Changements apportés au
Système de détermination du statut de réfugié
La Conférence de FJP sur la citoyenneté
et l'immigration de l'ABC
les 4 et 5 mai 2001
prononcé par
Peter Showler
Président
Commission de l'immigration et du statut de réfugié
(Priorité au discours prononcé)
Après environ un an et demi au poste de président de
la Commission de l'immigration et du statut de réfugié,
j'ai jugé bon de vous entretenir aujourd'hui des changements
qui ont été apportés au Système de détermination
du statut de réfugié. J'aborderai donc deux types de changements
tout à fait différents. En premier lieu, j'examinerai
avec vous les changements d'ordre législatif. Le Comité
permanent de la citoyenneté et de l'immigration étudie
actuellement le projet de loi C-11. Certaines dispositions du projet
de loi auront des répercussions importantes sur le processus
de détermination du statut de réfugié. En deuxième
lieu, j'aimerais vous décrire certains des changements qui ont
été apportés au processus de détermination
du statut de réfugié au cours du dernier exercice.
Le projet de loi C-11
Certains volets importants du projet de loi C-11 portent directement
sur la détermination du statut de réfugié : les
motifs élargis d'accueil des demandes d'asile, les tribunaux
à un seul commissaire et la nouvelle Section d'appel des réfugiés
(voir l'annexe A). À mon avis, ces trois volets représentent
la direction que le processus de détermination du statut des
réfugiés au pays prendra si le projet de loi est adopté.
Motifs élargis
En vertu de la loi proposée, la Section de la protection des
réfugiés (SPR), qui s'appelle actuellement la SSR, sera
habilitée à accueillir des demandes d'asile en vertu de
motifs « élargis et regroupés. »
Il y aura trois motifs qui permettront à la Commission d'accueillir
une demande d'asile. La définition du premier figure dans la
Convention relative au statut des réfugiés
et on la retrouve également dans la Loi sur l'immigration
actuellement en vigueur. Elle inclut une clause ayant trait à
la perte du statut et une clause d'exclusion. Un réfugié
au sens de la Convention continue d'être défini comme une
personne qui, craignant avec raison d'être persécutée
du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son
appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques,
soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité,
soit, si elle n'a pas de pays de nationalité, se trouve hors
du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, et ne
peut ou ne veut du fait de cette crainte, se réclamer de la protection
de chacun de ces pays (voir l'art. 96).
Le deuxième motif est défini dans la Convention contre
la torture. Il s'applique aux personnes qui courraient le risque,
s'il y avait des motifs sérieux de le croire, d'être soumises
à la torture au sens de l'article premier de la Convention
contre la torture si elles étaient renvoyées dans
leur pays de nationalité ou dans le pays où elles ont
leur résidence habituelle (voir l'al. 97(1)a). Par le
passé, ce motif ne relevait pas de la compétence de la
CISR et, par conséquent, la CISR dispose de peu de jurisprudence
sur l'interprétation de la Convention sur la torture.
À mon avis, une jurisprudence considérable sera constituée
au cours des premières années d'application de la nouvelle
loi, ce qui devrait préciser les différents types de préjudices
visés par la définition de la torture. De toute évidence,
le critère n'engloberait pas toutes les formes de persécution.
Nous ne sommes toutefois pas entièrement dépourvus de
jurisprudence sur le sujet. La SSR a certainement tenu compte de la
Convention contre la torture lorsqu'elle a établi la
définition d'un réfugié au sens de la Convention.
En fait, les directives concernant les Revendicatrices du statut
de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe qui ont été publiées
par la présidente de la Commission en mars 1993 et mises à
jour en novembre 1996, font précisément référence
à la Convention contre la torture lorsqu'il s'agit d'évaluer
si le préjudice dont une personne craint d'être victime
équivaut à de la persécution. Il y a certaines
distinctions fondamentales dignes de mention entre les motifs d'accueil
d'une demande d'asile invoqués dans la Convention contre
la torture et dans la Convention relative au statut des réfugiés.
Qui plus est, en vertu de la Convention contre la torture,
il n'est pas nécessaire d'établir un lien entre la crainte
d'être persécuté et l'un des cinq motifs prévus
dans la Convention relative au statut des réfugiés,
à savoir la race, la nationalité, etc. L'un des facteurs
supplémentaires mentionnés dans la Convention contre
la torture est l'implication de l'État dans la torture.
Le troisième motif a trait à « la menace à
sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités »
(voir al. 97(1)b)). Traditionnellement, les décisions
en cette matière concernant les demandes d'asile ont été
rendues par les fonctionnaires de Citoyenneté et Immigration
conformément à la procédure s'appliquant à
la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié
au Canada (CDNRSRC). Il s'agit d'une nouveau motif qui relèvera
de la compétence de la CISR, ce qui confirme que les motifs d'accueil
des demandes d'asile seront véritablement regroupés au
sein du processus de détermination du statut de réfugié.
De manière générale, les deux nouveaux motifs
s'intègrent naturellement à la compétence de la
CISR et il serait logique que la Division de la protection des réfugiés
soit habilitée à statuer à l'égard des trois
motifs. Ceux-ci trouvent leur origine dans le concept selon lequel une
protection doit être offerte aux victimes des violations graves
des droits humains perpétrées hors du Canada. Je me dois
de souligner toutefois que le regroupement des motifs ne se fera pas
sans que la CISR et les conseils n'aient à affronter des défis
d'ordre logistique et des difficultés d'ordre juridique. Quelle
sera exactement la preuve à soumettre pour chacun des trois motifs?
Les plaidoyers et la preuve devront-ils porter sur les trois motifs?
Quels seront les critères qui serviront à déterminer
la possibilité qu'une personne risque de subir un préjudice
précisé dans la définition des deux nouveaux motifs.
Il ne fait aucun doute que vous et les commissaires de la CISR aurez
du pain sur la planche à mesure que la jurisprudence sera constituée.
Tribunaux à un seul commissaire
Depuis 1989, la détermination du statut de réfugié
à été confiée à des tribunaux à
deux commissaires. Ce type de tribunal a été proposé
dans le Rapport Plaut, par Rabbi Gunther Plaut, en 1985. En vertu de
la Loi sur l'immigration, une divergence d'opinion entre les
commissaires un commissaire détermine que la personne
est un réfugié au sens de la Convention et l'autre arrive
à une conclusion contraire entraîne une décision
en faveur du revendicateur. Nombreux sont ceux qui ont vu dans cette
disposition de la loi une garantie procédurale en faveur des
revendicateurs découlant des droits conférés par
l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés
qui sont invoqués dans les cas de détermination du statut
de réfugié. Curieusement, au cours des dernières
années, moins d'un pour cent des revendications ont donné
lieu à une différence d'opinion. Toutefois, cette statistique
ne décrit pas adéquatement la dynamique du processus décisionnel.
En effet, les commissaires analysent souvent les questions à
examiner ainsi que la preuve en collaboration afin d'en arriver à
un consensus et de rendre une décision unanime.
En vertu de la Loi sur l'immigration, un seul commissaire
peut statuer sur une revendication si le revendicateur y consent. Le
pourcentage des revendications qui ont été réglées
par un seul commissaire a augmenté au fil des ans. Selon les
dernières statistiques, les tribunaux à un seul commissaire
statuent sur environ 55 % de toutes les revendications à l'échelle
nationale. La proportion des décisions rendues par des tribunaux
à un seul commissaire varie de 80 à 37 % selon les régions.
Il ne semble pas y avoir de corrélation entre le pourcentage
des audiences présidées par un seul commissaire et le
taux de décisions favorables. Ainsi, c'est dans la région
où 80 % des revendications sont entendues par un tribunal à
un seul commissaire qu'on rend le moins de décisions favorables.
En vertu des dispositions contenues dans le projet de loi C-11, toutes
les demandes d'asile seraient examinées par un tribunal à
un seul commissaire, sauf dans les cas où le président
désignerait un tribunal à un trois commissaires. On s'attend
que les tribunaux à trois commissaires siégeront dans
deux circonstances différentes. En premier lieu, ces tribunaux
seront constitués à des fins de perfectionnement, en particulier
lorsque de nouveaux commissaires seront nommés à la Commission
et, en deuxième lieu, lorsqu'il s'agira de statuer sur une affaire
exceptionnellement importante ou complexe quant aux faits ou aux questions
de droit. La SSR a l'habitude d'avoir recours à des tribunaux
à un seul commissaire pour l'examen des revendications du statut
de réfugié. J'ai la conviction que le passage aux tribunaux
à un seul commissaire, si le projet de loi C-11 est adopté,
se fera en douceur et dans le respect de l'équité.
Je ne prévois pas de variation importante du taux global de
décisions favorables rendues par la Commission, même s'il
s'agit d'une supposition pour le moment. À ceux qui se préoccupent
de la disparition du principe du « bénéfice
du doute » inhérent au tribunal à deux commissaires,
j'aimerais souligner qu'il doivent considérer la généralisation
du tribunal à un seul commissaire à la lumière
de la création de la nouvelle Section d'appel des réfugiés
(SAR). À mon avis, l'examen sur le fond par la SAR de la décision
rendue par un seul commissaire est une méthode de détermination
du statut de réfugié plus équitable et plus efficace
que celle prévue par la loi actuelle.
Section d'appel des réfugiés (SAR)
En vertu du projet de loi C-11, la Section d'appel des réfugiés
examinerait sur papier toutes les décisions relatives à
des demandes d'asile rendues par la DPR. Le ministre et le demandeur
d'asile disposeraient d'un droit d'appel. La SAR entendrait aussi les
appels relatifs à la perte de l'asile ou aux demandes d'annulation.
La SAR n'aurait cependant pas la compétence nécessaire
pour entendre les appels interjetés à l'égard des
décisions rendues dans les cas de retrait ou de désistement.
Dans le même ordre d'idée, elle n'entendrait pas les appels
portant sur des questions interlocutoires.
On prévoit que la SAR sera centralisée et que les appels
de toutes les régions seront entendus en un même endroit.
À mon avis, les commissaires de la SAR devront avoir présidé
des audiences à la SSR de sorte qu'ils aient l'expérience
nécessaire en matière de détermination du statut
de réfugié.
L'un des aspects innovateurs de la SAR sera sa capacité de créer
des précédents pour la Section de la protection des réfugiés.
En vertu des dispositions contenues dans le projet de loi C-11, un commissaire
de la SAR sera habilité à statuer sur les appels interjetés
auprès de la SAR. Toutefois, comme c'est actuellement le cas
pour la SAI, le président pourra désigner un tribunal
à trois commissaires à la SAR. Selon le projet de loi
C-11, une décision rendue par un tribunal à trois commissaires
de la SAR crée, à l'égard de la Section de la protection
des réfugiés et d'un tribunal à un commissaire
de la SAR, le même précédent qu'une décision
rendue par une cour d'appel crée à l'égard d'un
tribunal de première instance (voir l'al. 171c). Par
conséquent, le principe du respect des décisions rendues
par les tribunaux supérieurs (stare decisis) et des
précédents ainsi créés serait acquis dans
l'environnement constitué par ce tribunal administratif.
Le précédent constitue un aspect essentiel, en particulier
si la SAR doit remplir deux fonctions distinctes mais également
importantes. En premier lieu, il peut servir à corriger rapidement
et efficacement les erreurs commises par la Section de la protection
des réfugiés. En deuxième lieu, il peut constituer
une jurisprudence ayant force exécutoire sur la Section de la
protection des réfugiés, ce qui favorisera la cohérence
de la prise de décision au niveau inférieur. Comme les
décisions seront également contraignantes pour les tribunaux
à un seul commissaire de la SAR, cela aura pour effet de favoriser
la cohérence au sein même de la SAR.
Autres changements apportés au processus de
détermination du statut de réfugié
Bien que le projet de loi C-11 soit intéressant et que la CISR
y consacrera beaucoup d'énergie au cours de la prochaine année,
s'il est adopté par le Parlement, il ne s'agit que d'un projet
de loi à l'heure actuelle et non pas d'une loi. Par conséquent,
je vais maintenant traiter de certaines des modifications que nous apportons
actuellement au processus de détermination du statut de réfugié.
Processus accéléré
Depuis de nombreuses années, la SSR tente de statuer sur les
revendications du statut de réfugié qu'elle reçoit
et qui lui semblent bien fondées en ayant recours au processus
accéléré. Traditionnellement, le processus a été
appliqué différemment dans les diverses régions.
À titre d'exemple, à Montréal, les revendications
traitées selon le processus accéléré sont
confiées à unité centrale; à Toronto, ce
sont plutôt des équipes géographiques qui font le
travail. L'utilisation du processus accéléré diffère
énormément d'une région à l'autre et il
y a des divergences d'opinion au sein de la Commission sur l'efficacité
et l'intégrité du processus. En raison de ces divergences
qui concernent la fréquence du recours au processus ainsi que
la façon de procéder et qui sont également d'ordre
idéologique, la SSR a commencé à élaborer
une politique nationale sur l'utilisation et la mécanique du
processus accéléré en octobre 2000. Personnellement,
j'ai la conviction qu'un processus accéléré bien
géré est un bon outil dont dispose la Commission pour
statuer sur des revendications. Disons qu'il s'agit d'une « solution
de rechange » qui permet à la Commission de statuer
sur des revendications et qui exige moins de temps et d'argent qu'une
audience. Néanmoins, je reconnais que l'intégrité
du processus ne doit pas être mise en doute par aucun des usagers
du système : le revendicateur du statut de réfugié,
le conseil, le personnel de la CISR, les décideurs de la CISR,
le ministre et, en bout de ligne, la population canadienne.
Le processus de consultation sur la politique concernant le processus
accéléré a eu lieu à l'automne 2000 et à
l'hiver 2001. La principale proposition relative au processus accéléré
qui semble avoir causé certaines préoccupations chez les
conseils est l'enregistrement sur bande magnétique de l'entrevue
menée dans le cadre du processus par l'agent chargé de
la revendication. Dans l'éventualité où une audience
serait requise, l'enregistrement serait remis au tribunal chargé
d'entendre l'affaire. En cas de différend quant à ce qui
aurait été dit au cours de l'entrevue, l'enregistrement
pourrait être utilisé au cours de l'audience. J'ai l'impression
que les conseils craignent que l'entrevue devienne un interrogatoire
préalable et que les déclarations du revendicateur au
cours de l'entrevue puissent être utilisées contre lui
à l'audience. Une approche de ce genre modifierait la nature
et le caractère du processus accéléré et
irait à l'encontre de l'orientation initiale donnée au
processus qui se voulait une façon sans préjudice de traiter
les revendications susceptibles d'être réglées rapidement.
Je peux garantir une chose aux conseils : le processus accéléré
ne deviendra pas un interrogatoire préalable. La politique est
bien claire à ce sujet. L'entrevue a été limitée
à une heure et elle doit cesser dès qu'il devient évident
qu'une audience est requise. Les agents préposés à
la revendication recevront une formation sur les paramètres qui
devront être respectés au cours de l'entrevue. Un conseil
qui éprouvera certaines préoccupations au sujet d'une
entrevue pourra en faire part à la direction de la Commisson
ou au tribunal chargé de statuer sur la revendication si une
audience est requise.
L'enregistrement de l'entrevue est une mesure qui favorise l'intégrité
du processus accéléré. Il y a eu des cas où,
au cours de son témoignage à l'audience, le revendicateur
a contredit de long en large les déclarations qu'il avait faites
au cours de l'entrevue. Un compte rendu sténographique est également
nécessaire dans le cas des demandes d'annulation lorsque le revendicateur
a obtenu le statut de réfugié dans le cadre du processus
accéléré. Une décision concernant une demande
d'annulation exige une évaluation de la revendication et de la
preuve soumise au moment où le revendicateur a obtenu le statut
de réfugié. S'il ne dispose pas d'un compte rendu de l'entrevue
qui a eu lieu dans le cadre du processus accéléré,
le commissaire aura beaucoup de difficulté à rendre une
décision éclairée. Je suis d'avis qu'il faut un
compte rendu sténographique de l'entrevue pour garantir l'intégrité
du système. Néanmoins, je m'attends qu'on fera un usage
très limité des enregistrements sur bande magnétique
au cours des audiences. C'est ce qui se passe actuellement. Nous avons
enregistré, à titre d'essai, les entrevues dans le cadre
du processus accéléré à Toronto et nous
avons constaté que seulement quelques transcriptions de l'entrevue
ont été utilisées au cours de l'audience. De plus,
les revendicateurs doivent déclarer qu'ils diront la vérité
mais, dans la mesure du possible, l'entrevue doit se dérouler
dans une atmosphère détendue apte à favoriser une
communication directe et efficace qui n'est pas limitée par le
carcan procédural d'une audience.
À mon avis, un processus accéléré bien
géré est avantageux pour toutes les parties. Il s'agit
d'une façon efficace et équitable de régler les
revendications qui semblent bien fondées à prime abord.
Nous prévoyons un délai de trois mois pour le traitement
des revendications suivant le processus accéléré,
ce qui représente le tiers du temps requis pour une audience
en raison des délais occasionnés par la mise au rôle.
Les avantages pour les revendicateurs sont évidents : une
décision rapide atténue leur anxiété légitime
et leur permet d'entreprendre leur nouvelle vie dans leur pays d'accueil.
La Commission y gagne elle aussi parce qu'elle peut consacrer le temps
et les ressources nécessaires aux cas plus complexes qui exigent
une audience.
Initiatives visant à favoriser la cohérence
J'aimerais commenter brièvement certaines initiatives que nous
avons mises en branle pour favoriser la cohérence. À mon
avis, la prise de mesures visant à favoriser la cohérence
constitue un volet fort important au sein du système de détermination
du statut de réfugié. Il n'est pas acceptable qu'un tribunal
national qui est chargé de statuer sur une question aussi importante
que le statut de réfugié rende sans justification, dans
des cas similaires, des décisions qui divergent au sein d'une
région et d'une région à l'autre. Néanmoins,
il faut préserver l'indépendance des décideurs.
Selon moi, la cohérence et l'indépendance ne sont pas
incompatibles. La clé est l'équilibre entre les deux.
Au cours des dernières années, la Commission a examiné
les taux d'acceptation régionaux pour y déceler des indices
d'incohérence. Cependant, comme nous le savons, les statistiques
peuvent être trompeuses. Les profils des revendicateurs d'un pays
donné peuvent différer considérablement d'une région
à l'autre, ce qui justifie des décisions différentes.
Néanmoins, il peut y avoir des différences régionales
corrigeables, notamment des variations en ce qui concerne la preuve
documentaire et l'interprétation du tribunal. Par conséquent,
nous avons mis en branle plusieurs initiatives en vue d'évaluer
et de corriger les incohérences qui se manifestent dans les régions
ou d'une région à l'autre.
La SSR a identifié des pays pour lesquels il y a des divergences
entre les décisions rendues selon la région. Elle a créé
des « réseaux géographiques » pour
diverses régions du monde (comme l'Europe continentale et l'Afrique)
et, dans chacun des bureaux de la CISR, des spécialistes géographiques
sont affectés à chacun de ces réseaux. Ces spécialistes
tiennent une vidéoconférence chaque mois. L'un de leurs
principaux objectifs est de partager de nouveaux renseignements sur
la situation dans les pays de sorte que toutes les régions aient
accès aux mêmes renseignements. Ces spécialistes
en profitent également pour examiner les dossiers d'information
sur les pays à des fins d'uniformité. Évidemment,
il serait impossible, à toutes fins utiles, d'en arriver à
une prise de décision cohérente si l'information de base
était différente d'un bureau à l'autre. Lorsque
des variations dans la documentation sont relevées, la nouvelle
information sur le pays est transmise aux équipes géographiques
pour qu'elles puissent l'analyser et en discuter au cours des séances
de formation mensuelles. Cette initiative est assortie d'un programme
d'échange en vertu duquel les commissaires se rendent présider
des audiences dans d'autres régions. L'objectif est de permettre
aux commissaires de différentes régions d'échanger
des opinions sur la preuve.
De plus, la SSR a entrepris un projet pilote qui consiste à
établir le profil des revendications du statut de réfugié.
Auparavant, la CISR ne disposait malheureusement pas d'un bon outil
de saisie de données et seules les données de base sur
les revendications du statut de réfugié étaient
mises en banque. Nous avons fait l'acquisition d'un logiciel qui nous
permettra d'effectuer la saisie de tous les renseignements pertinents
sur une revendication, y compris le fondement de la décision.
La région du Pacifique a appliqué l'établissement
de profils à plusieurs pays à titre d'essai et cette méthode
a été appliquée aux revendications des ressortissants
mexicains à l'échelle nationale. Nous espérons
pouvoir appliquer l'établissement de profils à tous les
pays pour lesquels il existe d'importantes incohérences régionales.
La technique d'établissement de profils qui est actuellement
à l'essai consiste à examiner le FRP et à introduire
les renseignements qui concernent la revendication dans la base de données.
Lorsque la décision a été rendue, les motifs sont
consignés. Le projet pilote vient tout juste d'être mis
en branle, mais nous espérons qu'il nous permettra de cibler
plus précisément les incohérences qui touchent
les pays de nationalité.
Conclusion
Les défis à relever sont nombreux à la CISR en
ce moment. La nouvelle législation pourrait être adoptée
au cours des prochains mois et, dans une telle éventualité,
nous aurons besoin d'énormément de ressources pour assurer
la mise en oeuvre de la législation. Parallèlement, nous
assistons à une augmentation sans précédent du
nombre de revendications du statut de réfugié qui a dépassé
le cap des quarante pour cent au cours des deux dernières années.
Cette tendance ne se manifeste pas seulement au Canada. Un grand nombre
de pays industrialisés sont aux prises avec des augmentations
comparables et rien ne nous permet de prévoir une diminution
du nombre de revendications. Par conséquent, la Commission et
le processus de détermination du statut de réfugié
au pays seront soumis à dure épreuve. Nos ressources sont
limitées, notre mandat est sur le point d'être élargi
et notre charge de travail s'alourdit. Dans l'intervalle, nous continuerons
à faire notre travail qui consiste à statuer sur les revendications
du statut de réfugié aussi rapidement, équitablement
et efficacement que possible. Et, je m'en voudrais de ne pas ajouter
que, même si l'efficacité de notre processus de décision
peut encore être améliorée considérablement,
en bout de ligne, il faut toujours mettre l'accent sur l'équité.
Autrement, toutes les améliorations d'efficacité réalisées
ne sont d'aucune utilité.
ANNEXE A
Dispositions du projet de loi C-11
95. (1) L'asile est la protection conférée à tout
étranger dès lors que, selon le cas
a) sur constat qu'il est, à la suite d'une
demande de visa, un réfugié ou une personne en situation
semblable, il devient soit un résident permanent au titre du
visa, soit un résident temporaire au titre d'un permis de séjour
délivré en vue de sa protection;
b) la Commission lui reconnaît la qualité
de réfugié ou celle de personne à protéger;
c) le ministre accorde la demande de protection,
sauf si l'étranger est visé au paragraphe 112(3).
(2) Est appelée personne protégée l'étranger
à qui l'asile est conféré et dont la demande n'est
pas ensuite réputée rejetée au titre des paragraphes
108(3), 109(3) ou 114(4).
96. A qualité de réfugié au sens de la Convention
- le réfugié - l'étranger qui, craignant avec raison
d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion,
de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social
ou de ses opinions politiques:
a) soit se trouve hors de tout pays dont il a
la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut
se réclamer de la protection de chacun de ces pays;
b) soit, s'il n'a pas de nationalité et
se trouve hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle,
ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.
97. (1) A qualité de personne à protéger l'étranger
qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers
tout pays dont il a la nationalité ou, s'il n'a pas de nationalité,
dans lequel il avait sa résidence habituelle, exposé :
a) soit au risque, s'il y a des motifs sérieux
de le croire, d'être soumis à la torture au sens de l'article
premier de la Convention contre la torture;
b) soit à une menace à sa vie ou
au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le
cas suivant
(i) il ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer
de la protection de ce pays,
(ii) il y est exposé en tout lieu de
ce pays alors que d'autres personnes originaires de ce pays ou qui s'y
trouvent ne le sont généralement pas,
(iii) la menace ou le risque résulte
de sanctions légitimes - sauf celles infligées au mépris
des normes internationales - et inhérents à celles-ci
ou occasionnés par elles,
(iv) la menace ou le risque ne résulte
pas de l'incapacité du pays de fournir des soins médicaux
ou de santé adéquats.
(2) A également qualité de personne à protéger
l'étranger qui se trouve au Canada et fait partie d'une catégorie
de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de
protection.
98. L'étranger visé aux sections E ou F de l'article premier
de la Convention sur les réfugiés ne peut avoir la qualité
de réfugié ni de personne à protéger.
110. (1) L'étranger et le ministre peuvent, conformément
aux règles de la Commission, en appeler - sur une question de
droit, de fait ou mixte - à la Section d'appel des réfugiés
de la décision de la Section de la protection des réfugiés
accordant ou rejetant la demande d'asile.
(2) N'est pas susceptible d'appel le prononcé de désistement
ou de retrait.
(3) La section procède sans tenir d'audience en se fondant
sur le dossier de la Section de la protection des réfugiés,
mais peut recevoir les observations écrites du ministre, de la
personne en cause et du représentant ou mandataire du Haut-Commissariat
des Nations Unies pour les réfugiés, ainsi que de toute
autre personne visée par les règles.
111. (1) La Section d'appel des réfugiés confirme la décision
attaquée, casse la décision et y substitue la décision
qui aurait dû être rendue ou renvoie, conformément
à ses instructions, l'affaire à la Section de la protection
des réfugiés.
(2) Elle procède au renvoi si elle estime nécessaire
la tenue d'une audience ou si le résultat de l'appel du ministre,
sur une question de crédibilité du demandeur, lui est
favorable.
171. S'agissant de la Section d'appel des réfugiés :
a) le ministre peut, sur avis donné conformément
aux règles, intervenir à l'appel, notamment pour y déposer
ses observations;
b) la section peut admettre d'office les faits
admissibles en justice et les faits généralement reconnus
et les renseignements ou opinions qui sont du ressort de sa spécialisation;
c) la décision du tribunal constitué
de trois commissaires a la même valeur de précédent
pour le tribunal constitué d'un commissaire unique et la Section
de protection des réfugiés que celle d'une cour d'appel
a pour une cour de première instance.
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