Rapport de recherche
PROJET DE SERVICES D'AVOCAT AUTOCHTONE DE GARDE DU NOUVEAU-BRUNSWICK
Ab Currie
juin 2000
Les opinions qui y sont exprimées sont celles de l'auteure ; elles ne reflètent pas nécessairement celles du Ministère de la justice Canada.
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SOMMAIRE
Le présent projet a été conçu en vue d'améliorer les services d'aide juridique offerts aux
Autochtones au Nouveau-Brunswick. Le projet a été mis en oeuvre dans le comté de Kent, du
Nouveau-Brunswick, à l'essai, pour desservir les collectivités des premières nations de Big Cove,
de Bouctouche et d'Indian Island.
La nécessité d'adopter une approche différente pour répondre aux besoins des Autochtones est
devenue manifeste par suite du grand nombre d'ajournements requis par ceux-ci en cour de
première comparution. On se doutait que certains problèmes de communication entre les
Autochtones et les avocats non autochtones dispensant les services de garde réguliers pouvaient
rendre difficile pour les affaires concernant les Autochtones de franchir les étapes du système
judiciaire.
En vue d'examiner la question avec plus grand soin, tout en prenant une mesure immédiate pour
régler la situation, on a embauché une avocate autochtone pour qu'elle dispense des services de
garde à l'intention des Autochtones auprès de la cour provinciale à Richibouctou. Cette avocate
parlait le micmac, la langue autochtone en usage dans la région. Le projet a démarré en
décembre 1998. Il était financé en partie par une contribution du ministère de la Justice du
Canada, dont la Section de la recherche et de la statistique a exercé un certain contrôle la
première année.
Au cours de la première année, 146 personnes ont obtenu des services dans le cadre du projet, et
ont eu 305 rencontres au total avec l'avocate de garde. La caractéristique la plus importante de la
clientèle autochtone avait trait aux aptitudes linguistiques. Vingt-quatre % des clients ont déclaré
qu'ils s'exprimaient mal en anglais. Ce qui peut surprendre, c'est que huit % des clients ont dit
ne parler que le micmac. Cela expliquerait une bonne part des difficultés rencontrées par les
avocats non autochtones qui ont dispensé des services à cette clientèle.
De même, une proportion élevée des clients (soit 32 %) étaient des femmes. Cela est beaucoup
plus élevé que le pourcentage habituel des femmes parmi les clients de l'aide juridique. Il est
vrai qu'en comparaison avec les hommes, les femmes autochtones avaient tendance à commettre
des crimes moins graves. Toutefois, après l'étape des services d'avocat de garde du processus de
justice pénale, les femmes autochtones ont obtenu des mandats d'aide juridique selon la même
proportion qu'elles avaient obtenu ces premiers services. Cela indique que les femmes
autochtones n'ont pas été désavantagées, en termes de services d'aide juridique dispensés, en
raison de leur tendance à commettre des crimes moins graves.
Le résultat le plus remarquable obtenu la première année du projet a été la diminution
significative du nombre d'ajournements des affaires concernant les Autochtones. Les données
provenant du même tribunal pendant les deux années antérieures au projet révèlent qu'un ou
plusieurs ajournements avaient été requis pour 43 % des Autochtones en 1996-97 et 46 % d'entre
eux en 1997-1998. Cette proportion a été réduite à 24 % dans le cadre du projet de services
d'avocat autochtone de garde, de décembre 1998 à novembre 1999. Les données relatives à
l'avocat de garde tirées des instances devant le tribunal de Richibouctou desservi par un avocat
non autochtone en 1998-1999 révèlent que 45% des clients autochtones ont eu besoin d'un ou
plusieurs ajournements, soit une proportion très semblable à celle de la période antérieure au
projet, auprès du tribunal où travaillait l'avocate de garde autochtone associée au projet.
Il importe de noter que la diminution des ajournements ne s'est pas traduite en une augmentation
des plaidoyers de culpabilité. Pendant la période antérieure au projet, devant le tribunal de
Richibouctou 17 % des clients autochtones en 1996-1997 et 25 % de ceux-ci en 1997-98 ont
inscrit un plaidoyer de non-culpabilité lors de leur première comparution. De décembre 1998 à
novembre 1999, par comparaison, 49 % des clients du Projet de services d'avocat autochtone de
garde du Nouveau-Brunswick ont inscrit un plaidoyer de non-culpabilité à leur première
comparution. Pour la même période, 28 % des Autochtones ont inscrit un plaidoyer de non-culpabilité
à leur première comparution devant le tribunal témoin desservi par un avocat non
autochtone.
La première nation de Big Cove dispose de divers services communautaires concernant
notamment la maîtrise de la colère, des conseils matrimoniaux et des conseils en matière de
drogue et d'alcool. On peut recourir à ces services pour s'attaquer à des problèmes pouvant être
reliés à la perpétration d'infractions par des Autochtones. L'avocate autochtone signale qu'elle a
renvoyé des clients à 71 occasions vers des services communautaires. Cela dénote l'utilisation
d'une approche davantage « holistique » que par le passé pour répondre aux besoins des clients
autochtones.
En conclusion, ce mode « intensif » de prestation de services de garde a été couronné de succès
au cours de la première année de son fonctionnement. Les objectifs visés par le Projet de
services d'avocat autochtone de garde ont été atteints tant en matière de services à la clientèle
que d'efficacité du système. Les données préliminaires tirées de la première année d'activités
révèlent que le projet constitue une façon efficace de satisfaire aux besoins particuliers de cette
clientèle.
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