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DOCUMENT DE TRAVAIL

LA NÉGOCIATION DE RÈGLEMENTS:
QUESTIONS ET APPLICATIONS

Lee Axon
et
Bob Hann

mars 1994

Les opinions qui y sont exprimées sont celles de l'auteure ; elles ne reflètent pas nécessairement celles du Ministère de la justice Canada.

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SOMMAIRE

Le présent rapport a été entrepris sous les auspices du Projet de règlement de différends du ministère de la Justice du Canada. Il conjugue un examen de la documentation concernant la négociation de règlements et des procédures plus conventionnelles d'établissement de règles au Canada et dans d'autres pays (notamment aux États-Unis et en Australie) à des interviews réalisées auprès de porte-parole qui ont expérimenté le processus de négociation de règlements. Conçue aux États-Unis dans les années 1980, la négociation de règlements constitue une solution de rechange novatrice et contraignante aux méthodes conventionnelles de rédaction de règlements. Les points suivants résument les caractéristiques principales de la négociation de règlements :

  • la négociation de règlements est une solution de rechange aux méthodes classiques de règlement de différends en vertu de laquelle le résultat n'est pas influencé de façon marquée par une tierce partie;
  • on ne doit pas confondre la négociation de règlements avec un règlement négocié. S'ils supposent tous deux une négociation, la négociation de règlements est, par nature, tournée vers l'avenir : elle vise non pas à résoudre des différends précis, mais bien à établir des règles générales qui influenceront le comportement;
  • la négociation de règlements vise à servir de complément et de solution de rechange aux méthodes conventionnelles d'établissement de règles, telles que la consultation et les audiences;
  • la négociation de règlements possède quatre caractéristiques critiques :
    • elle se produit «en amont» de l'élaboration de règlements;
    • les intervenants se rencontrent face à face pour présenter leur position et entendre le point de vue de l'autre partie;
    • en ce qui touche la rédaction finale des règlements proposés, les décisions sont prises par consensus;
    • dans la mesure du possible, les décisions auxquelles les négociations permettent d'arriver lient les parties;
  • dans le contexte de la négociation de règlements, on entend par «consensus» que tous les intéressés présents autour de la table sont d'accord avec l'entente conclue -- ou du moins ne s'y opposent pas;
  • la négociation de règlements vise la production de meilleurs règlements -- quant à la politique, à la procédure et au fond -- en donnant aux parties que le règlement proposé intéresse tout particulièrement l'occasion de participer à sa formulation;
  • parmi les avantages de la négociation de règlements, on retrouve :
    • de meilleures assises en ce qui touche la prise de décisions relatives aux règlements et l'élaboration de règlements plus solides;
    • des conflits moins nombreux, une mise en oeuvre plus rapide et uneconformité plus grande;
    • une meilleure validité, sur le plan politique, de la prise de décisions relatives aux règlements;
    • des relations davantage axées sur la coopération entre les intéressés et l'organisme;
    • moins de temps, d'argent et d'effort;
  • parmi les inconvénients de la négociation de règlements, on retrouve :
    • le fait qu'elle peut exiger de nombreuses ressources à court terme et obliger les organismes à adapter leurs procédures internes;
    • le fait qu'elle exige un investissement considérable de temps et de ressources de la part de groupes d'intérêt publics qui peuvent avoir une capacité limitée de soutenir l'effort nécessaire à la participation au processus -- particulièrement si ces groupes prennent part à plus d'une négociation;
    • le fait que de nombreux intervenants connaissent mal le processus, si bien qu'il faut parfois vaincre les attitudes négatives à son endroit, y compris les réticences que l'idée suscite chez les organismes;
    • le fait qu'elle risque de ne pas représenter adéquatement les intérêts du public; le fait qu'elle peut se prêter aux manipulations de ceux qui pourraient être tentés d'utiliser le processus à leurs propres fins;
  • les procédures liées à la négociation de règlements comportent quatre stades :
    • un stade d'évaluation prévoyant un examen minutieux de la pertinence du recours à la négociation de règlements dans le contexte des critères qui ont été mis au point pour le processus, de la nature de l'objet de la réglementation, du nombre et de la nature des enjeux, de l'échéancier rattaché à l'élaboration des règlements ainsi que de la définition, de la disponibilité et de l'engagement des parties concernées;
    • un stade de pré-négociation prévoyant deux phases : d'abord, un organisateur procède à un examen en profondeur des critères ci-dessus et prépare les parties aux négociations; dans la deuxième phase, l'organisme et l'organisateur font publier l'avis d'intention de négocier, choisissent un médiateur et prennent, à l'égard de l'avis, les dispositions nécessaires;
    • un troisième stade, celui des négociations elles-mêmes, y compris les négociations relatives à la procédure et au fond; et
    • un quatrième stade, soit la fermeture et le suivi (par exemple, l'évaluation du processus et la surveillance de la mise en oeuvre de l'entente).

Tandis que la négociation de règlements peut ne pas se prêter à toutes les formes d'établissement de règles, elle constitue un moyen d'élaborer des règlements qu'on pourra privilégier lorsque les enjeux sont de taille, que les questions ouvertes à la négociation sont suffisantes et que la motivation est assez grande pour que les négociations soient menées de bonne foi. Dans le cadre du processus de négociation de règlements, le style de négociation utilisé, pour reprendre l'expression de Roger Fisher, est la «négociation raisonnée» -- c'est-à-dire une négociation fondée sur la résolution réciproque de problème.

La participation à la négociation de règlements doit être volontaire, et les participants doivent faire preuve d'enthousiasme à l'égard du recours à cette méthode. Pour les intervenants de l'extérieur du gouvernement, la motivation est établie en fonction des meilleures solutions de rechange à une entente négociée. Si les intervenants estiment qu'ils pourront mieux atteindre leurs buts non pas en négociant les règlements, mais en recourant à d'autres moyens (par exemple, le lobbying, les actions en justice ou les mesures dilatoires), ils seront peu susceptibles de participer à la négociation de règlements.

On peut influencer les meilleures solutions de rechange à une entente négociée en faveur de la négociation. Si le gouvernement affiche clairement sa «position de repli», ou qu'il dissuade les intervenants de recourir à d'autres moyens, par exemple le lobbying, avant qu'on ait fait l'essai de la négociation de règlements, il est plus probable que ces derniers accepteront de jouer le jeu. On a donc posé l'hypothèse suivant laquelle la négociation de règlements est plus susceptible de porter fruit lorsque les parties s'entendent sur ce que sera le résultat, en l'absence de négociations; lorsqu'elles ne s'entendent pas sur ce que sera le résultat, en l'absence de négociations, et que toutes font davantage preuve de pessimisme que d'optimisme; et lorsque l'organisme de réglementation ou le ministère influent activement sur les perceptions des parties à l'égard des meilleures solutions de rechange, en mettant l'accent auprès des parties, dans des termes qui les touchent de près, sur les conséquences néfastes d'une action unilatérale de la part de l'organisme, ce qui rend plus attrayante la perspective d'une négociation.

On peut également encourager la participation du gouvernement, parce que la négociation de règlements suscitera vraisemblablement quelque résistance à l'égard d'un certain nombre de facteurs tels que le manque d'information et de connaissances au sujet du processus, l'incertitude à propos de sa légitimité et la nécessité d'effectuer un certain nombre de modifications internes pour donner libre cours à la procédure. Pour encourager la participation du gouvernement à la négociation de règlements, on peut prendre un certain nombre de mesures, notamment en légitimant le processus à l'aide de mesures habilitantes.

Au nombre des arguments en faveur de l'adoption d'une loi relative à la négociation de règlements, on retrouve le fait que des mesures législatives légitimeraient le processus et favoriseraient officiellement son utilisation, éclairciraient les questions de droit de procédure, officialiseraient la capacité des organismes de recourir à la négociation de règlements et fourniraient une orientation quant à son fonctionnement. Parmi les arguments militant à l'encontre de mesures législatives à cet égard, on retrouve la perte de souplesse, la rupture de l'équilibre consensuel nécessaire aux négociations de règlements et la codification prématurée du processus.

Le processus, même s'il a été mis au point aux fins de la formulation de règlements, se prête à un certain nombre d'autres applications, y compris l'élaboration de politiques, l'établissement de normes, le règlement de différends postérieurs à l'établissement de règlement, la délivrance de permis et de licences et l'observation des règlements. Les avantages qu'on associe à l'utilisation du processus dans d'autres contextes sont analogues à ceux qu'on observe dans le cas de l'élaboration de règlements. Comme en ce qui concerne la négociation de règlements, on doit toutefois choisir avec soin les situations qui se prêtent à l'utilisation de la procédure.

Au stade où nous en sommes, au Canada, le respect des recommandations suivantespourra favoriser l'utilisation de la négociation de règlements :

Recommandation 1

Le ministère de la Justice devrait donner une série d'ateliers ou de séminaires au sujet de la négociation de règlements à l'intention des cadres supérieurs des organismes et des ministères chargés de la réglementation. Dans le cadre des ateliers, des personnes qui ont connu l'expérience du processus de négociation de règlements devraient prendre la parole.

Recommandation 2

Le ministère de la Justice, par le truchement du Projet de règlement de différends et en collaboration avec le Projet d'adhésion au droit réglementaire, devrait consulter les ministères chargés de la réglementation pour établir deux ou trois situations qui pourraient se prêter avantageusement à une négociation de règlements.

Recommandation 3

En conjonction avec les projets pilotes de négociation de règlements ci-dessus, le ministère de la Justice devrait consulter les ministères chargés de la réglementation pour déterminer les candidats qui pourraient servir à la réalisation d'études de cas au sujet des méthodes conventionnelles de formulation de règlements.

Recommandation 4

On devrait entreprendre une évaluation de la qualité et de l'utilité des résumés d'études d'impact de la réglementation, y compris, au besoin, des améliorations recommandées.

Recommandation 5

On devrait songer à la création d'un organisme qui serait le pendant du Administrative Conference of the United States (ACUS) ou à d'autres moyens pouvant procurer les avantages associés à l'ACUS.

Recommandation 6

Le ministère de la Justice, en collaboration avec le Secrétariat des affaires réglementaires et d'autres organismes et ministères concernés, devrait examiner des moyens d'assurer, à l'égard de la négociation de règlements, du financement et de la formation.

Recommandation 7

Le ministère de la Justice, en consultation avec des organismes et des ministères chargés de la réglementation, devrait explorer de nouveaux moyens de favoriser le recours à la négociation de règlements.

Recommandation 8

Le ministère de la Justice devrait organiser des ateliers pour recueillir des points de vue et discuter des avantages et des inconvénients que présentent l'adoption de mesures législatives relatives à la négociation de règlements, le contenu et l'orientation de telles mesures et (ou) des solutions de rechange pouvant permettre d'assurer la légitimité de la négociation de règlements.

Recommandation 9

Le ministère de la Justice devrait jouer un rôle de chef de file en ce qui a trait à la mise en oeuvre de la négociation de règlements dans les administrations canadiennes. Au nombre des initiatives que le ministère pourrait prendre à cet égard, on retrouve :

  • la tenue régulière d'ateliers au sujet de la négociation de règlements, des ateliers mettant l'accent sur les sujets qui intéressent ou préoccupent tout particulièrement les représentants des gouvernements fédéral et provinciaux chargés de la réglementation et d'autres groupes concernés (par exemple, les tables rondes provinciales et nationales du Canada, les tierces parties neutres, les représentants des entreprises et des industries, les groupes d'intérêt public, les représentants des universités et d'autres établissements d'agrément);
  • la diffusion d'information au sujet de la négociation de règlements, y compris des conclusions découlant de toutes les études et les évaluations suggérées ci-dessus; et
  • des services d'orientation en ce qui a trait à l'application du processus dans des contextes autres que l'établissement de règles.

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