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Le ministère de la Justice du Canada a mis en œuvre un programme intensif de recherche sur les questions entourant le rôle parental à la suite d´un divorce au Canada.

 

Rapport fédéral-provincial-territorial final sur les droits de garde et de visite et les pensions alimentaires pour enfants

L'enfant d'abord !

novembre 2002



Also available in English

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TABLE DES MATIÈRES

SOMMAIRE

PARTIE 1 : DROITS DE GARDE ET DE VISITE

A. Les familles d'aujourd'hui
B. Le projet du Comité sur le droit de la famille
C. Principes et objectifs
D. Le rôle des lois fédérales, provinciales et territoriales
E. Vue d'ensemble de la recherche et des consultations
F. Principaux enjeux législatifs

G.  Choix de services et résultats

H. Règlement des questions relatives à la parentalité dans le cadre du système de droit familial

PARTIE 2 : PENSIONS ALIMENTAIRES POUR ENFANTS

A. Introduction
B. Procédures judiciaires et questions législatives

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXE A - RECOMMANDATIONS DU COMITÉ MIXTE SPÉCIAL SUR LA GARDE ET LE DROIT DE VISITE DES ENFANTS

ANNEXE B - RÉSUMÉ DES ÉVALUATIONS INTERNATIONALES

ANNEXE C - LOIS CANADIENNES SUR LA GARDE ET LE DROIT DE VISITE

ANNEXE D - RAPPORTS DE RECHERCHE SUR LA GARDE ET LE DROIT DE VISITE

ANNEXE E - RECOMMANDATIONS DU COMITÉ SUR LE DROIT DE LA FAMILLE

NOTES


Le présent rapport renferme les résultats du projet concernant le droit de garde et de visite du Comité fédéral-provincial-territorial sur le droit de la famille, qui a été mis sur pied à la demande des sous-ministres responsables de la Justice.  Les autorités fédérales, provinciales et territoriales ont participé à ce projet.  Les sous-ministres ont aussi demandé au Comité d'examiner les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.

Ce rapport présente les résultats des recherches approfondies et des consultations effectuées auprès de professionnels du droit de la famille, de parents, de groupes d'intervention et de Canadiens intéressés par ces questions, et les discussions prolongées qui se sont déroulées entre les représentants des autorités fédérales, provinciales et territoriales afin de recommander des mesures à prendre à l'avenir.

Les opinions exprimées dans ce rapport sont celles des membres du Comité sur le droit de la famille et ne reflètent pas nécessairement la position des ministères et des gouvernements qu'ils représentent.


MEMBRES DU COMITÉ FÉDÉRAL-PROVINCIAL-TERRITORIAL SUR LE DROIT DE LA FAMILLE

Mme Virginia McRae
(co-présidente)

Ministère de la Justice du Canada
Ottawa, Ont.

 

Mme Betty Ann Pottruff, c.r.
(co-présidente)

Saskatchewan Justice
Regina, Sask.

 

Mme Lucy Austin
Ministère de la Justice
Yellowknife, T.N.-O.

 

M. Robin Bassett
Ministère du Procureur général
Victoria, C.-B.

 

M. John Booth
Alberta Justice
Edmonton, Alb.

 

M. Michael Comeau
Ministère de la Justice
Fredericton, N.-B.

 

Mme Betty Egan
Bureau du Procureur général
Charlottetown, Î.-P.-É.

 

Me Hélène Fortin
Ministère de la Justice
Sainte-Foy, Qué.

 

M. Brian F. Furey
Ministère de la Justice
St. John's, T.-N. et L.

 

Me Denise Gervais
Ministère de la Justice
Sainte-Foy, Qué.

 

Mme Sheri Hogeboom
Ministère de la Justice
Whitehorse, Yukon

 

Mme Maria Lodge
Nunavut Justice
Iqaluit, Nun.

 

Mme Joan A. MacPhail, c.r.
Manitoba Justice
Winnipeg, Man.

 

Mme Averie McNary
Alberta Justice
Edmonton, Alb.

 

Mme Tilly Pillay
Ministère de la Justice
Halifax, N.-É.

 

Mme Anne Marie Predko
Ministère du Procureur général
Toronto, Ont.

 

Mme Risa Sheriff
Ministère du Procureur général
Toronto, Ont.

 

Mme Janet Sigurdson
Manitoba Justice
Winnipeg, Man.

 


SOMMAIRE

Il ne nous suffit pas, dans le système de justice, d'être réactifs.  Pour être vraiment efficaces, nous devons être proactifs.  Si notre tâche consiste à régler les problèmes des gens, nous n'y parviendrons véritablement que si nous adoptons des mesures proactives afin de modifier le droit de la famille et les procédures pour demeurer au diapason de l'évolution de la société.  Une attitude proactive correspond à une pensée et à une action progressives et innovatrices en réponse aux problèmes réels vécus par les hommes, les femmes et les enfants auxquels s'adresse la loi.  Le droit de la famille est probablement plus proche des normes et des valeurs fondamentales de notre société que toute autre sphère du droit.  Et pour être efficace, la loi doit refléter ces valeurs[1].

Ce rapport est présenté aux ministres chargés de la justice dans l'espoir de favoriser la poursuite du dialogue déjà entamé sur les enjeux du droit de la famille, l'élaboration constante de services toujours très attendus en matière de droit de la famille et une réforme réfléchie du droit de la famille.

Le présent document fait état des épreuves nombreuses que les enfants et les parents doivent surmonter avant, pendant et après l'éclatement de la famille.  Il examine la recherche, les sondages, les études antérieures et l'expérience d'autres gouvernements.  Il se fonde sur les consultations publiques et les travaux de recherche effectués pour le projet.  Le rapport présente des suggestions au regard des lois sur les droits de garde et de visite ainsi que des services et des recours de droit familial susceptibles d'aider à résoudre les conflits familiaux et d'atténuer le choc subi par les enfants et leur famille.  Cela suppose une implication individuelle, professionnelle, judiciaire et gouvernementale.

Aujourd'hui, les enfants vivent dans une variété de modèles familiaux.  L'évolution sociale a fait augmenter le nombre de familles monoparentales et de familles recomposées et le risque, pour les enfants, de vivre plusieurs restructurations familiales.  De plus en plus d'enfants sont exposés à l'éclatement de la famille à un âge plus précoce.  Un nombre croissant d'enfants naissent de parents qui ne sont pas mariés et les enfants nés de couples vivant en union libre sont davantage exposés à vivre la séparation des parents que les enfants dont les parents sont mariés.

Au moment de l'éclatement de la famille, il faut adapter les arrangements parentaux.  De temps à autre, des ajustements peuvent aussi s'imposer, et ce, tant que les enfants dépendent des parents.  Les conflits à l'origine de l'éclatement de la famille risquent de compliquer grandement ce processus pour bien des familles.  Le divorce ou la séparation risquent d'exacerber les problèmes déjà existants, comme la pauvreté ou les lacunes parentales.  Des problèmes nouveaux susceptibles d'affecter les arrangements parentaux, comme le déménagement d'un parent ou la venue d'autres enfants, peuvent survenir après la séparation.

Le droit familial en matière de garde, de droit de visite et de pensions alimentaires pour enfants regroupe les lois et procédures judiciaires visant à régler les différends quand les parents ne parviennent pas à s'entendre.  Au Canada, la responsabilité gouvernementale en matière de droit de la famille est partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux, en vertu du partage des pouvoirs législatifs prévu par la Loi constitutionnelle de 1867.

La Loi sur le divorce du gouvernement fédéral régit les questions de garde, d'accès (droit de visite) et de pensions alimentaires pour enfants dans les instances de divorce.  Ces questions relèvent des lois provinciales et territoriales dans le cas de parents mariés qui se séparent et qui ont recours aux lois provinciales pour obtenir les ordonnances de séparation et d'autres mesures de redressement, et dans le cas de parents en instance de divorce qui décident d'avoir recours aux lois provinciales.  Les lois provinciales et territoriales régissent tous les autres aspects du droit de la famille qui concernent les parents et les enfants, y compris la filiation, l'adoption, la protection de la jeunesse, la gestion des biens des enfants et le consentement aux traitements médicaux.  Le gouvernement fédéral est chargé de la nomination des juges des cours supérieures mais les provinces ont le mandat d'administrer tous les tribunaux qui s'occupent de questions familiales.

Compte tenu du partage des compétences et de la mobilité de plus en plus grande de la population, il importe que les gouvernements collaborent à la réforme du droit de la famille.  Vu la nécessité d'un examen global fondé sur une coopération intergouvernementale dans ce domaine du droit, on a demandé au Comité sur le droit de la famille d'étudier les lois et les services se rattachant aux droits de garde et de visite et d'examiner les recommandations du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants.

Les ministres chargés de la justice ayant approuvé un ensemble de principes directeurs et d'objectifs pour la réforme du droit de la famille en 1999, le Comité sur le droit de la famille propose que ces principes continuent de guider l'élaboration, à plus long terme, d'une solution fondée sur la coopération intergouvernementale en matière de réforme du droit de la famille et d'amélioration des services en matière de droit familial[2]Le Comité sur le droit de la famille recommande que la réforme du droit de la famille se fonde sur les principes et objectifs qui suivent.

Principes [3]

Assurer la priorité aux besoins et au bien être des enfants.

Favoriser une approche qui reconnaît qu'il n'existe pas de modèle idéal du rôle parental qui conviendrait à tous les enfants; cette approche doit tenir compte de la façon dont les enfants et les jeunes vivent la séparation et le divorce à diverses étapes de leur développement.

Soutenir des mesures qui protègent les enfants de la violence, des conflits, des mauvais traitements et des difficultés économiques.

Reconnaître qu'il est bénéfique pour les enfants et pour les jeunes d'établir et de maintenir des relations significatives avec leurs deux parents, lorsqu'ils peuvent le faire sans danger et de façon positive.

Reconnaître qu'il est bénéfique pour les enfants et pour les jeunes d'établir et de maintenir des relations significatives avec leurs grands-parents et avec les autres membres de la famille élargie, lorsqu'ils peuvent le faire sans danger et de façon positive.

Reconnaître l'apport de la culture et de la religion dans la vie des enfants.

Favoriser les mécanismes non conflictuels de règlement des différends et ne retenir le débat contradictoire devant le tribunal que comme mécanisme de dernier recours.

Clarifier les dispositions législatives en ce qui concerne les responsabilités relatives à l'éducation et aux soins à apporter aux enfants.

Reconnaître qu'il y a chevauchement de compétences en matière de garde et de droit de visite des enfants au Canada et consentir des efforts pour assurer une législation et des services coordonnés et complémentaires.

Objectifs

Guider les parents, les professionnels et les responsables des services afin qu'ils comblent les besoins des enfants et défendent leurs intérêts de la meilleure façon qui soit.

Atténuer l'incidence négative des conflits sur les enfants et proposer des modèles valables de résolution des conflits.

Soutenir les interactions positives de l'enfant, que ce soit  avec ses parents, sa famille élargie ou sa communauté culturelle.

Proposer des solutions plus claires, plus prévisibles et mieux comprises aux questions en matière de justice familiale.

Il importe de reconnaître l'existence des deux volets interdépendants dans cette réforme du droit de la famille : les lois et les services.  Les consultations publiques, le rapport du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants et les présentations d'organisations comme l'Association du Barreau canadien indiquent clairement que, pour bien des Canadiens, les changements législatifs ne sont ni le seul ni le principal enjeu de la réforme du droit de la famille.  Toute modification de la loi qui ne s'accompagne pas d'une amélioration des services risque d'avoir peu d'incidence, sinon aucune, sur l'adaptation des familles et des enfants à l'éclatement de la famille.  Le présent rapport traite à la fois des lois et des services, y compris des processus de résolution de conflits.

Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux doivent jouer un important rôle de soutien aux services dans le système de justice familiale.  L'engagement des gouvernements à financer les services offerts dans les provinces et les territoires s'impose afin de favoriser à long terme une démarche multisectorielle intégrée pour la prestation de services complémentaires et coordonnés.

DROITS DE GARDE ET DE VISITE

Les lois

En plus de la Loi sur le divorce, on compte au moins treize lois provinciales ou territoriales différentes régissant les droits de garde et de visite au Canada.  Toutes les dispositions législatives sont différentes malgré la présence d'éléments communs importants.  Par exemple, elles prévoient toutes que le principe fondamental est celui de l'intérêt de l'enfant et elles utilisent toutes le terme de « garde ».  Cependant, les lois n'utilisent pas toutes ce terme  dans le même sens et l'on note des variantes dans certaines dispositions clés comme dans la terminologie.  Une certaine cohérence des lois fédérales, provinciales et territoriales permettrait aux Canadiens d'y voir plus clair en droit et aiderait à garantir un traitement plus uniforme pour les enfants.

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les gouvernements s'appliquent à garantir aux enfants un traitement et une protection semblables partout au Canada en apportant une certaine cohérence dans les lois touchant les droits de garde et de visite et les pensions alimentaires pour enfants.

Dans le document sur les consultations publiques de 2001, L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada, le Comité sur le droit de la famille a cerné plusieurs des principaux enjeux législatifs de la réforme, soit la définition de « l'intérêt de l'enfant », la terminologie, la violence familiale, les relations très conflictuelles, le point de vue des enfants et le respect des obligations en matière de garde et de droit de visite.

Définition de l'intérêt de l'enfant    Certaines lois provinciales et territoriales énumèrent des facteurs particuliers que les parents doivent prendre en compte pour déterminer l'intérêt de l'enfant.  La Loi sur le divorce ne renferme aucune liste de ce genre.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que soit intégrée à la législation en matière de garde une liste explicative non exhaustive de critères dont les parents, les juges et toute autre personne qui participent au processus de décision devront tenir compte pour établir les modalités de garde optimales qui servent l'intérêt des enfants.  À inclure dans la liste :

  • les facteurs liés aux enfants eux-mêmes, comme la santé et les besoins particuliers de l'enfant;
  • les facteurs liés aux relations des enfants avec les autres;
  • les facteurs liés au rôle parental assumé avant la rupture;
  • les facteurs liés à l'avenir des enfants, y compris les situations de conflits ou de violence ayant un impact possible sur les enfants.

Le Comité sur le droit de la famille recommande aussi que toute liste de critères portant sur l'intérêt de l'enfant soit axée sur l'enfant afin de garantir que cet intérêt de l'enfant demeure la préoccupation première dans la prise de décision au sujet de la garde et du droit de visite.

Terminologie    La terminologie actuelle des droits de garde et de visite a fait l'objet de critiques, notamment de la part du Comité mixte spécial qui a recommandé de ne plus utiliser ces termes dans la Loi sur le divorce et de les remplacer par la nouvelle expression, le « partage des responsabilités parentales ».  Les critiques soutiennent que la terminologie actuelle favorise le conflit et met l'accent sur les droits des parents plutôt que sur ceux de l'enfant.  D'autres soutiennent que la terminologie actuelle est neutre, souple, bien comprise et que la modification pourrait occasionner des litiges, du moins à court terme.  Le Comité sur le droit de la famille a étudié les cinq options suivantes qu'il a formulées dans le cadre des consultations publiques et qui sont présentées dans L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada.

Option 1 - Conserver la terminologie de la loi actuelle.
Les termes « droit de garde » et « droit de visite » seraient conservés.  On favoriserait la connaissance et l'utilisation du vaste éventail actuel d'arrangements parentaux possibles grâce à des programmes, nouveaux et améliorés, d'éducation et de formation à l'intention du public et des professionnels.

Option 2 - Préciser le sens de la terminologie législative actuelle : donner une définition large du droit de garde. 
Conserver et clarifier les termes « droit de garde » et « droit de visite » en y incluant une liste non limitative des éléments constituant la garde, et ce, dans un langage clair et compréhensible.  La loi proposerait un cadre permettant aux parents et aux juges d'attribuer l'exercice des diverses responsabilités parentales à un seul parent ou aux deux parents conjointement.  La loi exigerait que les tribunaux attribuent clairement l'exercice des responsabilités parentales, mais sans exiger que les parties ou les tribunaux utilisent les termes « droit de garde » ou « droit de visite ».

Option 3 - Préciser le sens de la terminologie législative actuelle : donner une définition étroite du terme « droit de garde » et introduire un terme et un concept nouveaux, la « responsabilité parentale ».
Le terme « droit de garde » serait conservé, mais redéfini, pour signifier uniquement la résidence.  Il ne s'agirait plus que d'une composante d'un nouveau concept de responsabilité parentale, englobant tous les droits et toutes les responsabilités des parents envers leurs enfants.  Chaque parent serait responsable des soins quotidiens et des décisions concernant les enfants pendant leur séjour chez un parent.  L'exercice des responsabilités parentales pourrait être attribué à un seul parent ou aux deux parents conjointement.

Option 4 - Remplacer la terminologie législative actuelle : introduire le nouveau terme et concept de « responsabilité parentale ».
Les termes « droit de garde » et « droit de visite » seraient remplacés par le nouveau concept de responsabilité parentale.  Les ordonnances de responsabilité parentale préciseraient les modalités d'exercice des responsabilités parentales entre les parents.  Telle fonction particulière pourrait être confiée à un seul parent, aux parents proportionnellement ou aux deux parents conjointement.

Option 5 - Remplacer la terminologie législative actuelle : adopter une approche de « partage des responsabilités parentales ».
Les termes « droit de garde » et « droit de visite » seraient remplacés par le nouveau concept de « partage des responsabilités parentales ».  Une telle approche ne présumerait pas que les enfants doivent partager leur temps également entre les parents.  Tout arrangement parental devrait cependant partir du principe que les enfants doivent avoir une interaction large et régulière avec leurs deux parents et que les droits et responsabilités des parents, y compris la prise de décision, mais non la résidence, doivent être partagés également ou presque également entre les parents.

Le Comité sur le droit de la famille ne recommande pas l'option 5 sur le « partage des responsabilités parentales » pour plusieurs raisons.  Les arrangements parentaux devraient être élaborés en fonction de l'intérêt supérieur de l'enfant, et ce, en tenant compte de la situation propre à chaque enfant.  Il ne devrait y avoir aucune présomption légale laissant entendre qu'une entente parentale est meilleure qu'une autre.  De plus, le « partage des responsabilités parentales » semble également mettre l'accent sur les droits des parents plutôt que sur ceux de l'enfant.  Son sens et son application sont ambigus, ce qui risque d'occasionner des litiges.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que la loi ne privilégie aucun modèle d'organisation des responsabilités parentales après la séparation qui soit fondé sur une présomption et que la loi n'utilise aucune formulation suggérant l'existence d'un tel modèle.  En tout temps, le principe fondamental et prépondérant de l'intérêt de l'enfant doit continuer à présider aux décisions relatives aux responsabilités parentales.

Le Comité sur le droit de la famille reconnaît que toute réforme devrait viser à clarifier les modalités d'exercice des responsabilités parentales et à aider les parents à privilégier les besoins des enfants.  Toute terminologie doit être assez souple pour convenir à l'éventail des besoins et des situations des enfants et de leurs parents.  C'est l'efficacité des arrangements plutôt que la terminologie qui importe le plus.

En général, le Comité croit que les options 2, 3 et 4 pourraient rencontrer les objectifs et les principes de la réforme, dépendamment de la formulation légale que l'on utilisera et du soutien qui sera offert pour en favoriser la mise en application et en comprendre les concepts.  Toutes ces options permettraient de clarifier les responsabilités des parents en matière de prise de décision et de distinguer les exigences reliées à la prise de décision, tout en indiquant clairement que les responsabilités parentales peuvent être partagées ou réparties entre les parents, et ce, dans l'intérêt de leurs enfants.  Le Comité reconnaît que l'abandon de la terminologie actuelle risque de créer des difficultés, en particulier pour l'exécution à l'étranger des ordonnances rendues au Canada, et que la nouvelle terminologie risque d'augmenter le nombre de litiges.  Le Comité sur le droit de la famille recommande, dans le cas où un gouvernement conclut à la nécessité de modifier ou de préciser la terminologie utilisée dans sa législation, qu'il axe les modifications sur l'enfant; qu'il mette l'accent sur la responsabilité qui incombe aux parents de comprendre les besoins de leurs enfants et d'en tenir compte; et qu'il favorise l'implication des deux parents de manière constructive et sécuritaire.  On reconnaît que les options 2, 3 et 4 pourraient satisfaire à ces critères, mais non l'option 5.

Violence familiale    La Loi sur le divorce devrait traiter explicitement des problèmes de violence familiale.  Il faut trouver un juste équilibre entre l'insistance de la Loi sur le divorce à garantir un maximum de communication d'un enfant avec ses parents et le besoin de protéger les enfants de toute violence familiale.  Le fait d'accorder plus d'importance à un critère qu'à un autre semble contraire à une démarche axée sur l'enfant.  Le Comité sur le droit de la famille recommande, pour éviter que des ordonnances du tribunal ne nuisent à la sécurité des enfants et les exposer à des dangers, que :

(a)  la loi ne contienne aucune présomption sur le degré de communication d'un enfant avec ses parents ;

(b)  l'intérêt de l'enfant soit défini par des critères législatifs tels que :

  • les antécédents de violence familiale et le potentiel de violence familiale dans l'avenir;
  • l'amélioration de la communication avec les deux parents quand cette démarche est sécuritaire et constructive.

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de s'attacher à renforcer les mécanismes de soutien offerts aux familles exposées à la violence familiale, y compris les programmes de counselling en situation de crise ainsi que des programmes de counselling pour les enfants exposés à la violence familiale.

Relations très conflictuelles     Il est difficile de définir adéquatement les cas de relations très conflictuelles, à part ceux où la violence familiale est présente, de telle façon qu'on puisse élaborer des critères ou une réponse législative.  La meilleure manière de traiter les cas de relations très conflictuelles consiste à proposer de meilleures façons de les reconnaître pour intervenir plus tôt et de manière plus efficace et à offrir des services pour aider les parents à cerner les besoins de leurs enfants et à améliorer leurs aptitudes à communiquer et à résoudre les conflits.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de s'occuper des cas de relations très conflictuelles grâce à une combinaison de services et de mécanismes de soutien afin de réduire le plus possible l'incidence négative des conflits sur les enfants et les familles.

Point de vue de l'enfant    Pour déterminer l'intérêt de l'enfant, les décideurs doivent entendre son point de vue afin de savoir ce qu'il pense de la façon dont ses parents comptent prendre soin de lui.  Il faut évaluer la pertinence de permettre à l'enfant de s'exprimer dans le cadre du processus décisionnel en tenant compte du besoin de tenir l'enfant à l'écart de conflits parentaux et d'éviter qu'il ne s'y trouve mêlé.  Le Comité sur le droit de la famille recommande à chaque gouvernement d'examiner les lois, les procédures et les services en vigueur afin de permettre que :

  • les parents et les tribunaux puissent prendre connaissance du point de vue de l'enfant;
  • l'information soit obtenue de l'enfant et communiquée au besoin aux parents et au tribunal d'une manière qui tienne compte de l'intérêt de l'enfant, de son âge et de son développement et en évitant que l'enfant ne se sente responsable des décisions relatives à la garde.

Respect des obligations en matière de garde et de droit de visite    Même si on accorde beaucoup d'attention à la question du non-respect injustifié du droit de visite, l'omission d'exercer le droit de visite et les difficultés entourant l'exécution des ordonnances de garde posent aussi des problèmes.  Le problème de l'exécution des ordonnances relatives au droit de visite n'est pas facile à résoudre compte tenu de la grande diversité des circonstances entourant le problème et du fait que les décisions doivent viser l'intérêt de l'enfant.  De plus, on ignore l'importance et la nature véritables des problèmes liés au droit de visite.  Au lieu d'insister sur des réactions punitives, les stratégies devraient peut-être chercher à prévenir les situations conflictuelles ou les malentendus qui mènent au non-respect du droit de visite ou au non-exercice de ce droit.

Même si le Comité sur le droit de la famille a indiqué plusieurs façons possibles d'améliorer les lois portant sur le respect des droits de garde et de visite des enfants et les lois de mise en Éuvre de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, il faut s'attacher à trouver d'autres solutions, à analyser les travaux en cours sur le plan international, incluant un rapport paru récemment au Royaume-Uni, et à présenter aux sous-ministres des recommandations plus précises.  Étant donné l'envergure et la complexité des questions reliées au respect des droits de garde et de visite des enfants et des cas d'enlèvement d'enfants par un parent, le Comité sur le droit de la famille recommande d'entreprendre un examen plus approfondi de ces questions.

À cause des dispositions actuelles de la Loi sur le divorce régissant la compétence en matière de garde, il arrive que la garde d'enfants qui résident habituellement dans une province soit attribuée par les tribunaux d'une autre province où ils ont des liens plus fragiles ou plus récents.  Certains textes de loi provinciaux et territoriaux ont des règles de compétence concernant les droits de garde et de visite fondées sur la résidence habituelle de l'enfant, et prévoient quelques exceptions qui tiennent compte des ententes ou des considérations de sécurité.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que la Loi sur le divorce et les lois provinciales et territoriales en la matière confèrent aux tribunaux de la province ou du territoire où se trouve la résidence habituelle de l'enfant la compétence sur les questions relatives aux droits de garde et de visite, sous réserve de restrictions fondées sur le consentement et sur des considérations de sécurité et compte tenu, si elles s'appliquent :

  • des dispositions de certaines lois provinciales concernant la compétence en matière d'attribution des droits de garde et de visite;
  • des législations spécifiques relatives à l'exécution du droit de garde;
  • de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.

Choix de services et résultats

Éducation et information à l'intention du public et des professionnels    Les programmes et les services d'éducation et d'information à l'intention du public et des professionnels aident les familles à survivre au choc émotif de la séparation, permettent aux parents de faire des choix éclairés au sujet des rôles parentaux et aident les parents à exercer conjointement leurs rôles avec le maximum d'efficacité.  Ces programmes fournissent aux familles et aux professionnels qui travaillent auprès d'eux de l'information sur les questions légales, le développement de l'enfant, des solutions pour la résolution des conflits, des méthodes de communication et des ressources; et ils aident les parents à acquérir les compétences et les techniques susceptibles de leur permettre de mieux jouer leur rôle de parent.

Ces dernières années, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont tous créé et mis en place divers services et programmes d'information.  On retrouve par exemple des lignes téléphoniques sans frais, des livrets, des dépliants, des sites web et des vidéos.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de diffuser dans le public, aussi largement que les ressources le permettent, l'information sur les lois et les services actuels et nouveaux et de les rendre accessibles aux familles ayant des enfants, grâce à différents moyens de communication.

Les programmes d'information et d'éducation des parents aident ceux-ci à mieux comprendre les exigences et les défis du rôle parental après la séparation et le divorce, leur apprennent de nouvelles façons de communiquer et de régler les différends quotidiens et présentent une intéressante solution de rechange à la procédure judiciaire officielle, dans le règlement de tout autre problème qu'ils pourraient rencontrer.  Ces programmes permettent d'atténuer les conflits, les vexations et la confusion en plus de réduire les coûts pour les parents et pour le système.  Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de favoriser les programmes d'éducation des parents, qu'ils soient obligatoires ou volontaires; que ces initiatives soient largement accessibles et répondent aux besoins linguistiques, culturels et géographiques des parents, ainsi qu'aux demandes d'information générale sur les responsabilités parentales, le volet juridique et les procédures.

Les avocats, les travailleurs sociaux et autres professionnels qui travaillent avec les familles en voie de séparation et se préoccupent de leurs problèmes, comme les intervenants, les médiateurs ou les conseillers, sont des sources essentielles d'information pour les parents.  Les professionnels qui aident les familles à résoudre les problèmes liés à l'éclatement de la famille et aux nouvelles responsabilités parentales doivent posséder une solide compréhension des situations que les familles sont appelées à vivre, tant émotionnelles que juridiques.  Les organismes professionnels devraient envisager d'obliger leurs membres à se tenir au courant des principaux enjeux, de la dynamique sociale générale qui touche les familles, ainsi que des ressources et des services disponibles pour les familles en période de séparation et de divorce; pour atteindre cet objectif, les organismes devraient offrir à leurs membres la formation appropriée.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que l'on soutienne les professionnels qui travaillent avec les familles en instance de séparation ou de divorce, comme les avocats, les travailleurs sociaux et les psychologues, afin qu'ils reçoivent une formation et une éducation permanente dans les domaines de la garde et des pensions alimentaires pour enfants, de la violence familiale, ainsi qu'en ce qui a trait à la dynamique de la séparation et du divorce et à leurs effets sur les enfants.  On devrait encourager et soutenir les organismes professionnels pour qu'ils facilitent le perfectionnement de leurs membres dans ces domaines et envisagent des normes d'accréditation incorporant le perfectionnement professionnel en la matière.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que les gouvernements collaborent avec les différentes associations juridiques et avec le Barreau :

  • pour étudier les possibilités de perfectionnement et de formation professionnels dans le domaine juridique de façon à pouvoir communiquer avec les enfants de parents séparés pendant le procès;
  • pour revoir les règles de pratique afin qu'elles énoncent les rôles et les devoirs des avocats de telle façon que soit adéquatement défendu l'intérêt de l'enfant et que les avocats soient dans l'obligation d'examiner, avec leurs clients en droit familial, toutes les options en matière de résolution des conflits.

Les provinces et les territoires ont dressé l'inventaire des services en matière de garde et de droit de visite qu'ils offrent.  Le document s'intitule Un répertoire des services gouvernementaux qui appuient la prise de décisions sur la garde, le droit de visite et leur exécution.  Ce répertoire devrait être mis à jour périodiquement.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que le Répertoire des services gouvernementaux qui appuient la prise de décisions sur la garde, le droit de visite et leur exécution soit mis à jour périodiquement.

Résolution des conflits    L'accès à des mécanismes adéquats et rapides de résolution des conflits, soit dans le cadre de la procédure judiciaire, soit à l'extérieur de celui-ci, peut permettre aux parties de cerner les points en litige, de régler les problèmes plus rapidement et de réduire au minimum les conflits entre les parents, les blessures psychologiques et les coûts financiers.  Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements et aux divers groupes professionnels de collaborer à la mise en place d'un vaste éventail de services en matière de résolution des différends, y compris la médiation, l'arbitrage et le droit collaboratif, ainsi que d'autres moyens de soutien aux parents pour les amener à identifier et à mieux cerner les points en litige, par exemple les expertises psychosociales et l'éducation des parents.

La médiation doit être encouragée dans les cas appropriés, mais il n'est pas recommandé qu'elle soit obligatoire.  Une telle démarche est incompatible avec ce qui constitue la prémisse fondamentale de la médiation en tant que prise de décision volontaire fondée sur le consensus.  Elle ne cadre pas non plus avec le principe d'une prise de décision axée sur l'enfant.  Elle risquerait en fait de mettre un parent ou un enfant en danger et, lorsque les deux parents ne sont pas à l'aise avec le processus de médiation, elle pourrait engendrer des conflits plutôt que de les réduire.  Le Comité sur le droit de la famille recommande :

  • de ne pas rendre la médiation obligatoire;
  • d'offrir des services de médiation à des parties bien informées, qui possèdent des pouvoirs de négociation relativement égaux et dont la participation est volontaire, là où existe un mécanisme de contrôle adéquat qui permet de dépister et, généralement, d'exclure les cas de violence familiale.

Habituellement, les avocats aident les parties à régler leurs différends par la négociation; en cas d'échec, ils défendent la cause de leurs clients devant le tribunal.  Récemment, les avocats ont adopté une nouvelle approche en matière de résolution des conflits familiaux : le droit collaboratif familial, où les avocats n'interviennent que dans le but d'aider les parties à s'entendre et ne peuvent représenter les parties dans aucune procédure judiciaire.  Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements d'encourager la création d'une pratique de droit collaboratif familial comme une nouvelle option à proposer aux parties pour la résolution des conflits.

La Loi sur le divorce exige des avocats qu'ils informent leurs clients de la possibilité de recourir à des services de counselling et de médiation et qu'ils discutent de l'opportunité de la négociation dans les questions entourant la garde et les pensions alimentaires.  Avec l'éventail actuel des mécanismes de résolution de conflits, de l'arbitrage au droit collaboratif, il est possible que les exigences actuelles de la loi ainsi que les dispositions semblables des lois provinciales ou territoriales soient trop restrictives.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que les lois sur le droit de la famille obligent les avocats à informer les clients de tout l'éventail des options possibles pour la résolution des conflits.

À l'heure actuelle, en vertu de la Loi sur le divorce, un juge peut ajourner une procédure de divorce afin de permettre aux parents de tenter une réconciliation.  La Loi sur le divorce devrait stipuler également qu'un juge peut ajourner les procédures afin que les parties tentent de régler leurs problèmes à l'extérieur du tribunal par la médiation ou d'autres mécanismes extrajudiciaires de résolution de conflits.

Les tribunaux, partout au Canada, ont tenté de favoriser le règlement rapide des cas par divers mécanismes.  Le Comité sur le droit de la famille recommande aux tribunaux d'utiliser à bon escient les mécanismes judiciaires et extrajudiciaires de règlement des différends afin d'éviter le durcissement des positions, de favoriser un règlement rapide et de délimiter les points en litige.

Les systèmes de gestion des cas facilitent le règlement rapide des différends et réduisent les délais et les dépenses inutiles en faisant appel à des juges et à d'autres personnes pour gérer activement les cas en tenant des conférences et en imposant des calendriers.  Le personnel expérimenté de la cour ou les juges attirent l'attention des parties et de leurs avocats sur les points vraiment en litige, encouragent la conclusion d'une entente et s'assurent que les points à régler reçoivent, autant que possible, toute l'attention voulue.  Les systèmes de gestion des cas relevant du droit de la famille doivent être adaptés aux problèmes particuliers auxquels les familles font face.  Ils doivent notamment assurer que dans les situations urgentes, comme les cas de violence ou de déplacement illicite d'un enfant, les procédures de gestion de cas n'empêchent pas les familles de comparaître sans délai devant un juge.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que les systèmes de gestion des cas permettent d'accélérer le processus de décision judiciaire quand il en va de l'intérêt de l'enfant de régler d'urgence une affaire.

Les ordonnances du tribunal devraient préciser de façon claire et sans équivoque les responsabilités de chaque parent envers les enfants.  Cela est important pour assurer la mise en Éuvre efficace des ordonnances et pour pouvoir disposer de règles et d'orientation susceptibles d'aider les parents à régler les problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentent.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que le libellé des ordonnances soit clair et cohérent pour permettre aux parties de bien comprendre leurs obligations et pour assurer le respect et la bonne exécution des ordonnances.

Il peut être nécessaire de modifier les arrangements parentaux prévus dans une ordonnance du tribunal, plusieurs fois pendant la vie d'un enfant.  Même quand les parents s'entendent pour modifier une ordonnance, ils ne peuvent le faire sans qu'il y ait une nouvelle ordonnance.  Dans bien des cas, toutefois, il n'est pas nécessaire qu'il y ait une audience devant le tribunal, laquelle risquerait de susciter des désaccords.  Le Comité sur le droit de la famille recommande la mise en place de procédures permettant, lorsqu'il y a consentement, la modification rapide des ordonnances de garde et de droit de visite de même que des ordonnances alimentaires, et ce, sans audience devant le tribunal.

Exécution    Ainsi qu'on l'a mentionné plus haut, la question de l'exécution des ordonnances relatives à l'accès et du non-exercice du droit de visite, constituent un aspect problématique de l'intervention dans ce secteur.  Il est difficile d'évaluer l'ampleur de ces deux problèmes, car ils se manifestent dans des situations diverses; de plus, il est difficile de proposer des solutions exemptes d'effets négatifs non voulus sur l'enfant.  Les démarches proactives, comme les programmes d'éducation parentale, peuvent certainement aider à prévenir les difficultés.  Le Comité sur le droit de la famille recommande d'étudier les problèmes liés au refus du droit de visite et au non-exercice de ce droit afin de dégager les meilleures pratiques et les moyens les plus adéquats pour aborder ces problèmes, ainsi que d'approfondir la recherche en vue d'élaborer et d'évaluer des mesures correctives innovatrices.

Aide juridique en matière familiale    L'aide juridique en matière familiale est offerte par tous les gouvernements, mais l'accès à l'aide juridique est limité et l'éventail des questions de droit familial dont on s'occupe varie beaucoup d'une province ou d'un territoire à l'autre.  Dans quelques endroits, l'aide juridique en matière familiale n'est disponible que dans les cas de violence familiale.  Il y a un danger évident que le manque d'accès à l'aide juridique pour la famille puisse avoir des conséquences très négatives pour les enfants et leurs parents.  De plus, le grand nombre de parties qui plaident leur propre cause (dont le nombre semble toujours augmenter) taxe le système judiciaire.  Le Comité sur le droit de la famille reconnaît que les questions relatives aux services d'aide juridique en matière familiale font actuellement l'objet d'un examen au niveau national et qu'il existe d'autres options pour aider les familles aux prises avec des problèmes juridiques, comme les lignes téléphoniques d'assistance juridique et les manuels à l'intention des parents qui désirent se représenter eux-mêmes.  Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de poursuivre leurs efforts pour améliorer les composantes de l'appareil judiciaire, comme l'aide juridique en matière familiale, qui sont essentielles afin que les familles accèdent au système judiciaire pour résoudre les questions liées à l'éclatement familial.

Mise en place de modèles de tribunaux unifiés de la famille    En combinant une structure judiciaire simplifiée à un tribunal spécialisé assorti de services comme la médiation et l'évaluation, les tribunaux unifiés de la famille proposent un mécanisme efficace pour résoudre les conflits familiaux.  Le Comité sur le droit de la famille recommande au gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux à la création de tribunaux unifiés de la famille, là où existe une demande à ce sujet.  De plus, il est recommandé que les personnes nommées et œuvrant au sein des tribunaux spécialisés de la famille possèdent une expertise dans le domaine du droit de la famille.

Recherche et travaux à poursuivre

Le présent rapport repose sur une somme importante de recherches effectuées au Canada et ailleurs, incluant des travaux entrepris expressément pour le projet du Comité sur le droit de la famille portant sur les droits de garde et de visite.  Le Comité sur le droit de la famille croit qu'il faut poursuivre la recherche pour parfaire et améliorer notre compréhension des familles, de l'évolution de la famille ainsi que des problèmes et des enjeux reliés au droit familial.  Le Comité sur le droit de la famille recommande que l'on continue de mettre l'accent sur la recherche et l'évaluation à l'échelle nationale afin de suivre les tendances et de connaître l'incidence de la réforme du droit et des services.



Au cours de son examen du système de droit familial au Canada, le Comité sur le droit de la famille a cerné plusieurs points particuliers exigeant davantage de travail ou de recherche.  Par exemple, ainsi qu'on l'a mentionné plus haut, il faut étudier plus à fond les questions de l'exécution des droits de garde et de visite de même que de l'enlèvement d'enfant par un parent.  Parallèlement, il faut porter attention aux lois provinciales ou territoriales régissant les droits et les responsabilités reliés à la garde et à l'accès après la naissance d'un enfant de parents non mariés, ainsi qu'aux lois sur l'établissement et la reconnaissance du statut parental.  Les lois varient d'une province à l'autre.  Compte tenu du nombre croissant d'enfants qui naissent de parents non mariés, le Comité sur le droit de la famille recommande aux provinces et aux territoires de réviser leur législation entourant l'établissement et la reconnaissance du statut parental et des droits relatifs à la garde et au droit de visite après la naissance d'un enfant, afin de déterminer quels aspects exigent des mesures législatives ou la mise en place de services, et de formuler des recommandations à cet égard.

Enfin, le Comité sur le droit de la famille reconnaît qu'il ne s'est pas encore suffisamment penché sur les questions reliées à la diversité et aux questions autochtones en matière de droit familial et de services en matière de droit familial.  Il faut poursuivre les travaux afin de répondre aux attentes dans ces domaines.  Le Comité affirme que de plus amples discussions sur les besoins précis de certaines communautés sont nécessaires.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de mettre en place des mécanismes permanents de dialogue, de recherche et de développement afin d'explorer les questions liées à la diversité et aux réalités autochtones en matière de droit de la famille.

PENSIONS ALIMENTAIRES POUR ENFANTS

En plus de revoir les questions de garde et de droit de visite, le Comité sur le droit de la famille, dans le cadre de ses opérations courantes, a mené différentes consultations sur des points précis des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.

Les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants sont entrées en vigueur le 1er mai 1997.  Depuis, toutes les provinces et tous les territoires ont adopté des lois qui énoncent des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.  Le Comité sur le droit de la famille estime que, de façon générale, ces lignes directrices ont atteint leurs objectifs mais qu'un certain peaufinage est requis pour les rendre plus claires sans les rendre plus rigides. 

En tenant compte des résultats des consultations de 2001 ainsi que des consultations antérieures sur d'autres questions, des conclusions de la recherche et de l'analyse de la jurisprudence, le Comité formule les recommandations suivantes :

Garde partagée

La règle des 40 pour cent



Si un époux exerce son droit d'accès auprès d'un enfant ou en a la garde physique pendant au moins 40 pour cent du temps au cours d'une année, le pouvoir discrétionnaire du juge lui permet de fixer un montant de pension alimentaire différent de celui qui est indiqué dans les Lignes directrices.  Bien qu'on ait critiqué ce seuil des 40 pour cent parce qu'il lie les contacts avec l'enfant à la pension alimentaire, il n'existe aucun autre moyen éprouvé d'améliorer le critère relatif au seuil.  Le Comité sur le droit de la famille recommande qu'aucun changement ne soit apporté à la règle relative au seuil des 40 pour cent.  Cependant, il faudrait donner plus d'information dans les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants quant aux moyens de cerner ou d'analyser les éléments qui contribuent à déterminer si le seuil des 40 pour cent a été atteint.



Formule présomptive

Un grand pouvoir discrétionnaire en matière de détermination du montant de la pension alimentaire dans les cas de garde partagée a entraîné d'importants écarts dans les montants accordés.  Afin d'accroître la certitude et la prévisibilité tout en conservant la même souplesse, le Comité sur le droit de la famille recommande de remplacer les facteurs servant actuellement à calculer le montant des pensions alimentaires dans les situations de garde partagée, par une formule basée sur une présomption.  Le montant résultant de la formule serait basé sur la différence entre les valeurs données dans les tables pour chaque parent étant donné le nombre total d'enfants considérés dans l'arrangement de garde partagée, sauf si ce montant est jugé inadéquat en raison, par exemple, de la manière dont les parents se répartissent les dépenses de l'enfant.

Dépenses spéciales ou extraordinaires

Définition de « dépenses extraordinaires »

L'article 7 des Lignes directrices prévoit un partage proportionnel de six catégories de « dépenses extraordinaires » liées aux enfants.  On retrouve dans ces catégories les dépenses extraordinaires pour l'éducation et les activités parascolaires.  Le terme extraordinaire a été interprété de différentes façons partout au pays, ce qui a entraîné de la confusion et un manque de cohérence.  Afin d'accroître la prévisibilité et la certitude, le Comité sur le droit de la famille recommande que le terme extraordinaire soit défini dans les Lignes directrices.

Pensions alimentaires pour enfants majeurs

Divulgation

Dans le cas des enfants majeurs, les lignes directrices n'exigent pas la divulgation des renseignements portant sur le droit de l'enfant à une pension alimentaire.  Pour assurer la transparence et la reddition de compte, il est recommandé que les Lignes directrices soient modifiées afin d'exiger une telle divulgation.  Afin d'éviter la participation directe de l'enfant à la poursuite, la modification précisera que le parent receveur, et non l'enfant, doit fournir les renseignements.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de garder intactes les dispositions relatives à l'admissibilité à une pension alimentaire des enfants qui ont atteint leur majorité.  Le Comité recommande de modifier les Lignes directrices afin que les parents qui reçoivent une pension alimentaire pour des enfants majeurs soient tenus de divulguer l'information concernant l'admissibilité des enfants.

La méthode de comparaison des niveaux de vie des ménages

Si le paiement des montants fixés par les Lignes directrices risque d'entraîner des difficultés excessives eu égard au niveau de vie des ménages, soit pour un parent, soit pour un enfant, le juge peut fixer une pension alimentaire différente.  Les tribunaux appliquent actuellement cet article de la façon prévue.  Dans plusieurs cas où le parent payeur réside loin de l'enfant, les tribunaux tiennent compte des dépenses élevées de transport que doit engager le parent dont le droit de visite fait l'objet d'une ordonnance distincte.  Le Comité sur le droit de la famille recommande qu'aucun changement portant précisément sur les coûts élevés liés au droit d'accès ne soit apporté aux Lignes directrices.  Il faut aborder chaque situation au cas par cas et tout arrangement jugé pertinent dans un cas particulier devrait faire partie intégrante de l'ordonnance relative à la garde et au droit de visite.

Obligations d'une personne « tenant lieu de parent »

Une personne « tenant lieu de parent » envers un enfant peut avoir des obligations en matière de pension alimentaire semblables à celles d'un parent biologique.  Un grand pouvoir discrétionnaire en matière de détermination du montant de la pension alimentaire dans les cas de ces « beaux-parents » a entraîné d'importants écarts dans les montants accordés.  Toutefois, la question de savoir comment répartir la pension alimentaire entre parents naturels et les beaux-parents est plutôt complexe et repose en grande partie sur les circonstances propres à chaque cas. Le recours à une formule stricte risquerait d'être inéquitable.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de garder inchangées les dispositions des Lignes directrices concernant les obligations d'une personne « tenant lieu de parent ».

Tables de pensions alimentaires pour enfants

Lorsque les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants ont été adoptées, l'objectif était de modifier les tables chaque fois que des changements aux taux d'imposition auraient des répercussions importantes sur les montants des tables.  Le Comité sur le droit de la famille recommande de mettre à jour les tables de pensions alimentaires tous les cinq ans ou plus souvent si des modifications apportées aux lois fédérales, provinciales ou territoriales sur l'impôt ont une incidence significative sur les montants des tables.

BIBLIOGRAPHIES ET RECOMMANDATIONS



Les références complètes des travaux de recherche et autres documents cités en bas de page sont données dans la section « Bibliographie » à la fin du présent rapport.  L'annexe D dresse la liste des rapports de recherche produits dans le cadre du projet sur la garde et le droit de visite.  L'annexe E dresse la liste de toutes les recommandations formulées dans les pages qui suivent.




PARTIE 1 : DROITS DE GARDE ET DE VISITE

A. LES FAMILLES D'AUJOURD'HUI

Au cours de la vie de l'enfant, sa famille peut se former, éclater et se reconstituer.  L'unité familiale initiale peut comprendre un parent ou les deux et un enfant ou plus.  Souvent les grands-parents, les tantes, les oncles ou d'autres parents composent une famille étendue pour prendre soin de l'enfant.  Les lois et les services reliés aux soins et à l'éducation des enfants visent à reconnaître la diversité des cellules familiales où vivent les enfants et à répondre à leurs besoins.

Les enfants représentent l'avenir de la société.  Leur santé et leur bien-être devraient être notre principale préoccupation.  Les décideurs doivent déterminer comment réagir aux recherches et aux expériences vécues qui démontrent que la séparation, le divorce et la restructuration de la famille peuvent avoir des effets néfastes sur le bien-être des enfants[4].  Les enfants semblent éprouver de plus en plus de problèmes au moment de la restructuration de la famille.  L'évolution sociale a fait augmenter le nombre de familles monoparentales et de familles reconstituées ainsi que le risque, pour les enfants, de vivre plusieurs restructurations familiales[5].

Des sondages récents portant sur la vie familiale ont dégagé quatre grandes tendances.  Premièrement, la plupart des enfants naissent dans des familles biparentales, mais un nombre croissant de ces parents ne sont pas mariés.  Deuxièmement, les enfants connaissent de plus en plus la vie dans une famille monoparentale et à un âge plus précoce qu'auparavant.  Ainsi, l'analyse des données de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes indique que le quart des enfants nés au début des années 1970 ont vu leurs parents se séparer avant qu'ils aient quinze ans.  À peine dix ans plus tard, le quart des enfants nés au début des années 1980 avaient vécu la séparation de leurs parents avant l'âge de dix ans.  Vers la fin des années 1980, près du quart des enfants nés entre 1987 et 1988 avaient vécu la séparation de leurs parents avant l'âge de six ans[6].  Troisièmement, les enfants nés de parents vivant en union libre risquent plus que les enfants de parents mariés de vivre une séparation parentale[7].  Quatrièmement, un nombre accru d'enfants sont appelés à connaître de multiples structures familiales, car ils sont plus jeunes au moment du premier éclatement de la famille et leurs parents sont plus susceptibles de former un nouveau couple (peut-être plus d'une fois) avec d'autres adultes, dont certains ont déjà des enfants d'une union précédente.

Un nombre croissant d'enfants canadiens vivent avec un seul parent, tandis que l'autre parent vit au sein d'une autre structure familiale.  De nombreux enfants sont de parents non mariés.  Une analyse récente de l'Enquête longitudinale indique qu'au début des années 1960 plus de quatre-vingt-dix pour cent de tous les enfants sont nés de deux parents mariés qui n'avaient jamais cohabité avant le mariage.  Or, dès 1993-1994, moins de quarante pour cent de tous les enfants sont nés de parents mariés qui n'avaient jamais cohabité avant le mariage, et vingt pour cent des enfants sont nés de parents non mariés.  Cette tendance est la plus marquée au Québec, où seulement vingt-trois pour cent des enfants sont nés de parents mariés sans avoir d'abord vécu ensemble et quarante-trois pour cent des enfants sont nés de couples en union libre[8].

Les enfants, peu importe leur structure familiale, ont besoin de vivre dans un environnement stable et affectueux, à l'abri des éléments néfastes comme les conflits, la pauvreté et la violence, et d'entretenir des relations constructives avec au moins un adulte[9].  Les problèmes éprouvés par la famille avant la séparation, comme la pauvreté ou la responsabilité parentale déficiente, se trouvent souvent aggravés par la séparation ou le divorce.  Les parents, qui sont confrontés à des difficultés financières ou émotives provoquées par la séparation ou par le divorce, peuvent se sentir perdus, fâchés, victimisés ou diminués à la suite des changements survenus dans la structure familiale.  Les enfants, de leur côté, peuvent se sentir déprimés et responsables de l'éclatement de la famille, n'ayant plus tout le support antérieur.

L'Enquête longitudinale nationale révèle que les enfants à risque (un statut socioéconomique peu élevé, des parents peu instruits, une famille dysfonctionnelle, des complications prénatales ou une famille monoparentale, etc.) ont moins de problèmes de comportement lorsqu'ils sont élevés dans un environnement parental constructif et cohérent.  La manière d'exercer le rôle parental, notamment lorsque marquée par l'hostilité, a un effet plus négatif sur le comportement des enfants que d'autres facteurs comme le revenu ou la structure familiale[10].

B. LE PROJET DU COMITÉ SUR LE DROIT DE LA FAMILLE

Les sous-ministres chargés de la justice au Canada ont demandé au Comité sur le droit de la famille d'accorder la priorité aux questions reliées aux droits de garde et de visite, et ce, en relation avec la réforme du droit de la famille et avec le projet d'intégration des services de justice familiale.  On a assorti au projet le mandat suivant :

Élaborer et présenter des recommandations sur les problèmes de droits de garde et de visite que vivent les enfants avant, pendant et après les conflits familiaux.  Pour ce faire il faudra élaborer une stratégie pour s'occuper des questions reliées à la loi et à la prestation des services qui justifient une intervention immédiate et définir un processus multisectoriel intégré pour répondre aux besoins à plus long terme des enfants et des familles au niveau de la loi, de l'environnement et des services :

  • répondre aux inquiétudes persistantes de la population du pays au sujet de la loi, de la pratique et des services actuels offerts en rapport avec les droits de garde et de visite;
  • favoriser un consensus public ou un dialogue sur les types et les niveaux de réponse appropriés;
  • élaborer des méthodes intégrées et qui tiennent compte des diversités, dans la prestation de services qui correspondent mieux aux besoins du client et à l'intérêt public.

En décembre 1999, les ministres chargés de la justice ont examiné et approuvé le plan de travail du projet, les plans pour la tenue de consultations publiques et un ensemble de principes pour orienter la réforme du droit de la famille.  De plus, la ministre fédérale à l'époque, de concert avec ses homologues provinciaux et territoriaux, a aussi convenu de présenter les recommandations du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants[11]au Comité sur le droit de la famille, pour que ce dernier les intègre à son examen.

En mars 2001 était publié un document de consultation, intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada[12].  Le public était invité à y répondre tant par écrit que dans le cadre d'ateliers tenus dans toutes les provinces et tous les territoires d'avril à juin 2001.  Les questions soulevées et débattues dans L'intérêt de l'enfant d'abord reflètent les préoccupations manifestées au pays au sujet des droits de garde et de visite et des pensions alimentaires pour enfants.  Les consultations ont permis de recueillir tout un éventail de commentaires sur ces questions.  L'examen du rapport rédigé à la suite de ces consultations[13] révèle un consensus général sur plusieurs grands thèmes, dont :

  • le besoin de maintenir une vision axée sur l'enfant en veillant par exemple à ce que l'intérêt de l'enfant demeure l'enjeu principal lorsqu'il s'agit de déterminer les responsabilités familiales;
  • le besoin d'améliorer le système de justice familiale et les services d'aide afin de s'assurer que l'on défende bien l'intérêt de l'enfant au moment de l'éclatement de la famille;
  • la reconnaissance de l'importance des besoins de sécurité physique, émotionnelle, psychologique et financière des enfants;
  • l'importance de favoriser et de soutenir les comportements parentaux adéquats pendant et après la séparation et le divorce;
  • le besoin de faire constamment preuve de souplesse dans l'approche adoptée pour cerner et combler les besoins particuliers des enfants et des familles pendant et après la séparation ou le divorce, sans exclure la famille étendue et sans négliger les besoins d'ordre culturel ou social.

Si la plupart des questions ont suscité des points de vue variés, le contexte de l'atelier a amené les participants à écouter le point de vue d'autres personnes qui se préoccupent des enfants et des familles qui vivent une séparation ou un divorce et à en tirer des leçons.  Les participants aux divers ateliers, environ 750 personnes en tout, représentaient les services sociaux, l'enseignement, l'exécution, le milieu juridique, l'aide à l'enfance, la santé, les groupes d'intérêt, féminins et masculins, les groupes de grands-parents, les groupes de parents n'ayant pas la garde et les organisations autochtones.  Des ateliers étaient aussi destinés aux jeunes.

Le Comité sur le droit de la famille s'est également penché sur les recommandations du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants.  Dans son rapport, Pour l'amour des enfants, le Comité mixte spécial a formulé quarante-huit recommandations au sujet de la garde, de l'accès et des pensions alimentaires pour enfants, incluant les questions reliées à la législation et aux services[14].  Les recommandations du Comité au sujet des questions traitées dans le présent rapport font l'objet d'un débat dans les sections du rapport qui portent sur les points pertinents.

Pour mener à bien le projet des droits de garde et de visite, le Comité sur le droit de la famille s'est inspiré non seulement des recherches effectuées sur diverses questions avant et pendant le déroulement du projet par le gouvernement fédéral, mais aussi d'autres consultations, de recherches et d'examens menés au niveau des provinces et des territoires.

Ainsi, la Saskatchewan avait entamé un examen des services et des questions législatives par la publication en mars 1998 d'un document intitulé Promoting Resiliency in Children and Families:  A Discussion Paper on the Effects of Separation and Divorce[15].  Le document a fait l'objet de discussions publiques au cours de cinq ateliers multisectoriels.  Les résultats ont entraîné la rédaction d'un second rapport, intitulé Promoting Resiliency in Children and Families:  Identifying Priorities[16], publié à l'automne 2000 et ayant fait l'objet d'une autre série d'ateliers multisectoriels.  Les réactions des participants aux deux séries d'ateliers ont permis d'orienter l'approche de la province aux consultationsnationales centrées sur L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants[17].

En Alberta, le Groupe de travail sur les tribunaux unifiés de la famille a présenté un rapport recommandant qu'un seul tribunal traite des questions de droit de la famille[18].  Le gouvernement de l'Alberta a également mis sur pied l'Alberta Family Law Reform Project, des consultations publiques sur la réforme du droit de la famille ayant débuté en février et mars 2002.

Le 29 avril 2002, le document intitulé Les enfants d'abord, Rapport au Parlement concernant les dispositions et l'application des Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants au Canada a été déposé devant la Chambre des communes par le ministre de la Justice du Canada[19].  Ce rapport au Parlement recommande des modifications aux Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, lesquelles recommandations sont présentées dans la partie 2 du présent rapport, « Pensions alimentaires pour enfants ».  Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont participé à l'élaboration de ces recommandations par l'intermédiaire du Comité sur le droit de la famille.  Le rapport au Parlement fournit aussi de l'information sur la manière dont les gouvernements ont collaboré à la mise en œuvre des lignes directrices partout au Canada dans le cadre des services de justice familiale, de projets de recherche, de campagnes d'information et de sensibilisation du public à l'intention des parents, des avocats et des juges et d'une exécution plus efficace des ordonnances alimentaires.

Le rapport au Parlement présente également les démarches entreprises par les gouvernements pour collaborer à l'amélioration de l'exécution des ordonnances alimentaires.  Pour que le système de justice familiale fonctionne, il faut s'assurer de l'exécution des ordonnances alimentaires envers la famille.  Les provinces et territoires canadiens sont responsables de l'exécution des ordonnances.  Cependant, au cours des six dernières années, le gouvernement du Canada a commencé à jouer un rôle plus important en matière d'exécution.

Le gouvernement fédéral a d'ailleurs axé ses efforts en matière d'exécution dans les domaines de la coordination et de l'amélioration de ses outils d'exécution : il a créé une unité fédérale des politiques d'exécution, augmenté le financement de projets connexes et mis sur pied un programme global de recherche sur les enjeux de l'exécution et du respect des obligations.  Les résultats d'une partie de ces études devraient être rendus publics cette année; ils seront très utiles à l'évaluation des mesures en cours et, par le fait même, à la planification de nouvelles dispositions.

Le projet sur la garde, le droit de visite et les pensions alimentaires n'incluait pas l'évaluation des politiques ou des programmes d'exécution des obligations alimentaires.  Pour de plus amples informations sur les travaux fédéraux, provinciaux et territoriaux sur l'exécution des obligations alimentaires, le lecteur devrait consulter le rapport au Parlement.

Les sous-ministres ont demandé que tout travail d'élaboration des politiques traite des questions de diversité.  Le Comité sur le droit de la famille reconnaît qu'il ne s'est pas encore suffisamment penché sur les questions reliées à la diversité et aux Autochtones en matière de droit familial et de services relatifs au droit de la famille.  Il faut poursuivre les travaux afin de répondre aux attentes.  Malgré la tenue d'ateliers autochtones à Ottawa, le 25 juin 2001[20], et bien que des recherches aient été effectuées au Nunavut[21], le Comité sur le droit de la famille est d'avis qu'il faut poursuivre le dialogue au sujet des besoins de certaines collectivités.

Recommandation 1

Le Comité sur le droit de la famille recommande de mettre en place des mécanismes permanents de dialogue, de recherche et de développement afin d'explorer les questions liées à la diversité et aux réalités autochtones en matière de droit de la famille.



Le Comité sur le droit de la famille espère que la diffusion du rapport issu des consultations fédérales, provinciales et territoriales, la disponibilité des recherches effectuées pour le projet, ainsi que le rapport lui-même, vont favoriser la poursuite du dialogue et l'élaboration d'un consensus sur les questions importantes abordées dans le présent document.

C. PRINCIPES ET OBJECTIFS



Ainsi qu'on l'a mentionné plus haut, les ministres chargés de la justice ont approuvé, en décembre 1999, un ensemble de principes directeurs pour la réforme du droit de la famille.  Ces principes figuraient dans le texte du document de consultation intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord [22].  On a semblé s'entendre au sujet de ces principes pendant les consultations.  Le Comité sur le droit de la famille propose que ces principes continuent de guider l'élaboration, à plus long terme, d'une solution fondée sur la coopération intergouvernementale à la réforme du droit de la famille et à l'amélioration des services en matière de droit familial.



Recommandation 2

Le Comité sur le droit de la famille recommande que la réforme du droit de la famille se fonde sur les principes et objectifs qui suivent.

Principes

Assurer la priorité aux besoins et au bien-être des enfants.

Favoriser une approche qui reconnaît qu'il n'existe pas de modèle idéal du rôle parental qui conviendrait à tous les enfants; cette approche doit tenir compte de la façon dont les enfants et les jeunes vivent la séparation et le divorce à diverses étapes de leur développement.

Soutenir des mesures qui protègent les enfants de la violence, des conflits, des mauvais traitements et des difficultés économiques.

Reconnaître qu'il est bénéfique pour les enfants et pour les jeunes d'établir et de maintenir des relations significatives avec leurs deux parents, lorsqu'ils peuvent le faire sans danger et de façon positive.

Reconnaître qu'il est bénéfique pour les enfants et pour les jeunes d'établir et de maintenir des relations significatives avec leurs grands-parents et avec les autres membres de la famille élargie, lorsqu'ils peuvent le faire sans danger et de façon positive.

Reconnaître l'apport de la culture et de la religion dans la vie des enfants.

Favoriser les mécanismes non conflictuels de règlement des différends et ne retenir le débat contradictoire devant le tribunal que comme mécanisme de dernier recours.

Clarifier les dispositions législatives en ce qui concerne les responsabilités relatives à l'éducation et aux soins à apporter aux enfants.

Reconnaître qu'il y a chevauchement de compétences en matière de garde et de droit de visite des enfants au Canada et consentir des efforts pour assurer une législation et des services coordonnés et complémentaires.

Objectifs

Guider les parents, les professionnels et les responsables des services afin qu'ils comblent les besoins des enfants et défendent leurs intérêts de la meilleure façon qui soit.

Atténuer l'incidence négative des conflits sur les enfants et proposer des modèles valables de résolution des conflits.

Soutenir les interactions positives de l'enfant, que ce soit  avec ses parents, sa famille élargie ou sa communauté culturelle.

Proposer des solutions plus claires, plus prévisibles et mieux comprises aux questions en matière de justice familiale.



D. LE RÔLE DES LOIS FÉDÉRALES, PROVINCIALES ET TERRITORIALES



La garde, le droit de visite et les pensions alimentaires pour enfants sont des domaines de compétence constitutionnelle partagée étant donné la responsabilité du Parlement fédéral en matière de mariage et de divorce, d'une part, et la responsabilité des provinces s'agissant du droit de propriété et du droit civil, d'autre part.  La Loi sur le divorce s'applique à la garde, au droit d'accès et aux pensions alimentaires pour enfants lorsque ces questions sont décidées en vertu de cette loi au cours d'une action en divorce.  Ces enjeux sont fixés par les lois provinciales et territoriales dans le cas de parents mariés qui, en se séparant, ont recours aux lois provinciales pour fixer les ordonnances de séparation et d'autres mesures de redressement, et dans le cas de parents en instance de divorce qui décident d'avoir recours aux lois provinciales.  Les mêmes enjeux sont également régis par les lois provinciales dans le cas de parents non mariés.  Les lois provinciales et territoriales régissent tous les autres aspects du droit de la famille qui concernent les parents et les enfants, y compris la filiation, l'adoption, la protection de la jeunesse, la gestion des biens des enfants et le consentement aux traitements médicaux.



On compte donc au moins quatorze lois et quatorze dispositions législatives différentes régissant les droits de garde et de visite au Canada.  Certaines provinces et certains territoires comptent plus d'une loi portant sur les droits de garde et de visite.  On décrit à l'annexe C les dispositions législatives dans les provinces et territoires canadiens.  Toutes ces dispositions diffèrent malgré la présence d'éléments communs importants; elles prévoient toutes que le principe dominant et fondamental demeure l'intérêt de l'enfant[23]; elles retiennent toutes l'expression « droit de garde », sans toujours la privilégier pour définir les responsabilités et les droits parentaux (en Colombie-Britannique et en Alberta, la loi parle avant tout de guardianship).

La définition précise où l'usage du terme « garde » varie selon les diverses législations, mais sauf dans le cas du Québec, il décrit habituellement l'ensemble des droits et obligations reliés à la garde et à la surveillance d'un enfant, incluant la garde légale, soit la responsabilité de prendre toutes les décisions importantes au sujet des soins et de l'éducation d'un enfant, et la garde physique, soit la responsabilité de la garde physique et de la surveillance quotidienne de l'enfant.  On appelle parfois cet ensemble de droits et de responsabilités la « tutelle à la personne » de l'enfant.  Les responsabilités relatives aux biens ou à la succession des enfants, souvent appelées la « tutelle aux biens » de l'enfant, en sont généralement exclues[24].

Par exemple, en Saskatchewan, la Loi de 1997 sur le droit de l'enfance définit le « droit de garde » comme la tutelle personnelle d'un enfant et inclut les soins, l'éducation et toute autre situation de garde, compte tenu de l'âge et du développement de l'enfant[25].  Au Québec, par ailleurs, la loi donne à la garde un sens plus précis en ce qu'il renvoie uniquement à la garde physique.  Le concept de l'« autorité parentale » se rapproche davantage au Québec, du concept de garde utilisé par les autres législations canadiennes.  Le dénominateur commun, partout au Canada, c'est que le droit de garde sous-entend, à tout le moins, la garde physique et la surveillance de l'enfant et les décisions quotidiennes pratiques nécessaires pour remplir cette responsabilité.

Le droit d'accès (droit de visite), au sens qu'on lui prête dans la loi, renvoie à la communication du parent non gardien avec l'enfant, que ce soit au cours de visites ou autrement.  Certaines des législations proposent une définition du droit de visite sensiblement plus étendue que d'autres.  Par exemple, certaines lois stipulent que le droit de visite inclut le droit d'obtenir des informations importantes au sujet de l'enfant.  D'autres précisent qu'il s'agit seulement d'un droit à l'information, et non d'un droit d'être consulté ou de participer à la prise de décision.

La garde conjointe, sans être définie explicitement dans aucune législation, sert habituellement à indiquer que les deux parents ont la garde légale de l'enfant, même si un seul parent peut avoir la garde physique ou la garde physique et la surveillance principale.  Au Québec, cet usage s'apparente au concept de l'exercice conjoint de l'autorité parentale.

La garde partagée n'est pas utilisée actuellement dans la loi canadienne sur la garde.  Elle s'applique habituellement à la situation où les parents partagent la garde physique ainsi que la garde légale[26].

En général, la loi canadienne accorde beaucoup de latitude au tribunal pour décider du genre d'ordonnance qui lui semble opportun dans les circonstances.  Les tribunaux ne manquent pas de se prévaloir de leur prérogative de rendre des ordonnances portant sur une grande variété d'arrangements parentaux, aussi bien en vertu de la Loi sur le divorce qu'en vertu des lois provinciales et territoriales.  Par exemple :

  • des ordonnances n'utilisant pas les termes « droit de garde » ou « droit de visite »;
  • la garde physique traditionnelle à un parent assortie d'un droit d'accès pour l'autre parent;
  • garde conjointe avec désignation de la résidence principale, ou soins et surveillance confiés principalement à un parent, et accessoirement à l'autre parent à des moments précis ou à convenir;
  • la garde conjointe avec l'attribution à un parent d'un pouvoir décisionnel prépondérant;
  • la garde partagée;
  • l'exercice conjoint de l'autorité parentale;
  • le droit de guardianship conjoint.

Par ailleurs, la législation n'empêche pas les parents de convenir, de leur propre gré, d'arrangements entre eux qui leur semblent le mieux convenir à leur famille éclatée.  Les parents n'ont pas à s'en tenir à la terminologie légale dans leurs propres ententes, bien que la précision soit essentielle pour l'exécution d'une ordonnance de garde en cas de différend.

E. VUE D'ENSEMBLE DE LA RECHERCHE ET DES CONSULTATIONS



Ces dernières années, plusieurs pays ont apporté des modifications importantes à leurs lois sur les droits de garde et de visite.  Le Comité sur le droit de la famille a étudié attentivement les modifications effectuées dans l'État de Washington, au Royaume-Uni et en Australie[27].  On a choisi ces États pour plusieurs raisons : chacun a apporté des modifications importantes à la terminologie des droits de garde et de visite; les nouvelles lois y sont en vigueur depuis un certain nombre d'années et il est donc possible de disposer d'une documentation pour en évaluer l'incidence.  Même si aucune des évaluations n'est concluante quant aux effets des lois, les études disponibles indiquent bien que les lois n'ont pas encore eu d'effets bénéfiques pour ce qui est de réduire les litiges et les conflits entre les parents.  Le Comité sur le droit de la famille s'est également penché sur la réforme des droits de garde et de visite dans les pays de tradition civiliste, en particulier la France[28].



Le présent rapport puise aussi dans la recherche effectuée au Canada.  Une bonne part de ces travaux a été effectuée en collaboration avec le Comité sur le droit de la famille.  La majorité des études sont assez récentes, ayant été entreprises au cours des quatre dernières années à la suite de la parution du rapport du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, lequel faisait valoir que la recherche s'impose et doit se poursuivre au Canada[29].  On a mené divers types de projets de recherche, y compris des études juridiques, empiriques et consultatives.

À titre d'exemples du genre d'études juridiques entreprises, il faut citer les analyses des diverses options de réformes pour assurer l'exercice du droit de visite ou pour aborder les cas de relations très conflictuelles[30].  La recherche empirique comprend les projets consistant à étudier les données statistiques des sondages passés comme l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes et l'Enquête sociale générale[31], ainsi que les analyses sociologiques connexes des études disponibles sur les sujets d'intérêt comme les fausses allégations de violence et les relations très conflictuelles[32].  La recherche consultative porte sur les consultations avec le grand public[33] et avec les professionnels œuvrant auprès des familles en transition[34].

Le présent document puise dans ces recherches canadiennes.  Tout au long du rapport, s'il y a lieu, on présente les résultats de la recherche et les renvois bibliographiques à l'intention du lecteur intéressé.  Globalement, la recherche offre un autre exemple des fruits de la collaboration fédérale-provinciale-territoriale et des avantages de l'élaboration éclairée des politiques.  Dans l'ensemble, la recherche est assez imposante, mais le Comité sur le droit de la famille estime qu'il faut poursuivre la recherche pour parfaire et améliorer notre compréhension des familles, de l'évolution de la famille et des problèmes et des enjeux reliés au droit de la famille[35].

Recommandation 3

Le Comité sur le droit de la famille recommande que l'on continue de mettre l'accent sur la recherche et l'évaluation à l'échelle nationale afin de suivre les tendances et de connaître l'incidence de la réforme du droit et des services.

F. PRINCIPAUX ENJEUX LÉGISLATIFS

Bien qu'on ait exprimé certaines inquiétudes au sujet des lois actuelles sur les droits de garde et de visite, il est clair, d'après les consultations publiques, le rapport du Comité mixte spécial et les réactions d'organisations comme l'Association du Barreau canadien, que pour bien des Canadiens, la modification de la loi n'est ni le seul ni le principal enjeu de la réforme du droit de la famille.  On reconnaît généralement qu'une modification de la loi sans amélioration ni réforme des services risque d'avoir peu d'incidence ou même aucune incidence sur la manière dont les familles et les enfants abordent  l'éclatement et la reconstruction de la famille[36].  Le besoin de services et de mécanismes de résolution de conflits adaptés aux familles, pour aider celles-ci à faire face aux difficultés posées par la séparation, en songeant avant tout aux enfants, s'est avéré le thème dominant du débat sur la réforme des droits de garde.  Les options pour la réforme des services et des mécanismes de résolution de conflits font l'objet d'un examen plus détaillé à la section G du rapport, intitulée « Choix de services et résultats ».

Cette partie du rapport traite des préoccupations exprimées au sujet du cadre législatif actuel en matière de droits de garde et de visite.  Le document de consultation de 2001, intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada, proposait de débattre de certaines questions clés, soit la définition de « l'intérêt supérieur de l'enfant », la terminologie utilisée, la violence familiale, les relations très conflictuelles, le point de vue des enfants et le respect des obligations en matière de droits de garde et de visite.

Définition de « l'intérêt supérieur de l'enfant »

La loi et les services concernant les droits de garde et de visite au Canada s'inspirent du principe fondamental que toutes les décisions doivent tenir compte de « l'intérêt supérieur de l'enfant ».  De plus, il s'agit de la norme adoptée dans la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies (intérêt supérieur)[37].

Toutes les lois canadiennes régissant la garde et le droit de visite incorporent ce principe absolu et incitent les tribunaux à tenir compte de l'intérêt de l'enfant au moment de prendre des décisions sur la garde et l'accès[38].  Certaines lois provinciales et territoriales dressent une liste de facteurs que les parents doivent examiner afin de déterminer l'intérêt de l'enfant.  La Loi sur le divorce ne renferme aucune liste de ce genre.  Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants a recommandé une liste de critères à employer pour déterminer l'intérêt de l'enfant[39].

Le document de consultation, intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord, énumérait de nombreux facteurs pouvant faire partie d'une définition de l'intérêt de l'enfant[40].  Les facteurs retenus s'inscrivaient sous plusieurs thèmes généraux :

  • les facteurs liés aux enfants eux-mêmes, comme la santé et les besoins particuliers de l'enfant;
  • les facteurs liés aux relations des enfants avec les autres;
  • les facteurs liés au rôle parental assumé avant la rupture;
  • les facteurs liés à l'avenir des enfants, y compris les situations de conflits ou de violence ayant un impact possible sur les enfants.

On a demandé à des intervenants d'indiquer si les critères de l'intérêt de l'enfant devaient figurer dans la Loi sur le divorce et, dans ce cas, de préciser ces critères.  Si beaucoup de participants ont dit souhaiter quelques modifications permettant de mieux comprendre la signification de « l'intérêt de l'enfant », bon nombre se sont interrogés sur l'incidence générale possible d'un tel changement.  Ces derniers estimaient qu'il serait probablement plus facile de faire comprendre aux parents, aux familles et aux professionnels ce qu'on entend par « l'intérêt de l'enfant », en insistant davantage sur l'éducation du public et sur les services de justice familiale.  Malgré l'absence de consensus autour d'une liste précise de critères, on a reconnu qu'une liste non exclusive n'avait eu aucune incidence négative apparente dans les juridictions qui avaient adopté de tels critères[41].

Le Comité sur le droit de la famille craint qu'une liste exhaustive de critères ne débouche sur de nouveaux litiges fondés sur les critères énumérés.  Cependant, une liste équilibrée et non exhaustive de critères permettrait d'orienter les parents, les professionnels et les tribunaux quant au genre de facteurs à prendre en compte et ne devrait pas, en soi, mener à de nouveaux litiges.

Recommandation 4

Le Comité sur le droit de la famille recommande que soit intégrée à la législation en matière de garde une liste explicative non exhaustive de critères dont les parents, les juges et toute autre personne qui participent au processus de décision devront tenir compte pour établir les modalités de garde optimales qui servent l'intérêt des enfants.  À inclure dans la liste :



  • les facteurs liés aux enfants eux-mêmes, comme la santé et les besoins particuliers de l'enfant;
  • les facteurs liés aux relations des enfants avec les autres;
  • les facteurs liés au rôle parental assumé avant la rupture;
  • les facteurs liés à l'avenir des enfants, y compris les situations de conflits ou de violence ayant un impact possible sur les enfants.

Recommandation 5

Le Comité sur le droit de la famille recommande aussi que toute liste de critères portant sur l'intérêt de l'enfant soit axée sur l'enfant afin de garantir que cet intérêt de l'enfant demeure la préoccupation première dans la prise de décision au sujet de la garde et du droit de visite.



Terminologie

On a critiqué l'utilisation des termes « garde » et « droit de visite ».  On soutient que ces termes ne conviennent pas pour décrire la relation entre l'enfant et ses parents parce qu'ils véhiculent un concept dépassé, celui de l'enfant comme une possession de ses parents et qu'ils poussent de trop nombreux parents à insister sur leurs droits plutôt que sur leurs responsabilités.  On dit que ces expressions comportent une « charge émotive » et alimentent un état d'esprit belliqueux, un parent étant le « gagnant » et l'autre le « perdant », peu importe les aptitudes parentales.

Les partisans de l'abandon des termes actuels lient souvent leurs préoccupations au sujet de la garde à la question de la répartition inadéquate des responsabilités parentales dans le cadre juridique actuel.  Ils estiment qu'un des parents exerce presque toute l'autorité et toutes les responsabilités à l'égard de l'enfant, l'autre parent étant empêché d'exercer un rôle parental significatif.  Certains estiment que la terminologie et l'approche actuelles sont la démonstration du caractère sexiste du système en place.  Ces critiques soutiennent qu'il faut non seulement de nouveaux termes mais également un nouveau concept pour présider à l'attribution des modalités d'exercice des responsabilités parentales après la séparation ou le divorce.

Pour de semblables motifs, d'autres pays de common law et certains États américains ont délaissé la terminologie traditionnelle des droits de garde et de visite en faveur d'une nouvelle terminologie et, souvent, de nouveaux concepts juridiques.  Ainsi, en Australie et au Royaume-Uni, les expressions garde et accès ont fait place aux expressions responsabilités parentales, résidence et contact.  L'État de Washington a remplacé les droits de garde et de visite par un nouveau système basé sur des « plans parentaux » qui prévoient les modalités d'exercice des responsabilités parentales, incluant le pouvoir décisionnel de chacun[42].

Certains États de droit civil ont aussi révisé la terminologie utilisée pour décrire les arrangements parentaux.  Dans les années 1970, le droit de la famille a subi d'importants changements dans les pays européens de tradition civiliste, particulièrement la France.  En 1984, le Conseil de l'Europe a recommandé l'utilisation de l'expression responsabilités parentales.  Même si le droit français continue d'utiliser l'expression « autorité parentale », on y a proposé aux tribunaux et aux autres instances concernées une nouvelle approche pour aider les parents à organiser les modalités d'exercice de leur autorité parentale[43].

Le Comité mixte spécial a recommandé de remplacer les termes garde et droit de visite, dans notre législation, par l'expression « partage des responsabilités parentales » compte tenu que : « [...] les deux parents continueront, dans la plupart des cas après une séparation ou un divorce, à jouer à l'égard des enfants leur rôle de décideurs comme avant la séparation[44] ».

D'autre part, les tenants de la terminologie actuelle soutiennent qu'elle n'est pas nécessairement négative.  Les parents peuvent définir leurs rôles de façon adéquate par une entente et les tribunaux jouissent d'une grande discrétion pour façonner des arrangements parentaux de manière à ce que la garde soit attribuée de façon constructive.

Les tenants de la terminologie actuelle du droit de garde soulignent qu'il faut avoir des attentes réalistes quant aux effets de la modification de la loi[45].  Le fait de modifier la terminologie légale ne changera pas les attitudes, pas plus qu'il n'obligera les parties à renoncer aux affrontements.  En effet, l'expérience tentée en Australie démontre que les efforts visant à clarifier la terminologie peuvent en fait augmenter le risque de litige et de mésentente.  Si certains préconisent une certaine forme de présomption en faveur de l'exercice conjoint des responsabilités parentales ou de « partage des responsabilités parentales[46] », l'expérience australienne inciterait les gouvernements à la prudence dans l'adoption de nouveaux termes, à cause du risque inhérent qu'ils soient mal compris ou qu'ils donnent des résultats négatifs dans la quête d'un équilibre entre l'intérêt des enfants et celui de leurs parents.

En 1987, l'État de Washington a adopté le modèle du « plan parental » pour tenter d'amener les parents à privilégier les besoins de l'enfant mais, à ce jour, le changement a eu peu d'incidence véritable sur la réalité de l'exercice des rôles parentaux après la séparation.  Les modifications apportées au Royaume-Uni devaient encourager les parents à rechercher des ententes basées sur la coopération, mais les résultats de la recherche à ce niveau indiquent que ces modifications n'ont pas réussi à réduire les cas litigieux en matière de droits de garde et de visite.  Au contraire, on a constaté, par exemple, une augmentation très marquée des litiges relatifs aux ordonnances dites « de contact[47] ».

Certains de ceux qui préconisent la modification de la terminologie ont également soutenu que les termes actuels manquent de clarté au Canada parce qu'ils ont, selon eux, une signification différente selon la province ou le territoire.  Ils croient qu'il faut clarifier la terminologie afin qu'elle soit comprise et utilisée de la même façon partout au Canada.  Ceux qui s'opposent à la modification de la terminologie actuelle soutiennent qu'elle est claire et bien comprise par les Canadiens et par le système judiciaire, et qu'il est possible de dissiper toute confusion éventuelle autrement que par un changement des termes.

Dans le document de consultation, intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord, on propose cinq options pour le débat public :

Option 1 - Conserver la terminologie législative actuelle.

Conserver les expressions « droit de garde » et « droit de visite ».  On favoriserait la connaissance et l'utilisation du vaste éventail actuel d'arrangements parentaux grâce à des programmes, nouveaux et améliorés, de formation et d'éducation à l'intention du public et des professionnels.

Option 2 - Clarifier la terminologie utilisée actuellement dans la loi - Donner une définition large du « droit de garde ».

Conserver et clarifier les expressions « droit de garde » et « droit de visite » en y incluant une liste non exhaustive des éléments constitutifs de la garde dans un langage clair et compréhensible.  La loi proposerait un cadre permettant aux parents et aux juges d'attribuer l'exercice des diverses responsabilités parentales à un seul parent ou aux deux parents conjointement.  La loi exigerait que les tribunaux attribuent clairement l'exercice des responsabilités parentales, mais sans exiger que les parties ou les tribunaux utilisent les expressions « droit de garde » ou « droit de visite ».

Option 3 - Préciser le sens de la terminologie législative actuelle - Donner une définition étroite du terme « droit de garde » et introduire un terme et un concept nouveaux, la « responsabilité parentale ».

Conserver l'expression « droit de garde » et la redéfinir strictement pour qu'elle se limite au « lieu de résidence ».  Il ne s'agirait plus que d'une des composantes du nouveau concept de « responsabilité parentale » qui engloberait tous les droits et toutes les responsabilités des parents envers leurs enfants.  Chaque parent serait responsable des décisions quotidiennes et des soins courants lorsque les enfants sont avec lui.  L'exercice des responsabilités parentales pourrait être attribué à un seul parent ou aux deux parents conjointement.

Option 4 - Remplacer la terminologie législative actuelle - Introduire le nouveau terme et concept de « responsabilité parentale ».

Remplacer les expressions « droit de garde » et « droit de visite » par le nouveau concept de « responsabilité parentale ».  Les ordonnances de responsabilité parentale préciseraient les modalités d'exercice des responsabilités parentales entre les parents.  Une fonction précise pourrait être confiée à un seul parent, aux parents de façon proportionnelle ou aux deux parents conjointement.

Option 5 - Remplacer la terminologie législative actuelle - Adopter une approche de « partage des responsabilités parentales ».

Remplacer les expressions « droit de garde » et « droit de visite » par le nouveau concept du « partage des responsabilités parentales ».  Cette approche ne présumerait pas que les enfants doivent partager leur temps également entre les parents.  Tout arrangement parental devrait cependant se fonder sur la prémisse que les enfants doivent avoir des contacts prolongés et réguliers avec leurs deux parents et que les droits et responsabilités des parents, y compris tous les aspects de la prise de décision, mais non la résidence, doivent être partagés également ou presque également entre les parents.



Lors des consultations, les répondants ont exprimé bon nombre des arguments résumés ci-dessus au sujet des avantages de modifier la terminologie et les concepts actuels.  On n'a pas dégagé de consensus quant aux options à privilégier.  En effet, les avis étaient très partagés au sujet de l'option 1 (conserver la terminologie actuelle) et de l'option 5 (adopter une approche de partage des responsabilités parentales).  Il semblait y avoir une certaine forme d'appui pour le changement de la terminologie, ou du moins, un désir de voir le système de justice inciter les parents à privilégier les besoins des enfants et leurs responsabilités de parent plutôt que leurs propres droits[48].

Le Comité sur le droit de la famille a été incapable d'obtenir un consensus en faveur d'une des options.  Le Comité sur le droit de la famille a convenu qu'il ne recommanderait pas l'option 5 (partage des responsabilités parentales) pour plusieurs raisons.  Les arrangements parentaux devraient être élaborés en fonction de l'intérêt de l'enfant, et ce, dans le contexte propre à chaque enfant.  Il ne devrait y avoir aucune présomption légale selon laquelle un modèle d'arrangement serait meilleur que d'autres.  Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite a également conclu que la loi ne doit comporter aucune présomption.  Dans la section de son rapport intitulée « Absence de présomption » au chapitre quatre, le Comité rappelle certains des débats sur la question et fait l'observation suivante :

Un certain nombre d'administrations aux États-Unis ont adopté comme norme la garde conjointe ou la préséance au principal pourvoyeur de soins mais, dans certains cas, les assemblées législatives ont fait marche arrière après avoir constaté que cette façon de procéder ne produisait pas les effets positifs escomptés.  Présumer qu'une forme particulière d'arrangements entre les parents servirait au mieux l'intérêt de tous les enfants pourrait occulter les différences significatives qui existent entre les familles[49].

Le concept de « partage des responsabilités parentales » a fini par laisser supposer que le point de départ est une présomption en faveur de l'égalité ou de la quasi-égalité des responsabilités et des droits parentaux, incluant celles relatives à la prise de décision.  L'imposition d'un régime de partage de la prise de décision à des parents incapables d'avoir des rapports exempts de conflits risque d'engendrer davantage de conflits, et cela au détriment des enfants.  De plus, même si on reconnaît que les deux parents peuvent jouer un rôle constructif dans le développement de l'enfant après la séparation, il ne faut pas insister sur le rôle des parents en négligeant d'indiquer clairement où se situe l'intérêt de l'enfant.  L'expression semble aussi susciter un vif débat sur sa signification et son application.  L'ambiguïté même de l'expression peut être source de conflits.

Le Comité sur le droit de la famille a examiné et soupesé divers facteurs dans son évaluation des quatre autres options.

L'examen, par le Comité, des lois en vigueur au pays, indique que l'argument en faveur de la modification de la loi par souci de clarté n'est pas convaincant.  Comme on l'a déjà mentionné dans le présent rapport, bien que les lois varient, toutes utilisent le terme « garde » pour signifier, à tout le moins, le soin et la surveillance continus de l'enfant, ou si l'on veut, la résidence et la prise quotidienne de décision qui s'y rattache en pratique.  La terminologie répond aux exigences en matière d'exécution des ordonnances et le concept législatif est suffisamment souple pour permettre toute forme d'arrangements parentaux qui convient à un famille donnée.

Cependant, une expression comme « responsabilité parentale » n'a peut-être pas la connotation négative que certains attribuent à la terminologie actuelle.  Le fait d'exiger ou de permettre l'utilisation de cette expression d'apparence plus neutre pourrait amener les parents à adopter une démarche plus consensuelle.  Les recherches effectuées durant le Projet du Comité sur le droit de la famille révèlent qu'un changement de terminologie pourrait promouvoir une approche moins accusatoire[50].  En prévoyant dans la législation une variété d'arrangements ou d'aménagements des rôles parentaux, on pourrait orienter les parents, les avocats et les autres professionnels, ainsi que les tribunaux, et les aider à élaborer des arrangements entre parents plus sensibles aux besoins de l'enfant, tout en tenant compte de chacun de ses parents.

D'autre part, bien des gens refusent de croire que les expressions « droit de garde » ou « droit de visite » aient des effets négatifs ou, s'ils en ont, qu'on doive nécessairement modifier la loi pour changer la terminologie servant à décrire les arrangements parentaux quand les parents ne veulent pas utiliser cette terminologie.  Depuis déjà quelques années, des parents, des avocats et des juges, partout au pays, ont délaissé la terminologie des droits de garde et de visite dans les ententes et les ordonnances du tribunal; ils ont pu le faire parce que la terminologie et la formule législatives actuelles autorisent une telle souplesse[51].  Ainsi, au Manitoba, une ordonnance typique de garde ne prévoit pas une garde exclusive avec un droit de visite.  Le plus souvent, l'ordonnance stipule que les parents ont la garde conjointe (c'est‑à‑dire qu'ils partagent la prise de décision sur les questions importantes), un parent se voyant octroyer « une partie du soin et de la surveillance physiques, à titre principal », et l'autre parent, « une partie du soin et de la surveillance physiques, ses modalités d'exercice devant être convenues entre les parties[52] ».  De plus, dans la mesure où il pourrait y avoir quelque ambiguïté dans la terminologie actuelle, les parents, les avocats et les juges sont libres d'élaborer des ententes et des ordonnances qui conviennent à la famille.

L'examen par le Comité sur le droit de la famille des lois fédérale, provinciales et territoriales actuelles n'a décelé aucune forme de sexisme dans la loi.  Mais on reconnaît que si la loi est non sexiste, c'est la mère qui, dans la majorité des cas, a la garde unique et entière ou, dans une organisation de garde conjointe, elle est le premier fournisseur de soins, tandis que le père a le rôle du parent non gardien ayant un droit de visite[53].  Il n'existe aucune raison de penser que cet écart selon le sexe résulte d'un préjugé généralisé des tribunaux.  Il est plus vraisemblable que, dans la grande majorité de ces cas, les parties ont volontiers accepté un tel arrangement.  La réalité sociale ou les perceptions des parents au sujet des rôles parentaux pourraient être en cause.

Le Comité sur le droit de la famille reconnaît essentiellement que toute réforme devrait viser à clarifier les modalités d'exercice des responsabilités parentales et à aider parents à privilégier les besoins des enfants.  Toute terminologie doit être assez souple pour convenir à l'éventail des besoins et des situations de l'enfant et de ses parents.  C'est l'efficacité des arrangements plutôt que la terminologie qui importe le plus[54].

En général, le Comité croit que les options 2, 3 et 4 pourraient satisfaire à ces principes de la réforme, selon la formulation utilisée et le soutien offert pour favoriser la mise en application et la compréhension des concepts.  Il existe tout un éventail d'appuis pour chacun de ces modèles[55].  Toutes ces options permettraient de clarifier les modalités d'exercice des responsabilités des parents pour la prise de décision et de distinguer les exigences reliées à toute décision, indiquant clairement que l'exercice des responsabilités parentales peut être partagé ou réparti entre les parents tout en respectant l'intérêt de leurs enfants.

Tout changement risque toutefois d'avoir des incidences positives et négatives.  Ces incidences éventuelles méritent une analyse plus poussée, incluant le temps qu'exige la mise en application de ces modifications, et ce, pour ne pas perturber inutilement les relations familiales.  Si on remplace les termes garde et droit de visite dans les lois en matière de droit de la famille, on pourra néanmoins continuer de les utiliser dans d'autres lois portant sur la protection de l'enfant ou sur le guardianship.  L'incidence d'un tel changement sur les lois provinciales et territoriales doit être également évaluée dans ce contexte.  De plus, même si on remplace les termes garde et droit de visite relativement aux droits et aux responsabilités des parents, il faudra peut-être conserver l'expression droit de visite dans le cas des droits des tiers, comme les grands-parents ou la famille élargie.

Toute modification à la terminologie actuelle devra aussi respecter la définition de la garde de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants afin que dans les cas visés par la Convention, il soit possible de savoir si on a enfreint une situation de garde au sens de la Convention.  Cette mesure s'impose pour éviter d'invalider les demandes de retour d'enfants canadiens enlevés.

En effet, au nombre des préoccupations du Comité sur le droit de la famille quant à l'incidence de tout changement de terminologie, on mentionnera le besoin de déterminer quels services seront nécessaires pour aider les familles à s'adapter à tout nouveau régime et d'évaluer quelle information il faudra fournir aux familles, aux avocats et aux autres personnes œuvrant dans le système de justice familiale pour toute modification de la loi.  Dans le cas des modifications législatives, en particulier à la terminologie, il faut du temps pour s'adapter à une nouvelle façon de penser.  Les parents ont besoin d'information au sujet de leurs obligations et tous les intervenants dans le système de justice familiale ont besoin de comprendre les raisons et les effets de toute modification législative.  De plus, les concepts de garde, de droit de visite et d'accès sont bien ancrés dans la société hors de la sphère du droit familial.  Ainsi, les policiers, le personnel des garderies, et des écoles et les travailleurs de la santé font couramment référence à ces concepts.  Des groupements de toutes sortes devront obtenir des informations sur l'application de la nouvelle terminologie à leur travail.

Dans d'autres provinces et territoires, l'expérience confirme qu'un programme permanent d'information et d'éducation s'impose pour mettre en place efficacement toute réforme juridique dans le domaine du droit de la famille[56].  Les groupes d'intérêt et les professionnels donnent aux modifications législatives en matière de droit familial des interprétations différentes.  Il s'agit de comprendre comment les mêmes mots utilisés dans la loi peuvent engendrer des messages différents.  Le langage a ses nuances et ses subtilités; même des modifications mineures peuvent donner au message un sens différent.

Le Procureur-général et Ministre de la famille et des services communautaires de l'Australie a formé le Family Law Pathways Advisory Group pour trouver des façons d'offrir aux familles concernées un meilleur accès au système de droit familial.  Le groupe a recommandé l'élaboration d'une stratégie d'information permanente pour communiquer avec les personnes intéressées au moment où elles en ont besoin.  Une telle stratégie permettrait d'aider celles-ci à comprendre quelles sont leurs obligations lors de la rupture du mariage et à prendre conscience de leurs responsabilités parentales permanentes envers leurs enfants.

Les consultations avec les parents et les professionnels révèlent que les problèmes au sein du système de justice familiale sont causés plus souvent par un manque de ressources pour les familles concernées que par la législation[57].  En fait, une disponibilité accrue des services de justice familiale et d'éducation aurait une incidence plus grande et plus positive sur la transformation des conditions auxquelles les familles font face pendant une séparation ou un divorce que toute modification législative[58].

Si on modifie la loi, il faudra du temps et de l'argent pour la mettre en Éuvre et pour apporter les changements opportuns aux services.

Recommandation 6

Le Comité sur le droit de la famille recommande que la loi ne privilégie aucun modèle d'organisation des responsabilités parentales après la séparation qui soit fondé sur une présomption et que la loi n'utilise aucune formulation suggérant l'existence d'un tel modèle.  En tout temps, le principe fondamental et prépondérant de l'intérêt de l'enfant doit continuer à présider aux décisions relatives aux responsabilités parentales.

Recommandation 7

Le Comité sur le droit de la famille recommande, dans le cas où un gouvernement conclut à la nécessité de modifier ou de préciser la terminologie utilisée dans sa législation, qu'il axe les modifications sur l'enfant; qu'il mette l'accent sur la responsabilité qui incombe aux parents de comprendre les besoins de leurs enfants et d'en tenir compte; et qu'il favorise l'implication des deux parents de manière constructive et sécuritaire.  On reconnaît que les options 2, 3 et 4 pourraient satisfaire à ces critères, mais non l'option 5.

Violence familiale

Une autre préoccupation importante du public et du Comité sur le droit de la famille consiste à voir si le système actuel de droit familial permet de garantir que l'on tient suffisamment compte des problèmes de violence familiale lorsqu'on doit décider de l'intérêt de l'enfant.  Les lois provinciales et territoriales traitent de la question à divers degrés.  On a critiqué la Loi sur le divorce pour son manque de clarté sur la manière dont les tribunaux doivent traiter les allégations ou les constats de violence familiale et sur la manière de régler ces questions en regard des règles favorisant le maximum de contact.  On a reproché au régime actuel de trop insister sur le contact, parfois au détriment de l'enfant.  Il faut considérer les besoins de tel enfant dans le contexte général de la vie et de la situation de cet enfant.  Le fait d'accorder plus d'importance à un critère qu'à un autre semble contraire à une démarche axée sur l'enfant[59].

Ces questions sont soulevées dans le document de consultation intitulé L'intérêt de l'enfant d'abord, Droits de garde et de visite et pensions alimentaires pour enfants au Canada.  Malgré la variété des réponses, il semble qu'un grand nombre de répondants reconnaissent que la violence familiale peut avoir de graves conséquences pour les enfants, ainsi que pour leurs pourvoyeurs de soins, et qu'il faudra peut-être clarifier davantage la loi pour s'assurer de ne pas compromettre la sécurité des enfants.  Il apparaît également évident que les participants à la consultation ont constaté la nécessité d'un solide réseau de services à l'appui des mesures législatives[60].

Les options de réforme vont de l'inclusion d'une déclaration de principe générale dans la loi pour indiquer que les enfants méritent de se développer dans un environnement sain, à l'abri des préjudices sur les plans émotionnel, physique et psychologique, jusqu'à l'inclusion de présomptions précises interdisant le contact quand la violence familiale s'avère un facteur à prendre en compte.  Beaucoup craignent, toutefois, qu'une modification des normes juridiques n'ait des résultats négatifs soit en dissuadant les parties d'exprimer leurs inquiétudes à l'égard de la violence familiale, soit en créant des incitatifs visant à présenter cette violence comme un problème plus grave que ne le justifient les circonstances.

Parallèlement, on craint que certains parents ne fassent de fausses allégations de violence envers les enfants à l'encontre de l'autre parent afin d'en tirer un avantage dans les procédures de garde.  La recherche indique que les avis sont partagés sur cette question et que le nombre réel de fausses allégations semble assez faible[61].  Cependant, le manque de confiance et l'absence de communication constructive entre les parties peuvent donner lieu à des malentendus ou à des interprétations erronées qui accentuent le conflit et la méfiance.  La difficulté consiste encore à trouver le bon équilibre pour s'assurer que la sécurité de l'enfant ne soit pas compromise et que la communication de l'enfant avec ses deux parents ne soit pas limitée sans motif suffisant.

Le Comité sur le droit de la famille souligne l'incidence négative importante de la violence familiale sur le sentiment de sécurité des enfants, leur estime de soi et l'orientation future de leurs relations.  Cette incidence négative se manifeste, que les enfants soient directement ou indirectement victimes de la violence.  Cependant, chaque cas doit néanmoins être évalué en fonction des risques antérieurs, actuels et futurs de violence ou des effets négatifs de la violence sur les relations.  Le Comité reconnaît que la violence peut surgir de façon isolée ou s'insérer dans un comportement permanent.  Il faut examiner de près les conséquences des risques particuliers ou des effets négatifs de la violence familiale dans chaque cas où ce facteur apparaît.  L'objectif premier de veiller à la sécurité des enfants et de favoriser leur bien-être doit guider l'ensemble des décisions.  Ainsi, les parents et les tribunaux devraient s'assurer que leurs décisions n'entraînent pas de situations à risque pour l'enfant.

Recommandation 8

Le Comité sur le droit de la famille recommande, pour éviter que des ordonnances du tribunal ne nuisent à la sécurité des enfants et les exposer à des dangers, que :

(a) la loi ne contienne aucune présomption sur le degré de communication d'un enfant avec ses parents;
b) l'intérêt de l'enfant soit défini par des critères législatifs tels que :

  • les antécédents de violence familiale et le potentiel de violence familiale dans l'avenir;
  • l'amélioration de la communication avec les deux parents quand cette démarche est sécuritaire et constructive.

Recommandation 9

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de s'attacher à renforcer les mécanismes de soutien offerts aux familles exposées à la violence familiale, y compris les programmes de counselling en situation de crise ainsi que des programmes de counselling pour les enfants exposés à la violence familiale.



Les relations très conflictuelles

À l'heure actuelle, ni la Loi sur le divorce ni les lois provinciales et territoriales ne renferment de dispositions portant directement sur les relations très conflictuelles.  On a fait valoir que des mesures législatives s'imposent dans les cas précis où un parent ou un enfant prétend être en danger à cause d'une situation très conflictuelle.  Les avis sont partagés au sujet de l'« aiguillage » des cas de violence ou de relations très antagonistes[62].  Certains pensent qu'il suffit que le cas soit devant le tribunal pour justifier une intervention judiciaire car il peut y avoir des problèmes sous-jacents de déséquilibre des pouvoirs dans la famille.  D'autres pensent que le fait de soumettre au processus judiciaire tous les cas de relations très conflictuelles, comportant par exemple de la violence familiale, en écartant les autres techniques de résolution de conflits, est empreint de paternalisme et prive la victime de son autonomie[63].

Les recherches semblent montrer que seuls dix à quinze pour cent des couples vivent d'importants conflits légaux et interpersonnels[64].  Les conflits familiaux peuvent surgir et disparaître en fonction de facteurs comme le stress financier, les nouvelles relations et les problèmes de garde et de développement des enfants.  La recherche a en outre démontré que le niveau et l'intensité des conflits parentaux affectent gravement la capacité d'adaptation des enfants après la séparation et le divorce.  Les parents prisonniers d'un cycle conflictuel peuvent ne pas se rendre compte du tort causé.  Les parents qui coopèrent après leur séparation améliorent les chances de voir leurs enfants établir de bonnes relations avec eux et réussir à s'adapter au divorce.  Les conflits et le manque de coopération entre les parents diminuent la capacité d'adaptation des enfants après la séparation.  Lorsque les conflits parentaux prennent le devant de la scène, les besoins des enfants ne reçoivent pas toute l'attention nécessaire.  Les parents qui entretiennent des relations très conflictuelles peuvent avoir de la difficulté à distinguer leurs propres besoins de ceux de leurs enfants, ce qui nuit à leur aptitude à apprendre comment communiquer ou à partager leurs rôles parentaux de manière efficace[65].

La recherche montre qu'il n'y a pas de définition généralement acceptée de ce qui constitue exactement un divorce très conflictuel, même si on reconnaît que de telles situations diffèrent du niveau normal de perturbation lié à la rupture du mariage[66].  La plupart des couples qui se séparent vivent une période de transition pendant laquelle ils vivent des perturbations émotionnelles liées à la fin de leur relation.  Cependant, on ignore pourquoi certains couples séparés ou en voie de se séparer s'engagent dans des batailles amères, prolongées et coûteuses au sujet de la garde, des droits de visite et de la pension alimentaire alors que la majorité des familles touchées par la séparation ou le divorce semblent capables d'éviter ces disputes interminables[67].

La recherche indique que les situations très conflictuelles peuvent causer de graves problèmes pour les enfants et les parents.  Les enfants éprouvent de la peur, de la tristesse, de l'impuissance, de la culpabilité et un conflit de loyauté.  Les parents ressentent des émotions semblables et signalent que divers problèmes surgissent dans les situations très conflictuelles, incluant les menaces d'agression et les voies de fait, le non-respect du droit de visite, la limitation des relations de l'enfant avec les membres de la famille étendue, le non-versement de la pension alimentaire et le refus de donner à l'autre parent l'accès à l'information.  Les travailleurs de la santé mentale et les avocats indiquent aussi que les situations très conflictuelles sont critiques, marquées par la colère et l'impuissance, la violence familiale ainsi que la violence physique, psychologique ou verbale.  Les avocats et les juges, d'autre part, associent souvent les cas de relations très antagonistes à la durée accrue des procès et aux procédures répétées[68].

Les cas de séparation et de divorce marqués par un niveau élevé de conflit semblent partager plusieurs caractéristiques, notamment les difficultés émotionnelles des parents et des enfants devant affronter ces situations hautement conflictuelles; les problèmes connexes découlant du conflit entre les parents, comme les fausses allégations d'abus ou le refus d'accès; et la simple réalité que les parents dans des situations conflictuelles entament plus de poursuites que les autres couples, ce qui entraîne une augmentation du temps passé en cours et des ressources requises, ainsi que du temps et des ressources que les parents eux-mêmes consacrent au règlement du conflit.  Dans ces situations, il est difficile de voir comment on peut tenir compte de l'intérêt des enfants[69].

Si les consultations publiques ont soulevé cette question et incité les participants à suggérer des réponses adéquates, que ce soit en termes de réforme législative ou d'implantation de services, il semble clair que, la violence familiale mise à part, il serait difficile de proposer une bonne définition des cas de relations très conflictuelles se prêtant à une réponse ou à des critères juridiques.  La solution, dans le cas de telles relations, consiste à aider les parents à privilégier les besoins de leurs enfants, à améliorer les aptitudes parentales à communiquer et à résoudre leurs conflits, de même qu'à appuyer les démarches ou les services de soutien permettant de mieux cerner et aiguiller les cas de relations très antagonistes afin d'intervenir plus tôt et de façon plus efficace[70].  Par exemple, dans le programme d'éducation des parents du Manitoba, Pour l'amour des enfants, on tient des séminaires distincts pour les parents dont les relations sont plus conflictuelles.  Ces séminaires mettent l'accent sur des méthodes d'exercice des rôles parentaux qui soient sécuritaires et qui limitent le plus possible ou éliminent les contacts entre parents après la séparation.  La section G du présent rapport, intitulée « Choix de services et résultats », traite de ces questions.

Recommandation 10

Le Comité sur le droit de la famille recommande de s'occuper des cas de relations très conflictuelles grâce à une combinaison de services et de mécanismes de soutien afin de réduire le plus possible l'incidence négative des conflits sur les enfants et les familles.

Point de vue des enfants

Pour cerner l'intérêt de l'enfant, les décideurs doivent entendre le point de vue de l'enfant afin de savoir ce qu'il pense de la façon dont ses parents comptent prendre soin de lui.  Le Canada est partie à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, laquelle stipule que :

Les États parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité.

À cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'une organisation approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale (article 12 de la Convention).

Les avis sont partagés quant au meilleur moment et à la meilleure façon d'entendre le point de vue des enfants[71].  Il faut évaluer la pertinence de permettre à l'enfant de s'exprimer dans le cadre du processus décisionnel par rapport au besoin de tenir l'enfant à l'écart des conflits parentaux, et éviter qu'il ne s'y trouve mêlé.  Les enfants ne devraient pas être mis en situation de choisir un parent de préférence à l'autre.

Si la Loi sur le divorce ne comporte aucune disposition instruisant expressément le tribunal de prendre en compte les désirs des enfants, la plupart des lois provinciales et territoriales ordonnent au tribunal de prendre en compte le point de vue et les préférences de l'enfant, habituellement dans le cadre d'une évaluation de l'intérêt de celui-ci[72].  Au Canada, la loi reconnaît en général que le poids à accorder aux désirs des enfants croît avec l'âge et le développement de ceux-ci.

Dans certaines situations, les tribunaux ont nommé un représentant pour l'enfant dans une instance afin de décider de ses droits de garde et de visite.  En Ontario, le Bureau de l'avocat des enfants représente un enfant dont le cas répond à ses critères.  Au Manitoba, jusqu'à tout récemment, l'aide juridique subventionnait la nomination d'avocats par le tribunal pour agir à titre d'amicus curiae.  Le rôle de l'amicus curiae, ou intervenant désintéressé, était de conseiller le tribunal quant à l'intérêt de l'enfant, soit de transmettre au tribunal les désirs exprimés par l'enfant, mais sans prendre ses instructions.  À l'heure actuelle, le bureau de la Conciliation familiale du Manitoba mène un projet pilote, le Service de consultation, qui permet à l'enfant d'exprimer son point de vue.  Un avocat est à la disposition du tribunal pour rencontrer les parents et l'enfant dans un bref délai.  L'avocat présente ensuite un bref rapport verbal ou écrit au tribunal qui peut inclure de l'information au sujet des désirs et des préoccupations de l'enfant.

Les rapports d'experts, comme ceux du service ad hoc du Manitoba, s'avèrent la façon la plus courante de communiquer le point de vue de l'enfant au tribunal.  L'expert, tel le travailleur social, interroge l'enfant et communique au tribunal, souvent dans le cadre d'un rapport d'évaluation psychosociale sur les droits de garde et de visite, le point de vue exprimé par l'enfant.  Exceptionnellement, le juge peut interroger les enfants[73].

La recherche effectuée dans le cadre du projet du Comité sur le droit de la famille indique qu'à l'heure actuelle, les enfants n'ont pas souvent l'occasion, en général, de participer aux procédures de prise de décision concernant les droits de garde et de visite qui les touchent.  La recherche a porté sur une gamme de solutions possibles, allant de l'intervention plus directe de l'enfant avec un conseiller ou un avocat, à la mise en place de services de soutien pour les enfants[74].

Les jeunes qui ont participé aux consultations, intitulées L'intérêt de l'enfant d'abord,étaient enthousiastes à l'idée de faire connaître leur point de vue.  Six thèmes ont été régulièrement abordés durant les ateliers : les conflits parentaux; l'abandon par le parent ou le manque d'intérêt envers l'enfant; le point de vue de l'enfant; la disponibilité; la réceptivité et la responsabilité des professionnels; la pension alimentaire pour enfants; et les préoccupations face à l'avenir.  La grande majorité des jeunes voulaient que les services et la législation sur le divorce leur permettent d'exprimer leur point de vue au moment de prendre des décisions les concernant, mais ils craignaient clairement de se retrouver au cœur du différend[75].

Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants a reconnu expressément dans ses recommandations la nécessité de permettre aux enfants de faire valoir leur point de vue par l'entremise d'un professionnel ou d'un autre représentant, incluant un avocat au besoin, au moment où les parents prennent des décisions les concernant[76].

Puisque le projet du Comité sur le droit de la famille en vue de réformer les droits de garde et de visite est avant tout axé sur l'enfant, il est prioritaire de répondre aux besoins des enfants de faire connaître leur point de vue, et ce, sur une tribune officielle ou officieuse, et par l'entremise de mécanismes efficaces.

Recommandation 11

Le Comité sur le droit de la famille recommande à chaque gouvernement d'examiner les lois, les procédures et les services en vigueur afin de permettre que :

  • les parents et les tribunaux puissent prendre connaissance du point de vue de l'enfant;
  • l'information soit obtenue de l'enfant et communiquée au besoin aux parents et au tribunal d'une manière qui tienne compte de l'intérêt de l'enfant, de son âge et de son développement et en évitant que l'enfant ne se sente responsable des décisions relatives à la garde.

Respect des obligations en matière de garde et de droit de visite

Introduction

Les parents peuvent avoir des droits de garde ou de visite conformément à la loi, en vertu d'une entente écrite ou à la suite d'une ordonnance du tribunal.  Les tiers, comme les grands-parents et d'autres personnes, peuvent aussi avoir des droits de garde ou de visite en vertu d'une ordonnance ou d'une entente.  En cas de négation d'un droit de garde ou de visite, on dispose d'une vaste gamme de solutions et de recours légaux pour faire respecter le droit en question[77].Certaines solutions ne peuvent s'appliquer que s'il y a une ordonnance du tribunal; d'autres s'appliquent uniquement aux enfants d'un certain âge ou dans les cas mettant en cause plus d'une juridiction.  Les solutions varient des négociations officieuses entre les parties ou leurs avocats, à la médiation, au recours civil et, parfois, au dépôt d'accusations criminelles.  Le critère employé par les tribunaux partout au Canada dans le choix des arrangements parentaux pour les enfants et les modalités de visite pour les enfants se résume à « l'intérêt de l'enfant ».  Selon le mécanisme d'exécution utilisé pour faire respecter un droit de garde ou de visite, le critère employé par le tribunal peut s'avérer très différent ou invoquer l'intérêt des enfants dans un sens général plutôt que dans un sens précis (comme dans le cas des procédures en vertu de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants).

Même si on accorde beaucoup d'attention aux situations où un parent allègue que l'autre parent lui refuse à tort le droit de visite qui lui avait été accordé par les tribunaux, il arrive dans certains cas, qu'un parent néglige d'exercer ce droit tel que prévu dans les ordonnances.  Des problèmes peuvent également survenir en ce qui concerne l'exécution d'un droit de garde, que la situation s'apparente ou non à un enlèvement par un parent[78].

Le problème de l'exécution des ordonnances en matière de droit de visite n'est pas facile à résoudre puisque les allégations varient du non-respect grave et de l'enlèvement à la déception résultant du refus de communication ou du non-exercice du droit de visite au moment prévu.  De plus, on ignore l'importance et la nature véritable des problèmes liés au droit de visite.  Il est également difficile de trouver des solutions efficaces, compte tenu de la grande diversité des circonstances dans chaque cas et du fait que les décisions doivent viser l'intérêt de l'enfant.  Au lieu d'insister sur des réactions punitives, les stratégies devraient peut-être viser à prévenir les situations conflictuelles ou les malentendus qui mènent au non-respect ou au non-exercice du droit de visite[79].

Même si le Comité sur le droit de la famille a indiqué plusieurs façons possibles d'améliorer les lois portant sur le respect des droits de garde et de visite des enfants et sur la loi de mise en Éuvre de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, il faut s'appliquer à trouver d'autres solutions pour régler les cas difficiles, à analyser les travaux en cours sur le plan international (incluant un rapport paru récemment au Royaume-Uni[80]) et à présenter aux sous-ministres des recommandations plus précises.

Recommandation 12

Étant donné l'envergure et la complexité des questions reliées au respect des droits de garde et de visite des enfants et des cas d'enlèvement d'enfants par un parent, le Comité sur le droit de la famille recommande d'entreprendre un examen plus approfondi de ces questions.



Tout en reconnaissant qu'il est toujours nécessaire de se pencher sur certaines questions et sur certains services, voici une brève description des recours actuels[81].

Recours non judiciaires

Dans les cas moins complexes, les parents peuvent avoir intérêt à tenter une médiation ou à négocier le règlement des difficultés en matière de droit de visite.  Ainsi, un conflit au sujet du moment des visites ou de la modification du calendrier des visites peut être traité par la médiation ou la négociation par l'intermédiaire de l'avocat des parties.  Les programmes d'information des parents offerts au début du processus (idéalement avant le prononcé d'une ordonnance du tribunal ou avant la conclusion d'un accord de médiation) peuvent aider de nombreuses familles à éviter, dans l'avenir, tout problème lié à l'exécution des ordonnances de garde ou de visite.  Ces programmes peuvent être très utiles aux parents pour leur permettre de comprendre les besoins affectifs de leurs enfants aux diverses étapes de leur développement et la façon dont ces besoins évoluent avec le temps et peuvent exiger une plus grande souplesse dans l'exercice du droit de visite et des arrangements parentaux.

Outrage civil

Lorsqu'une ordonnance du tribunal comporte un droit de garde ou de visite, il est possible d'utiliser la solution de l'outrage civil (les tribunaux inférieurs n'ont pas la compétence pour reconnaître une personne coupable d'outrage à l'égard d'une ordonnance, à moins que l'outrage ne se produise au tribunal lui-même).  Les règles judiciaires peuvent prévoir des pénalités pour les personnes reconnues coupables d'outrage.  De même, les lois d'exécution des droits de garde et de visite contiennent parfois toute une gamme de dispositions en matière d'exécution.

Dans les demandes d'outrage, un certain nombre de principes sont d'une importance capitale :

  • la partie intimée doit être au courant des dispositions de l'ordonnance; la preuve de la signification à la personne peut être nécessaire;
  • les détails de l'outrage allégué doivent être indiqués dans la requête;
  • la requête doit être signifiée en personne;
  • l'inobservation de l'ordonnance du tribunal doit être délibérée.

Les tribunaux ont considéré qu'une procédure pour outrage devrait être une solution de dernier recours lorsqu'il n'existe plus d'autres moyens.  Les personnes trouvées coupables d'inobservation d'une ordonnance d'accès (ou de droit de visite) ont été condamnées notamment à des périodes d'incarcération, à des sentences suspendues, à des amendes, à des ajournements, à des visites compensatoires, à des visites supervisées et à une suspension de l'ordonnance alimentaire ou d'autres paiements en attente de la reprise du droit de visite.

Pour qu'un outrage soit une option envisageable, l'ordonnance d'accès (ou de droit de visite) doit être très claire.  Cela signifie généralement que l'ordonnance doit porter sur une période précise de visite et que les jours et les heures doivent être précisés.  En général, on ne pourrait pas utiliser une ordonnance prévoyant un droit de visite raisonnable pour demander qu'une personne soit reconnue coupable d'outrage civil.  Dans un tel cas, la partie à qui le droit de visite est refusé devrait plutôt demander au tribunal de préciser les périodes de visites.

La législation civile relative au respect des droits de garde et de visite

Certaines provinces et certains territoires sont dotés de lois d'exécution des droits de garde prévoyant un certain nombre de moyens pour assurer l'observation des ordonnances de garde ou d'accès.  Ces lois peuvent être invoquées en cas d'infraction à l'ordonnance dans la province en question (si un enfant est enlevé ou en voie d'être enlevé vers la province, dans la province ou depuis la province en question ou que le droit de visite est refusé dans cette province, par exemple).

Les lois d'exécution des droits de garde et de visite s'appliquent aux ordonnances de garde ou de visite rendues par les tribunaux de la province en question, ainsi que par les tribunaux des autres provinces ou territoires ayant compétence pour prononcer des ordonnances de garde.  En général, ces lois ne permettent pas aux personnes bénéficiant d'un droit de garde ou de visite, conformément à des ententes écrites ou par l'application de la loi, d'invoquer ces dispositions.  Dans la plupart des provinces et territoires, on peut invoquer les lois d'exécution du droit de garde en l'absence d'accords réciproques officiels avec une autre province, contrairement aux lois d'exécution réciproque des ordonnances alimentaires.

Ces lois limitent la capacité des tribunaux à substituer leur propre ordonnance de garde et de visite aux cas où un enfant n'a pas de liens significatifs avec la province qui a prononcé l'ordonnance originale, alors qu'il a des liens dans la province en question de même qu'aux cas où toutes les parties résident habituellement dans la province du tribunal saisi, et aux cas où l'enfant subirait un préjudice grave s'il était renvoyé au parent gardien nommé dans l'ordonnance (ou si le parent non gardien était autorisé à communiquer avec l'enfant).

Les ordonnances d'exécution, en vertu de ces lois, sont exécutoires dans la province dans laquelle elles sont prononcées.  Ainsi, lorsqu'un enfant est enlevé d'une province pour être emmené dans une autre puis dans une troisième, on peut avoir à engager des procédures plusieurs fois.

Ces lois contiennent une variété de recours qui peuvent être utilisés pour faire exécuter une ordonnance de garde ou de visite qui est violée dans la province en question.  Parmi ces recours, on trouve les ordonnances relatives à l'interdiction de molester, le dépôt d'un cautionnement ou la signature d'un engagement, l'autorisation pour une personne d'appréhender et de livrer l'enfant à une autre personne, un transfert de biens ou de pension alimentaire à un fiduciaire et la saisie des passeports ou d'autres documents.  Certains recours ne s'appliquent que si l'ordonnance contient une clause d'interdiction de déplacer l'enfant.

Dans certaines provinces ou certains territoires, on a eu recours à la législation en matière d'exécution des ordonnances de garde, pour mettre en Éuvre la Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.

Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants

La Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants a été conclue en octobre 1980.  Le Canada était parmi les quatre premiers signataires.  La Convention a été mise en œuvre dans toutes les provinces et tous les territoires canadiens.  Chaque province et territoire possède une Autorité centrale chargée de certaines obligations conformément aux dispositions de la Convention; il existe également une Autorité centrale fédérale.

La Convention de La Haye régit les cas d'enlèvements d'enfants internationaux, mais pas ceux qui ont lieu entre provinces et territoires.  La Convention traite des questions de compétence et prévoit, à quelques exceptions près, que les tribunaux qui doivent traiter des questions de garde sont ceux du lieu de résidence habituel de l'enfant avant son retrait.  Tout comme les lois d'exécution provinciales des droits de garde et de visite, la Convention de La Haye fixe un cadre permettant de déterminer le meilleur moyen de résoudre les différends relatifs à la garde et, en ce sens, vise l'intérêt de l'enfant.  La Convention s'appuie sur le principe que l'on répond au mieux à l'intérêt de l'enfant en le protégeant de l'enlèvement et en faisant respecter le droit de garde.  Elle ne traite ni du mérite d'autres revendications concernant l'enfant, ni de l'intérêt de l'enfant dans le contexte de la résolution de ces revendications particulières.

La Convention de La Haye s'applique aux enfants de moins de 16 ans.  Elle s'applique aux cas où le droit de garde par application d'une loi ou conformément à une ordonnance du tribunal n'est pas respecté.  La Cour suprême du Canada a pris en compte la Conventionde La Haye dans deux cas[82].

La cour a indiqué que le retrait d'un enfant en contravention d'une clause d'interdiction de déplacer l'enfant prévue dans une ordonnance provisoire constituait un déplacement illicite au sens de la Convention, mais elle a indiqué également que cela ne serait pas nécessairement le cas pour une ordonnance finale de garde.  Bien que l'article 21 de la Convention de La Haye permette de demander à une Autorité centrale d'établir ou de faire exécuter un droit de visite, elle n'est pas claire en ce qui concerne la nature de l'obligation internationale à cet égard.  Par conséquent, de nombreux pays, y compris la plupart des autorités centrales canadiennes, sont d'avis qu'elles ne participeront pas activement aux cas de fixation et d'exécution du droit de visite, même si une aide juridique est possible à cette fin à certains endroits.  La quatrième Commission spéciale, qui a revu le fonctionnement de la Convention en 2001 à La Haye, a noté que les questions liées au droit de visite étaient d'une importance critique.  Il a été proposé de tenir une réunion spéciale à La Haye pour discuter plus à fond de ce sujet important.

Sanctions pénales



En janvier 1983, des dispositions particulières du Code criminel du Canada, faisant de l'enlèvement d'un enfant par un parent une infraction pénale, sont entrées en vigueur.  Les articles 282 et 283 du Code criminel interdisent les enlèvements d'enfants par un parent dans les cas où il existe une ordonnance de garde prononcée par un tribunal canadien et dans les cas où il n'existe pas d'ordonnance de garde, respectivement.  Par conséquent, l'article 283 s'applique aux cas où les parents continuent d'avoir la garde conjointe de leur enfant par application de la loi, lorsqu'il existe une entente écrite, lorsqu'il existe une ordonnance de garde prononcée à l'étranger ou lorsque le parent qui a enlevé l'enfant ne croyait pas ou ne savait pas qu'il existait une ordonnance de garde valide.  Les ministres responsables de la Justice ont approuvé en 1989 les Lignes directrices types touchant le dépôt d'accusations contre un parent ayant enlevé un enfant.  Les ministres, à leur réunion d'octobre 1998, ont approuvé les Lignes directrices révisées touchant le dépôt d'accusations contre un parent ayant enlevé un enfant.  Au moment où les lignes directrices ont été élaborées, le Comité sur le droit de la famille a recommandé que les policiers aient un accès direct à des personnes désignées ayant une expérience dans le domaine du droit de la famille, au sein de leur juridiction et, plus particulièrement, de pouvoir téléphoner à ces personnes en dehors des heures de travail normales.



Tous les cas d'infraction aux ordonnances de garde ou de visite ne sont pas des enlèvements d'enfants par un parent.  Selon la loi ou le règlement en vertu desquels l'ordonnance de garde ou de visite a été prononcée, d'autres accusations peuvent être portées.

Non-exercice du droit de visite



Le non-exercice du droit de visite peut être aussi préjudiciable à l'enfant que le refus du droit de visite.  Plusieurs provinces ont des lois qui prévoient qu'un parent gardien peut demander une compensation financière si l'autre parent n'exerce pas son droit de visite tel qu'il est prescrit dans l'ordonnance originale[83].



Dispositions relatives à la compétence prévues dans la législation en matière de droits de garde et de visite

Certains textes de loi provinciaux et territoriaux prévoient des règles de compétence des tribunaux pour déterminer les droits de garde et de visite qui sont fondées sur la résidence habituelle de l'enfant, en précisant quelques exceptions liées au consentement et à la sécurité.  Il y aurait exception liée au consentement, par exemple, lorsque les parents s'entendent sur la compétence du tribunal d'une province autre que celle où l'enfant réside habituellement.  Il y aurait exception fondée sur la sécurité lorsque le tribunal craint que le fait de ne pas exercer sa compétence représente un risque pour l'enfant.  D'autres provinces et territoires n'ont pas ce genre de dispositions, mais ont des législations relatives à l'exécution du droit de garde qui prévoyaient des critères semblables concernant la reconnaissance d'une ordonnance rendue à l'extérieur (et la capacité de ce tribunal à exercer sa compétence et à substituer sa propre ordonnance de garde ou de visite).

La Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants traite également des questions de compétence et prévoit, à quelques exceptions près, que les tribunaux ayant compétence pour s'occuper des questions de garde sont ceux du lieu de résidence habituelle de l'enfant avant son déplacement.

La Loi sur le divorce prévoit que les tribunaux d'une province ou d'un territoire où l'un ou l'autre des époux ou ex-époux réside habituellement a compétence pour traiter des questions de garde.  Le tribunal peut transférer une procédure de garde à un tribunal d'une autre province dans le cas où « l'enfant à charge concerné par l'ordonnance a ses principales attaches dans cette province[84] », mais n'est pas obligé de le faire.  Cette approche diffère considérablement des lois provinciales en matière de garde et d'exécution du droit de garde.  Elle a eu également pour résultat que la garde d'enfants résidant habituellement dans une province soit déterminée par des tribunaux d'une autre province dans laquelle les enfants avaient des liens plus ténus ou plus récents.

Recommandation 13

Le Comité sur le droit de la famille recommande que la Loi sur le divorce et les lois provinciales et territoriales en la matière confèrent aux tribunaux de la province ou du territoire où se trouve la résidence habituelle de l'enfant la compétence sur les questions relatives aux de garde et de visite, sous réserve de restrictions fondées sur le consentement et sur des considérations de sécurité et compte tenu, si elles s'appliquent :

  • des dispositions de certaines lois provinciales concernant la compétence en matière d'attribution des droits de garde et de visite;
  • des législations spécifiques relatives à l'exécution du droit de garde;
  • de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.

G. CHOIX DE SERVICES ET RÉSULTATS



On a demandé au Comité sur le droit de la famille d'étudier les réponses, tant du point de vue de la législation que des services de justice familiale, aux problèmes auxquels sont confrontés les enfants lorsque leurs parents se séparent.  Selon l'expérience des provinces et des territoires, les services sont essentiels pour appuyer les objectifs stratégiques et législatifs afin d'aider les familles à surmonter les difficultés de la séparation de la façon la plus saine possible pour les parents et leurs enfants.  Mettre l'accent sur l'aspect législatif, plutôt que sur la prestation de services et sur les besoins concrets, ne permettrait pas de répondre adéquatement à tous les besoins complexes des familles.



Le programme de recherche sur la garde et le droit de visite va dans le sens de cette position.  Presque tous les rapports des chercheurs recommandent des programmes et des services pour les parents et les enfants[85].  Le public exige une grande diversité de services pour les familles, comme en témoignent les réponses aux consultations, intitulées L'intérêt de l'enfant d'abord [86].  Comme le rapport sur les consultations le mentionne :

Lorsqu'on leur demande quels facteurs pourraient permettre aux parents de bien jouer leur rôle de parent, les répondants font état d'une grande diversité d'enjeux qui touchent les parents eux-mêmes et leurs relations, le soutien accordé aux deux parents par le système juridique et les différents services de soutien disponibles.

Les répondants insistent sur la nécessité d'améliorer les services de formation et d'information (tant pour les parents que pour la communauté juridique), de soutien (comme les centres de visites supervisées ou les coordonnateurs parentaux) et d'aide juridique.  À leur avis, pour améliorer l'efficacité de ces services, il faut les offrir au bon moment et en faciliter l'accès[87].

De plus, il est clair d'après l'expérience des autres pays que les changements législatifs entraînent une demande accrue de services et que le nombre de litiges peut augmenter dans la même mesure qu'augmente la demande d'implantation de nouveaux services.  Les modifications législatives peuvent faire ressortir une insatisfaction sous-jacente à l'égard du système de justice familiale et exercer des pressions accrues sur tous les éléments du système à la fois.  Et cette nouvelle demande peut persister à moyen terme (cinq à dix ans).

Les changements législatifs introduits en Australie, par exemple, se sont accompagnés de la création et de l'expansion de centres de visites supervisées.  Ces services se sont révélés un élément nécessaire du nouveau système en renforçant le droit de l'enfant à avoir des contacts avec les deux parents.  Des pressions s'exercent de plus en plus pour étendre ces services de visites supervisées à un plus grand nombre d'endroits dans le pays.  Les demandes de résidence et de contact adressées aux tribunaux ont plus que doublé dans l'année qui a suivi le changement législatif et sont restées relativement constantes à ce niveau pendant les quatre années suivantes.  Quatre-vingt nouveaux magistrats ont été nommés pour faire face à cette nouvelle demande de règlement par les tribunaux[88].

Reconnaissant que le droit de la famille relève de la compétence partagée du fédéral et des provinces et que les préoccupations sont communes lorsqu'il s'agit du bien-être des enfants et des familles canadiennes qui vivent un divorce ou une séparation, le Comité sur le droit de la famille estime qu'il incombe aux gouvernements provinciaux et territoriaux et au gouvernement fédéral de soutenir la mise en place de services.

Cinq principaux thèmes concernant le développement de services ont été présentés aux ministres à leur réunion de septembre 2001.  Il s'agit de l'information et de l'éducation du public et des professionnels; la résolution des différends; l'exécution des ordonnances; l'aide juridique en matière familiale; et les modèles de tribunaux de la famille.  Ces services exigent des mesures non seulement de la part du gouvernement mais également des particuliers, des collectivités et des professionnels collaborant dans un cadre intégré.  Si ces intervenants Éuvrent en collaboration, ils peuvent offrir une réponse intégrée aux besoins nouveaux des enfants et des familles qui traversent les différentes étapes d'une transition.

Information et éducation pour le public et les professionnels

Les programmes et services d'information et d'éducation destinés au public et aux professionnels ont pour objectifs d'aider les familles à faire face au traumatisme de la séparation, de permettre aux parents de faire des choix éclairés concernant l'exercice de leurs responsabilités parentales et d'aider ceux-ci à partager ces responsabilités le plus efficacement possible.  Ces programmes, d'une part, fournissent de l'information aux familles, de même qu'aux professionnels qui travaillent auprès d'eux, sur les questions légales, le développement de l'enfant, la résolution des conflits, les méthodes de communication et les ressources et, d'autre part, ils aident les parents à acquérir les compétences et les techniques susceptibles d'améliorer leurs aptitudes à exercer conjointement leurs rôles parentaux.  Les parents qui se séparent ou qui divorcent ont besoin d'information et peuvent aussi avoir besoin d'aide pour comprendre les types d'entente qu'ils sont susceptibles de conclure pour s'occuper de leurs enfants; pour comprendre les incidences de ces ententes sur leurs enfants; et pour comprendre ce qu'ils vivent, eux-mêmes et leurs enfants.

Cette information peut aider les parents et les enfants à comprendre les conséquences du divorce et de la séparation, les solutions possibles et les façons de créer des liens constructifs qui soutiennent les nouvelles relations familiales.  Cette information doit être donnée pendant les périodes de crise pour que les parents puissent se concentrer sur les décisions immédiates et éviter de susciter des conflits inutiles.  Il est aussi important que les parents en instance de divorce soient bien informés pour qu'ils sachent quelles options choisir et pour que les conflits soient réduits au minimum.  Après la séparation, l'information permet d'assurer la continuité des ententes et favorise la coopération et les interactions positives entre parents et entre parents et enfants.  En effet, il peut arriver que des familles sur le point de se séparer y renoncent lorsqu'elles disposent d'une information et d'un soutien appropriés.

Information des parents

Les participants aux consultations nationales sur L'intérêt de l'enfant d'abord ont été nombreux à demander un meilleur accès à de l'information au moment opportun et sous diverses formes.  Les parents séparés ou en instance de séparation ont besoin d'information sur les sujets suivants :

  • les arrangements parentaux (par exemple la résidence, le temps passé avec chaque parent, les décisions quotidiennes, le développement de l'enfant et ses besoins, les grandes orientations, la mobilité);
  • la législation relative aux droits de garde et de visite;
  • les options de règlement des différends (par exemple la médiation, la conciliation, l'arbitrage, les plans parentaux, la négociation, les poursuites judiciaires);
  • les ressources et services disponibles dans la collectivité[89].

Pour trouver cette information, les parents peuvent parler avec des amis, des membres de la famille, des conseillers, des médecins, des autorités religieuses, des enseignants, le personnel des services à l'enfance et d'autres membres de la collectivité.  Souvent, les amis, les membres de la famille ou les services communautaires ne disposent pas de l'information nécessaire ou donnent des renseignements inexacts aux parents qui peuvent également recevoir des avis divergents et parfois contradictoires.  De nombreux parents se tournent vers les avocats pour obtenir cette information.  Les avocats en pratique privée doivent demander des honoraires pour le temps qu'ils consacrent à donner ces renseignements.  Étant donné qu'une compétence en matière juridique n'est pas nécessaire pour offrir l'information de base, le recours à un avocat n'est donc pas toujours la façon la plus efficace.  De plus, certains avocats n'ont pas toute l'information nécessaire, dont une bonne partie est fournie sous différentes formes par le gouvernement et les organismes communautaires[90].

Ces dernières années, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont tous créé et mis en œuvre des services et des programmes touchant ce domaine.  Voici des exemples de la façon dont l'information sur le droit de la famille est rendue plus accessible au public, compte tenu de la disponibilité des ressources :

  • Documents imprimés  Les publications qui expliquent en langage clair l'information essentielle (les arrangements parentaux, le droit, les différents modes de résolution des conflits, les services offerts) devraient être largement disponibles.  Idéalement, ces publications devraient être offertes en différentes langues afin de pouvoir joindre tous les membres de la communauté.  Par exemple, au Manitoba, le dépliant intitulé Le droit de la famille au Manitoba, contenant des informations de base sur toutes ces questions ainsi que sur le droit de la famille, est distribué à de nombreux fournisseurs de services afin qu'ils le distribuent aux parents de la province.
  • Lignes téléphoniques  La plupart des provinces et territoires ont des lignes téléphoniques sans frais où un personnel compétent répond aux demandes de renseignements du public et renvoie aux ressources pertinentes pour obtenir une information plus détaillée, de l'aide et des conseils juridiques.  La Colombie-Britannique administre une ligne téléphonique sans frais sur le droit de la famille qui offre des renseignements enregistrés sur divers sujets.
  • Information électronique  De nombreuses familles ont maintenant des ordinateurs et peuvent donc accéder à de l'information sur cédérom.  Par exemple, le Manitoba élargit actuellement son programme d'éducation des parents et publie de l'information sur cédérom afin que les personnes qui vivent dans des localités éloignées, qui doivent rester à la maison ou qui s'intéressent simplement au sujet, puissent la consulter.
  • Sites Internet et courriel  Étant donné qu'un nombre croissant de personnes ont accès à Internet, il est possible de diffuser de plus en plus de renseignements par ce moyen.  Une bonne partie de l'information sur le droit de la famille, comme les lois concernées, est maintenant affichée sur Internet.  On peut se servir du web pour offrir l'information dans une langue facile à comprendre pour les familles qui sont aux prises avec des questions de garde et de droit de visite.  De nombreux gouvernements ainsi que des fournisseurs d'information juridique destinée au public utilisent de plus en plus les sites web du gouvernement et Internet pour améliorer l'accès à des documents et les mettre à jour.  Ainsi, le dépliant du Manitoba dont il a été question plus tôt est offert sur le site web du ministère manitobain de la Justice, et la Colombie-Britannique a récemment lancé un site sur le droit de la famille.  Ce site présente des explications courtes et claires ainsi que des réponses à une centaine de questions sur les éléments de base du droit de la famille, les options de règlement des différends et les services offerts aux parents.
  • Vidéos  Les vidéos peuvent fournir l'information de façon plus compréhensible à de nombreuses familles, en particulier celles qui ont des problèmes d'alphabétisation.

Certaines provinces ou certains territoires fournissent de l'information par l'intermédiaire de centres d'information où l'on peut rencontrer un membre du personnel et obtenir des renseignements imprimés.  Ainsi, les centres d'information sur le droit de la famille de l'Ontario, qui sont situés dans les palais de justice de la plupart des districts, y compris les bâtiments des tribunaux unifiés de la famille, offrent de l'information, des services de référence et autres services d'aide.  Le personnel des tribunaux fournit des renseignements sur les procédures judiciaires, notamment les formulaires, et un avocat donne des conseils juridiques sommaires.  Certains centres d'information dans d'autres provinces offrent également d'autres services; on trouvera des renseignements plus détaillés sur ces centres ci-dessous.

Recommandation 14

Le Comité sur le droit de la famille recommande de diffuser dans le public, aussi largement que les ressources le permettent, l'information sur les lois et les services actuels et nouveaux et de les rendre accessibles aux familles ayant des enfants, grâce à différents moyens de communication.



Programmes d'information et d'éducation des parents

Les programmes d'éducation et d'information des parents enseignent à ceux-ci comment favoriser l'intérêt de leurs enfants par la coopération et la consultation lorsque cela ne présente pas de risque.  L'objectif de ces programmes est d'aider les parents à comprendre les exigences et les difficultés du rôle parental après la séparation ou le divorce, de proposer de nouveaux moyens de communiquer, de résoudre les différends quotidiens et de proposer des solutions de rechange au processus judiciaire officiel pour régler les problèmes.  L'acquisition d'aptitudes de base, en matière de règlement des différends, permettra aux parents d'atténuer les différends ou les dissensions et à utiliser des méthodes constructives de résolution des conflits avec leurs enfants.  Ces programmes présentent aux parents les rudiments de la prise de décision et de la résolution de conflits, de même que les moyens de réduire les frustrations, la confusion et les coûts tant pour eux-mêmes que pour le système judiciaire.

Les programmes d'éducation et d'information peuvent jouer un rôle essentiel pour sensibiliser les parents et leur permettre d'acquérir les compétences appropriées au moment de la rupture.  De tels programmes, qu'ils soient volontaires ou obligatoires, devraient être offerts aux parents avant qu'ils ne recourent au système judiciaire; ils devraient aussi présenter des lignes directrices précises permettant de diriger les victimes de la violence vers le système judiciaire.  Les programmes d'éducation devraient comporter un volet sur la plus grande vulnérabilité des victimes de violence familiale au moment de la séparation et offrir un processus accéléré d'accès au tribunal dans des cas semblables.

Actuellement, la plupart des programmes canadiens d'éducation des parents qui sont financés par le gouvernement sont associés à un tribunal soit par la sélection, soit par le prononcé d'une ordonnance.  Par exemple, à Terre-Neuve-et-Labrador, le tribunal unifié de la famille de St-John's offre un programme d'éducation parentale, Parents Are Forever, aux parents qui vivent une séparation ou un divorce.  Il s'agit d'un cours d'acquisition de compétences de douze heures qui donne des renseignements concernant les effets sur les enfants de la séparation et du divorce, et enseigne des techniques de communication et de négociation visant à réduire les conflits entre les parents.

En Alberta, des séminaires sur le rôle parental après la séparation offrent aux parents qui se séparent ou qui divorcent des renseignements tant sur le processus qui s'enclenche et ses effets sur les enfants, que sur les techniques permettant d'améliorer la communication et les questions juridiques; ils favorisent l'utilisation de la médiation et des plans parentaux.  Ce cours est obligatoire pour les parents qui souhaitent accéder aux tribunaux, à l'exception des cas de violence familiale.  Une évaluation du programme a conclu qu'une grande majorité des participants ont indiqué qu'ils pensaient que l'information recueillie les aiderait à communiquer avec leurs enfants ainsi qu'avec l'autre parent à l'avenir.  On a également constaté que le programme contribuait à réduire le niveau de conflits parentaux[91].

L'évaluation du programme d'éducation parentale du Manitoba, Pour l'amour des enfants, montre que le programme a eu un effet positif sur la capacité des parents à faire face à la séparation.  Le rapport d'évaluation indiquait [traduction] :



Il est intéressant de noter que la plupart des parents ont pensé, lors du suivi, qu'ils traitaient plus efficacement avec leurs enfants et l'autre parent et qu'ils connaissaient mieux leurs propres sentiments et réactions.  De plus, la plupart ont attribué au programme le mérite d'avoir influencé ces changements de façon positive[92].

Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants a recommandé que tous les parents qui demandent des ordonnances de garde soient obligés de participer à un programme d'éducation et qu'une attestation de participation soit exigée pour que les parents puissent faire leur demande[93].  Certaines provinces, comme la Saskatchewan et l'Alberta, ont déjà prévu cette obligation dans leurs lois ou règlements judiciaires[94].  La Colombie-Britannique a administré à titre expérimental un programme obligatoire, Parenting After Separation, sur le rôle des parents après la séparation dans deux tribunaux provinciaux.  Les résultats de l'évaluation indiquent que les parents qui ont participé étaient très satisfaits de l'information qu'ils avaient reçue et qu'ils ont moins eu recours au processus judiciaire que les parents de certains endroits choisis où le programme n'existait pas[95].  La Colombie-Britannique a rendu ce programme obligatoire dans dix districts judiciaires.

Certaines provinces ont également investi dans des programmes visant précisément à aider les enfants à comprendre la nature du divorce et de la séparation.  La Saskatchewan a préparé des programmes destinés à des enfants de trois groupes d'âge différents.  Ils sont offerts par les organismes communautaires afin d'aider les enfants à comprendre que le divorce ou la séparation n'est pas de leur faute, et à savoir comment se distancier du conflit entre les parents et à mieux faire part à ceux-ci de leurs sentiments et de leur vécu.  Ces programmes sont jugés très utiles pour réduire les facteurs de risque chez les enfants[96].

Parmi les autres initiatives en matière d'éducation et d'information, on trouve des programmes d'éducation pour les familles en transition visant à aider les familles nouvellement constituées ou recomposées à s'adapter à la nouvelle dynamique familiale, de même que des documents de formation personnelle ou adaptés pour aider les parents à comprendre leurs rôles et à prendre des décisions grâce à des brochures concernant les ententes et les plans parentaux[97].

Recommandation 15

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de favoriser les programmes d'éducation des parents, qu'ils soient obligatoires ou volontaires; que ces initiatives soient largement accessibles et répondent aux besoins linguistiques, culturels et géographiques des parents, ainsi qu'aux demandes d'information générale sur les responsabilités parentales, le volet juridique et les procédures.

Information et éducation des professionnels

Les avocats, les travailleurs sociaux et autres professionnels qui travaillent avec les familles en voie de séparation et qui se préoccupent de leurs problèmes, en qualité d'intervenants, de médiateurs ou de conseillers, sont des sources essentielles d'information pour les parents.  Les professionnels qui aident les familles à résoudre les problèmes liés à l'éclatement de la famille et aux rôles parentaux doivent posséder une solide connaissance des aspects tant émotionnels que juridiques des situations que vivent ces familles.

Les professionnels qui possèdent l'information et quiont une bonne compréhension des problèmes peuvent aider les parents à prendre de meilleures décisions et à réduire le niveau général de conflit, la confusion et les coûts.  Les organisations professionnelles devraient penser à exiger de leurs membres qu'ils se tiennent au courant des principaux enjeux et de la dynamique sociale touchant les familles, ainsi que des ressources et des services disponibles pour les familles qui se séparent ou qui divorcent; pour cela, ces organisations devraient offrir une formation connexe[98].  La recherche corrobore l'opinion selon laquelle les personnes qui travaillent avec des couples qui divorcent ou se séparent et leurs familles tireraient bénéfice d'une meilleure formation pratique et théorique[99].  De même, le public a souligné, dans le cadre des consultations, que davantage de formation et de services aux familles en transition seraient nécessaires[100].

De plus, il existe dans un grand nombre d'organismes gouvernementaux et communautaires de première ligne des professionnels dont la fonction principale concerne d'autres programmes, par exemple les centres de crise, et qui sont en contact régulier avec les familles qui se séparent ou sont séparées.  Ils peuvent aider les parents en offrant des renseignements de base et en les dirigeant vers les services appropriés.  Il est important que ces organismes aient accès à une information qu'ils peuvent ensuite transmettre à leurs clients et que les travailleurs puissent suivre une formation qui leur permette de mieux aider leurs clients.  Les gouvernements peuvent offrir des renseignements essentiels susceptibles d'être adaptés puis intégrés aux publications de ces organismes.  On pourrait également élaborer des manuels et des documents de formation normalisés à l'intention de ces organismes.

Les parents ont parfois dit que les avocats, plutôt que les parties, orientent les débats ou qu'ils n'ont pas confiance dans la capacité de ceux-ci à donner des conseils.  Les dossiers de droit familial impliquant des enfants sont très différents des autres cas dans la mesure où toutes les parties doivent prendre des décisions en fonction de « l'intérêt de l'enfant ».  Cela va parfois à l'encontre du rôle traditionnel des avocats qui défendent la position de leurs clients dans un contexte de débats contradictoires.  Les avocats, comme les agents du tribunal qui doivent prendre des décisions en fonction de « l'intérêt de l'enfant », doivent tenir compte de cette situation dans leur pratique.

Recommandation 16

Le Comité sur le droit de la famille recommande que l'on soutienne les professionnels qui travaillent avec les familles en instance de séparation ou de divorce, comme les avocats, les travailleurs sociaux et les psychologues, afin qu'ils reçoivent une formation et une éducation permanente dans les domaines de la garde et des pensions alimentaires pour enfants, de la violence familiale, ainsi qu'en ce qui a trait à la dynamique de la séparation et du divorce et à leurs effets sur les enfants.  On devrait encourager et soutenir les organismes professionnels pour qu'ils facilitent le perfectionnement de leurs membres dans ces domaines et envisagent des normes d'accréditation incorporant le perfectionnement professionnel en la matière.

Recommandation 17

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les gouvernements collaborent avec les différentes associations juridiques et avec le Barreau :

  • pour étudier les possibilités de perfectionnement et de formation professionnels dans le domaine juridique de façon à pouvoir communiquer avec les enfants de parents séparés pendant le procès;
  • pour revoir les règles de pratique afin qu'elles énoncent les rôles et les devoirs des avocats de telle façon que soit adéquatement défendu l'intérêt de l'enfant et que les avocats soient dans l'obligation d'examiner, avec leurs clients en droit familial, toutes les options en matière de résolution des conflits.

Fournir l'information au public par des initiatives gouvernementales

Les provinces et territoires ont élaboré différentes méthodes et mis en place des niveaux de soutien différents pour assurer l'éducation et l'information du public.  Il leur serait utile de créer une base de documentation commune en utilisant les meilleures pratiques et en réduisant les coûts d'élaboration de cette base de données en partageant leurs expériences.  Les provinces et les territoires offrent toute une gamme de services dont on trouve la liste dans le Répertoire des services gouvernementaux qui appuient la prise de décisions sur la garde, le droit de visite et leur exécution.  Ce répertoire est affiché sur le site web du ministère de la Justice du Canada[101].  Il faudrait que ce répertoire soit mis à jour périodiquement.

Recommandation 18

Le Comité sur le droit de la famille recommande que le Répertoire des services gouvernementaux qui appuient la prise de décisions sur la garde, le droit de visite et leur exécution soit mis à jour périodiquement.

Il serait également utile que les gouvernements s'entendent sur la façon de mieux diffuser l'information et sur le choix du responsable qui pourrait le faire et devrait le faire.  Cela permettrait de réduire la confusion qu'engendrent, aux yeux du public, les diverses dispositions des lois et des services aux niveaux fédéral, provincial et territorial.

Résolution des conflits

La résolution des conflits en cas de séparation ou de divorce, particulièrement lorsque des enfants sont en cause, peut s'avérer très difficile pour les parents et les enfants.  Chaque famille vit des niveaux de conflit différents selon les circonstances.  Les situations qui sont relativement stables peuvent devenir explosives ou conflictuelles lorsqu'un parent a une nouvelle relation, si des problèmes persistent dans la relation, si les besoins des enfants changent ou quand un parent souhaite déménager en raison de son emploi ou de ses études.

Le processus judiciaire peut être très long, laisser des questions importantes sans réponse pendant trop longtemps et susciter davantage de conflits entre les parents.  Le procès ne tient pas toujours compte des questions complexes qui touchent les enfants.  Les ententes conclues entre parents seront sans doute plus durables que les décisions d'un juge après une audience contestée.  On peut recourir aux règlements des différends extrajudiciaires pour soutenir et faciliter les méthodes constructives de résolution des conflits.  L'accès à ces options de façon appropriée et au moment opportun, soit dans le cadre du procès ou autrement, permet aux parties de canaliser les enjeux faisant l'objet du conflit, de les résoudre plus rapidement et de réduire considérablement les antagonismes entre les parents, les chocs émotionnels et les coûts financiers.

Les parents sont parfois frustrés par le manque d'accès aux services juridiques et par l'incapacité de résoudre les problèmes initiaux ou non encore réglés associés aux responsabilités parentales.  Cette frustration peut les conduire à essayer de se représenter eux-mêmes au procès, ce qui peut être coûteux sur le plan émotif et financier, pour eux-mêmes, pour la famille et pour l'administration de la justice.  Les parents peuvent également décider d'agir unilatéralement et d'aggraver une situation déjà très difficile en enlevant l'enfant ou en ne payant pas la pension alimentaire afin d'imposer ce qu'ils estiment être un arrangement plus équitable.  Là encore, cela conduit à des coûts d'exécution supplémentaires pour l'État et à des coûts émotifs et financiers pour la famille.

Malheureusement, il arrive parfois que les parents décident simplement de régler leur frustration en ne respectant plus les dispositions de l'ordonnance ou de l'entente, qu'ils jugent insatisfaisantes, ou en décidant de ne plus se préoccuper de leur enfant.  Les parents qui s'éloignent de leur enfant expliquent souvent cela par des raisons complexes, notamment leur découragement face au refus du droit de visite, des difficultés pratiques liées à la distance ou aux heures de travail ou une absence de contact antérieure[102].  Les parents s'éloignent souvent aussi par crainte que les conflits permanents ne deviennent préjudiciables à l'enfant.  Il est évident que cette distanciation et cette insatisfaction peuvent avoir une incidence négative sur les relations entre le parent et l'enfant et ne donnent pas la possibilité de mettre en Éuvre ou d'acquérir les moyens permettant de régler efficacement le conflit.

Il existe un certain nombre de mécanismes pour aider les familles à résoudre les litiges en dehors des tribunaux.  Les avocats jouent un rôle important dans la résolution des conflits au moyen des représentations juridiques traditionnelles.  Mais dans de nombreux cas, un tel règlement arrive trop tard, soit après un procès provisoire contesté et d'autres étapes d'un processus contradictoire, pour éviter le conflit et les coûts émotifs et financiers liés au système accusatoire.  Récemment, certains avocats ont commencé à exercer le droit collaboratif familial qui permet de retenir les services des avocats des deux parties exclusivement afin de les aider à en arriver à une entente et sans pouvoir les représenter dans le cadre de procédures judiciaires, quelles qu'elles soient.

La médiation, lorsqu'il existe un parti neutre pour aider les parents à conclure une entente, est souvent un moyen efficace pour deux parents qui détiennent une position de négociation relativement égale.  Le médiateur, qui peut être aussi un avocat, un travailleur social ou un autre professionnel formé en médiation, dirige la discussion et contribue à préparer les plans parentaux après la séparation.  Les parents qui participent à la médiation peuvent encore avoir besoin de l'aide et des conseils d'un avocat agissant dans son rôle traditionnel de défenseur.  Des services de médiation existent dans toutes les provinces et territoires et on y a de plus en plus recours partout au Canada[103].

Un des rôles essentiels du médiateur est de reconnaître et d'atténuer le déséquilibre des forces en présence et d'assurer la sécurité des participants[104].  Ces préoccupations existent particulièrement dans les cas de violence familiale reconnue, mais il peut exister d'autres circonstances où le déséquilibre des forces en présence ne permet pas aux parties d'être sur un pied d'égalité.  Dans bien des cas, les responsables de la réglementation et de la promotion de la médiation ont établi un processus de sélection des cas où la médiation ne conviendrait pas.  Il est certain que le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, tout en favorisant généralement la médiation, a reconnu qu'il était essentiel, lorsqu'on veut recourir à un médiateur, de repérer les cas de violence familiale et de garantir la sécurité de toutes les parties[105].

C'est au Québec que l'on a déployé les efforts les plus importants et les plus complets pour encourager la médiation[106].  Les parents doivent assister à une séance d'information sur la médiation avant l'audition s'il y a un différend relativement à la garde, le droit de visite ou la pension alimentaire ou sur le partage des biens.  La médiation peut être volontaire ou ordonnée par le tribunal, lequel peut demander aux parties de passer par la médiation à tout moment de l'instruction d'une cause contestée.  Il s'agit d'un service gratuit jusqu'à concurrence de six séances, chacune durant en moyenne 75 minutes.

Le Manitoba offre un Service de comédiation globale où deux médiateurs, dont l'un est un avocat et l'autre un spécialiste en relations familiales, aident les parents à conclure une entente sur toutes les questions en litige.  Dans l'évaluation du projet pilote qui a précédé la mise en œuvre du programme, 81 pour cent des répondants ont affirmé que le plus gros avantage était que la médiation portait sur toutes les questions nécessitant une résolution, tant celles touchant l'enfant que le volet financier.  Au cours du projet pilote, une entente sur toutes les questions a été conclue dans 52 pour cent des cas, et une entente sur certaines ou la plupart des questions a été possible dans plus de 31,5 pour cent des cas[107].  Le projet pilote offrait également un stage pour faciliter l'accréditation des professionnels (les avocats et les spécialistes en relations familiales) du secteur privé.

La médiation doit être encouragée dans les cas appropriés, mais il n'est pas recommandé qu'elle soit obligatoire.  Une telle démarche est incompatible avec la prémisse fondamentale de la médiation en tant que formule de prise volontaire de décision fondée sur le consensus.  Elle est également incompatible avec l'insistance mise sur les décisions axées sur l'enfant et pourrait présenter un risque pour l'enfant ou l'un des parents; si les deux parents ne sont pas à l'aise avec le processus de médiation, cela risque d'aggraver plutôt que d'atténuer les conflits.

Recommandation 19

Le Comité sur le droit de la famille recommande :

  • de ne pas rendre la médiation obligatoire;
  • d'offrir des services de médiation à des parties bien informées, qui possèdent des pouvoirs de négociation relativement égaux et dont la participation est volontaire, là où existe un mécanisme de contrôle adéquat qui permet de dépister et, généralement, d'exclure les cas de violence familiale.

Les procédures judiciaires visant à régler les litiges entourant les arrangements parentaux sont encore nécessaires dans bien des situations.  Il en est ainsi, par exemple, dans les cas de violence familiale, lorsque la médiation ne convient pas ou que la médiation ou d'autres méthodes de résolution des conflits ont échoué.  Des modifications peuvent toutefois être apportées au modèle traditionnel afin d'encourager le règlement d'une partie ou de la totalité des questions au début du processus judiciaire et de gérer les cas de façon plus efficace pour réduire les coûts et les conflits et combler les retards.

Les programmes de gestion de cas permettent un règlement rapide des différends en comblant les retards et en réduisant les dépenses inutiles lorsque les juges et autres personnes concernées gèrent activement le processus judiciaire.  Le personnel judiciaire d'expérience ou les juges demandent aux parents et à leurs avocats de se concentrer sur les questions réellement en cause, tout en encourageant les parents à conclure une entente sur d'autres aspects.  Cela peut impliquer des rencontres préparatoires avec le juge avant l'instruction ou même des mini-procès lorsqu'un juge présente aux parents son évaluation de l'issue probable d'un procès.  La gestion de cas vise également à faire en sorte que les cas qui font l'objet d'un procès soient traités le plus efficacement possible.

Par exemple, dans le système de gestion des cas du Manitoba, il y a différentes façons d'organiser des conférences de cas.  Les parents peuvent demander de fixer la date d'une conférence de cas ou le tribunal peut en prévoir une à l'occasion d'un événement déclencheur, comme la demande d'une date dans le cadre d'une requête contestée.  Les parties doivent assister à toutes les rencontres à moins d'en être dispensées par le juge responsable de ces rencontres.  Le juge désigné comme responsable de la première rencontre demeurera à la disposition des parties et des avocats pour gérer le dossier jusqu'à son terme.

En Saskatchewan, avant d'aller devant le tribunal, les parties et leurs avocats doivent se réunir avec un juge lors d'une rencontre préliminaire au procès.  C'est un mécanisme relativement souple et, dans la plupart des centres, il peut être amorcé dans les huit semaines à partir du moment où les parties ont rassemblé les renseignements nécessaires.  L'objet de cette rencontre est de parvenir à un règlement.  Un juge est présent pour conseiller les avocats et les parties sur les points de droit.  Tout règlement conclu peut rapidement devenir un jugement.  La plupart des cas ainsi amorcés sont réglés au cours de ces pourparlers préliminaires au procès.

Certaines provinces et certains territoires ont des programmes ou des procédures de règlement précoces, permettant par exemple aux juges d'inviter les parents à des rencontres de gestion de cas et même d'ajourner un cas pour permettre aux parents d'essayer une autre méthode de résolution des conflits.  La Colombie-Britannique a un projet pilote dans plusieurs greffes de la cour qui oblige les parties à des procédures de garde, de visite ou de pension alimentaire pour enfants de se réunir séparément avec un avocat en droit de la famille pour passer en revue leurs options avant la première comparution.  Les cas urgents peuvent être entendus immédiatement par un juge.

Dans certaines situations, s'il y a consentement ou que l'ordonnance n'est pas contestée, le tribunal prononce les ordonnances de garde, de droit de visite et de pension alimentaire pour enfants sans tenir une audience.  Au Québec, le greffier spécial peut homologuer une entente entre les parties qui prévoit un règlement complet des questions de garde et de pension alimentaire pour enfants.  Le greffier peut entendre les parties, séparément au besoin et en présence d'un avocat, pour déterminer si l'entente protège l'intérêt de l'enfant et si le consentement n'a pas été donné sous pression.  Sinon, le greffier peut renvoyer la question au juge.  Ce système vise à « simplifier la procédure et accélérer le traitement des cas mettant en cause le droit de garde et la pension alimentaire pour enfants[108] ».

Les expertises psychosociales indépendantes portant sur les droits de garde et de visite sont également utiles pour résoudre les conflits.  Elles peuvent aider les parents à se concentrer sur les besoins de l'enfant et à réduire le niveau de conflit.  Elles peuvent également conduire à un règlement puisque de nombreux parents se disent prêts à accepter les recommandations d'une tierce partie neutre et pensent que la poursuite des débats serait peu productive dans la mesure où les tribunaux ont tendance à accorder beaucoup de poids à ces expertises.  La recherche indique que de tels services aident les parents à en arriver à un règlement dans la majorité des cas[109].  Les enquêtes des avocats pour enfants de l'Ontario ont des effets bénéfiques semblables[110].

Au Manitoba, deux projets pilotes sont en cours pour aider le tribunal et les parents à régler rapidement les questions touchant les enfants.  Le premier est le Service de consultation dans lequel un avocat est à la disposition du tribunal pour rencontrer les parents et voir l'enfant à très court terme.  L'avocat remet ensuite un mémoire écrit ou un rapport verbal au tribunal qui peut inclure l'information sur les préférences ou les préoccupations de l'enfant.  L'autre projet pilote comporte la préparation d'expertises ciblées qui remplacent les expertises traditionnelles concernant toute la famille dans les situations impliquant la résolution d'un seul problème.

Les provinces ont également essayé de soutenir les parents qui se séparent ou qui sont déjà séparés, en les aidant à résoudre les questions liées aux responsabilités parentales, que ce soit avant les procédures judiciaires ou après qu'elles aient commencé, en offrant des services multiples par le biais d'un organisme ou centre unique.  Les parents ont plus facilement accès à l'information et aux services de règlement des différends lorsque ces services sont regroupés.  Les centres d'information sur le droit de la famille, à Edmonton et à Calgary, offrent des renseignements juridiques, aident les parents à traiter avec le système judiciaire et les renvoient à d'autres organismes qui peuvent les aider lors des procédures.  L'objectif de ces centres est d'aider les parents à résoudre les conflits avant de passer devant le tribunal[111].

En Colombie-Britannique, les centres du droit de la famille sont implantés dans de nombreuses collectivités de la province mais ne sont pas rattachés aux tribunaux.  Les avocats en droit de la famille offrent des services de résolution de conflit comme la conciliation et la médiation et ils aident les parents à négocier et à préparer des ordonnances par consentement et des ententes écrites.

Il existe en Ontario des centres d'information sur le droit de la famille dans la plupart des districts judiciaires, où il est possible d'obtenir des informations sur le processus judiciaire, sur les solutions de rechange aux poursuites, y compris la médiation, ainsi que de recevoir des avis juridiques sommaires d'un avocat.  Des coordonnateurs de l'information et des renvois sont présents dans les centres d'information des tribunaux unifiés pour diriger les clients vers les ressources communautaires comme les groupes de counselling ou de soutien.  De plus, les parents peuvent s'inscrire à des séances d'information volontaires offertes dans chacun des tribunaux unifiés de la famille.  Ces séances mettent l'accent sur l'importance de tenir les enfants à l'écart des conflits entre les parents.

À Terre-Neuve-et-Labrador, le Family Justice Services Western, un projet pilote organisé à Corner Brook, offre aux parents qui se séparent une solution de rechange au système judiciaire.  Le projet rassemble une équipe multidisciplinaire de professionnels qui offre sur place des services d'éducation, de médiation et de counselling aux adultes et aux enfants faisant face à un divorce et impliqués dans l'établissement des droits de garde et de visite et des pensions alimentaires pour enfants ou conjoints.  Toutes les demandes au tribunal sont renvoyées directement au Family Justice Services Western avant que la date de comparution ne soit fixée.  Les deux parties doivent commencer par assister à une session de formation de trois heures.

Les parents doivent pouvoir évaluer l'à-propos des processus de résolution des conflits et y avoir accès.  Toutefois, ces services ne sont pas toujours disponibles ni accessibles à tous les parents en raison des coûts et de l'endroit où se trouvent les services, ou parce que les parents n'en savent rien.  Dans bien des cas, le tribunal devrait être le dernier recours dans un conflit familial, mais l'incapacité d'accéder à d'autres méthodes de règlement des conflits nécessite parfois que les parties suivent la voie litigieuse traditionnelle.

Certains se sont dit préoccupés par le nombre croissant de gens qui comparaissent devant un tribunal de la famille et qui ne sont pas représentés par un avocat, soit parce qu'ils ne peuvent pas se le permettre, que l'aide juridique n'est pas disponible ou qu'ils préfèrent se représenter eux-mêmes.  Lorsqu'ils ne sont pas en mesure de se représenter efficacement, cela peut avoir des conséquences néfastes pour les parents et les enfants.  Sans avis et représentation juridiques, certains parents adoptent un comportement destructeur comme l'enlèvement des enfants et le refus de payer la pension alimentaire.  De plus, ils peuvent utiliser le système juridique abusivement par des litiges inutiles et prolongés.  Une des façons de régler ce problème est d'améliorer l'accès à l'aide juridique, mais il est également possible de fournir aux parties qui se représentent elles-mêmes le soutien nécessaire pour les aider.  Par exemple, des trousses d'information comportant des renseignements sur la façon de demander une pension alimentaire pour enfants ainsi qu'un droit de garde ou de visite, comment modifier une ordonnance et comment s'opposer à une demande.  Les trousses peuvent comprendre une copie des formulaires et des instructions sur la façon de remplir et de déposer les documents.  Les services offerts par les centres du droit de la famille de la Colombie-Britannique et les centres d'information sur le droit de la famille de l'Ontario et de l'Alberta en sont un autre exemple.

Recommandation 20

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements et aux divers groupes professionnels de collaborer à la mise en place d'un vaste éventail de services en matière de résolution des différends, y compris la médiation, l'arbitrage et le droit collaboratif, ainsi que d'autres moyens de soutien aux parents pour les amener à identifier et à mieux cerner les points en litige, par exemple les expertises psychosociales et l'éducation des parents.

Exécution des ordonnances de garde et de visite

Les services d'exécution visent à faire en sorte que les parents s'acquittent de leurs obligations et de leurs responsabilités envers leurs enfants; à limiter le niveau des conflits et du stress que vivent parents et enfants à la suite de la non-observation des ordonnances du tribunal ou des ententes; et à renforcer le respect de l'administration de la justice par l'observation des ordonnances et des ententes.



Des problèmes surgissent quand les parents omettent de se conformer aux conditions de l'entente ou de l'ordonnance et qu'ils refusent le droit de visite ou omettent d'exercer ce droit.  Cela se produit parfois lorsque les parents ne comprennent pas ce qu'ils doivent faire.  Les conséquences peuvent aller d'incidents mineurs à des différends hautement conflictuels.  La recherche montre que de graves problèmes en matière de droit de visite se produisent beaucoup plus fréquemment lorsqu'il existe des antécédents de mauvais traitements ou de conflits majeurs entre les parents[112].

Les rôles respectifs de l'État et des parents, par exemple, peuvent se croiser lorsque des allégations de négligence ou de mauvais traitements de la part d'un parent soulèvent un problème pour les services de protection de la jeunesse (aide à l'enfance).  Dans ce cas, la volonté du parent de se conformer aux dispositions des ordonnances ou des ententes relatives à l'enfant peut diminuer parallèlement à la perte de confiance entre les parties.  Les services de protection de la jeunesse subissent parfois des pressions particulières lorsqu'ils ont affaire à ce genre de cas car les allégations ont des effets sur les procédures du tribunal de la famille.  Les principaux professionnels qui traitent des questions de garde et de visite peuvent également être sensibilisés à des cas de harcèlement ou de mauvais traitements qui exigent des mesures allant au-delà de celles qui existent pour faire exécuter les ordonnances de garde et de visite.  Un parent, par exemple, peut avoir à demander une injonction restrictive contre l'autre parent.

Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants a formulé une recommandation à ce sujet :

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral travaille avec les provinces et les territoires à élaborer une réponse nationale coordonnée, comportant des éléments thérapeutiques et punitifs, lorsqu'il y a refus de se conformer aux ordonnances.  Parmi les mesures qui pourraient être envisagées, citons l'intervention précoce, un programme d'éducation parentale, une politique permettant la compensation du temps, des services d'orientation à l'intention des familles où les parents ne s'entendent pas sur l'éducation des enfants et la médiation; dans le cas de parents intraitables, des mesures punitives pourraient être prises à l'égard de ceux qui enfreindraient illégalement les ordonnances parentales[113].

La plupart des mesures et des services recommandés par le Comité mixte spécial existent déjà.  Les mesures juridiques sont décrites dans la première partie du présent rapport, « Principaux enjeux législatifs », de même que les services.  Il est possible de rendre la législation plus précise en la matière afin d'établir un plus large éventail de mesures juridiques dans certaines provinces et certains territoires, mais de tels outils n'apportent qu'une solution partielle compte tenu des limites à l'accès au recours juridique, de l'effet négatif que cela peut avoir sur des relations déjà troublées, des coûts et de l'impossibilité de résoudre le problème sous-jacent par le seul recours judiciaire[114].  Les ordonnances du tribunal et les ententes devraient être respectées par toutes les parties en cause, mais les pressions d'ordre affectif et les frustrations peuvent conduire les parties à ne respecter ni les ententes ni les ordonnances qu'elles jugent injustes ou trop flexibles ou imprécises.

Les questions relatives à l'exécution des droits de garde et de visite créent un réseau complexe de besoins physiques, psychologiques et émotionnels pour les parents et les enfants.  Il faut soutenir les parents en les amenant à comprendre que les besoins de l'enfant sont primordiaux et que, en tant que parents, ils sont responsables d'assurer son bien-être émotionnel, psychologique et financier dans la mesure du possible.

Le Comité sur le droit de la famille a examiné diverses approches sur les plans de la loi et des services aux problèmes de l'exécution, tant dans les provinces et territoires canadiens que dans d'autres pays.  La recherche en ce domaine souligne constamment la difficulté de trouver des solutions efficaces et rentables qui n'ont pas d'effets délétères imprévus sur la famille[115].

Par exemple, un projet sur l'aide relative au droit de visite a été mis en œuvre au Manitoba de 1989 à 1993.  Les deux principales composantes de cette initiative étaient les suivantes : un processus de conciliation volontaire en vue de résoudre la source des problèmes liés à l'accès; une mesure juridique permettant d'entreprendre des procédures judiciaires sans frais pour les parents cherchant à faire respecter une ordonnance de visite.  La demande pour ce service a toutefois été relativement faible.  On a constaté que les familles qui y avaient recours faisaient face à de nombreux problèmes exigeant beaucoup de temps et de ressources.  Le programme, qui n'était pas rentable, a été interrompu pour des raisons financières.

C'est donc là un domaine où il faut consacrer plus de travail afin de cerner et d'élaborer des approches efficaces pour régler les problèmes de certains parents.  De tels services peuvent aider les parents à mieux comprendre les modalités de leur entente ou de l'ordonnance et peuvent les soutenir dans la recherche de solutions pour gérer les conflits et s'occuper prioritairement de l'enfant.  Les services de visites supervisées peuvent aussi aider les parents à respecter leurs obligations en matière d'accès s'il existe d'importants conflits entre eux ou s'il est dans l'intérêt de l'enfant que la visite du parent non gardien soit supervisée.

Les services - dont il est question dans les sections du présent rapport intitulées « Information et éducation pour le public et les professionnels » et « Règlement des litiges » - jouent un rôle important en aidant les parents à prendre des décisions éclairées lorsqu'il s'agit d'exécuter des ordonnances.  Cela comprend, par exemple, l'éducation des parents, la médiation et le droit collaboratif.  Certaines questions qui relèvent plus particulièrement de l'exécution nécessitent une étude plus approfondie :

  • Des protocoles peuvent être nécessaires pour bien comprendre le rôle des autorités chargées de la protection des enfants dans les cas de garde et de visite impliquant des difficultés d'exécution.
  • Les fournisseurs de services aux familles doivent comprendre la dynamique de la violence familiale et les recours disponibles au criminel et au civil.
  • Tous les gouvernements pourraient avoir à examiner les recours disponibles en vertu de leurs lois ou de leurs services et déterminer s'il faut les améliorer.

    Recommandation 21

    Le Comité sur le droit de la famille recommande d'étudier les problèmes liés au refus du droit de visite et au non-exercice de ce droit afin de dégager les meilleures pratiques et les moyens les plus adéquats pour aborder ces problèmes, ainsi que d'approfondir la recherche en vue d'élaborer et d'évaluer des mesures correctives innovatrices.

Aide juridique en matière familiale

Le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite avait recommandé que le gouvernement fédéral fournisse des ressources adéquates en matière d'aide juridique « afin que l'absence ou l'insuffisance de l'aide juridique ne soit pas préjudiciable aux parties visées par les demandes contestées d'ordonnances parentales[116] ».  Durant les consultations concernant L'intérêt de l'enfant d'abord, les répondants ont souligné qu'il était nécessaire d'avoir accès à l'aide juridique dans les cas de droit de la famille[117].

L'aide juridique en matière familiale existe partout au Canada.  En général, les lignes directrices sur l'admissibilité financière à l'aide juridique se situent sous le seuil de faible revenu de Statistique Canada.  Par conséquent, l'aide juridique est limitée aux personnes très pauvres.  L'étendue des questions de droit familial qui sont couvertes varie considérablement d'une province ou d'un territoire à l'autre.  La plupart des plans d'aide juridique prévoient des services dans un certain nombre de domaines, par exemple le divorce, la garde, l'accès, les pensions alimentaires, le partage des biens, la protection de l'enfant et les injonctions imposant certaines restrictions.  Dans certains endroits, la priorité est donnée aux cas mettant en jeu la sécurité de l'époux ou de l'enfant.  Dans toutes les provinces, on donne la priorité aux cas de protection des enfants par suite de l'affaire Nouveau-Brunswick c. G.(J.)[118].  Dans quelques provinces, l'aide juridique en matière familiale n'est disponible que dans les cas où il y a violence familiale.

Le Comité sur le droit de la famille reconnaît qu'un courant de pensée au Canada veut qu'il y ait beaucoup de besoins non satisfaits en ce qui a trait à l'aide juridique en matière familiale.  On craint vivement que le manque d'accès à l'aide juridique pour la famille puisse avoir des conséquences très néfastes pour les enfants et leurs parents.

Les questions d'aide juridique en matière familiale ne sont pas un élément important de l'initiative nationale de recherche actuelle sur l'aide juridique.  Cependant, à l'heure actuelle, des recherches restreintes sont en cours et se basent sur des données existantes pour déterminer le nombre de parties non représentées devant les tribunaux de la famille.  Le Comité attend avec impatience les résultats de cette enquête.

Il n'existe à l'heure actuelle que des données empiriques préliminaires au sujet des parties non représentées par avocat devant les tribunaux de la famille.  Selon la province et le niveau du tribunal, les données préliminaires montrent qu'entre 40 et 80 pour cent des parties engagées dans des questions de droit de la famille ne sont pas représentées au moment du dépôt initial.

Cependant, un accès plus grand à l'aide juridique ne constitue pas la seule solution.  Il existe d'autres options dont il faut tenir compte afin de combler les besoins des parents qui sont en quête d'aide pour résoudre les questions juridiques liées à leur rôle de parent.  L'accès des familles à la justice peut prendre la forme d'une approche multidisciplinaire comportant à la fois des stratégies juridiques et non juridiques pour traiter les problèmes résultant de l'éclatement de la famille.  Il peut s'agir par exemple de lignes téléphoniques d'aide juridique; de stratégies extrajudiciaires comme la médiation et l'orientation familiales; de services ciblés où des avocats de l'aide juridique offrent des avis limités portant uniquement sur certains aspects et sur les moyens permettant aux clients de résoudre les autres problèmes eux-mêmes; et de services bénévoles fournis par des avocats du secteur privé.  Ces initiatives peuvent également comprendre des documents d'information juridique destinés au public, combinés avec une aide directe aux parties afin qu'elles puissent remplir et déposer les documents requis de la façon la moins litigieuse possible.  Ce sont là les domaines dans lesquels les professionnels du droit peuvent collaborer avec les principaux fournisseurs de services d'aide juridique afin d'élaborer des solutions novatrices pour les familles à faible ou à moyen revenu.

Recommandation 22

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements de poursuivre leurs efforts pour améliorer les composantes de l'appareil judiciaire, comme l'aide juridique en matière familiale, qui sont essentielles afin que les familles accèdent au système judiciaire pour résoudre les questions liées à l'éclatement familial.

Mise en place de modèles de tribunaux unifiés de la famille

En 1974, la Commission de la réforme du droit du Canada a préparé un document important sur les tribunaux de la famille et recommandé de créer des tribunaux ayant compétence exclusive pour traiter de toutes les questions liées au droit de la famille[119].  À cette époque, il arrivait que deux ou trois tribunaux exercent une compétence en droit de la famille dans une province ou un territoire.  Depuis lors, de nombreuses provinces ont créé des tribunaux unifiés de la famille ou des modèles structurés qui permettent à un tribunal ou une division d'une cour supérieure d'exercer toute la compétence en matière de droit de la famille.  Plus récemment, le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants a recommandé l'expansion des tribunaux unifiés de la famille[120].

Un des éléments essentiels du modèle du tribunal de la famille est l'intervention d'un magistrat spécialisé, connaissant bien les questions du droit de la famille ou s'y intéressant véritablement, et qui est sensible aux questions sociales et juridiques complexes que soulèvent de tels cas.  On estime que cette connaissance spécialisée rend les tribunaux de la famille plus efficaces et efficients et réduit donc les coûts pour les clients.

Les tribunaux de la famille doivent toutefois s'appuyer sur toute une série de services et de programmes pour être vraiment efficaces.  Le Comité mixte spécial reconnaît également que les tribunaux unifiés de la famille doivent offrir des services complets en plus de leurs fonctions décisionnelles.  En associant la structure judiciaire simplifiée et le magistrat spécialisé à une gamme de services et de modèles de règlement des différends décrits ci-dessus, ces tribunaux constituent un mécanisme efficace de résolution des conflits familiaux.

Recommandation 23

Le Comité sur le droit de la famille recommande au gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux à la création de tribunaux unifiés de la famille, là où existe une demande à ce sujet.

Recommandation 24

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les personnes nommées et œuvrant au sein des tribunaux spécialisés de la famille possèdent une expertise dans le domaine du droit de la famille.

H. RÈGLEMENT DES QUESTIONS RELATIVES À LA PARENTALITÉ DANS LE CADRE DU SYSTÈME DE DROIT FAMILIAL



Introduction

Le mandat du Comité sur le droit de la famille, pour le présent projet, consistait à « déterminer les questions de garde et de droit de visite qui sont soulevées avant, pendant et après les conflits familiaux et à formuler des recommandations à cet égard ».  Les deux sections précédentes du présent rapport traitent des principales questions en matière de loi et de services.  La troisième section porte sur la façon dont le système de justice familiale aborde les autres questions de garde et de droit de visite dans les familles séparées ou en voie de séparation, depuis la naissance d'un enfant jusqu'aux diverses étapes qui marquent l'éclatement de la famille.  À la suite de cet examen, le Comité sur le droit de la famille a cerné un certain nombre de domaines pouvant bénéficier de mesures législatives, d'une amélioration des services, de recherches ou de travaux plus approfondis.



Au moment de la séparation, les parents sont confrontés à d'importantes interrogations juridiques lorsqu'ils ont à régler la question des rôles parentaux futurs :

  • Quelle loi s'applique à la situation?  Loi provinciale?  Loi fédérale (Loi sur le divorce)?  L'une et l'autre?
  • Quelles sont les principales caractéristiques de ces lois?  Quelles sont les différences?
  • Comment faire en sorte que le point de vue de l'enfant soit entendu et compris?
  • Quelles sont les différentes possibilités d'organisation parentale?
  • Quels sont les éléments importants ou les circonstances particulières qui entrent en jeu dans le processus décisionnel?
  • Quelles dispositions s'appliqueront par défaut si les parents décident de ne pas conclure une entente formelle?

Après avoir collecté l'information, les parents peuvent décider d'une entente avec l'aide de professionnels qualifiés comme des avocats et des conseillers familiaux.  Si aucune entente n'est possible, les parents peuvent recourir au tribunal.  Il existe plusieurs méthodes de règlement des différends d'une affaire judiciaire dont certaines peuvent être ordonnées par un juge bien qu'elles demeurent extérieures au processus judiciaire (par exemple les expertises et la médiation), alors que d'autres font partie du processus judiciaire (par exemple les conférences de cas, les rencontres préparatoires au procès et la possibilité d'obtenir la divulgation de certaines informations).  À la suite de la mise en place d'un arrangement parental, il peut être nécessaire de faire exécuter ou de modifier cet arrangement, ce qui peut déclencher à nouveau tout le processus décisionnel.

De nombreuses familles ont des problèmes particuliers qui compliquent le processus habituel, plus particulièrement les cas où le comportement de l'un ou l'autre des deux parents met en danger la participation de l'autre parent ou de l'enfant à une négociation directe des questions de garde et de droit de visite.  Parmi ces situations particulières, on mentionnera la violence familiale et l'enlèvement d'enfants.  D'autres problèmes tels que la toxicomanie et la maladie mentale peuvent empêcher un parent de s'occuper de l'enfant.

Dans de nombreux cas de séparation, un parent prend la décision de se séparer contre la volonté de l'autre.  L'autre parent peut alors négocier les questions relatives aux enfants pour maintenir le contact avec l'ancien partenaire ou dans l'espoir d'une réconciliation; il peut ne pas vraiment comprendre toutes les ramifications qui sous-tendent les ententes entourant les arrangements parentaux.  De l'autre côté, un parent que l'on a délaissé peut éprouver du ressentiment et, par vengeance, prendre des positions déraisonnables concernant les arrangements parentaux.  Le risque est réel que l'un ou l'autre parent puisse consciemment ou non utiliser les enfants pour répondre à ses propres besoins.

De plus, de nombreux parents ne vivent jamais ensemble avec leurs enfants biologiques.  Ces cas doivent être abordés dans toute discussion sur la garde et le droit de visite.

Les étapes marquant l'éclatement de la famille

Lorsque les parents n'habitent jamais ensemble



Les responsabilités parentales des parents qui ne se marient pas ou n'habitent pas ensemble sont régies complètement par la législation de la province ou du territoire dans lequel ils habitent.  Alors que toutes les autres lois provinciales et territoriales établissent que les droits de l'enfant sont les mêmes, qu'il soit né dans le mariage ou hors mariage, les provinces et les territoires ont des positions différentes concernant la garde et le droit de visite d'un enfant né de parents qui n'ont jamais habité ensemble.



Les lois de la Saskatchewan prévoient que « le père ou la mère avec qui un enfant réside est son seul gardien légitime si ses père et mère n'ont jamais cohabité après sa naissance ».  La garde en vertu des lois de la Saskatchewan est définie comme « tutelle à la personne d'un enfant; sont assimilés à la garde, la charge, l'éducation et tous les autres droits accessoires à la garde, compte tenu de l'âge et de la maturité de l'enfant[121] ».  Autrement dit, c'est la personne avec qui l'enfant demeure qui a, à la fois, la garde physique et le pouvoir décisionnel.  Selon la loi de Colombie-Britannique, la mère est le seul gardien, ayant donc la garde des biens et la garde de la personne de l'enfant à moins qu'un tribunal en décide autrement[122].

Certaines lois n'établissent pas de distinction expresse entre le cas où les parents cohabitent après la naissance de l'enfant et les cas où ils ne cohabitent pas.  Plusieurs autres ont la même approche que la loi ontarienne qui prévoit que « si les parents d'un enfant sont séparés et que l'enfant vit avec son père ou sa mère avec le consentement, même tacite, ou l'acquiescement de l'autre, le droit que l'autre personne a de faire valoir son droit de garde et ses droits accessoires, mais non son droit de visite, sont suspendus jusqu'à ce qu'un accord de séparation ou une ordonnance prévoie le contraire[123] ».

Dans certains cas, c'est la filiation elle-même qui fait l'objet d'un débat.  Cela se produit souvent dans le contexte de la pension alimentaire pour enfants où c'est la paternité qui est habituellement en jeu.  Toutes les provinces et tous les territoires ont des lois qui précisent la façon dont les tribunaux règlent cette question.  Les dispositions statutaires sont toutes différentes, mais il existe d'importants éléments communs.  Presque toutes les lois contiennent des dispositions établissant une présomption de paternité, dans certains cas, et prévoient qu'une personne est présumée, dans ces cas-là,  être le père à moins que le contraire ne puisse être prouvé selon toute probabilité.  Les circonstances donnant lieu à une présomption comprennent normalement les cas suivants :

  • L'homme était marié avec la mère au moment de la naissance de l'enfant.
  • L'homme était marié avec la mère et le mariage a pris fin par décès ou dissolution du mariage dans les 300 jours de la naissance de l'enfant.
  • L'homme et la mère ont reconnu par écrit que l'homme est le père de l'enfant.
  • L'homme cohabitait avec la mère dans une relation relativement permanente au moment de la naissance de l'enfant ou l'enfant est né dans les 300 jours suivant la fin de la cohabitation.
  • L'homme a été reconnu par un tribunal comme étant le père de l'enfant[124].

Lorsqu'un enfant naît de parents qui ne cohabitent pas, la première étape juridique pour établir la filiation est l'enregistrement de la naissance.  Les provinces et territoires ont des exigences différentes aux termes de leurs lois concernant l'enregistrement de la naissance et ses effets sur l'établissement de la paternité.



Étant donné qu'un nombre croissant d'enfants canadiens naissent de parents non mariés, le Comité sur le droit de la famille estime qu'il faut poursuivre le travail pour voir si des modifications législatives sont nécessaires afin d'en arriver à une certaine uniformité entre les juridictions.  Cet examen pourrait venir à propos compte tenu du projet de loi fédéral sur les techniques de reproduction.

Recommandation 25

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux provinces et aux territoires de réviser leur législation entourant l'établissement et la reconnaissance du statut parental et des droits relatifs à la garde et au droit de visite après la naissance d'un enfant, afin de déterminer quels aspects exigent des mesures législatives ou la mise en place de services, et de formuler des recommandations à cet égard.

Lorsque des parents conjoints de fait se séparent



Lorsque des parents cohabitent ensemble avec leurs enfants, trois principaux modèles de garde et d'accès s'appliquent au Canada au moment de la séparation.  Ces modèles s'appliquent dès la séparation jusqu'à ce qu'il y ait une entente officielle légalement reconnue entre les parents ou une ordonnance d'un tribunal.  Dans certaines provinces ou certains territoires, le parent avec qui vivent les enfants a la garde physique et le pouvoir décisionnel et l'autre parent peut avoir un droit de visite.  Dans d'autres, le parent avec qui vivent les enfants a la garde physique de ces derniers, l'autre parent a un droit de visite et ils partagent le pouvoir décisionnel.  Selon un troisième modèle, les parents continuent d'avoir la garde conjointe jusqu'à ce qu'un tribunal en décide autrement.  Au Québec, les enfants demeurent sous l'autorité des deux parents.



Les points de départ de ces modèles sont très différents pour des parents qui se séparent.  Plusieurs parents ne comprennent pas les différences subtiles entre ces modèles.  Ces parents concluront leurs propres ententes parentales concernant le soin des enfants et utiliseront des termes comme garde, droit de visite, tutelle, autorité parentale, résidence, soin, contrôle ou visite, sans faire de liens avec les lois en vigueur dans leur province.

Du point de vue de l'intérêt de l'enfant, il faut atteindre un équilibre entre deux principes majeurs.  D'un côté, les conditions de vie de l'enfant doivent être stables afin que le parent avec qui l'enfant réside puisse s'occuper efficacement de l'enfant et que celui-ci ne soit pas l'objet d'un déplacement intempestif par l'autre parent, ou victime de violence ou de comportements parentaux inadéquats.  D'un autre côté, le modèle législatif ne doit pas nuire aux liens que l'enfant avait avec les deux parents avant la séparation.  Chaque province ou territoire doit tenter d'atteindre son propre équilibre, en fonction de l'évaluation et des perceptions des normes sociétales.

Lorsque des abus, de la violence, une maladie mentale ou le bien-être de l'enfant ont forcé un des parents à se séparer, celui-ci doit faire appel à la protection des tribunaux afin d'obtenir un arrangement concernant la garde et le droit de visite qui soit différent de la solution « par défaut » prévue dans la loi.  Des précautions additionnelles peuvent être requises au moment de demander l'opinion de l'enfant dans ces situations puisque le stress peut nuire à sa santé mentale et à son développement.  Il risque de s'identifier au parent abuseur, de se considérer comme le sauveur du parent mentalement malade ou toxicomane ou de se blâmer d'avoir révélé l'abus[125].

Le fait de la séparation est l'occasion pour le gouvernement et pour la communauté d'apporter un soutien aux parents et aux enfants.  L'aide aux parents qui viennent de se séparer peut prendre la forme de services d'information et d'éducation; de formation offerte aux personnes qui serviront probablement de premier point de contact, comme les avocats, les conseillers, les travailleurs sociaux, les médecins et les conseillers religieux; et de soutien sur le plan émotif pour les parents qui ont besoin de temps pour accepter la réalité de la séparation.  De plus amples détails sur les recommandations du Comité sur le droit de la famille en matière de services sont présentés dans le présent rapport à la section intitulée « Choix de services et résultats ».

Lorsque les parents n'arrivent pas à s'entendre sur les modalités d'exercice des responsabilités parentales



Qu'ils aient cohabité ou n'aient jamais demeuré ensemble, de nombreux parents ne concluront aucune entente formelle sur la responsabilité à l'égard des enfants, et ce pour plusieurs raisons.  Par exemple, lorsqu'un parent, habituellement le père, a peu de contact ou aucun contact avec les enfants, les parents peuvent ne voir aucun avantage à conclure une entente formelle.  De même, lorsque les parents peuvent collaborer pour gérer la situation sans conflit ou qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires, ils peuvent choisir de ne pas conclure d'entente formelle.  Environ le tiers des parents séparés n'auront pas d'entente parentale formelle[126].



D'autres parents concluront des arrangements parentaux écrits et sanctionnés légalement concernant les modalités d'exercice des responsabilités parentales.  Cet arrangement est le plus souvent inclus dans l'accord de séparation.  Seule une minorité de parents obtiendra une ordonnance du tribunal.  La plupart des accords de séparation sont préparés avec l'aide d'un ou de plusieurs avocats.  Certains contiendront très peu d'information sur les arrangements parentaux tandis que d'autres comporteront un plan parental détaillé.

Les plans parentaux contiennent généralement : un emploi du temps détaillé touchant les conditions de vie de l'enfant; une répartition des pouvoirs de décision sur les différents aspects de la vie de l'enfant (un parent peut être responsable, par exemple, de l'éducation religieuse alors que l'autre prend en charge sa participation à des sports d'équipe); des restrictions sur les changements de résidence de l'enfant ou des parents; des dispositions sur les vacances avec l'enfant; et un mécanisme de résolution des conflits.  Les plans parentaux permettent de prévenir plusieurs des conflits qui surviennent d'habitude lors des séparations, mais pour le parent qui est très dominant ou qui entend garder contact avec son ex-époux, de tels plans peuvent fournir l'occasion d'interminables séances de négociations.  Dans le cas d'un ex-époux violent, un plan parental peut être un outil très efficace de contrôle, puisqu'il ne change pas la présomption qui sous-tend la plupart des lois, soit que les parents partagent le pouvoir décisionnel.  Habituellement, le plan n'est exécutoire que par les parents entre eux sur une base volontaire et tel parent a très peu d'options réelles si l'ex-conjoint choisit d'ignorer les règles établies dans le plan[127].

Les avocats rédigent généralement l'ébauche des ententes de séparation et des ordonnances par consentement.  Ils peuvent simplement mettre sur papier les conditions de l'entente conclue par les parties elles-mêmes, avec ou sans l'aide d'autres parties, comme des médiateurs.  Lorsque les parties sont incapables de conclure une entente, les avocats aident les parties à s'entendre par des négociations.  Les avocats encouragent souvent les clients à envisager la médiation, un plan parental ou une conciliation durant la préparation d'un accord de séparation.  Si la marge de désaccord est mince, une négociation directe entre les avocats évitera à la famille d'avoir recours à un autre professionnel.  Dans bien des cas, le règlement des problèmes de garde et de droit de visite des enfants par un accord de séparation peut constituer pour les parties une solution plus souple et plus complète qu'une ordonnance du tribunal ou, du moins, fonder une entente aussi durable qu'une ordonnance du tribunal.

Dans quelques régions des États-Unis et du Canada, les avocats ont recours à une nouvelle approche pour la résolution des conflits familiaux, le droit collaboratif familial.  Les avocats, formés en négociation raisonnée, travaillent avec leurs clients et les autres avocats afin de négocier une entente au cours d'une rencontre face à face.  Avant le début des négociations, avocats et clients s'entendent pour renoncer aux litiges; en cas d'échec des négociations, les clients doivent embaucher de nouveaux avocats.  L'accent est donc clairement mis sur le règlement.

La Loi sur le divorce exige des avocats qu'ils informent leurs clients de la possibilité de recourir à des services d'orientation et de médiation et qu'ils discutent des avantages de la négociation sur la garde et les pensions alimentaires de soutien.  Avec l'éventail actuel des mécanismes de résolution de conflits, allant de l'arbitrage au droit collaboratif, il est possible que les exigences actuelles de la législation et les dispositions semblables des lois provinciales ou territoriales soient trop restreintes.

Recommandation 26

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux gouvernements d'encourager la création d'une pratique de droit collaboratif familial comme une nouvelle option à proposer aux parties pour la résolution des conflits.

Recommandation 27

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les lois sur le droit de la famille obligent les avocats à informer les clients de tout l'éventail des options possibles pour la résolution des conflits.

Lorsque des parents mariés décident de divorcer



Tout comme le mariage, le divorce est un événement juridique.  Il ne peut s'accomplir sans une décision du tribunal.  Seules les personnes mariées doivent obtenir un divorce, mais ce ne sont pas toutes les personnes mariées qui obtiendront un divorce, puisque cela n'est généralement pas nécessaire du point de vue juridique à moins qu'un des anciens époux décide de se remarier[128].



Lorsque des parents divorcent, ils peuvent conclure des arrangements parentaux en vertu de la Loi sur le divorce.  En raison de la structure de la constitution canadienne, si l'un des parents décide de passer par la Loi sur le divorce pour en arriver à des arrangements parentaux, les procédures en cours devant les tribunaux provinciaux pour déterminer la garde ou le droit de visite sont suspendues ou terminées.  Le poids de la loi fédérale est d'une importance capitale puisque le parent qui se rend compte d'une différence appréciable entre les deux législations et perçoit que la loi fédérale est avantageuse pour lui, demandera plutôt le divorce.

À l'heure actuelle, en vertu de la Loi sur le divorce, un juge peut ajourner une procédure de divorce afin de permettre aux parents de tenter une réconciliation.  Il serait peut-être bon que la Loi sur le divorce autorise également le juge à ajourner les procédures afin que les parties puissent tenter de résoudre leurs différends hors cour, grâce à une médiation ou à un autre mécanisme non judiciaire de règlement des différends.

Si le Comité sur le droit de la famille appuie le recours aux solutions de rechange aux procédures juridiques pour le règlement des différends entre parents, il n'existe pas de consensus sur la nécessité d'autoriser un juge, en vertu de la Loi sur le divorce, à forcer les parents à avoir recours à la médiation, à une évaluation ou à d'autres services financés par les provinces.  Comme la plupart des provinces ou territoires prévoient le recours aux approches alternatives de règlement des différends selon les règles de la cour ou dans le cadre des lois, il faut déterminer s'il y a des limites juridiques ou pratiques à la capacité d'accéder à ces services dans les cas soumis à la Loi sur le divorce.

De plus, les Canadiens sont de plus en plus mobiles et il n'est pas rare que l'un des parents déménage pour tirer avantage de meilleures possibilités d'emploi ou pour d'autres raisons et quitte la province ou le territoire où la famille résidait, après la rupture du mariage ou de la relation.  L'uniformité relative des lois fédérales, provinciales et territoriales présente l'avantage de réduire la confusion au sujet des lois qui s'appliquent aux liens familiaux au Canada et du processus décisionnel centré sur les enfants.

Recommandation 28

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les gouvernements s'appliquent à garantir aux enfants un traitement et une protection semblables partout au Canada en apportant une certaine cohérence dans les lois touchant les droits de garde et de visite et les pensions alimentaires pour enfants.



Lorsque les parents demandent l'aide des tribunaux

Il ne serait pas prudent ou raisonnable pour certaines familles de conclure elles-mêmes leurs ententes parentales en raison de conflits, de détresse émotive, de valeurs opposées, de violence domestique, de maladie mentale grave ou de toxicomanie qui peuvent placer un des parents ou les enfants en situation de danger.  Certaines familles tenteront de conclure leurs propres ententes parentales, mais n'y parviendront pas, tandis que d'autres se retrouveront devant les tribunaux parce qu'une ordonnance du tribunal est une condition préalable nécessaire pour en arriver à un arrangement parental (ils doivent par exemple obtenir un jugement confirmant qu'ils sont les parents afin de pouvoir demander un droit de visite) ou pour d'autres raisons (l'obtention de prestations de sécurité du revenu par exemple).

L'activité des tribunaux est régie par deux éléments : la loi applicable et les procédures du tribunal (généralement déterminées par les règles du tribunal).  En vertu de la Constitution, chacune des provinces contrôle les procédures de ses tribunaux.  Comme il a été dit ci-dessus, les lois provinciales s'appliquent à tous les parents qui ne sont pas mariés.  Même les parents mariés peuvent choisir d'intenter des procédures en vertu de la loi provinciale plutôt qu'en vertu de la Loi sur le divorce.  Dans certaines provinces, il y a deux niveaux de tribunaux qui peuvent statuer sur les questions de droit familial; dans ces cas, seule la cour supérieure peut accorder un divorce.  En général, les frais de justice et les honoraires d'avocat sont plus élevés dans le cas des cours supérieures et les procédures sont plus complexes. Certains parents préfèrent donc résoudre leurs problèmes devant les tribunaux inférieurs.  Dans d'autres provinces et dans certaines régions, les deux niveaux sont unifiés, si bien qu'une seule cour a le pouvoir de prendre toutes les décisions concernant le droit de la famille.

Les instances au Canada sont de nature accusatoire, ce qui signifie que chaque personne est responsable de présenter les faits et le droit afin de convaincre le juge du bien-fondé de sa cause. Étant donné que la fonction de parent implique des contacts continus, la résolution des problèmes par le modèle accusatoire peut aller à l'encontre du but recherché.  Les parents qui considèrent leur cause comme une bataille, où il y aura un gagnant ou un perdant, n'ont pas les outils nécessaires pour maintenir une relation basée sur la collaboration.  En réponse à cette lacune, plusieurs provinces ont ajouté des mécanismes de soutien et des étapes additionnelles au processus judiciaire lorsque la garde des enfants est en cause, afin d'assurer que l'intérêt des enfants demeure au centre des préoccupations.

Recommandation 29

Le Comité sur le droit de la famille recommande aux tribunaux d'utiliser à bon escient les mécanismes judiciaires et extrajudiciaires de règlement des différends afin d'éviter le durcissement des positions, de favoriser un règlement rapide et de délimiter les points en litige.

Étapes des procédures judiciaires

Les procédures judiciaires varient d'une province à l'autre et entre les niveaux du système judiciaire dans les provinces ou territoires où existent toujours deux niveaux. La procédure civile régit habituellement les procédures de droit de la famille, même si certaines provinces ont adopté des procédures propres aux questions de droit de la famille.  On a déjà tenté de simplifier le langage utilisé dans les codes de procédure s'appliquant au droit de la famille afin de permettre au profane de mieux comprendre le processus.

Les tribunaux civils, particulièrement les cours supérieures mises en place par le gouvernment fédéral, tendent à avoir des codes de procédure très détaillés.  Cela permet des poursuites complexes sur une diversité de questions civiles, y compris les différends commerciaux.  Le langage et les procédures du tribunal sont souvent très complexes pour les parents qui sentent que leur décision sur les rôles parentaux a été transférée à un processus sur lequel ils ont peu de contrôle.  Ainsi, les résultats d'une étude sur l'efficacité de la médiation au Manitoba révèlent que seul un petit nombre de participants estimaient avoir un certain contrôle sur le processus judiciaire[129].

Habituellement, un parent peut obtenir, tôt dans le processus, une ordonnance intérimaire ou temporaire qui restera en vigueur jusqu'au règlement de la question, soit par une entente, soit par un procès.  La plupart des appareils judiciaires prévoient au moins une rencontre préparatoire dirigée par un fonctionnaire judiciaire, afin de discuter des possibilités de résoudre une part des problèmes ou tous les problèmes entre les parties.  Dans les cas de tribunaux spécialisés, il peut y avoir plusieurs rencontres avec un juge avant le procès.

Au Canada, la plupart des instances de droit de la famille font l'objet d'une gestion des cas, ce qui signifie que le juge ou le personnel du tribunal tente de faire respecter le calendrier aux parties et de s'assurer que l'affaire soit résolue.  Ce processus de gestion des cas peut ajouter des étapes additionnelles au processus puisque les parents doivent signaler au tribunal pourquoi leur cas ne progresse pas.  Les systèmes de gestion des cas doivent pouvoir s'adapter aux problèmes particuliers survenant dans des cas de droit de la famille.  Ils doivent notamment assurer que dans les situations urgentes, comme les cas de violence ou de déplacement illicite d'un enfant, les procédures de gestion des cas n'empêchent pas les familles de comparaître devant un juge le plus tôt possible.

Recommandation 30

Le Comité sur le droit de la famille recommande que les systèmes de gestion des cas permettent d'accélérer le processus de décision judiciaire quand il en va de l'intérêt de l'enfant de régler d'urgence une affaire.



À tout moment pendant le processus judiciaire, les parents peuvent conclure une entente parentale.  Comme ils ont présenté une demande à la cour, cette entente est souvent intégrée à une ordonnance du tribunal par consentement.  Si aucune entente n'est conclue, l'instance se poursuit jusqu'au procès, où les preuves sont alors présentées.  À la conclusion du procès, le juge rendra une ordonnance portant sur les arrangements parentaux.

Les décisions de la cour et les procès jouent un rôle dans la protection des parents et des enfants qui pourraient être victimes de violence ou de manipulation.  Cependant, puisqu'à l'exception de la législation sur la protection des enfants, le droit de la famille relève généralement du droit privé et que les parents doivent se charger eux-mêmes des procédures, le processus judiciaire tend à favoriser le parent qui a le plus de ressources financières.  Les fonds dédiés à l'aide juridique ne sont pas distribués également au pays, et ils ne sont pas répartis de façon égale entre le secteur du droit civil et le secteur du droit criminel.

Lorsque le tribunal rend une ordonnance

Un tribunal ne peut rendre une ordonnance que sur une question soulevée par l'un des deux parents.  L'un ou l'autre des parents doit s'adresser au tribunal pour l'organisation des arrangements parentaux avant que le tribunal ne puisse rendre une ordonnance.  Les ordonnances peuvent être intérimaires (temporaires jusqu'à ce qu'une ordonnance définitive soit rendue), ou définitives.  Le qualificatif définitif  d'une ordonnance portant sur les arrangements parentaux peut cependant induire en erreur puisque la loi permet la modification d'une ordonnance s'il est dans l'intérêt de l'enfant de le faire et s'il y a eu des changements importants depuis que l'ordonnance a été rendue.

Afin que des parents mariés puissent divorcer, le tribunal doit rendre un jugement de divorce.  Souvent, les arrangements parentaux inclus dans l'accord de séparation ou conclus par suite de négociations sont incorporés dans le jugement de divorce.

Au Canada, les ordonnances du tribunal sont souvent rédigées par les avocats qui représentent les parents ou par le personnel du tribunal.  Le niveau de détail de l'organisation des responsabilités parentales dans ces ordonnances peut varier.  Certains tribunaux incluront un plan parental détaillé tandis que d'autres énonceront simplement que les parents ont la garde conjointe des enfants.  Les tribunaux du Canada peuvent ordonner une grande diversité dans l'aménagement des rôles parentaux.  La jurisprudence confirme qu'un tribunal peut inclure toute condition dans une ordonnance de garde ou de visite qu'il juge nécessaire pour donner effet à celle-ci.

Si les parents ont comparu devant les tribunaux, l'ordonnance du tribunal représente la principale description de leur future relation en tant que parents.  Les parents tireront avantage d'une ordonnance rédigée dans un langage clair et sans équivoque, décrivant clairement la responsabilité de chacun des parents à l'égard des enfants.  Puisqu'ils ont dû se tourner vers les tribunaux pour résoudre leur différend, il est raisonnable de croire qu'ils auront besoin de conseils ou d'orientation pour résoudre les conflits à venir.  Il est donc important que l'ordonnance soit claire en prévision de son exécution.  Le Manitoba a traité de la clarté des ordonnances de façon proactive en élaborant dans le cadre d'un projet-pilote un modèle de dispositions que les juges et les avocats peuvent inclure dans les ordonnances[130].

Recommandation 31

Le Comité sur le droit de la famille recommande que le libellé des ordonnances soit clair et cohérent pour permettre aux parties de bien comprendre leurs obligations et pour assurer le respect et la bonne exécution des ordonnances.



Lorsqu'une personne doit faire modifier l'organisation des rôles parentaux

Les enfants grandissent et les familles changent.  Les arrangements parentaux ou les décisions concernant l'éducation d'un enfant devront être modifiées plusieurs fois pendant la vie de l'enfant.  Même lorsque des décisions définitives ont été prises par les parents, des changements, comme de nouvelles relations des parents, le désir de l'un ou des deux parents de déménager, le passage de l'enfant à l'adolescence et des modifications dans la situation financière peuvent entraîner une réévaluation des arrangements.  La façon dont le changement est fait est déterminée, en grande partie, par la forme de l'arrangement originel.

Habituellement, une entente parentale écrite peut être modifiée par d'autres ententes écrites signées par les deux parties et leurs témoins.  Plusieurs accords de séparation renvoient à des mécanismes de règlement des différends, y compris la médiation et l'arbitrage, afin d'aider les parents à déterminer les termes de la modification.

Une ordonnance du tribunal ne peut être modifiée que par une autre ordonnance du tribunal.  Ainsi, même lorsque les parents sont d'accord, si l'entente parentale est incluse dans un jugement de divorce ou une ordonnance de garde et de visite, ils devront retourner devant les tribunaux pour faire modifier l'ordonnance.  Certains parents ont besoin de l'aide et de la protection du tribunal même lorsqu'ils ont conclu une entente.  Par exemple, l'exercice de révision judiciaire en cas de changements dans la situation des parents, peut éviter la coercition exercée par un parent sur l'autre.  Cependant, lorsque les parents obtiennent une ordonnance, non en raison d'un conflit, mais pour d'autres raisons, comme l'obtention de prestations sociales, l'instance visant à changer les arrangements peut déclencher les hostilités.  En d'autres termes, une audience devant le tribunal, avec tous les coûts émotifs et financiers qui s'y rattachent, n'est pas nécessaire dans certains cas.

Recommandation 32

Le Comité sur le droit de la famille recommande la mise en place de procédures permettant, lorsqu'il y a consentement, la modification rapide des ordonnances de garde et de droit de visite de même que des ordonnances alimentaires, et ce, sans audience devant le tribunal.




PARTIE 2 : PENSIONS ALIMENTAIRES POUR ENFANTS

A. INTRODUCTION

Les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants sont constituées des règles et des tables que les tribunaux doivent utiliser afin de déterminer le montant de la pension alimentaire pour enfants.  Les modifications à la Loi sur le divorce établissant le cadre des lignes directrices, de même que les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, sont entrées en vigueur le 1er mai 1997.  Toutes les provinces et tous les territoires ont mis en œuvre des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.  À l'exception du Québec, toutes les provinces et tous les territoires ont adopté les lignes directrices fédérales ou une version modifiée de celles-ci.  Le Québec a établi ses propres lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.

Une partie de la loi adoptant les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants de la Loi sur le divorce exigeait que le ministre fédéral de la Justice fasse rapport au Parlement avant le 1er mai 2002.  En 1999, le ministère de la Justice du Canada a mené des consultations sur des questions techniques relatives aux lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants en distribuant un document au public[131].  Un rapport intérimaire concernant les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants a été fourni par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie[132].  Les consultations publiques de 2001, intitulées L'intérêt de l'enfant d'abord [133], sollicitaient les réactions du public sur quatre questions :

  • pensions alimentaires dans les cas de garde partagée;
  • impact des frais liés à l'exercice du droit d'accès sur les sommes consacrées aux pensions alimentaires;
  • pensions alimentaires pour enfants majeurs;
  • obligation alimentaire de l'époux « tenant lieu de père ou de mère ».

Le Comité sur le droit de la famille estime que les lignes directrices ont, en général, réussi à mettre en place les bases raisonnables à partir desquelles les parties peuvent déterminer leur niveau de responsabilité en matière de pension alimentaire pour enfants; elles ont encouragé les parties à accepter le résultat quant aux montants et à payer les pensions alimentaires pour enfants et accru le niveau général des pensions alimentaires accordées aux enfants[134].

Si les lignes ont connu un grand succès, les parents, les avocats, les juges et d'autres intervenants ont relevé des points qui devraient être améliorés.  Certains de ces points n'exigeront pas de changements importants mais de simples aménagements; il s'agit d'être plus précis tout en restant souple.  Il faut noter que tout changement de terminologie dans la Loi sur le divorce doit nécessairement entraîner une modification des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants dans les législations fédérale, provinciales et territoriales.

En tenant compte des résultats des consultations de 2001 ainsi que des consultations antérieures sur d'autres questions, des résultats de recherche et de l'analyse de la jurisprudence, les recommandations suivantes sont formulées.

B. PROCÉDURES JUDICIAIRES ET QUESTIONS LÉGISLATIVES

Garde partagée

Les Lignes directrices stipulent que si un époux exerce son droit d'accès auprès d'un enfant ou en a la garde physique pendant au moins 40 pour cent du temps au cours d'une année, le tribunal peut prescrire un montant de pension alimentaire différent du montant indiqué dans les Lignes directrices.  En prenant une telle décision, le juge tient compte de divers facteurs incluant les montants figurant dans les tables applicables à l'égard de chaque époux, des coûts plus élevés associés à la garde partagée, ainsi que des ressources, des besoins et, d'une façon générale, de la situation de chaque époux et de tout enfant pour lequel une pension alimentaire est demandée.

La règle des 40 pour cent

Bien que l'on ait critiqué l'emploi d'un tel seuil en raison du lien direct entre les contacts avec l'enfant et la pension alimentaire, aucune autre solution permettant d'améliorer la méthode basée sur un tel seuil n'a pu être trouvée.  Il existe bien d'autres propositions valables, mais aucune ne simplifie le processus judiciaire et chacune constitue un changement radical par rapport au statu quo.  L'abandon d'un seuil basé sur le temps de présence de l'enfant créerait beaucoup d'incertitude et alourdirait le processus, allant ainsi à l'encontre des objectifs des Lignes directrices.

Le fait de choisir un seuil plus élevé, en référant par exemple à une période substantiellement équivalente, présente certains avantages.  Ces avantages peuvent toutefois être annulés par d'autres facteurs, y compris les risques accrus de contestations portant sur le sens de ce terme; l'iniquité pour les parents ayant un droit d'accès prolongé; et l'incertitude quant à savoir si cela permettra effectivement de réduire ce lien entre le temps de contact avec l'enfant et la pension alimentaire, et donc si cela entraînera réellement une diminution des litiges.

De plus, il existe déjà toute une jurisprudence qui interprète cet article et les parents comme les professionnels la connaissent bien.  On continuera toutefois à examiner de près la jurisprudence.

Recommandation 33

Le Comité sur le droit de la famille recommande qu'aucun changement ne soit apporté à la règle relative au seuil des 40 pour cent.  Cependant, il faudrait donner plus d'information dans les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants quant aux moyens de cerner ou d'analyser les éléments qui contribuent à déterminer si le seuil des 40 pour cent a été atteint.



L'application d'une présomption



On propose de remplacer les facteurs servant actuellement à calculer le montant de pension alimentaire dans les situations de garde partagée, par une formule basée sur une présomption.  Un juge décidera du montant de la pension alimentaire en appliquant la formule prescrite, à moins que le montant ne convienne pas.  Le montant de la formule est constitué de la différence entre les valeurs de la table pour chacun des parents (méthode de compensation).  L'objectif d'une telle présomption est d'accroître la prévisibilité et la certitude tout en conservant le pouvoir judiciaire ultime d'ordonner le versement d'un autre montant dans les conditions appropriées.



Cette formule de compensation sera déterminée en fonction des valeurs de la table pour le nombre total d'enfants dont les parents ont la garde partagée.  Pour décider de l'équité du montant fixé par la formule, le tribunal peut prendre en compte tout facteur pertinent, y compris la façon dont les époux partagent les dépenses pour l'enfant.

La formule de compensation tient compte des coûts accrus du maintien de résidences respectives puisque la contribution de chacun des parents sera fondée sur le nombre total d'enfants dont ils ont la garde partagée.  Cela diffère des conditions de garde exclusive où les montants de la table ne tiennent compte que du nombre d'enfants dont chaque parent a la garde.  La méthode de compensation est conforme aux principes des lignes directrices qui veulent que chacun des parents contribue à l'entretien des enfants de la même façon que si la famille était demeurée intacte.

L'utilisation d'une formule basée sur une présomption simplifie la détermination du montant de la pension alimentaire et offre plus de certitude et de prévisibilité.  Elle oriente les parents et les tribunaux quand vient le temps de déterminer le montant de la pension alimentaire dans les cas de résidence partagée tout en leur accordant une certaine souplesse.  Comme les tribunaux ont le pouvoir de s'écarter de la formule dans les cas appropriés, ils risquent moins d'ordonner le versement de montants injustes.  Plusieurs tribunaux appliquent déjà ce critère dans des cas appropriés.

Recommandation 34

Le Comité sur le droit de la famille recommande de remplacer les facteurs servant actuellement à calculer le montant des pensions alimentaires dans les situations de garde partagée, par une formule basée sur une présomption.  Le montant résultant de la formule serait basé sur la différence entre les valeurs données dans les tables pour chaque parent étant donné le nombre total d'enfants considérés dans l'arrangement de garde partagée, sauf si ce montant est jugé inadéquat en raison, par exemple, de la manière dont les parents se répartissent les dépenses de l'enfant.



Définition des dépenses extraordinaires

L'article 7 des Lignes directrices prévoit l'inclusion possible de six catégories de dépenses spéciales pour l'enfant dans le montant de pension alimentaire pour enfants compte tenu de leur nécessité par rapport à l'intérêt de l'enfant et de leur caractère raisonnable par rapport aux ressources des époux et de l'enfant ainsi qu'aux habitudes de dépense de la famille avant la séparation.  On retrouve dans ces catégories les dépenses extraordinaires pour l'éducation et les activités parascolaires.

Le terme extraordinaire est interprété différemment dans l'ensemble du pays, ce qui crée une certaine confusion et un manque d'uniformité dans l'application.  Il est donc nécessaire de le définir plus précisément.  Il est donc proposé de modifier l'article 7 en y ajoutant une définition du terme extraordinaire.  On demandera aux parents et aux tribunaux d'établir si telle ou telle dépense est de nature extraordinaire par rapport au revenu du parent qui présente la demande et qui engage la dépense en question.  Si l'examen du revenu ne permet pas de décider si la dépense est extraordinaire, on invitera les parents et le tribunal à tenir compte d'autres facteurs que le revenu.  Cette réforme serait similaire à celle que le Manitoba a apportée à ses lois.  Les autres facteurs examinés seront notamment :

  • le nombre et la nature des programmes et des activités;
  • le coût d'ensemble des programmes et des activités;
  • les besoins et aptitudes particuliers de l'enfant;
  • tout autre facteur semblable que le tribunal juge pertinent.

L'approche proposée respecte l'esprit initial de l'article et l'interprétation adoptée par plusieurs cours d'appel.

Recommandation 35

Le Comité sur le droit de la famille recommande que le terme extraordinaire soit défini dans les Lignes directrices.

Pensions alimentaires pour enfants majeurs

Bien des gens ont soutenu que les enfants plus âgés qui reçoivent une pension alimentaire devraient rendre des comptes et fournir certains renseignements, financiers et autres, attestant qu'ils sont toujours dans les conditions pour prétendre à un tel soutien.  D'autres déclarent qu'il s'agit d'une intrusion inutile dans la vie privée de l'enfant plus âgé qui a pour effet de l'impliquer indûment dans les litiges des parents.



Il est proposé de modifier les Lignes directrices afin d'exiger la divulgation des renseignements relatifs au droit de l'enfant à la pension alimentaire.  Cela assurera la transparence du processus et affirmera l'obligation de rendre compte.  La modification exigera que le parent receveur, et non l'enfant, fournisse les renseignements sur demande écrite du parent payeur, évitant ainsi à l'enfant lui-même d'être mêlé directement au litige.  Cette exigence s'appliquerait dans tous les cas où une pension alimentaire est versée à des enfants majeurs, et pas uniquement aux cas s'accompagnant de dépenses spéciales.

Les dépenses spéciales, par exemple les frais de scolarité pour des études postsecondaires, ne sont pas comprises dans les montants de la table de pensions alimentaires pour enfants.  Un article des Lignes directrices exige déjà que les parents communiquent les renseignements relatifs à une demande de dépenses spéciales.  Cependant, cette disposition ne s'applique pas à la communication des renseignements sur l'admissibilité continue et d'autres dépenses qui peuvent être payées à même le montant des tables ou un autre montant versé pour les enfants plus âgés.

Recommandation 36

Le Comité sur le droit de la famille recommande de garder intactes les dispositions relatives à l'admissibilité à une pension alimentaire des enfants qui ont atteint leur majorité.

Recommandation 37

Le Comité sur le droit de la famille recommande de modifier les Lignes directrices afin que les parents qui reçoivent une pension alimentaire pour des enfants majeurs soient tenus de divulguer l'information concernant l'admissibilité des enfants.

La méthode de comparaison des niveaux de vie des ménages

La disposition sur les difficultés excessivesreconnaît que, dans certaines circonstances, le paiement du montant indiqué dans la table ou ce montant additionné des dépenses spéciales peut causer à un parent ou à un enfant des difficultés excessives.  Cet article permet aux tribunaux et aux parents de décider d'un montant différent dans les cas pertinents, et ce, afin d'atténuer ces difficultés.  La disposition touchant les difficultés excessives vise à établir un équilibre entre les objectifs d'uniformité des lignes directrices et une norme équitable de pension alimentaire qui tienne compte de la situation particulière de la famille.



On a critiqué la disposition portant sur les difficultés excessives parce qu'on l'a appliquée de manière restrictive aux époux désireux de réduire le montant des pensions alimentaires, surtout quand les frais relatifs à l'exercice du droit d'accès sont élevés pour les parents payeurs qui résident loin de l'enfant.  Les tribunaux étudient actuellement ces situations au cas par cas et, le plus souvent, ils appliquent l'article comme il se doit.  Dans plusieurs cas de déménagement (le parent payeur réside loin de l'enfant par exemple), les tribunaux tiennent compte des dépenses élevées de transport que doit engager le parent dont le droit de visite est déterminé par une ordonnance distincte.

Recommandation 38

Le Comité sur le droit de la famille recommande qu'aucun changement portant précisément sur les coûts élevés liés au droit d'accès ne soit apporté aux Lignes directrices.  Il faut aborder chaque situation au cas par cas et tout arrangement jugé pertinent dans un cas particulier devrait faire partie intégrante de l'ordonnance relative à la garde et au droit de visite.

Obligations des personnes qui « tiennent lieu de parent »

Les relations maritales et familiales à durée variable et les familles recomposées sont de plus en plus fréquentes dans la société canadienne[135].  Une personne qui « tient lieu de parent » à un enfant peut avoir l'obligation légale de soutenir cet enfant une fois que la relation avec l'autre parent se termine.

La Loi sur le divorce définit un enfant à charge (soit un enfant admissible au soutien alimentaire) comme l'enfant des deux époux ou ex-époux, « dont l'un est le père ou la mère et pour lequel l'autre en tient lieu[136] ».  La plupart des provinces et des territoires ont adopté une définition similaire dans leur propre législation ou ont défini l'enfant comme « un enfant envers qui une personne a démontré l'intention soutenue de traiter l'enfant comme un membre de sa famille ».

Une fois qu'il est établi que le beau-parent tient lieu de parent, ces obligations sont similaires à celles du parent naturel.  Les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants permettent aux tribunaux de fixer le montant de pension pour enfants qu'ils jugent adéquat dans ces cas.  Lorsqu'ils calculent ce montant, les tribunaux doivent tenir compte du montant prévu dans les lignes directrices et de l'obligation légale de tout autre parent pour le soutien alimentaire de l'enfant.

Les tribunaux ont adopté diverses façons d'aborder la question et, à la lumière des incohérences qui en ont résulté, certains sont d'avis que la réglementation devrait fournir des directives explicites aux juges sur la façon d'établir le montant de la pension alimentaire versée par le beau-parent.  Toutefois, la question de savoir comment répartir la pension alimentaire entre les parents naturels et les beaux-parents est plutôt complexe et repose en grande partie sur les circonstances propres à chaque cas.  L'utilisation d'une formule stricte risquerait d'être inéquitable.  La plupart des répondants ont fait part de cette préoccupation précise durant les consultations[137].  Pour toutes ces raisons, on recommande de ne pas modifier cette disposition.

Recommandation 39

Le Comité sur le droit de la famille recommande de garder inchangées les dispositions des Lignes directrices concernant les obligations d'une personne « tenant lieu de parent ».



Tables de pensions alimentaires pour enfants

Les tables fédérales de pensions alimentaires pour enfants fixent le montant mensuel de pension alimentaire pour enfants pour chaque province et chaque territoire en fonction du revenu annuel du parent qui doit payer la pension et du nombre d'enfants pour qui cette pension doit être versée.  Les montants varient d'une province ou d'un territoire à l'autre en raison des différences des taux et des crédits d'imposition entre les provinces et les territoires.  Lorsque les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants ont été adoptées, l'objectif était de modifier les tables chaque fois que des changements aux taux d'imposition auraient des répercussions importantes sur les montants de la table.

Recommandation 40

Le Comité sur le droit de la famille recommande de mettre à jour les tables de pensions alimentaires tous les cinq ans ou plus souvent si des modifications apportées aux lois fédérales, provinciales ou territoriales sur l'impôt ont une incidence significative sur les montants des tables.




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Mise à jour : 2006-10-10 Haut de la page Avis importants