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Rapport de recherche
Étude nationale sur les
adultes non représentés
accusés devant les
cours criminelles provinciales partie 1 :
Préparé par :
Robert G. Hann et Joan Nuffield
Robert Hann & Associates Limited
Colin Meredith et Mira Svoboda
ARC Applied Research Consultants
Pour :
Le ministère de la Justice Canada Septembre, 2002
RR03-LARS-2f
Les opinions exprimées dans ce document sont celles
des auteurs et elles ne traduisent pas nécessairement
le point de vue du ministère de la Justice Canada.
SOMMAIRE
Rapport
Robert G. Hann, Colin Meredith, Joan Nuffield et Mira Svoboda, Étude nationale sur les
adultes non représentés accusés devant les cours criminelles provinciales, Robert Hann &
Associates Limited et ARC Applied Research Consultants, préparé pour le ministère de la
Justice du Canada, 2002.
Méthodologie
Étude de la représentation juridique des adultes accusés au criminel dans un échantillon de
neuf cours provinciales au Canada. La méthodologie employée comprend l'analyse d'un
échantillon des décisions (ou du registre de la Cour, dans le cas d'un tribunal), l'observation
directe du déroulement d'audiences ainsi que des entrevues avec les principales sources
locales d'information.
Résultat : nombre d'accusés se représentant eux-mêmes
- Le nombre important d'accusés comparaissant sans avocat devant plusieurs des neuf
tribunaux observés suscite des préoccupations relativement à la parité d'accès à la
justice.
aux premières comparutions |
de 5 % à 61 % |
plus 36 % dans 4 tribunaux |
aux deuxièmes comparutions |
de 2 % à 38 % |
plus 30 % dans 4 tribunaux |
aux troisièmes comparutions |
de 1 % à 32 % |
plus 19 % dans 4 tribunaux |
aux enquêtes sur le cautionnement |
de 3 % à 72 % |
plus 12 % dans 4 tribunaux |
aux réponses à l'accusation |
de 6 % à 41 % |
plus 18 % dans 4 tribunaux |
aux dernières comparutions |
de 6 % à 46 % |
plus 23 % dans 4 tribunaux |
- Même dans les cas où les accusés sont représentés, on constate souvent qu'ils font
face à d'importants problèmes de sous-représentation du fait de la restriction des
ressources et des autres contraintes imposées aux avocats de service de l'aide
juridique ainsi qu'aux avocats de service et à l'égard des tarifs payés aux avocats du
secteur privé. Le phénomène de la sous-représentation traduit donc les limites
qualitatives et quantitatives de l'aide juridique offerte.
- Les grandes disparités observées dans les neuf tribunaux, non seulement à l'égard des
statistiques sur la représentation, mais également sur le plan des stratégies de
prestation de services, de l'affectation de personnel et de la gestion des tribunaux,
suscitent des inquiétudes concernant la parité d'accès à la justice.
- Il est impossible d'isoler le problème de la représentation devant les tribunaux et
l'élaboration de solutions pertinentes. Il faut les intégrer au contexte de la gestion des
instances, des politiques et des attitudes envers les avocats de service et les accusés
non représentés et tenir compte de la disponibilité des ressources. Dans le cas d'un
tribunal, la gestion des instances et la qualité du service d'aide juridique étaient
exemplaires et montraient qu'une bonne représentation permet d'accélérer les
procédures. La planification judicieuse des instances permet, quant à elle, de réduire le
nombre de comparutions sans résultat, libérant ainsi les services d'aide juridique et leur
permettant de traiter un plus grand nombre de dossiers.
- Malgré l'attention généralement accordée par la défense aux procès criminels, les
résultats de recherches antérieures et l'opinion des principaux répondants donnent à
penser que les premières étapes du processus pénal sont d'une importance capitale.
Certes, la manière dont est abordée la question de la représentation aux premières
étapes affecte l'issue du procès en ce qui concerne l'accusé, mais elle a également des
répercussions sur le fonctionnement de la cour, tant aux premières étapes
qu'ultérieurement.
- Les principaux répondants estiment qu'en général les accusés dans les affaires
criminelles ont effectivement des difficultés à comprendre le processus pénal, à plus
forte raison à se défendre eux-mêmes. Dans les affaires criminelles, il semble que les
accusés sont peu scolarisés, qu'ils ont du mal à lire et qu'ils mènent des vies
désordonnées. Dans certains tribunaux de l'échantillon, de nombreux accusés sont soit
des immigrants, soit des personnes appartenant à d'autres catégories (dont les
Autochtones) qui se heurtent à des obstacles linguistiques et culturels. Il existe
également un nombre important d'accusés atteints de désordres mentaux qui
comparaissent devant certains tribunaux.
Résultat : incidences sur l'accusé
- L'étude n'a pas permis d'établir un lien de causalité entre la représentation et les
incidences sur l'accusé.
- Toutefois, l'absence de représentation entraîne effectivement pour les accusés des
conséquences graves quant aux décisions de la cour dans leurs affaires :
- - Dans certaines situations, selon la compétence du tribunal et l'étape à laquelle le
plaidoyer a été inscrit, les accusés sont condamnés sans avoir bénéficié des
services d'un avocat, dans une proportion sensiblement supérieure à 50 %.
- - Dans d'autres cas, selon le ressort et le type d'infraction, jusqu'à 30 % des
condamnés font l'objet d'une décision de détention sans bénéficier des services
d'un avocat.
- La plupart des principaux répondants sont d'avis qu'en raison de leurs lacunes, les
accusés comparaissant sans avocat et ceux qui ne sont pas suffisamment représentés
subissent les conséquences découlant des graves erreurs qu'ils commettent au cours
du processus, p. ex. :
- - Dans la plupart des tribunaux observés, on remarque qu'un nombre important
d'accusés reconnaissent leur culpabilité « simplement pour en finir », sans
comprendre la portée du dossier déposé par la Couronne, la décision que la cour
pourrait rendre (p. ex., les libérer au lieu de les condamner) ni les peines
susceptibles d'être imposées.
- - Les accusés non représentés (et, dans certains tribunaux observés, les accusés
représentés par l'avocat de service) peuvent procéder sans avoir pris connaissance
de la preuve.
- - Le ministère public ne négocie habituellement pas en matière pénale avec les
accusés non représentés, les empêchant ainsi de bénéficier d'une réduction ou d'un
retrait de l'accusation.
- - Les accusés omettent souvent de faire valoir des éléments pertinents qui pourraient
influencer les décisions rendues pendant le processus (p. ex., la libération sous
caution), durant le procès et au moment des recommandations relatives à
l'imposition de la sentence.
- - Les accusés non représentés ignorent souvent la procédure à suivre en matière de
présentation de la preuve, d'interrogation des témoins ou de plaidoirie sur
l'imposition de la sentence, à plus forte raison lorsqu'il s'agit de préserver leurs
propres intérêts.
- - Les principaux répondants ont laissé entendre que les accusés non représentés
commettent un grand nombre d'autres erreurs graves à chaque étape du processus
pénal.
- Outre les conséquences mentionnées ci-dessus, les principaux répondants ont souligné
les graves conséquences socio-économiques de l'absence de représentation :
- - Les accusés reconnaissant leur culpabilité ne comprennent pas les conséquences
économiques et sociales d'un casier judiciaire sur divers plans, p. ex. : perspectives
d'emploi, mesures d'expulsion, droit d'entrée dans les pays étrangers, admissibilité
au service militaire, interdiction de conduire un véhicule.
- - Les accusés peuvent plaider coupable, même quand ils sont défendus par un
avocat, parce qu'ils ont honte ou qu'ils sont gênés de la situation et qu'ils veulent
atténuer la honte et minimiser la publicité.
- - Les principaux répondants ont souvent mentionné des cas où les accusés ont
plaidé coupable parce qu'ils ne pouvaient respecter les conditions de leur mise en
liberté sous caution ou qu'ils n'avaient pas le temps de se présenter aux
nombreuses audiences devant le tribunal et pendant le procès - ce qui les aurait
empêchés de s'acquitter de leurs obligations familiales (p. ex., conduire les enfants
à l'école) ou aurait réduit leur capacité de conserver leur emploi.
- - Par ailleurs, on a signalé que les accusés suivent souvent le processus pénal
jusqu'au jugement et au prononcé de la sentence sans comprendre ce qui leur
arrive (par exemple, un accusé qui consent - ou, du moins, ne s'oppose pas - aux
conditions de sa mise en liberté sous caution ou de sa sentence sans en
comprendre les conséquences juridiques et socio-économiques).
Résultat : incidences sur les tribunaux et sur les fonctionnaires de la cour
- Le système judiciaire est fondé sur le principe selon lequel l'accusé doit bénéficier d'un
procès équitable. Si l'accusé ne bénéficie pas des services d'un avocat, voici ce qui
peut se produire :
- - Les juges et les autres fonctionnaires de la cour doivent faire l'impossible pour éviter
les situations indues et remédier à l'absence de représentation juridique de l'accusé.
- - Contre toute attente, dans la plupart des tribunaux observés, la comparution hors
procès des accusés non représentés dure généralement moins longtemps que celle
des accusés représentés par un avocat de service ou par un avocat exerçant en
cabinet privé.
- - Contre toute attente, dans la plupart des tribunaux observés, les accusés sans
avocat comparaissent habituellement moins souvent devant la cour que ceux
représentés par un avocat.
- - Dans l'ensemble, il faut habituellement moins de temps pour régler les affaires
mettant en cause des accusés non représentés que celles d'accusés représentés
par des avocats exerçant en cabinet privé, mais les affaires d'accusés représentés
par des avocats de service exigent davantage de temps.
- - De l'avis de la plupart des principaux répondants, les procès des accusés non
représentés durent beaucoup plus longtemps que les autres et sont stressants pour
toutes les parties en cause.
- - Le personnel administratif signale un nombre important de demandes d'information
et d'assistance provenant des accusés non représentés.
Solutions fréquemment proposées par les principaux répondants
Le rapport principal fait état d'un grand nombre de solutions proposées par les personnes
interrogées. En voici quelques exemples.
Améliorer les critères d'admissibilité à l'aide juridique
- assouplir les critères d'admissibilité relatifs à la situation financière en vue d'accepter les
dossiers d'un plus grand nombre de travailleurs à faible revenu;
- assouplir les dispositions relatives à la couverture, en particulier pour offrir des services
aux personnes accusées d'une première infraction, leur évitant ainsi un casier judiciaire.
Améliorer le rôle des avocats de service
- accroître les services offerts par les avocats de service;
- donner à tous les accusés, détenus ou non, indépendamment de leur situation
financière, l'égalité d'accès aux avocats salariés;
- recourir au service continu d'avocats de service, ce qui amène ces avocats à assister
les clients de la première comparution jusqu'à la décision, si leur charge de travail le
permet;
- doter les palais de justice de bureaux d'aide juridique ou de bureaux d'avocats de
service qui offrent " information, conseils et assistance " aux accusés.
Augmenter les ressources affectées à l'aide juridique
- accroître le financement de l'aide juridique;
- relever le tarif applicable aux avocats exerçant en cabinet privé qui sont mandatés par
l'aide juridique;
- confier à des parajuristes la tâche de seconder les avocats salariés de l'aide juridique et
les avocats de service en s'occupant, par ex., d'engagements de cautionnement en vue
de la libération et de recherches sur les possibilités de déjudiciarisation ou sur les
solutions de rechange à la peine.
Faire connaître les services d'aide juridique et le processus de demande
- Fournir le plus tôt possible aux accusés non représentés de l'information et des conseils
concernant les services d'aide juridique. Les moyens utilisés devraient tenir compte des
difficultés de nombreux accusés à lire et à écrire.
- Doter les tribunaux d'agents des demandes d'aide juridique afin d'accélérer le
traitement des affaires suspendues jusqu'à l'assignation d'un avocat, entre autres.
Améliorer les autres services et fonctions de la cour et la coordination sur ce plan
- améliorer la coordination des services offerts par l'avocat de service et les aides
judiciaires autochtones, là où ceux-ci oeuvrent;
- améliorer la communication de la preuve;
- améliorer les méthodes de gestion des instances de manière à accélérer la disposition
des affaires et à réduire le nombre de comparutions " sans résultat ", entre autres.
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