunions se déroulaient principalement en inuktitut, mais une traduction vers l’anglais était disponible pour l’avocat ou pour quiconque en avait besoin.

Nous avons aussi mené des entrevues individuelles avec des personnes intéressées, notamment des travailleurs sociaux, des membres des CJC, des avocats, le juge principal, la directrice des adoptions et de la protection de l’enfance et des ministres du culte. Lors de nos interventions directes, nous avons aussi rencontré un nombre important de personnes que la question intéressait, notamment des parents, des grands-parents, des jeunes, des enseignants et autres. Enfin, nous avons recueilli des commentaires et de l’information de la MQ et du groupe de travail sur le droit de la famille du Nunavut qui, comme nous l’avons mentionné précédemment, comprend des représentants des services de la santé et des services sociaux et des représentants du ministère de la Justice mais aussi des avocats du droit de la famille, des juges, le curateur public et le tuteur public.

Ces rencontres ont permis de recueillir une information précieuse pour toute planification ultérieure. Certains commentaires aux vastes incidences ont mis en lumière certains aspects cruciaux du développement du droit de la famille dans le Territoire.

5.  Recommandations pour les recherches à venir

Quand on décide d’entreprendre une tâche de cette ampleur, il est inévitable de commettre certaines erreurs, mais aussi de connaître certains succès et de tirer du processus des leçons utiles.

Avec le recul, nous reconnaissons avoir commis une erreur de taille en choisissant un outil aussi complexe pour l’enquête auprès des ménages. Nous avions choisi cet outil parce que nous avions comme objectif de comparer les résultats du Nunavut à ceux du reste du Canada. Or, nous avions sous-estimé les difficultés importantes qui allaient surgir au moment d’adapter l’entrevue téléphonique assistée par ordinateur pour en faire un questionnaire sur papier adapté à des entrevues porte à porte, mais aussi au moment de codifier les résultats et d’analyser les données. De plus, l’enquête portait sur un plus grand nombre de sujets que nécessaire, ce qui a occasionné une perte de temps et d’énergie. Nous aurions pu éviter ce problème en définissant plus étroitement les objectifs de la recherche. Autre grave erreur, celle d’avoir omis de concevoir la base de données en même temps que l’outil de l’enquête, ce qui aurait simplifié l’analyse. À l’avenir, au moment d’entreprendre un projet analogue, il serait préférable de retenir les services d’une personne experte en recherche quantitative et en programmation beaucoup plus tôt dans le processus.

L’investissement des Inuits dans le projet a été un grand succès, notamment leur participation au processus d’adaptation de l’outil de l’enquête, leur aide à déterminer les collectivités à visiter, à l’organisation et à l’animation des rencontres communautaires, à l’administration du questionnaire et aux observations qu’ils ont pu faire sur le rapport final. À chaque étape, une connaissance de la collectivité était essentielle pour déterminer les questions à poser, comment les poser et à quel moment afin de recueillir les renseignements importants et de créer les conditions favorables à un échange d’information. À l’avenir, il serait souhaitable, si possible, de maintenir cette participation jusqu’à l’étape de la rédaction du rapport final. De plus, comme le processus d’adaptation du questionnaire existant a suscité des difficultés inattendues, il serait important d’essayer de bâtir l’outil de l’enquête proprement dit en s’appuyant encore davantage sur une approche participative.

Un autre succès de la recherche — qui présentait pourtant des difficultés — a été de lier le projet de recherche directement à son objectif, soit la conception de programmes et de politiques. Les Inuits et autres habitants du Nord expriment souvent des réserves face aux projets de recherche à grande échelle parce qu’ils ont le sentiment de ne pas en retirer d’avantages. Comme la recherche a donné des résultats tangibles (notamment la mise en place de services de médiation, la formation de médiateurs et la création d’un bureau d’aide à la famille), nous espérons que les personnes qui ont consacré du temps à titre de participants sentiront que leur contribution a produit des résultats concrets pour le bénéfice de la communauté.

Vu la méfiance de la communauté à l’égard des projets de recherche en général — et vu les besoins considérables qui ressortent de ce rapport — nous croyons qu’il vaut mieux ne pas entreprendre de projet de recherche quantitative dans un avenir rapproché. Toute recherche quantitative devrait porter sur le sous-groupe de personnes ayant vécu une séparation ou un divorce afin de recueillir plus de renseignements sur ces deux aspects du droit de la famille particulièrement importants; ce faisant, par ailleurs, il ne faudrait pas négliger des facteurs tels que la structure de la famille élargie et le rôle de l’adoption selon les coutumes autochtones.

Un secteur en particulier exige des recherches plus poussées : il faudrait procéder à une étude qualitative auprès des aînés et des participants âgés, pour examiner les approches et les principes traditionnels et contemporains en matière de droit de la famille. Ce travail permettrait de rendre compte de façon plus précise des différentes normes régissant la séparation, les décisions relatives aux enfants, les obligations liées au soutien des membres de la famille, l’égalité entre conjoints, la résolution des problèmes, la violence et la santé des familles. Il serait extrêmement précieux de pouvoir étudier comment ces normes interagissent avec le système juridique officiel.

La MQ fera un suivi de la présente recherche en mettant en place des mécanismes de consultation pour évaluer nos résultats et nos recommandations de réforme du droit. Cependant, une fois cette consultation terminée, le véritable défi — qui exigera les efforts conjugués de tous les intervenants du droit de la famille sur le Territoire — sera de concrétiser ces résultats par des programmes et des politiques qui répondront à la réalité du Nord.


ANNEXE II
OUTIL DE L’ENQUÊTE — ENQUÊTE AUPRÈS DES MÉNAGES

Questionnaire — Enquête sur le droit de la famille

Bonjour, je m’appelle _____________ et je travaille au ministère de la Justice du Nunavut. Nous menons une enquête sur les familles et le droit de la famille au Nunavut et nous aimerions vous poser des questions dans le cadre de cette enquête.

Toutes vos réponses seront confidentielles. Nous regrouperons les renseignements que vous nous aurez fournis avec d’autres renseignements provenant d’un grand nombre de personnes, et votre nom n’y sera jamais associé. De plus, s’il y a une question à laquelle vous préférez ne pas répondre, vous ne serez pas tenu(e) d’y répondre.

Votre participation à cette enquête est essentielle pour que nous puissions avoir une bonne vue d’ensemble des familles au Nunavut. Comme nous venons de former un nouveau gouvernement, nous avons besoin de statistiques pertinentes sur notre population afin de concevoir des services et des lois qui répondent aux besoins les plus importants de nos familles.

J’accepte de participer à l’enquête_______

Nous aimerions aussi vous demander la permission de communiquer avec vous à une date ultérieure — peut-être dans cinq ans — pour faire le suivi de cette information.

J’accepte de participer au suivi_______  Je n’accepte pas de participer au suivi _____________

Nom de la personne participant à l’enquête :
Numéro de téléphone :
Adresse :

Nous vous remercions infiniment de votre participation.

SECTION — PROFIL DES PARTICIPANTS À L’ENQUÊTE

Nous aimerions commencer par vous poser certaines questions sur vous-même afin de nous aider à mieux vous situer sur le plan démographique.

1.  Quel âge avez-vous?
(Nbre d’années)____

2.  Homme/Femme (enquêteur, veuillez prendre note)

3.  Êtes-vous un(e) Inuit(e)?
Oui___/ Non ___ Si non, quelle est votre origine ethnique___________

4.  Quel est votre niveau de scolarité le plus élevé?
Quelques années d’élémentaire
Élémentaire terminé
Quelques années de secondaire
Secondaire terminé
Quelques années de collège
Diplôme collégial
Stage d’apprenti(e) ou formation professionnelle
Accréditation de métier
Quelques années d’université
Diplôme universitaire
Diplôme de deuxième ou de troisième cycle

5.  Quelle est votre principale source de revenu?
Emploi rémunéré à temps plein
Emploi rémunéré à temps partiel
Soutien du revenu
Activités traditionnelles (chasse, piégeage, artisanat)
Un autre membre de la famille y pourvoit (précisez)______________

6.  Quelle est votre langue maternelle? __________________

7.  Quelle autre langue parlez-vous? __________________

8.  Où êtes-vous né(e)? __________________

SECTION — COMPOSITION DU MÉNAGE

Nous aimerions vous poser quelques questions sur les personnes qui composent votre ménage aujourd’hui.

Pouvez-vous nous donner le prénom de chacune des personnes qui compose votre ménage?

 

Prénom de la personne

Lien avec la personne participant à l’enquête

1

 

 

2

 

 

3

 

 

4

 

 

5

 

 

6

 

 

7

 

 

8

 

 

9

 

 

10

 

 

11

 

 


Quel est le lien de parenté de cette personne avec vous?
Époux/épouse
Conjoint(e)
Fils/fille
    Est-il/elle votre
    -  enfant naturel
    -  enfant adoptif
    -  enfant de votre conjoint(e)
Enfant dont vous êtes le tuteur/ la tutrice
Père ou mère
    Est-il/elle votre
    -  parent naturel
    -  parent adoptif
    -  conjoint(e) du parent naturel
Frère ou sœur
  -  demi-frère ou demi
  -  sœur par alliance
  -  demi-frère ou demi-sœur
  -  adopté(e)
Petit-fils ou petite-fille
Grand-père ou grand-mère
Beau-fils (gendre) ou belle-fille (bru)
Beau-père ou belle-mère
Belle-sœur ou beau-frère
Neveu ou nièce
Oncle ou tante
Cousin(e)
Partenaire de même sexe
Autre lien de parenté
Aucun lien de parenté

SECTION — LES ENFANTS (FEMME PARTICIPANT À L’ENQUÊTE)

(Veuillez ne pas compter les enfants en famille d’accueil dans cette section)

1  Avez-vous déjà élevé le ou les enfants d’un conjoint (marié ou conjoint de fait)?
    Oui                   Combien? _____
    Non

2  À l’exclusion des enfants d’un conjoint, avez-vous déjà adopté des enfants selon le processus judiciaire?
    Oui                   Combien? _____
    Non

3  À l’exclusion des enfants d’un conjoint, avez-vous déjà adopté des enfants en ayant recours à l’adoption selon les coutumes autochtones?
    Oui                   Combien? _____
    Non

4  Avez-vous déjà été la tutrice d’un ou de plusieurs enfants?
    Oui                   Combien? _____
    Non

4a  Combien de temps a duré la tutelle? (répondez pour chaque enfant)
Nbre de mois, Nbre d’années)_____________  ________________  __________

5  Avez-vous déjà donné naissance à un enfant? Oui Non Oui, et j’ai donné l’enfant en adoption_____

6  Avez-vous des petits-enfants?
    Oui                   Combien? _____
    Non

7  En commençant par l’aîné, quel est le prénom de chaque enfant que vous avez élevé ou auquel vous avez donné naissance? Incluez ceux qui sont décédés, le cas échéant.

Prénom
Âge
Sexe
1________________
____ans
M/F
2________________
____ans
M/F
3________________
____ans
M/F
4________________
____ans
M/F
5________________
____ans
M/F
6________________
____ans
M/F
7________________
____ans
M/F
8________________
____ans
M/F

Prénom
Mode d'entrée dans la famille
Âge d'entrée dans la famille
1________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
2________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
3________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
4________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
5________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
6________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
7________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans
8________________ Naturel/Adopté/EC*/Tutelle
__ans

* Enfant du conjoint

S’IL N’Y A PAS D’ENFANT, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA SECTION SUR LE MARIAGE

POSEZ LES QUESTIONS SUIVANTES (A, B ou C) POUR CHACUN DES ENFANTS

NOM DE L’ENFANT :

1  Est-ce que (prénom de l’enfant) habite avec vous à temps plein, une partie du temps, pas du tout?
À temps plein — veuillez répondre aux parties A, D et E
Une partie du temps — veuillez répondre aux parties C, D et E
Pas du tout — veuillez répondre aux parties B, D et E
Décédé — veuillez répondre aux parties D et E seulement

PARTIE A — SI (NOM DE L’ENFANT) VIT AVEC VOUS À TEMPS PLEIN :

A1  Est-ce que le père naturel ou adoptif de (prénom de l’enfant) habite avec vous?
       Oui
       Non
       Non, le père naturel est décédé

A2  Est-ce que (prénom de l’enfant) a toujours habité avec vous?
       Oui
       Non

SI LA RÉPONSE EST OUI AUX QUESTIONS A1 ET A2, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA PARTIE D


A3  Avant d’habiter avec vous, quelle était la situation de (prénom de l’enfant)?
       Habitait avec un des deux parents naturels
       Habitait avec les deux parents naturels
       Avait un ou des tuteurs
       Avait été adopté(e) par une autre famille
       Habite avec moi depuis sa naissance

A4  Est-ce que (prénom de l’enfant) a déjà quitté votre foyer depuis qu’il ou elle habite chez vous?
       Oui
       Non

A4a  Si oui, pourquoi?
A été adopté(e)
Parti(e) habiter avec l’autre parent après la séparation ou le divorce
Parti(e) habiter avec une autre personne après la séparation ou le divorce
Qui était cette personne ________________
Intervention des services sociaux
Parti(e) habiter avec des amis ou seul(e)
Parti(e) habiter avec un(e) conjoint(e)
La participante à l’enquête a demandé à l’enfant de partir
N’a pas quitté le foyer depuis son arrivée dans la famille peu après sa naissance
Autre                Précisez ____________________

A5  Pendant combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il/elle) vécu loin de votre foyer?
       ____ mois _____ années

A6  Combien de fois (prénom de l’enfant) est-il/elle parti(e) habiter loin de votre foyer?
       ____ fois

SI LE PÈRE NATUREL HABITE À LA MAISON, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA PARTIE D

SI LE PÈRE NATUREL NE VIT PAS À LA MAISON :

A7  Est-ce que (prénom de l’enfant) a des contacts avec son père naturel ou adoptif du genre (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Nuitée
Visites durant la journée
Téléphone ou lettre
Aucun contact (SI L’ENFANT N’A AUCUN CONTACT AVEC SON PÈRE, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA QUESTION A8)

A7a  Si le père rend visite à l’enfant, combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il passé en compagnie de son père naturel ou adoptif au cours des 12 derniers mois?
       ____ mois ou
       ____ semaines ou
       ____ jours
       ____ pas du tout

A7b  Combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il passé en compagnie de son père naturel ou adoptif au cours du dernier mois?
       ____jours
       ____semaines
       ____heures
       ____Pas du tout au cours du dernier mois

A7c  Au cours des 12 derniers mois, combien de fois le père naturel ou adoptif a-t-il communiqué avec (prénom de l’enfant) par lettre ou par téléphone alors que (prénom de l’enfant) n’habitait pas chez vous?
       Tous les jours
       Au moins une fois par semaine
       Au moins une fois par mois
       Moins d’une fois par mois
       Pas du tout

A8  Le domicile du père naturel ou adoptif se trouve :
Dans un rayon de 10 km (dans la même collectivité)
Dans une collectivité voisine accessible par voie de terre (jusqu’à 10 heures de route)
Dans une autre collectivité du Nunavut ou des T.N.-O., accessible par avion seulement
Au Canada ou aux États-Unis, mais hors du Nunavut ou des T.N.-O.
Hors du Canada ou des États-Unis

A9  Recevez-vous une pension alimentaire pour (prénom de l’enfant) du père naturel ou adoptif?
       Oui
       Non

A10  Recevez-vous une aide matérielle, autre que financière pour (prénom de l’enfant) du père naturel ou adoptif?
       Oui
       Non

A11  Est-ce que cette aide est une source de problèmes entre vous et le père naturel ou adoptif?
       Oui
       Non
       Quel type de problèmes?

A12  Êtes-vous satisfaite du montant de la pension alimentaire accordée par le père naturel ou le père adoptif de (prénom de l’enfant)?
       Oui
       Non

A13  Si vous recevez une aide, à quelle fréquence la recevez-vous?
Régulièrement — au moins une fois par mois
Assez régulièrement — plusieurs fois par année
Quand il a un emploi régulier ou que la chasse est bonne
À l’occasion

A14  Si vous ne recevez pas d’aide, en avez-vous déjà fait la demande?
       Oui
       Non

PARTIE B — SI (PRÉNOM DE L’ENFANT) NE VIT PAS DU TOUT AVEC VOUS :

B1  Avec qui (prénom de l’enfant) vit-il/elle?
       Avec le père naturel ou le père adoptif
       Un parent de l’enfant       Précisez __________________
       Autre              Précisez __________________

B2  Pour quelle raison (prénom de l’enfant) a-t-il/elle quitté le foyer?
Il ou elle a été adopté(e)
Il ou elle est allé(e) habiter avec un autre membre de la parenté après la rupture
Il ou elle est allé(e) habiter avec une autre personne après la rupture
De qui s’agit-il ________________
Les services sociaux sont intervenus
Il ou elle est parti(e) habiter avec des amis, ou seul(e)
Il ou elle est parti(e) habiter avec un(e) conjoint(e)
La participante à l’enquête a demandé à l’enfant de quitter le foyer
Autre       Précisez ____________________

B3  Avez-vous des contacts avec (prénom de l’enfant)… (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Nuitées
Visites durant la journée
Téléphone ou lettre
Aucun contact — Quel âge avait (prénom de l’enfant) lors du dernier contact? ___ ans

En l’absence de tout contact avec l’enfant, sautez les trois questions suivantes.

B3a  Combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il/elle passé dans votre foyer au cours des 12 derniers mois?
       ____ mois ou
       ____ semaines ou
       ____ jours
       Pas du tout

B3b  Combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il/elle passé dans votre foyer au cours du dernier mois?
       ____jours
       ____nuitées
       ____semaines
       ____heures
       Pas du tout

B3c  Au cours des 12 derniers mois, combien de fois avez-vous communiqué avec (prénom de l’enfant) par lettre ou par téléphone alors que (prénom de l’enfant) n’habitait pas chez vous?
       Tous les jours
       Au moins une fois par semaine
       Au moins une fois par mois
       Moins d’une fois par mois
       Pas du tout

B4  Par rapport à votre domicile, (prénom de l’enfant) réside :
Dans un rayon de 10 km (dans la même collectivité)
Dans une collectivité avoisinante accessible par voie de terre (jusqu’à dix heures de route)
Dans une autre collectivité du Nunavut ou des T.N.-O., accessible par avion seulement
Au Canada ou aux États-Unis, mais hors du Nunavut ou des T.N.-O.
Hors du Canada ou des États-Unis

B5  Êtes-vous satisfaite ou mécontente de la fréquence des contacts que vous avez avec (prénom de l’enfant)?
       Satisfaite
       Mécontente
       Sans opinion

B6  Pourquoi êtes-vous satisfaite ou mécontente? ______________________

B7  Avez-vous tenté de modifier l’entente sur le lieu de résidence de l’enfant ou la fréquence des contacts que vous avez avec (prénom de l’enfant)?
       Oui
       Non

B8  Quels moyens avez-vous utilisés pour modifier la fréquence des contacts?
Recours au tribunal
Entente directe avec la personne qui a la charge de l’enfant
Entente par l’intermédiaire d’une tierce personne   Qui_____________
Entente avec l’enfant
Autre       Précisez _________________

B9  Versez-vous une pension alimentaire à (prénom de l’enfant)?
       Oui
       Non

B10  Aidez-vous (prénom de l’enfant) par d’autres moyens?
       Oui
       Non

SI LA RÉPONSE EST OUI

B10a  À quelle fréquence accordez-vous une aide à l’enfant?
       Régulièrement — au moins une fois par mois
       Assez régulièrement — plusieurs fois par année
       Quand je travaille ou que je fais régulièrement de la couture
       Autre       Précisez ___________________

B10b  Pour quelle raison accordez-vous une aide à (prénom de l’enfant)?
       Sens des responsabilités envers les enfants
       Ordonnance de la cour
       Entente
       Autre (précisez) ________________________

SI LA RÉPONSE EST NON

B10c  Pour quelle raison ne versez-vous aucune pension alimentaire à (prénom de l’enfant)?
       On ne me l’a pas demandé
       Aucune ordonnance de la cour
       Entente
       Je m’occupe déjà financièrement des enfants de ma nouvelle famille
       Je n’ai pas l’obligation de verser une pension alimentaire —
       Pourquoi?_____________________________
       Autre (précisez) ___________________________

PARTIE C    SI (PRÉNOM DE L’ENFANT) HABITE AVEC VOUS À TEMPS PARTIEL

C1  Avec qui d’autre l’enfant habite-t-il?
Le père naturel ou le père adoptif 
Un membre de la famille de l’enfant  Précisez __________________
Autre    Précisez ______________________

C2  Pourquoi (prénom de l’enfant) ne vit-il avec vous qu’à temps partiel?
Garde conjointe/garde partagée des enfants
Pour des motifs scolaires
Pour des motifs reliés à l’emploi
Motifs autres    Précisez _______________

C2a  S’il s’agit d’une garde conjointe, est-ce que vous et l’autre parent partagez :
La résidence de (prénom de l’enfant)
La prise des décisions importantes relatives à (prénom de l’enfant)
L’information sur (prénom de l’enfant)

C3  Pendant combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il/elle habité avec vous au cours des 12 derniers mois?
      ____mois ou
      ____semaines ou
      ____jours
      Pas du tout

C4  Combien de temps (prénom de l’enfant) a-t-il/elle habité avec vous au cours du dernier mois?
      ____jours
      ____nuitées
      ____semaines
      ____heures
      Pas du tout dans le courant du dernier mois

C5  Au cours des 12 derniers mois, à quelle fréquence avez-vous eu des contacts avec (prénom de l’enfant) par lettre ou par téléphone alors que (prénom de l’enfant) n’habitait pas chez vous?
      Tous les jours
      Au moins une fois par semaine
      Au moins une fois par mois
      Moins d’une fois par mois
      Pas du tout

C6  L’autre domicile de (prénom de l’enfant) se trouve-t-il :
Dans un rayon de 10 km (dans la même collectivité)
Dans une collectivité avoisinante accessible par voie de terre (jusqu’à dix heures de route)
Dans une autre collectivité du Nunavut ou des T.N.-O., accessible par avion seulement
Au Canada ou aux États-Unis, mais hors du Nunavut ou des T.N.-O.
Hors du Canada ou des États-Unis

C7  Versez-vous ou recevez-vous une pension alimentaire pour (prénom de l’enfant)?
Oui, je verse une pension alimentaire
Oui, je reçois une pension alimentaire
Non, je ne verse ni ne reçois de pension alimentaire

C8  Procurez-vous ou recevez-vous d’autres formes d’aide matérielle pour (prénom de l’enfant)?
Oui, je fournis une aide matérielle
Oui, je reçois une aide matérielle
Non, je ne fournis aucune aide matérielle et n’en reçois pas

C9  La pension alimentaire ou l’aide matérielle sont-elles une source de problèmes entre le père de (nom de l’enfant) et vous?
       Oui
       Non

C10  Est-ce que le fait de ne recevoir aucune pension alimentaire pour enfant ou autre aide, le cas échéant, constitue un problème pour (prénom de l’enfant)?
       Oui       Pourquoi?
       Non       Pourquoi?

SI UNE PENSION ALIMENTAIRE EST VERSÉE

C11  À quelle fréquence versez-vous la pension alimentaire?
Régulièrement — Au moins une fois par mois
Assez régulièrement — plusieurs fois par année
Quand je travaille ou que je couds régulièrement
De temps en temps

C12  Pourquoi versez-vous une pension alimentaire pour (prénom de l’enfant)?
Sens des responsabilités envers les enfants
Ordonnance de la cour
Entente
La personne qui a la garde de l’enfant me l’a demandé
Autre (précisez) ________________________

SI AUCUNE PENSION ALIMENTAIRE N’EST VERSÉE

C13  Pourquoi ne versez-vous aucune pension alimentaire pour (prénom de l’enfant)?
On ne me l’a pas demandé
Aucune ordonnance de la cour
Je garde souvent les enfants
Je m’occupe déjà financièrement des enfants de ma nouvelle famille
Je n’ai aucune obligation de le faire  Pourquoi? ____________________________
Autre (précisez)  ___________________________

C14  Êtes-vous satisfaite ou mécontente de l’entente sur les conditions de résidence de l’enfant?
Satisfaite
Mécontente
Sans opinion

C14a  Pourquoi êtes-vous satisfaite ou mécontente? _________________

C15  Êtes-vous satisfaite ou mécontente de la fréquence des contacts que vous avez avec (prénom de l’enfant)?
       Satisfaite
       Mécontente
       Sans opinion

C15a  Pourquoi êtes-vous satisfaite ou mécontente? ______________________

C15b  Avez-vous tenté de modifier l’entente sur les conditions de résidence de l’enfant ou la fréquence des contacts que vous avez avec (prénom de l’enfant)?
Oui
Non

C15c  Quels moyens avez-vous utilisés pour modifier l’entente sur les conditions de résidence de l’enfant ou à la fréquence des contacts avec lui?
Recours au tribunal
Entente avec la personne qui s’occupe de l’enfant
Entente avec l’enfant
Entente par l’intermédiaire d’une tierce personne       Qui____________
Autre

PARTIE D : QUAND (PRÉNOM DE L’ENFANT) N’HABITE PAS AVEC LES DEUX PARENTS.
(Si l’un des parents est décédé ou que les enfants habitent avec les deux parents, veuillez vous reporter à la partie E) D1  Avez-vous déjà conclu une entente avec une autre personne à propos de la garde de l’enfant ou de la pension alimentaire pour (prénom de l’enfant)?
Oui, mais nous ne l’avons jamais écrite
Oui, nous avons une entente écrite
Non, nous n’avons aucune entente
Non, la cour a rendu une ordonnance

D2  Avez-vous obtenu des conseils d’une source extérieure concernant la garde de vos enfants ou la pension alimentaire?
Oui
Non

D3  Si oui, quelle était cette source :
Parent
Aîné
Amis
Travailleur social
Travailleur social auprès des tribunaux
Avocat
Autre (précisez)____________________

S’il existe une entente ou une ordonnance de la cour relative à la garde des enfants


D4  Diriez-vous que, dans l’ensemble, le temps que vous passez auprès de vos enfants correspond :
À peu près aux termes de l’entente/de l’ordonnance de la cour?
À moins que les termes de l’entente/de l’ordonnance de la cour?
À plus que les termes de l’entente/de l’ordonnance de la cour?

PARTIE E : POUR TOUS LES PARENTS (NE RÉPONDEZ QU’UNE SEULE FOIS POUR TOUS LES ENFANTS)

E1  Dans l’ensemble, êtes-vous satisfaits du temps que vous pouvez consacrer à vos enfants?
Très satisfait
Assez satisfait
Pas très satisfait
Pas du tout satisfait

E1a  Pourquoi_____________________________

E2  Je pense que je suis une meilleure mère que ma mère/ma mère substitut?
Tout à fait d’accord
D’accord
En désaccord
Tout à fait en désaccord
Sans opinion

SECTION — MARIAGE

1  Quel est votre état matrimonial actuel?
Êtes-vous…marié(e) légalement et non séparé(e)?
…marié(e) légalement et séparé(e)?
…divorcé(e)?
…veuf ou veuve?
…jamais légalement marié(e)?

2  Avez-vous déjà vécu en union de fait (dans une union de fait, les conjoints composent un couple qui a eu des relations sexuelles et a partagé la même adresse pendant au moins une année)
Oui
Non — Sauter la section sur « les unions de fait » — Veuillez vous reporter à la section sur la vulgarisation juridique

3  Où vous et votre partenaire habitez-vous?
Dans une maison dont nous sommes propriétaires
Dans une maison louée
Dans la maison d’une tierce personne
Autre _________________

Veuillez vous rappeler que vous n’êtes pas tenu(e) de répondre à toutes les questions. Certaines personnes pourraient trouver difficile de répondre aux deux questions suivantes. Elles concernent le mariage.

4  Dans l’ensemble, diriez-vous que votre relation est…
Très heureuse
Assez heureuse
Pas très heureuse

5  Diriez-vous que votre conjoint(e) gagne
… beaucoup moins que vous
… un peu moins que vous
… à peu près la même chose que vous
… un peu plus que vous
… beaucoup plus que vous
…je ne sais pas

SI VOUS ÊTES CÉLIBATAIRE OU CONJOINT(E) DE FAIT SEULEMENT :

6  Pensez-vous vous marier un jour?
       Oui
       Non
       Pourquoi? ____________________

(Si célibataire, conjoint(e) de fait, n’ayant jamais été marié(e), veuillez vous reporter à la section UNIONS DE FAIT)

PARTIE A — SI VOUS ÊTES MARIÉ(E), MARIÉ(E) ET SÉPARÉ(E), OU DIVORCÉ(E)

A1  En quel mois et en quelle année vous êtes-vous marié(e)?
       mois ___ /année ___

A2  Quel était l’état matrimonial de votre conjoint(e) avant votre mariage?
       Veuf ou veuve
       Divorcé(e)
       Célibataire
       Je ne sais pas

A3  Est-ce que votre conjoint(e) a vécu en union de fait avec une autre personne avant votre mariage?
       Oui
       Non
       Je ne sais pas

A4  Est-ce que votre conjoint(e) a des enfants d’une relation antérieure, que vous n’avez pas élevés?
       Oui
       Non
       Je ne sais pas

Si la conjointe ou le conjoint a des enfants, veuillez demander :

A4a  Combien?
       ___ enfants
       Je ne sais pas

A4b  Est-ce qu’un ou plusieurs de ces enfants a 18 ans ou moins?
       Oui. Le cas échéant, combien? _____
       Non

Si la conjointe ou le conjoint a des enfants de 18 ans ou moins, veuillez demander :

A4c  Est-ce que votre conjoint(e) verse une pension alimentaire pour ces enfants?
       Oui
       Non
A4d  Au cours des 12 derniers mois, combien de fois votre conjoint(e) a-t-il/elle vu son enfant ou ses enfants?
Tous les jours, incluant des nuitées sur une base régulière
Tous les jours, mais sans nuitée en général
Au moins deux fois par semaine, incluant des nuitées
Au moins une fois par semaine, incluant une nuitée
Au moins une fois par semaine, mais rarement de nuitées
Au moins une fois par mois
Moins d’une fois par mois
Pas du tout

A5  Est-ce que votre conjoint(e) et vous-même viviez en union de fait avant le mariage?
       Oui
       Non

A6  En quel mois et en quelle année votre conjoint(e) et vous-même avez-vous commencé à vivre ensemble?
       mois ___/année ___

SÉPARATIONS TEMPORAIRES

A7  Votre conjoint(e) et vous-même avez-vous déjà connu une séparation temporaire?
            Oui       Combien de fois____________
            Non

Si vous avez repris la vie commune après la séparation

A7a  Pourquoi avez-vous repris la vie commune? (cochez toutes les réponses qui s’appliquent)
Manque d’argent
Promesse de modifier le comportement
Amour
Les enfants voulaient être avec l’autre parent
Pression sociale (voisins, parents, etc.)
Autre : (précisez)__________________

A8  Est-ce votre premier mariage?
Oui
Non   Si la réponse est non et que le participant/la participante est actuellement marié(e), veuillez-vous reporter à la question B1

SI LE PARTICIPANT/LA PARTICIPANTE EST ACTUELLEMENT MARIÉ(E) ET N’EST PAS SÉPARÉ(E) OU N’A JAMAIS DIVORCÉ, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA SECTION SUR LES UNIONS DE FAIT

A9  En quel mois et en quelle année la séparation est-elle survenue dans votre mariage actuel?
       mois ___/année ___

A10  Quelle était la raison principale de la rupture (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Usure du couple
Le participant/la participante à l’enquête avait une relation avec quelqu’un d’autre
Le conjoint ou la conjointe avait une relation avec quelqu’un d’autre
Violence
Consommation abusive d’alcool ou de drogues
Le couple ne pouvait avoir d’enfant
Autre : (précisez)________________________

A11  Après la séparation, avez-vous continué d’habiter au même endroit?
J’ai quitté le domicile
Mon conjoint/ma conjointe a quitté le domicile
Nous avons tous deux quitté le domicile

A12  Êtes-vous divorcé(e) actuellement?
       Oui
       Non

A12a  Avez-vous demandé le divorce?
       Oui
       Non
       Pourquoi ou pourquoi pas : _______________________________

A12b  Quand le divorce a-t-il été prononcé?
       mois____ /année____

SI LE PARTICIPANT/LA PARTICIPANTE EST SÉPARÉ(E) ET A DES ENFANTS

A13  De façon générale, la réaction de vos enfants à la séparation a été :
Très positive
Positive
Négative
Très négative
Sans réaction

A13a  Pourquoi? ______________________

A14  Avez-vous reçu une pension alimentaire de votre conjoint(e) ou lui en avez-vous versé une quand le mariage a pris fin?
       Oui
       Non

A15  Avez-vous cherché à obtenir un avis juridique après votre séparation pour vous aider sur des questions concernant la garde, le droit de visite ou la pension alimentaire?
       Oui
       Non

A16  Avez-vous cherché conseil auprès de quelqu’un d’autre qu’un avocat?
Auprès de qui avez-vous cherché conseil? ____________

SI LE MARIAGE ACTUEL N’EST PAS LE PREMIER MARIAGE :

B1  En quel mois et en quelle année vous êtes-vous marié(e) pour la première fois?
       mois___/année___

B2  Quel était l’état matrimonial de votre premier époux/première épouse avant le mariage?
       Veuf ou veuve
       Divorcé(e)
       Célibataire (jamais légalement marié(e))

B3  Est-ce que vous et votre premier époux/première épouse aviez vécu en union de fait avant ce mariage?
Oui
Non

B4  Est-ce que votre premier mariage s’est terminé par…
Une séparation puis un divorce ou une annulation
Une séparation puis le décès de l’époux ou de l’épouse
Le décès de l’époux/de l'épouse — Veuillez vous reporter à B9
Le divorce ou l’annulation sans séparation
Autre      Précisez______________________________

B5  En quel mois et en quelle année la dernière séparation a-t-elle eu lieu?
mois___/année___

B6  En quel mois et en quelle année le divorce ou l’annulation ont-t-il eu lieu?
mois___/année___
Sans objet

B7  Quelle était la principale raison de la rupture (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Usure du couple
Violence
Le participant/la participante à l’enquête avait une relation avec quelqu’un d’autre
Le conjoint/la conjointe avait une relation avec quelqu’un d’autre
Consommation abusive d’alcool ou de drogues
Le couple ne pouvait pas avoir d’enfant
Autre : (précisez)________________________

B8  Dans l’ensemble, la réaction de vos enfants à la rupture a été :
Très positive
Positive
Négative
Très négative
Sans réaction
Pas d’enfant au moment du divorce.

B9  Est-ce que le mariage actuel est votre second mariage?
Oui
Non

B10  Au total, combien de fois avez-vous été marié(e) devant la loi?___ fois

SECTION — UNIONS DE FAIT
(Si le participant/la participante à l’enquête est actuellement marié(e) — ni séparé(e) ni divorcé(e) — veuillez vous reporter à la question 9)

1  Vivez-vous présentement en union de fait (dans une union de fait, les conjoints composent un couple qui a eu des relations sexuelles et a partagé la même adresse pendant au moins une année, ou un couple qui vit ensemble depuis assez longtemps avec un enfant)
Oui
Non
Si la réponse à la question 1 est non, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA SECTION SUR L’ENFANCE!

2  En quel mois et en quelle année votre conjoint(e) et vous avez-vous commencé à vivre ensemble?
mois___/année___

3  Quel était l’état matrimonial de votre conjoint(e) avant d’entreprendre la vie commune?
Veuf ou veuve
Séparé(e)
Divorcé(e) (ou précédent mariage annulé)?
Célibataire

4  Est-ce que votre conjoint(e) vivait en union de fait avec quelqu’un d’autre avant de vivre avec vous?
Oui
Non

5  Où votre conjoint(e) et vous-même vivez-vous?
Dans une maison dont nous sommes propriétaires
Dans une maison que nous louons
Dans la maison de quelqu’un d’autre
Autre _________________

Veuillez vous rappeler que vous n’êtes pas tenu(e) de répondre à toutes les questions. Certaines personnes pourraient trouver difficile de répondre aux deux questions suivantes.

6  Dans l’ensemble, diriez-vous que votre relation est…
Très heureuse
Assez heureuse
Pas très heureuse

7  Diriez-vous que votre conjoint(e) gagne
…beaucoup moins que vous
…un peu moins que vous
…à peu près la même chose que vous
…un peu plus que vous
…beaucoup plus que vous

8  Est-ce que votre conjoint(e) a des enfants d’une relation antérieure, que vous n’avez pas élevés?
Oui
Non
Je ne sais pas

Si le conjoint/la conjointe a des enfants, veuillez demander :

8a  Combien?
      ___ enfants
      Je ne sais pas

8b  Est-ce que l’un ou l’autre de ces enfants a 18 ans ou moins?
      Oui. Combien? _____
      Non      Je ne sais pas

Si le conjoint/la conjointe a des enfants de 18 ans ou moins, veuillez demander :

8c  Est-ce que votre conjoint(e) verse une pension alimentaire pour ces enfants?
      Oui
      Non

8d  Au cours des 12 derniers mois, combien de fois votre conjoint(e) a-t-il/elle vu ces enfants?
Tous les jours, avec des nuitées sur une base régulière
Tous les jours, mais généralement sans nuitée
Au moins deux fois par semaine, y compris des nuitées
Au moins une fois par semaine, y compris une nuitée
Au moins une fois par semaine, mais rarement avec nuitée
Au moins une fois par mois
Moins d’une fois par mois
Pas du tout

8e  Au cours des 12 derniers mois, combien de fois votre conjoint(e) a-t-il/elle communiqué avec ces enfants par lettre, courriel ou téléphone?
Tous les jours
Au moins une fois par semaine
Au moins une fois par mois
Moins d’une fois par mois
Pas du tout

9  Avez-vous vécu une union de fait antérieure, non suivie d’un mariage?
Oui
Non

SI LA RÉPONSE À CETTE QUESTION EST NON, VEUILLEZ VOUS REPORTER À LA SECTION SUR L’ENFANCE


10  En quel mois et en quelle année votre première union de fait, qui n’a pas été suivie d’un mariage, a-t-elle commencé?
mois___/année___

11  À quel moment diriez-vous que votre relation a pris fin?
mois___/année___

12  Quelle était le principal motif de la rupture (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Usure du couple
Décès du partenaire
Violence
Le participant/la participante à l’enquête avait une relation avec quelqu’un d’autre
Le conjoint/la conjointe avait une relation avec quelqu’un d’autre
Consommation abusive d’alcool ou de drogues
Le couple ne pouvait avoir d’enfant
Autre : (précisez)________________________

13  Après la séparation, avez-vous continué d’habiter au même endroit?
J’ai quitté le domicile
Mon conjoint/ma conjointe a quitté le domicile
Nous avons tous deux quitté le domicile

14  Dans l’ensemble, quel effet cette séparation a-t-elle eu sur vos enfants?
Très positif
Positif
Négatif
Très négatif
Sans effet
Pas d’enfant au moment du divorce.

15  Avez-vous entretenu d’autres unions de fait non suivies d’un mariage?
Oui
Non

16  Combien d’unions de fait au total?____ unions de fait

17  Avez-vous reçu une pension alimentaire de votre conjoint(e) ou lui en avez-vous versé une quand l’union de fait a pris fin?
Oui
Non

18  Avez-vous demandé un avis juridique après la séparation d’avec un(e) conjoint(e) de fait pour vous aider avec la question de la garde, du droit de visite ou des pensions alimentaires?
Oui
Non

19  Avez-vous demandé les conseils d’une personne autre qu’un avocat?
Qui était cette personne? ____________

SECTION — VOTRE ENFANCE

J’aimerais vous poser quelques questions sur votre enfance.

1.  Quelles personnes vivaient avec vous quand vous étiez enfant? (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Mère naturelle
Père naturel
Mère adoptive
Père adoptif
Le/les parent(s) de la mère
Le/les parent(s) du père
Frères ou sœurs d’un parent
Un tuteur/une tutrice
Un frère ou une sœur
Un demi-frère ou une demi-sœur
D’autres personnes non apparentées (préciser)

2.  Avez-vous déjà été adopté(e)?
     Oui      Combien de fois____
     Non

2a  Quel âge aviez-vous au moment de l’adoption? ___ ans

2b  Avez-vous été adopté(e) selon les coutumes autochtones ou suite à une procédure judiciaire?
coutumes autochtones
procédure judiciaire

2c  Quelle était, le cas échéant, la relation entre votre mère naturelle et vos parents adoptifs?
Les parents adoptifs étaient les parents naturels de la mère
Les parents adoptifs étaient les parents naturels du père
Le parent adoptif était le frère ou la sœur du père naturel
Le parent adoptif était un parent (______________) de la mère naturelle
Le parent adoptif était un parent (______________) du père naturel
Les parents adoptifs n’étaient pas apparentés, mais appartenaient à la même collectivité
Les parents adoptifs n’étaient pas apparentés et n’étaient pas de la même collectivité

Si vous n’avez pas vécu avec l’un ou l’autre de vos parents naturels dans votre première année de vie,

3.  Avez-vous déjà vécu avec l’un ou l’autre de vos parents naturels?
Oui, avec les deux (passer à la question 6a)
Oui, avec ma mère naturelle (passer à la question 6)
Oui, avec mon père naturel (passer à la question 6)
Non (passer à la question 11)

Si la personne a vécu avec ses deux parents naturels ou adoptifs dès la naissance, demandez : (S’il s’agit d’un seul parent, passer à la question 6)

4.  Vos parents étaient-ils mariés devant la loi?
     Oui
     Non

5.  Avez-vous vécu avec vos deux parents durant toute votre enfance?
     Oui       passer à la question 16
     Non      passer à la question 7

Si la personne a vécu avec un seul parent naturel ou adoptif dès la naissance, demandez :

6.  Vos parents ont-ils déjà vécu ensemble?
      Oui    Quel âge aviez-vous quand vos parents vivaient ensemble?
                De __ à ___ ans
      Non

6a.  Si oui, vos parents ont-ils déjà été mariés devant la loi?
      Oui
      Non

7.  Est-ce que l'un ou l'autre de vos parents est décédé durant votre enfance?
     Mère      Quel âge aviez-vous? ___
     Père      Quel âge aviez-vous? ___
     Non

7a.  Viviez-vous avec le parent au moment de son décès?
       Oui
       Non

8.  Vos parents se sont-ils déjà séparés ou ont-il divorcé?
      Oui      Quel âge aviez-vous au moment de la séparation de vos parents? ___ ans
      Non      (Passer à la question 9)

8a  Vos parents ont-ils eu recours au tribunal pour obtenir le divorce?
      Oui
      Non

8b  Viviez-vous avec vos deux parents à l’époque?
      Oui
      Non

8c  Avec qui avez-vous vécu après la séparation de vos parents? (cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Mère
Père
Grands-parents maternels
Grands-parents paternels
Autre (précisez)___________________

8d  Avez-vous maintenu le contact avec vos deux parents après la séparation?
      Oui
      Non

8e  Est-ce que le parent avec lequel vous ne viviez pas a versé une pension alimentaire pour vous après la séparation?
      Oui
      Non

SI LE PARTICIPANT/LA PARTICIPANTE À L'ENQUÊTE A CESSÉ DE VIVRE AVEC L'UN OU L'AUTRE DES PARENTS, VEUILLEZ PASSER À LA QUESTION 11

Si le participant/la participante A CONTINUÉ de vivre avec un parent…

9.  Est-ce que le parent avec lequel vous viviez entretenait une union de fait avec une personne autre que votre autre parent?
     Oui        Combien (d’autres) unions de fait? ______
     Non

10.  Est-ce que le parent avec lequel vous viviez s’est remarié?
       Oui        Combien de fois_______
       Non

11.  Y a-t-il une période de votre enfance pendant laquelle le ménage dans lequel vous viviez ne comptait qu’un seul adulte?
        Oui                   Combien de temps cette situation a-t-elle duré mois___/année___
        Non

12.  Durant votre enfance, à part votre mère, y a-t-il eu une d’autres femmes qui vous ont élevé(e), selon vous?
       Oui                   Combien? ____
       Non

13.  Quelle était leur relation avec vous? (s’il y a plus d’une femme, cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Grand-mère
Belle-mère
Conjointe du père
Tante
Soeur
Mère substitut
Mère adoptive (si vous avez été adopté(e) quand vous étiez plus âgé(e))
Autre

14.  Durant votre enfance, à part votre père, y a-t-il eu d’autres hommes qui vous ont élevé(e), selon vous?
       Oui                   Combien? ____
       Non

15.  Quelle était leur relation avec vous (s’il y a plus d’un homme, cochez plus d’une réponse si nécessaire)
Grand-père
Beau-père
Conjoint de la mère
Oncle
Frère
Père substitut
Père adoptif (si vous avez été adopté(e) quand vous étiez plus âgé(e))
Autre

Tous les participants/tous les participants à l’enquête

16.  Avez-vous déjà fait des fugues?
       Oui                   Combien de fois ___
       Non

17.  Quelle était la principale source de revenu de votre mère ou de la femme qui vous a élevé(e)?

Source de revenu

Rôle de mère 1

Rôle de mère 2

Rôle de mère 3

Emploi à temps plein

 

 

 

Emploi à temps partiel

 

 

 

Revenus occasionnels

 

 

 

Activités traditionnelles (couture, peaux, etc.)

 

 

 

Soutien du revenu

 

 

 

Argent d’autres membres de la famille (préciser)

 

 

 

Autre (préciser)

 

 

 


18.  Quelle était la principale source de revenu de votre père ou de l'homme qui vous a élevé(e)?

Source de revenu

Rôle de père 1

Rôle de père 2

Rôle de père 3

Emploi à temps plein

 

 

 

Emploi à temps partiel

 

 

 

Revenus occasionnels

 

 

 

Activités traditionnelles (couture, peaux, etc.)

 

 

 

Soutien du revenu

 

 

 

Argent d’autres membres de la famille (préciser)

 

 

 

Autre (préciser)

 

 

 

19.  Combien de frères et de sœurs issus des mêmes parents avez-vous eus? _____

20.  Avez-vous eu des demi-frères ou des demi-sœurs (issu(e)s d’un même parent)?
       Oui       Combien? ____
       Non

21.  Avez-vous eu des demi-frères ou des demi-soeurs par alliance (enfants du conjoint ou de la conjointe de votre parent)?
        Oui    Combien? ____
        Non

Les questions suivantes sont plutôt intimes. Je vous rappelle que les réponses aux questions demeureront confidentielles et que vous n’êtes pas tenu(e) d’y répondre.

22.  Avec le recul, durant votre enfance, étiez-vous?
Très heureux/heureuse
Assez heureux/heureuse
Pas très heureux/heureuse
Malheureux/malheureuse

23.  Est-ce que la protection de l’enfance est déjà intervenue dans votre famille?
Oui
Non

23b  Quand la protection de l’enfance est intervenue, était-ce à l’occasion d’un événement majeur dans l’histoire de votre famille?
Adoption
Séparation des parents
Séparation d’un parent et du nouveau conjoint ou de la nouvelle conjointe
Décès d’un parent
Autre
Aucun événement en particulier

24.  Est-ce que les membres du ménage dans lequel vous viviez consommaient de l’alcool ou des drogues quand vous étiez enfant? Répondez sur une échelle de 1 à 10 où 1 = aucune consommation et 10 = abus graves et répétés.____

25.  Y avait-il de la violence dans ce ménage quand vous étiez enfant? Répondez sur une échelle de 1 à 10 où 1 = aucune violence et 10 = violence fréquente et intense.____

SECTION — VULGARISATION JURIDIQUE

J’aimerais vous poser quelques questions sur vos connaissances du droit et des services disponibles.

1.  Avez-vous déjà entendu parler…
De l’Aide juridique pour résoudre des problèmes familiaux
Du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires
Des Lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants
Des travailleurs sociaux ou des conseillers familiaux
Des membres des groupes paroissiaux en tant que conseillers familiaux
Des comités de justice communautaire pour résoudre des problèmes familiaux

2.  Avez-vous déjà utilisé l’un des services suivants… Si c’est le cas, pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez eu recours à ce service? Si vous avez déjà utilisé le service à des fins diverses, précisez le cas le plus récent.

Service

Utilisation

Objet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


NE POSEZ LA QUESTION QU’AUX PARTICIPANT(E)S QUI SE SONT SÉPARÉ(E)S OU QUI ONT DIVORCÉ…

(Pour les autres, veuillez vous reporter à la question 6)

3.  Au moment de la séparation ou du divorce, avez-vous demandé les conseils de…

___ ami  sur ___ garde/droit de visite des enfants
___ membre de la famille   ___ contact avec les enfants
___ travailleur social   ___ pension alimentaire pour enfants
___ ministre du culte/prêtre   ___ violence/sécurité
___ avocat   ___ adoption
___ travailleur social à la cour   ___ mariage/remariage
___ ministre du culte/prêtre    
___ avocat    
___ travailleur social à la cour    
___ membre d’un groupe paroissial    

4.  Saviez-vous que…

•  La loi exige que les deux parents continuent de pourvoir aux besoins de leurs enfants après la séparation ou le divorce?
   Oui ____/Non____

•  Le gouvernement du Nunavut procure des services pour faire exécuter les ordonnances et les ententes sur la pension alimentaire versée au conjoint ou aux enfants?
   Oui ____/Non____

•  L’un ou l’autre des parents peut recourir au tribunal pour demander la garde ou le droit de visite des enfants?
   Oui ____/Non___

•  Un(e) conjoint(e) de fait peut recourir au tribunal pour obtenir une pension alimentaire pour lui/elle ou les enfants au moment de la séparation?
   Oui____/Non____

•  Les conjoints de fait ou mariés peuvent recourir au tribunal pour le partage du patrimoine familial?
   Oui___/Non___

5.  Selon vous, est-il important que les résidents du Nunavut sachent que…

•  La loi exige que les deux parents continuent de pourvoir aux besoins de leurs enfants après la séparation ou le divorce?
   Oui ____/Non____ Pourquoi?

•  Le gouvernement du Nunavut procure des services pour faire exécuter les ordonnances et les ententes sur la pension alimentaire versée au conjoint ou aux enfants
   Oui ____/Non____ Pourquoi?

•  L’un ou l’autre des parents peut recourir au tribunal pour demander la garde ou le droit de visite des enfants?
   Oui ____/Non___

•  Un(e) conjoint(e) de fait peut recourir au tribunal pour obtenir une pension alimentaire pour lui/elle ou les enfants au moment de la séparation?
   Oui____/Non____

•  Les conjoints de fait ou mariés peuvent recourir au tribunal pour le partage du patrimoine familial?
   Oui___/Non___

8.  Si vous-même ou des personnes de votre connaissance aviez besoin d’information sur le divorce ou la séparation, et particulièrement sur les pensions alimentaires pour enfants, la garde et le droit de visite des enfants, auprès de qui iriez-vous chercher l’information…
      Avocat
      Travailleur social auprès des tribunaux
      Travailleur social
      Centre communautaire
      Groupe paroissial ou ministre du culte
      Aîné
      Ami
      Membre de la famille
      Autre (précisez)

9.  Quelle est, à votre avis, la meilleure façon de transmettre l’information aux résidents du Nunavut?
      Radio
      Télévision
      Internet
      Articles dans les journaux
      Affiches


ANNEXE III
OUTIL DE L’ENQUÊTE — RÉPERTOIRE DES SERVICES

1.  Connaissez-vous des personnes ou des familles de votre collectivité qui font face à des difficultés suite à une séparation ou à un divorce?

2.  Des problèmes concernant la garde et le droit de visite des enfants?

3.  Des problèmes avec un autre parent concernant le versement d’une pension alimentaire?

4.  Des problèmes de violence?

5.  Existe-t-il des services pour ces personnes? Quels sont les principaux services?

6.  Est-il possible de recourir à certains services particuliers de la collectivité?

7.  Le travailleur social traite-t-il des problèmes liés au droit de la famille?

8.  Votre collectivité a-t-elle bénéficié des services continus d’un travailleur social au cours des deux dernières années?

9.  Travaille-t-il à temps plein?

10.  Votre collectivité bénéficie-t-elle des services d’un travailleur auprès des jeunes?

11.  Quel genre d’activités organise-t-il?

12.  Travaille-t-il à temps plein?

13.  Y a-t-il un conseiller en orientation dans votre collectivité? Quel rôle y joue-t-il et comment?

14.  Y a-t-il des groupes paroissiaux actifs dans votre collectivité?

15.  Jouent-t-ils un rôle dans la résolution des conflits familiaux? Comment?

16.  Y a-t-il des groupes de femmes actifs dans votre collectivité?

17.  Y a-t-il des services de consultation pour les problèmes d’alcoolisme et de toxicomanie?

18.  Est-ce que les gens ont recours à des avis juridiques pour résoudre les problèmes de séparation ou de divorce?

19.  À qui les gens s’adressent-ils pour obtenir des avis juridiques? (travailleur social auprès du tribunal, juge de paix, avocat)

20.  Y a-t-il d’autres services disponibles?

21.  En cas de séparation ou de divorce, les famille font-elles face à des problèmes pour lesquels aucun service n’est fourni?


ANNEXE IV
LA STRATÉGIE DU NUNAVUT EN MATIÈRE DE DROIT DE LA FAMILLE

Contexte — en quoi consiste le statu quo?

Au Nunavut, il existe relativement peu de ressources pour les personnes aux prises avec des problèmes relevant du « droit de la famille ». Bien des gens préfèrent ne pas avoir recours aux tribunaux pour déterminer leurs droits ou leurs responsabilités en cas de séparation ou de divorce; souvent, des ententes informelles entre membres de la famille donnent de meilleurs résultats et durent plus longtemps.

Par ailleurs, d’après nos résultats, les personnes qui choisissent d’avoir recours au système juridique semblent n’avoir qu’un nombre limité de choix, souvent mal compris. Les personnes qui choisissent cette voie pour régler leurs problèmes familiaux ont généralement peu de succès. Sur la base des consultations menées dans les collectivités (qui seront décrites et analysées dans un document ultérieur) et sur les données préliminaires d’une étude sur les collectivités, nous avons tiré certaines conclusions sur l’état du droit de la famille.

Les principes juridiques sous-jacents

Nous avons d’abord voulu savoir si l’indifférence vis à vis du système du droit de la famille résultait d’un sentiment selon lequel les principes sous-jacents à ce système seraient en porte-à-faux avec la vie de la famille et la culture inuites. Or, nous avons découvert que, dans l’ensemble, ces principes étaient généralement bien acceptés. Lors de nos rencontres, la plupart des participants s’entendaient pour dire que l’intérêt supérieur de l’enfant devait régir toutes les décisions le concernant; que les parents qui avaient de l’argent devaient subvenir aux besoins de leurs enfants même si ceux-ci avaient cessé de vivre avec d’eux, et que les conjoints de fait ou les couples mariés devaient contribuer de façon égale, même si cela devait se faire de façon différente.

Une différence importante concerne le rôle important que continue de jouer la famille élargie pour combler les lacunes causées par des parents qui assument mal leur rôle ou qui sont absents. Ce rôle est très peu reconnu dans les campagnes d’information ou les services existants.

La pension alimentaire pour enfant

Comme nous l’avons mentionné, les collectivités soutiennent fortement la reconnaissance des obligations parentales envers les enfants. Nous en sommes venus à la conclusion que la pension alimentaire pour enfant constituait une priorité beaucoup plus élevée que la garde, le droit de visite ou la pension alimentaire pour conjoint. Une indication de l’importance d’appuyer l’élargissement du principe des pensions alimentaires pour enfants, est le message clair que nous avons reçu selon lequel les grands-parents et la famille élargie devraient, en tant que parents substituts, pouvoir recevoir une pension alimentaire s’ils ont la responsabilité d’élever un enfant.

Il est également clairement ressorti qu’il était déraisonnable d’exiger une pension d’une personne qui n’avait pas les moyens de la payer. De même, il était important de reconnaître et d’admettre des formes non monétaires d’aide matérielle aux enfants, et notamment de la nourriture traditionnelle.

On a également exprimé certaines inquiétudes sur la possibilité que la pension alimentaire pour enfant soit mal utilisée par un parent ou qu’elle constitue soit un motif de séparation ou de divorce soit un motif pour avoir plus d’enfants.

La garde et le droit de visite

Comme nous l’avons mentionné précédemment, la garde et le droit de visite ne semblent pas constituer une priorité. Quand les parents vivent dans la même collectivité, la garde et le droit de visite ne soulèvent apparemment pas de problème (à moins que l'enfant ne doive être protégé). Toutefois, la question de la garde et du droit de visite peut soulever des difficultés s’il y a de grandes distances à parcourir : quand un parent emmène avec lui les enfants dans une localité éloignée, l’autre parent a souvent peu de moyens pour faire valoir son droit de visite, vu le coût engendré par le déplacement.

De plus, quand les parents vivent dans des provinces différentes avec des législations différentes, il faut savoir laquelle de ces législations a préséance et parfois obtenir des décisions judiciaires de provinces différentes, tout cela crée passablement de confusion.

La pension alimentaire pour conjoint

Tout comme dans le Sud du Canada, on saisit parfois mal la notion de pension alimentaire versée au conjoint, et celle-ci n’obtient pas toujours le soutien de la collectivité. Bien que le principe de la « contribution égale » dans le couple soit bien compris et semble accepté, les conséquences juridiques qui découlent de ce principe le sont moins et bénéficient d’un soutien mitigé. La question de la pension alimentaire pour conjoint a fait très peu l’objet de discussions.

Le domicile conjugal

Dans l’ensemble, on a reconnu sans hésitation que la personne qui rompait le mariage perdait souvent l’accès au domicile conjugal. Les participants ont estimé en général que, lorsque la personne quitte le domicile en emmenant les enfants, ou parce qu’il y a de la violence, cette situation crée beaucoup d’injustice, en plus d’imposer un fardeau à la famille et aux refuges. En même temps on a reconnu que ce problème était difficile à résoudre en raison de la pénurie de logements et en raison de la violence qui nuit à la capacité des personnes d’exercer leur droit à une occupation continue. Il arrive souvent que le conjoint ou la conjointe n’ait nulle part où aller.

L’obligation de demander la pension alimentaire pour enfant

Le soutien du revenu ne semble pas rendre exécutoire l’obligation de demander une pension alimentaire aux parents ou à un(e) ancien(ne) conjoint(e) qui y aurait eu droit. Les pensions alimentaires ne sont perçues que lorsqu’elles sont versées par l’intermédiaire du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. D’après le personnel du soutien du revenu, le droit à la pension alimentaire pour enfant n’est pas un droit que les gens exercent facilement et, en fait, ils ne le demandent pas.

L’information juridique

Dans l’ensemble, le niveau de l’information juridique dans les collectivités est assez faible.

Les gens ignorent les cas dans lesquels ils ont droit à une pension alimentaire (surtout dans le cas des unions de fait, des personnes qui ont eu un enfant après une relation très brève, ou des membres de la famille élargie qui élèvent des enfants). Les gens en général ignorent le niveau de soutien financier auquel ils ont droit et ne sont pas au courant des Lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants qui servent à calculer le montant de ces pensions. Ils sont peu au courant des choix juridiques qui régissent la garde et le droit de visite et, en particulier, ne semblent pas considérer le recours au tribunal comme une option possible si l’un des parents emmène les enfants vivre dans un autre lieu sans l’accord préalable de l’autre parent.

La pension alimentaire pour enfant n’est pas toujours nécessairement bien comprise non plus. Dans bien des cas, on a tendance à penser qu’il s’agit d’un programme gouvernemental visant à pourvoir aux besoins des enfants plutôt que d’une obligation parentale. Bien que des affiches sur les pensions alimentaires pour enfants aient été largement diffusées dans les collectivités, elles ne mentionnaient pas la pension alimentaire destinée aux enfants.

Pour un nombre très important de personnes, la fonction du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires était aussi inconnue. Cela n’est pas surprenant si l’on considère que très peu de personnes (moins de 200) ont obtenu des ordonnances de la cour.

Tandis que les collectivités exprimaient le besoin d’être mieux informées, les participants à nos rencontres manifestaient très clairement le besoin d’une information juridique utile. Ils demandaient une information extrêmement claire et précise. Plus important encore, il demandaient une information appuyée par des services afin qu’on puisse poser des questions et obtenir de l’aide. L’information qui énonce des droits sans fournir les moyens de les faire valoir n’était pas considérée comme utile.

Cette conclusion corrobore tout à fait nos conclusions sur le processus global entourant le droit de la famille.

Le processus

Le résultat le plus important de notre recherche est le fait qu’un grand nombre de personnes ont tenté, sans succès, d’utiliser le système du droit de la famille ou ont eu des difficultés en essayant d’y recourir. Il semble que leurs efforts pour utiliser le système aient été constamment entravés par un ensemble d’obstacles systémiques. La plupart des gens abandonnent le processus bien avant de s’adresser au tribunal.

  • Premièrement, le processus décourage bon nombre de personnes avant même de s’adresser au tribunal car, dans bien des cas, l’exercice de ces droits risque d’être perçu comme la provocation d’un conflit qui par ailleurs n’existe pas. La forte association qui se fait entre tribunal et pouvoir coercitif du droit pénal constitue un autre puissant facteur qui empêche certaines personnes de recourir au droit de la famille pour régler leurs problèmes. Les membres de la communauté n’ont pas l’impression d’avoir le contrôle de la situation en empruntant cette voie.
  • Deuxièmement, il existe un manque flagrant de services de consultation pour les couples qui désirent rester ensemble.
  • Troisièmement, en cas de rupture, les ressources sont insuffisantes pour faire respecter les droits et les obligations découlant du droit de la famille.
  • Il n’y a pas suffisamment d’avocats — rien qu’au Nunavut il y a 70 dossiers relevant du droit de la famille en attente à l’Aide juridique; il n’y a que deux avocats spécialisés en droit de la famille et tous deux travaillent pour l’Aide juridique.
  • Il semble que les gens ne recourent pas aux travailleurs sociaux auprès des tribunaux pour les questions de droit de la famille. Ces travailleurs ne possèdent ni les connaissances ni la formation suffisante; en outre, ils se retrouvent souvent en conflit d’intérêts quand il s’agit de représenter une personne dans une affaire criminelle.
  • Les travailleurs sociaux sont surchargés de travail et leurs interventions auprès des familles semblent se limiter à la protection de l’enfance. Les gens ne semblent pas considérer les travailleurs sociaux comme une ressource.
  • Quatrièmement, les gens sont dépassés par le processus — les ententes ne sont pas finalisées, les gens ne se présentent pas au tribunal, les ordonnances ne sont pas déposées au bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, etc.
  • Cinquièmement, la plupart des ordonnances déposées au bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires font l’objet de défauts de paiement et, la plupart du temps, de défauts de paiement graves.
  • Sixièmement, la plupart des gens qui utilisent le système judiciaire ne semblent pas le comprendre. Par exemple, certains payeurs ne savent pas comment faire modifier une ordonnance qui exige d’eux le versement de sommes excédant de beaucoup leur revenu. Ou encore, les bénéficiaires ne savent pas quoi faire quand ils obtiennent une ordonnance, ou après un ajournement décidé pour obtenir davantage d’information. Aucune des deux parties ne semble savoir quoi faire advenant l’intervention du tribunal d’une autre province ou territoire. En somme, le processus semble détourner les parties des problèmes proprement dits et fait qu’elles n’ont plus le contrôle de la situation.

Les conflits

Les cas pour lesquels les gens font une demande d’aide juridique ne concernent pas toujours des conflits; les conflits, dans bien des cas, sont relativement peu importants. En revanche, bien souvent, les clients de l’aide juridique sont des personnes qui ont besoin d’aide en cours de processus, et besoin d’information sur leurs droits. Actuellement, il n’existe aucun moyen pour gérer les besoins de ces personnes.

Cela étant dit, un grand nombre de cas concernent la violence au sein des familles, ce qui est significatif à bien des égards.

  • Souvent, quand il s’agit d’un problème de violence, tous les problèmes relevant du droit de la famille cèdent la place à la préoccupation beaucoup plus urgente de sécurité et de nécessité de « ramener les choses à la normale ». Le fait de prendre des mesures pour mettre fin à une relation est souvent malvenu, et les gens préfèrent essayer de voir s’il est possible de changer les comportements et d’aboutir à une réconciliation.
  • La violence explique souvent la réticence de certaines personnes à exercer leurs droits, en leur nom ou en celui de leurs enfants; elles peuvent souhaiter une séparation totale mais être intimidées au point de vouloir éviter toute confrontation.
  • Dans bien des cas, il y a des questions pénales à régler et bien qu’il soit nécessaire de prendre des mesures de protection supplémentaires pour rééquilibrer les situations, il est également clair que le fait d’être obligé de retourner au tribunal pour résoudre cette fois des questions relevant du droit de la famille a vraisemblablement un effet dissuasif vis à vis de ce droit.

Les objectifs de la stratégie en matière de droit de la famille

  • Sensibiliser les conjoints et les conjointes à leurs droits et à leurs obligations au moment de la séparation.
  • Mettre au point un « palier intermédiaire » de services pour aider les gens à gérer « à l’ombre de la loi » les problèmes relevant du droit de la famille.
  • De concert avec les collectivités et d’autres ministères gouvernementaux, travailler à mettre en place au niveau de la collectivité des services du droit de la famille offrant des possibilités de consultation et de médiation.

Les éléments du programme

Principes juridiques

Il ne s’agit pas d’un secteur important de changement. Les principes actuels sont assez bien acceptés et une réforme majeure du droit de la famille s’est poursuivie au cours des dix dernières années dans les T.N.-O.

Les deux secteurs où des changements pourraient s’imposer sont :

  • Une révision des règles de procédure et des formulaires pour faciliter le règlement précoce des conflits et aider les parties qui comparaissent sans la présence d’un avocat.
  • Élaborer des options en vue de faciliter une action rapide pour protéger contre la violence familiale ou la prévenir dans le cadre de lois axées sur les victimes, semblables à celles de la Saskatchewan ou du Manitoba. En vertu de ces lois, toute personne victime de violence familiale pourrait demander à un juge ou à un juge de paix une ordonnance de protection de sa personne ou de ses droits, et notamment une ordonnance requérant la possession exclusive du domicile.

Information juridique

  • S’assurer qu’au niveau des collectivités, la population a une meilleure connaissance des droits et des responsabilités que lui confèrent la Loi sur le droit de la famille, la Loi sur les droits de l’enfance et la Loi sur le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires.
  • Faire en sorte que l’information juridique soit disponible en anglais, en inuktitut et en inuinaqtun et dans des formats accessibles aux personnes qui ont des difficultés de lecture.
  • Faire en sorte que l’information juridique soit axée sur l’action et liée aussi clairement que possible à « l’étape suivante » du processus. Cela exigera non seulement une meilleure intégration des services mais aussi la création de nouveaux services.

Le processus

  • Améliorer l’intégration des services et instaurer un système de « guichet unique » pour les affaires relevant du droit de la famille, en élargissant les fonctions actuelles du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires pour en faire un « Bureau de soutien aux familles ».
  • Avec du personnel supplémentaire, améliorer les mécanismes visant à encourager la divulgation, la médiation et le règlement avant de soumettre les cas à la cour. Avec le temps, élargir les occasions qui permettront d’associer des services de la collectivité au Bureau de soutien aux familles.

Les résultats spécifiques de ces services élargis seraient

  • d’accroître le nombre des cas où les personnes qui font une demande de pension alimentaire pour enfant ou pour conjoint obtiennent une entente ou une ordonnance à cet effet;
  • de réduire le nombre des dossiers de l’Aide juridique en attente, par la mise en place d’un système permettant de résoudre les cas peu conflictuels;
  • de permettre aux parties d’avoir le sentiment de contrôler le processus, en ne faisant intervenir le tribunal qu’en dernier recours;
  • d’accroître le nombre des ordonnances véritablement exécutées — il est clair que les membres des collectivités se conforment beaucoup plus volontiers aux conditions d’une entente qu’aux ordonnances de la cour;
  • d’accroître la disponibilité des services en inuktitut;
  • de mettre sur pied des mécanismes d’accès rapide aux services de l’Aide juridique dans certaines circonstances, pour :
    • procéder à un contrôle juridique des ententes, dans la mesure où elles sont admissibles;
    • faciliter le règlement des causes hautement conflictuelles;
    • fournir des avocats aux clients pour les représenter en cas de violence;
    • s’assurer que les ordonnances en cours reflètent la capacité réelle de payer;
    • élargir, à un stade précoce, l’utilisation d’autres méthodes de règlement des différends, pour trouver, avant tout recours au tribunal, des solutions amiables aux défauts de paiement et aux arrérages.

Les services

À l’heure actuelle, le gouvernement fournit deux principales catégories de services : l’Aide juridique, dans le cadre de la Commission des services juridiques, et le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires.

Les services fournis dans le cadre de la Commission des services juridiques offrent une aide juridique complète à un nombre restreint de personnes. L’accès à ces services est très limitée, en raison du manque de ressources et du manque d’avocats spécialisés en droit de la famille au Nunavut (et dans les T.N.-O.). Il en résulte un nombre considérable de dossiers en attente. Avec seulement deux avocats en droit de la famille au Nunavut, les conflits d’intérêts sont également fréquents.

Le Programme d’exécution des ordonnances alimentaires se trouve également dans une double impasse. D’une part, le bureau est débordé de travail en raison de la transition par rapport aux T.N.-O. et du nombre important de défauts de paiement. D’autre part, il est largement admis que le nombre d’ordonnances ou d’ententes inscrites auprès du bureau d’exécution est nettement inférieur à ce qu’il devrait être, compte tenu du nombre de personnes, et surtout d’enfants, admissibles à une pension alimentaire au Nunavut.

Nos résultats étayent fortement la conclusion selon laquelle la quasi-inexistence de recours au système du droit de la famille résulte en fin de compte d’une insuffisance de services accessibles et adéquats et, plus précisément, de services de base intégrés. La principale fonction de ce rapport est de faire des recommandations sur l’orientation que doit prendre la mise en place de ces services, et sur la campagne d’information juridique qui doit promouvoir ces services. Il faudra de toute évidence des ressources additionnelles pour modifier la situation. Pendant la phase pilote, les sommes nécessaires pourraient certainement provenir des fonds fédéraux prévus pour l’Initiative relative aux pensions alimentaires pour enfants.

Un « bureau de soutien aux familles »

On peut envisager, grâce à des fonds fédéraux, l’élargissement des services du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires pour venir apporter de l’aide. Plusieurs provinces, en particulier la Colombie-Britannique, disposent de services extrajudiciaires qui aident les couples aux prises avec une rupture et qui n’ont pas accès aux services d’un avocat. En Colombie-Britannique, les deux tiers des familles qui se présentent devant la cour provinciale ne sont pas représentées par un avocat.

Le programme des conseillers auprès du tribunal de la famille de la C.-B. est particulièrement impressionnant. Des médiateurs ayant reçu une formation adéquate rencontrent le couple (d’abord chaque membre séparément) pour discuter de ses problèmes, lui procurer des conseils sur les choix juridiques qui s’offrent à lui, et faire état des droits et des responsabilités de chacun. Si les deux parties sont d’accord, le conseiller mettra au point, de concert avec les parties, une entente qui pourra être déposée à la cour et devenir exécutoire. Nous pourrions utiliser des fonds fédéraux pour engager une personne expérimentée et respectée qui dispenserait l’information et aiderait les gens à négocier des ententes « à l’ombre de la loi ».

Il sera important que les services offerts dans la collectivité le soient en inuktitut et en anglais. De façon plus générale, pour que le processus soit bien compris des personnes peu au courant du système juridique en général, nous recommandons le recrutement d’une personne inuite pour le poste, tout en sachant que cette personne aura besoin d’une formation en droit de la famille et en médiation.

En concentrant notre attention sur des services susceptibles d’aider les personnes à conclure des ententes, nous pourrions changer la perception selon laquelle la fonction du système juridique est de créer des conflits. En utilisant un processus que les parties contrôlent mieux, nous pourrons probablement parvenir à des résultats qui seront mieux compris,

Dans notre cas, il serait sans doute plus judicieux de mettre au point ce genre de services dans le cadre du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires plutôt que dans celui du tribunal de la famille, celui-ci n’étant pas très actif en ce moment. Cette intégration favoriserait la perception d’une continuité dans les services, car les gens pourraient s’adresser au même endroit pour obtenir de l’information sur les pensions alimentaires et d’autres questions relevant du droit de la famille, pour obtenir de l’aide dans la négociation des ententes ou des recommandations d’ordre juridique, et pour obtenir l’exécution des ententes ou des ordonnances.

La population comprenant assez mal la fonction du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, nous recommandons également un changement de profil du bureau, de manière à refléter les changements qui auront été mis en place. Au lieu d’être un « bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires », on pourrait parler d’un « bureau de soutien aux familles » ou d’un « bureau de soutien aux enfants ». Les gens comprennent déjà bien ces concepts; si nous élargissions l’éventail des services, le bureau de soutien aux familles pourrait être en mesure de remplir les fonctions annoncées par son nom, et nous pourrions concrétiser la promesse d’une intégration substantielle des services.

Dans le sens de cette intégration, nous recommandons de travailler de concert avec la Commission des services juridiques pour mettre en place des mécanismes d’accès rapide aux conseillers juridiques quand les personnes ont connu des problèmes avec le modèle de la médiation. On pourrait aussi vouloir mettre en place ces mécanismes pour obtenir un avis juridique indépendant sur les conditions d’une entente qui vient d’être conclue. Dans les cas non litigieux, cela pourrait réduire le rôle des avocats à une fonction de supervision afin, souhaitons-le, de réduire la surcharge de travail et la pile des dossiers en attente. Pour que ces mécanismes soient efficaces, il faudra probablement, vu leur petit nombre, la collaboration des avocats des différentes régions du Nunavut. La Commission des services juridiques pourrait aussi envisager la mise sur pied d’un système d’admissibilité présumée pour toute première visite à l’Aide juridique.

Les « audiences pour défaut de paiement » et les ententes obtenues grâce à la médiation

Cela fait quelques années qu’aucune audience pour défaut de paiement n’a été entendue au Nunavut de sorte que, dans de nombreux dossiers, les arrérages sont substantiels.

Il est nécessaire d’aider les membres des collectivités — souvent peu au courant du système judiciaire — à résoudre les difficultés résultant d’obligations alimentaires dues depuis longtemps sur lesquelles se greffent de nouvelles obligations alimentaires, sans parler des problèmes découlant des refus de paiement.

Au moment d’introduire à nouveau les audiences pour défaut de paiement, nous devrons considérer ce qui suit :

  • Comment faire en sorte que le recours au tribunal et le processus accusatoire demeurent un dernier recours?
  • L’élaboration d’un processus non accusatoire pour gérer les problèmes d’arrérages en première instance;
  • La question des règles de procédure civile, pour que les audiences soient menées avec un minimum de formalités — débiteurs comparaissant sans la présence d’un avocat et agente du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires se représentant elle-même.

Le Programme de vulgarisation et d’information juridiques

Nous devons commencer par organiser une campagne de vulgarisation juridique afin de compléter la mise en place d’un guichet unique pour les pensions alimentaires pour enfants. Ce PVIJ aura pour objectif principal de produire des documents que la population pourra utiliser.

Dans l'élaboration des documents du PVIJ, l’important sera de préparer l’étape suivante, soit — comme l’exprimait l’un des participants de Pond Inlet, « un numéro de téléphone qu’on peut composer pour obtenir plus d’information ». Cette demande, d’une source d’information et de services d’orientation juridique accessibles, pourra dans une certaine mesure se concrétiser avec l’implantation du « Bureau de soutien aux familles », qui comptera du personnel ayant pour fonction de répondre aux questions des membres de la collectivité sur le droit de la famille.

Il est absolument nécessaire de fournir des informations précises dans un certain nombre de secteurs cibles :

  • Les droits des conjoints ou conjointes de fait. Ces personnes ont des droits reconnus par la loi, pratiquement identiques à ceux des personnes mariées. La population comprend assez mal cette réalité. C’est en raison de ce manque de connaissance que bien des gens omettent d’exercer leurs droits de base, comme par exemple demander une pension alimentaire pour enfant, sans parler de la pension alimentaire pour conjoint ou du partage du patrimoine. Nous devons être sûrs d’avoir cette information pour prévenir la confusion quand différentes sources semblent donner des avis contradictoires (p.ex., d’après les Lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants, celles-ci ne s’appliquent qu’en cas de divorce).
  • Les grands-parents ou les autres membres de la famille élargie peuvent demander une pension alimentaire pour enfant quand ils élèvent un enfant. Il existe un nombre assez important de cas où les grands-parents ne font que « prendre soin » de l’enfant et n’ont aucune intention de l’adopter. Leur droit à une pension alimentaire et leur capacité de l’obtenir aux termes d’une entente sont des renseignements importants que la population doit connaître.
  • Les fonctions du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires.
  • Le message selon lequel la pension alimentaire pour enfant représente un droit de l’enfant — les affiches actuelles sur les pensions alimentaires pour enfant ne sont pas suffisamment explicites (un essai auprès de groupes cibles a révélé qu’un grand nombre de personnes ne comprenaient pas la teneur du message de ces affiches).
  • Comment sont gérées les affaires de droit familial entre provinces — quel est l’effet d’une ordonnance émise par le tribunal d’une province différente, comment contester une telle ordonnance.
  • Nous devons aussi nous assurer que les documents du PVIJ franchissent une autre étape, c’est-à-dire qu’ils fournissent aux membres de la collectivité les moyens de modifier leur propre rapport à la loi.
  • Une plus grande diffusion des Lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfant — un grand nombre de personnes utilisent et comprennent ces lignes directrices. Elles sont déjà disponibles en français et en inuktitut. Il est important de préciser que ces lignes directrices s’appliquent aussi aux conjoints de fait.
  • Des trousses sur le divorce. Nous proposons de mettre au point une trousse sur le divorce pour aider les personnes à présenter leur demande en divorce sans aide juridique. Cette tâche a été confiée à l’étudiant embauché pour l’été par le secteur des politiques du ministère. Nous espérons qu’avec l’existence de services d’aide à la négociation des ententes, ces trousses s’avèreront utiles aux personnes ayant des enfants mineurs, aux personnes sans enfant ou aux personnes avec des enfants adultes.
  • Des trousses à l’usage des personnes voulant s’adresser au tribunal

Les modifications aux lois ou aux règlements

Les règles de procédure civile régissent en fait un procès de nature accusatoire, soit un procès qui se termine devant le tribunal. On pourrait envisager de remanier les formulaires, et en fait de travailler sur l’ensemble du processus, de manière à simplifier la vie des plaideurs non représentés par un avocat.

La Commission d’examen des lois mènera des consultations permanentes sur le droit de la famille, notamment sur les questions relatives à la garde et au droit de visite. Ces consultations seront coordonnées avec les consultations de niveau FPT sur la garde et le droit de visite.

Nous ne prévoyons pas de modifications à la législation.

Activités à court terme

Printemps 2000

Première proposition soumise à l’Initiative relative aux pensions alimentaires pour enfants dans le but d’obtenir 210 000 $

Été 2000

Dans le cadre d’un emploi d’été, l’étudiant du secteur effectue le travail préliminaire pour :

  • La constitution d’une trousse sur le divorce, et la composition des dépliants du PVIJ en vue de l’ouverture d’un Bureau de soutien aux familles;
  • Une proposition de révision des règles de procédure;
  • L’aide à l’élaboration d’une approche de médiation pour les audiences pour défaut de paiement au bureau du Programme d’exécution des ordonnances, y compris quelques essais de médiation dans la région d’Iqaluit.

Recrutement d’un conseiller auprès du Bureau de soutien aux familles.

Le Comité du barreau et de la magistrature cherche des fonds pour financer une proposition de mise en place de mécanismes de médiation appropriés dans le Nunavut. Parmi les sources de financement possibles, mentionnons la Stratégie en matière de justice applicable aux Autochtones et le PVIJ.

Mise au point d’un protocole d’accélération des processus avec la Commission des services juridiques.

Automne-hiver 2000-2001

Le conseiller auprès du Bureau de soutien aux familles reçoit la formation nécessaire — sans doute en même temps que d’autres agents du ministère de la Justice.

Le bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires — qui occupe de nouveaux locaux plus spacieux — reprend ses activités sous le nom de Bureau de soutien aux familles, doté de l’agent du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires et du conseiller auprès du Bureau de soutien aux familles.

Des procédures pour défaut de paiement sont mises en place dans un petit nombre de collectivités dans le cadre de la cour de circuit.

La Commission d’examen des lois du Nunavut poursuit ses consultations sur les questions touchant au droit de la famille.

Le secteur travaille au recrutement de conseillers et de médiateurs en droit de la famille; et établit les liens nécessaires entre les collectivités et les ministères.

Stratégie à long terme — Extension des services aux collectivités

Projet pilote de formation et de déploiement de travailleurs communautaires spécialisés en droit de la famille.

Le Comité du barreau et de la magistrature sur la médiation a élaboré des propositions de recherche et de mise en place de mécanismes de médiation en droit de la famille adaptés au Nunavut. Si les membres du comité y consentent, nous aimerions travailler avec eux, avec la participation de la communauté inuite, dans le but d’ajouter certains éléments à ceux qu’ils ont proposés à ce jour.

Dans le cadre du processus, il se peut que nous puissions faire venir au Nunavut des éducateurs spécialisés en médiation, qui seraient chargés de la formation du personnel judiciaire, du personnel des organismes administratifs et des autres divisions du ministère de la Justice. Les coûts pourraient en être absorbés par le ministère. Une fois sur place, ces personnes pourraient mener des recherches et des consultations sur une formation appropriée des médiateurs au niveau des collectivités. Ce travail pourrait déboucher sur l’élaboration d’une formation de deux à quatre semaines destinée à ces médiateurs du droit de la famille.

Nous appuierions la proposition — venant vraisemblablement de l’organisme de vulgarisation juridique désigné qu’est la Commission des services juridiques — d’offrir ce cours à titre de projet pilote. Pour la première session, nous pourrions faire appel à un nombre limité de collectivités pour préparer le cours, organiser et soutenir les services aux familles. Les participants seraient recrutés au sein des comités de justice communautaire, chez les conseillers, les enseignants, les travailleurs sociaux, etc. Il semble qu’il y ait des fonds disponibles pour cette formation dans le cadre du PVIJ.

Si ce projet réussi, nous recommandons de passer à la phase II.

La législation sur les victimes de violence

Il sera nécessaire de mener d’importantes consultations auprès des groupes concernés avant de pouvoir élaborer une loi pour les victimes de violence, et avant que cette loi ne puisse entrer en vigueur il faudra donner une formation solide aux professionnels, notamment aux juges ou aux juges de paix, aux agents de la paix, aux travailleurs sociaux auprès des tribunaux et aux avocats. Il sera également nécessaire de prévoir une campagne de sensibilisation pour renseigner la population sur l’existence d’options juridiques à court terme pour les victimes de violence, et sur la façon d’y recourir. Là encore, il sera important de bien coordonner les politiques.

Phase II — Des travailleurs spécialisés en droit de la famille dans toutes les collectivités

La phase II correspondra à une version modifiée du projet pilote : nous tenterons alors d’assigner à chaque collectivité au moins une personne ayant une compréhension de base des droits et des responsabilités découlant du droit familial, et du processus de médiation.

Pour mettre en œuvre le projet, il serait important de se fixer les objectifs suivants :

  • Projet pilote — session de formation — printemps 2001 (7-10 participants).
  • Deuxième session de formation — automne 2001.
  • Troisième session de formation — hiver/printemps 2002.

Avec le temps, il deviendra prioritaire de créer des liens avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, et éventuellement avec le ministère de l’Éducation, pour regrouper les services familiaux au niveau des collectivités. En ce qui a trait à la réforme des services du droit de la famille, la communauté a clairement exprimé un besoin de services de consultation pour aider les couples à résoudre leurs difficultés quand cela est possible, comme complément nécessaire aux services traitant de séparation ou de divorce. Certains projets très intéressants, qui pourraient constituer un bon complément, verront bientôt le jour, par exemple :

  • Des services de consultation pour les couples à Cambridge Bay — actuellement, le directeur du programme du mieux-être reçoit en consultation plus de vingt couples aux prises avec des difficultés.
  • Le Centre de la famille à Clyde River — les services et le local pourraient logiquement être élargis pour offrir aussi de l’information sur le droit de la famille.
  • Des liens solides entre ministères et communauté seront la clé de la viabilité des services offerts aux collectivités.

Les activités régulières du Bureau de soutien aux familles à ce moment-là seront :

  • de fournir de l’information à la clientèle
  • de fournir des services de médiation pour élaborer des ententes entre les parties
  • de mettre en œuvre des mesures d’exécution
  • d’assurer la gestion financière des cas inscrits au Programme

Le dernier élément de cette stratégie sera d’évaluer, après un certain laps de temps, l’efficacité tant du Bureau de soutien aux familles que celle des médiateurs des collectivités. Parmi les principaux résultats attendus, mentionnons : un certain nombre de personnes ayant reçu une formation et retenues en tant que médiateurs dans les collectivités, des médiations réussies (en tenant compte également du respect des obligations), le règlement de cas relevant du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires ou de cas pour défaut de paiement.


ANNEXE V
LISTE PARTIELLE DES PARTICIPANTES ET PARTICIPANTS À L’ENQUÊTE

Pond Inlet

Alice, travailleuse sociale
Joseph, Groupe jeunesse
Allen, Église catholique romaine
Sarpina, Groupe des dames bénévoles
Leslie, travailleuse sociale auprès des tribunaux
Roger, juge de paix
Sarah, adjointe à l’agent principal d’administration
Celia, enquêteuse
Silas, enquêteuse
Mary, enquêteuse
Sandra, examen des lois
Elizabeth, interprète

Et environ 20 autres personnes

Chesterfield Inlet

Brenda, travailleuse sociale
Eli, maireSituni, Église catholique romaine
Marion, Collège de l’Arctique
Donna, enquêteuse
Hillary, enquêteuse
Julia, interprète

Et environ 15 autres personnes

Coral Harbour

Rosie Tanuyak, formatrice d’adultes
Emily Beardsall, Programme de mieux-être communautaire
Armand Angootealuk
Mary Matoo, groupe des dames
Annie Eetuk
Susie Angootealuk
Imelda Angootealuk
Elisapee Ningeonan, groupe des dames bénévoles
Heather Kolit

Cambridge Bay

Kim
Elik
Sandra

Consultation à Iqaluit (2001)

Marie Irniq, Services à l’enfance et à la famille, directrice des adoptions
Ruby Rafuse, Services à l’enfance et à la famille
Travailleur social, Hall Beach
Services sociaux d’Iqualuit
Patrick Smith, services juridiques de Keewatin
Doug Sage, services de santé et services sociaux régionaux de Baffin
Sandra Omik, Maligarnit Qimirrujiit (Commission d’examen des lois du Nunavut)
Jonah Kelly, Maligarnit Qimirrujiit (Commission d’examen des lois du Nunavut)
Louise Anaija, attachée de recherche, Cour de justice du Nunavut
Peter Allison, Maliiganik Tukisiiniakvik
Juge Robert Kilpatrick, Cour de justice du Nunavut
Joan Mercredi, Division juridique du ministère de la Justice du Nunavut
Simona Arnatsiaq, Conseil du développement social du Nunavut
Kelly Mahoney, Cour de justice du Nunavut, secrétaire
Basil Alexander, Cour de justice du Nunavut, secrétaire


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LISTE DES ARRÊTS

C.(A.) v. G.(V.) [1992] N.W.T.R. 236 (S.C.).

Re: Katie Adoption Petition (1961) 38 W.W.R. 100 (N.W.T.T.C.) par le juge Sissons

S.K.K. v. J.S., [1999] N.W.T.J. No. 94 (S.C.).

Re: Tagornak Adoption Petition, [1984] 1C.N.L.R. 185 (N.W.T.S.C)

Re: Wah-Shee (1975), 57 D.L.R. (3d) 743 (N.W.T.C.A.).


NOTES

[1]  Loi sur les services juridiques (Nunavut), L.R.T.N.-O. 1988, c. L-4, modifiée pour le Nunavut.

[2]  On trouvera à l’annexe I un examen détaillé de la méthodologie utilisée pour ce rapport de recherche, ainsi que la démarche recommandée pour de futures études empiriques.

[3]  Maligarnitt Qimrujiit, First Report to the Premier, (Iqaluit: Assemblée législative territoriale, 2000). L’histoire des changements de noms au Nunavut ne date pas d’hier. Autour des années 1960, le gouvernement du Canada inaugurait un programme qui attribuait un numéro aux Inuits (« E-numbers system »). En 1970, pour remédier à l’échec de ce programme, un nouveau projet d’enregistrement des patronymes était introduit (« Project Surname »). En raison des différentes orthographes de l’Inuktitut, du manque de connaissance en matière de liens familiaux et d’autres problèmes, la plupart des noms étaient mal orthographiés. Dans certains cas, le patronyme apparaissait sous la rubrique du prénom et ainsi de suite. Il a donc fallu démanteler le projet et défaire cette gabegie, avec comme résultat un autre problème persistant. Les noms mal orthographiés ont longtemps été une cause de frictions entre le gouvernement et les membres de la communauté.

[4]  Loi sur le Nunavut, L.C., 1993, c. 28.

[5]  Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, Accord entre les Inuit [sic] de la région du Nunavut et Sa Majesté la Reine du Chef du Canada (Ottawa: ministre de l’Approvisionnement et des Services, 1993) (ci-après dénommé Accord sur les revendications territoriales du Nunavut).

[6]  Consulter entre autres : Nunavut: Inuit regain control of their lands and their lives, sous la direction de Jens Dahl, Jack Hicks et Peter, (Copenhagen: International Work Group for Indigenous Affairs, 2000). Consulter aussi un ouvrage incontournable sur la question : John Merritt, Randy Ames, Terry Fenge, et Peter Jull, Nunavut: Political choices and manifest destiny (Ottawa: Comité canadien des ressources arctiques, 1989).

[7]  Voir, par exemple, le premier énoncé de principes important du cabinet du gouvernement du Nunavut, le Bathurst Mandate Pinasuaqtavut: that which we’ve set out to do (Iqaluit, 1999).

[8]  Voir à ce propos le chapitre 2.3.3, ainsi que John Clement et Amanda Parraig, « A Review of Reported Crime Statistics in Nunavut Communities », (Ottawa, Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada, 2000); et John Evans, Robert Hann, et Joan Nuffield, « Crime and Corrections in the Northwest Territories » (inédit, 1998), La violence familiale au Canada : un profil statistique 2000, Centre canadien de la statistique, Statistique Canada No. 85-224, la section sur les femmes inuites du rapport final du Comité canadien sur la violence faite aux femmes, « Un nouvel horizon : éliminer la violence, atteindre l’égalité » (Ottawa: Approvisionnement et Services, 1993); Mary Crnkovich, Lisa Addario, et Linda Archibald, « Rapport de recherche : les femmes inuites et le système juridique du Nunavut » (Ottawa: Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada); Pauktuttit, l’organisation des femmes inuites, a rendu publics de nombreux rapports qui traitent de certains problèmes de ce type, notamment, « Inuit Women and the Administration of Justice, Phase 1: Project Report, 1993 », « Phase 1, Progress Report #1 », et « Phase 2, Progress Reports #2. » Consulter également Margo Nightingale, « Judicial Attitudes and Differential Treatment: Native Women in Sexual Assault Cases » (1991) 23 Ottawa Law Review 71; le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, vol. 3 Chapitre 2, (Ottawa: Approvisionnement et services, 1996) Rosemary Kuptana, « No more secrets: acknowledging the problem of child sexual abuse in Inuit communities: The first step towards healing », (Ottawa, document inédit, préparé pour Pauktuttit , 1991); Michelle Ivanitz, « Traditional Family Law: Inuvialuit and Kitikmeot Region » (Yellowknife, document inédit, préparé pour le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, 1991); et Marie Uviliq, « Traditional Family Law: Baffin and Keewatin Regions » (Yellowknife, document inédit, préparé pour le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, 1990).

[9]  Bureau de la statistique du Nunavut, http://www.stats.gov.nu.ca.

[10]  Il existe des groupes importants d’Inuits au Nunavik, dans le Nord québécois et au Labrador. De plus, les Inuvialuits, groupe ethnique très proche des Inuits, vivent dans les Territoires du Nord-Ouest. Enfin, un certain nombre d’Inuits vivent dans les grands centres urbains, en particulier à Ottawa et à Edmonton.

[11]  Statistique Canada, recensement de 1996.
Les chiffres sont repris des statistiques du GTNO - http://www.stats.gov.nt.ca.

[12]  À Arviat, le taux de chômage était de 40,3 p. cent; à Clyde River et à Gjoa Haven, le taux de chômage était de 34,9 p. cent; à Hall Beach, il était de 35,8 p. cent et à Igloolik, de 38,4 p. cent; à Sanikiluaq, de 39,2 p. cent. Le taux de chômage est défini en fonction du nombre de personnes âgées de 16 ans et plus qui ont effectué un travail quelconque rémunéré dans le courant de la semaine précédant l’enquête ou qui étaient absentes du travail pour des vacances ou en raison d’une maladie ou d’un conflit de travail, ainsi de suite. L’enquête note que les définitions traditionnelles du chômage tendent à minimiser le phénomène au Nunavut en raison de la petite taille des collectivités et de la rareté des emplois connus; en effet, il se peut que de nombreuses personnes soucieuses de trouver du travail n’ont pas cherché d’emploi au cours des quatre semaines précédentes, sachant qu’à leur connaissance et en toute bonne foi il n’y avait pas d’emplois disponibles. Bureau de la statistique du Nunavut, Enquête sur la population active du Nunavut, 1999 :Résultats complets et tableaux explicatifs (Iqaluit: gouvernement du Nunavut, 1999.) Disponible également à l’adresse http://www.stats.gov.nu.ca.

[13]  D’après les chiffres recueillis sur une période de 11 ans entre 1986 et 1996, le taux de suicide annuel au Nunavut est de 77,4 pour 100 000 habitants; chez les Inuits, ce taux est de 79,3 pour 100 000. Dans l’ensemble du Canada, le taux de suicide en 1992 était de 13 personnes pour 100 000. Source : Publications des services sociaux et de santé des T.N.-O., Suicide in the Northwest Territories: A Descriptive Review at http://hlthss.gov.nt.ca/publicat/suicide/summary/sec02.htm.

[14]  Le rapport, The Northwest Territories Health and Status Report (1999), du ministère de la Santé et des Services sociaux (Yellowknife: G.T.N.-O., 2000) signalait que le taux de morts accidentelles dans les T.N.-O. en 1994-1995 était deux fois celui de la moyenne nationale (p. 34), et notait la corrélation entre les décès consécutifs à des blessures et le nombre d’années potentielles de vie perdues. Consulter le site à l’adresse http://hlthss.gov.nt.ca/hstats/HEALTH.PDF.

[15]  Toutes les données proviennent du Bureau de la statistique du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sur la consommation d’alcool, de drogues et de solvants, Northwest Territories Drug and Alcohol Survey 1996 (Yellowknife: G.T.N.-O.). Ou consulter le site à l’adresse
http://www.stats.gov.nt.ca/Statinfo/Health/ alcdrug/Alcohol_Drug.html.

[16]  Selon les statistiques de la Société d’habitation du Nunavut citées dans le plan d’activités de la société en 2001.

[17]  Rapport du Groupe de travail ministériel sur l’habitation, gouvernement du Nunavut, 2000.

[18]  Listes d’attente de l’organisme d’habitation local — août 2000 ( mentionnées dans le plan d’activités de la Société d’habitation du Nunavut pour 2001).

[19]  Enquête sur la population active du Nunavut, 1999, op.cit. note12.

20  Mandat de Bathurst, op.cit. note 7

21  Un exemple particulièrement flagrant de ce point de vue est exprimé dans l’ouvrage du célèbre anthropologue du droit E.A.. Hoebel, « The EsKimo : Rudimentary Law in a Primitive Anarchy » in The Law of Primitive Man: A study in Primitive Legal Dynamics (New York: Atheaneum, 1979, c.1954)

22  Marie Uviliq, « Traditional Family Law: Baffin and Keewatin Regions » (Yellowknife: document inédit préparé pour le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, 1990), p.6.

23  Mandat de Bathurst, op.cit.note 7.

24  Il existe de nombreux ouvrages sur le sujet. Jean Briggs, Never in Anger: Portrait of an Eskimo Family (Cambridge: Harvard University Press, 1970) est sans doute le plus connu. On peut également consulter un ouvrage récent d’histoire orale : Naqi Ekho and Uqsuralik Ottokie, Interviewing Inuit Elders: Childrearing Practices, sous la direction de Jean Briggs éditeur (Iqaluit: Collège de l’Arctique, 2001), rassemblant les souvenirs des traditions sur l’éducation des enfants.Mentionnons d’autres ouvrages ethnographiques dont celui de Minnie Aodla Freeman, Life Among the Qallunaat (Edmonton: Hurtig, 1978) et de Charles Hughes, Eskimo Boyhood (Lexington: University Press of Kentucky, 1974).

25  Voir la Loi sur le Nunavut, op. cit.; Loi portant modifications de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et portant modifications corrélatives, L.C. 1999, c. 3, modifiant L.C. 1993, c. 28.; Nunavut Judicial System Implementation Act, S.N.W.T. 1998, c. 34, telle qu’adoptée pour le Nunavut, conformément à la Loi sur le Nunavut.

26  On peut consulter l’ouvrage de W. G. Morrow, Northern Justice: The Memoirs of Mr. Justice William J. Morrow, W.H. Morrow, éd. (Toronto: Osgoode Society, 1995) et celui de Jack Sissons, Judge of the Far North: The Memoirs of Jack Sissons (Toronto: McLelland & Stewart, 1968).

27  Katherine Peterson, The Justice House: Report of the Special Advisor on Gender Equality (Yellowknife: G.T.N.- O., 1992).

28  Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, Family Law Review Report (Yellowknife: G.T.N.-O., 1992).

29  Ministère de la Justice du Canada, « Options en ce qui concerne l’organisation judiciaire au Nunavut : document de travail » (Ottawa: 1997).

30  Une bibliographie récente compilée par la Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada fournit un aperçu des documents disponibles : Naomi Giff, « La justice au Nunavut : bibliographie annotée » (Ottawa: Ministère de la Justice du Canada) 2000.

31  Katherine Peterson, op.cit. note 27

32  Les statistiques du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires ont été fournies par Charlene Johnson, directrice du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, dans un rapport envoyé par courrier électronique le 31 janvier 2001.

33  Les projets de justice communautaire n’ont pas, à ce jour, fait l’objet de beaucoup d’études. Quelques exceptions importantes : Scott Clark, « Report on Community-Based Justice in Nunavut: Focus Group Consultations with Community Justice Committees ». (Iqaluit: ministère de la Justice du Nunavut, 2000) et l’ouvrage du Conseil du développement social du Nunavut, « Towards Justice that Brings Peace: Nunavut Social Development Council Justice Retreat and Conference » (Iqaluit: publié par l’auteur lui-même, 2000).

34  Options en ce qui concerne l’organisation judiciaire, op. cit.

35  Deux rapports récents examinent ces questions : John Clement et Amanda Parraig, « A Review of Reported Crime Statistics in Nunavut Communities » (Ottawa: Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada, 2000); et John Evans, Robert Hann et Joan Nuffield, « Crime and Corrections in the Northwest Territories » (document inédit, 1998)

36  Centre canadien de la statistique juridique, 1996 chiffres cités dans Evans, Hann et Nuffield, voir note 35, p.3-4. Ces statistiques s’appuient sur des infractions signalées et soumises à une vérification initiale de la police.

37  Voir l’ensemble des données du document La violence familiale au Canada : un profil statistique 2000, Centre canadien de la statistique juridique, Statscan. Cat. No 85-224.

38  Rapport sur les femmes inuites, dans le document du Comité canadien sur la violence faite aux femmes, « Un nouvel horizon : éliminer la violence, atteindre l’égalité » (Ottawa: Approvisionnement et services, 1993).

39  Clement and Parraig, Op. cit. note 35, à la p. 5. Les rapports sont considérés comme fondés quand, à l’issue de l’enquête, on conclut que la preuve vient à l’appui du rapport initial. Les taux d’affaires classées font référence aux rapports ayant donné lieu à une poursuite criminelle ou à des mesures quelconques.

40  Evans, Hann et Nuffield, Op. cit. note 35, p. 7-8, montrent que le taux de condamnation dans les Territoires du Nord-Ouest est de près de 50 p. cent plus élevé que dans le reste du Canada.

41  Voir Mary Crnkovich, Lisa Addario et Linda Archibald, « Rapport de recherche : les femmes inuites et le système juridique du Nunavut » (Ottawa: Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice du Canada) pour une étude sur le sujet. Pauktuttit, l’organisation des femmes inuites, a publié de nombreux rapports soulignant des problèmes de ce genre, et notamment : « Inuit Women and the Administration of Justice, Phase 1: Project Report, 1993 », « Phase 1, Progress Report 1 », et « Phase 2, Progress Reports 2. » Voir aussi Margo Nightingale, « Judicial Attitudes and Differential Treatment: Native Women in Sexual Assault Cases » (1991) 23 Ottawa Law Review 71.

42  Voir le document de Développement des ressources humaines Canada, Comité FPT - Projet d’information sur les services à l’enfance et à la famille, Rapport statistique 1994-1997, (http://www.hrdc-drhc.gc.ca/socpol/cfs/statreports/94-95x96-97/report/pdf). Consulter le tableau A et les figures, p. 96.

43  Voir p. ex. le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, vol. 3, chapitre 2 (Ottawa: Approvisionnement et services, 1996).

44  Voir Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, Op. cit.note 22. Consulter également l’ouvrage de Rosemary Kuptana, « No more secrets: acknowledging the problem of child sexual abuse in Inuit communities, the first step towards healing » (Ottawa: document inédit préparé pour Pauktuttit, 1991); Michelle Ivanitz, « Traditional Family Law: Inuvialuit and Kitikmeot Region » (Yellowknife: document inédit préparé pour le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, 1991).

45  Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones (Nunavut) L.T.N.-O. 1994, c.26, modifiée pour le Nunavut.

46  Loi sur le droit de l’enfance (Nunavut) L.T.N.-O. 1997, c. 14, modifiée pour le Nunavut.

47  Loi sur le droit de la famille (Nunavut) L.T.N.-O. 1997, c. 18, modifiée pour le Nunavut.

48  Loi sur les services à l’enfance et à la famille (Nunavut), L.R.T.N.-O. c. M-2, modifiée pour le Nunavut.

49  Loi sur l’adoption (Nunavut), L.T.N.-O. 1998, c.9, modifiée pour le Nunavut.

50  Loi sur l’exécution des ordonnances alimentaires (Nunavut), L.R.T.N.-O. c. M-2 modifiée, modifiée pour le Nunavut.

51  Loi sur le droit de l’enfance, Op. cit.note 46, art.17.

52  Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, Pour l’amour des enfants : Rapport du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants (Ottawa: Parlement du Canada, 1998).

53  Gouvernement du Canada, « Stratégie de réforme : Réponse du gouvernement du Canada au rapport du Comité spécial mixte sur la garde et le droit de visite des enfants. » Ottawa : ministère de la Justice, 1999.

54  Pour obtenir le texte complet des principes et objectifs de la réforme relative à la garde et au droit de visite des enfants, voir à la page 4 du document de consultation fédéral-provincial-territorial, L’intérêt de l’enfant d’abord : droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada, disponible à l’adresse http://canada.justice.gc.ca/fr/cons/ConsultationDocument.pdf.

55  Voir p. ex. Jean Briggs, Inuit Morality Play: The Emotional Education of a Three-Year-Old. (St. John’s: Institute of Social and Economic Research, et New Haven: Yale University Press, 1998).

56  Marie Uviliq, op.cit. note 22, p.12.

57  Voir p. ex., L’Institut Vanier de la famille, Profil des familles canadiennes II, (Colombie-Britannique : Institut Vanier, 2000) Aux p. 22‑23, il est énoncé que 3 975 080 familles sont composées des deux parents et de leur(s) enfant(s) sur un total de 7 838 865 familles. Il est difficile d’établir une comparaison avec les données du Nunavut car l’étude ne tient pas compte de la présence des membres de la famille élargie.

58  Voir Uviliq, Op.cit. note 22, p. 7-13.

59  Jane George, « Babies Having Babies: An Explosion of Infants Born to Teenage Mothers », Nunatsiaq News, 19 mai 2000. On a peu de statistiques sur les grossesses des adolescentes au Nunavut et les responsables de la santé publique s’appuient surtout sur des données empiriques. Jane George signale que selon les infirmières d’Arviat, les 65 jeunes filles de moins de 19 ans vivant dans la collectivité auraient donné naissance à 15 bébés, soit 10 fois la moyenne nationale. Elle cite aussi, sans divulguer son nom, un ancien directeur général du Conseil régional de la santé de Baffin qui affirmait que l’âge moyen auquel les femmes de la région de Baffin donnaient naissance à leur premier enfant avait chuté au fil des ans, passant de 16 à 18 ans à 14 à 16 ans. Les chiffres de Statistique Canada pour les T.N.-O. pour 1994 indiquent un taux de grossesses chez les adolescentes de 15 à 19 ans de 67 pour 1000, et de 12,6 pour 1000 chez les jeunes filles de moins de quinze ans. Les chiffres se fondent sur les Statistiques démographiques des collectivités du Nunavut, disponibles à l’adresse Internet suivante : http://www.stats.gov.nu.ca/Statinfo/Demographics/ nunest/popest_Nunavut.pdf.

60  La figure 1 se fonde sur le résultat, pour 248 participants à l’enquête, d’une soustraction de l’âge du parent du nombre d’années qui s’est écoulé depuis l’arrivée du premier enfant. La consignation des données comportait quelques incohérences. Même si les participants à l’enquête ont répondu à la question concernant l’année d’arrivée de chaque nouvel enfant, jusqu’à un maximum de neuf enfants, seules les données concernant les deux premiers enfants ont été consignées. La première entrée concernait l’aîné des enfants, et le graphique se fonde sur la date de naissance de ce premier enfant, mais il se peut que la date d’arrivée dans la famille du premier enfant ait été antérieure à cette naissance, si un enfant est arrivé suite à une adoption ou s’il y a eu de nouveaux conjoints qui avaient déjà des enfants.

61  Loi sur le droit de l’enfance, Op.cit.note 46, art.20(2).

62  Entrevue avec Marie Irniq, directrice du service des adoptions et des services à l’enfance et aux familles du ministère de la Santé et des Services sociaux du Nunavut, le 19 janvier 2001. Elle constate qu’environ 10 p. cent des adoptions dans les T.N.-O. avaient lieu chez les Denes.

63  [1999] N.W.T.J. No 94. Il existe un bon nombre de cas reconnaissant l’adoption selon les coutumes autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest. Le juge Sissons, dans Re: Katie Adoption Petition (1961) 38 W.W.R. 100 (N.W.T.T.C.) a été le premier à reconnaître que l’adoption selon les coutumes faisait partie du droit des T.N.-O. La cour d’appel des T.N.-O. en est venue à la même conclusion dans Re: Wah-Shee (1975), 57 D.L.R. (3d), 743. Deux décisions ultérieures de la Cour suprême des T.N.-O. ont précisé que le rôle de la cour dans les cas d’adoption selon les coutumes autochtones était « purement déclaratoire ». Voir Re: Tagornak Adoption Petition, [1984] 1C.N.L.R. 185; C.(A.) v. G.(V.) [1992] N.W.T.R., 236.

64  Loi de reconnaissance de l’adoption selon les coutumes autochtones, S.K.K. v. J.S., para. 30.

65  Voir p.ex. Mariano Aupilaarjuk, Marie Tulimaaq, Akisu Joamie, Emile Imaruittuq, Lucassie Nutaraaluk, Interviewing Inuit Elders: Perspectives on Traditional Law, sous la direction de Jarich Oosten, Frederic Laugrand et Wim Rasing, (Iqaluit: Collège de l’Arctique, 2000), p. 144.

66  Aupilaarjuk et coll., Op.cit. note 65, p.148, citant Imaruittuq; entrevue avec Sandra Omik, commissaire en chef de la MQ, le 17 juillet 2001.

67  Manifestement, les T.N.-O. ont également un processus d’adoption selon les coutumes autochtones. Toutefois, selon la directrice des adoptions, seulement 10 p. cent des adoptions selon les coutumes avaient eu lieu dans l’ouest des T.N.-O. avant le partage du territoire.

68  Nous ne savons pas précisément pourquoi ce taux est aussi bas alors qu’il devrait être beaucoup plus élevé dans cette partie du questionnaire. Il est possible que l’outil utilisé dans cette partie de l’enquête ait été mal conçu et que ce problème ne soit pas ressorti au moment des sessions d’information, mais qu’il ait surgi sur le terrain. Mentionnons également certaines réticences relatives aux questions portant sur le mariage, contrairement à d’autres types de sujets liés au droit de la famille.

70  Voir l’étude de GFoss Gilroy Inc., Study to Examine the Socio-Demographic Situation of Aboriginal Women, Preliminary Data Phase (Ottawa, 1994).

71  Les participants à l’enquête divorcés ou séparés étaient âgés de 38 ans en moyenne.

72  Nous avons certaines réserves quant à la fiabilité de ces chiffres. Précisons que les participants à l’enquête ont pu ne pas mentionner certaines unions de fait antérieures de sorte que les données peuvent ne pas se rapporter nécessairement à une première union de fait, ou alors l’échantillon de population était peut-être trop petit.

73  Ainsi, par exemple, quand nous avons demandé aux personnes mariées, mariées et séparées, ou divorcées (n=135) si elles en étaient à leur premier mariage, 44 (32 p. cent) ont répondu oui et 90 autres n’ont pas répondu ou ont déclaré que la question était sans objet dans leur cas. Quand nous avons demandé aux personnes du même groupe si elles avaient vécu en union de fait avec leur conjoint(e) actuel(le) avant leur mariage, 33 ont répondu oui, 12 ont répondu non et 90 n’ont pas répondu à la question, ou ont déclaré que la question était sans objet dans leur cas. De la même façon, quand nous avons demandé aux personnes en union de fait (n=87) si elles avaient eu d’autres unions de fait antérieures, n’ayant pas conduit au mariage, 12 ont répondu oui, 35 ont répondu non et toutes les autres n’ont pas répondu à la question ou ont déclaré que la question était sans objet dans leur cas.

74  Remarque : le nombre total d’hommes ayant participé à l’enquête est plus faible dans l’ensemble.

75  Certaines différences mineures portent, par exemple, sur la période de temps à respecter après une séparation pour faire une demande de pension alimentaire ou de partage des biens matrimoniaux. Sandra Omik, de la Commission d’examen des lois, a signalé que la loi considérait comme émancipée une personne mineure si elle était mariée, mais non si elle vivait en union de fait.

76  En ce qui concerne le Nunavut, ce sont les chiffres pour la population totale des plus de 15 ans : 15 240 personnes.

78  L’histoire « Arnaq Ningaijauvaktuq (La femme violentée) » est reprise par Alexina Kublu, et se fonde sur une histoire que lui racontait son père quand elle était enfant. Le récit est paru dans Aupilaarjuk et coll., Op.cit. note 65, p. 153-156.

79  Comparons, par exemple, l’importance de la violence à l’échelle nationale largement documentée dans La violence familiale au Canada, Op.cit. note 35, et les pourcentages élevés d’agressions et d’agressions sexuelles signalés dans l’ouvrage de Evans, Hann et Nuffield (1998) et dans celui de Clement et Parraig (2000). Cette situation peut découler d’un certain nombre de facteurs : l’utilisation d’enquêteurs régionaux, en particulier l’utilisation d’enquêteurs hommes, peut bloquer à l’expression des sentiments personnels au moment d’aborder ces questions. L’utilisation d’une enquête pourrait aussi s’avérer inappropriée dans ces cas. Il est important d’essayer de saisir la portée du problème. Par exemple, comme certains nous l’ont fait remarquer, il est tout à fait nécessaire de commencer à consigner si oui ou non des accusations pour agression et pour agression sexuelle sont portées dans le contexte familial.

80  Voir p. ex. Nancy Wachowich (en collaboration avec Apphia Agalakti Awa, Rhoda Kaukjak Katsak et Sandra Pikujak Katsak), Saqiyuk: Stories from the Lives of Three Inuit Women (Montreal: McGill-Queens University Press, 1999); Rapport final du comité canadien sur la violence faite aux femmes, Op.cit. note 38; Gossip: A Spoken History of Women in the North sous la direction de Mary Crnkovich, (Ottawa: Comité canadien des ressources arctiques, 1989).

81  Commission d’établissement du Nunavut, « Two Member Constituencies and Gender Equality: A Made in Nunavut Solution for an Effective and Representative Legislation » (Iqaluit, 1994).

82  Voir les statistiques de l’Enquête sur la main-d’œuvre et la dynamique des revenus à l’adresse http://www.statcan.ca/Francais/pgbd/People/ Labour/labor01a.htm.

83  Voir une étude qualitative récente sur l’expérience de travail des femmes au Nunavut : Colleen Purdon, « Inuit Women in Iqaluit, Nunavut: Draft Site Report » dans First Nations and Inuit Women Speak about Diminishing Conflicts Between their Cultural Context and their Education/Work Context (à paraître); voir également l’Enquête sur la population active au Nunavut, 1999, Op.cit.note 12.

84  Certaines caractéristiques des logements, extraites du recensement de 1996.
http:/www.statcan.ca/français/pgbd/People/ Families/famil099.htm

85  Loi sur le droit de la famille, voir note 48, art. 47-56.

86  Courrier électronique de Chris d’Arcy à l’auteur de l’étude, le 26 janvier 2001.

87  Ibid.

88  Voir p. ex. M.E. Turpel, « Home/land » (1991) 10, Revue canadienne de droit familial, 17.

89  Les statistiques du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sur la situation matrimoniale et les familles, à l’adresse http://www.stats.gov.nt.ca/Statinfo/Census/ census96/_1996census.html, et Statistiques Canada. Recensement de 1996 : état matrimonial, unions libres et familles (Le Quotidien, jeudi 14 octobre 1997).

90  Dix-sept participants à l’enquête (7,6 p. cent) n’avaient pas de situation matrimoniale définie. Par conséquent, le total des pourcentages du paragraphe qui précède n’est pas égal à 100 p. cent.

91  Statistiques basées sur les chiffres de l’Institut Vanier de la famille, Op.cit. note 58, p.22-34.

92  Voir Colin Lindsay, Les familles monoparentales au Canada. (Ottawa: Statistique Canada, 1992).

93  Un nombre important de chefs de famille monoparentale (9) n’ont pas déclaré leur situation matrimoniale, chiffre plus important que ceux ayant déclaré être divorcés ou séparés.

94  Institut Vanier de la famille, Op.cit.note 58, p.70-71.

95  Ministère de la Justice du Canada, Statistiques choisies sur les familles canadiennes et le droit de la famille, deuxième édition. CSR-2000-1E, Ottawa 2000, en particulier les pages 6-7 et 12-13.

96  Institut Vanier de la famille, Op.cit. note 58, p.66-67.

97  Trente et une personnes (9 p. cent de l’échantillon) n’ont pas répondu à cette question.

98  Sept participants à l’enquête n’ont pas répondu à la question et nous croyons que la plupart d’entre eux n’ont pas déclaré avoir d’enfant.

99  Seulement 23 personnes ont répondu.

100  Dix personnes n’ont pas répondu à la question de savoir avec qui vivaient les enfants.

101  Il n’existe aucun moyen de savoir avec exactitude si ce conjoint (ou cette conjointe) était aussi un parent. Toutefois, la façon dont la question est posée (voir le questionnaire de l’enquête auprès des ménages Enfants B1 et C1) donne à penser que le conjoint (ou la conjointe) n'est pas le parent de l’enfant.

102  Céline LeBourdais, Heather Juby et Nicole Marcil-Gratton, Le Maintien des contacts père/enfants après la séparation : le point 2de vue des hommes (Ottawa, Ministère de la Justice du Canada, Section de la famille, des enfants et des adolescents: CSR-2000-3E).

103  Ibid.

104  Tous les parents (7) qui vivaient loin de leurs enfants ne les voyaient plus. Pour être plus précis : il s’agit de sept parents sur neuf puisque, dans deux cas, les parents ont indiqué qu’un ou plusieurs enfants vivaient à la fois dans leur collectivité et dans une collectivité éloignée.

105  Trente-quatre parents n’ont répondu à aucune de ces questions.

106  Voir Peterson, Op. cit. note 27,et le Groupe de travail ministériel sur la réforme du droit de la famille, Op.cit. note 28.

107  Il est possible que la question ait été mal comprise. Nous savons que les enquêteurs ont compris la question, mais si les participants l’ont mal comprise ou n’ont pas demandé de clarification, ce phénomène peut avoir été sous-estimé.

108  Dix personnes du groupe n’ont pas répondu à la question.

109  Cinq personnes n’ont pas répondu à cette question.

110  Quatre personnes sur neuf ont dit recevoir une pension régulièrement. Onze personnes sur 22 ont affirmé verser une pension sur une base régulière.

111  Trois personnes sur neuf ont dit recevoir des paiements au moins plusieurs fois par année; cinq personnes sur 22 ont dit verser une pension alimentaire sur cette base.

112  Deux personnes ont affirmé recevoir une pension alimentaire sur une base occasionnelle, et six personnes dans l’obligation de payer ont affirmé faire des versements quelques fois par année seulement.

113  Toutes les statistiques du bureau du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires du Nunavut nous ont été fournies par Charlene Johnson, directrice du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires, dans un rapport transmis par courriel le 31 janvier 2001.

114  D’après une comparaison entre le pourcentage de personnes qui ont indiqué recevoir une pension alimentaire pour enfant et le pourcentage de la population représentée dans les dossiers du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires. La différence, de trois à huit fois, correspond à la marge d’erreur de notre enquête.

115  De tous les participants à l’enquête, y compris les 49 personnes qui n’ont pas répondu à la question.

116  Le 1er mars 2000, le total des arrérages s’élevait à 1 939 809,17 dollars. Au 31 janvier 2001, il était de 1 690 416,90 dollars, soit une réduction de 249 397,27 dollars.

117  Nous avons aussi demandé si les arrangements existants sur le temps passé en compagnie des enfants découlaient d’une entente ou d’une ordonnance de la cour. Seuls 12 des 27 participants que la question aurait pu concerner y ont répondu : sept personnes ont dit qu’elles consacraient à leurs enfants une période correspondant à peu près à ce que la cour avait ordonné, quatre ont indiqué consacrer plus de temps et une autre a déclaré consacrer moins de temps.

118  Rapport de recherche soumis à l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants du ministère de la Justice du Canada, Réalités canadiennes, « Survey on Arrangements Dealing with Custody and Access », document de travail inédit, et Réalités canadiennes, « Survey of Parents’ Views on the Child Support Guidelines », Rapport de recherche soumis à l’Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants du ministère de la Justice du Canada, document de travail inédit.

119  Consulter, entre autres, l’excellent article ethnographique de Phyllis Morrow, « Yupik Eskimo Agents and American Legal Agencies: Perspectives on Compliance and Resistance », 1996 2 Journal of the Royal Anthropological Institute, p. 405

120  Consultation des intervenants du 13 juin 2001.

121  Réalités canadiennes, Survey on arrangements, Op.cit. note 118.

122  Cinquante personnes n’ont pas répondu à ces questions.

123  Seize personnes n’ont pas répondu à cette question.

124  L’American Psychological Association, par exemple, a signalé certaines études qui soulignent l’existence de graves problèmes concernant les couples qui ont recours aux services de consultation dans des cas de violence conjugale : consulter le rapport du groupe de travail présidentiel sur la violence et la famille de l’American Psychological Association, Violence in the Family: Report of the APA Presidential Task Force on Violence and the Family (Washington, Presidential Task Force on Violence and the Family, 1996). On peut consulter un résumé du rapport à www.apa.org/pi/viol&fam.html.

125  Sharon Gullberg, Child support Law Information Needs of Aboriginal People in the Northwest Territories, Phase 2 (Ottawa: Ministère de la Justice du Canada, Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants, BP24E); Law Courts Education Society of British Columbia, Northern BC First Nations Communities Child support Needs Survey (Ottawa: Ministère de la Justice du Canada, Équipe sur les pensions alimentaires pour enfants, BP21E). La recherche de Gullberg, d’après son mandat, ne portait que sur les besoins d’information de la région occidentale des Territoires du Nord-Ouest. Notre recherche appuie ses conclusions sur la nécessité de former des intermédiaires pour diffuser l’information juridique, mais nos résultats diffèrent sensiblement soit sur la nature de la demande de l’information juridique soit sur la définition des intermédiaires appropriés.

126  Entrevue avec Bonnie Tulloch, directrice administrative de la Commission des services juridiques, le 13 juin 2001.

127  Le CJC de Sanikilluaq, par exemple, a préféré procéder sans précipitation, même dans le secteur du droit criminel.

128  Voir également Goss Gilroy Inc., Study to Examine the Socio-Demographic Situation of Aboriginal Women, Preliminary Data Phase, Op.cit.note 70.

129  Toutes les statistiques démographiques de ce chapitre proviennent du Bureau de la statistique du Nunavut, « Le Nunavut : évaluation du nombre d’habitants par communauté, 1997/1998/1999 » (Iqaluit: 1999).

130  Nombre de participants à l’enquête : Iqaluit (72); Cambridge Bay (27); Pond Inlet (151); Coral Harbour(66); Chesterfield Inlet (26 ).



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Mise à jour : 2005-10-28 Haut de la page Avis importants