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Jeunes délinquants – Rapport de Wolfred Nelson – 1852
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Wolfred Nelson (1791-1863) est un personnage hors du commun. Médecin
de profession, cet anglophone du Bas-Canada (comme s'appelait alors
le Québec) fut l'un des leaders de la Rébellion de 1837,
qui visait à obtenir un gouvernement responsable. De 1827 à 1830,
il fut membre de l'Assemblée législative du Bas-Canada.
Nelson critiquait vivement l'ordre établi. Il réclamait
des réformes qui accorderaient à la majorité francophone
un pouvoir véritable sur la gestion des affaires du Bas-Canada.
Mais face au refus obstiné des autorités britanniques
de faire quelque concession que ce soit, Nelson en arriva à la
conclusion que le recours à la force était indispensable.
C'est ainsi qu'à l'automne de 1837 il devint l'un de ceux qui,
lors des assemblées politiques qui se tinrent alors, incitaient
la population à se soulever.
Les rebelles ayant pris les armes, Nelson organisa la défense
du village de Saint-Denis. C'est là que, le 23 novembre 1837,
un petit groupe de patriotes repoussa l'assaut de troupes britanniques
pourtant beaucoup plus nombreuses et mieux organisées. Cette
importante victoire militaire resta cependant sans lendemain. La rébellion
fut rapidement écrasée et Nelson arrêté.
Il fut d'abord emprisonné pendant sept mois, puis déporté aux
Bermudes en 1838 pour y être détenu. Il fut toutefois
libéré la même année. En 1843, il profita
de l'amnistie qui fut décrétée pour revenir au
Canada et recommencer à exercer sa profession à Montréal.
De 1844 à 1851, il siège à l'Assemblée
législative. En 1851, il quitte la vie politique et devient
inspecteur des prisons. S'intéressant toujours aux questions
sociales, il publie en 1852, en sa qualité d'inspecteur des
prisons, un rapport sur l'état des établissements pénitentiaires
du Québec. Une partie distincte du rapport en question est consacrée
aux jeunes délinquants. Cette section du rapport présente
un incontestable intérêt en ce qu'elle nous donne un aperçu
des idées de l'époque sur la façon de traiter
les mineurs. Il nous a donc paru utile de mettre ce texte à la
disposition de tous ceux qu'intéresse l'histoire des mentalités.
Le sujet des jeunes délinquants n'a pas encore occupé l'attention
du public en Canada ; pour cette raison, il est heureux que l'on
puisse trouver ailleurs les renseignements et les précédents
sur lesquels on doit se guider dans l'établissement et l'adoption
de lois pour la punition et la correction de ceux qui à un âge
aussi peu avancé de la vie enfreignent les lois de leur pays et
menacent de devenir ses plus mauvais citoyens et ses ennemis. C'est donc
avec plaisir que l'on peut référer à une autorité aussi éminente
dans cette matière que celle du lieutenant colonel Jebb, en Angleterre,
qui est peut-être la première autorité sur ce point.
Dans son deuxième rapport sur les prisons, en 1847, il s'exprime
dans les termes suivants en traitant des jeunes criminels : « Il
est très difficile de maintenir un système de discipline
réellement efficace qui convienne pour les jeunes délinquants
dans presque aucune des prisons, à cause du petit nombre des prisonniers
qui pourraient justifier la dépense d'un personnel suffisant pour
leur instruction et leur gouvernement spécial, » mais
dans un autre endroit il dit : « Dans la plupart des
prisons nouvelles, il y a un quartier spécialement réservé pour
les jeunes délinquants » – cet exemple paraît
mériter qu'on le suive en Canada ; il est cependant à espérer
qu'il ne sera pas nécessaire de faire de grandes dépenses
pour faire des réparations et des additions aux anciennes prisons,
ou pour acheter de vieilles maisons ou autres édifices propres à être
convertis en prison pour cette classe de délinquants ; mais
lorsque cela sera nécessaire et pourra être accompli à peu
de frais, il pourra être établi dans quelques-unes des prisons
actuelles un petit nombre de cellules qui suffiront pour toutes les fins
de la justice d'ici à un certain temps, plus particulièrement
si les suggestions qui seront faites plus bas sont considérées
comme dignes d'attention et sont mises à effet. Prévoyant
le cas où les additions dont il vient d'être parlé seraient
exécutées, il n'est peut-être pas hors de propos
de donner quelques détails sur la meilleure manière de
construire les cellules ; elles ne devraient pas avoir plus de trois
pieds de largeur ni plus de huit de longueur, et devraient communiquer
avec une salle suffisamment spacieuse pour servir d'école et d'atelier,
où le silence le plus absolu devrait être observé,
et où les détenus seraient constamment sous la surveillance
de leur gardien, qui remplirait aussi les fonctions d'instituteur ;
et aussitôt que leur travail ou leurs leçons seraient terminés,
ils devraient être reconduits dans les cellules qui leur serviraient
pour coucher aussi bien que pour y être renfermés pendant
le jour dans les cas de désobéissance ou d'inconduite.
Il ne faut pas perdre de vue que dans la plupart des cas, il est impossible
de réussir à dompter ces enfants pervers autrement qu'en
les soumettant au silence et au confinement ; c'est un fait dont
MM. DeBeaumont et de Tocqueville étaient bien persuadés ;
ils s'en expriment ainsi dans leur « Système Pénitentiaire. » –
« La séparation individuelle des prisonniers dans
les maisons d'arrêt, est le point de départ de tout bon
régime d'emprisonnement, » et un peu plus loin on trouve
ces mots : « L'isolement, qui comme moyen préservatif
de la corruption est un si grand bienfait pour les détenus eux-mêmes,
est aussi de toutes les mesures de discipline celle qui leur fait sentir
le plus vivement toute l'étendue de leur peine. »
Les
dépenses qu'entraînent les prisons pour les jeunes délinquants
sont telles que le colonel Jebb fait la suggestion suivante : « Il
conviendrait de faciliter l'union de plusieurs comtés ou bourgs
pour construire et entretenir des prisons ou maisons de détention
consacrés exclusivement aux jeunes délinquants au-dessous
de l'âge de quinze ans. » On peut citer comme preuve
des dépenses que nécessitent de pareilles institutions
en Angleterre, que ce qu'il en coûte pour tenir chaque enfant
dans la prison de Packhurst, une des mieux conduites du Royaume-Uni,
s'élève à un
chelin et trois deniers par jour ou vingt-deux louis par année.
Or si en Angleterre où il y a tant de moyens pour administrer économiquement
de semblables établissements, la dépense ci-dessus est
encourue, elle ne serait certainement pas moindre en Canada où les
moyens d'employer les délinquants profitablement sont bien moins
nombreux. Il faut se rappeler aussi, relativement à la dépense,
que la population est comparativement faible et disséminée
sur un vaste territoire, avec peu de grandes villes et de lieux de
refuge pour les mauvais sujets ; et il est à espérer,
que d'ici à un grand nombre d'années la population indigente
ne sera pas assez nombreuse pour nécessiter la construction
d'établissements
exclusivement destinés pour la détention des enfants
vicieux et vagabonds ; et il n'est pas à présumer
qu'on entretienne aucune idée qui puisse faciliter ou inspirer
aux indigents, aux fainéants ou aux gens immoraux de laisser
leurs malheureux enfants à charge à l'état
pour leur existence et leur entretien.
Il faut reconnaître que les sommes dépensées pour
de semblables institutions dans les États-Unis sont quelquefois
moins considérables ; cependant, l'auteur de ce rapport croit
que la moyenne la plus faible n'a jamais été de moins de
cinquante piastres par tête, et si sa mémoire ne lui fait
pas défaut à l'admirable institution de Boston sud, qu'il
a visitée récemment, il en coûte le double de cette
somme. Remarquons le en passant, et nous ne ferons que rendre justice
au pénitentiaire de Charlestown, à la maison de correction
et à la prison des jeunes délinquants qui s'y trouvent,
en déclarant que ces institutions paraissent être conduites
de la manière la plus digne de louanges, et qu'en même temps
qu'une discipline sévère y est observée, le traitement
et la diète sont irréprochables ; et bien que tous
les enfants soient tenus constamment à l'ouvrage, nul d'entre
eux n'est surchargé de travail et ils ont tous un air de santé,
et je puis ajouter de contentement.
Un édifice approprié à cette classe de prisonniers
ne saurait coûter moins de douze mille louis ; même
le petit état du Nouveau-Jersey, a consacré la somme de
quarante-cinq mille piastres pour une de ces prisons, et l'on pense qu'il
faudra y ajouter une somme assez considérable pour l'achever.
Comme il a été observé, il ne paraît pas
que la population exige encore l'établissement d'une semblable
institution ; outre cela à l'honneur, impérissable
d'une institution établie récemment en Canada, il y a toute
raison de croire que la génération qui grandit fournira
encore un moins grand nombre de jeunes délinquants que peut-être
aucun autre pays du monde, et pour cet état de choses, on doit
remercier cette noble et bienveillante société, – « les
frères de la doctrine chrétienne, » – qui
donnent l'éducation gratuite, non seulement aux enfants des plus
pauvres, mais aussi aux enfants des riches ; et leurs excellentes écoles
sont ouvertes non pas seulement aux catholiques, mais à tous ceux
qui veulent profiter de l'admirable système d'éducation
qu'ils suivent, système purement séculier ; pendant
les heures d'école il n'est question d'aucun sujet religieux.
Les enfants catholiques assistent régulièrement au service
divin à l'église paroissiale ; et il n'y aurait pas
grand mal à ce que les enfants protestants fussent forcés
d'aller plus strictement à leurs églises.
Le philanthrope et l'ami de l'ordre ne saurait voir sans un plaisir
infini des centaines d'enfants marchant en une longue ligne vers l'école
ou en revenant, avec la contenance la plus décente et la plus
modeste, guidés par un autre enfant décoré d'une
médaille, marchant à côté, et veillant au
maintien de l'ordre. Pas de courses, pas de tiraillements ni de mots
grossiers, partout la décence et la tranquillité ;
et bien que le plus grand nombre soit vêtu pauvrement, il règne
cependant chez eux une apparence de propreté qui fait voir au
premier coup d'oeil que bien que les parents soient d'une humble condition,
ils sont cependant bien convaincus des avantages que leurs enfants retirent
de ces incomparables écoles de charité, et qu'ils font
tous leurs efforts pour qu'ils en profitent. Ces écoles sont certainement
les meilleures sauvegardes de l'ordre public, de l'honneur et de la prospérité,
et produisent des avantages cent fois plus grands qu'on ne pourrait en
retirer des prisons et des pénitentiaires ; les premières
ne coûtent rien à l'état, mais au contraire établissent
sa réputation, tandis que les autres entraînent des dépenses
très considérables, et ne font guère honneur au
pays où elles se multiplient ; les unes empêcheront
le crime et développeront la vertu ; les autres servent à punir
le crime, mais aussi le plus souvent rendent les méchants pires.
Au lieu de dépenser des milliers de louis pour les retraites
auxquelles il a été fait allusion, appropriez-en quelques
centaines pour acheter des livres élémentaires destinés à être
distribués aux enfants des citoyens les plus pauvres ; car
il est venu à la connaissance de l'inspecteur, que nombre d'enfants
n'ont pu être envoyés à l'école, faute des
moyens d'acheter quelques livres, du papier et une ardoise.
La raison dit qu'il est bien suffisant que ces bienfaiteurs publics
dévouent toute leur existence à l'éducation des
pauvres, sans demander ni espérer aucune récompense dans
ce monde, sans qu'ils soient encore forcés pour ainsi dire à fournir
la papeterie dont la dépense dépasserait de beaucoup leurs
moyens.
Il n'y a qu'un petit nombre d'années que ces excellentes écoles
sont établies en Canada ; et l'on compte déjà par
milliers les enfants qui les suivent, et le nombre s'en élève
tous les ans ; quelque soient les avantages qui en découlent,
on ne peut s'attendre que toute la jeunesse d'un pays sera honnête
et vertueuse ; mais il y a toute raison d'espérer que le
nombre des méchants sera assez faible pour pouvoir être
logé dans les prisons ordinaires, sans construire des établissements
dispendieux expressément pour eux ; car avec des changements
comparativement peu considérables, nos prisons actuelles suffiront
pour leur détention temporaire, et dans les cas plus graves, pendant
l'épreuve qui précédera leur translation dans le
pénitentiaire provincial, où le personnel est très
complet, et où il y a des moyens de punition et d'instruction
dans les arts utiles, et où il sera pris soin de leur faire remplir
leurs devoirs moraux et religieux. Mais de beaucoup le meilleur moyen
de détenir, punir et corriger ces malheureux, serait dans la généralité des
cas les fermes modèles, dont un certain nombre, il n'y
a pas à en douter, seront avant longtemps établies dans
la province, quand ce ne serait que dans le but de répandre les
connaissances agricoles ; et là ils apprendraient le meilleur
de tous les états, l'agriculture ; leur instruction serait
surveillée fidèlement sous tous ses rapports ; ils
y acquerraient une constitution vigoureuse et l'amour des travaux de
la campagne, et il ne leur resterait aucune tache ni ignominie. À l'appui
de ce qui vient d'être dit, citons l'extrait suivant du « Pennsylvania
Journal of Philanthropy and Prison Discipline » : – « Des écoles
de réforme, où le travail à l'extérieur ou
dans les champs a été la principale occupation des élèves,
ont procuré des avantages, évité des maux, et donné des
résultats, qui ne se trouvent point dans l'histoire des autres
institutions d'où les travaux de la terre ont été exclus ; » et
dans un autre endroit il est dit ; « nous ne pouvons
nous empêcher de croire qu'il est possible d'appliquer aux jeunes
délinquants une discipline qui devrait être plus salubre,
mieux appropriée et plus efficace que celle qui existe maintenant
avec une moins grande ressemblance avec l'architecture des prisons, et
une occupation bien plus convenable pour les détenus ; » encore
un peu plus loin on lit, « l'engagement des enfants et des
cultivateurs, entraîne une existence libre de tentations, et bien
plus propre à faire naître des habitudes vertueuses que
toute autre, et ce goût devrait être cultivé aussi
jeune que possible. »
On lit dans le rapport du bureau des directeurs de la société de
discipline des prisons pour 1850, page 488, que « les apprentis
donnent généralement satisfaction, et sont un avantage
pour les autres en même temps qu'ils font leur propre bonheur, » plus
loin page 489, « personne ne peut passer une journée à la
ferme de l'état, sans être convaincu des bienfaits conférés
aux jeunes délinquants qui y sont rassemblés. »
C'est un sujet important, et il y a toute raison d'être convaincu
que le chef du bureau d'agriculture, tirera un bon parti de cette charge
nouvelle et intéressante, quand ce ne serait qu'à l'égard
des enfants indigents et coupables ; pour cela seul, le nouveau
département devrait être reçu avec acclamation et
rencontrer l'approbation et le support universels.
Les fermes dont il s'agit devraient être situées loin de
l'influence contagieuse des grandes villes et même des villages.
Outre les fermes modèles, ou à leur défaut, un
grand nombre d'enfants vagabonds, ou condamnés pour des délits
légers pourraient être bien placés chez les cultivateurs à la
campagne, où même les petits enfants rendent des services.
Pendant qu'il était à Fredericton, dans le Nouveau Brunswick,
l'inspecteur a été confirmé dans la vérité de
ce qu'il avance, d'accord avec ses propres idées, par l'assurance
que lui a donné le gardien de la maison des pauvres de cette ville,
que tous les jours des fermiers respectables venaient y demander des
enfants, et les prenaient volontiers même à l'âge
de quatre ou cinq ans, et qu'il était impossible de satisfaire à toutes
les demandes.
Quoiqu'il en soit les suggestions faites ici peuvent mériter
quelque attention, et peuvent peut-être conduire à l'adoption
de mesures au moyen desquelles la société se débarrasserait
des petits mendiants, ferait sortir ces malheureuses petites créatures
abandonnées de la voie de la paresse, du vice et de l'infamie,
pour leur donner des habitudes de travail et d'industrie, et en faire
plus tard des membres utiles et respectables de la société.
Il est très probable que la législature adoptera des mesures,
spécialement au sujet des jeunes délinquants ; dans
ce cas il devrait être recommandé de prendre les moyens
de remplacer l'autorité des parents de moeurs vicieuses et dissolues,
en engageant leurs enfants à des cultivateurs ou des artisans.
C'est la pratique de plusieurs des états voisins ; les enfants
des vagabonds et des personnes de mauvaises moeurs leur sont enlevés
et sont engagés à des personnes qui méritent la
confiance et le respect ; l'autorité qui appartient ordinairement
aux parents leur est enlevée, et l'enfant est engagé régulièrement,
mais par un acte qui lui assure protection contre les mauvais traitements
et l'oppression, en même temps que l'instruction et une bonne éducation
domestique.
Il serait peut-être expédient d'établir quelque
tribunal où des châtiments sommaires corporels seraient
infligés, et la régénération morale s'en
suivrait peut-être sans laisser la tache ineffaçable qui
suit l'emprisonnement. Cette importante question a occupé sérieusement
l'attention depuis nombre d'années en Angleterre, et quelques-uns
des jurisconsultes les plus éminents ont préconisé les
châtiments sommaires. Je vais citer quelques-unes de ces autorités :
lord Mackenzie a fait la déclaration suivante entre autres, devant
un comité de la Chambre des communes en 1847 : « La
douleur physique étant le grand moyen par lequel la nature éloigne
l'homme de ce qui doit être évité, je doute que nous
puissions abolir tout à fait la peine du fouet en justice criminelle
sans sacrifier l'utilité. » Le sergent Adams s'exprime
dans les termes suivants devant le comité : « À Middlesex
nous avons substitué la verge de bouleau aux autres moyens de
châtiment, et c'est un fait singulier mais indubitable que des
enfants qui se rient d'être renfermés dans un donjon, et
d'être fouettés avec des férules, se jettent à genoux
et supplient en sanglotant qu'on ne les fouette pas avec la verge de
bouleau. Cela les corrige plus que toute autre chose. » Plusieurs
personnes rendent témoignage du même fait, mais surtout
les gouverneurs des prisons en Angleterre, et le baron Alderson qui rendit
aussi témoignage dans la même occasion ajoute ce qui suit à ce
qu'il avait déjà dit à l'appui de la nécessité du
fouet ; il dit : « Je crois que l'humanité qui
réclame une peine légère pour un premier délit
est une véritable inhumanité ; je suis bien persuadé qu'un
plan judicieux de réforme pour les jeunes délinquants serait
l'arrangement le plus économique qu'on pourrait faire ; les
dépenses qu'entraînent aujourd'hui les emprisonnements et
les procès réitérés, excèdent de beaucoup
le coût probable d'une tentative de réforme efficace ;
et corriger cette classe de délinquants serait faire disparaître
une des sources les plus prolifiques de crime chez les adultes. » C'est
aussi l'opinion des hauts personnages qui viennent d'être nommés,
aussi bien que d'un grand nombre de juges en Angleterre, en autant au
moins qu'on le peut déduire des procédés du comité mentionné plus
haut, que « les magistrats devraient avoir le droit de juger
d'une manière sommaire plusieurs des délits les plus ordinaires
commis par les jeunes criminels, et il est recommandé d'annexer
aux cours de police quelqu'endroit où pour des crimes mineurs,
on fouetterait sévèrement, mais non cruellement avec une
verge de bouleau les jeunes criminels qui seraient ensuite renvoyés
chez eux ; » avec ce témoignage de ce à quoi
ils seront exposés s'ils errent encore, et l'assurance qu'à ce
châtiment, il sera ajouté pour la récidive un long
séjour soit dans une prison soit dans un pénitentiaire.
Qu'il soit permis de citer encore quelques noms distingués dont
les opinions corroborent les vues ci-dessus. Le baron Rolfe dit : « Je
pense qu'il serait avantageux de conférer aux magistrats le pouvoir
de juger sommairement les jeunes criminels pour les petits vols et peut-être
quelques autres crimes, et de les punir du fouet, soit avec ou sans emprisonnement
pour un temps déterminé. » Et le lord justice
général exprime ainsi son sentiment sur ce sujet : « J'ai
certainement eu occasion quelques fois de regretter que le pouvoir d'infliger
un châtiment modéré au moyen du fouet ne fût
pas sanctionné à l'égard des jeunes délinquants,
comme étant plus propre à les empêcher de répéter
l'offense que la peine de l'emprisonnement seule. N'oublions pas que
les craintes du criminel sont les sauvegardes de la société. » – Crawford
Russell.
Il est juste de supposer que les sentiments et les opinions d'hommes
aussi capables et aussi distingués, exerceront leur influence
dans ce pays, et qu'aucun sentiment exagéré d'humanité n'empêchera
les hommes réellement bienveillants de faire l'épreuve
de moyens qui sont si bien recommandés, et sont si propres à supprimer
le crime, et par la crainte ramènent les enfants perdus dans la
voie de l'industrie et des bonnes moeurs.
Au moment où l'inspecteur allait terminer son rapport, il lui
est venu à l'idée qu'il devait visiter l'école des
frères, afin d'obtenir tous les renseignements qu'il pourrait
relativement au système d'éducation qui y est suivi, aussi
bien qu'aux avantages qu'il est propre à produire. Le résultat
de cette visite dépassa de beaucoup ses anticipations, car outre
ce qu'il cherchait, il fut assez heureux pour rencontrer dans la personne
du chef de cette digne école, un homme de vastes connaissances,
qui avait consacré des talents peu communs et une longue vie à la
plus élevée de toutes les occupations, celle de travailler « Pour
rendre le peuple meilleur » suivant [la devise] de l'institution,
et qui avait été pendant huit ans le principal directeur
d'un vaste établissement pénal pour les jeunes délinquants
en France, où il a eu amplement l'occasion d'étudier le
caractère des détenus, les progrès qu'ils pouvaient
faire dans l'éducation morale et séculière, et quelle
influence ils en éprouvaient. Il me déclara, les larmes
aux yeux, qu'il craignait beaucoup qu'il ne résultât plus
de mal que de bien, malgré les efforts incessants et la vigilance
de ses confrères ; la duplicité et l'hypocrisie semblaient
usurper la place de l'audace courageuse qui élève l'homme.
Si complètement infructueux avaient été leurs efforts
qu'il semblait que l'esprit du mal régnait partout ; qu'une
lèpre morale infectait jusqu'à l'atmosphère de la
place, et avait lancée ses flèches de vengeresse dans tous
les coeurs.
À la prière de l'inspecteur cet homme estimable entreprit
de rédiger par écrit, d'une manière concise, les
vues qu'il avait eues relativement à cette institution, vues qui
sont le résultat de beaucoup d'étude, de beaucoup d'observation
et de patience, et d'une vaste expérience personnelle ; et
deux jours après l'inspecteur eut l'honneur de recevoir une visite
de ce véritable philanthrope, qui mit à sa disposition
un écrit plein d'intérêt et d'informations, qui se
trouvent dans l'appendice sous les lettres F.f., et est reproduit ici.
C'est un document qui mérite bien d'être noté et
pris en sérieuse considération par le gouvernement.
« QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LES MAISONS DE REFUGE POUR
LES ENFANTS
On a prétendu rendre un service à la société en établissant
des maisons de refuge, pour les enfants vagabonds ou qui ont commis quelque
faute contre la propriété ou contre la saine morale. Je
puis assurer d'après l'étude approfondie, longue et consciencieuse
que j'en ai pu faire pendant l'espace de huit ans, où j'ai eu
plusieurs de ces établissements sous ma direction, que je me suis
convaincu qu'un législateur ne pouvait faire un plus funeste présent à la
société. En effet, ces maisons, au lieu d'être des
maisons d'éducation ou de correction ne sont que des maisons
de corruption où s'élève une génération
de voleurs et de tous les vices imaginables. Je considère un
enfant qui tombe dans une de ces maisons comme un enfant perdu sans
ressource.
Continuellement en contact pendant plusieurs années avec de jeunes
gens plus pervers qu'eux, ils contractent une telle habitude du vice
qu'ils n'en rougissent plus ; au contraire ils rougissent de pratiquer
des actes de vertu : occupés depuis le matin jusqu'au soir à tromper
la vigilance de leurs gardiens, ils deviennent hypocrites, dissimulés,
menteurs, impies. Dans l'usage où ils sont de ne manquer jamais
de rien, de trouver toujours leur nécessaire, ils contractent
l'habitude de ne rien prévoir, de ne s'occuper de rien, et quand
ils sortent de ces maisons, ne trouvant plus personne qui leur fournisse
ce dont ils ont besoin, ils le prennent où ils le trouvent :
bientôt même ils regrettent la maison d'où ils sortent ;
ils la considèrent comme la leur propre, ils entrent dans une
prison avec autant de plaisir qu'un enfant de famille entre dans la maison
de son père après un voyage, ils ne trouvent d'ailleurs
de sympathie que parmi les habitants de ces lieux, ils ne sont bien que
là. J'ai vu de jeunes gens entrer dans un pénitentiaire
avec autant de bonheur que s'ils avaient été à des
noces.
En vain le législateur prétend-il les habituer à l'ordre,
au travail et leur faire apprendre un métier : s'il y a de
l'ordre, ce ne sera qu'un ordre obtenu par la force, par l'esclavage ;
ordre propre à dégrader l'homme, jamais à le conduire
au bien, il n'y a que l'ordre qui naît de l'amour, qui conduise
l'homme à la vertu. S'il y a du travail, il sera aussi forcé et
ils ne travailleront que comme des esclaves dans le seul but d'éviter
les punitions, ils en feront le moins possible et sans application, sans
goût.
On leur apprendra un métier, dit-on, afin qu'au sortir, ils puissent
avoir une ressource. Je puis assurer, que sur cent il n'en sortira pas
un qui sache un métier quelconque. Les entrepreneurs des travaux
n'y vont que pour gagner de l'argent, nullement pour enseigner des métiers.
Leur but est de faire faire du travail au meilleur marché possible,
afin de le débiter à de bonnes conditions et qu'ils puissent
en avoir un prompt écoulement : toute leur étude tend à ce
but ; ils n'apprendront qu'une partie à chacun, afin de produire
le plus d'ouvrage possible et il faut avouer qu'il est bien difficile
de faire autrement. Supposons néanmoins qu'ils apprissent un métier, ce ne
serait qu'un métier qu'on ne peut exercer que dans les villes,
où se trouve la cause de la perdition des jeunes gens les mieux élevés, à plus
forte raison, de jeunes gens qui sont sans famille et qui ont appris à ne
rougir de rien : dans cette dernière supposition même
c'est donc encore rendre un mauvais service à ces jeunes gens
et à la société. Ceci est d'après l'expérience.
Qu'on ne cherche point ailleurs que dans ces établissements la
cause du nombre croissant des crimes, dans l'ancien continent, soit en
France, soit en Angleterre. Et ce qu'il y a de plus déplorable,
c'est que jamais la vérité n'est parvenu aux oreilles des
législateurs ; ils n'en ont jamais pu étudier les
résultats que dans des rapports faux et mensongers, parce que
ceux qui les font sont intéressés ; ils ne cherchent
qu'à se faire valoir, ils craignent de perdre leurs places. Je
pourrais dire à ce sujet des choses qu'on ne pourrait pas croire.
Il n'y a qu'un seul moyen à ma connaissance, capable de rendre
un service utile à la société, ce serait de faire
une ferme modèle, qui fournirait des hommes propres à l'agriculture,
seul moyen de rendre un pays riche et prospère. Des fermes modèles
coûteraient fort peu à fonder et au bout de deux ou trois
ans, elles pourraient se suffire à elles-mêmes ; mais
pour qu'une ferme puisse arriver à ce résultat et prospérer,
il faut qu'elle soit sous la conduite d'hommes plus pratiques que théoriciens,
qui fassent parler leurs oeuvres, et qui n'aiment point à écrire
ou à faire des rapports ; des hommes qui fassent le bien
pour le bien et n'attendent leur récompense que de Dieu. Des hommes
qui vivent comme les colons, qui n'aient pas de forts traitements, qui
adoptent ces enfants et les considèrent comme leur propre
famille. Sans ces conditions, pas de prospérité possible.
Ceci est encore d'après l'expérience.
Quand on met à la tête des établissements publics
des hommes qui aiment la gloire, qui savent écrire, faire parler
les journaux, qui désirent se faire un nom, obtenir de l'avancement,
toute leur étude consiste à chercher le moyen de tromper
le public et surtout les législateurs, chose facile à faire,
en mettant au jour des théories, qui ne manquent ensuite que par
l'incurie de leurs subordonnés, jamais par la leur ; leur
fortune, voilà ce qui les touche et non le bien de leur patrie.
Qu'on n'oublie pas qu'il faut que ce soit le sentiment religieux qui
guide ces hommes, qu'il n'y a que cet esprit qui puisse faire le bien
d'une manière stable et solide.
Il importe surtout que dans le
début on pose des bases d'une discipline sévère
sous le rapport moral et religieux. Car si jamais la corruption se glisse
dans l'établissement, c'est fini, on ne viendra jamais à bout
d'y mettre la réforme ; la corruption dans un établissement
est comme la lèpre, elle s'attache aux murs, et tout ce qu'on
pourra faire ne fera qu'atténuer le mal, sans jamais le guérir
entièrement.
Si les nouveaux pays veulent se garantir des malheurs des anciens, il
ne faut pas qu'ils suivent leurs errements ; c'en serait un bien
dangereux, lequel ajouté à la faute que l'on a déjà faite
d'établir tant de petits collèges perdrait bien vite le
pays. Il vaudrait bien mieux faire donner une bonne éducation
et instruction primaire adaptée aux besoins du pays que de créer
des institutions qui ne tendent qu'à retirer le peuple des travaux
de la campagne, et à faire des avocats et des notaires, souvent
sans talent et dont le seul mérite consiste à travailler
au malheur de l'humanité. Une bonne instruction primaire n'a pas
ces inconvénients, elle
ne retire jamais l'homme de son état, elle fait de bons ouvriers,
intelligents, laborieux, économes et moraux, des hommes polis
et jamais des orgueilleux propres à mépriser les autres.
Voici maintenant le nombre des enfants qui fréquentent les écoles
des frères en Canada et aux États-Unis : Montréal
1869 enfants, et les divers autres postes, 2508, soit 4377 en Canada ;
et 4211, en neuf différentes maisons des États-Unis, formant
8588 enfants pour le total. »
L'inspecteur ne dissimulera pas qu'il a éprouvé une grande
satisfaction en voyant que les sentiments qu'il a nourris pendant bien
des années, avaient reçu une confirmation aussi complète
de la part d'une personne aussi impartiale, et qui mérite autant
de confiance et de respect ; et l'inspecteur n'hésite pas à affirmer
que les nobles efforts des instituteurs des écoles chrétiennes,
méritent sous tous les rapports l'appui et la faveur du gouvernement,
comme étant les auxiliaires les plus efficaces qu'il puisse avoir
dans l'instruction et l'éducation de la jeunesse, en encourageant
les bonnes habitudes, et fournissant par là la meilleure sauvegarde
contre le crime et ses tristes et nombreuses conséquences.
L'inspecteur, outre qu'il pense, ainsi qu'il l'a dit ci-dessus, que
vu l'état actuel du pays, et sa population, il n'y a pas une nécessité immédiate
d'établir des maisons de refuge pour les jeunes délinquants,
si même cette nécessité se présente jamais,
croit pouvoir avancer avec assez de plausibilité, que l'enfant
qui a passé plusieurs années dans une de ces retraites
y devient habitué, acclimaté pour ainsi dire ; elle
perd à ses yeux l'aspect d'une prison, il s'y attache comme à sa
propre maison ; l'élasticité de son jeune esprit le
conduit à assimiler bientôt ses idées à tout
ce qui l'entoure ; la restreinte même à laquelle il
est condamné perd de ses dégoûts, et finit par lui
plaire, de sorte qu'à la longue et insensiblement, il en vient à chérir
sa retraite, et il n'y a là rien qui doive surprendre, puisqu'il
y est bien nourri, vêtu et logé, et traité avec douceur,
et ne travaille pas beaucoup ; et quand il est malade il reçoit
toute l'attention et les conforts nécessaires.
Est-il surprenant qu'avec de pareilles influences il éprouve
avant longtemps le désir de revenir dans un lieu où il
a passé ses années les plus heureuses, et où il
a échappé aux privations et aux misères auxquelles
l'avaient soumis des parents dénaturés et peut-être
vicieux.
Il est inutile de lui dire qu'il est sorti d'une prison, car ses convictions
les plus intimes lui disent constamment que là il a été traité humainement,
qu'il y a trouvé abri et protection ; par conséquent,
ce ne serait pas une punition que d'être renfermé de nouveau
dans son ancienne demeure ; c'est un asile qu'il serait disposé à chercher,
et où il reviendrait volontiers s'il souffrait quelque privation
ou de mauvais traitements de ses parents, ou d'un maître dur et
cruel ; il a été remarqué avec justesse « que
les prisons sont plus redoutées de ceux qui n'y ont jamais été renfermés,
que de ceux qui les ont habitées. »
Outre les attractions mentionnées plus haut, et qui devraient
militer contre l'établissement de semblables institutions, il
y a encore à cela une objection manifeste, c'est qu'il a été prouvé à l'évidence
que la réformation du criminel résulte très rarement
ou jamais d'un séjour dans quelqu'un de ces asiles ; au contraire,
les méchants y deviennent généralement plus pervers,
et ceux qui sont bien disposés sont certains d'être corrompus ;
l'association même d'esprits d'une nature si analogue, peut être
une autre raison qui les engagerait à retourner dans leur ancienne
demeure. L'influence pernicieuse qui règne dans toutes ces institutions,
est bien décrite par le bon frère, dans le précieux
document, dont copie a été donné plus haut, et qui
est inséré en original tel qu'il a été écrit
dans l'appendice au rapport de l'inspecteur ; ce document démontre
clairement qu'il est presque impossible de réformer les jeunes
gens qui sont réunis ensemble en grand nombre, malgré les
moyens les mieux imaginés pour empêcher la contamination ;
et le digne supérieur a dit avec beaucoup de raison, qu'il n'y
avait pas jusqu'à l'atmosphère morale du lieu qui ne fut
gâtée et empoisonnée par la présence de ses
habitants. On se rappellera aussi que la charitable Harriet B. Stowe,
a dit, que « l'atmosphère subtile de l'opinion se fait
sentir sans le secours de la parole. »
Le regard impudent, la démarche indépendante, et l'air
fanfaron exercent une singulière influence, et c'est à une
pareille manière d'agir qui ne peut être ni contrôlée
ni corrigée que l'on peut attribuer en grande partie tous les
maux qui résultent de l'association d'un grand nombre d'enfants
mal élevés, qui sont continuellement en compagnie les uns
des autres, bien que le silence puisse être imposé en tout
temps.
L'excitation qui accompagne les travaux des champs, le changement continuel
de position et d'occupation, la séparation les uns des autres
pendant les travaux, les efforts physiques qu'ils font continuellement épuisent
pour ainsi dire l'activité mentale surabondante qui résulte
d'une conformation vigoureuse, et de là naît une disposition
tranquille, placide et satisfaite.
S'il y a quelque vérité, ou même de la vraisemblance
dans l'avancé ci-dessus, il doit donner lieu à de profondes
réflexions avant de décider la fondation d'institutions
publiques pour les jeunes délinquants et les enfants sans asile.
Il est bien vrai que l'exemple de l'Angleterre, de la France et d'autres
nations Européennes, et même des États-Unis, peut être
considéré comme réglant la matière, et ce
serait peut-être de la présomption de la part de tout individu
que de présenter quelque objection à suivre un pareil exemple ;
néanmoins l'inspecteur est si intimement convaincu de la justesse
de ce qu'il a avancé sur ce sujet réellement important,
qu'il n'a pas de scrupule à se soumettre à toutes les remarques
quelque dures qu'elles soient, qui pourront être faites sur ce
qu'il se hasarde à exprimer une opinion contraire à des
doctrines si généralement reçues. On pourrait faire
valoir une autre raison très forte contre ces institutions, même
si elles n'étaient sujettes aux objections qui sont posées
ci-dessus, c'est que les métiers qu'on y enseigne sont généralement
ceux qui ne peuvent être exercés que dans les villes, serres
chaudes où croissent les vices et la corruption ; et c'est
tellement le cas, que la population des villes fournit vingt coupables à la
prison contre un qui vient de la campagne pour le même chiffre
de population ; il ne faut pas non plus oublier que les malheureux
habitants de la maison de correction ont d'abord été contaminés
au milieu d'une population nombreuse et dense, et qu'après avoir
subi la peine de fautes qui, dans la plupart des cas, n'ont pas originé chez
eux, ils y sont renvoyés plus vieux, mais tout aussi corrompus
que lorsqu'ils ont laissé la scène de leurs premiers vices,
ayant une plus grande force de corps, plus d'intelligence, moins de terreur
de la prison, et prêts à recommencer de nouveau leur triste
carrière de crimes, peste de la société et à charge à soi-même.
Or si cette peinture ressemble tant soit peu à la réalité,
n'est-ce pas un devoir impérieux pour la législature de
prévenir des résultats qui, l'expérience le prouve,
sont autant à anticiper qu'à craindre.
On accusera peut-être l'inspecteur de s'enthousiasmer sur ce point ;
de grossir les dangers et de supposer des résultats qui échappent
aux prévisions des autres hommes ; peut-être est-ce
le cas, cependant voyant que des fermes modèles doivent être établies
dans différentes parties de cette province, il pourrait être
prudent de faire l'expérience de leur utilité comme lieux
de correction et d'instruction pour les enfants de parents dégradés ;
là on leur enseignera un état, le seul qui puisse être
suivi loin des tentations et de la corruption de la cité ;
et ils y apprendront à fuir le vice, aimer le travail, et devenir
enfin des membres utiles de la société, dont ils auraient
pu devenir dans d'autres circonstances la honte et la terreur.
Wolfred Nelson
Montréal, 8 septembre 1852
Note
Ce texte est tiré du document suivant :
Rapport du Dr. Wolfred Nelson,
un des inspecteurs du pénitentiaire provincial,
sur la condition, la discipline, l'administration et l'entretien
des prisons de district et autres prisons du Bas-Canada
Quebec, John Lovell, 1853 Les erreurs d'orthographe ou de typographie manifestes ont été corrigées.
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