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COMPENDIUM DE DÉCISIONS
QUATRIÈME SÉRIE DE DIRECTIVES
REVENDICATRICES DU STATUT DE RÉFUGIÉ
CRAIGNANT D'ÊTRE PERSÉCUTÉES EN RAISON DE LEUR SEXE
: MISE À JOUR
Commission de l'immigration et du statut de
réfugié
Février 2003
TABLE DES MATIÈRES
- DÉTERMINATION DE LA NATURE ET DES MOTIFS DE LA
PERSÉCUTION
- PROPOSITION GÉNÉRALE
- MOTIFS AUTRES QUE L'APPARTENANCE À UN GROUPE
SOCIAL
- Race
- Religion
- Nationalité
- Opinions politiques
- APPARTENANCE À UN GROUPE SOCIAL
- ÉVALUATION DU PRÉJUDICE REDOUTÉ
- Facteurs
- QUESTIONS RELATIVES À LA PREUVE
- PROBLÈMES SPÉCIAUX LORS DES AUDIENCES RELATIVES
À LA DÉTERMINATION DU STATUT DE RÉFUGIÉ
A. DÉTERMINATION DE LA NATURE ET DES MOTIFS DE LA PERSÉCUTION
I. PROPOSITION GÉNÉRALE
4 grandes catégories
- Les femmes qui craignent d'être persécutées pour
les mêmes motifs et dans les mêmes circonstances que les
hommes. L'analyse ne se fait pas en fonction du sexe, mais la nature
du préjudice redouté et les questions de procédures
à l'audience peuvent varier. (p. ex. race, nationalité,
opinions politiques, croyances religieuses)
- Les femmes qui craignent d'être persécutées uniquement
pour des motifs liés à la parenté. (p. ex.
statut, activités ou opinions d'un ou des membres de leur famille)
- Les femmes qui craignent d'être persécutées à
la suite de certains actes de grave discrimination sexuelle ou d'actes
de violence de la part des autorités publiques ou même
de citoyens privés, lorsque l'état ne veut pas ou ne peut
pas les protéger de façon appropriée. (p. ex.
violence familiale et de guerre civile)
- Les femmes qui craignent d'être persécutées pour
avoir violé certaines coutumes, lois et pratiques religieuses
discriminatoires à l'endroit des femmes dans leur pays d'origine.
(p. ex. mariage imposé, maquillage, visibilité ou
longueur des cheveux ou type de vêtements)
II. MOTIFS AUTRES QUE L'APPARTENANCE À UN GROUPE SOCIAL
1. Race
Farah, Zahra Moumin c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-493-01), Pinard, 22 mars 2002, 2002; 2002 CFPI 302.
Les revendicatrices prétendaient craindre avec raison d'être
persécutées du fait de leur race ou de leur nationalité,
parce qu'elles font partie de la tribu Midgan, et du fait de leur appartenance
à un groupe social. La Cour a maintenu la conclusion de la SSR
voulant que les requérants, pour manque de crédibilité,
ne pouvaient obtenir le statut de réfugié. La SSR
en est arrivée à la conclusion, de façon claire et
catégorique, que les requérants n'étaient pas crédibles;
elle a fourni, à l'appui de sa conclusion, des motifs détaillés
qui s'appuient sur une preuve documentaire solide. En ce qui concerne
la crédibilité, la Section du statut peut tirer des conclusions
négatives des contradictions entre le FRP
de la requérante et son témoignage qui n'ont pas reçu
d'explications convaincantes. Que certains éléments de la
preuve documentaire ne soient pas mentionnés dans les motifs de
décision n'invalide pas cette décision. La SSR
a fait référence aux directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe; elle a
tenu compte de l'analphabétisme de la requérante et du fait
que les hommes, au Djibouti, ne partagent pas toujours avec leurs familles
les détails de leurs activités extérieures. Toutefois,
après avoir fait une évaluation détaillée
de la preuve, la Section du statut a conclu que cette preuve était
insuffisante pour établir que les demanderesses craignaient avec
raison d'être persécutées. Les conclusions tirées
par la Section du statut étaient raisonnables compte tenu du fait
qu'elle n'a pas cru les demanderesses. La demande a été
rejetée. (Décision de la SSR
A99-00376, 17 janvier 2001).
2. Religion
SSR
U95-04832, 16 août 1996.
La revendicatrice, célibataire de 26 ans, était une musulmane
ahmadie fervente, active au sein de la communauté ahmadie. Au cours
des années 1970 et en 1984, elle a été témoin
d'attaques de la part de musulmans orthodoxes contre des membres de sa
famille. Ses parents et trois de ses frères se sont enfuis au Canada
en 1990. Par la suite, alors qu'elle vivait avec une soeur mariée,
elle a reçu des appels de menace du fait de son appartenance religieuse.
Elle s'est enfuie dans une autre ville où elle a déniché
du travail comme enseignante, mais la découverte de son appartenance
religieuse a conduit à son renvoi immédiat et un mallah
local a donné l'ordre de la tuer. Ses frères habitant Karachi
et Rawalpindi éprouvaient régulièrement des problèmes
avec les non-Ahmadis. La Section du statut de réfugié a
jugé que le témoignage de la revendicatrice concordait avec
la preuve documentaire. Elle a statué que sa liberté de
pratiquer la religion de son choix était limitée et qu'elle
faisait face à une discrimination religieuse grave. De plus, en
tant que célibataire vivant seule, sans famille, elle risquait
d'attirer l'attention et la méfiance du public dans une société
musulmane. Elle n'avait donc aucune possibilité de refuge intérieur.
La Section du statut de réfugié a examiné les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. La revendicatrice avait des raisons valables de
craindre d'être persécutée du fait de sa religion
et de ses opinions politiques présumées.
SSR
T99-09129, 13 mars 2001.
La revendicatrice disait craindre d'être persécutée
parce qu'elle est de foi chrétienne. Sa revendication a aussi été
examinée à la lumière des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. La revendicatrice
prétendait que son neveu avait été tué à
cause de sa religion, que la police n'avait rien fait et qu'un gang de
motards s'en était pris à ses enfants en arrachant les croix
qu'ils portaient au cou et en les poussant par terre. Elle craignait d'avoir
maille à partir avec les autorités pakistanaises responsables
de l'application de la loi sur le blasphème. Sa crainte s'est accrue
après le décès de son mari. La preuve documentaire
faisait état de gangs musulmans détruisant des maisons dans
les quartiers chrétiens, d'utilisation de gaz lacrymogène
par la police contre des chrétiens et d'autorités fermant
les yeux sur les attaques commises par des extrémistes musulmans.
Au Penjab, où la majorité des chrétiens pakistanais
vivent, de nombreux chrétiens sont emprisonnés à
la suite de fausses accusations. La crainte de persécution de la
revendicatrice fondée sur le fait qu'elle est chrétienne
avait un fondement objectif. La preuve documentaire indiquait également
que les femmes seules sont considérablement désavantagées
au Pakistan. Les viols sont fréquents et la police prend rarement
des mesures contre les agresseurs. En fait, il arrive même parfois
qu'elle soit impliquée dans les agressions. Il ressortait de la
preuve documentaire que les femmes chrétiennes forment la minorité
la plus souvent victime de discrimination au Pakistan. La revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée parce qu'elle
est une femme seule sans protection masculine.
Arshad, Nasreen c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3455-02), Campbell, 22 janvier 2003; 2003 CFPI 64.
La requérante est une citoyenne du Pakistan âgée de
35 ans qui a fui son pays avec ses deux enfants mineurs, parce qu'elle
avait une crainte bien fondée de persécution à cause
de son adhésion à la religion musulmane chiite. Elle prétend
que l'oncle de son mari et d'autres membres du SSP ont commencé
à la persécuter après sa conversion à la secte
chiite en avril 2000. La SSR
a accepté ses éléments de preuve; cependant, elle
n'a pas examiné adéquatement la réalité selon
laquelle les services de police ont traité l'affaire comme [traduction]
« un problème de famille personnel » et
n'étaient donc pas disposés à offrir leur protection.
Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA1-18831 et al., 31 mai 2002).
3. Nationalité
SSR
C93-00433, 3 décembre 1993.
L'intéressé, une femme mariée, avait subi des sévices
physiques et psychologiques de la part de son époux. Le tribunal
a déterminé que le traitement violent et les rituels traditionnels
qui l'attendraient à son retour étaient assimilables à
de la persécution. Le tribunal a conclu que la crainte que ressentait
l'intéressée était liée à sa nationalité,
c'est-à-dire son affiliation tribale, ainsi qu'à sa religion,
la religion chrétienne. D'après la preuve documentaire,
l'État ne voulait ni ne pouvait la protéger.
SSR
T92-08429, 10 mai 1994.
L'intéressée est une citoyenne musulmane originaire d'Iran,
qui a épousé un juif iranien. Elle a résidé
en Israël à partir de 1980 jusqu'à son départ
pour le Canada en 1992, ce qui a soulevé la question de l'exclusion
en vertu de la section 1E. En Israël, l'intéressée
a été victime de violence conjugale et s'est séparée
de son époux. Elle craignait donc que si elle devait retourner
en Israël, elle perdrait son statut et serait expulsée en
Iran. L'intéressée a été interrogée
en détail sur ses droits et de ses obligations pendant les 12 années
qu'elle a résidé en Israël. En analysant si l'intéressée
avait les droits et les obligations attachés à la possession
de la nationalité, le tribunal a conclu qu'elle ne courait pas
de risque d'être renvoyée d'Israël en Iran; elle serait
autorisée à rentrer en Israël, et ce pays reconnaissait
son mariage. Le tribunal a également pris en compte les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe en examinant la crainte que disait éprouver
l'intéressée d'être persécutée par son
époux. Le tribunal a jugé qu'aux termes de la section 1E,
on peut considérer qu'une protection efficace de l'État
fait partie des droits attachés à la possession de la nationalité
et que, en l'espèce, une telle protection serait disponible. Le
tribunal a conclu que l'intéressée était exclue par
la section 1E.
SSR
U93-06513 et al., 1er avril 1996.
Dans cette ville, les arrestations de Tamouls auxquelles procédait
la police comprenaient habituellement des vérifications de l'identité
et des antécédents, et les personnes étaient libérées
dans les deux ou trois jours suivants, tout au plus. La prévention
du terrorisme était un objectif social valable, et la détention
et l'interrogatoire de Tamouls étaient une mesure de sécurité
raisonnable qui visait à faire obstacle à la menace terroriste
d'extrémistes tamouls. Les arrestations et les détentions
de brève durée de Tamouls arrivés depuis peu à
Colombo ne pouvaient être qualifiées d'actes de persécution.
La revendicatrice n'avait pas été gardée en détention
ou interrogée pendant son séjour à Colombo, ce qui
confirmait que les autorités ne la considéraient pas comme
un risque pour la sécurité. Prenant en considération
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, la Section du statut a fait remarquer qu'en ce
qui a trait à la situation des femmes, le Sri Lanka est considéré
comme l'un des pays les plus progressistes de l'Asie du Sud. Il était
peut-être bien effrayant pour une Tamoule veuve et dans la cinquantaine
de retourner dans une ville où elle n'avait aucune famille, mais
il existait à Colombo une vaste communauté tamoule qui avait
soutenu de nombreux Tamouls déplacés, de même que
des services de soutien destinés aux femmes. (Demande de contrôle
judiciaire rejetée, Ganeshan, Annam c. Canada (Ministre de
la Citoyenneté et de l'Immigration), (C.F.
1re
inst., IMM-1440-96), MacKay, 21 février 1997).
SSR
A98-00732, 16 mars 1999.
La revendicatrice, qui est née en 1933, a allégué
craindre d'être persécutée du fait de sa nationalité
à titre d'Arménienne de souche. La Section du statut de
réfugié a conclu que les Arméniens de souche ne sont
pas l'objet, en Géorgie, d'actes qui constituent de la persécution.
Selon la preuve documentaire, le gouvernement de la Géorgie respecte
habituellement les droits des membres des minorités ethniques.
Même si la revendicatrice avait été victime de certains
actes discriminatoires et d'hostilité, les nombreux incidents d'extorsion
et ceux au cours desquels on l'a insultée, étalés
sur de nombreuses années, ne constituaient pas un préjudice
grave ou une violation constante de ses droits fondamentaux, et n'équivalaient
pas à de la persécution. Quant au fait qu'elle soit une
femme âgée vivant seule, la preuve documentaire indiquait
que les femmes font l'objet de discrimination dans l'emploi en Géorgie
et que la violence conjugale est un problème, mais la revendicatrice
était célibataire et à la retraite. Compte tenu des
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, la Section du statut de réfugié
a conclu que les femmes âgées vivant seules en Géorgie
ne sont pas soumises à des préjudices graves équivalant
à de la persécution.
SSR
T98-05792, 29 novembre 1999.
La revendicatrice, citoyenne éthiopienne, a prétendu être
d'ethnie érytréenne par la famille de sa mère et
a exprimé une crainte de persécution à l'égard
de l'Éthiopie et de l'Érythrée à cause de
sa nationalité. La revendication soulève la question de
crédibilité de son témoignage selon lequel elle était
d'ethnie érythréenne. Elle avait un passeport et un permis
de sortie éthiopiens, et n'avait aucun document indiquant que sa
mère était née dans ce qui est maintenant l'Érythrée.
Elle ne pouvait parler le tigrina, la langue érythréenne.
Malgré ses doutes et parce qu'elle a accordé beaucoup d'importance
au fait que la revendicatrice était une jeune femme, la Section
du statut de réfugié a reconnu qu'elle était d'ethnie
érythréenne et qu'elle craignait avec raison d'être
persécutée en Éthiopie du fait de son origine ethnique.
Comme elle n'avait pas de certificat de naissance et comme il n'était
pas clair que sa mère était née en Érythrée
ou en Éthiopie, la Section du statut de réfugié ne
pouvait conclure que la citoyenneté érythréenne lui
serait automatiquement accordée ou serait une simple formalité
dans son cas. Même si celle-ci pouvait obtenir la citoyenneté
érythréenne, elle serait dans une situation précaire
parce qu'elle était une jeune femme seule et ferait face à
une possibilité sérieuse de persécution parce qu'elle
serait considérée comme quelqu'un venant de l'Éthiopie.
Dans ses motifs, la Section du statut de réfugié a tenu
compte des directives de la présidente intitulées Les enfants
qui revendiquent le statut de réfugié : Questions relatives
à la preuve et à la procédure et celles intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe
SSR
T98-03163 et al., 7 mai 2001.
La revendicatrice adulte, qui est d'origine russe, a été
l'objet de discrimination et de persécution de la part de résidents
du Kirghizistan d'origine kirghize. Elle souffrait en outre de troubles
mentaux graves. S'ils devaient retourner au Kirghizistan, ces deux enfants
seraient touchés par des problèmes comme le taux de chômage
élevé chez les femmes, le manque de ressources de base,
le trafic des jeunes filles et des femmes, les mauvais traitements infligés
aux enfants, le non-respect des lois et le nombre croissant d'enfants
vivant dans la rue. La violence contre les femmes est répandue
au Kirghizistan et ne rencontre que l'indifférence des responsables
de l'application de la loi. La Section du statut de réfugié
n'a pas conclu qu'il existait une possibilité sérieuse que
toutes les personnes d'origine russe vivant au Kirghizistan soient persécutées.
Cependant, si la revendicatrice adulte retournait dans ce pays, son origine
ethnique et celle de ses enfants pourraient ne faire aucun doute en raison
de ses problèmes psychologiques, ce qui les mettraient tous en
danger. En outre, il était peu probable qu'elle puisse obtenir
la protection de l'État. Compte tenu des troubles mentaux graves
dont elle était atteinte, elle serait probablement incapable de
travailler dans un avenir prévisible. Il existait plus qu'une simple
possibilité que les revendicateurs soient persécutés
du fait de leur origine ethnique et de leur appartenance à un groupe
social, à savoir une famille composée de deux enfants mineurs
élevés uniquement par leur mère qui souffre de troubles
mentaux graves, dans un pays où sévissent des problèmes
sociaux et économiques sérieux ayant des conséquences
néfastes sur les femmes et les enfants. La Section du statut de
réfugié a tenu compte des directives intitulées Les
enfants qui revendiquent le statut de réfugié : Questions
relatives à la preuve et à la procédure et aux directives
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
SSR
VA1-00226, 2 août 2001.
La revendicatrice, une Tamoule d'environ 25 ans, prétendait craindre
d'être persécutée par les TLET parce qu'elle avait
refusé de se joindre à eux et par l'armée sri-lankaise
parce que son père avait été forcé de collaborer
avec les TLET. Elle prétendait aussi craindre d'être persécutée
par un soldat sri-lankais qui avait menacé de la tuer si elle refusait
de vivre avec lui. La preuve de la revendicatrice contenait plusieurs
incohérences et invraisemblances. Malgré ces problèmes
de crédibilité, les aspects de sa preuve qui étaient
crédibles étayaient sa revendication. Il ressort de la preuve
documentaire que les TLET ont commis des violations graves des droits
de la personne. Par ailleurs, les mauvais traitements exercés contre
les détenus par les forces de sécurité ne sont pas
rares, et les détenues tamoules courent le risque d'être
violées. Il existait plus qu'une simple possibilité que
la revendicatrice soit persécutée en raison de son sexe
et de son origine ethnique. La revendicatrice n'avait pas de possibilité
de refuge intérieur (PRI)
à Colombo car les Tamouls sont souvent sommés de s'identifier,
et il existe une preuve abondante des mauvais traitements subis par les
femmes détenues à Colombo.
SSR
MA1-00109, 16 avril 2002.
La revendicatrice craignait d'être persécutée en raison
de la sa nationalité gitane et de son appartenance au groupe social
des femmes. Elle aurait perdu son emploi après avoir rejeté
des avances sexuelles de son employeur. De plus, elle aurait été
victime d'agressions physiques de la part de skinheads ayant conduit à
un avortement. Le tribunal était d'avis que malgré l'existence
en Hongrie d'institutions judiciaires et policières ayant vocation
de protéger ses citoyens et les efforts du gouvernement en matière
d'amélioration des droits humains reconnus par la communauté
internationale, étant donné que la revendicatrice appartenait
à un groupe ciblé par une culture de discrimination profondément
enracinée dans la société, les incidents qu'elle
avait vécus, pris cumulativement, équivalaient à
de la persécution. Par ailleurs, la perception que la revendicatrice
avait de la police comme corps pro-hongrois ethnique justifiait sa crainte
de recherche d'une quelconque protection auprès d'elle. Le tribunal,
s'étant référé aux directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, conclut
que la revendicatrice était une réfugiée au sens
de la Convention.
4. Opinions politiques
SSR
T93-06593, 9 mai 1994.
La revendicatrice a été incarcérée plusieurs
fois pour avoir refusé de participer à des manifestations
en faveur de Khomeini, pour son association à un groupe pro-monarchiste
et pour des infractions au code vestimentaire. De plus, elle a reçu
50 coups de fouet lorsque la force révolutionnaire l'a vue seule,
sans accompagnateur, avec un ami. Le tribunal a conclu que la revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée du fait de
ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social
(c'est-à-dire les femmes). Pour rendre sa décision, le tribunal
a tenu compte des directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe. Bien que le tribunal
ait d'abord eu de graves inquiétudes quant à la façon
dont la revendicatrice présentait son témoignage, il a conclu,
d'après les réponses qu'elle a données, qu'elle n'était
pas un témoin qui essayait d'être vague, mais qu'elle avait
plutôt du mal à se concentrer et qu'elle était mentalement
perturbée du fait des mauvais traitements subis en Iran. Une évaluation
psychiatrique, demandée par le tribunal, a confirmé cet
état. Du fait de l'incapacité de la revendicatrice à
témoigner de façon cohérente, le tribunal s'est surtout
fondé sur les renseignements contenus dans le Formulaire de renseignements
personnels de celle-ci et les rapports médicaux et psychiatriques
pour tirer ses conclusions quant à la preuve.
SSR
A99-00401, 10 octobre 1999.
La revendicatrice était la fille d'un ancien dirigeant du MDN,
un parti de droite qui aurait eu des liens avec les anciens gouvernements
militaires de Haïti. Elle était une proche collaboratrice
de son père dans le cadre du travail de ce dernier et travaillait
dans l'organisation. La Section du statut de réfugié a estimé
qu'il existait plus qu'une simple possibilité que la revendicatrice
soit persécutée à Haïti par des représentants
du gouvernement en raison de ses opinions politiques et de son appartenance
à un groupe social, à savoir sa famille. Il était
impossible de se fier à la police et aux juges. La revendicatrice
était une jeune femme susceptible de rencontrer les problèmes
particuliers auxquels sont confrontées les femmes placées
en détention. La Section du statut de réfugié a pris
en considération les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe pour conclure que la
revendicatrice était une réfugiée au sens de la Convention.
SSR
MA0-04502 et al., 5 décembre 2000.
La revendicatrice principale craignait d'être persécutée
en raison de son sexe, de ses opinions politiques et de son appartenance
à un groupe social. Elle affirmait avoir tenté de mettre
sur pied un syndicat pour venir en aide aux femmes victimes d'abus de
pouvoir de la part du personnel en charge et des propriétaires
de l'entreprise où elle travaillait. Par la suite, la revendicatrice
aurait été, entre autres, agressée sexuellement par
trois inconnus qui lui auraient laissé entendre que ce n'était
qu'un début. Elle avait aussi reçu des menaces visant sa
fille. La revendicatrice s'était plainte à la police, leur
racontant son histoire et les raisons pour lesquelles elle avait été
menacée et agressée. La police ne lui avait pas donné
de leurs nouvelles. La preuve documentaire indiquait que bien que le gouvernement
uruguayen semblait avoir fait des efforts significatifs pour venir en
aide aux femmes victimes de violence, la violence contre les femmes continuait
à être un problème sérieux. Le tribunal a tenu
compte des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et a conclu que les revendicatrices étaient
des réfugiées au sens de la Convention.
SSR
TA0-01062, 1er mars 2001.
La revendicatrice était membre du Front civique uni (CUF). À
cause de ses activités de promotion du CUF auprès des femmes
de Zanzibar, elle a été interrogée et détenue
pendant des périodes de deux semaines et de dix jours, pendant
lesquelles elle a subi des humiliations équivalant à des
agressions sexuelles. Elle a perdu son emploi à deux occasions,
et la police a fouillé sa maison à plusieurs reprises. La
revendicatrice s'est réfugiée dans le nord de Zanzibar et
en Tanzanie continentale. La Section du statut de réfugié
a pris en considération les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe ainsi qu'un
rapport psychologique indiquant que la revendicatrice souffrait d'une
grave dépression. La preuve documentaire corroborait son témoignage
selon lequel les membres du CUF sont harcelés et détenus
arbitrairement et étayait sa prétention selon laquelle la
police de Zanzibar et de la Tanzanie était une seule et même
police et que la police tanzanienne serait obligée de donner suite
à tout instrument juridique délivré par la police
de Zanzibar. La revendicatrice était une activiste du CUF relativement
connue dans sa communauté. Il n'existait pas de possibilité
de refuge intérieur dans son cas (PRI).
Kaur, Biba c. Canada (Ministre de
la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-305-96, Jerome, 17 janvier 1997.
La revendicatrice, membre du Parti d'action démocratique (PAD),
fondait sa revendication du statut de réfugié au sens de
la Convention sur sa crainte de persécution du fait de ses opinions
politiques. Elle a été détenue pendant de brèves
périodes en août et en décembre 1988. En avril 1989,
elle a été détenue, violée et sauvagement
battue par trois ou quatre policiers. La Section du statut de réfugié
a conclu que le viol était un acte de violence gratuit sans lien
avec la définition de réfugié au sens de la Convention.
La Cour a jugé que le tribunal s'était trompé dans
sa conclusion, étant donné que la preuve indiquait que la
revendicatrice avait été détenue en raison de son
appartenance au PAD et qu'elle avait été recherchée
activement par la police à plusieurs reprises. Si le viol avait
eu lieu indépendamment de manifestations ou d'activités
politiques, la conclusion du tribunal aurait été appropriée.
Mais la revendicatrice a été interrogée sur ses activités
politiques et violée pendant qu'elle était détenue.
Le viol était une conséquence directe de sa détention
pour des raisons politiques. La demande a été accueillie.
(Décision de la SSR
U93-02012, 13 août 1993).
III. APPARTENANCE À UN GROUPE SOCIAL
1) Les groupes définis par une caractéristique
innée ou immuable (p. ex. sexe, antécédents linguistiques
et orientation sexuelle);
Orientation sexuelle
SSR
T94-07129, 14 août 1995.
La revendicatrice, qui est citoyenne du Venezuela, était transsexuelle.
Elle était née homme, mais elle prétendait que son
identité sexuelle était celle d'une femme. Elle s'était
fait implanter des prothèses mammaires et avait suivi des traitements
hormonaux; elle recevait en outre de l'aide psychologique pour la préparer
à un changement de sexe. Parce qu'elle était transsexuelle,
elle avait été battue par sa famille et des policiers l'avaient
agressée sexuellement dès l'âge de 13 ans, l'avaient
emprisonnée, battue et obligée à verser la moitié
de ses revenus pour qu'ils assurent sa protection. Lorsqu'elle a dit à
un policier qu'elle projetait de quitter le Venezuela en raison de la
manière dont elle était traitée, son domicile a été
rasé par le feu. La Section du statut de réfugié
a conclu que l'identité sexuelle de la revendicatrice était
celle d'une femme, que son orientation sexuelle la portait vers les hommes
et que ces deux caractéristiques étaient innées et
immuables. Par conséquent, la Section du statut de réfugié
a statué que les transsexuels constituaient un groupe social. Elle
a fait remarquer que la revendicatrice serait également considérée
comme un homosexuel au Venezuela. La preuve documentaire examinée
par la Section du statut de réfugié décrit une société
hostile aux homosexuels et encore plus hostile aux travestis et aux transsexuels.
La Section du statut de réfugié a estimé que la preuve
documentaire corroborait le témoignage de la revendicatrice qui
a déclaré que la police ne prenait pas au sérieux
les plaintes portées par les transsexuels et les homosexuels, et
qu'elle n'essayait même pas véritablement d'assurer une protection
aux homosexuels. En fait, les agents de persécution étaient
souvent les autorités de l'État. Il a été
jugé que la revendicatrice avait réussi à réfuter
la présomption de la protection de l'État. La Section du
statut de réfugié a conclu que la revendicatrice craignait
avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance
à un groupe social.
SSR
T97-03671, 29 juillet 1999.
La revendicatrice fondait sa revendication sur une crainte d'être
persécutée du fait de son appartenance à un groupe
social : les lesbiennes. Elle prétendait qu'elle et sa petite amie
avaient été harcelées par des voisins, violées
par des collègues de travail de sexe masculin et détenues,
battues et violées par des agents de police, qui avaient également
tenté de leur soutirer de l'argent. Sa petite amie avait disparue,
et la revendicatrice a appris par la suite qu'elle était morte
à l'hôpital. La Section du statut de réfugié
a conclu que même s'il y avait certains problèmes, elle était
dans l'ensemble un témoin digne de foi. Dans son examen de la revendication,
la Section du statut de réfugié s'est reportée aux
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Même s'il existe des mesures de sauvegarde
en Argentine pour protéger les minorités sexuelles, les
mauvais traitements de la part de la police, y compris la torture, se
poursuivent. Le viol de la revendicatrice par la police est un acte de
persécution. Il y avait plus qu'une simple possibilité que
la revendicatrice subirait un préjudice en raison de son orientation
sexuelle si elle devait retourner en Argentine.
SSR
VA0-01624 et al., 8 mars 2001.
Les revendicatrices prétendaient craindre d'être persécutées
du fait de leur appartenance à un groupe social, les partenaires
lesbiennes victimes de violence familiale. La revendicatrice principale
était divorcée. Quand son ex-mari a découvert qu'elle
avait une liaison amoureuse avec l'autre revendicatrice, cette dernière
a été agressée par deux hommes dans sa maison. Elle
a signalé l'incident à la police, qui a refusé de
l'aider à cause de son orientation sexuelle. Les deux revendicatrices
ont ensuite été attaquées violemment chez elles par
des policiers engagés par l'ex-mari de la revendicatrice principale.
La Section du statut de réfugié a estimé que les
revendicatrices avaient été persécutées dans
le passé, qu'elles le seraient probablement de nouveau dans l'avenir
et qu'elles ne pouvaient pas bénéficier de la protection
de l'État puisque les agents de persécution étaient
des policiers. Elles n'avaient pas une possibilité de refuge intérieur
(PRI)
car l'ex-mari de la revendicatrice principale n'accepterait pas que la
mère de son enfant vive ouvertement avec une autre lesbienne en
quelque endroit que ce soit au Mexique. La revendicatrice principale avait
indiqué dans son témoignage qu'elle demanderait la garde
légale de son enfant si elle retournait au Mexique, ce qui attirerait
sur elle l'attention des agents de persécution. La Section du statut
de réfugié a aussi fait remarquer que les revendicatrices
avaient tenté de se réinstaller ailleurs au Mexique, mais
que les agents de persécution s'étaient lancés à
leur recherche. Elle a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
SSR
AA0-01226 et al., 19 mars 2001.
La revendicatrice principale et son amie craignaient d'être agressées
par l'ex-mari de la revendicatrice principale, un homme violent. Elles
se sont adressées à la police à une occasion lorsque
l'ex-mari les a menacées. La police les a battues après
avoir appris de l'ex-mari qu'elles étaient lesbiennes. Elles ont
porté plainte auprès du bureau du procureur de l'État,
où on leur a dit que leur plainte ne justifiait pas une enquête
car il s'agissait d'une dispute conjugale. La revendicatrice principale
a déjà été hospitalisée après
avoir été battue par son ex-mari. La Section du statut de
réfugié a fait remarquer que la violence familiale est toujours
un problème majeur en Russie et que les victimes peuvent rarement
bénéficier de la protection de l'État. L'ex-mari
avait des relations au sein de la police et pourrait retrouver les revendicatrices
partout en Russie. Il ressort également de la preuve documentaire
que des homosexuels sont attaqués ou tués en raison de leur
orientation sexuelle et qu'ils sont réticents à signaler
les crimes. Le commissaire dissident a jugé que les revendicatrices
n'étaient pas crédibles en raison des invraisemblances inexpliquées
contenues dans leurs témoignages. Il était également
d'avis qu'elles avaient une PRI
en Russie.
Famille
SSR
U92-08151 et al., 2 septembre 1993.
Les demandeurs, une mère et ses quatre enfants mineurs, étaient
tous citoyens iraniens. Comme l'on avait soupçonné le père
d'appuyer les moudjahidin, la mère avait été gardée
en détention pendant une brève période, isolée
dans une cellule et interrogée sur les allées et venues
de son époux. Son père et son frère avaient été
gardés en détention pendant une courte période pour
les mêmes raisons. Le tribunal a rejeté les allégations
de l'intéressée qui disait que la crainte qu'elle éprouvait
était justifiée parce qu'on la soupçonnait elle-même
d'appuyer les moudjahidin; il a toutefois conclu que l'intéressée,
en tant que membre d'un certain groupe social, soit les Iraniennes mariées
à des hommes soupçonnés d'appuyer les moudjahidin,
faisait face à une possibilité sérieuse de persécution.
La preuve documentaire a confirmé que les autorités gardent
en détention et menacent les parents d'Iraniens qui fuient la persécution.
En analysant l'expression « certain groupe social »,
le tribunal a fait sienne la proposition exposée dans les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, qui reconnaissent les cas de « persécution
de la parenté », où les femmes craignent d'être
persécutées pour des raisons uniquement liées aux
activités de leurs conjoints. Le statut de réfugié
au sens de la Convention a été reconnu aux demandeurs.
SSR
M96-09149 et al., 16 juin 1998.
Une mère et son fils ont revendiqué le statut de réfugié.
Le tribunal a jugé que le fils de la revendicatrice n'était
pas crédible, et donc, il n'était pas un réfugié.
La revendicatrice alléguait qu'à la suite de la visite de
sa fille durant une semaine dans le pays après un an d'exile au
Canada, elle avait été sauvagement battue et volée
par des hommes armés qui cherchaient sa fille. La revendicatrice,
âgée de 76 ans, craignant pour sa vie, avait décidé
de quitter le pays pour se prévaloir de la protection du Canada.
Le tribunal a tenu compte des directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe et a conclu que: «
l'intention de ces Directives est d'ouvrir l'acception de
» l'appartenance à un groupe social « à
ces personnes dont les droits fondamentaux sont menacés, à
cause d'une caractéristique innée ou immuable qui les rend
vulnérables, là où l'appareil étatique est
inefficace pour leur offrir protection. » Selon le tribunal,
considérant, entre autres, son âge et sa vulnérabilité,
la revendicatrice avait raison de craindre des atteintes sérieuses
à ses droits de la part des individus qui pourraient être
des ennemis politiques de sa fille, sans qu'elle puisse compter sur une
protection efficace des autorités haïtiennes.
2) Les groupes dont les membres s'associent
volontairement pour des raisons si essentielles à leur dignité
humaine qu'ils ne devraient pas être contraints à renoncer
à cette association (défenseurs des droits de la personne);
SSR
M93-08606, 22 mai 1996.
La revendicatrice était victime de violence physique et psychologique
de la part de son mari. Instruite et émancipée, elle croyait
fermement en la dignité des femmes et en leurs droits, croyances
qui entraient en contradiction avec les traditions et les lois religieuses
de la Tanzanie. Elle est contre la polygamie et l'excision chez la femme.
D'après la preuve documentaire, la violence contre les femmes est
chose courante en Tanzanie, et les pressions culturelles, sociales et
familiales empêchent souvent les femmes de signaler les abus aux
autorités. On ne faisait pas respecter les lois qui auraient pu
protéger les femmes. La revendicatrice ne pouvait réclamer
la protection des autorités lorsque son mari abusait d'elle, parce
que celui-ci était le commissaire de district et le chef de la
police locale. La Section du statut de réfugié a jugé
que la revendicatrice appartenait au groupe social des femmes battues.
Étant donné son passé en matière d'abus, ses
opinions, ses études approfondies sur les droits de la femme, son
long séjour à l'Ouest et son refus de retourner en Tanzanie
pour continuer à travailler pour le gouvernement, elle serait en
danger si elle devait retourner dans son pays.
3) Les groupes associés par un ancien
statut volontaire immuable en raison de sa permanence historique (intentions
historiques et influences anti-discriminatoires).
GROUPE SOCIAL DÉFINI PAR LE SEXE
On reconnaît de plus en plus, à l'échelle
internationale, que les revendications de femmes qui craignent d'être
persécutées uniquement en raison de leur sexe sont fondées
sur le motif de l'appartenance à un groupe social, aux termes de
l'article 1 a, paragraphe 2, de la Convention des Nations Unies de
1951 relative au statut des réfugiés.
Application du motif prévu par la loi
Il convient d'évaluer l' « appartenance
à un groupe social » comme motif justifiant la crainte
de persécution fondée sur le sexe en tenant compte de
deux facteurs :
1. La plupart des femmes qui présentent
une revendication fondée sur le sexe craignent d'être persécutées
pour avoir transgressé des normes religieuses ou sociales. La
revendication peut donc être tranchée pour des motifs liés
à la religion ou aux opinions politiques.
Pour avoir transgressé les normes religieuses
ou sociales
SSR
T93-11934, 5 juillet 1994.
Le tribunal a jugé que l'intéressée, une chrétienne
âgée de 33 ans, craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un certain groupe social, celui des
« Syriennes appartenant à une famille arabe traditionnelle
». Les hommes de sa famille avaient fait le serment de l'assassiner
car, à leur avis, elle avait humilié et déshonoré
la famille; elle avait transgressé les normes culturelles de la
société syrienne. Elle avait commis diverses fautes, dont
celles d'épouser quelqu'un que sa famille n'approuvait pas et de
rencontrer en privé un homme qui n'était pas de la famille.
Le tribunal a statué que l'intéressée avait confirmé
de manière claire et convaincante que l'État ne la protégerait
pas advenant son retour en Syrie. En évaluant la crédibilité
de l'intéressée, le tribunal a accepté l'explication
qu'elle avait donnée pour avoir omis certains détails importants
dans son Formulaire de renseignements personnels. Appliquant les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, le tribunal a fait remarquer qu'il était
nécessaire d'être attentif aux problèmes particuliers
auxquels sont confrontées les femmes qui sont appelées à
présenter leurs arguments aux audiences relatives à la détermination
du statut de réfugié, notamment lorsqu'elles ont vécu
des situations dont elles ont de la difficulté à parler.
SSR
T93-11857 et al., 18 octobre 1994.
Les revendicateurs avaient peur du père de la revendicatrice, un
officier influent et haut placé dans l'espionnage syrien. La revendicatrice,
citoyenne de Syrie, avait subi, pendant des années, des abus physiques
et sexuels de sa part. Elle l'avait défié en épousant
le revendicateur, un libanais musulman chiite (la famille de la revendicatrice
était sunnite et son père détestait les Chiites).
Elle avait peur que son père ne les tue, elle et son mari, parce
qu'elle avait déshonoré sa famille par ses actes d'insoumission.
S'appuyant sur les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe, le tribunal a conclu
que la revendicatrice entrait dans la catégorie des « femmes
qui craignent d'être persécutées pour avoir violé
certaines coutumes, lois et pratiques religieuses discriminatoires à
l'endroit des femmes dans leur pays d'origine. » Il a conclu que,
d'après les normes culturelles acceptées qui dictent la
vie des femmes en Syrie, l'État ne lui accorderait aucune protection.
Sa crainte d'être persécutée se fondait sur son appartenance
à un groupe social défini par le sexe, les femmes syriennes.
Comme l'influence de son père s'étendait aussi au Liban,
le revendicateur craignait, avec raison, d'être persécuté
s'il retournait dans ce pays.
SSR
T94-04946 et al., 11 avril 1995.
La revendicatrice, citoyenne de la Somalie, a été séparée
de son époux par la guerre dans ce pays. Sa belle-mère,
croyant l'époux de la revendicatrice décédé,
a contraint cette dernière à devenir la troisième
épouse de son beau-frère. Dans le nord de la Somalie, un
tribunal musulman a procédé à une « audience
», où la revendicatrice n'a pas été autorisée
à prendre la parole. Le tribunal a émis une déclaration
portant que le mariage entre la revendicatrice et son époux était
dissous et qu'elle devait épouser son beau-frère. Elle a
alors été amenée dans un hôtel et violée
à plusieurs reprises au cours des deux jours suivants. La Section
du statut de réfugié a conclu que la revendicatrice craignait
avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance
à un groupe social, celui des femmes qui ont transgressé
les mœurs sociales de la société dans laquelle elles
vivent. La Section a fait référence à des éléments
de preuve documentaires indiquant ce qui suit: que les femmes sont traitées
durement dans la société somalienne, qu'en Somalie, le fait
de se marier au frère de son époux est une tradition culturelle
et que la direction de la république auto-proclamée de la
Somalie a adopté la « sharia », avec le résultat
que des femmes ont été fouettées pour avoir enfreint
des règles islamiques et lapidées pour prostitution et adultère.
La Section du statut de réfugié a fait référence
aussi aux directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe ainsi qu'à divers instruments internationaux
portant sur les droits de la personne notamment la Déclaration
des Nations Unies sur les femmes. La Section du statut de réfugié
a conclu que les actes commis par la revendicatrice en transgressant les
moeurs sociales de la Somalie l'exposeraient à un châtiment
sévère si elle retournait dans ce pays, y compris la poursuite
de la relation forcée avec son beau-frère.
SSR
T97-06758 et al., 23 février 1999.
La revendicatrice principale a été fiancée à
l'âge de dix ans. Les tentatives de sa famille pour mettre fin aux
fiançailles n'ont pas été acceptées par l'homme
auquel elle était fiancée. Il a fait plusieurs tentatives,
accompagnées de violence, pour enlever la revendicatrice principale.
Il a brutalement battu son père, aidé de deux membres de
la police secrète sur lesquels il avait prise en raison de son
soutien financier au Parti socialiste au pouvoir. Selon la preuve documentaire,
les jeunes filles et les femmes se font couramment enlever en Albanie
et la police participe à ces enlèvements. D'après
le Kanun de Lek, une femme doit épouser l'homme avec lequel elle
est fiancée. Si les fiançailles sont rompues, le parti du
futur marié peut se venger sur la famille de la future mariée.
Les fiançailles forcées de la revendicatrice principale
à l'âge de dix ans étaient contraires à la
Déclaration universelle des droits de l'homme et au Pacte
international relatif aux droits civils et politiques. Elle n'avait
pas la protection de l'État. La revendicatrice principale craignait
avec raison d'être persécutée à titre de membre
d'un groupe social. La Section du statut de réfugié s'est
reportée à une catégorie de personnes établie
dans les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe : les femmes qui craignent d'être persécutées
pour avoir violé certaines coutumes, lois et pratiques religieuses
discriminatoires à l'endroit des femmes dans leur pays d'origine.
SSR
V96-02102 et al., 28 mai 1999.
La revendicatrice a été condamnée à subir
74 coups de fouet pour avoir contrevenu au code vestimentaire iranien.
Elle a évité les coups en achetant sa condamnation parce
qu'elle donnait encore le sein à son enfant (le revendicateur).
Son défaut de respecter le code vestimentaire a également
mené à son congédiement à la demande de la
direction de la moralité du Komiteh. Après la mort de son
mari, ses beaux-parents ont obtenu la garde de son fils en vertu du code
civil iranien. Elle a quitté l'Iran avec lui plutôt que de
renoncer à sa garde. Suivant le code civil, le grand-père
paternel d'un garçon peut revendiquer la garde lorsque l'enfant
atteint l'âge de sept ans. La Section du statut de réfugié
a conclu que le code civil portait atteinte aux droits de la personne
garantis aux veuves. Le fait de séparer une veuve de son enfant
constitue un traitement cruel et inusité, rend la loi d'application
générale draconienne et donne à celle-ci un caractère
de persécution. La revendicatrice craignait avec raison d'être
persécutée à titre de membre de deux groupes : les
femmes qui craignent, de la part des autorités publiques, la persécution
découlant de certains cas de discrimination grave fondée
sur le sexe et celles qui craignent la persécution dont elles pourraient
faire l'objet si elles omettent de respecter les lois et les pratiques
religieuses ou coutumières qui donnent lieu à de la discrimination
fondée sur le sexe. La Section du statut a cité les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe.
SSR
U97-03682, 18 septembre 1999.
La revendicatrice était un membre actif du National Conscience
Party. Elle a participé à un rassemblement de gens opposés
au gouvernement et a été arrêtée et battue
par la police. Pendant sa détention, elle a été torturée
et agressée sexuellement à plusieurs reprises par les gardes.
Vu le processus de démocratisation engagé au Nigeria, il
n'existait pas de possibilité sérieuse que la revendicatrice
soit persécutée du fait de ses opinions politiques. Cependant,
elle craignait avec raison d'être persécutée en raison
de son appartenance à un groupe social, à savoir les femmes
qui sont perçues comme ayant transgressé les normes de la
société [ou les normes culturelles]. Au Nigeria, les femmes
victimes de viol sont déshonorées, mises au ban de la société
et privées de tout soutien social. La revendicatrice a été
frappée d'ostracisme par sa famille et par son mari, qui lui a
défendu d'avoir des contacts avec ses enfants. Elle ne pourrait
pas obtenir la protection du gouvernement. La preuve documentaire indique
que le gouvernement tolère les pratiques religieuses et culturelles
qui sont préjudiciables aux Nigérianes. Subsidiairement,
le paragraphe 2(3) de la Loi sur l'immigration, qui concerne
les raisons impérieuses, s'appliquait. Le tribunal a tenu compte
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe pour rendre sa décision.
SSR
T99-10229 et al., 24 mai 2000.
La revendicatrice adulte a divorcé de son premier mari qui était
violent. Elle a envoyé leur fille à l'extérieur du
pays, par crainte. Lorsque son ancien mari, maintenant membre des Talibans,
a découvert que leur fille n'était plus là pour contracter
un mariage arrangé, il a battu la revendicatrice, il l'a menacée
et a arrêté son mari actuel. Il l'a également signalé
aux Talibans relativement à une autre affaire. Croyant que ce n'était
qu'une question de temps avant d'être arrêtée par les
Talibans ou tuée par son ancien mari, elle a quitté le pays
avec son fils mineur. Selon la preuve documentaire, les femmes font, sous
le régime des Talibans, l'objet d'une discrimination grave. À
titre de femme instruite qui enseignait aux filles et avait exercé
son indépendance en empêchant son ancien mari de choisir
un époux pour sa fille, la revendicatrice craignait avec raison
d'être persécutée aux mains des Talibans ou de son
ancien mari du fait de son appartenance à un groupe social et de
ses opinions politiques. Le revendicateur mineur faisait face à
une possibilité sérieuse de persécution du fait de
sa relation avec la revendicatrice. La Section du statut de réfugié
a examiné les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe.
Pepa, Arben c. Canada (Ministre de
la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3957-01), Rothstein, 31 juillet 2002; 2002 CFPI 834.
Le Kanun de Lek est une coutume traditionnelle de l'Albanie. Il régit
un certain nombre de choses, dont le mariage. Les revendicateurs se sont
mariés sans obtenir l'approbation des parents de la mariée
et sans fournir de dote. Par conséquent, la famille de la mariée
a menacé de tuer les revendicateurs. La SSR
a estimé que les revendicateurs étaient la cible d'une vendetta
privée – de la vengeance de la famille de la mariée.
(1) La SSR
n'a pas expliqué pourquoi, même si une personne est uniquement
la cible d'une vendetta privée, si la vendetta repose sur la race
de la victime ou tout autre motif au sens de la Convention, il demeure
possible que la victime ne relève pas de la définition de
réfugié au sens de la Convention. Il n'existe aucun principe
de droit qui prévoit que le fait d'être victime d'une vendetta
privée et le fait d'être réfugié au sens de
la Convention doivent nécessairement s'exclure. (2) La SSR
a estimé que les revendicateurs n'appartenaient pas à un
groupe possédant une caractéristique innée ou immuable.
Pour en arriver à cette conclusion, la SSR
n'a tenu compte que de la famille de la mariée qui, souligne-t-elle,
pouvait assister au mariage. La SSR
s'est concentrée, à tort, sur les agresseurs, plutôt
que sur les victimes. (3) En outre, la SSR
aurait dû évaluer si, dans ce cas, l'association à
un groupe, quoique volontaire, est inaltérable en raison de la
permanence historique, c'est-à-dire que le mariage a eu lieu sans
l'approbation des parents et constituait donc un fait inaltérable.
(4) La Cour a souligné que la SSR,
au moment de la nouvelle audience, devra examiner un certain nombre d'autres
questions de droit ainsi que d'autres questions de fait, de droit et de
crédibilité. Demande accueillie. (Décision de la
SSR
CA0-00540, 1er août 2001).
2. Pour qu'une femme puisse établir qu'elle craint
avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance
à un groupe social donné défini par le sexe et
correspondant à la première catégorie établie
dans Ward (c.-à-d. Les groupes définis par une
caractéristique innée ou immuable) :
- Le fait que le groupe social en question se compose
d'un nombre élevé d'habitantes du pays concerné
n'est pas pertinent; la race, la religion, la nationalité et
les opinions politiques sont aussi des caractéristiques que
partagent un grand nombre de gens.
- Le sexe est une caractéristique innée.
Il faut déterminer si la revendicatrice, en tant que femme,
craint avec raison d'être persécutée dans son
pays de nationalité du fait de son appartenance à ce
groupe.
Narvaez c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] 2 C.F.
55 (1re inst.).
La revendicatrice craignait d'être brutalisée par son ex-mari
si elle devait retourner en Équateur. La seule fois où elle
a demandé la protection de la police, pendant les sept ans qu'ont
duré les abus, les policiers ne sont arrivés chez elle que
bien après son appel et sa plainte a été biffée
dans le registre policier. La Cour a annulé la décision
de la Section du statut de réfugié au fondement qu'elle
n'avait pas traité adéquatement de l' « appartenance
au groupe social ». La Cour a examiné l'arrêt Canada
(Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689 et les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Elle a conclu que « les femmes équatoriennes
victimes de violence familiale appartiennent à un groupe social
». En outre, la Section du statut de réfugié n'a pas
tenu compte de la façon dont les policiers traitaient les femmes
victimes de violence familiale en Équateur. L'expérience
antérieure de la revendicatrice et de femmes dans la même
situation étaient des preuves du manque de protection offert à
ces femmes. De l'avis de la Cour, le fait que la revendicatrice soit maintenant
divorcée n'aurait pas d'effet sensible sur l'ampleur de la protection
offerte par la police. La demande est accueillie. (Décision de
la SSR
U93-10881, 19 juillet 1994).
- Il peut également être conclu dans les
cas de persécution fondée sur le sexe que les groupes
sociaux comportent des sous-groupes de femmes. (p. ex. âge,
race, situation de famille et situation économique)
Situation de famille
SSR
T92-09592, 14 septembre 1993.
L'intéressée était une femme de 36 ans qui, d'après
le tribunal, avait subi pendant des années des sévices cruels,
inhumains et dégradants aux mains de son ex-époux. Ce dernier
avait travaillé auprès du ministère de l'Intérieur
et, à l'époque de l'audience, il était au service
de la police. Le couple s'était séparé en 1975, mais
l'époux avait exercé des sévices contre l'intéressée
jusqu'à ce qu'elle se réfugie au Canada en 1992. Lorsque
l'intéressée s'était adressée aux autorités
bulgares, ces dernières ne l'avaient pas protégée
car il s'agissait, selon elles, d'une affaire de nature conjugale. L'intéressée
croyait qu'on ne l'aiderait pas à cause des liens étroits
que son ex-époux entretenait avec les services de sécurité
de l'État. En étudiant la revendication, le tribunal s'est
reporté à maintes reprises aux directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. Le tribunal
a jugé que l'intéressée avait subi de graves préjudices,
dont sont surtout victimes les femmes dans un milieu qui ne leur accorde
aucune protection. Il a été déterminé que,
par rapport aux femmes bulgares ordinaires, victimes de sévices
de la part de leur époux, la situation dans laquelle se trouvait
l'intéressée était différente et bien plus
difficile; l'intéressée était plus vulnérable
en raison des liens que son ex-époux entretenait avec le gouvernement.
Par ailleurs, le tribunal a conclu qu'en raison du comportement passé
de l'ex-époux de l'intéressée, il y avait plus qu'une
simple possibilité que ce dernier s'en prenne à elle si
elle retournait dans son pays; cela empêchait toute possibilité
de refuge ailleurs dans le même pays. Le tribunal a jugé
que l'intéressée appartenait au groupe social particulier
des femmes bulgares susceptibles d'être victimes de sévices
de la part d'hommes ayant de l'influence au gouvernement. Le statut de
réfugié au sens de la Convention lui a été
reconnu.
SSR
T93-04176 et al., 7 décembre 1993.
En étudiant la revendication du statut de réfugié
au sens de la Convention présentée par une veuve et ses
trois enfants mineurs, la Section du statut de réfugié a
été convaincue par les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe qu'une Tajik,
une musulmane insoumise, influencée par des idées occidentales
susceptibles d'être perçues comme contraires à l'objectif
de l'État, ayant des enfants mineurs et privée de toute
source de protection masculine, au sein d'une société qui
exige une telle protection, aura des motifs valables de craindre d'être
persécutée si elle est renvoyée dans un milieu où
sa protection est, dans le meilleur des cas, incertaine, vu l'instabilité
de la situation politique et les graves violations des droits de la personne
qui règnent dans ce pays. La Section du statut de réfugié
a déterminé que l'intéressée adulte appartenait
à un certain groupe social, celui des femmes tajik occidentalisées
vivant dans une société s'orientant vers l'orthodoxie islamique
et privée de toute protection masculine. En arrivant à sa
décision, la Section du statut de réfugié a pris
en considération le raisonnement exposé dans la décision
SSR
U92-03400 (13 août 1992), où le tribunal a conclu que, dans
une société comme l'Afghanistan, où il est nécessaire
de bénéficier de la protection d'un homme, une femme qui
est privée de la protection d'un parent masculin s'expose à
des risques.
SSR
U94-03497 et al., 20 avril 1995.
Après avoir été victime pendant plusieurs années
de violence conjugale au Bangladesh, en Arabie saoudite et aux États-Unis,
l'intéressée principale a divorcé d'avec son premier
époux et s'est remariée. Son premier époux était
membre d'une famille musulmane fondamentaliste, influente et fortunée
au Bangladesh. Grâce à ses contacts familiaux, il était
parvenu à poursuivre en justice avec succès l'intéressée
principale et son second époux sous de fausses accusations d'enlèvement
d'enfant, devant les tribunaux criminels du Bangladesh, et, grâce
à ses contacts politiques et religieux, il était parvenu
à faire pression sur les autorités saoudiennes pour qu'elles
cherchent à arrêter le couple. Le tribunal a statué
qu'étant donné que l'intéressée principale
était une « femme du Bangladesh, mariée antérieurement
à un homme d'influence », sa revendication était fondée
sur le sexe. Elle appartenait donc à un groupe social, d'après
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe; de plus, l'affaire tombait dans la catégorie
des caractéristiques innées ou immuables mentionnée
dans l'arrêt Canada (P.G.) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689. Son second époux, ainsi que la fille qu'elle avait eue de
son premier époux, ont été reconnus comme membres
du groupe social composé de sa famille.
SSR
U97-03981, 2 décembre 1998.
La revendicatrice était une jeune femme qui n'avait pas de parents
avec qui elle aurait pu vivre en Inde. Elle affirmait que, sans protection,
elle pouvait être la cible d'enlèvements, d'agression sexuelles
et de violations des droits de la personne. La preuve documentaire appuyait
cette assertion et indiquait que les cas signalés de violence contre
les femmes sont à la hausse en Inde et que l'esclavage des femmes
et la prostitution forcée sont des phénomènes répandus
dans certaines tranches de la société. La tradition des
Satis ne permet pas à une veuve de bien s'alimenter, de porter
de bons vêtements et de dormir dans un lit. Les veuves sont censées
tolérer les avances de tous les hommes de leur famille. Il est
difficile pour les femmes célibataires de se trouver un logement.
En tant que jeune veuve, la revendicatrice serait, sans la protection
d'un homme, la cible d'agressions sexuelles et de violations de ses droits
de la personne et serait privée de son droit de gagner sa vie et
de vivre seule. Elle serait également victime d'ostracisme social
et serait la victime de traditions solidement enracinées qui considèrent
les veuves comme une malédiction. Elle avait de bonnes raisons
de craindre d'être persécutée du fait de son appartenance
à un groupe social, celui des jeunes veuves qui ne bénéficient
pas de la protection d'un homme. La Section du statut de réfugié
a cité les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe.
SSR
T93-12736 et al., 26 avril 1994.
L'intéressée a quitté son époux, un membre
du Service de sécurité de l'État (SIDE), qui s'est
servi de la position qu'il occupait pour faire annuler une ordonnance
de garde concernant les enfants plus âgés du couple. Devant
les efforts que faisait l'intéressée pour récupérer
la garde de ses enfants, cet homme a soumis son épouse et ses enfants
plus jeunes - les demandeurs mineurs - à de graves menaces, dont
des menaces de mort. De plus, en 1989, l'intéressée a été
victime d'une agression sexuelle de la part d'agents armés au service
de son époux. Elle n'a pu obtenir une protection de la police ou
de groupes non gouvernementaux parce que son époux appartenait
au SIDE. En évaluant les revendications, le tribunal a tenu compte
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. De plus, il a tenu compte des dispositions de
la Convention contre la torture et autres peines aux traitements cruels,
inhumains ou dégradants ainsi que de la Convention sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard
des femmes. Compte tenu des persécutions dont l'intéressée
avait été victime dans le passé ainsi que de son
incapacité de jouir de la protection de l'État, le tribunal
a conclu qu'elle craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son sexe, en tant qu'épouse d'un homme influent au sein
du puissant appareil de sécurité de l'État. Les revendications
des demandeurs mineurs ont été fondées sur la relation
de ces derniers avec leur mère.
SSR
V95-00374, 21 novembre 1996.
Le père de la revendicatrice avait organisé le mariage de
cette dernière avec un musulman plus âgé qu'elle,
la conversion à l'Islam de la revendicatrice, qui était
chrétienne, ainsi que son excision avant le mariage. Lorsque la
revendicatrice s'était opposée au mariage, son père
l'avait battue. La Section du statut de réfugié a jugé
que la revendicatrice appartenait à un groupe social, à
savoir, les femmes ghanéennes contraintes au mariage forcé.
Elle risquait d'être persécutée sous la forme de mutilation
sexuelle et de conversion forcée. Si le gouvernement du Ghana décourageait
l'excision des femmes, il ne l'avait pas rendue illégale. De plus,
la police n'intervenait normalement pas dans les querelles familiales.
La revendicatrice n'aurait pas bénéficié d'une protection
convenable de l'État. Le fait que la revendicatrice se soit mariée
au Canada après avoir présenté sa revendication du
statut de réfugié n'éliminait pas le fondement objectif
de sa crainte de persécution, car il n'était pas invraisemblable
que son père la force quand même à épouser
l'homme qu'il lui avait choisi, ou qu'il la blesse ou la tue si ce dernier
se désistait.
SSR
V98-02797, 10 janvier 2000.
La revendicatrice prétendait avoir été agressée
par son ancien conjoint de fait, un citoyen canadien, qui exerçait
un contrôle sur elle en la menaçant de lui enlever ses enfants
si elle ne lui obéissait pas. Elle craignait d'être persécutée
en raison de son appartenance à un groupe social, les femmes qui
sont victimes de violence familiale en Hongrie. Selon la preuve documentaire,
un quart de la population hongroise grandit dans une famille où
la menace de violence physique est une réalité quotidienne.
La Section du statut de réfugié a fait référence
aux directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Selon un criminaliste hongrois, environ 50 femmes
meurent chaque année des mauvais traitements infligés par
leur conjoint. La revendication avait un fondement objectif solide. Des
éléments de preuve convaincants de l'incapacité de
la Hongrie de protéger les victimes de violence conjugale ont été
produits. Il n'existe aucune loi particulière visant la violence
familiale. La police et les autorités de protection de l'enfance
considèrent souvent que le fait de mener des enquêtes dans
des cas de violence familiale constitue une intrusion dans la vie privée
d'une famille. Le nombre de refuges est extrêmement limité.
Vu que le couple restera lié à cause des enfants, l'ex-conjoint
de la revendicatrice voudra toujours connaître l'endroit où
celle-ci vit et sera en mesure de la retrouver. La revendicatrice n'avait
pas de possibilité de refuge intérieur (PRI)
en Hongrie.
SSR
VA0-02616, 8 février 2001.
La revendicatrice prétendait craindre d'être persécutée
du fait de son sexe et de son appartenance à un groupe social,
les femmes obèses. Elle s'était vu refuser de l'avancement
et avait perdu des chances en matière d'emploi à cause de
son obésité. Il ressortait cependant de son témoignage
qu'elle n'avait eu aucune difficulté à se trouver un emploi
au Mexique, bien qu'elle ait été incapable de dénicher
un poste permanent qui lui aurait permis de travailler auprès du
public et qui l'aurait contentée. La Section du statut de réfugié
a conclu que la revendicatrice avait été victime de discrimination
à de nombreuses reprises, mais que cette discrimination n'équivalait
pas, même considérée cumulativement, à de la
persécution. Elle a pris en considération les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, en particulier en ce qui concerne la persécution
liée à des actes discriminatoires. La Section du statut
de réfugié a aussi fait remarquer que rien dans la preuve
ne permettait de croire qu'au Mexique les hommes obèses ne seraient
pas l'objet d'une discrimination similaire s'ils voulaient occuper des
postes où ils doivent traiter directement avec le public.
SSR
A99-01089, 22 mars 2001.
La revendicatrice prétendait qu'elle avait organisé des
activités pour les jeunes à Bogota, que des recruteurs avaient
tenté d'amener certains jeunes à se joindre à une
organisation paramilitaire et qu'elle avait essayé de convaincre
un jeune garçon de ne pas joindre les rangs de cette organisation.
Après que le garçon eut été retrouvé
mort le lendemain, et les recruteurs ont menacé la revendicatrice
et l'ont violée. La Section du statut a pris en considération
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et a décidé que la revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée.
SSR
VA0-00225, 20 avril 2001.
La revendicatrice prétendait craindre avec raison d'être
persécutée en Inde du fait de son appartenance à
un groupe social : les femmes divorcées. Elle faisait valoir qu'elle
serait victime de discrimination dans l'emploi et dans le logement et
que des hommes lui feraient des avances indésirables. Il ressortait
de la preuve documentaire que le divorce n'est toujours pas accepté
pour les femmes en Inde et que les femmes divorcées sont souvent
frappées d'ostracisme par leur collectivité et même
par leur famille. Toutefois, les difficultés vécues dans
le passé par la revendicatrice, lesquelles expliquaient sa crainte,
constituaient de la discrimination et non de la persécution. Le
fait d'être une femme divorcée ne la priverait pas de son
droit de travailler comme infirmière, de pratiquer sa religion
et de suivre des cours dans des établissements d'enseignement normalement
accessibles. Bien qu'elle ait eu de la difficulté à louer
une chambre et qu'elle ait dû à subir les avances indésirables
de deux hommes qui pensaient qu'elle succomberait facilement, ces incidents
étaient de nature discriminatoire et n'équivalaient pas,
si on les considérait cumulativement, à de la persécution.
La Section du statut de réfugié a consulté les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, mais a décidé qu'elles ne s'appliquaient
pas en l'espèce. En outre, la revendicatrice n'a pas réfuté
la présomption relative à la protection de l'État.
SSR
MA1-03752 et al., 4 janvier 2002.
La revendicatrice principale alléguait une crainte bien fondée
de persécution en raison de son appartenance à un groupe
social, celui des femmes. Son fils mineur basait sa revendication sur
celle de sa mère en tant que membre de la famille. La revendicatrice
était violentée par son conjoint qui était un officier
de haut rang dans la police. Celui-ci l'aurait battue et menacée
de mort avec un pistolet à plusieurs reprises devant le fils de
la revendicatrice qu'il menaçait également de tuer. Elle
se serait enfuie à plusieurs reprises,mais son ami l'aurait trouvée.
La revendicatrice n'avait pas porté plainte contre les agissements
de son conjoint à cause de son rang et influence dans la police.
Le tribunal était d'avis que la revendicatrice était crédible.
Selon la preuve documentaire, il existait une loi pour protéger
les victimes de violence conjugale, mais elle était inefficace,
car les policiers refusaient de recevoir les plaintes faites par les femmes
victimes et la majorité des juges ignoraient le contenu de cette
loi ou préféraient l'ignorer. Le tribunal a considéré
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et conclut que les revendicateurs étaient
des réfugiés au sens de la Convention.
Dhaliwal, Jaswinder Kaur c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4787-01), Kelen, 11 septembre 2002; 2002 CFPI 965.
La SSR
a déterminé que la requérante était victime
de violence physique et mentale horrible de la part de son mari. Toutefois,
la SSR
a enfreint les principes de justice naturelle lorsqu'elle a rejeté,
pour manque de crédibilité, le témoignage de la requérante,
selon lequel la violence avait continué après son divorce,
en 2000, en ce sens que la SSR
avait interrompu le témoignage de la requérante portant
sur la poursuite de la violence, parce qu'elle avait déterminé
que ce témoignage n'était pas nécessaire. De plus,
la Cour a statué que la décision de la SSR,
selon laquelle la requérante était un témoin crédible
quant à sa crainte de persécution jusqu'à la fin
de 1998, mais qu'elle n'était pas un témoin crédible
quant à sa crainte de persécution en 1999 et en 2000,
est irrationnelle. Demande accueillie.(Décision de la SSR
TA0-17763, 20 août 2001).
b. que cette crainte est fondée sur l'un
des motifs de la définition,
SSR
T93-00104 et al., 29 octobre 1993.
Les intéressés étaient originaires de l'Ukraine.
Il a été déterminé que l'intéressée
adulte, qui avait quitté le pays avant l'entrée en vigueur
des lois sur la citoyenneté, était apatride, l'Ukraine étant
son pays de résidence habituelle antérieure. Quant à
l'intéressée mineure, arrivée au Canada après
l'entrée en vigueur des lois, il a été déterminé
qu'elle était citoyenne de l'Ukraine. L'intéressée
adulte a déclaré avoir été harcelée
par les Communistes à cause des activités politiques qu'elle
menait pour le compte du Bloc démocratique. Elle avait aussi subi
d'horribles sévices, dont des viols brutaux, aux mains de son époux.
Le tribunal a statué que les Communistes contrôlaient peut-être
encore l'Ukraine, mais qu'il n'y avait aucune possibilité raisonnable
que l'intéressée adulte soit persécutée de
fait de ses opinions politiques. Quant à la crainte qu'inspirait
à l'intéressée son époux violent, le tribunal
a décrété que les coups, les agressions et les viols
constituaient indéniablement des actes de persécution, mais
que la question en cause consistait à savoir s'il existait un lien
avec l'un des motifs énoncés dans la définition.
Selon le conseil, le groupe social particulier auquel l'intéressée
adulte pouvait appartenir était les « Ukrainiennes victimes
de violence conjugale ou familiale en général, qui ne jouissent
pas d'une protection efficace en Ukraine ». Citant la décision
Canada (Procureur général) c. Ward [1993] 2 RCS
689, le tribunal a considéré que l'on ne pouvait désigner
le groupe social en invoquant une « victimisation par persécution
». Appliquant les critères énoncés dans la
décision Ward, le tribunal a jugé que a) le fait
d'être victime de violence conjugale n'avait rien d'inné
ou d'immuable; 2) l'intéressée n'était pas volontairement
associée à d'autres victimes de ce genre, et c) l'affaire
ne mettait pas en cause un état volontaire antérieur inaltérable.
Quant aux directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, le tribunal a répété que
l'on ne pouvait désigner le groupe social par la persécution
subie. Le tribunal ne s'est pas prononcé explicitement sur la question
de savoir si les « femmes » ou les « Ukrainiennes »
constituaient un certain groupe social, mais il a présumé,
à titre d'exemple, qu'elles pouvaient l'être. Le tribunal
a décrété qu'indépendamment de l'existence
d'un lien avec l'un des motifs, il n'y avait aucune preuve claire et convaincante
que l'État se trouvait dans l'incapacité d'assurer une protection.
Comme la revendication de l'intéressée mineure était
subordonnée à celle de l'adulte, le statut de réfugié
au sens de la Convention n'a été reconnu ni à l'une
ni à l'autre.
SSR
T93-08839, 3 mars 1994.
L'intéressée, une Issaq du nord de la Somalie, craignait
de retourner en Somalie à cause des conflits politiques au sein
des Issaq, car elle était célibataire et ne voulait pas
adhérer à la charia. Le tribunal a jugé que la crainte
de l'intéressée était sans fondement : (1) sa crainte
de rivalités politiques intestines était une crainte généralisée
des conditions en Somalie et n'avait aucun lien avec un motif énoncé
dans la Convention; (2) d'après la preuve documentaire, l'intégrisme
islamiste n'était pas répandu au point de menacer la liberté
des autres musulmans; et (3) appliquant les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, le tribunal
a considéré les conditions dans le pays d'origine et a conclu
que les femmes en général, ou les femmes qui rejetaient
les traditions sociales et religieuses dominantes, n'avaient pas raison
de craindre d'être persécutées en raison de leur sexe
ou de leur mode de vie.
SSR
M93-02943 et al., 9 septembre 1994.
La revendication en question, présentée par une femme et
ses quatre enfants, a été examinée en tenant compte
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. La preuve non contredite a démontré
que la revendicatrice principale était victime de violence conjugale
depuis son mariage en 1967. Elle a été brutalisée,
violée et humiliée à maintes reprises. La revendicatrice
a quitté définitivement l'Italie en 1992 pour chercher refuge
au Canada après qu'elle eut surpris son époux qui s'adonnait
à des attouchements sexuels sur leur fillette de cinq ans. La Section
du statut de réfugié a entendu le témoignage de deux
témoins experts qui ont expliqué que des tabous sociaux
profonds ainsi qu'une pression culturelle, familiale et religieuse faisaient
en sorte que le phénomène de violence conjugale était
occulté en Italie. Cette réalité sociale exacerbait
le sentiment de culpabilité chez la femme italienne et favorisait
son silence et son inaction. Néanmoins, en dépit de ce contexte
social difficile et même si elle acceptait que la revendicatrice
avait été victime de persécution pour l'un des motifs
de la définition, la SSR
a conclu que l'État italien était en mesure de protéger
les demandeurs. Il y existe un régime de droit et des organismes
de lutte contre la violence conjugale.
SSR
M94-01200, 1er décembre 1994.
L'intéressée est arrivée au Canada en 1988, laissant
derrière elle ses enfants et un partenaire violent. Ce dernier
l'a rejointe au Canada un an plus tard, rétablissant la relation,
et les sévices ont repris. L'intéressée ne s'est
pas plainte à la police parce qu'elle résidait illégalement
dans le pays. Elle n'a pas tenté non plus de régulariser
sa situation jusqu'à ce qu'elle-même et son partenaire soient
convoqués par l'Immigration en 1992. Son compagnon est reparti
à Saint-Vincent. L'intéressée a demandé le
statut de réfugié, affirmant que si elle était expulsée,
elle n'aurait d'autre choix que de vivre avec l'homme qui la battait,
et qu'elle savait de par l'expérience de deux amies que les femmes
battues ne disposaient d'aucune protection dans son pays. Le tribunal
a conclu que si les « femmes » constituent bien un certain
groupe social, tel que défini par l'arrêt Canada (Procureur
général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689, la Section du statut de réfugié a établi antérieurement
qu'il n'en est pas de même des « femmes battues sans protection
», car un groupe social ne peut être défini par rapport
à une persécution. De ce fait, la crainte de l'intéressée
n'était pas reliée à l'un des cinq motifs de la Convention.
En outre, même si un motif avait été établi,
la preuve documentaire montrait qu'une protection adéquate est
disponible. Les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe furent considérées comme n'étant
pas applicables, car toutes les femmes disposent d'une protection à
Saint-Vincent.
Diluna, Roselene Edyr Soares c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3201-94), Gibson, 14 mars 1995.
La relation de l'intéressée avec son époux était
marquée par de la violence de la part de ce dernier à son
endroit. L'intéressée s'est plaint à la police à
quatre occasions, mais cela n'avait pas atténué les attaques.
La Section du statut de réfugié a pris en considération
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Le tribunal a statué que ce que redoutait
l'intéressée était des actes de violence et de criminalité
privés commis contre elle en tant qu'individu; il ne s'agissait
pas de persécution, et les actes en question n'étaient pas
liés à un motif énoncé dans la Convention.
Le tribunal a conclu aussi que l'intéressée n'avait pas
expliqué de manière satisfaisante pourquoi elle avait tardé
à présenter une revendication après son arrivée.
La Cour a statué que les « ;femmes victimes de violence conjugale
au Brésil » constituent un groupe social. À cet égard,
la Cour a souscrit au raisonnement exposé dans la décision
, c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)
[1995] 2 C.F. 55 (1re
inst.). Elle a indiqué qu'elle définissait un groupe social
en prenant pour base la victimisation commune de ses membres. Le tribunal
a commis une erreur en négligeant de conclure que l'intéressée
avait des motifs valables de craindre d'être persécutée
pour un motif énoncé dans la Convention, vu (entre autres
facteurs) que les autorités de l'État avaient montré
dans le passé qu'elles ne pouvaient ou ne voulaient assurer une
protection. Il était regrettable que le tribunal n'ait pas fait
mention d'une évaluation psychiatrique qui, aurait-on peut-être
pu dire, étayait l'explication donnée par l'intéressée
pour le retard. La demande a été accueillie. (Décision
de la SSR
U93-07504, 24 mars 1994).
c. que le préjudice est suffisamment grave
pour équivaloir à de la persécution,
SSR
C97-00534, 13 janvier 1999.
Pendant les six années où elle a été mariée,
la revendicatrice été victime de violence, d'agression sexuelle
et d'intimidation parce qu'elle avait donné naissance à
des filles plutôt qu'à des garçons. Elle avait été
forcée de participer à des actes de sorcellerie et à
divers rituels. Elle avait été enfermée dans sa chambre
comme punition pour avoir contredit les prédictions du sorcier
et avoir donné naissance à des filles. Son mari avait essayé
de la forcer à avorter au cours de sa troisième grossesse.
Son beau-père s'était plaint de l'insuffisance de sa dot
et avait mentionné l'immolation de l'épouse par le feu.
Elle avait été isolée par son mari et la famille
de ce dernier et ne pouvait parler à personne de la violence qu'elle
subissait. La Section du statut de réfugié a tenu compte
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Elle a jugé que ce traitement constituait
de la persécution fondée sur le sexe. La famille du mari
de la revendicatrice était puissante et avait des relations. Selon
la preuve documentaire, la violence contre les femmes est un problème
important en Inde. L'application des lois protégeant les femmes
demeure un problème et l'aide apportée par des organismes
privés aux femmes victimes de violence n'existe qu'à une
petite échelle. La revendicatrice n'avait pu communiquer avec la
police parce qu'elle était enfermée, et a mentionné
l'influence de son mari et de la famille de ce dernier. La Section du
statut de réfugié a conclu que la revendicatrice ne pouvait
se prévaloir de la protection de l'État. Étant donné
que la famille de son mari avait des relations partout en Inde, qu'elle
ne pouvait compter sur la protection de sa famille et devait s'occuper
de deux petites filles, il n'y avait aucun endroit en Inde où elle
pouvait vivre en sécurité, sans attirer l'attention de son
mari et de sa belle-famille. Il n'existait aucune possibilité de
refuge intérieur (PRI).
SSR
T98-02359, 31 mars 1999.
La revendicatrice était victime de violence physique chronique
de la part de son mari. Lorsque la tentative de ce dernier de suivre la
revendicatrice au Canada a échoué, il a menacé celle-ci
par téléphone. La Section du statut de réfugié
a conclu que les antécédents de violence physique et affective
subie par la revendicatrice équivalaient à de la persécution.
La preuve documentaire sur la violence familiale au Portugal était
limitée et récente. La Section du statut de réfugié
est arrivée à la conclusion que les mesures de protection
actuellement offertes dans ce pays aux femmes victimes de violence comportaient
de graves lacunes et insuffisances. Il appartient aux victimes de déposer
une plainte, et la police tente de dissuader les femmes de recourir à
cette mesure. En l'espèce, l'indifférence manifestée
par la police pourrait avoir été exacerbée par le
racisme, puisque la revendicatrice est de race noire. Comme la revendicatrice
appartenait à une minorité visible et qu'il s'agissait d'une
femme victime de violence, aucune protection de l'État n'était
accessible. La revendicatrice ne bénéficiait pas d'une possibilité
de refuge intérieur (PRI)
puisque son mari était dangereusement violent et pouvait la poursuivre
n'importe où au Portugal. Même s'il existait une PRI,
il aurait été déraisonnable de s'attendre à
ce que la revendicatrice tente d'obtenir refuge dans ce pays compte tenu
de son âge, de son piètre état de santé, de
sa dépendance économique, de son éducation restreinte
et de son manque de compétences monnayables. On a pris en compte
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe.
SSR
U98-01230 et al., 29 juillet 1999.
La revendicatrice alléguait qu'elle et les membres de sa famille
avaient été harcelés par des Hindous parce qu'ils
étaient des Ahmadis. La Section du statut de réfugié
a conclu que l'ensemble des expériences de la revendicatrice n'équivalait
pas à de la persécution. L'Inde n'a pas adopté une
religion d'État, et la Constitution garantit la liberté
de culte. Même s'il y avait des preuves que des missionnaires ahmadis
qui faisaient du prosélytisme dans un canton dominé par
des Musulmans avaient été attaqués par une foule,
les revendicateurs n'étaient pas dans la même situation que
ces missionnaires. La revendicatrice adulte a également allégué
que son mari (un paraplégique confiné à un fauteuil
roulant) les avait agressées physiquement, elle et ses enfants,
lorsqu'il était ivre, et qu'il voulait les impliquer, elle et ses
filles, dans le commerce international de la prostitution. Les notes fournies
par la revendicatrice au point d'entrée ne faisaient aucunement
mention d'agression physique. À l'époque où le mari
de la revendicatrice était censé la battre tous les jours,
une de ses filles a écrit à un conseiller spirituel en qui
elle avait confiance pour lui demander de prier pour son père qui
souffrait beaucoup. La fille n'a pas mentionné les mauvais traitements
au conseiller. La revendicatrice pouvait s'adresser au système
de justice indien pour empêcher que ses filles soient forcées
de se livrer à la prostitution.
SSR
V99-02940 et al., 8 mai 2000.
Les revendicatrices étaient deux jeunes femmes, dont l'une mineure.
La Section du statut de réfugié a examiné les directives
concernant Les enfants qui revendiquent le statut de réfugié
: Questions relatives à la preuve et à la procédure.
L'une des revendicatrices a soutenu craindre, en tant que femme, la discrimination
de la part de ses grands-parents qui considéraient sa famille comme
un échec parce qu'elle n'avait donné naissance qu'à
des filles. Elle est venue en Amérique du Nord pour gagner de l'argent
qu'elle enverrait en Chine, afin de tenter d'améliorer la réputation
de sa famille immédiate. Elle craignait les stigmates qui la marqueraient
comme un « échec » si elle était forcée
de retourner en Chine. La Section du statut de réfugié a
conclu que ces stigmates n'équivalaient pas, dans les circonstances,
à de la persécution. Il convient de souligner que la revendicatrice
n'a pas mentionné le problème lors de son entrevue au point
d'entrée ni dans son formulaire de renseignements personnels (FRP).
Cette revendicatrice n'était pas une réfugiée au
sens de la Convention. L'autre revendicatrice a prétendu que son
père violent, qui avait beaucoup de dettes, avait arrangé
son mariage en échange d'une dot considérable. Elle a affirmé
qu'elle se suiciderait plutôt que de marier l'homme. La Section
du statut de réfugié a conclu que le préjudice équivalait
à de la persécution. Le père de la revendicatrice
tenait le registre familial dans lequel la revendicatrice était
toujours inscrite, et celle-ci ne pourrait se prévaloir de la protection
de l'État dans un village rural. Cette revendicatrice était
une réfugiée au sens de la Convention.
SSR
M99-07094 et al., 31 mai 2001.
La revendicatrice principale, de nationalité française,
avait divorcé de son époux de nationalité syrienne
et naturalisé français, car elle avait subi de sa part de
la violence physique, psychologique et sexuelle ainsi que des menaces
d'enlever leurs enfants vers la Syrie. (
) La revendicatrice s'était
enfuie au Canada avec les enfants craignant que leur père ne mette
en exécution ses menaces et n'enlève les revendicateurs
mineurs vers la Syrie et ce malgré l'ordonnance de ne pas sortir
les enfants du territoire français. Entre-temps, l'ex-époux
obtenait la garde légale des revendicateurs mineurs en France.
(
) Selon le commissaire président de la formation du tribunal,
les revendicateurs étaient membres du groupe social « famille
mixte dont le père a la nationalité d'un pays non-signataire
de la Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement
international d'enfants qui ne respecte pas les principes de la Convention
regardant les droits des enfants ». La revendicatrice était
crédible et sa crainte de l'enlèvement de enfants était
raisonnable. (
) L'enlèvement international d'enfants vers
un pays non-signataire de la Convention de La Haye sur les aspects
civils de l'enlèvement international d'enfants, par son caractère
d'atteinte grave et soutenue aux droits fondamentaux, tant des enfants
que de la mère, équivalait à de la persécution.
(
) En effet, le droit à la sécurité de la personne,
garanti à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et
libertés, s'étendrait à la protection de l'intégrité
psychologique de la personne (Nouveau Brunswick c. G. (J.), (1999)
3 R.C.S.
46). (
) Selon la culture familiale musulmane et syrienne décrite
dans la preuve documentaire, la revendicatrice mineure surtout aurait
en toute probabilité à accepter l'époux choisi pour
elle par son père et passerait de la tutelle de celui-ci à
celle de son mari. (
) De plus, la revendicatrice mineure risquerait
d'être privée de faire des études ou d'avoir une profession.
Elle risquerait aussi de subir l'excision ou une clitoridectomie, que
le tribunal reconnaît comme étant de la persécution.
(
) En France, la revendicatrice semblait avoir été
victime d'une faille judiciaire.
SSR
TA0-06676 et al., 4 mars 2002.
La revendicatrice principale (qui était accompagnée de son
jeune fils) fondait sa revendication du statut de réfugié
sur le fait qu'elle est une femme victime de violence familiale. Elle
prétendait que son ancien mari la battait pendant leur mariage
et qu'il avait continué à la harceler, à l'intimider
et à la suivre partout après qu'elle l'eut quitté.
Elle a décidé de s'enfuir de Russie après qu'il fut
entré de force chez ses parents et eut tenté de la violer
devant son fils, lequel a été blessé gravement au
cours de la bagarre qui a suivi. Le revendicateur mineur avait aussi subi
des mauvais traitements avant cet incident. La Section du statut a considéré
que la revendicatrice craignait que son ancien mari ne lui cause un préjudice
grave qui était assimilable à de la persécution.
Son témoignage selon lequel elle avait tenté à plusieurs
reprises, mais sans succès, d'obtenir la protection de l'État
était étayé par la preuve documentaire. Celle-ci
indiquait que la police russe hésite souvent à intervenir
dans des disputes qui, à ses yeux, sont purement conjugales.
SSR
MA1-07929, 13 mars 2002.
La revendicatrice âgée de dix sept ans craignait d'être
persécutée dans son pays en raison de son appartenance à
un groupe social, les femmes. Elle alléguait que son père
voulait la forcer à épouser un homme de 65 ans, polygame
et père de 15 enfants. Le tribunal était d'avis que le témoignage
de la revendicatrice était crédible. De plus, selon la connaissance
spécialisée du tribunal, l'époux pouvait demander
que la nouvelle épouse subisse de nouveau une mutilation génitale.
Par ailleurs, le tribunal avait tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, car le
préjudice redouté équivalait à de la persécution.
Selon la preuve documentaire, en Guinée, la coutume avait préséance
sur le droit écrit. Il était donc déraisonnable d'évoquer,
dans le cas en l'espèce, la protection étatique et encore
moins le refuge interne. Le tribunal conclut que la revendicatrice était
une réfugiée au sens de la Convention.
d. qu'il y a une possibilité sérieuse
qu'elle soit persécutée si elle retourne dans son pays
d'origine et,
SSR
T95-05227 et al., 2 juillet 1996.
La revendicatrice principale avait été régulièrement
victime de violence de la part de son conjoint de fait, ancien agent de
police ayant de nombreuses relations dans la police. Lorsque la revendicatrice
principale avait tenté d'obtenir la protection de la police, elle
s'était fait répondre qu'il n'y avait rien à faire
pour les femmes victimes de violence conjugale à moins de blessures
graves ou de décès. Selon la preuve documentaire, la police
offrait ou accordait rarement son aide aux femmes victimes de violence
familiale et l'aide fournie par les organismes gouvernementaux n'était
pas efficace. La revendicatrice mineure, qui était la fille de
quatre ans de la revendicatrice principale, avait subi des conséquences
émotives et psychologiques néfastes de la violence dont
sa mère avait été victime. De plus, la revendicatrice
principale craignait que son conjoint utilise la revendicatrice mineure
contre elle, ce qui serait préjudiciable à la fillette.
La Section du statut de réfugié a tenu compte des directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Elle a statué qu'il existait un risque
raisonnable que les revendicatrices soient victimes de persécution
fondée sur le sexe si elles retournaient au Venezuela. Compte tenu
des relations du conjoint, les revendicatrices n'avaient aucune possibilité
de refuge intérieur.
SSR
T98-06186, 2 novembre 1999.
On a jugé qu'il existait une possibilité sérieuse
qu'un préjudice grave soit causé à la revendicatrice,
une travailleuse du sexe assujettie à une servitude pour dettes,
si elle retournait en Thaïlande, soit parce qu'elle devrait continuer
de se livrer à la prostitution pour rembourser ses dettes, soit
parce qu'elle serait l'objet de représailles physiques pour avoir
tenté d'échapper à ses dettes. La Section du statut
de réfugié a indiqué qu'il ne conviendrait pas d'adopter
une définition stricte du groupe social au motif que la prostitution
peut être considérée comme immorale, répugnante
ou indésirable. C'est le fait que la revendicatrice était
une femme qui était la principale cause de ses problèmes.
Les femmes étaient le groupe social auquel elle appartenait. Subsidiairement,
les anciennes travailleuses du sexe forment un groupe social en ce sens
qu'elle sont liées par un ancien statut volontaire immuable en
raison de sa permanence historique. Le défaut de la revendicatrice
de revendiquer le statut de réfugié en France, son retour
en Thaïlande et son retard à revendiquer le statut de réfugié
au Canada ont été expliqués à la satisfaction
du tribunal. La question de la protection de l'État a été
étudiée; le tribunal a conclu qu'elle n'était pas
disponible en Thaïlande. Les arrêts Canada (Procureur général)
c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689, et Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),
[1995] 3 R.C.S.
593, ont été examinés. - Dans ses motifs de dissidence,
l'autre commissaire a conclu qu'il n'existait pas de lien entre la revendication
et un motif prévu par la Convention. La revendicatrice a été
la victime de membres du crime organisé spécialisés
dans la traite des femmes à des fins d'exploitation sexuelle. Les
victimes du crime organisé ne forment pas un groupe social. Le
fait que la revendicatrice se livrait à la prostitution n'était
pas une caractéristique innée ou immuable. Subsidiairement,
la revendicatrice n'a pas démontré que l'État ne
pouvait pas la protéger. Différentes décisions judiciaires
ainsi que les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe ont été examinées.
SSR
T99-07761, 27 septembre 2000.
La revendicatrice était une jeune Israélienne arabe de religion
catholique. Lorsqu'elle était une jeune adolescente, sa famille
l'a forcée à épouser un parent. Son mari et sa belle-famille
l'ont gardée quasiment enfermée et l'ont continuellement
agressée. Elle et son mari se sont séparés à
leur arrivée au Canada. La revendicatrice a commencé à
fréquenter un autre homme et est tombée enceinte. Elle craignait
d'être tuée par une personne voulant sauver l'honneur de
la famille si elle retournait en Israël. La Section du statut de
réfugié a considéré que le « mariage
» de la revendicatrice sans son consentement équivalait à
un viol au sens de la loi. La preuve documentaire indiquait qu'au moins
60 femmes arabes ont été victimes de « meurtres d'honneur
» au cours des années 1990 et que les efforts du gouvernement
israélien pour combattre ces crimes n'ont pas toujours été
adéquats. Il existait une possibilité sérieuse que
la revendicatrice soit persécutée si elle devait retourner
en Israël. L'État israélien serait disposé à
la protéger, mais cette protection ne serait pas suffisante.
Zadeh, Muhammed Nadir Ghani c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1290-96), Richard, 17 février 1997.
La Cour a estimé qu'il n'y avait aucune raison de modifier la conclusion
du tribunal concernant son rejet de la crainte de persécution de
la revendicatrice, qui était fondée sur les opinions politiques
de son mari. La revendicatrice a aussi prétendu être persécutée
du fait qu'elle était une femme. Le tribunal a conclu que, sans
un protecteur masculin, il existait davantage qu'une simple possibilité
qu'elle soit persécutée. En dehors d'une mention imprécise,
rien dans la preuve documentaire présentée au tribunal ne
corroborait la conclusion relative au protecteur masculin. Cette question
constituant l'élément central de la décision du tribunal,
la Cour a conclu que la décision de la Section du statut de rejeter
l'argument de la revendicatrice selon lequel elle craignait d'être
persécutée du fait qu'elle était une femme était
manifestement déraisonnable compte tenu des circonstances. La demande
de la revendicatrice a été accueillie. (Décision
de la SSR
T94-05119 et al., 8 mars 1996).
Prado De Guerra, Maria Elena c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1391-01),Dawson, 8 mai 2002; 2002 CFPI 519.
Les demandeurs sont Mme Prado de Guerra
et ses trois enfants mineurs. Leur mari et père, Eduardo Javier
Guerra, est arrivé au Canada en 1998, suivi des demandeurs en 1999.
Leurs revendications étaient fondées sur la crainte éprouvée
par M. Guerra de certains syndiqués en Argentine. M. Guerra et
Mme Prado de Guerra se sont séparés
par la suite, et leurs revendications du statut de réfugié
ont été entendues séparément. La SSR
a rejeté celle de M. Guerra (Décision de la SSR
T99-12622, 19 juin 2000). Mme Prado de
Guerra a modifié son FRP,
pour indiquer qu'elle craignait surtout d'être persécutée
par son ancien mari. À la lumière de ses « connaissances
spécialisées », la SSR
a conclu que M. Guerra ne serait pas en Argentine parce qu'il ferait traîner
son renvoi ou pourrait choisir d'aller aux États-Unis. (1) La SSR
n'a pas donné l'avis prévu au par. 68(5) de la Loi sur
l'immigration. Elle aurait été fondée à
rejeter, pour des motifs pertinents, le témoignage de Mme
Prado de Guerra au sujet des intentions avouées de son mari, mais
elle l'a fait sur la base de ses propres conjectures. (2) La SSR
a encore fait observer que « Eduardo n'a pas l'air de ce monstre
qui aurait suivi la demanderesse jusqu'à Buenos Aires simplement
pour lui faire du mal ». Et ce, malgré le témoignage
de Mme Prado de Guerra, que la SSR
a jugé crédible et selon lequel son mari, après leur
arrivée au Canada, avait commencé à la battre presque
journellement, l'avait violée, avait menacé de se venger
parce qu'elle était partie avec les enfants, avait menacé
de lui faire mal pendant les neuf mois précédents; elle
craignait qu'il la suive partout où elle serait en Argentine et
qu'il la tuerait. La SSR
a commis une erreur en déterminant, par les motifs qu'elle a pris,
qu'il n'y avait pas plus qu'une simple possibilité que M. Guerra
aille à Buenos Aires pour persécuter les demandeurs. Demande
accueillie. (Décision de la SSR
T99-08639, 5 février 2001).
Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) c. Raymond, Marie Francise (C.F.
1re
inst., no. IMM-3142-01), Blanchard, 13 septembre 2002; 2002 CFPI
970.
Le tribunal avait accueilli la revendication. La demanderesse avait fait
vie commune avec un homme d'affaires canadien et avait été
victime de violence conjugale en Haïti et au Canada. Elle alléguait
qu'elle ne serait pas protégée en Haïti. Selon la Cour,
l'expression « possible, voire même probable, que l'ex-conjoint
puisse rejoindre la demanderesse
si elle devait retourner en Haïti
» ne mène pas à conclure que le tribunal a utilisé
une norme de preuve moindre que celle de la possibilité sérieuse
ou raisonnable. Le tribunal n'avait pas ignoré les disparités
entre le récit écrit et le témoignage oral mais les
avaient attribuées au stress que vivait la demanderesse au moment
où elle complétait son FRP. La preuve non-contestée
démontrait que l'ex-conjoint avait des intérêts et
contacts en Haïti et qu'il était obsédé à
l'idée de récupérer ce qui lui avait été
volé et avait tout intérêt de retourner en Haïti.
La preuve à l'effet que la demanderesse serait retrouvée
en Haïti n'était pas contestée. Demande rejetée.
(Décision de la SPR MA0-08690, 4 juin 2001).
e. qu'elle ne peut vraiment pas s'attendre à
recevoir une protection appropriée de la part de son pays.
SSR
T93-12477, 19 avril 1994.
Depuis de nombreuses années, l'intéressée était
victime de harcèlement continuel et de graves sévices physiques
et mentaux de la part de son ex-époux. Lorsqu'elle a porté
plainte à la police, celle-ci a refusé de se mêler
de ce qu'elle considérait comme une dispute conjugale. Le fait
que l'ex-époux entretenait des liens étroits avec la police
avait aussi entravé les efforts de l'intéressée pour
obtenir de l'aide. Le tribunal a conclu que cette dernière appartenait
à un groupe social, celui des femmes bulgares. Il a décidé
que la preuve donnée par l'intéressée, à savoir
que, dans le passé, elle avait été personnellement
victime d'actes de persécution contre lesquels l'État ne
l'avait pas protégée, était une preuve claire et
convaincante que l'État n'avait pu la protéger d'une manière
convenable et efficace. Il n'existait aucune possibilité de refuge
intérieur, car son ex-époux aurait pu la retrouver en consultant
le système bulgare d'enregistrement du lieu de résidence;
ses contacts au sein de la police pourraient l'aider sur ce plan. Compte
tenu des agissements antérieurs de son ex-époux, il n'y
avait pas lieu de croire que celui-ci ne tenterait pas de poursuivre l'intéressée.
En évaluant la revendication, le tribunal a pris en compte les
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Le statut de réfugié au sens de
la Convention a été reconnu à l'intéressée.
SSR
U95-02138, 10 septembre 1996.
La revendicatrice, une jeune femme membre de la All India Sikh Student
Federation, a été détenue à plusieurs reprises
par la police et a fait l'objet d'avances à caractère sexuel.
Le commissaire a souligné que, si le militantisme des Sikhs avait
diminué dans le Pendjab au moment où la revendicatrice était
détenue, la police n'avait pas relâché ses activités
liées à la sécurité. Dans le contexte de l'ethos
social de la collectivité au sein de laquelle vivait la revendicatrice,
les fréquentes arrestations de cette dernière auraient terni
sa réputation. Les femmes détenues étaient particulièrement
susceptibles d'être violées durant leur détention,
et des viols ainsi que d'autres actes de violence commis à l'endroit
des femmes par les forces de sécurité et la police avaient
été signalés aux quatre coins de l'Inde. Les traitements
subis par la revendicatrice allaient à l'encontre des directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. La revendicatrice appartenait au groupe social
des « femmes sikhs qui craignent le harcèlement des policiers
et ne peuvent obtenir la protection de l'État ». Comme la
police aurait un dossier au nom de la revendicatrice, celle-ci avait de
bonnes raisons de craindre d'être persécutée dans
d'autres régions de l'Inde aussi bien qu'au Pendjab. Ailleurs en
Inde, en tant que femme seule n'étant pas protégée
par un homme, elle aurait risqué de faire l'objet de discrimination
équivalant à de la persécution. Le commissaire dissident
a jugé que la revendicatrice n'était pas crédible.
SSR
T98-05518, 3 décembre 1998.
La revendicatrice craignait d'être persécutée par
son mari violent dont elle était séparée. Elle n'a
pas obtenu la protection de l'État lorsqu'elle a signalé
à la police les menaces sérieuses que son mari lui avait
proférées. Selon la preuve documentaire, la violence familiale
n'est pas prise au sérieux en Jamaïque, malgré l'adoption
de lois à cet égard. De plus, la revendicatrice venait d'un
milieu modeste et semblait être une personne soumise qui n'aurait
pas la capacité de faire valoir les droits que lui garantit la
loi sur la violence familiale de 1995 (Domestic Violence Act).
Même si la revendicatrice et son mari étaient maintenant
divorcés, ils continuaient de se voir en raison des enfants dont
le mari avait la garde. La Section du statut a tenu compte des directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, puis a conclu que la revendicatrice appartenait
à un groupe social, soit les Jamaïquaines maltraitées
et incapables de se prévaloir des dispositions de la loi qui peuvent
sembler offrir a priori une certaine protection. Elle a tardé à
revendiquer le statut de réfugié parce qu'elle ne savait
pas qu'elle pouvait fonder sa revendication sur le motif de la violence
familiale.
SSR
M96-06372, 16 avril 1999.
La revendicatrice a été souvent victime de violence physique
aux mains de son mari et elle craignait d'être tuée si elle
retournait aux Philippines. Elle avait tenté à au moins
trois reprises, mais sans succès, de demander la protection de
la police. Son mari n'a jamais été détenu ni accusé.
Lorsqu'elle a examiné la revendication, la Section du statut de
réfugié s'est reportée au cadre d'analyse fourni
dans les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Selon la preuve documentaire, la violence contre
les femmes, en particulier la violence familiale, constitue un problème
grave aux Philippines, la violence familiale est considérée
comme une question personnelle plutôt que relevant du droit criminel,
et il est rare que des poursuites soient intentées contre les auteurs
de la violence familiale. La situation évolue, mais rien n'indiquait
que les projets de loi sur la violence familiale présentés
en 1997 avaient été adoptés. La revendicatrice ne
pourrait se prévaloir de la protection de l'État. Comme
son mari avait des liens avec la police, il pourrait la trouver partout
aux Philippines. Il ne serait pas raisonnable de s'attendre à ce
qu'elle vive en cachette, dans son propre pays. Elle n'avait aucune possibilité
de refuge intérieur (PRI).
SSR
T99-11955, 27 avril 2000.
La revendicatrice prétendait craindre d'être persécutée
par son ex-petit ami, qui était violent à son endroit depuis
qu'elle avait refusé de l'épouser. Cet homme comptait parmi
les personnes les plus riches de son petit village. Après qu'il
eut essayé de violer la revendicatrice, la mère de cette
dernière a signalé l'incident à la police; les policiers
lui ont répondu qu'ils ne pouvaient pas gaspiller leur temps à
régler des cas de violence familiale. Il n'y avait pas d'homme
dans la famille de la revendicatrice qui aurait pu la défendre.
Selon la preuve documentaire, la violence exercée contre les femmes
est un problème grave et répandu au Salvador et la police
ne prend pas la violence familiale au sérieux. En outre, les incidents
de violence familiale et les viols ne sont pas toujours signalés
en raison des pressions sociales exercées sur la victime, de la
crainte de représailles et de publicité, du peu d'attention
portée aux victimes par les autorités et de la croyance
qu'il soit peu probable que des affaires de ce genre doivent être
réglées. Compte tenu de la situation particulière
de la revendicatrice, qui est une jeune femme sans protection masculine,
du profil de son persécuteur dans l'ordre hiérarchique des
sexes et de la richesse dans la société salvadorienne et
du fait que la revendicatrice habitait dans une région éloignée
de la police et des services juridiques, la Section du statut de réfugié
a jugé qu'elle ne pouvait pas bénéficier d'une protection
adéquate de l'État. Elle a pris en compte les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe.
SSR
MA0-03034, 18 octobre 2000.
La revendicatrice craignait d'être persécutée en raison
de son appartenance au groupe social des femmes. Elle avait été
victime de coups et blessures et de menaces de mort de la part de son
conjoint. Lorsqu'elle avait demandé protection auprès des
autorités, on la lui avait refusée, essentiellement, parce
que son conjoint, ancien militaire, travaillait au service du magistrat
de l'endroit. La preuve documentaire indiquait que la violence contre
les femmes était un problème très répandu
en Haïti. Les autorités n'appliquaient pas les lois qui prévoyaient
des peines contre les abuseurs ou les personnes qui commettaient des crimes
d'agression physique. Dans le cas de violence familiale, même s'il
y avait eu des discussions au niveau du Parlement, il semblait qu'on eut
beaucoup parlé, mais qu'on n'eut pas agi, ce qui illustrait une
volonté de la société de ne pas régler le
problème. La revendicatrice était une réfugiée
au sens de la Convention.
Myrie, Oraine Elizabeth c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1213-96), Noël, 15 janvier 1997.
La revendicatrice a allégué qu'elle était une réfugiée
au sens de la Convention en raison de son appartenance à un groupe
social, à savoir les femmes victimes de violence familiale en Jamaïque.
La Section du statut de réfugié n'a pas mis en doute le
fait que la revendicatrice avait été victime de graves sévices,
mais le tribunal a jugé qu'elle n'avait pas fourni une preuve claire
et convaincante de l'incapacité de l'État de la protéger.
Le tribunal en est arrivé à cette conclusion à la
lumière du fait que la revendicatrice était une personne
relativement aisée et avait donc davantage de ressources pour assurer
sa protection que la Jamaïcaine moyenne; qu'elle pouvait choisir
de divorcer de son mari, ce qu'elle n'a pas fait même lorsqu'elle
s'est retrouvée au Canada; que divers recours juridiques s'offraient
aux victimes de violence en Jamaïque; et qu'elle a pris le risque
d'être expulsée en Jamaïque en restant au Canada sans
visa valide pendant une période de dix mois, comportement qui,
selon le tribunal, n'aurait pas été adopté par une
personne qui prétend que l'État est incapable de la protéger.
La Cour a conclu qu'il n'avait pas été prouvé que
la décision elle-même n'était pas raisonnable ou qu'elle
était mal fondée en droit. La demande a été
rejetée. (Décision de la SSR
T94-07176, 11 mars 1996).
James, Cherrie Anne Louanne c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3352-97), Wetston, 1er
juin 1998.
La Cour est d'avis que la revendicatrice a effectivement présenté
une preuve claire et convaincante de l'incapacité de l'État
de lui assurer une protection adéquate et que la conclusion de
la Section du statut était, en l'espèce, abusive. On ne
peut conclure que l'État offrait sa protection à la demanderesse
sur le fondement qu'un policier a aidé cette dernière à
quitter le pays, lequel était incapable de lui fournir une protection
adéquate. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.
(Décision de la SSR
U96-02421, 16 juillet 1997).
G.D.C.P. c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-5451-01), Heneghan, 20 septembre 2002; 2002 CFPI 989.
La requérante principale a été victime de violence
familiale et d'abus sexuel aux mains de son petit ami. La Section du statut
a déterminé que la requérante était crédible,
mais a conclu qu'elle n'avait pas exploré toutes les avenues de
protection dans son pays. La Section du statut a appliqué le mauvais
critère en déterminant la capacité de l'État
à assurer la protection. Une requérante n'est pas tenue
de démontrer qu'elle a exploré toutes les avenues de protection.
Elle doit plutôt démontrer qu'elle a pris toutes les mesures
raisonnables, dans les circonstances, compte tenu du contexte général
du pays d'origine, les mesures qu'elle a prises et ses interactions avec
les autorités. Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-14209, 7 novembre 2001).
B. ÉVALUATION DU PRÉJUDICE REDOUTÉ
Facteurs
Les circonstances qui font naître chez les femmes
une crainte de persécution sont souvent uniques aux femmes
Mutilation génitale
SSR
T95-00479, 5 juillet 1996.
La revendicatrice était une orpheline âgée de six
ans, membre du clan des Majerteens. Elle avait été adoptée
au Canada par son oncle et son épouse, tous deux citoyens canadiens.
Sa revendication reposait sur son appartenance au clan des Majerteens
ainsi que sur son statut de jeune Somalienne à qui l'on ferait
subir une mutilation des organes génitaux. En raison de son âge
et, plus particulièrement, de son statut d'orpheline sans parent
proche vers qui se tourner pour obtenir appui et protection, de même
que de son appartenance au clan des Majerteens, la revendicatrice aurait
été nettement marginalisée si elle retournait en
Somalie, et cette marginalisation équivaudrait à de la persécution.
SSR
M95-13161, 13 mars 1997.
La revendicatrice, une Haoussa musulmane pratiquante, a soutenu qu'elle
craignait de retourner au Ghana parce qu'elle serait forcée de
se soumettre à une mutilation sexuelle. La Section du statut de
réfugié a conclu que la mutilation sexuelle des femmes violait
le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité
de la personne, le droit à la santé et le droit de ne pas
être soumis à un traitement cruel ou inhumain. Cette mutilation
viole le droit ne pas être mariée sans son consentement,
dans la mesure où elle est souvent une condition préalable
au mariage. Elle viole le droit à la protection spéciale
accordée aux mères, puisqu'elle rend l'enfantement plus
risqué. Comme la mutilation sexuelle des femmes est une violation
en règle et systémique de plusieurs des droits de la personne
les plus fondamentaux, elle équivaut à de la persécution.
Il existait une possibilité raisonnable que la revendicatrice soit
forcée de se soumettre à une telle mutilation si elle était
renvoyée au Ghana. À son âge, la mutilation sexuelle
obligatoire n'était pas la norme, mais n'était pas exceptionnelle.
Comme le gouvernement refusait d'appliquer sa propre loi interdisant la
mutilation sexuelle des femmes, la revendicatrice ne pouvait se réclamer
de la protection de ce pays. Elle craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un groupe social, les femmes devant
se soumettre à la mutilation sexuelle.
SSR
A96-00453 et al., 8 décembre 1997.
Citoyens de la République de Guinée, les revendicateurs,
un couple et leurs quatre enfants, affirmaient avoir une crainte bien
fondée de persécution dans leur pays d'origine à
cause de leur refus de soumettre les deux plus jeunes filles aux coutumes
tribales des Peuls, dont l'une des traditions consistait en la clitoridectomie,
ou la mutilation des organes génitaux de la femme. Bien que l'excision
se pratique habituellement vers l'âge de sept ans, elle peut survenir
n'importe quand. Cette pratique était illégale selon le
code pénal, qui n'était toutefois pas appliqué; c'étaient
les femmes de la famille élargie qui décidaient si elle
devait ou non être pratiquée. Le tribunal a jugé que
les deux plus jeunes revendicatrices étaient des réfugiées
au sens de la Convention, puisqu'elles appartenaient à un groupe
social, celui des femmes et, selon la preuve au dossier, elles subiraient
la mutilation de leurs organes génitaux si elles retournaient en
Guinée. Également, elles ne pourraient pas profiter de la
protection de l'État. En ce qui concerne la jeune fille aînée
qui avait déjà subi de force cette pratique dans son pays,
le tribunal jugeait qu'étant donné le gouffre qui sépare
les perspectives sociales de la revendicatrice et celles de la société
peule plus restrictive, le caractère atroce de la persécution
subie et les traumatismes psychiques qu'elle subirait en retournant dans
une société semblable où elle devrait de nouveau
vivre des réalités choquantes sur le plan moral, il existait
des raisons impérieuses selon le paragraphe 2(3) de la Loi sur
l'immigration pour lui reconnaître le statut de réfugié.
Les difficultés que les parents ainsi que leur fils pourraient
avoir à cause de leur non-conformité aux coutumes peules
ne constituaient pas de la persécution et il existait même
une possibilité de refuge intérieur dans d'autres régions.
SSR
T97-03141, 27 mai 1998.
Les revendicateurs craignaient la persécution parce qu'ils étaient
membres du clan Darod ainsi que des sous-clans Majerten et Marehan. Trois
revendicatrices mineures craignaient en outre d'être persécutées
à cause de la pratique de mutilation des organes génitaux
de la femme (MOGF). La Section du statut de réfugié a conclu
que les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe s'appliquaient aux trois revendicatrices mineures,
que ces dernières avaient une crainte fondée de persécution
du fait de leur appartenance au groupe social que constituent les enfants
de sexe féminin et que l'État ne les protégerait
pas de la MOGF. Comme la MOGF est une pratique répandue en Somalie,
l'existence d'une possibilité de refuge intérieur (PRI)
n'était pas une question pertinente en ce qui concerne ces revendicatrices.
La principale revendicatrice est une femme seule avec sept enfants à
sa charge. Tous les revendicateurs éprouvaient une crainte fondée
de persécution à Mogadiscio puisqu'ils étaient du
clan Darod. Mogadiscio n'offrait pas encore un milieu stable pour une
femme seule avec sept personnes à charge. Les revendicateurs ne
bénéficiaient d'aucune PRI
puisque la famille était issue des deux sous-clans Majerten et
Marehan. La Section du statut de réfugié a également
tenu compte de divers autres facteurs pour un des revendicateurs mineurs.
SSR
T98-04876 et al. , 14 septembre 1999.
Les revendicatrices mineures, qui étaient âgées de
quatre et de huit ans, fondaient leur revendication sur leur appartenance
à un groupe social, à savoir les mineures susceptibles de
subir une mutilation sexuelle. Quant à leur mère, la revendicatrice
principale, elle fondait sa revendication sur son appartenance à
un groupe social, à savoir les femmes qui ne respectent pas les
mœurs culturelles et sociales. Les revendicatrices étaient
des membres de la tribu Yoruba. Dans les familles nigérianes traditionnelles,
le pouvoir appartient à l'homme qui est le chef de la famille.
La mutilation sexuelle est une pratique fréquente et largement
tolérée. La Section du statut a reconnu que le patriarche
de la famille de l'ex-époux de la revendicatrice principale avait
l'intention de prendre à sa charge les revendicatrices et de faire
pratiquer sur elle une mutilation sexuelle, et qu'il avait le pouvoir
de le faire. Il est bien établi que la pratique d'une mutilation
sexuelle est un acte de persécution. Les revendicatrices ne pouvaient
pas bénéficier de la protection du gouvernement. Bien que
celui-ci se soit opposé publiquement aux mutilations sexuelles,
il n'a pris aucune mesure pour mettre fin à cette pratique. La
revendicatrice principale était susceptible de subir un préjudice
grave de la part du patriarche parce qu'elle était une femme s'opposant
à son autorité et à ses normes culturelles. La Section
du statut a fait référence aux directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
SSR
MA1-00356 et al., 18 décembre 2001.
La revendicatrice principale et ses deux filles mineures craignaient d'être
persécutées en raison de leur appartenance aux groupes sociaux,
la famille et les femmes. Les parents du premier mari avaient exigé
qu'elle leur laisse sa fille qu'ils avaient par la suite fait exciser
sans prévenir la revendicatrice. La revendicatrice avait eu deux
autres filles avec son deuxième époux. Les parents de ce
dernier avaient, eux aussi, tout préparé pour faire exciser
la deuxième fille de la revendicatrice. Le commissaire qui présidait
la formation du tribunal était d'avis que la revendicatrice était
crédible. Son témoignage révélait que selon
la tradition elle devait obéir à sa belle-famille. Si elle
n'obéissait pas, la belle-famille utiliserait tous les subterfuges
pour que le couple se sépare. Et si le couple se séparait,
la revendicatrice craignait que ses enfants lui soient enlevées
et qu'elles soient ensuite excisées comme ce fut le cas pour sa
première fille. Ce commissaire s'était référé
à K.L.W. c. Office des services à l'enfant et à
la famille de Winnipeg et al. [2000] 2 S.C.R. 519 dans lequel il
était mentionné que le retrait de la garde d'un enfant portait
atteinte à l'intégrité psychologique du parent, compte
tenu de la détresse causée par la rupture du lieu affectif
entre parent et enfant. Selon ce commissaire, la Cour suprême avait
reconnu que l'intégrité psychologique d'une personne était
protégée par l'article 7 de la Charte des droits et
libertés. Il était d'avis que ce qu'avait vécu
la revendicatrice principale qui avait déjà été
persécutée dans le passé et qui serait en situation
continuelle de danger de se faire enlever ses filles pour fins d'excision
ou de façon définitive, en cas de retour dans son pays,
constituait une atteinte grave et soutenue à un de ses droits fondamentaux,
ce qui pouvait être considéré comme étant de
la persécution. En tenant compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, le président
de la formation avait statué que les revendicatrices faisaient
partie du groupe social des femmes. De plus, la preuve documentaire corroborait
les allégations de la revendicatrice principale. Il y avait plus
qu'une simple possibilité que les revendicatrices mineures subissent
la mutilation de leurs organes génitaux contre leur gré
advenant leur retour en Guinée. Elles ne pourraient pas profiter
de la protection vu que malgré certaines lois en vigueur, selon
la preuve documentaire, la tradition était tellement ancrée
de sorte que les mariages forcés et l'excision étaient encore
grandement pratiqués en Guinée, principalement chez l'ethnie
Peul, l'ethnie des revendicatrices. Le deuxième commissaire qui
était d'accord avec la décision du président de la
formation du tribunal dans son ensemble, ne partageait cependant pas son
point de vue quant à l'application qu'il avait faite de la décision
de la Cour suprême, car selon lui, le risque d'enlèvement
des enfants de la revendicatrice ne constituaient pas en soi un motif
de persécution au sens de la Convention. De plus, selon la preuve
documentaire, le père des enfants était solidaire de la
position de la revendicatrice au sujet de l'excision et, depuis le départ
de la revendicatrice de son pays, il y avait eu rupture des relations
entre son mari et la famille de celui-ci. Le tribunal conclut que les
revendicatrices étaient des réfugiées au sens de
la Convention.
SSR
MA1-02054 et al., 21 décembre 2001.
Les revendicateurs alléguaient une crainte de persécution
en raison de leur appartenance aux groupes sociaux, les femmes et les
enfants illégitimes. La revendicatrice principale, d'ethnie peule,
était la mère de deux enfants illégitimes mineurs
issus d'une liaison avec un ami avec qui elle avait l'intention de se
marier. La demande en mariage faite par ce dernier avait été
rejetée par le père de la revendicatrice au motif qu'une
telle requête était contraire non seulement aux coutumes
en vigueur dans la communauté peule, mais aussi aux principes moraux
de l'Islam. Pour la punir, son père l'aurait obligée à
épouser un autre homme. La revendicatrice craignait pour elle-même,
pour sa fille, qui devrait subir des mutilations génitales ainsi
que pour son fils, condamné à vivre dans la honte toute
sa vie. Le tribunal était d'avis que le témoignage de la
revendicatrice principale était crédible. Le tribunal a
conclu que le mariage forcé, les mutilations génitales,
auxquelles la fille de la revendicatrice était sujette, ainsi que
les préjudices redoutés de la part du fils de la revendicatrice
équivalaient à de la persécution. Selon le tribunal,
étant donné que la preuve documentaire indiquait qu'en Guinée
la coutume avait préséance sur le droit écrit, il
était déraisonnable d'évoquer, dans le cas en l'espèce,
la protection étatique et encore moins le refuge interne. Les revendicateurs
étaient des réfugiés au sens de la Convention.
Annan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration), [1995] 3 C.F.
25 (1re inst.).
Le fils musulman d'un inspecteur de police a harcelé la revendicatrice,
qui était chrétienne, pour qu'elle l'épouse. Comme
elle avait rejeté sa proposition, il l'a enlevée et l'a
violée, à tour de rôle, avec des amis. Il a convoqué
un chef religieux musulman qui a décidé que la revendicatrice
devait être excisée, mais celle-ci s'est enfuie. Même
si elle a porté plainte à la police, celle-ci n'a rien fait.
La revendicatrice s'est réfugiée ailleurs au Ghana, mais
elle a été informée que ses agresseurs étaient
à ses trousses. Elle craignait, si elle devait retourner dans son
pays, d'être contrainte par des musulmans fanatiques de subir une
excision. La Section du statut de réfugié n'a pas mis en
doute la crédibilité de la revendicatrice, mais elle a rejeté
sa revendication sur le fond. La Cour a statué que la revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée. De plus,
elle ne pouvait pas compter sur la protection de l'État : il faut
considérer non seulement la capacité de l'État de
protéger la personne, mais aussi sa volonté d'agir; même
si le gouvernement du Ghana avait manifesté de temps à autre
son intention de rendre l'excision illégale, il tolérait
toujours cette mutilation atroce. Il n'y avait aucune possibilité
d'un refuge intérieur : le Ghana est un petit pays; l'inspecteur
de police pourrait obtenir de ses collègues, ailleurs au pays,
des renseignements sur la revendicatrice; de plus, la revendicatrice devrait
retourner seule au Ghana. Demande accueillie. (Décision de la SSR
M94-03192, 4 janvier 1995).
Sawadogo, Salamata c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4162-00), Rouleau, 17 mai 2001.
La demanderesse craignait devoir retourner vivre avec son mari qu'elle
avait marié contre son gré. Elle alléguait avoir
subi l'excision forcée à l'exigence de celui-ci après
que les policiers avaient refusé de la protéger. Le tribunal
n'avait pas cru que la demanderesse avait subi l'excision après
son mariage vu qu'elle n'avait pas le profil d'une personne généralement
ciblée pour cette procédure selon la documentation au dossier.
La Cour a accordé la demande pour les raisons suivantes : 1) Le
tribunal n'avait pas fait mention du certificat du médecin canadien
attestant que la demanderesse avait subi une excision ni du rapport concernant
le profil psychologique de celle-ci; 2) Le tribunal n'avait pas indiqué
s'il croyait ou non que la demanderesse ait été excisée
en bas âge; 3) La documentation sur laquelle s'était basé
le tribunal pour douter de la crédibilité de la demanderesse
permettait de conclure que les femmes plus âgées subissent
cette procédure; 4) le tribunal était tenu d'indiquer explicitement
les raisons pour lesquels il écartait les explications de la demanderesse
à l'effet qu'elle ne pouvait se prévaloir de la protection
étatique; 5) l'argument de la défenderesse à l'effet
que le tribunal n'avait pas à aborder la question des raisons impérieuses
vu le manque de crédibilité de la demanderesse est mal fondé
; et 6) selon la Cour, le but du contre-interrogatoire du tribunal relativement
à la distance entre le poste de police, l'hôpital et sa résidence
était de confondre la demanderesse et constituait un exemple de
la partialité de la SSR. Demande accueillie. (Décision de
la SSR
M99-11847, 12 juillet 2000).
Adodo, Lydia Oritseweyinmi c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-6503-00), McKeown, 25 octobre 2001; 2001 CFPI 1159.
La requérante fondait sa revendication sur sa crainte (i) de
devoir épouser Alhaji, un musulman, contre son gré et (ii) d'être
forcée de subir une excision. (1) La SSR
a indiqué que la requérante avait déclaré
qu'elle avait été autorisée à venir au Canada
en vue de la compétition en raison des liens étroits existant
entre Alhaji et le président national de l'association de volley-ball,
et qu'elle ne connaissait pas le nom de famille de cette personne malgré
le fait qu'elle faisait partie de l'équipe. Selon la transcription
cependant, la requérante a mentionné à deux reprises
le nom complet du président national. De plus, la SSR
a tiré une conclusion erronée au regard de cette preuve.
(2) Selon la preuve, la SSR
n'a pas commis une erreur susceptible de contrôle lorsqu'elle a
fait remarquer que les trois sœurs de la requérante n'avaient
pas subi d'excision. (3) La SSR
a déclaré qu'il ressortait de la preuve documentaire dont
elle disposait que le peuple Itsekiri ne pratique pas en général
la mutilation sexuelle des femmes (MSF). Cette déclaration figurait
dans la Réponse à une demande d'information no NGA35426.E,
laquelle était fondée sur la Réponse à une
demande d'information no NGA34047.E
qui n'indiquait pas clairement que le peuple Itsekiri ne pratique pas
en général la MSF. La Cour a confirmé la partie du
raisonnement de la SSR
où celle-ci refusait de reconnaître que la requérante
allait être forcée de se marier avec Alhaji, mais non celle
concernant l'excision forcée. La demande a été accueillie.
(Décision de la SSR
TA0-07666, 21 novembre 2000).
Mariage arrangé
SSR
M97-06821 et al., 14 juillet 1998.
La revendicatrice a été battue et menacée de mort par
son beau-frère qu'elle avait refusé d'épouser, et elle
a été harcelée et agressée sexuellement par
des policiers lorsqu'elle a tenté de déposer une plainte.
Elle est allée s'installer dans sa famille aux États-Unis.
Lorsqu'elle est rentrée au Pakistan pour assister au mariage d'un
membre de sa famille, elle a découvert que sa famille avait organisé
son mariage avec un veuf plus âgé qu'elle. Elle a refusé
de se marier avec cet homme, et elle a été battue et menacée
de mort. Pour statuer que la revendicatrice craignait avec raison d'être
persécutée, la Section du statut de réfugié
a tenu compte des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et de la preuve documentaire indiquant que la violence
contre les femmes est répandue au Pakistan et que la police et les
tribunaux interviennent rarement.
SSR
V99-02940 et al., 8 mai 2000.
Les revendicatrices étaient deux jeunes femmes, dont l'une mineure.
La Section du statut de réfugié a examiné les directives
concernant Les enfants qui revendiquent le statut de réfugié
: Questions relatives à la preuve et à la procédure.
L'une des revendicatrices a soutenu craindre, en tant que femme, la discrimination
de la part de ses grands-parents qui considéraient sa famille comme
un échec parce qu'elle n'avait donné naissance qu'à
des filles. Elle est venue en Amérique du Nord pour gagner de l'argent
qu'elle enverrait en Chine, afin de tenter d'améliorer la réputation
de sa famille immédiate. Elle craignait les stigmates qui la marqueraient
comme un « échec » si elle était forcée
de retourner en Chine. La Section du statut de réfugié a
conclu que ces stigmates n'équivalaient pas, dans les circonstances,
à de la persécution. Il convient de souligner que la revendicatrice
n'a pas mentionné le problème lors de son entrevue au point
d'entrée ni dans son formulaire de renseignements personnels (FRP).
Cette revendicatrice n'était pas une réfugiée au
sens de la Convention. L'autre revendicatrice a prétendu que son
père violent, qui avait beaucoup de dettes, avait arrangé
son mariage en échange d'une dot considérable. Elle a affirmé
qu'elle se suiciderait plutôt que de marier l'homme. La Section
du statut de réfugié a conclu que le préjudice équivalait
à de la persécution. Le père de la revendicatrice
tenait le registre familial dans lequel la revendicatrice était
toujours inscrite, et celle-ci ne pourrait se prévaloir de la protection
de l'État dans un village rural. Cette revendicatrice était
une réfugiée au sens de la Convention.
SSR
T99-09887, 17 mai 2000.
La revendicatrice était une Yoruba. Elle craignait de devoir se
plier à un mariage arrangé par son père. Elle a essayé
d'éviter ce mariage, mais son père a insisté et l'homme
qu'elle devait épouser l'a enfermée, l'a battue et l'a violée.
Elle a vécu dans la clandestinité avant de s'enfuir du Nigeria.
Elle a produit différents documents contenant tous des renseignements
compatibles avec sa revendication. La preuve documentaire indiquait que
les mariages arrangés de femmes instruites comme la revendicatrice
sont moins fréquents dans les régions urbaines du Nigeria.
Cependant, compte tenu du fait que le père et la mère de
la revendicatrice viennent tous deux de petits villages et que la famille
a une dette envers l'homme qu'elle devait épouser, il était
vraisemblable qu'un mariage ait été arrangé en l'espèce.
Comme les mariages traditionnels ne sont pas contraires à la loi
au Nigeria, la revendicatrice ne pouvait pas bénéficier
d'une protection adéquate de l'État. La Section du statut
de réfugié a consulté les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
SSR
T99-14088, 2 juin 2000.
La revendicatrice, une adolescente, a été forcée
d'épouser son cousin. Elle s'est opposée au mariage et a
été l'objet de violence physique et psychologique durant
des semaines avant de réussir à s'échapper avec l'aide
d'un autre cousin, lequel été battu et a reçu des
menaces de mort en conséquence. La police a refusé d'intervenir.
La Section du statut de réfugié a décidé que
la revendicatrice avait été victime de persécution
à cause de son appartenance à un groupe social, les femmes
forcées de se marier. Selon la preuve documentaire, la violence
familiale est un problème grave et répandu au Pakistan,
la police intervient rarement et les femmes hésitent à porter
plainte à cause des mœurs sociales qui stigmatisent le divorce
et rendent les femmes dépendantes des membres de leur famille sur
le plan économique et psychologique. Il serait objectivement déraisonnable
pour la revendicatrice de chercher à obtenir la protection de l'État.
Elle n'avait aucune possibilité de refuge intérieur (PRI)
puisque les femmes qui contreviennent aux coutumes ont beaucoup de difficulté
à trouver un refuge, ne connaissent pas le service de transport
public, n'ont habituellement pas d'argent et sont susceptibles d'être
de nouveau victimes de violence si elles déménagent. Il
y a des refuges pour les femmes, mais ceux-ci ne peuvent ou ne veulent
généralement pas protéger les femmes contre les membres
de leur famille. La Section du statut de réfugié a tenu
compte des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe.
SSR
T99-06804, 11 juillet 2000.
La belle-famille de la revendicatrice la soupçonnait d'avoir causé
la mort de son mari. Pour prouver son innocence, elle devait participer
à certains rites et épouser son jeune beau-frère.
Elle a refusé de participer à certains des rites imposés
à cause de sa religion - elle est chrétienne. Elle a également
refusé d'épouser son beau-frère parce qu'il était
polygame. Elle a été accusée d'être une sorcière
et elle craignait d'être tuée par sa belle-famille si elle
retournait au Nigeria. Elle craignait en particulier l'un de ses beaux-frères,
un policier haut gradé qui était apparemment en mesure de
la retracer peu importe où elle se trouverait au Nigeria. Selon
la preuve documentaire, le lévirat est bien ancré dans la
société nigériane. En outre, la preuve documentaire
étayait l'allégation de la revendicatrice selon laquelle
la police n'intervient pas dans des affaires qu'elle considère
être des affaires familiales. La revendicatrice craignait avec raison
d'être persécutée du fait à la fois de sa religion
et de son appartenance à un groupe social si elle devait retourner
au Nigeria. De plus, elle ne pouvait pas bénéficier de la
protection de l'État et elle n'avait pas de possibilité
de refuge intérieur (PRI).
SSR
TA0-13595 et al., 21 août 2001.
La revendicatrice prétendait craindre d'être persécutée
en raison de son sexe et de son appartenance à un groupe social.
Elle a décrit le rôle et la religion de son père et
les mauvais traitements exercés contre elle et d'autres membres
de sa famille par celui-ci. Son père et son ex-fiancé avaient
voulu la tuer pour une question d'honneur après qu'elle eut refusé
un mariage arrangé et épousé un autre homme. Le couple
a eu un enfant. Le mari de la revendicatrice a ensuite été
battu par l'ex-fiancé de celle-ci et la police a refusé
de mener une enquête sur leur plainte. Il ressortait clairement
de la preuve documentaire que des meurtres sont commis par vengeance en
Turquie, et la loi prévoit des peines réduites pour les
meurtres commis à la suite d'une provocation. Il existait plus
qu'une simple possibilité que la revendicatrice soit persécutée
en Turquie en raison de son sexe et de son appartenance à un groupe
social. La Section du statut a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
SSR
MA0-00006, 26 novembre 2001.
La revendicatrice alléguait une crainte bien fondée de persécution
en raison de son appartenance à un groupe social, celui du sexe
féminin. La revendicatrice craignait son père qui lui avait
infligé des sévices corporels parce qu'elle avait refusé
d'épouser un homme plus âgé, qui avait déjà
deux femmes et douze enfants. La revendicatrice avait témoigné
qu'elle s'était enfuie d'abord au Cameroun, puis en Russie où
elle avait épousé un médecin d'origine congolaise.
Elle s'était par la suite établie au Congo où son
mari, en raison de ses activités politiques, aurait été
enlevé ainsi que ses enfants. Le tribunal avait tenu compte des
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe ainsi que d'autres lignes directrices émanant
de documents internationaux concernant les violations des droits fondamentaux
des femmes. En outre, la preuve documentaire faisait état des mariages
forcés et précoces ainsi que de la discrimination faite
aux femmes en République centrafricaine. Une bonne partie des allégations
de la revendicatrice étaient corroborée, soit par la preuve
documentaire, soit par son témoignage. Elle avait témoigné
de manière spontanée et aucune contradiction importante
n'avait été décelée entre son témoignage
et la preuve documentaire. Par ailleurs, le tribunal était d'avis
que la revendicatrice ne pouvait se prévaloir de la protection
de l'État dans son pays. En ce qui concerne la possibilité
de refuge intérieur, même si la revendicatrice était
maintenant majeure, étant donné son profil et son évaluation
psychologique, il aurait été difficile pour elle d'aller
se réfugier dans une autre partie de son pays, où les droits
des femmes étaient bafouées à tous les niveaux.
La revendicatrice était une réfugiée au sens
de la Convention.
SPR MA1-08227, 19 août 2002.
La demanderesse d'asile craignait d'être persécutée
en raison de son appartenance à un groupe social, soit les femmes
promises à un mariage arrangé. Elle prétendait être
une personne à protéger parce qu'elle serait exposée,
en cas de retour dans son pays, à une menace à sa vie ou
au risque de traitements ou peines cruels ou inusités. La demanderesse
avait témoigné que son père l'avait promise en mariage
à un homme beaucoup plus âgé qu'elle, afin de régler
une dette importante contractée envers lui. Selon la preuve documentaire,
les mariages forcés existaient chez les Issas de la République
de Djibouti, éthnie à laquelle appartenait la demanderesse.
Des jeunes filles étaient offertes en mariage dès l'âge
de 13 ans. Le tribunal s'est référé aux paragraphes
215 et 216 du Guide des procédures et critères à
appliquer pour déterminer le statut de réfugié
en ce qui concerne les demandes d'asile de mineurs. Il s'est également
référé à la jurisprudence qui soulignait que
les femmes qui étaient forcées de contracter mariage contre
leur volonté voyaient violer leur droit humain fondamental. Par
ailleurs, le tribunal a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, de l'absence
de protection et de la possibilité de refuge intérieur et
a conclu que la demanderesse était une réfugiée au
sens de la Convention.
SPR TA1-21612 et al., 9 septembre 2002.
La demandeure d'asile a allégué craindre d'être persécutée
en raison de son appartenance à un groupe social, soit les femmes
qui refusent de se conformer aux pratiques traditionnelles, ainsi qu'en
raison de ses opinions politiques présumées. Le demandeur
d'asile a allégué craindre d'être persécuté
à cause de ses opinions politiques. Après la disparition
du demandeur d'asile, qui était exposé à de la persécution
à cause de ses convictions politiques, la demandeure d'asile a
été contrainte au lévirat avec le frère de
celui-ci, contre sa volonté. Son nouveau mari la maltraitait et
menaçait de la tuer. Le demandeur d'asile était membre du
parti d'opposition Mouvement pour un changement démocratique (MDC)
et travaillait pour une organisation non gouvernementale, pour laquelle
il faisait du travail communautaire. Il s'est caché après
que cinq membres du MDC eurent été tués. La preuve
de la demandeure d'asile concernant la pratique du lévirat était
compatible avec la preuve documentaire, qui démontre que, malgré
l'interdiction prévue par la loi, les femmes sont encore vulnérables
aux pratiques habituelles reconnues, comme contraindre une veuve à
épouser le frère de son défunt mari. La violence
conjugale est endémique au Zimbabwe, et la police ne donne pas
suite aux demandes d'aide. Pour ce qui est du demandeur d'asile, la preuve
documentaire fait état de plusieurs cas de violence et d'agressions,
parfois fatales, à l'égard de membres du MDC. Les deux demandeurs
d'asile ont une crainte fondée de persécution.
Vidhani c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] 3 C.F.
60 (1re inst.).
La revendicatrice était une femme asiatique du Kenya, de religion
musulmane. Son père avait arrangé pour elle un mariage avec
un homme qu'elle ne voulait pas épouser. Elle craignait les mauvais
traitements de son père si elle refusait de marier cet homme et
elle craignait d'être maltraitée par ce dernier si elle l'épousait.
Elle n'avait pas demandé la protection de la police. Elle a témoigné
qu'elle craignait que la police ne l'agresse sexuellement si elle se plaignait
d'être forcée de contracter mariage. La Cour a parlé
de deux groupes sociaux possibles soit le groupe des femmes asiatiques
au Kenya et celui des femmes qui sont forcées de contracter mariage
contre leur volonté. En ce qui concerne les groupes sociaux possibles
et la persécution, la Cour a examiné les directives de la
présidente intitulées Revendicatrices du statut de réfugié
craignant d'être persécutées en raison de leur sexe.
Elle a signalé qu'il était question dans l'arrêt Canada
(P.G.) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689 des cas reliés au sexe, et elle a dit que la revendicatrice
entrait dans la catégorie des groupes définis par une caractéristique
innée ou immuable. Les femmes qui sont forcées de contracter
mariage contre leur volonté voient violer leur droit humain fondamental.
Toutefois, la restriction de l'exercice d'un droit de la personne ne constitue
pas de la persécution dans tous les cas. La Section du statut n'a
pas examiné, de façon appropriée, ce qui arriverait
à la revendicatrice si elle refusait de se marier. Elle
a conclu qu'il serait raisonnable pour celle-ci de demander la protection
de l'État pour la protéger des mauvais traitements de la
part de son père; elle ne disposait toutefois d'aucune preuve documentaire
concernant l'attitude des autorités et elle n'a tiré aucune
conclusion défavorable quant à la crédibilité.
Elle aurait dû examiner la déposition de la revendicatrice
sur la possibilité d'une agression sexuelle pour déterminer
si cela constituait de la persécution. Demande accueillie. (Décision
de la SSR
U93-04148, 9 juin 1994).
U.G. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1907-96), Heald, 10 juillet 1997.
La revendicatrice était une ressortissante du Zimbabwe qui avait
été forcée de se marier en vertu du droit coutumier
et traditionnel et qui affirmait que son époux lui faisait subir
des sévices physiques et sexuels. La Cour devait déterminer
si la Section du statut de réfugié avait commis une erreur
(1) en concluant que la revendicatrice n'avait pas établi l'absence
de protection de l'État et (2) en concluant que la revendicatrice
avait tardé de façon déraisonnable à quitter
le Zimbabwe. Même si la Section du statut de réfugié
a reconnu que les femmes qui ont été forcées de se
marier et qui sont victimes de violence peuvent constituer un «
groupe social », elle a conclu que la revendicatrice
n'avait pas réussi à établir que la protection légale
à sa disposition était inefficace. La Cour a statué
que le tribunal n'avait pas commis d'erreur en concluant qu'il n'y avait
pas absence de protection de l'État durant toutes les périodes
pertinentes. La Cour a déclaré que le Zimbabwe était
un pays en transition, que la pratique de l'échange d'épouses
n'avait pas été complètement bannie, que le tribunal
a reconnu que le droit coutumier et traditionnel existe toujours au Zimbabwe
et que cela était confirmé par la documentation pertinente.
Quant à la question du retard déraisonnable, le tribunal
a décidé que la revendicatrice avait exagéré
les mauvais traitements infligés par son époux et qu'elle
avait eu toute la liberté et le loisir voulus pour quitter le pays.
Elle possédait un passeport valide et assez d'argent pour faire
le voyage; sa soeur se trouvait au Canada, où aucun visa n'est
requis pour voyager. La Cour a souscrit à la conclusion de la Section
du statut de réfugié selon laquelle le défaut de
la revendicatrice de se retirer de la situation prétendument violente
où elle se trouvait était incompatible avec son témoignage
au sujet des sévices graves qu'elle aurait subis et qu'elle disait
craindre de la part de son époux et ne correspondait pas à
l'attitude d'une personne raisonnable placée dans la situation
alléguée par la revendicatrice. La demande a été
rejetée. (Décision de la SSR
U95-02789, 10 mai 1996).
Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) c. Lin, Dan (C.F.
1re
inst., IMM-2996-00), Tremblay-Lamer, 21 mars 2001.
La requérante, qui est née en Chine en 1983, est arrivée
au Canada par bateau le 13 août 1999. La SSR
a estimé qu'elle craignait avec raison d'être persécutée
vu que son père l'avait forcée à se marier et que
l'État ne pouvait pas la protéger. Cette décision
a fait l'objet d'un contrôle judiciaire à la demande du ministre.
L'affaire concernait un père violent qui n'a pas modifié
l'enregistrement du ménage de façon à y rayer le
nom de l'intimée. Compte tenu de ces circonstances, du témoignage
de l'intimée, du témoignage de sa mère corroborant
le fait qu'un préjudice lui sera causé si elle retourne
dans son pays et de la preuve d'expert sur la violence faite aux enfants,
la Cour a jugé que la décision de la SSR
était raisonnable. Elle a rejeté les arguments du ministre
selon lesquels la SSR
n'avait pas examiné la PRI
ni pris en considération de manière appropriée la
protection de l'État. La demande a été rejetée.
(Décision de la SSR V99-02957,
8 mai 2000).
Diallo, Houssainatou c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-5850-01), Pinard, 26 novembre 2002; 2002 CFPI 2004.
La revendication de la demanderesse basée sur son appartenance
à un groupe social, soit le fait d'être une femme victime
de mariage forcée, avait été rejetée pour
manque de crédibilité. Selon la Cour, les réponses
de la demanderesse n'étaient pas vagues. Les explications de la
demanderesse quant au délai de revendiquer étaient raisonnables.
Selon la preuve, le délai d'environ cinq mois s'expliquait par
le fait que la demanderesse avait le droit d'être au Canada sous
son visa d'étudiante et qu'elle souffrait de symptômes dépressifs
sévères. Demande accueillie. (Décision de la SPR
MA1-02434, 7 décembre 2001).
Violence familiale
SSR
T93-07375, 18 janvier 1994.
L'intéressée a épousé un ressortissant de
la Barbade au Canada. Durant son mariage, cet homme l'a agressée
physiquement et sexuellement et il a aussi agressé physiquement
leurs enfants. L'intéressée a sollicité la protection
de divers organismes au Canada et a déménagé à
douze reprises pour échapper à ces abus. Renvoi à
la Barbade, l'époux de l'intéressée a déclaré
à la mère de cette dernière que quand sa fille rentrerait
au pays, il la tuerait. Le tribunal a pris en considération les
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et, notamment, la disponibilité de la protection
de l'État. Même s'il ressortait de la preuve documentaire
que les autorités barbadiennes traitent avec sérieux la
violence conjugale, le tribunal a conclu que l'intéressée
ne pouvait jouir d'une protection adéquate du fait du comportement
extrêmement violent de son époux, du manque de mobilité
de l'intéressée à cause de ses enfants et de la preuve
de la présence de femmes aux prises avec une situation similaire
au sein de sa famille. De l'avis du tribunal, l'intéressée
ne pouvait se réfugier qu'à l'extérieur de la Barbade
et dans un pays dans lequel son époux n'avait pas accès.
SSR
U96-03318, 9 juin 1997.
Les beaux-parents de la revendicatrice, insatisfaits de la dot versée
par la famille de celle-ci, ont commencé à la maltraiter
et à exiger plus d'argent à la suite de son mariage arrangé.
Elle a fait deux fausses couches après avoir été
battue par sa belle-mère et son beau-frère. Elle a pris
la fuite lorsque son époux lui a lancé du kérosène,
mais ses beaux-parents l'ont suivie à la demeure de ses parents,
où ils les ont attaquées et menacées, elle et sa
famille. Elle a signalé l'incident à la police, mais celle-ci
n'a pas voulu lui venir en aide. Après avoir examiné les
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, la Section du statut de réfugié
a conclu que la revendicatrice craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un groupe social, soit les femmes
victimes de violence familiale découlant d'une querelle au sujet
de la dot. Selon la preuve documentaire, les demandes illégales
de dot en Inde ont provoqué plus de morts entre 1988 et 1991 que
le mouvement séparatiste sikh, et les morts reliées à
des querelles de dot n'ont donné lieu à aucune condamnation
entre 1992 et 1994. La revendicatrice ne pouvait pas bénéficier
de la protection de l'État, car les autorités n'étaient
pas disposées à la lui accorder.
SSR
M97-04087 et al., 15 décembre 1997.
La revendicatrice principale s'était mariée contre son gré,
en 1986. Son mari la battait souvent, il buvait et ne voulait pas travailler.
Elle avait demandé l'aide de ses parents qui, ne voulant pas aller
à l'encontre des coutumes indiennes, la renvoyaient toujours chez
son mari. Elle s'est enfuie chez une cousine, à Delhi, mais celle-ci
l'a dit au mari de la revendicatrice principale. Le mari est revenu la
chercher et a menacé de la tuer, ainsi que ses filles (les revendicatrices
mineures), si elle allait se plaindre à la police. La Section du
statut de réfugié a conclu que les revendicatrices étaient
des réfugiées au sens de la Convention. Elle a fait mention
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et a conclu à l'application du sous-paragraphe
3 de la section I des directives. Ce paragraphe vise les actes de violence
familiale et le fait que l'État ne veut ou ne peut protéger
adéquatement la victime.
SSR
T96-04627, 23 décembre 1997.
La revendicatrice avait été agressée physiquement
et sexuellement par son beau-père, depuis son enfance. Les explications
qu'elle a données visant le fait qu'elle n'avait pas présenté
une revendication du statut de réfugié les deux fois où
elle aurait pu le faire, d'abord au Canada puis à la Barbade, étaient
plausibles. Elle n'était venue la première fois au Canada
que six mois après la parution des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe et elle
ne savait pas qu'elle pouvait présenter une revendication du statut
de réfugié fondée sur l'abus sexuel et l'agression
physique. Elle ne s'était pas sentie en sécurité
à la Barbade, où son beau-père se rendait souvent
pour son travail. Son retard à revendiquer le statut de réfugié
après sa venue au Canada une deuxième fois s'expliquait
par le fait qu'elle avait rencontré un homme et croyait qu'elle
l'épouserait; elle n'avait donc pris aucune mesure indépendante
pour régulariser sa situation, avant d'être agressée
physiquement. Malgré l'adoption de la Domestic Violence Act
1995, l'efficacité des mesures prises par le gouvernement
de Saint-Vincent pour régler le problème de la violence
familiale était limitée par l'absence de renseignements,
la surcharge de travail des tribunaux et les attitudes de la société,
en particulier l'attitude de la police. La revendicatrice ne pourrait
se prévaloir de la protection de l'État.
SSR
T96-02426, 7 janvier 1998.
La revendicatrice était victime de violence familiale. La Section
du statut de réfugié a pris en considération les
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et a décidé que la revendicatrice
n'était pas une réfugiée au sens de la Convention.
Celle-ci pouvait se prévaloir, en Jamaïque, d'une protection
adéquate de l'État. Selon la preuve documentaire, la loi
et les services offerts, qui étaient nombreux et se multipliaient
rapidement, permettaient de résoudre le problème de la violence
familiale.
SSR
M95-08207, 18 février 1998.
La revendicatrice a soutenu que son conjoint de fait, qui était
alcoolique et toxicomane, la battait souvent et avait menacé de
la tuer. Comme l'a fait remarquer la Section du statut de réfugié,
la preuve documentaire indiquait que la police, à Grenade, hésitait
souvent à intervenir pour aider les femmes qui étaient victimes
de violence familiale. Quand l'État ne prend pas de mesures réelles
pour modifier l'attitude de la police à l'égard de la violence
conjugale dont sont victimes les femmes, on peut raisonnablement présumer
que l'État lui-même ne veut pas assurer une protection aux
femmes lorsqu'elles sont agressées et violentées par leurs
conjoints. Il s'est écoulé plus de sept ans entre l'arrivée
de la revendicatrice au Canada et le dépôt de sa revendication.
La Section a tenu compte de l'explication de la revendicatrice -- à
savoir qu'elle s'était abstenue de revendiquer le statut de réfugié
parce qu'elle craignait d'être renvoyée à la Grenade
-- ainsi que de la remarque du conseil selon laquelle les directives de
la présidente intitulées Revendicatrices du statut de réfugié
craignant d'être persécutées en raison de leur sexe
n'avaient été données que récemment. La revendicatrice
a démontré qu'elle craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un groupe social : les femmes qui
fuient la persécution de conjoints violents dans leur pays natal
et auxquelles l'État ne veut pas accorder une protection.
SSR
M98-09327, 25 août 1999.
La revendicatrice alléguait une crainte fondée de persécution
dans son pays en raison de la violence qu'elle aurait subie pendant plusieurs
années de la part de son conjoint de fait. La revendicatrice aurait
fait l'objet d'insultes, de cruauté physique et mentale, de traitements
dégradants, de viol et de privation de liberté. Ayant été
menacée avec une arme, la revendicatrice aurait décidé
de demander la protection de la police. Cependant, quelques jours plus
tard, son conjoint de fait aurait menacée de la tuer si elle parlait
encore une fois de leur vie de couple à un policier ou à
un militaire. La Section du statut de réfugié avait trouvé
crédible le témoignage de la revendicatrice et avait pris
en considération les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe, ainsi que la situation
des femmes en général au Honduras. De plus, selon la preuve
documentaire, la situation des femmes victimes de violence conjugale était
très difficile au Honduras. Les recours et la protection étaient
presque inexistants pour ces femmes et ce, malgré l'existence d'une
loi contre la violence familiale. La revendicatrice était une réfugiée
au sens de la Convention.
SSR
A99-00937 et al., 16 août 2000.
La revendicatrice a soutenu qu'elle avait été victime pendant
de nombreuses années de la violence physique de son mari. Elle
a affirmé que l'interprète qui l'avait aidée à
remplir sa revendication et qui avait préparé les formulaires
envoyés par la poste lui avait conseillé de mentir ou d'embellir
son récit, et lui avait offert de fabriquer une histoire en contrepartie
d'une somme d'argent. Comme l'interprète était lié
par des relations employeur-employé avec le premier conseil de
la revendicatrice, le conseil s'est récusé. L'interprète/
consultant en immigration a témoigné et on a jugé
qu'il s'était montré évasif et non sincère.
Le tribunal a fait remarquer que le conseil non approprié que l'interprète
avait donné à la revendicatrice avait presque entraîné
le rejet de sa revendication du statut de réfugié. Malgré
les nombreuses invraisemblances et contradictions qu'il contenait, le
témoignage de la revendicatrice ne comportait cependant aucune
contradiction ni invraisemblance au sujet de la violence de son conjoint.
On a fait valoir que la description de la violence dont la revendicatrice
a été victime ne correspondait pas au scénario type.
Son conseil a toutefois présenté une preuve documentaire,
obtenue d'un expert et indiquant que le scénario de violence décrit
par la revendicatrice faisait partie d'un ensemble de scénarios
connus, ainsi que des rapports psychiatriques obtenus de Pologne qui confirmaient
les troubles dont souffrait le mari de la revendicatrice. Dans les circonstances,
la protection de l'État contre la violence du conjoint n'était
pas suffisante. De plus, la revendicatrice n'avait pas de possibilité
de refuge intérieur (PRI).
La revendicatrice craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un groupe social : les femmes battues.
La revendicatrice mineure, la fille de la revendicatrice principale, craignait
avec raison d'être persécutée à titre de parente
de la revendicatrice.
SSR
TA0-00844, 24 mars 2001.
La revendicatrice prétendait craindre d'être persécutée
si elle retournait en Russie en raison du comportement violent de son
ancien mari, lequel appartenait à un groupe d'extrémistes
nationalistes. Elle a décrit de nombreux actes de violence et des
mauvais traitements dont elle a été victime; elle a notamment
parlé d'un viol et de la fausse couche qui s'en est suivie. Elle
a tenté, mais sans succès, d'obtenir la protection de l'État.
La revendicatrice est allée chez ses parents, mais on l'a poursuivie
et forcée à retourner vivre avec son mari. Elle s'est réfugiée
chez un ami, mais elle a de nouveau été poursuivie et forcée
de retourner vivre avec son mari. Ses allégations étaient
étayées par des rapports médicaux et des lettres
d'amis vivant à Moscou selon lesquels son ancien mari était
continuellement à sa recherche et lui laissait des messages de
menaces. La Section du statut de réfugié a appliqué
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Elle a conclu que les femmes qui sont continuellement
battues ne peuvent pas bénéficier de la protection de l'État
en Russie. En l'espèce, la revendicatrice n'avait pas non plus
le soutien de sa famille, et elle craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un groupe social, les femmes battues.
Fouchong, Donna Hazel c. Canada (Secrétaire
d'État) (C.F.
1re
inst., IMM-7603-93), MacKay, 18 novembre 1994.
L'intéressée a été battue, agressée
sexuellement et menacée de mort par son mari. Deux plaintes auprès
de la police sont restées sans effet. Après son arrivée
au Canada, l'intéressée a obtenu le divorce. Elle a affirmé
craindre la persécution en raison de son appartenance à
un certain groupe social, à savoir les femmes victimes de violence
conjugale craignant d'être persécutées aux mains de
leur ancien conjoint en cas de renvoi dans leur pays d'origine. La Cour
a jugé que la Section du statut de réfugié n'avait
pas traité comme il se doit la question de savoir si l'intéressée
était membre d'un certain groupe social. Au lieu d'évaluer
la situation de l'intéressée à la lumière
des principes énoncés dans Canada (Procureur général)
c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689, la Section du statut de réfugié a rendu une décision
défavorable à l'intéressée, en invoquant l'absence
de précédent où des faits similaires auraient abouti
à la reconnaissance d'un groupe social particulier. Cependant,
la Cour n'a pas admis l'appartenance de l'intéressée à
un certain groupe social, car on ne peut définir un groupe social
uniquement sur la base d'une victimisation commune de ses membres. Il
ne suffisait pas pour la Section du statut de réfugié de
conclure simplement qu'il ne s'agissait pas d'une situation de violence
conjugale, mais plutôt d'une situation telle que l'intéressée
craignait des agressions criminelles de la part de son ex-conjoint. Il
n'était pas déraisonnable que la Section du statut de réfugié
conclue que l'intéressée disposerait de la protection de
l'État. La situation à la Grenade, comme ailleurs, peut
certes laisser à désirer, mais la preuve documentaire témoigne
d'un souci croissant d'y remédier et de mesures en vue de protéger
les femmes victimes de violence conjugale ou d'autres actes de violence
illégale. La demande a été rejetée. (Décision
de la SSR
U93-07212, 3 décembre 1993).
Narvaez c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] 2 C.F.
55 (1re inst.).
La revendicatrice craignait d'être brutalisée par son ex-mari
si elle devait retourner en Équateur. La seule fois où elle
a demandé la protection de la police, pendant les sept ans qu'ont
duré les abus, les policiers ne sont arrivés chez elle que
bien après son appel et sa plainte a été biffée
dans le registre policier. La Cour a annulé la décision
de la Section du statut de réfugié au fondement qu'elle
n'avait pas traité adéquatement de l' « appartenance
au groupe social ». La Cour a examiné l'arrêt Canada
(Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689 et les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. Elle a conclu que « les femmes équatoriennes
victimes de violence familiale appartiennent à un groupe social
». En outre, la Section du statut de réfugié n'a pas
tenu compte de la façon dont les policiers traitaient les femmes
victimes de violence familiale en Équateur. L'expérience
antérieure de la revendicatrice et de femmes dans la même
situation étaient des preuves du manque de protection offert à
ces femmes. De l'avis de la Cour, le fait que la revendicatrice soit maintenant
divorcée n'aurait pas d'effet sensible sur l'ampleur de la protection
offerte par la police. La demande est accueillie. (Décision de
la SSR
U93-10881, 19 juillet 1994).
Cuffy, Loferne Pauline c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., no. IMM-3135-95), McKeown, le 16 octobre 1996.
La revendicatrice était victime de violence familiale. Ses efforts
visant à obtenir l'aide de la police ont été vains,
car celle-ci affirmait ne pouvoir lui venir en aide que s'il y avait des
preuves physiques de l'abus. La Section du statut de réfugié
a conclu que la revendicatrice n'était pas une réfugiée
au sens de la Convention, car elle n'avait pas épuisé tous
les recours qui s'offraient à elle avant de quitter le pays. La
Cour a conclu que la revendicatrice avait demandé l'aide des policiers
à plusieurs reprises, mais en vain. La Section du statut a confondu
la preuve documentaire concernant l'existence de services de counselling
et autres ressources avec la capacité de l'État d'offrir
une protection. La revendicatrice n'avait pas à utiliser ses propres
ressources, et une offre de counselling ne constituait pas un geste de
protection de la part de l'État. Selon la Cour, le counselling
ne peut remplacer la protection de la police. La demande est accueillie.
(Décision de la SSR
T94-07002, 30 octobre 1995).
Avortement forcé
SSR
V95-02063, 22 avril 1997.
La revendicatrice avait trois enfants. Lorsqu'elle est devenue enceinte
pour la deuxième fois, elle a été obligée
de se faire avorter, à la suite de quoi un stérilet lui
a été installé de force. Elle a été
avertie qu'elle devrait se faire avorter si elle devenait encore enceinte
et qu'elle serait stérilisée. La revendicatrice a eu son
deuxième enfant à l'extérieur de la Chine et elle
n'a pas déclaré qu'elle en était la mère lorsqu'elle
est retournée en Chine avec celui-ci. Lorsque la revendicatrice
a refusé de subir un deuxième avortement après être
devenue enceinte de son troisième enfant, l'entreprise de son mari
a été confisquée. Le troisième enfant est
né au Canada. La Section du statut de réfugié a conclu
que la revendicatrice craignait avec raison d'être persécutée
du fait des opinions politiques qui lui sont attribuées - sa détermination
manifeste à exercer son choix de procréer au mépris
de la politique de l'enfant unique de la Chine - et de son appartenance
à un groupe social, soit celui des femmes en Chine qui craignent
d'être stérilisées contre leur gré parce qu'elles
ont contrevenu à la politique chinoise de contrôle des naissances
en ayant plus d'un enfant. Il y avait de nombreuses différences
dans la manière dont la politique de l'enfant unique était
appliquée; toutefois, il aurait été déraisonnable
d'exiger que la revendicatrice tienne tête aux autorités
dans l'espoir que la peine infligée puisse mettre un terme à
la stérilisation forcée.
SSR
VA0-00592, 21 juin 2000.
La revendicatrice et son mari ont décidé d'avoir un autre
enfant malgré la politique de l'enfant unique appliquée
par la Chine parce que leur premier enfant avait une déficience
intellectuelle. La revendicatrice a été arrêtée
quand elle était enceinte de huit mois et a dû subir un avortement
contre son gré. Selon la Section du statut de réfugié,
la revendicatrice avait une crainte subjective de persécution,
elle avait en fait été persécutée dans le
passé lorsqu'on l'avait forcée à subir un avortement
et il existait plus qu'une simple possibilité qu'elle subisse contre
son gré un autre avortement ou une stérilisation, ou les
deux, si elle retournait en Chine. La Section du statut de réfugié
a porté à l'attention des autorités différents
aspects de la situation et le lien existant entre eux. La revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée du fait de
son appartenance à un groupe social, à savoir les femmes
qui, en Chine, ont un enfant et sont susceptibles d'être stérilisées
contre leur gré.
Lai, Quang c. Canada (Ministre de
l'Emploi et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-307-93), McKeown, 20 mai 1994.
L'intéressée a été forcée de subir
un avortement, en rapport avec la politique chinoise de l'enfant unique.
La Section du statut de réfugié a rendu sa décision
avant l'affaire Cheung c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),
[1993] 2 C.F. 314 (C.A.)
et Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),
[1993] 3 C.F. 675 (C.A.).
Elle a conclu que la politique chinoise d'un enfant unique n'avait pas
en soi un caractère persécutif; que les fortes amendes imposées
comme pénalité ne constituaient pas un acte de persécution;
et que, même s'il y avait une possibilité raisonnable que
l'on force l'intéressée à subir un autre avortement,
la situation n'était liée à aucun des motifs énoncés
dans la Convention. La Cour a déclaré qu'un avortement forcé,
qui revient à envahir le corps d'une femme, est un acte assimilable
à une stérilisation forcée et, d'après les
décisions Cheung et Chan, la stérilisation
forcée est un acte de persécution. La question n'était
pas de savoir si l'intéressée avait été forcée
de subir un avortement dans le passé, mais plutôt s'il y
avait une possibilité raisonnable qu'elle soit obligée d'en
subir si elle retournait en Chine. Le premier avortement était
pertinent à cette question, mais il faudrait aussi tenir compte
de la preuve relative à d'autres points, comme les pratiques locales.
Des sanctions économiques ne constituaient pas un acte de persécution.
La demande a été rejetée. (Décision de la
SSR
T90-10540 et al., 3 février 1993).
Stérilisation forcée
SSR
V99-03499, 15 février 2000.
La revendicatrice, une jeune femme venant d'une région rurale,
prétendait craindre d'être stérilisée en vertu
de la politique de planification familiale de la Chine si elle était
forcée de retourner dans ce pays. Elle a indiqué que son
mari l'avait quittée après avoir emprunté de l'argent
à sa famille. Son père et son frère avaient dit à
un agent d'immigration que son mari était décédé.
La revendicatrice a expliqué cette contradiction en indiquant que
sa famille était gênée que son mari l'ait abandonnée
et préférait agir comme s'il était mort. La Section
du statut de réfugié a accepté cette explication
et a fait remarquer que la contradiction n'était pas importante
car elle ne concernait pas nécessairement un élément
fondamental de la revendication, et que, de façon générale,
la revendicatrice était crédible. Comme la Cour d'appel
fédérale l'a statué dans l'affaire Cheung c.
Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 2 C.F.
314 (C.A.), la stérilisation
forcée des femmes est une violation essentielle des droits fondamentaux
de la personne, et la menace de stérilisation forcée peut
engendrer une crainte de persécution.
Liang, Zhai Kui c. Canada (Ministre
de l'Emploi et de l'Immigration) (CF 1re
inst., IMM-2487-93), Denault, le 2 novembre 1993.
La Cour a convenu avec la Section du statut de réfugié (SSR)
qu'une personne qui fait face à une stérilisation forcée
à cause de la politique de l'enfant unique qui est appliquée
en Chine craint d'être persécutée du fait de son appartenance
à un certain groupe social. La question en jeu consistait à
savoir si cette crainte était fondée ou non. La SSR
a évalué la preuve documentaire et le témoignage
de l'intéressé, et il lui était loisible, au vu de
la preuve, de conclure qu'il n'y avait aucune possibilité sérieuse
de stérilisation forcée. La demande a été
rejetée. (Décision de la SSR
U93-00876, 30 avril 1993).
Cheung c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1993] 2 C.F.
314 (C.A.).
Dans l'affaire Cheung, la Cour d'appel fédérale
a conclu, d'une part, que [traduction] « les Chinoises qui ont plus
d'un enfant et qui peuvent, ainsi, être stérilisées
contre leur gré forment un groupe social selon la définition
de réfugié au sens de la Convention » et, d'autre
part, que [traduction] « la stérilisation forcée dans
le contexte de la politique de l'enfant unique en Chine » équivaut
à une forme de persécution. Après la naissance de
son premier enfant, l'appelante s'est fait avorter trois fois. Par la
suite, elle a dû se cacher pour donner naissance à son deuxième
enfant, la deuxième appelante, qu'elle a laissé avec la
famille de son mari. Selon la preuve présentée, aucune allocation
ne serait versée pour nourrir cet enfant, qui ne recevrait, au
mieux, qu'une instruction médiocre. Peu après, le bureau
de planification familiale a obligé l'appelante à se faire
stériliser. Avant que l'intervention n'ait lieu l'appelante s'est
échappée et s'est réfugiée dans la famille
de son mari. Une nouvelle grossesse l'a obligée à subir
un autre avortement. Les commissaires de la Section du statut de réfugié
saisis de l'affaire ont reconnu que l'appelante serait stérilisée
si elle retournait en Chine. Cependant, ils ont conclu que la politique
de l'enfant unique en Chine était une loi d'application générale,
ne comportant [traduction] « aucune intention de persécution
de la part du gouvernement de la Chine », et résultant [traduction]
« non pas d'un caprice, mais d'un choix logique sur la plan économique
». La Cour a conclu que les commissaires auraient dû s'arrêter
aux méthodes utilisées pour exécuter la loi plutôt
que de concentrer leur attention sur son objet général.
[traduction] « La Commission n'a donc pas tenu compte du fait que
la stérilisation constituait une atteinte très grave à
l'intégrité physique et mentale d'une personne. »
En affirmant qu'il y avait absence d'intention de persécution,
les commissaires ont aussi commis une erreur, car il est suffisant que
le résultat équivaille à une forme de persécution.
La Cour a fait mention de la décision rendue par la Cour d'appel
dans l'affaire Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c.
Mayers, [1993] 1 C.F.
154, et, plus précisément, des critères qui y sont
énoncés comme fondement utile à la formulation d'une
définition de groupe social. À cet égard, la Cour
a conclu que les Chinoises qui avaient un enfant et qui pourrait être
stérilisées contre leur gré répondent à
un nombre suffisant de ces critères pour former un groupe social.
Cependant, la Cour a ajouté que seules les femmes craignant réellement
d'être persécutées pour cette raison pouvaient revendiquer
le statut de réfugié. De l'avis du juge Linden, la politique
de l'enfant unique en Chine est effectivement une loi d'application générale,
mais la stérilisation forcée des Chinoises qui ont déjà
un enfant ne l'est pas. M. le juge Linden a affirmé : [traduction]
« Cette pratique ne vise qu'un groupe restreint et bien délimité
de personnes et n'est pas suivie de façon générale.
» La preuve indiquait qu'il ne s'agissait pas d'une pratique généralisée
en Chine. Citant à l'appui l'affaire Padilla c. Canada (Ministre
de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 13 Imm. L.R. (2d) 1 (C.A.F.),
la Cour a ajouté que même si la stérilisation forcée
était une loi d'application générale, l'exécution
d'une telle loi peut équivaloir à une forme de persécution.
Dans l'affaire en cause, la Cour a conclu que l'appelante craignait [traduction]
« d'être la cible d'un traitement exceptionnel ne découlant
pas normalement de l'application de la loi ». Le juge Linden a ajouté
que la peine ou le traitement prévu par une loi d'application générale
peut être [traduction] « tellement disproportionné
par rapport à l'objectif de la loi » qu'il équivaut
à une forme de persécution, malgré son objet. Le
juge Linden a soutenu que la stérilisation des femmes contre leur
gré est une violation flagrante des droits humains fondamentaux
énoncés aux articles 3 et 5 de la Déclaration
universelle des droits de l'homme des Nations Unies : Article 3 Tout
individu a droit à la vie, à la liberté et à
la sûreté de sa personne. Article 5 Nul ne sera soumis à
la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants. Il convient de noter la conclusion suivante tirée
par la Cour : La stérilisation d'une femme contre son gré
est une violation grave et entièrement inacceptable de la sûreté
de sa personne. Il s'agit d'un traitement cruel, inhumain et dégradant
.
Lorsqu'il atteint une certaine limite, le traitement cruel devient de
la persécution, même s'il est sanctionné par la loi;
dans le cas de la stérilisation forcée, la limite est dépassée
.
La stérilisation des femmes contre leur gré est une violation
tellement grave de leur droits humains fondamentaux qu'elle constitue
une forme de persécution, même si on croyait, initialement,
que cette pratique contribuerait à moderniser la Chine. Dans l'affaire
Cheung, la Cour a conclu que les commissaires avaient commis
une erreur. (Décision de la SSR
T90-01620, 5 décembre 1990).
Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1993] 3 C.F.
675 (C.A.).
À la fin de 1989, après la naissance du second enfant de
l'appelant, des agents du Bureau de la sécurité publique
se sont rendus chez ce dernier à plusieurs reprises et l'ont accusé
d'avoir enfreint la règle de l'enfant unique qu'applique la Chine.
L'épouse de l'appelant a perdu son emploi pour cette raison. L'appelant
a accepté de se faire stériliser dans les trois mois qui
suivaient. Avant l'expiration de ce délai, il a quitté la
Chine sans subir de stérilisation. Le tribunal de la Section du
statut avait jugé que l'appelant ne craignait pas avec raison d'être
persécuté du fait de son appartenance à un certain
groupe social ou de ses opinions politiques. Il avait déterminé
que la stérilisation ne constituait pas une forme de persécution
pour un motif visé par la Convention, mais qu'il s'agissait plutôt
d'une mesure prise par le gouvernement de la République populaire
de Chine (RPC) pour mettre en oeuvre une politique de planification familiale
s'appliquant à tous les citoyens du pays. Dans son jugement, la
Cour d'appel fédérale (CAF) a rejeté l'appel relatif
à la décision de la Section du statut. Dans des motifs de
décision distincts, les juges Heald et Desjardins ont statué
que l'appelant, un citoyen chinois, n'avait pas raison de craindre d'être
persécuté du fait de son appartenance à un certain
groupe social ou de ses opinions politiques. Le juge Mahoney, s'exprimant
en dissidence, a conclu plutôt que les faits de l'affaire ne pouvaient
être distingués de ceux dont il était question dans
une décision antérieure de la CAF : Cheung c. Canada
(Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 2 C.F.
314. Les juges Heald et Mahoney ont tous deux décrété
qu'une stérilisation forcée est un acte de persécution.
En revanche, le juge Desjardins a déterminé que la stérilisation
forcée est une question qui déborde le cadre de la définition
d'un réfugié au sens de la Convention.
Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1995] 3 R.C.S.
593.
Les juges de la majorité ont rendu leur décision en se fondant
sur le fait que le demandeur n'avait pas prouvé qu'il craignait
avec raison d'être persécuté, savoir qu'il risquait
d'être stérilisé de force par suite de la politique
chinoise de l'enfant unique. Tous les juges se sont reportés au
Guide des Nations Unies (HCNUR) pour apprécier la preuve et ont
reconnu qu'il avait un caractère fort persuasif. Les principaux
éléments de la preuve qui, suivant l'appréciation
des juges de la majorité, ont été jugés insuffisants
étaient les suivants : la contrainte physique n'est utilisée
qu'en dernier recours, une fois que des sanctions économiques ont
été prises; les mesures visant à obtenir l'observation
de la loi varient considérablement d'un endroit à un autre
et l'absence de preuves documentaires ou anecdotiques corroborant la version
du demandeur. Même les sanctions économiques prises contre
le demandeur et son épouse n'ont pas été strictement
appliquées et ont été partiellement levées.
Le demandeur a conservé son poste de gestionnaire, l'amende infligée
à son épouse a été réduite de 40 p.
100 et son permis de conduire a été renouvelé. Tous
ces faits étaient incompatibles avec la possibilité sérieuse
que le demandeur fasse l'objet d'une stérilisation forcée.
Les juges de la majorité ont refusé d'examiner la question
de l'appartenance à un groupe social - savoir si l'arrêt
Cheung c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),
[1993] 2 C.F. 314 (C.A.F.)
devrait être suivi dans la foulée de l'arrêt Canada
(procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689 -- en l'absence de faits soulevant cette question. Le juge La Forest,
qui a rédigé les motifs de la dissidence, aurait renvoyé
l'affaire à la Section du statut de réfugié pour
qu'elle se prononce sur la question de la crainte justifiée de
persécution. Il a affirmé que la stérilisation forcée
est une violation d'un droit fondamental de la personne. Les juges dissidents
ont donné deux interprétations importantes à l'arrêt
Ward : la distinction entre « est/fait » n'a
jamais eu pour effet de remplacer les catégories établies
dans l'arrêt Ward et l'élément d'une association
volontaire, dans la deuxième catégorie établie dans
l'arrêt Ward, concerne le statut. Il n'est pas nécessaire
qu'une personne joigne un groupe social faisant partie de la deuxième
catégorie établie dans l'arrêt Ward; elle
peut en faire partie par son comportement si celui-ci s'explique par des
raisons essentielles à sa dignité humaine.
Viol
SSR
M99-04586 et al., 21 décembre 1999.
Le mari de la revendicatrice adulte, le père des revendicateurs
mineurs, a été arrêté et torturé par
la police après que des militants sikhs eurent forcé la
famille à leur donner de la nourriture et à les héberger.
La revendicatrice adulte ne l'a jamais revu depuis. Elle a été
arrêtée et violée par un inspecteur de police. Deux
semaines plus tard, elle a été de nouveau violé par
l'inspecteur et l'un de ses ami, chez elle. Après avoir fait remarquer
que la police du Penjab utilise le viol comme moyen de torture et pour
obtenir des renseignements, la Section du statut de réfugié
a décidé que la revendicatrice adulte avait raison de craindre
d'être persécutée. Pour en arriver à cette
conclusion, le tribunal a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. Les revendicateurs
mineurs n'ont pas été harcelés dans le passé.
La police du Penjab n'utilise plus les enfants comme chair à canon
dans sa lutte contre les militants sikhs. L'unité familiale n'est
pas un principe qui s'applique dans le cadre de la détermination
du statut de réfugié. Par ailleurs, la notion de persécution
indirecte a été rejetée par les tribunaux canadiens.
Les revendicateurs mineurs n'avaient pas une crainte fondée de
persécution.
L.G. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3275-01), Lemieux, 10 juillet 2002; 2002 CFPI 766.
La requérante est une jeune Rome qui, si l'on croit son récit,
a été vendue par son beau-père comme prostituée
alors qu'elle avait 11 ans. Son beau-père l'a exploitée
sexuellement quand elle avait 14 ans. Trois jeunes hommes ont tenté
de la violer, et aucune accusation n'a été portée
contre eux. Dans une certaine mesure, les allégations de la requérante
constituait un élément essentiel de sa revendication, mais
la Section du statut n'y a accordé aucune importance. La Section
du statut a conclu que le récit de la revendicatrice était
invraisemblable en tenant compte de la manière dont les organismes
ayant la vocation de fournir la protection de l'État se comporteraient
au Canada et non en Hongrie. Le tribunal n'a pas tenu compte de la manière
dont les notes ont été prises au point d'entrée.
Le tribunal laisse planer un doute sur la crédibilité de
la revendicatrice, mais conclut qu'elle est suffisamment crédible
pour étayer la conclusion selon laquelle l'État offre une
protection aux citoyens. Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-04112, 7 juin 2001).
Reginald c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 4 C.F.
523 (1re inst.).
La demanderesse, qui a vécu toute sa vie à Colombo, se dit
persécutée à cause de sa race, de sa nationalité,
de son appartenance à un certain groupe social, celui des femmes
tamoules du Sri Lanka, et des opinions politiques qu'on lui prêtait.
Il appert que les commissaires de la Section du statut avaient des doutes
sur la forme et dans une certaine mesure sur le fond des questions posées
à la demanderesse par son avocat. La Cour cite à l'appui
de nombreux passages de la transcription de l'audience de la Section du
statut. Contrairement aux directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe, il n'y avait rien de
compréhensif, et encore moins d'extrêmement compréhensif,
dans « l'attitude » que les commissaires témoignaient
à la demanderesse pendant son témoignage sur ses malheurs.
La Cour en conclut, en reprenant les termes employés par le juge
Mahoney dans Kumar, que « l'intervention abusive » des
commissaires de la SSR
dans « l'administration ordonnée des preuves par la demanderesse
» et l'attitude peu compréhensive témoignée
à cette dernière pendant son témoignage sur le viol
qu'elle aurait subi, équivalaient à un déni de justice
naturelle. Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-11489, 19 avril 2001).
Le fait que la violence, notamment la violence sexuelle
et familiale, à l'encontre des femmes soit universelle n'est
pas pertinent pour déterminer si le viol et d'autres crimes liés
ou constituent des formes de persécution. Il faut se demander
si la violence, vécue ou redoutée constitue une grave
violation d'un droit fondamental de la personne.
SSR
T91-01497 et al, 9 août 1994.
Les revendicatrices, une mère et sa fille mineure, se sont vu précédemment
refuser le statut de réfugié au sens de la Convention, sur
la base du témoignage de leur mari et père (le demandeur).
Le demandeur est depuis reparti en Bulgarie. La Section du statut de réfugié
a accepté la requête en réouverture, laquelle était
fondée sur l'argument que la justice naturelle avait été
déniée aux intéressées du fait qu'elles avaient
été empêchées par le demandeur de présenter
leur propre témoignage. Lors de la nouvelle audience, la mère
a déclaré avoir subi des sévices aux mains de son
mari tout au long du mariage. Elle a été frappée
à maintes reprises, menacée de mort et violée. Ses
tentatives pour trouver de l'aide sont restées vaines du fait de
la mentalité bulgare qui exige que la femme reste aux côtés
de son mari quoi qu'il advienne. En dépit de la signature par la
Bulgarie de la Convention sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes, les autorités
ont ignoré de façon répétée la violence
qui lui était infligée. Le tribunal a fait référence
à la Déclaration universelle des droits de l'homme,
à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, aux
directives de la présidente intitulées Revendicatrices du
statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et au rapport du comité des Nations Unies
pour l'élimination de la discrimination à l'égard
des femmes, et a conclu que la mère avait [TRADUCTION] «
un droit internationalement reconnu à être protégée
contre la violence conjugale et le refus de cette protection constitue
une forme de discrimination sexuelle ». Le tribunal a établi
qu'elle appartenait à un certain groupe social, les femmes. Pour
ce qui est de la fille mineure, elle a été terrorisée
et battue par le demandeur et, encore une fois, la protection de l'État
faisait défaut. Le tribunal a fait référence à
la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies
et jugé que la Bulgarie avait omis de protéger la revendicatrice
mineure contre les sévices physiques et psychologiques associés
à la violence du père. Le tribunal a déterminé
qu'elle appartient à un certain groupe social, les mineurs. Il
a jugé que les intéressées avaient une crainte bien
fondée de persécution en Bulgarie du fait de la présence
du demandeur dans ce pays et de l'absence de protection de l'État
et leur a reconnu le statut de réfugié au sens de la Convention.
SSR
A95-00154 et al., 12 avril 1996.
L'intéressée avait été brutalement agressée
par son époux à de nombreuses occasions, et ce dernier l'avait
violée. La police avait refusé d'intervenir, soutenant que
les agressions étaient une affaire de famille. La Section du statut
de réfugié a conclu que l'agression sexuelle est une infraction
aux droits les plus fondamentaux de la personne de même qu'une infraction
au droit à la sécurité de la personne. L'intéressée
appartenait à un groupe social particulier, celui des femmes victimes
de violence conjugale. Elle était victime de persécution
fondée sur le sexe. L'inaction de la police dans le dossier de
l'intéressée ainsi que la preuve documentaire sur la violence
faite aux femmes en Pologne établissaient que l'État ne
pouvait protéger l'intéressée. Cette dernière
pouvait s'installer ailleurs qu'à Varsovie, mais elle n'avait pas
de parents ou d'amis ailleurs et aucune capacité professionnelle
particulière, et l'époux pouvait facilement les retrouver,
elle ou le fils du couple. L'intéressée ne pouvait donc
se prévaloir d'une possibilité de refuge intérieur.
SSR
TA0-03535, 6 mars 2001.
La revendication faisait partie d'un groupe de revendications semblables
qui comportaient une contestation constitutionnelle fondée sur
l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
La revendicatrice, une adolescente, invoquait au soutien de sa revendication
son appartenance à un groupe social, les mineures incapables de
se protéger contre la violence familiale. Sa demande a été
rejetée. La revendicatrice avait été victime de la
violence physique et psychologique exercée par sa famille et avait
été envoyée en Amérique du Nord contre son
gré. Il ressortait de la preuve documentaire que, par ses politiques,
le gouvernement chinois encourage ou accepte tacitement les atteintes
portées aux droits fondamentaux des femmes et des jeunes filles,
que, selon la politique de contrôle de la population en vigueur
en Chine, les filles constituent des problèmes pour les familles
et que des centaines de millions de femmes sont battues par leur conjoint
sans qu'elles puissent obtenir de l'aide d'un organisme d'État
ou bénéficier d'un soutien quelconque. La revendicatrice
était une personne vulnérable en raison de son jeune âge
et de son sexe. Elle serait persécutée si elle retournait
en Chine et elle ne pourrait pas bénéficier de la protection
de l'État. La Section du statut de réfugié a consulté
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et Les enfants qui revendiquent le statut de réfugié
: Questions relatives à la preuve et à la procédure.
La revendication du statut de réfugié au
sens de la convention d'une femme ne peut être fondée uniquement
sur le fait qu'elle est assujettie à une politique ou à
une loi nationale à laquelle elle s'oppose. La revendicatrice
devra prouver l'un ou l'autre des éléments suivants :
a. la politique ou la loi constitue en soi une forme
de persécution;
SSR
T96-06045 et al., 30 octobre 1997.
La revendicatrice, une Copte, craignait d'être persécutée
par son mari violent. En dépit des nombreuses tentatives faites
pour obtenir de l'aide auprès des membres de sa famille et du prêtre
du village, la revendicatrice a toujours été contrainte
de se réconcilier avec son mari. Selon la preuve documentaire citée
par la Section du statut de réfugié, la loi égyptienne
donnait au mari un pouvoir absolu sur son épouse. De plus, il n'y
avait aucune reconnaissance publique de la violence familiale et l'aide
pour les femmes victimes de violence ne pouvait être obtenue que
des membres féminins de leur famille immédiate. Par ailleurs,
la revendicatrice ne pouvait pas divorcer puisque l'Église copte
n'accordait le divorce que dans des circonstances exceptionnelles. Le
mari de la revendicatrice comptait des amis au sein des forces de sécurité,
ce qui faisait davantage craindre à la revendicatrice de ne pouvoir
obtenir l'aide de la police. La revendicatrice ne pouvait pas bénéficier
de la protection de l'État, et il n'y avait aucune possibilité
de refuge intérieur pour elle.
SSR
T98-04554, 16 février 1999.
La revendicatrice, femme musulmane Yoruba qui avait contracté un
mariage traditionnel suivant la coutume, a fait l'objet de violence physique
et psychologique de la part de son mari, homme d'affaires nigérian
prospère. Entre autres agressions, elle a subi une fausse couche,
elle a eu un affaissement des poumons et a passé du temps aux soins
intensifs. Ses blessures ont été documentées par
des lettres de l'hôpital où elle a été traitée
et un rapport psychologique indiquant qu'elle souffrait du syndrome de
stress post-traumatique. La famille de la revendicatrice a refusé
son consentement au divorce, qui était exigé par le droit
coutumier traditionnel. En vertu du droit musulman, une femme ne peut
divorcer d'un homme. Selon la preuve documentaire, la violence conjugale
est approuvée par les normes culturelles Yoruba, et la police n'intervient
habituellement pas dans les querelles de ménage. Le gouvernement
tolère les pratiques traditionnelles et religieuses qui sont défavorables
aux femmes. La Section du statut de réfugié a examiné
les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. La revendicatrice a été jugée
une réfugiée au sens de la Convention.
SSR
V97-01419 et al. , 9 août 1999.
Les revendicateurs étaient une femme de 34 ans (la revendicatrice
principale) qui prétendait que ses droits et responsabilités
en tant que mère avaient été violés après
le décès de son mari. Son fils et sa fille, ainsi que ses
parents et sa grand-mère, prétendaient avoir été
harcelés par les autorités gouvernementales sur les instructions
du beau-père de la revendicatrice principale. La Section du statut
de réfugié a jugé qu'en vertu de la loi iranienne,
la revendicatrice principale aurait perdu la garde de ses enfants pour
une bonne partie de leur enfance s'ils étaient demeurés
en Iran, et qu'elle aurait perdu la capacité d'exercer une influence
sur les décisions concernant la garde de ses enfants. Cette situation
constituait une forme de discrimination suffisamment grave pour être
considérée comme de la persécution. Priver une femme
de la garde de ses enfants uniquement en raison de son sexe est une violation
fondamentale de ses droits fondamentaux. La revendicatrice principale
avait une crainte fondée d'être persécutée
au motif de son appartenance à un groupe social : les veuves en
Iran. En se reportant à la Convention des droits de l'enfant
des Nations Unies, la Section du statut de réfugié
a jugé que les revendicateurs mineurs avaient également
établi leur revendication comme membre d'un groupe social : les
enfants de mères veuves en Iran. Dans les circonstances particulières
de l'espèce, les confier à la garde de leur grand-père
paternel et les priver du droit d'être avec leur mère constituerait
une violation de leurs droits fondamentaux. Les revendicateurs plus âgés
n'étaient pas crédibles. Certaines questions générales
en matière d'immigration ont été mentionnées.
Les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe ont été examinées.
SSR
T98-08454, 28 mars 2000.
La revendicatrice prétendait craindre d'être persécutée
par son ancien conjoint de fait. Ce dernier l'a agressée à
de nombreuses reprises avant qu'elle le quitte, et a continué à
la battre par la suite. Il y a eu des problèmes concernant leur
enfant. La revendicatrice a été menacée et agressée.
Son ancien conjoint l'a enlevée, séquestrée, agressée
et menacée de mort. Elle a communiqué avec la police et
le protecteur du citoyen après cet incident, mais personne n'est
intervenu; elle a également communiqué avec les autorités
à d'autres occasions. Selon la preuve documentaire, les victimes
de violence familiale peuvent rarement bénéficier de la
protection de l'État en Hongrie, et les tribunaux jugent souvent
que la violence exercée par les hommes à l'endroit de leur
conjointe est acceptable, se contentant d'évaluer si la violence
était proportionnée au comportement de la conjointe ou des
enfants. La revendicatrice a tenté d'obtenir la protection de l'État
mais n'a pas été prise au sérieux. Elle était
également une Rome. La preuve documentaire indique que, bien que
les autres femmes qui portent plainte pour violence familiale soient considérées
avec indifférence, les Romes sont plus susceptibles d'être
traitées avec hostilité. Il existait plus qu'une simple
possibilité que la revendicatrice soit persécutée
si elle retournait en Hongrie, et elle ne pouvait pas bénéficier
d'une protection adéquate de l'État. La Section du statut
de réfugié a pris en compte les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe.
Hazarat, Ghulam c. Canada (Secrétaire
d'État)(C.F.
1re
inst., IMM-5496-93), McKay, 25 novembre 1994.
La revendicatrice adulte disait craindre la persécution en raison
de son appartenance à un certain groupe social, à savoir
les femmes. Il était prouvé que, sous le gouvernement des
moudjahidin, les femmes sont soumises à des lois et à des
pratiques qui leur imposent diverses restrictions; par exemple, elles
doivent porter le tchador, elles ne peuvent sortir de la maison ou voyager
à moins d'être accompagnées par un parent adulte,
elles ne peuvent s'instruire ni, de façon générale,
occuper un emploi. La Section du statut de réfugié a conclu
que ces restrictions n'équivalent pas à une persécution.
Devant la Cour, les intéressées ont fait valoir que la Section
du statut de réfugié avait omis de motiver cette conclusion.
Elle n'a pas, en particulier, indiqué de cadre de référence
pour son évaluation des restrictions en question, bien que de tels
cadres se rencontrent dans plusieurs textes, dont les directives de la
présidente intitulées Revendicatrices du statut de réfugié
craignant d'être persécutées en raison de leur sexe.
La Section du statut de réfugié a passé la preuve
en revue de façon détaillée. Sa conclusion n'était
pas fautive. La demande a été rejetée. (Décision
de la SSR
V92-01002 et al., 9 septembre 1993).
b. La politique ou la loi est utilisée comme
moyen de persécution pour l'un des motifs énumérés;
c. La politique ou la loi est appliquée
par des moyens qui constituent une forme de persécution, même
si les objectifs sont légitimes;
Cheung c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1993] 2 C.F.
314 (C.A.).
Dans l'affaire Cheung, la Cour d'appel fédérale
a conclu, d'une part, que [traduction] « les Chinoises qui ont plus
d'un enfant et qui peuvent, ainsi, être stérilisées
contre leur gré forment un groupe social selon la définition
de réfugié au sens de la Convention » et, d'autre
part, que [traduction] « la stérilisation forcée dans
le contexte de la politique de l'enfant unique en Chine » équivaut
à une forme de persécution. Après la naissance de
son premier enfant, l'appelante s'est fait avorter trois fois. Par la
suite, elle a dû se cacher pour donner naissance à son deuxième
enfant, la deuxième appelante, qu'elle a laissé avec la
famille de son mari. Selon la preuve présentée, aucune allocation
ne serait versée pour nourrir cet enfant, qui ne recevrait, au
mieux, qu'une instruction médiocre. Peu après, le bureau
de planification familiale a obligé l'appelante à se faire
stériliser. Avant que l'intervention n'ait lieu l'appelante s'est
échappée et s'est réfugiée dans la famille
de son mari. Une nouvelle grossesse l'a obligée à subir
un autre avortement. Les commissaires de la Section du statut de réfugié
saisis de l'affaire ont reconnu que l'appelante serait stérilisée
si elle retournait en Chine. Cependant, ils ont conclu que la politique
de l'enfant unique en Chine était une loi d'application générale,
ne comportant [traduction] « aucune intention de persécution
de la part du gouvernement de la Chine », et résultant [traduction]
« non pas d'un caprice, mais d'un choix logique sur la plan économique
» . La Cour a conclu que les commissaires auraient dû s'arrêter
aux méthodes utilisées pour exécuter la loi plutôt
que de concentrer leur attention sur son objet général.
[traduction] « La Commission n'a donc pas tenu compte du fait que
la stérilisation constituait une atteinte très grave à
l'intégrité physique et mentale d'une personne. »
En affirmant qu'il y avait absence d'intention de persécution,
les commissaires ont aussi commis une erreur, car il est suffisant que
le résultat équivaille à une forme de persécution.
La Cour a fait mention de la décision rendue par la Cour d'appel
dans l'affaire Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c.
Mayers, [1993] 1 C.F.
154, et, plus précisément, des critères qui y sont
énoncés comme fondement utile à la formulation d'une
définition de groupe social. À cet égard, la Cour
a conclu que les Chinoises qui avaient un enfant et qui pourrait être
stérilisées contre leur gré répondent à
un nombre suffisant de ces critères pour former un groupe social.
Cependant, la Cour a ajouté que seules les femmes craignant réellement
d'être persécutées pour cette raison pouvaient revendiquer
le statut de réfugié. De l'avis du juge Linden, la politique
de l'enfant unique en Chine est effectivement une loi d'application générale,
mais la stérilisation forcée des Chinoises qui ont déjà
un enfant ne l'est pas. M. le juge Linden a affirmé : [traduction]
« Cette pratique ne vise qu'un groupe restreint et bien délimité
de personnes et n'est pas suivie de façon générale.
» La preuve indiquait qu'il ne s'agissait pas d'une pratique généralisée
en Chine. Citant à l'appui l'affaire Padilla c. Canada (Ministre
de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 13 Imm. L.R. (2d) 1 (C.A.F.),
la Cour a ajouté que même si la stérilisation forcée
était une loi d'application générale, l'exécution
d'une telle loi peut équivaloir à une forme de persécution.
Dans l'affaire en cause, la Cour a conclu que l'appelante craignait [traduction]
« d'être la cible d'un traitement exceptionnel ne découlant
pas normalement de l'application de la loi ». Le juge Linden a ajouté
que la peine ou le traitement prévu par une loi d'application générale
peut être [traduction] « tellement disproportionné
par rapport à l'objectif de la loi » qu'il équivaut
à une forme de persécution, malgré son objet. Le
juge Linden a soutenu que la stérilisation des femmes contre leur
gré est une violation flagrante des droits humains fondamentaux
énoncés aux articles 3 et 5 de la Déclaration
universelle des droits de l'homme des Nations Unies : Article
3 Tout individu a droit à la vie, à la liberté et
à la sûreté de sa personne. Article 5 Nul ne sera
soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants. Il convient de noter la conclusion suivante
tirée par la Cour : La stérilisation d'une femme contre
son gré est une violation grave et entièrement inacceptable
de la sûreté de sa personne. Il s'agit d'un traitement cruel,
inhumain et dégradant
. Lorsqu'il atteint une certaine limite,
le traitement cruel devient de la persécution, même s'il
est sanctionné par la loi; dans le cas de la stérilisation
forcée, la limite est dépassée
. La stérilisation
des femmes contre leur gré est une violation tellement grave de
leur droits humains fondamentaux qu'elle constitue une forme de persécution,
même si on croyait, initialement, que cette pratique contribuerait
à moderniser la Chine. Dans l'affaire Cheung, la Cour
a conclu que les commissaires avaient commis une erreur. (Décision
de la SSR
T90-01620, 5 décembre 1990).
Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1993] 3 C.F.
675 (C.A.).
À la fin de 1989, après la naissance du second enfant de
l'appelant, des agents du Bureau de la sécurité publique
se sont rendus chez ce dernier à plusieurs reprises et l'ont accusé
d'avoir enfreint la règle de l'enfant unique qu'applique la Chine.
L'épouse de l'appelant a perdu son emploi pour cette raison. L'appelant
a accepté de se faire stériliser dans les trois mois qui
suivaient. Avant l'expiration de ce délai, il a quitté la
Chine sans subir de stérilisation. Le tribunal de la Section du
statut avait jugé que l'appelant ne craignait pas avec raison d'être
persécuté du fait de son appartenance à un certain
groupe social ou de ses opinions politiques. Il avait déterminé
que la stérilisation ne constituait pas une forme de persécution
pour un motif visé par la Convention, mais qu'il s'agissait plutôt
d'une mesure prise par le gouvernement de la République populaire
de Chine (RPC) pour mettre en oeuvre une politique de planification familiale
s'appliquant à tous les citoyens du pays. Dans son jugement, la
Cour d'appel fédérale (CAF) a rejeté l'appel relatif
à la décision de la Section du statut. Dans des motifs de
décision distincts, les juges Heald et Desjardins ont statué
que l'appelant, un citoyen chinois, n'avait pas raison de craindre d'être
persécuté du fait de son appartenance à un certain
groupe social ou de ses opinions politiques. Le juge Mahoney, s'exprimant
en dissidence, a conclu plutôt que les faits de l'affaire ne pouvaient
être distingués de ceux dont il était question dans
une décision antérieure de la CAF : Cheung c. Canada
(Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 2 C.F.
314. Les juges Heald et Mahoney ont tous deux décrété
qu'une stérilisation forcée est un acte de persécution.
En revanche, le juge Desjardins a déterminé que la stérilisation
forcée est une question qui déborde le cadre de la définition
d'un réfugié au sens de la Convention.
Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi
et de l'Immigration), [1995] 3 R.C.S.
593.
Les juges de la majorité ont rendu leur décision en se fondant
sur le fait que le demandeur n'avait pas prouvé qu'il craignait
avec raison d'être persécuté, savoir qu'il risquait
d'être stérilisé de force par suite de la politique
chinoise de l'enfant unique. Tous les juges se sont reportés au
Guide des Nations Unies (HCNUR) pour apprécier la preuve et ont
reconnu qu'il avait un caractère fort persuasif. Les principaux
éléments de la preuve qui, suivant l'appréciation
des juges de la majorité, ont été jugés insuffisants
étaient les suivants : la contrainte physique n'est utilisée
qu'en dernier recours, une fois que des sanctions économiques ont
été prises; les mesures visant à obtenir l'observation
de la loi varient considérablement d'un endroit à un autre
et l'absence de preuves documentaires ou anecdotiques corroborant la version
du demandeur. Même les sanctions économiques prises contre
le demandeur et son épouse n'ont pas été strictement
appliquées et ont été partiellement levées.
Le demandeur a conservé son poste de gestionnaire, l'amende infligée
à son épouse a été réduite de 40 p.
100 et son permis de conduire a été renouvelé. Tous
ces faits étaient incompatibles avec la possibilité sérieuse
que le demandeur fasse l'objet d'une stérilisation forcée.
Les juges de la majorité ont refusé d'examiner la question
de l'appartenance à un groupe social - savoir si l'arrêt
Cheung c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),
[1993] 2 C.F. 314 (C.A.F.)
devrait être suivi dans la foulée de l'arrêt Canada
(procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S.
689 -- en l'absence de faits soulevant cette question. Le juge La Forest,
qui a rédigé les motifs de la dissidence, aurait renvoyé
l'affaire à la Section du statut de réfugié pour
qu'elle se prononce sur la question de la crainte justifiée de
persécution. Il a affirmé que la stérilisation forcée
est une violation d'un droit fondamental de la personne. Les juges dissidents
ont donné deux interprétations importantes à l'arrêt
Ward : la distinction entre « est/fait » n'a
jamais eu pour effet de remplacer les catégories établies
dans l'arrêt Ward et l'élément d'une association
volontaire, dans la deuxième catégorie établie dans
l'arrêt Ward, concerne le statut. Il n'est pas nécessaire
qu'une personne joigne un groupe social faisant partie de la deuxième
catégorie établie dans l'arrêt Ward; elle
peut en faire partie par son comportement si celui-ci s'explique par des
raisons essentielles à sa dignité humaine.
d. La pénalité en cas de transgression
de la politique ou de la loi est démesurément lourde.
SSR
V94-01847, 21 juin 1996.
À une occasion, la revendicatrice a été condamnée
à 20 coups de fouet pour ne pas s'être conformée intégralement
au code vestimentaire iranien. À une autre occasion, son ami -
qu'elle rencontrait clandestinement - et elle ont été arrêtés
par le Komiteh, détenus et condamnés chacun à 20
coups de fouet. La revendicatrice s'est enfuie du pays lorsque son père,
membre du Komiteh, a déclaré vouloir faire confirmer sa
virginité par un examinateur du gouvernement. Depuis son arrivée
au Canada, la revendicatrice a noué des liens avec un jeune homme
et ils attendent la naissance de leur enfant. Selon le code pénal
iranien, la peine encourue pour des relations sexuelles « entre
un homme et une femme dont les rapports sont strictement interdits »
peut aller de 100 coups de fouet jusqu'à la peine de mort. La Section
du statut de réfugié a étudié les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, pour conclure que le préjudice redouté
par la revendicatrice était principalement dirigé contre
les femmes pour des motifs touchant les préceptes religieux et
les normes culturelles. Le non-respect de la loi musulmane entraînait
des peines graves pour les femmes. Les 20 coups de fouet reçus
pour avoir contesté le code vestimentaire constituaient une peine
cruelle et inusitée et équivalait à de la persécution,
de même que les peines qui seraient imposées à la
revendicatrice si elle retournait en Iran.
C. QUESTIONS RELATIVES À LA PREUVE
- Une revendication fondée sur le sexe ne peut
être refusée pour la simple raison que la revendicatrice
vient d'un pays où les femmes font généralement
l'objet d'oppression et de violence et que sa crainte de persécution
n'est pas fondée sur des circonstances qui lui sont propres.
Cette « règle de preuve individuelle » a été
rejetée par la cour d'appel fédérale dans l'arrêt
Salibian c. M.E.I. et dans d'autres décisions.
- Les décideurs doivent examiner la preuve démontrant
l'absence de protection de l'état si l'état et ses mandataires
dans le pays d'origine de la revendicatrice ne voulaient pas ou ne pouvaient
pas assurer une protection appropriée contre la persécution
fondée sur le sexe. Au moment d'évaluer s'il est objectivement
déraisonnable pour la revendicatrice de ne pas avoir sollicité
la protection de l'état, le décideur doit tenir compte,
parmi d'autres facteurs pertinents, du contexte social, culturel, religieux
et économique dans lequel se trouve la revendicatrice.
SSR
U92-08714, 4 juin 1993.
Pendant une dizaine d'années, l'intéressée avait
été victime de graves sévices physiques, ainsi que
de sévices sexuels, de la part de son ex-époux. À
deux occasions, elle avait sollicité l'aide de la police, qui n'était
pas intervenue en sa faveur. À la première des deux occasions,
l'intéressée avait appelé la police de son domicile,
mais les agents n'avaient pas donné suite à sa demande d'aide.
À la seconde occasion, les agents de police lui avaient ri au nez
et avaient dit qu'elle avait dû faire quelque chose pour justifier
les coups reçus. La preuve documentaire a confirmé que la
violence faite aux femmes est un mal répandu en Équateur
et que l'État ne considère pas qu'il s'agit d'un sujet d'intérêt
public sérieux. Malgré son divorce, l'intéressée
s'est trouvée dans l'impossibilité d'obtenir que l'État
la protège. Elle a été agressée par son ex-époux,
qui a menacé de la tuer si elle tentait de quitter le pays. Le
tribunal a déterminé que l'intéressée craignait
avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance
à un groupe social, celui des « Équatoriennes victimes
de violence conjugale ». En statuant sur la revendication, le tribunal
a appliqué les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe.
SSR
T93-01878 et al., 30 août 1993.
Dans ces revendications collectives, l'intéressée principale
était la mère des autres demandeurs. Ils craignaient leur
époux et leur père respectivement. Ce dernier a été
décrit comme un homme violent et dur qui était toxicomane.
La police, lorsque la famille s'était adressée à
elle pour la protéger contre les sévices dont elle était
victime, s'était montrée peu compatissante et n'avait offert
de l'aider que si elle lui donnait les noms des vendeurs de drogue; cependant,
l'intéressée principale ne savait pas qui approvisionnait
son époux en drogue. Elle ne pouvait obtenir le divorce car son
époux n'y aurait pas consenti. Elle ne pouvait pas simplement déménager
car la famille vivait dans un logement subventionné et ne pouvait
se payer un autre type de logement. Elle ne recevait aucune aide des bureaux
d'assistance sociale. Le tribunal a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe et a conclu
que la protection que pouvait offrir l'État était adéquate.
Selon la preuve documentaire, Israël considérait la violence
domestique comme une affaire sérieuse et avait adopté de
nouvelles lois pour prévenir ce genre de violence et punir ceux
qui en étaient coupables. Il était possible aux demandeurs
de traduire en justice leur époux/père. Le statut de réfugié
au sens de la Convention ne leur a pas été reconnu.
SSR
T92-09186, 13 septembre 1993.
L'intéressée, citoyenne du Ghana, disait avoir été
longtemps persécutée par le gouvernement que dirigeait le
Conseil provisoire de la défense nationale (CPDN) en raison de
sa participation au Mouvement démocratique du Ghana (MDG). Elle
soutenait que des agents du gouvernement l'avaient battue et agressée
sexuellement l'une des nombreuses fois où elle avait été
gardée en détention. Le tribunal a jugé que l'intéressée
n'était pas une réfugiée au sens de la Convention,
faisant remarquer qu'il était survenu un changement de circonstances
dans le pays d'origine. En examinant divers éléments de
preuve présentés à l'audience, le tribunal a déterminé
que, dans les circonstances actuelles, il n'y avait aucune possibilité
raisonnable que des actes de persécution soient commis. Quant à
savoir s'il existait ou non des raisons impérieuses aux termes
du paragraphe 2(3) de la Loi sur l'immigration, l'un des commissaires
a conclu que le viol répété d'une personne vulnérable
par des personnes au pouvoir ou l'agression sexuelle brutale de femmes
comme forme de représailles peuvent constituer un traitement atroce
qui constitue le fondement de raisons impérieuses. Le commissaire
a conclu que de telles personnes, victimes du fait de leur sexe et dont
on a violé gravement l'intégrité physique et morale,
peuvent être considérées comme une catégorie
spéciale et limitée de personnes [Canada (Ministre de
l'Emploi et de l'Immigration) c. Obstoj, [1992] 2 CF 739 (CA)] et
que cela se reflète dans les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. Toujours
selon le commissaire, il incombait à l'intéressée
de convaincre le tribunal que, selon la prépondérance des
probabilités, les situations qu'elle avait vécues avaient
engendré une certaine méfiance et une certaine répugnance
vis-à-vis du fait d'être associée au Ghana à
titre de ressortissante de ce pays. Le commissaire a aussi indiqué
que ce serait une bonne idée de produire des éléments
de preuve « convaincants », comme un rapport médical
ou psychiatrique, pour étayer l'argument des raisons impérieuses.
L'intéressée n'avait pas soulevé la question à
l'audience, et le conseil n'avait pas produit non plus une preuve justificative
quelconque. Il n'avait déposé que des arguments écrits.
Le commissaire a reconnu qu'il se pouvait que l'intéressée
ait hésité à faire état de tels abus, surtout
en présence d'hommes, mais il a conclu que rien ne s'opposait à
ce qu'elle témoigne des effets, sur elle, des situations qu'elle
avait vécues, sinon des détails relatifs à ces dernières.
Comme elle ne s'était pas acquittée de l'obligation qui
lui incombait, il n'existait donc aucune raison impérieuse. Même
s'il souscrivait au résultat, l'autre commissaire n'était
pas d'accord avec l'analyse des raisons impérieuses. Citant le
Guide du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés,
Grahl-Madsen et la décision Obstoj, il a déclaré
que le fait d'étendre cette catégorie aux personnes victimes
du fait de leur sexe et dont on a gravement violé l'intégrité
physique et morale, ou, alors, aux personnes vulnérables violées
à maintes reprises par des personnes au pouvoir, équivaudrait
à axer la raison d'être de la clause des « raisons
impérieuses », soit le lieu des atrocités, l'attitude
de la population et la méfiance du pays lui-même, sur l'acte
de persécution lui-même.
SSR
T93-00853, 27 septembre 1993.
Les demandeurs étaient citoyens d'Israël. L'épouse
était une chrétienne mariée à un juif. Elle
a dit avoir été violée par son employeur et que la
police avait refusé de porter des accusations parce qu'elle n'était
pas juive et qu'elle était nouvelle dans le pays. Elle craignait
que son employeur la tue si elle continuait de l'accuser. Le tribunal
ne lui a pas reconnu le statut de réfugié au sens de la
Convention. Il a jugé peu crédible que la police ne la protègerait
pas. De l'avis du tribunal, les preuves étaient insuffisantes pour
attaquer l'appareil judiciaire israélien. Le tribunal a tenu compte
des directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et a conclu que l'intéressée aurait
pu être protégée en Israël. Le tribunal a déterminé
que l'époux, un juif d'Ukraine, ne craignait pas avec raison d'être
persécuté en Israël.
SSR
U96-00685, 16 janvier 1998.
La revendicatrice a allégué craindre d'être persécutée
par son ancien employeur, un homme riche et influent qui l'avait violée
et qui continuait de la poursuivre de ses assiduités. La Section
du statut de réfugié a suivi les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. Elle a
souligné que la loi équatorienne contre la violence faite
aux femmes et aux membres de la famille, qui a été adoptée
en 1995, ne visait que les femmes mariées et, par conséquent,
ne s'appliquait pas à la revendicatrice. La preuve documentaire
indiquait que de nombreux viols commis en Équateur ne sont pas
signalés aux autorités et que les femmes ne peuvent porter
plainte contre un violeur que si elles peuvent produire un témoin.
Un bureau de la promotion de la femme, mis sur pied par le gouvernement
en 1994, pouvait accepter les plaintes relativement aux actes de violence
commis à l'égard des femmes, mais n'était nullement
habilité à prendre des mesures pour les contrer. Comme en
l'espèce, l'agresseur était un homme très influent
ayant des relations, la protection de l'État n'aurait pas été
offerte. De plus, il n'y avait pas de possibilité de refuge intérieur
pour la revendicatrice si on considère les ressources financières
de l'agresseur, son influence et ses relations ainsi que son obsession
à l'égard de la revendicatrice.
SSR
V97-00708 et al., 11 août 1998.
La revendicatrice et ses enfants ont invoqué la violence conjugale
dans leur revendication. La Section du statut de réfugié
a tenu compte des directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe. Le fait que la revendicatrice
ait consulté des avocats au cours d'un voyage au Canada et qu'elle
soit ensuite retournée au Pérou même si ceux-ci lui
avaient dit qu'elle pourrait revendiquer le statut de réfugié
s'expliquait par son refus de laisser ses enfants au Pérou. Par
la suite, elle a été légalement admise aux États-Unis
avec ses enfants, et elle est venue au Canada deux jours après
son arrivée à Miami parce que son mari savait que sa famille
et ses amis vivaient en Floride. Son omission de revendiquer le statut
de réfugié aux États-Unis n'a pas été
retenue contre elle puisqu'elle n'aurait pas pu rester à Miami
et que l'autre choix qui s'offrait à elle, c'est-à-dire
s'installer ailleurs aux États-Unis, n'était pas une solution
facile pour une mère seule ayant quatre enfants, alors qu'elle
avait la possibilité de s'installer près de sa sœur
au Canada. De plus, à cette époque, le mari de la revendicatrice
ignorait l'adresse ainsi que le numéro de téléphone
de cette sœur. La revendicatrice a déclaré qu'elle
s'était adressée à la police à trois reprises,
mais n'avait pas obtenu la protection demandée. Comme de nombreux
policiers au Pérou ne prennent pas au sérieux la violence
familiale, des postes de polices spéciaux ont été
mis sur pied pour s'occuper des femmes victimes de violence. La revendicatrice
connaissait l'existence de ces services de police, mais étant donné
que rien n'indiquait le genre de protection qu'elle aurait pu obtenir,
que le frère de son mari était puissant et qu'elle avait
essuyé trois rebuffades de la police, elle n'avait pas à
demander encore une fois la protection de l'État malgré
l'existence de postes de police chargés de s'occuper particulièrement
du cas des femmes violentées. La Section du statut de réfugié
a examiné si les enfants avaient été victimes de
violence (persécution) directe ou indirecte. Même si les
enfants n'ont pas été molestés physiquement par leur
père, la violence qu'il a exercée sur leur mère en
leur présence constituait une violence psychologique directe, et
le traumatisme qu'ils ont subi était aussi réel que s'ils
avaient été frappés physiquement. Les enfants appartenaient
à un groupe social, soit les enfants des femmes victimes de violence
conjugale.
SSR
T98-04880, 20 octobre 1999.
La revendicatrice, qui était une Rome, soutenait que, lorsqu'elle
avait porté des accusations d'agression sexuelle contre quatre
hommes, dont le fils d'un haut gradé de la police, on lui a offert
un pot-de-vin pour qu'elle laisse tomber ces accusations. Elle a refusé
le pot-de-vin, après quoi sa famille a commencé à
recevoir des appels de menaces. La Section du statut de réfugié
a pris en considération les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe, qui indiquent
qu'au moment d'évaluer s'il est objectivement déraisonnable
pour la revendicatrice de ne pas avoir sollicité la protection
de l'État, le décideur doit tenir compte du contexte social,
culturel, religieux et économique dans lequel se trouve la revendicatrice.
Les poursuites pour viol sont difficiles à intenter en Roumanie
parce qu'il faut produire à la fois un certificat médical
et un témoin. Les Roms continuent d'être victimes de violence
et de discrimination dans toutes les sphères de l'existence. La
prétention de la revendicatrice selon laquelle elle n'a pas reçu
une protection adéquate de la part de l'État était
crédible. Il existait une possibilité sérieuse que
les agresseurs de la revendicatrice poursuivent leurs tentatives d'intimidation
dans le but de l'amener à retirer les accusations criminelles si
elle retournait en Roumanie.
SSR
M98-09104, 1er décembre 1999.
La revendicatrice vivait une relation avec un homme qui l'agressait physiquement
et sexuellement. Elle l'a quitté, est venue au Canada, et a découvert
qu'elle était enceinte de lui. Il a menacé de la tuer si
elle revenait à la Grenade. De l'avis d'un médecin qui a
traité la revendicatrice au Canada, celle-ci souffrait d'une anxiété
extrême et était convaincue que son ancien partenaire la
tuerait si elle retournait à la Grenade. Le médecin estimait
que son renvoi dans son pays pourrait avoir des conséquences tragiques
pour sa santé mentale et sa vie. La Section du statut de réfugié
a pris en considération les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe. Selon la
preuve documentaire, la violence contre les femmes est courante à
la Grenade, et la majorité des incidents de violence conjugale
ne sont pas signalés. Il n'existe pas de refuge pour les femmes
victimes de violence familiale. La violence familiale n'est pas considérée
comme un crime grave, et les femmes qui déposent une plainte contre
leur partenaire sont socialement stigmatisées. La Section du statut
de réfugié a conclu qu'il n'était pas déraisonnable
que la revendicatrice ait craint de signaler l'incident à la police.
SSR
V98-04476 et al., 29 mai 2000.
Les revendicateurs étaient l'ex-épouse d'un membre violent
de la mafia russe et son conjoint actuel. L'ancien conjoint de la revendicatrice
l'a battue pendant des années avant comme après leur divorce,
qu'il n'a jamais accepté, et l'a menacée de mort lorsqu'elle
a commencé à fréquenter le revendicateur. Avant de
rencontrer la revendicatrice, le revendicateur avait été
battu à de nombreuses reprises et forcé de donner de l'argent
à des bandits pour pouvoir conserver son emploi. Après avoir
commencé à fréquenter la revendicatrice, le revendicateur
a été sauvagement battu par l'ex-conjoint de celle-ci et
d'autres hommes. L'ex-conjoint, qui avait des liens étroits avec
le monde interlope et la police, a menacé de tuer le revendicateur
parce qu'il s'était enfui avec son épouse. La Section du
statut de réfugié a considéré que les deux
revendicateurs craignaient avec raison d'être persécutés.
La preuve documentaire sur la violence faite aux femmes en Russie, la
corruption policière et l'influence étendue exercée
par la mafia russe sur le gouvernement et la société dans
l'ensemble démontrait que les revendicateurs ne pouvaient pas bénéficier
de la protection de l'État. La Section du statut de réfugié
a tenu compte des directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe.
SSR
T98-05972 et al. , 29 mai 2000.
La revendicatrice adulte et les enfants ont été maltraités
par l'ancien conjoint de fait de la revendicatrice. Celle-ci ne l'a pas
dénoncé à la police hongroise parce qu'elle avait
peur de lui et qu'elle ne pensait pas que la police la protégerait
de manière efficace. Elle l'a quitté mais, à chaque
fois, il l'a retrouvée et l'a forcée à retourner
vivre avec lui. Cet homme a un casier judiciaire en Hongrie. Il a également
été déclaré coupable à quelques reprises
d'avoir agressé la revendicatrice adulte au Canada et il a été
renvoyé. Même si le premier Formulaire de renseignements
personnels (FRP)
de la revendicatrice adulte ne disait rien au sujet des mauvais traitements
- il décrivait plutôt des actes de discrimination fondée
sur le fait que la revendicatrice est d'origine rome -, la Section du
statut de réfugié a jugé que les renseignements qu'il
contenait étaient probablement véridiques. Les déclarations
de culpabilité prononcées contre l'ancien conjoint de fait
de la revendicatrice adulte au Canada prouvaient qu'il avait persécuté
les revendicateurs en Hongrie. Selon la preuve documentaire, les victimes
de violence familiale peuvent rarement bénéficier de la
protection de l'État en Hongrie. Dans les cas où les femmes
non romes sont l'objet de discrimination ou d'indifférence, les
femmes romes, elles, seraient probablement traitées avec hostilité.
Le fait que la revendicatrice adulte n'ait pas cherché à
obtenir la protection de l'État ne fait pas échec aux présentes
revendications puisqu'il était évident que l'État
n'offrirait pas une protection adéquate. La Section du statut de
réfugié a tenu compte des directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe et Les enfants
qui revendiquent le statut de réfugié : Questions relatives
à la preuve et à la procédure.
SSR
V97-03802, 20 novembre 2000.
La revendicatrice, une Rome victime de violence familiale, prétendait
craindre d'être persécutée par son mari (de qui elle
est maintenant divorcée) et par la famille de celui-ci. La preuve
documentaire étayait sa crainte que la police polonaise n'aide
pas les victimes de violence familiale. Selon la Section du statut de
réfugié, l'ex-conjoint de la revendicatrice chercherait
probablement à la voir si les deux retournaient en Pologne. Il
est vrai que la revendicatrice a été l'objet de discrimination
et de harcèlement parce qu'elle est une Rome, mais cette discrimination
n'équivalait pas, dans son cas, à de la persécution.
Toutefois, l'attitude défavorable aux Roms de la police polonaise
devait être prise en compte pour déterminer si l'État
pouvait protéger la revendicatrice. Le tribunal a décidé
que celle-ci ne pouvait pas bénéficier de la protection
de l'État en Pologne étant donné que la police de
ce pays ne fait pas réellement d'efforts pour aider les Roms victimes
d'actes criminels et qu'aucune protection n'est réellement offerte
aux femmes battues par leur conjoint.
SSR
TA0-01358 et al., 28 novembre 2001.
La revendicatrice et son fils craignaient d'être persécutés
par son ex-mari qui les avaient maltraités dans le passé.
Le tribunal disposait d'une preuve psychiatrique qui démontrait
que la revendicatrice souffrait de dépression et du syndrome de
stress post-traumatique. Il ressortait de la preuve documentaire que la
violence familiale est un problème grave en Corée du Sud.
Le gouvernement avait adopté une loi en 1998 dans le but de régler
le problème, mais de nombreux obstacles empêchaient son application
efficace, notamment le manque de ressources policières et l'indifférence
des policiers. En ce qui concerne la violence faite aux enfants, le gouvernement
avait adopté une loi révisée sur la protection de
l'enfance en 2000. La Section du statut a cependant conclu que les enfants
victimes de violence voulant être protégés devraient
surmonter les mêmes obstacles qui avaient empêché la
mise en œuvre de la loi visant à protéger les victimes
de violence conjugale. La revendicatrice s'est fait répondre de
régler elle-même le problème quand elle a dit à
la police qu'elle voulait signaler une agression. Le fait qu'elle n'ait
pas demandé la protection de l'État par la suite n'entraînait
pas le rejet de sa revendication puisqu'elle n'aurait pas obtenu cette
protection de toute façon. L'ex-mari pourrait retrouver les revendicateurs,
si ceux-ci retournaient en Corée du Sud, grâce au système
d'enregistrement des familles. Il n'y avait pas de possibilité
de refuge intérieur (PRI)
pour les revendicateurs. La Section du statut a tenu compte des directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe et Les enfants qui revendiquent le statut de réfugié
: Questions relatives à la preuve et à la procédure.
SSR
MA1-02285 et al., 8 mars 2002.
Les revendicatrices alléguaient une crainte bien fondée
de persécution en raison de leur appartenance aux groupes sociaux
de la famille et des femmes victimes de violence. La revendicatrice principale
déclarait que son mari la battait régulièrement.
Elle s'était plainte à la police qui s'était limitée
à la raccompagner chez son mari. De plus, elle se serait opposée
à ce que son mari fréquente un terroriste et son mari l'aurait
à nouveau battue ainsi que sa fille aînée qui essayait
de le raisonner. La revendicatrice avait fui le domicile conjugal avec
ses deux filles, mais son mari les a obligées à retourner
à la maison. Par ailleurs, lors d'une descente de la police au
domicile conjugal afin d'arrêter son mari, en l'absence de celui-ci,
la police aurait arrêté la revendicatrice ainsi que sa fille
aînée. Pendant son séjour en prison, la revendicatrice
aurait été violée par plusieurs policiers. Selon
le tribunal, le témoignage de la revendicatrice était crédible.
De plus, la preuve documentaire rapportait que la violence conjugale était
une réalité en Inde et que les cas de viols par la police
n'étaient pas rares. Ainsi, les victimes de viol non seulement
avaient-elles de la difficulté à porter plainte, mais encore,
quand elles le faisaient, elles étaient ridiculisées au
point de mettre en question l'efficacité même du processus.
Les revendicatrices étaient des réfugiées au sens
de la Convention.
Sanno, Aminata c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-2124-95), Tremblay-Lamer, 25 avril 1996).
La Section du statut de réfugié a conclu que la revendicatrice,
une femme âgée de 24 ans et provenant d'un secteur rural
en Gambie, avait une crainte bien fondée de persécution
dans son village en raison du traitement infligé par son père
abusif : elle a notamment été battue pour avoir refusé
de se soumettre à un mariage forcé. Toutefois, la Section
du statut a erré en concluant que la revendicatrice avait une PRI
en zone urbaine, car elle a erronément inféré que
son mari, un Gambien qu'elle a épousé au Canada, était
en mesure de la protéger en Gambie. Le témoignage du témoin
expert n'étayait pas la conclusion de la Section du statut de réfugié
concernant la PRI. Lesdirectives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe ont été
examinées.Demande accueillie. (Décision de la SSR
U93-07096, 16 novembre 1993.)
D'Mello, Carol Shalini c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1236-97), Gibson, 22 janvier 1998.
L'analyse qu'a faite la Section du statut de la totalité de la
preuve et des règles de droit applicables était insuffisante
: (1) en ce qui concerne le principe énoncé dans Ward
et suivant lequel une revendicatrice ne devrait pas être tenue
de risquer sa vie pour tenter d'obtenir la protection inefficace d'un
État pour en prouver simplement l'inefficacité; et (2) en
ce qui concerne la preuve documentaire qui indiquait l'absence de soutien
de la police. La demande a été accueillie. (Décision
de la SSR
U96-01262, 4 mars 1997).
Tobar, Soledad del Carmen Concha et
al. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)
(C.F.
1re
inst., IMM-1139-98), Rouleau, 26 mai 1999.
Les femmes victimes de violence conjugale constituent un groupe social
au sens de la définition. La femme qui revendique sur cette base
doit démontrer que sa crainte est réelle; que le préjudice
redouté est suffisamment grave pour constituer de la persécution;
qu'elle n'a pas une possibilité de refuge intérieur; qu'elle
court un risque raisonnable de persécution et qu'elle ne peut raisonnablement
attendre une protection adéquate de l'État.- Selon la preuve,
il n'existe pas de ressources au Chili qui permettrait à la revendicatrice
de devenir autonome. « [
] on ne peut retourner une personne
dans son pays d'origine si la seule possibilité pour celle-ci est
de retourner vivre avec son agresseur. » La SSR
a commis une erreur en ne déterminant pas si la revendicatrice
et ses enfants avaient une possibilité de refuge intérieur.
« Pour établir si un État offre une protection adéquate,
il faut regarder non seulement si l'État est capable d'offrir cette
protection mais s'il le veut [
] Parmi les considérations
pertinentes, on doit vérifier si la violence familiale fait l'objet
de sanctions aux termes des lois du pays, si ces lois sont conçues
pour protéger les victimes contre les agressions, et surtout si
elles son appliquées. L'existence de services de soutien (counselling,
aide juridique et médicale) est louable mais ne constitue pas en
soi de la protection. De même, l'existence de maison d'hébergement
n'indique pas nécessairement qu'il existe une protection, si elles
n'offrent qu'un refuge temporaire et que les autorités locales
ne se donnent pas la peine de protéger les victimes de violence
familiale. Compte tenu des règles récemment établies
par la communauté internationale, l'état qui ne prend pas
de mesures pour prévenir les délits de violence à
l'égard des femmes est aussi coupable que les auteurs de ces actes.
Les états sont effectivement tenus de prévenir les délits
liés à la violence à l'égard des femmes, d'enquêter
sur ces actes et de les punir. » La SSR
s'est penché sur la preuve documentaire d'une façon très
selective.- Demande de contrôle judiciaire accueillie. (Décision
de la SSR
M96-01238 et al., 2 février 1998).
Velazquez, Sonia Laura Barragan c.
Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3243-98), Pinard, 9 juin 1999.
La Section du statut a examiné l'explication donnée par
la revendicatrice pour ne pas avoir demandé la protection de l'État
avant de quitter le Mexique. Elle a également tenu compte de son
état psychologique, notamment de la preuve qu'elle souffrait du
syndrome du stress post-traumatique. Le fait que la Section du statut
n'a pas produit une preuve que l'État mexicain pouvait protéger
ses citoyens ne suffit pas pour justifier l'intervention des tribunaux.
La Section du statut était saisie d'une preuve documentaire de
l'existence des initiatives et des ressources du gouvernement visant les
victimes de violence familiale. La demande a été rejetée.
(Décision de la SSR
V96-01189 et al., 9 juin 1998).
Elcock (Milkson), Joan Theresa c.
Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-2985-98), Gibson, 20 septembre 1999.
La revendicatrice est venue au Canada à titre de visiteur en 1994.
Son époux, qui était resté à la Grenade, a
accepté de divorcer, mais a dit à la revendicatrice qu'il
exercerait des représailles contre elle si jamais elle retournait
dans ce pays. En 1997, la revendicatrice a été arrêtée
parce qu'elle se trouvait illégalement au Canada. Elle a alors
revendiqué le statut de réfugié. Elle craint d'être
persécutée par son ex-époux à la Grenade.
La Section du statut (SSR)
a jugé la revendicatrice digne de foi, mais a statué qu'elle
n'avait pas démontré que l'État ne pouvait pas la
protéger. (1) La Cour a jugé que la SSR
avait commis une erreur en omettant d'analyser de manière appropriée
non seulement la question de savoir s'il existait un cadre législatif
et procédural de protection, mais également si l'État,
par l'entremise de la police, était disposé à appliquer
efficacement un tel cadre. (2) Comme dans Williams, les
explications de la revendicatrice au sujet de son retard à revendiquer
le statut de réfugié étaient tout à fait crédibles.
Cependant, comme les observations faites par la SSR
sur cette question n'étaient pas essentielles à sa décision,
elles ne constituaient pas une erreur susceptible de contrôle. La
demande a été accueillie. (Décision de la SSR
U97-01323, 26 mai 1998).
Cho, Soon Ja c. Canada (Ministre de
la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4029-99), Gibson, 9 août 2000.
La requérante principale prétend que son deuxième
époux, qui est le père de ses deuxième et troisième
enfants, est un alcoolique qui la maltraitait verbalement et physiquement
dès qu'il était soûl. Elle prétend également
que l'aîné de ses enfants, qui est le fruit de son premier
mariage, était aussi victime de violences verbales et physiques.
La SSR
a accepté le fait que la requérante principale était
victime de violence, mais elle a conclu que l'État lui offrait
une protection. L'analyse de la SSR
ne comportait aucune conclusion arbitraire sur les faits et représentait
une analyse raisonnable et approfondie de la situation actuelle en Corée
du Sud, tant en ce qui concerne les lois et règlements visant la
protection des victimes de violence conjugale et de leurs enfants que
la capacité et la volonté de réellement les appliquer.
Demande rejetée. (Décision de la SSR
U98-01321, 12 juillet 1999).
Haimov, Elena c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-5865-99), O'Keefe, 15 juin 2001.
Les requérants, Elena Haimov et son fils mineur, des citoyens d'Israël,
sont arrivés au Canada en 1998. La requérante, qui est née
en Russie et est de foi chrétienne orthodoxe, a épousé
un Juif, Boris Haimov, en 1987. Le couple a eu un fils en 1989. Deux ans
plus tard, la famille a émigré en Israël. Au soutien
de leur revendication du statut de réfugié, les requérants
invoquent la persécution exercée par Boris Haimov. La SSR
a reconnu que la requérante avait été battue par
Boris Haimov en Israël, mais elle a considéré que celle-ci
aurait pu obtenir la protection de l'État. Il ne faisait aucun
doute aux yeux de la Cour que la requérante avait une crainte subjective
de persécution puisque Boris Haimov l'avait battue et avait menacé
de la tuer. La police semble avoir aidé la requérante lorsque
son mari l'a menacée en éloignant celui-ci. Toutefois, selon
le juge O'Keefe, la preuve indiquait que rien n'est fait quand un
crime est commis. Quand la requérante s'est rendue au poste de
police, l'agent a commencé à rédiger un rapport,
avant de le déchirer quand il a appris que le différend
entre les époux était causé par le fait qu'ils n'étaient
pas de la même religion. Selon le juge O'Keefe, ce fait démontrait
que l'État était incapable de protéger les requérants.
La demande a été accueillie. (Décision de la SSR T98-07278,
9 novembre 1999).
Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) c. Olah, Bernadett (C.F.
1re
inst., IMM-2763-01), McKeown, 24 mai 2002; 2002 CFPI 595.
L'intimée, Klara Zakar, et sa fille, Bernadette Olah, âgée
de 11 ans, sont citoyennes hongroises. Elles ont d'abord basé leur
revendication sur les difficultés qu'elles ont éprouvées
parce qu'elles étaient Romes. Elles ont par la suite affirmé
que leur crainte véritable provenait des mauvais traitements qu'elles
subissaient de la part du conjoint de fait de l'intimée principale.
La SSR
en est arrivée à la conclusion que les intimées étaient
des réfugiées au sens de la Convention en se basant sur
la crainte de violence conjugale de la principale intimée. (1)
La question de la protection assurée par l'État s'applique
à l'élément objectif du critère relatif à
la crainte de persécution. Les éléments de preuve
pertinents comprennent la preuve documentaire et la situation personnelle
de la revendicatrice. Les impressions subjectives de la revendicatrice
concernant la protection de l'État ne seraient cependant pas un
facteur pertinent. Même s'il est clair que la SSR
a considéré la preuve documentaire objective, ses motifs
laissent entendre qu'elle a aussi tenu compte des impressions subjectives
de la revendicatrice. Selon le juge McKeown, il s'agissait là d'une
erreur. (2) Le tribunal a admis d'office que les services de police au
Canada étaient souvent incapables de protéger entièrement
de son agresseur une conjointe qui est victime de mauvais traitements.
Dans la présente affaire, les agents de police ont réagi
aux incidents de mauvais traitements et ont même porté des
accusations contre le mari, l'ont arrêté et l'ont mis en
détention. Même si, dans la présente affaire, la protection
de l'État aurait certainement pu être meilleure, celle que
la revendicatrice a reçue n'a pas été très
différente de celle qu'elle aurait reçue au Canada. La SSR
a établi une norme trop élevée en ce qui concerne
la protection de l'État. (3) Comme la preuve démontre que
la fille avait elle aussi été victime de mauvais traitements,
le tribunal n'a pas accepté l'argument du ministre selon lequel
la décision de la SSR
concernant la fille était fondée sur une persécution
indirecte. La demande a été accueillie. (Décision
de la SSR
T98-06283, 25 avril 2001).
Ferguson, Gloria c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-5927-01), Noël, 22 novembre 2002; 2002 CFPI 1212.
La Section du statut de réfugié a conclu que la requérante
était crédible et qu'elle avait subi de la violence physique
et psychologique aux mains de son mari. Toutefois, sa revendication du
statut de réfugié a été rejetée parce
qu'elle aurait pu se réclamer de la protection de l'État
existante en Jamaïque. (1) Il n'incombe pas à notre Cour d'établir
une norme élevée de protection de l'État pour d'autres
pays. La réalité doit prédominer, et un critère
permettant de déterminer si le système est adéquat,
compte tenu des circonstances de l'espèce, devrait être appliqué.
(2) La preuve de la protection inadéquate de l'État doit
être claire et convaincante. (3) La requérante a informé
le tribunal que son mari avait des amis au sein de la police locale. Elle
a aussi indiqué qu'elle aurait pu déposer sa plainte ailleurs
(et elle l'a fait sans intenter de poursuites judiciaires) à la
police locale d'une autre ville, où son mari n'était pas
connu. (4) La requérante a pris la décision de ne pas porter
d'accusations criminelles contre son mari parce qu'elle craignait la réaction
de ce dernier. Ce comportement est compréhensible, mais il ne rend
pas la protection de l'État insuffisante. Demande rejetée.
(Décision de la SSR
TA1-03733, 3 décembre 2001).
3. Un changement dans la situation d'un pays qui
est considéré, de façon générale,
comme une amélioration peut n'avoir aucune incidence ou même
avoir une incidence défavorable sur la crainte d'une femme d'être
persécutée du fait de son sexe. Il faut apprécier
la crainte de la revendicatrice et déterminer si les changements
sont suffisamment importants et réels pour rendre sans fondement
sa crainte.
Jimenez Mora, Gisselle et al. c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4041-98), Rouleau,25 juin 1999.
La SSR
avait conclu que selon la preuve documentaire récente les autorités
au Costa Rica avaient adopté des moyens pour combattre la discrimination,
le harcèlement et la violence envers les femmes. La SSR
avait aussi considéré que l'obtention frauduleuse de l'imitation
de la signature du conjoint de la demanderesse (pour rendre possible le
départ de la demanderesse avec son enfant) et conséquemment
à l'enlèvement de l'enfant, allait à l'encontre de
la Convention relative aux droits de l'enfant. La Cour était
d'avis que la preuve documentaire « témoigne de l'amélioration
importante de la situation des femmes au Costa Rica et de l'effort que
font les autorités pour les protéger contre la violence
conjugale. » Demande de contrôle judiciaire rejetée.
(Décision de la SSR
M97-09346 et al., 16 juillet 1998).
4. Pour déterminer s'il existe une possibilité
de refuge intérieur (PRI)
raisonnable, les décideurs doivent tenir compte de la capacité
de la femme, en raison de son sexe, de se rendre dans cette partie du
pays en toute sécurité et d'y rester sans difficultés
excessives.
SSR
U95-03525, 25 septembre 1996.
La Section du statut de réfugié a admis que la revendicatrice,
une Tamoule de 21 ans, avait une crainte fondée de persécution
dans le nord du Sri Lanka du fait de ses opinions politiques imputées
et de son appartenance à un groupe social (jeunes femmes tamoules
craignant d'être recrutées par les Tigres tamouls). La revendicatrice
avait toutefois une possibilité de refuge intérieur viable
à Colombo. Ses deux jours de détention à Colombo,
les mauvais traitements qu'elle y avait subis et sa remise en liberté
contre un pot-de-vin ne constituaient pas de la persécution, c'est-à-dire
qu'il ne s'agissait pas d'une longue période de menaces ou de blessures
corporelles infligées de façon systématique. Selon
la preuve documentaire, les personnes en mesure de prouver leur identité
à la police étaient relâchées dans les trois
jours. Si la revendicatrice devait être pénalisée
par la police parce qu'elle ne pouvait se conformer à l'obligation
de se présenter, conditionnelle à sa remise en liberté,
il s'agirait de poursuite judiciaires, et non de persécution. Les
principes exposés dans les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe ne s'appliquaient pas
à l'espèce. Il existait à Colombo une importante
collectivité tamoule où la revendicatrice pourrait trouver
du soutien.(Demande de contrôle judiciaire rejetée, Puvanendiran,
Premalatha c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)
(C.F.
1re
inst., IMM-3595-96), Heald, 8 juillet 1997).
SSR
U97-02858, 2 novembre 1998.
La revendicatrice craignait d'être persécutée par
son petit ami violent, qui l'a violée deux fois et qui l'a menacée
lorsqu'elle a tenté de mettre fin à leur liaison. Elle a
signalé les deux viols au bureau de la sécurité publique
(PSB), mais son petit ami a été libéré en
raison du manque de preuve et parce que le PSB considérait l'affaire
comme une « querelle familiale ». L'oncle du petit ami avait
du pouvoir et de l'influence au sein du PSB. La Section du statut de réfugié
a conclu que, dans les circonstances, la revendicatrice ne pouvait pas
se prévaloir de la protection de l'État. Il n'y a en Chine
aucune loi nationale interdisant la violence familiale et les femmes y
sont considérées comme la propriété de leurs
parents de sexe masculin. Même si certaines victimes de violence
familiale peuvent avoir une possibilité de refuge intérieur
(PRI)
en Chine, la revendicatrice n'avait pas de PRI
parce qu'elle aurait eu besoin d'un permis pour se déplacer et
que son petit ami aurait pu la retrouver grâce aux contacts que
possède son oncle au sein du PSB. Si elle s'intégrait aux
nombreuses personnes itinérantes qui n'ont aucune résidence
officielle en Chine, elle n'aurait pas droit aux services sociaux ni à
l'éducation, et elle devrait payer pour obtenir ces services. De
plus, les jeunes femmes de la campagne qui se trouvent dans de telles
situations sont souvent victimes d'agressions sexuelles.
SSR
T98-07538, 9 mars 2000.
La revendicatrice fondait sa revendication sur son appartenance à
un groupe social, soit les femmes en Chine victimes de violence familiale.
Elle était mariée avec un détective du Bureau de
la sécurité publique, un homme qui avait beaucoup de pouvoir
et d'influence. Certains membres de sa belle-famille étaient de
hauts fonctionnaires. Son mari l'agressait physiquement et sexuellement,
et ses efforts pour obtenir réparation auprès des autorités
étaient vains. Au Canada, un psychologue a diagnostiqué
chez elle le syndrome du stress post-traumatique. Selon la preuve documentaire,
la violence envers les femmes est encore un problème très
répandu en Chine. Il existe des lois pour protéger leurs
droits, mais les mesures d'exécution prévues dans ces lois
sont faibles. Les autorités policières locales choisissent
souvent de ne pas intervenir dans ce qu'elles considèrent comme
un problème familial. Les autorités ne voulaient pas assurer
à la revendicatrice une protection adéquate, et elle ne
pouvait déménager dans une autre ville sans le consentement
de son mari. Les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe ont été
examinées.
Quaye, Sarah Adjoa c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-3999-00), Tremblay-Lamer, 23 mai 2001.
La requérante, une citoyenne du Ghana âgée de 29 ans,
fonde sa revendication du statut de réfugié au sens de la
Convention sur sa race, les opinions politiques qui lui sont imputées
et son appartenance à un groupe social, les femmes battues. Elle
vivait dans un petit village agricole. Son père et sa mère
avaient pris des dispositions afin qu'elle épouse un homme qui
avait payé ses études (un homme riche qui vivait en Allemagne
et qui était puissant aux yeux des habitants de son village), malgré
le fait qu'elle vivait déjà en union de fait avec un homme
et qu'elle était enceinte de jumeaux de celui-ci. Elle a refusé
d'épouser l'homme choisi par son père et sa mère.
Elle craint de retourner au Ghana parce qu'elle pourrait être tuée
par sa tribu. La SSR
a estimé que la requérante avait une PRI
à Accra. (1) La Cour a statué que la conclusion de
la SSR
selon laquelle l'influence de son futur mari ne s'étendait pas
au-delà du village de la requérante reposait sur des suppositions.
En outre, la simple adoption de nouvelles dispositions législatives
n'était pas suffisante pour décider que la requérante
avait une PRI
dans la capitale. (2) La SSR
a mal interprété la preuve quand elle a conclu que, même
si la requérante était crédible quant à la
question de la violence faite aux femmes, elle devait accorder la priorité
à la preuve documentaire parce que celle-ci indiquait que le gouvernement
faisait des efforts pour lutter contre ce problème. Il ressortait
de la preuve documentaire que la violence familiale est encore un problème
grave partout au Ghana. La demande a été accueillie. (Décision
de la SSR TA0-02196,
13 juillet 2000).
Blanco, Alicia Zamudio c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4860-00), Nadon, 28 juin 2001.
La demanderesse alléguait appartenir au groupe social des femmes
victimes de violence conjugale et celui des lesbiennes. La SSR
avait trouvé que selon la preuve documentaire, les lesbiennes sont
parfois victimes de discrimination mais habituellement seulement dans
la sphère de la vie privée. La demanderesse n'avait pas
exprimé le désir d'avoir une relation homosexuelle voulant
vivre dans le cadre de ses croyances qui semblaient exclure ces relations.
De plus, la demanderesse risquait d'être maltraitée de nouveau
par son mari sans bénéficier de protection si elle retournait
vivre dans son secteur. Cependant, elle avait un PRI
à Mexico où il y avait pratiquement aucune chance que son
époux la retrouve ni que ses beaux-parents la rencontre par hasard.
La demanderesse avait fait preuve de débrouillardise en vivant
au Canada faisant en sorte qu'il était raisonnable pour elle de
vivre ailleurs au Mexique. Selon la Cour, le tribunal n'a pas commis d'erreur
justifiant une intervention de sa part. Demande rejetée. (Décision
de la SSR
V99-01904, 24 août 2000).
D. PROBLÈMES SPÉCIAUX LORS DES AUDIENCES RELATIVES À
LA DÉTERMINATION DU STATUT DE RÉFUGIÉ
Les femmes qui revendiquent le statut de réfugié
font face à des problèmes particuliers lorsque vient le
moment de démontrer que leur revendication est crédible
et digne de foi.
1. Certaines femmes peuvent être réticentes
à parler de la violence sexuelle dont elles ont été
victimes afin de garder leur sentiment de « honte » pour
elles-mêmes et de ne pas déshonorer leur famille ou leur
collectivité.
SSR
T93-11934, 5 juillet 1994.
Le tribunal a jugé que l'intéressée, une chrétienne
âgée de 33 ans, craignait avec raison d'être persécutée
du fait de son appartenance à un certain groupe social, celui des
« Syriennes appartenant à une famille arabe traditionnelle
». Les hommes de sa famille avaient fait le serment de l'assassiner
car, à leur avis, elle avait humilié et déshonoré
la famille; elle avait transgressé les normes culturelles de la
société syrienne. Elle avait commis diverses fautes, dont
celles d'épouser quelqu'un que sa famille n'approuvait pas et de
rencontrer en privé un homme qui n'était pas de la famille.
Le tribunal a statué que l'intéressée avait confirmé
de manière claire et convaincante que l'État ne la protégerait
pas advenant son retour en Syrie. En évaluant la crédibilité
de l'intéressée, le tribunal a accepté l'explication
qu'elle avait donnée pour avoir omis certains détails importants
dans son Formulaire de renseignements personnels. Appliquant les directives
de la présidente intitulées Revendicatrices du statut de
réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe, le tribunal a fait remarquer qu'il était
nécessaire d'être attentif aux problèmes particuliers
auxquels sont confrontées les femmes qui sont appelées à
présenter leurs arguments aux audiences relatives à la détermination
du statut de réfugié, notamment lorsqu'elles ont vécu
des situations dont elles ont de la difficulté à parler.
SSR
T97-06447 et al., 22 octobre 1999.
La revendicatrice, qui prétendait avoir été battue
par son conjoint, n'était pas à l'aise de témoigner
en présence des commissaires masculins du tribunal et a présenté
une requête demandant que sa revendication soit entendue par un
tribunal composé uniquement de femmes. La Section du statut de
réfugié a indiqué que, en l'absence de tout renseignement
particulier qui pourrait faire naître une crainte raisonnable de
partialité, tous les commissaires sont présumés avoir
la compétence voulue pour exercer leurs fonctions professionnelles
à l'égard des revendications fondées sur le sexe.
Les commissaires sont conscients de la difficulté des revendicatrices
à décrire en détail des voies de fait; règle
générale, les revendicatrices ne sont pas tenues de donner
des précisions à ce sujet. Lorsqu'un témoignage au
sujet d'une agression est nécessaire, les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe prévoient
explicitement la possibilité de recourir à d'autres moyens
de preuve. Dans des circonstances exceptionnelles, lorsque le fait d'obliger
une revendicatrice à comparaître devant un tribunal composé
de commissaires masculins serait contraire à la justice naturelle,
la revendication devrait être entendue par un tribunal formé
de femmes. En l'espèce, la preuve du malaise possible de la revendicatrice
n'était pas un motif suffisant pour conclure que l'audition de
la revendication par un commissaire masculin serait contraire à
la justice naturelle. La Section du statut de réfugié a
fait référence à différentes décisions
ainsi qu'au rapport médical d'un psychologue.
SSR
T99-00663 et al., 14 février 2000.
La revendicatrice a été violée par un groupe de policiers
lorsqu'elle s'est rendue au poste de police pour s'informer au sujet de
la libération de son mari. Elle n'a parlé à personne
de l'agression à cause de la honte qui touche les victimes de viol.
L'un de ses agresseurs, le demi-frère de son mari, a révélé
le viol de sorte que la faute sociale apparente de la revendicatrice a
été aggravée par sa transgression d'un autre tabou
profondément enraciné, l'inceste. Son mari a entrepris une
procédure de divorce à cause du viol. Sa famille voulait
qu'elle se soumette, avec ses fils, à un rituel de purification
yoruba pour purger la honte apportée à la famille. La revendicatrice
aurait dû boire un poison mortel dans le cadre de ce rituel. Selon
la preuve documentaire, la violence sexuelle exercée contre les
femmes continue d'être répandue au Nigeria. Bien que le viol
soit officiellement une infraction criminelle, les viols sont rarement
dénoncés ou font rarement l'objet de poursuites. Les inhibitions
et les tabous culturels dissuadent les victimes de les signaler. La Section
du statut de réfugié a jugé que l'ostracisme familial
et social dont étaient frappés les revendicateurs au Nigeria
était si fort qu'il constituait de la persécution. Pour
sa part, le commissaire dissident était d'avis que le témoignage
de la revendicatrice concernant le prétendu rituel de purification
n'était pas crédible vu l'absence de toute mention de ce
rituel dans la preuve documentaire. Il était cependant disposé
à reconnaître que la revendicatrice craignait avec raison
d'être persécutée, même s'il n'était
pas convaincu que c'était le cas également des enfants de
la revendicatrice. Les deux commissaires de la Section du statut de réfugié
ont pris en compte les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe.
Thambirasa, Sakuntala c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1224-98), Reed, 3 février 1999.
La CISR
a de toute évidence mal interprété la preuve en déclarant
que la raison pour laquelle la revendicatrice avait quitté le Sri
Lanka était l'agression sexuelle dont elle avait été
victime et certains événements connexes survenus à
Colombo. De plus, le fait que la CISR
se soit fondée sur le fait que l'on ne trouvait dans les notes
prises au point d'entrée aucune allusion aux événements
survenus à Colombo pour conclure à l'absence de crédibilité
constitue une conclusion arbitraire : (1) La CISR
ne s'est absolument pas interrogée sur les motifs pour lesquels
une femme tamoule (et d'ailleurs beaucoup de femmes) hésiterait
à divulguer une agression sexuelle à un étranger,
un homme, qui parle une autre langue et qui vit dans un pays dont la culture
est différente de la sienne ; (2) le fonctionnaire a rempli en
entier l'espace réservé aux notes qu'il devait prendre au
point d'entrée ; (3) c'est donc le fonctionnaire qui choisit ce
qui est consigné dans les notes, pas le revendicateur ; (4) on
ne peut s'attendre à ce que tous les faits soient relatés
dans les brèves lignes de notes. La demande est accueillie. (Décision
de la SSR
U97-00189, 23 février 1998).
2. Certaines femmes peuvent se trouver dans une
situation difficile lorsqu'elles sont interrogées au sujet des
expériences et/ou activités de leurs parents de sexe masculin.
3. Les revendicatrices du statut de réfugié
victimes de violence sexuelle peuvent présenter un ensemble de
symptômes connus sous le nom de syndrome consécutif au
traumatisme provoqué par le viol; les femmes qui ont fait l'objet
de violence familiale peuvent de leur côté présenter
un ensemble de symptômes connus sous le nom de syndrome de la
femme battue.
SSR
T93-06593, 9 mai 1994.
La revendicatrice a été incarcérée plusieurs
fois pour avoir refusé de participer à des manifestations
en faveur de Khomeini, pour son association à un groupe pro-monarchiste
et pour des infractions au code vestimentaire. De plus, elle a reçu
50 coups de fouet lorsque la force révolutionnaire l'a vue seule,
sans accompagnateur, avec un ami. Le tribunal a conclu que la revendicatrice
craignait avec raison d'être persécutée du fait de
ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social
(c'est-à-dire les femmes). Pour rendre sa décision, le tribunal
a tenu compte des directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe. Bien que le tribunal
ait d'abord eu de graves inquiétudes quant à la façon
dont la revendicatrice présentait son témoignage, il a conclu,
d'après les réponses qu'elle a données, qu'elle n'était
pas un témoin qui essayait d'être vague, mais qu'elle avait
plutôt du mal à se concentrer et qu'elle était mentalement
perturbée du fait des mauvais traitements subis en Iran. Une évaluation
psychiatrique, demandée par le tribunal, a confirmé cet
état. Du fait de l'incapacité de la revendicatrice à
témoigner de façon cohérente, le tribunal s'est surtout
fondé sur les renseignements contenus dans le Formulaire de renseignements
personnels de celle-ci et les rapports médicaux et psychiatriques
pour tirer ses conclusions quant à la preuve.
SSR
M94-00649, 11 mai 1995.
L'époux de l'intéressée était un Canadien
qui vivait en République dominicaine. Il était recherché
par la Sûreté du Québec. Lorsque l'intéressée
avait refusé de se conformer à certaines exigences de son
époux, celui-ci était devenu violent et l'avait battue.
Elle n'avait pu obtenir de l'aide de la police dominicaine, même
si elle avait présenté trois rapports, un à la police
locale et deux au palais de justice de la capitale. Ses premières
tentatives de fuite ont été vaines. Son époux l'a
amenée une fois au Québec pour un séjour de cinq
mois, mais elle ne parlait ni l'anglais ni le français et n'était
pas autorisée à sortir. Quand l'intéressée
est parvenue à revenir au Canada deux ans plus tard, elle n'a pas
demandé sur-le-champ le statut de réfugié parce qu'elle
ne savait pas qu'elle pouvait le faire. Le tribunal a jugé que
le témoignage de l'intéressée était digne
de foi et qu'il concordait avec le profil psychologique d'une femme battue.
D'après la documentation, les femmes qui sont victimes de violence
conjugale en République dominicaine sont privées de protection.
SSR
U96-02325, 20 décembre 1996.
La revendicatrice a affirmé que son mari avait fait preuve de violence
à son égard et l'avait menacée de mort, et que le
Ghana était incapable de la protéger. La Section du statut
de réfugié doutait de la crédibilité de la
revendicatrice, mais a accordé un poids considérable à
un rapport médical et à un rapport psychiatrique qui concluaient
tous deux qu'elle souffrait de dépression et du syndrome du stress
post-traumatique. La Section a consulté les directives de la présidente
intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant
d'être persécutées en raison de leur sexe et a conclu
que la revendicatrice appartenait clairement à la troisième
catégorie recensée dans les directives, savoir les femmes
qui craignent d'être persécutées du fait de leur sexe
à cause d' « [
] actes de grave discrimination sexuelle
ou d'actes de violence de la part des autorités publiques ou même
de citoyens privés, lorsque l'État ne veut pas ou ne peut
pas les protéger de façon appropriée [
] »
. La preuve documentaire a confirmé le témoignage de la
revendicatrice selon lequel les femmes victimes de violence familiale
ne pouvaient se prévaloir de la protection de la police. Même
si c'est un crime de battre sa femme au Ghana, la société
traditionnelle tolère généralement ce type de violence.
La revendicatrice ne pouvait obtenir une protection adéquate de
l'État.
SSR
U96-01850 et al., 18 septembre 1997.
La revendicatrice avait fait l'objet de violence physique et sexuelle
grave et continue de la part de son mari, membre du parti Jatiya, qui
formait alors en partie le gouvernement de coalition au Bangladesh. Elle
avait demandé la protection de la police à deux reprises,
mais celle-ci avait refusé même de prendre la plainte. Un
médecin qui l'avait traitée après une des agressions
brutales de son mari a décrit dans une lettre les blessures multiples
que celui-ci lui avait infligées. Selon une évaluation psychologique
faite par un spécialiste traitant les victimes de torture et les
femmes battues, la revendicatrice souffrait d'un stress post-traumatique
aigu lié à la torture physique, émotive et sexuelle.
Après le départ de la revendicatrice du Bangladesh, son
mari s'était informé de ses allées et venues, avait
menacé ses parents et battu son frère. La revendicatrice
faisait face à plus qu'une simple possibilité de préjudice
grave si elle retournait au Bangladesh, et elle ne pouvait pas se prévaloir
de la protection de l'État.
SSR
T98-07559, 9 juin 1999.
Tout au long de son mariage arrangé de vingt ans, la revendicatrice
a été battue par son mari. À plusieurs reprises,
elle a signalé les mauvais traitements à la police, mais
celle-ci n'a rien fait. Elle n'a pas tenté de divorcer de son mari
mais, selon la preuve documentaire, les mauvais traitements physiques
ne constituent un motif de divorce que s'ils causent des lésions
permanentes; d'autre part, il est difficile pour les femmes divorcées
de subvenir à leurs besoins financiers. Mis à part ses enfants,
la revendicatrice n'avait pas d'autre famille en Iran. Le fait qu'elle
n'ait pas demandé le divorce n'atteste pas de l'absence d'une crainte
subjective de persécution. D'après une évaluation
psychologique, la revendicatrice souffrait du syndrome du stress post-traumatique.
Ce reportant aux directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe, la Section du statut
de réfugié a déterminé que la revendicatrice
avait une crainte de persécution fondée en sa qualité
de femme victime de violence familiale. Il n'y avait aucune raison de
croire que la revendicatrice bénéficierait d'une plus grande
protection de l'État à l'avenir qu'elle ne l'avait eu dans
le passé.
SSR
T98-07538, 9 mars 2000.
La revendicatrice fondait sa revendication sur son appartenance à
un groupe social, soit les femmes en Chine victimes de violence familiale.
Elle était mariée avec un détective du Bureau de
la sécurité publique, un homme qui avait beaucoup de pouvoir
et d'influence. Certains membres de sa belle-famille étaient de
hauts fonctionnaires. Son mari l'agressait physiquement et sexuellement,
et ses efforts pour obtenir réparation auprès des autorités
étaient vains. Au Canada, un psychologue a diagnostiqué
chez elle le syndrome du stress post-traumatique. Selon la preuve documentaire,
la violence envers les femmes est encore un problème très
répandu en Chine. Il existe des lois pour protéger leurs
droits, mais les mesures d'exécution prévues dans ces lois
sont faibles. Les autorités policières locales choisissent
souvent de ne pas intervenir dans ce qu'elles considèrent comme
un problème familial. Les autorités ne voulaient pas assurer
à la revendicatrice une protection adéquate, et elle ne
pouvait déménager dans une autre ville sans le consentement
de son mari. Les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe ont été
prises en compte.
SSR
A99-00789 et al., 8 avril 2002.
La revendicatrice craignait d'être maltraitée par son mari.
Ses enfants partageaient cette crainte, et ils fondaient aussi leur revendication
sur le fait qu'ils étaient à moitié rom (l'origine
rome des revendicateurs n'avait pas été établie).
Une preuve médicale démontrait que les revendicateurs souffraient
d'un grave traumatisme psychologique et mental à cause des mauvais
traitements dont ils avaient été victimes. L'enfant le plus
jeune a indiqué dans son témoignage qu'il avait vu son père
donner des coups de poing à sa mère, que les mauvais traitements
étaient fréquents et que les quatre enfants avaient été
battus par leur père. Ce témoignage a été
corroboré par d'autres témoins. La preuve démontrait
que le mari de la revendicatrice était atteint de maladie mentale.
La Section du statut, qui était particulièrement préoccupée
par cette preuve, a conclu que non seulement les revendicateurs craignaient
avec raison d'être persécutés par le mari de la revendicatrice,
mais ils couraient peut-être aussi le risque d'être tués
par lui. Les revendicateurs ne pouvaient pas obtenir le protection de
l'État en Pologne. La violence conjugale est un phénomène
courant dans ce pays, et la protection et les recours sont très
limités. D'autres documents produits en preuve indiquaient également
que la revendicatrice et ses enfants ne pouvaient pas être protégés
de manière adéquate par l'État.
Mayeke, Yai Florence Futila c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-2496-98), Tremblay-Lamer,5 mai 1999.
Au début de l'audience, les commissaires avaient assuré
la demanderesse que le tribunal ne poserait aucune question au sujet des
viols. Selon la Cour, « puisque les viols étaient les
éléments centraux de la revendication, il était déraisonnable
[
] de conclure à la non crédibilité de la demanderesse
en évaluant sa crédibilité uniquement sur les incidents
qui ont suivi immédiatement ces agressions. Lorsqu'il a constaté
avoir des doutes quant à sa crédibilité sur des faits
collatéraux, le tribunal aurait dû permettre à la
demanderesse de témoigner sur l'élément central de
sa revendication. Une telle omission constitue un déni de justice
naturelle ». Aussi, la Cour est d'avis que la SSR
a ignoré les effets provoqués par les viols chez la demanderesse.
Elle souligne que la difficulté de concentration et la perte de
mémoire sont inclues dans la liste des symptômes mentionnés
dans les directives de la présidente intitulées Revendicatrices
du statut de réfugié craignant d'être persécutées
en raison de leur sexe. De plus, le tribunal a commis une erreur en ignorant
un document médical attestant que la demanderesse avait subi un
avortement spontané deux mois après son arrivée au
Canada. Demande de contrôle judiciaire accueillie. (Décision
de la SSR
M97-01372, 28 avril 1998).
Griffith, Marion c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4543-98), Campbell, 14 juillet 1999.
Pendant plus de vingt ans, la revendicatrice a subi une extrême
violence de la part de son mari. La Cour a formulé des observations
sur le défaut de la SSR
de respecter les directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe. Ces Directives constituent
un effort positif, éclairé et nécessaire déployé
par la CISR
pour s'assurer que le tribunal est bien informé et se montre sensible
au cas des femmes qui revendiquent le statut de réfugié
parce qu'elles sont victimes de violence familiale. Les membres du tribunal
doivent appliquer les connaissances nécessaires en faisant preuve
de sensibilité. Les commissaires de la SSR
qui s'occupent de telles revendications doivent poursuivre leur formation
approfondie. Les motifs de la SSR
doivent tenir compte de ce que l'on sait au sujet des femmes victimes
de violence familiale. Il est question de l'arrêt R. c. Lavallee,
[1990] 1 R.C.S.
852. Pour évaluer le retard qu'a mis la revendicatrice à
quitter St. Vincent et à présenter une revendication au
Canada, le tribunal n'aurait pas dû se servir du critère
objectif de la « personne raisonnable ». Demande
accueillie. (Décision de la SSR
T97-06299, 18 août 1998).
Kaur, Ravinder et al. c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4869-00), Pinard, 19 septembre 2001; 2001 CFPI 875.
Les demandeurs craignaient d'être persécutés en raison
de leur appartenance à un groupe social. Le tribunal avait rejeté
les revendications et conclu qu'elles n'avaient aucun minimum de fondement.
Le tribunal avait conclu que la demanderesse n'était pas crédible
vu qu'elle avait omis d'indiquer dans son FRP
qu'elle avait été violée par la police lorsqu'elle
était en détention. Cependant, elle avait amendé
son FRP
au début de l'audience pour y ajouter cet incident et avait expliqué
qu'elle ne l'avait pas indiqué dans son FRP
auparavant parce qu'elle avait honte et peur de la réaction des
gens. Elle avait expliqué qu'elle était en état de
détresse après l'incident et ne s'était pas occupée
de sa santé physique. La Cour était d'avis que les explications
de la demanderesse portaient sur des éléments centraux de
la revendication et la SSR
a erré en omettant de considérer les circonstances sociales
et culturelles qui, selon les allégations de la demanderesse, l'empêchaient
de parler de l'incident. Le tribunal aurait dû, pour le moins, commenter
les explications de la demanderesse qui semblaient raisonnables. Demande
accueillie. (Décision de la SSR
M99-08473 et al, 2 août 2000).
Cazak, Liliana c. Canada (Ministre
de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-1110-01), Blanchard, 9 avril 2002; 2002 CFPI 390.
La requérante principale prétendait avoir été
victime de la violence sexuelle, physique et psychologique exercée
par son mari. Ce dernier a proféré des menaces de mort à
l'endroit de la requérante principale et de sa sœur, la deuxième
requérante. La requérante principale a fait valoir que,
compte tenu du fait que son mari est policier et des attitudes existant
en Roumanie à l'égard de la violence familiale, il aurait
été vain qu'elle demande la protection de la police. Les
requérantes sont venues au Canada en 1999 pour participer au Championnat
mondial d'aviron, et elles ne sont jamais reparties. La Cour a statué
que la SSR
avait tiré des conclusions déraisonnables en s'appuyant
sur des suppositions, des stéréotypes et des idées
fausses. (1) Le rapport psychologique étayait les allégations
de la requérante principale. Il est significatif que la SSR
n'ait pas rejeté cet élément de preuve, mais qu'elle
ait plutôt choisi de ne lui accorder aucune pertinence et de se
fonder sur ses propres convictions et suppositions selon lesquelles les
athlètes de catégorie internationale n'ont pas le profil
des femmes battues. (2) La SSR
a souligné à plusieurs reprises que la requérante
principale n'avait rien fait pour quitter son mari même si elle
avait eu de nombreuses occasions de le faire pendant ses voyages à
l'étranger. Il faut cependant rappeler qu'elle s'était mariée
en octobre 1998 et s'était séparée moins d'un
an plus tard. Un examen de l'arrêt Lavallee ([1990]
1 R.C.S.
852) et du rapport psychiatrique permet de conclure que le comportement
de la requérante principale n'est certainement pas incompatible
avec celui-ci d'une victime du syndrome de la femme battue. La demande
a été accueillie. (Décision de la SSR
TA0-05194, 12 février 2001).
Reginald c. Canada (Ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 4 C.F.
523 (1re inst.).
La demanderesse, qui a vécu toute sa vie à Colombo, se dit
persécutée à cause de sa race, de sa nationalité,
de son appartenance à un certain groupe social, celui des femmes
tamoules du Sri Lanka, et des opinions politiques qu'on lui prêtait.
Il appert que les commissaires de la Section du statut avaient des doutes
sur la forme et dans une certaine mesure sur le fond des questions posées
à la demanderesse par son avocat. La Cour cite à l'appui
de nombreux passages de la transcription de l'audience de la Section du
statut. Contrairement aux directives de la présidente intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être
persécutées en raison de leur sexe, il n'y avait rien de
compréhensif, et encore moins d'extrêmement compréhensif,
dans « l'attitude » que les commissaires témoignaient
à la demanderesse pendant son témoignage sur ses malheurs.
La Cour en conclut, en reprenant les termes employés par le juge
Mahoney dans Kumar, que « l'intervention abusive » des
commissaires de la SSR
dans « l'administration ordonnée des preuves par la demanderesse
» et l'attitude peu compréhensive témoignée
à cette dernière pendant son témoignage sur le viol
qu'elle aurait subi, équivalaient à un déni de justice
naturelle. Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-11489, 19 avril 2001).
Dhaliwal, Jaswinder Kaur c. Canada
(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-4787-01), Kelen, 11 septembre 2002; 2002 CFPI 965.
La SSR
a déterminé que la requérante était victime
de violence physique et mentale horrible de la part de son mari. Toutefois,
la SSR
a enfreint les principes de justice naturelle lorsqu'elle a rejeté,
pour manque de crédibilité, le témoignage de la requérante,
selon lequel la violence avait continué après son divorce,
en 2000, en ce sens que la SSR
avait interrompu le témoignage de la requérante portant
sur la poursuite de la violence, parce qu'elle avait déterminé
que ce témoignage n'était pas nécessaire. De plus,
la Cour a statué que la décision de la SSR,
selon laquelle la requérante était un témoin crédible
quant à sa crainte de persécution jusqu'à la fin
de 1998, mais qu'elle n'était pas un témoin crédible
quant à sa crainte de persécution en 1999 et en 2000, est
irrationnelle. Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-17763, 20 août 2001).
A.G.I. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration) (C.F.
1re
inst., IMM-5771-01), Kelen, 11 décembre 2002; 2002 CFPI
1287.
La requérante, qui est Rome, a fondé sa revendication sur
la violence dont elle a été victime aux mains de son mari.
Ce dernier a commencé à la maltraiter physiquement en 1995,
après s'être joint à un groupe extrémiste appelé
Una-Unso, dont le principal but était de débarrasser l'Ukraine
des minorités ethniques, notamment les Roms. Le tribunal n'a pas
commis d'erreur en en venant à la conclusion que la requérante
n'avait pas de crainte fondée de persécution en raison de
son origine ethnique rome. La preuve d'un fondement objectif ne dégage
pas le revendicateur ou la revendicatrice de prouver qu'il ou elle a une
crainte subjective d'être persécuté(e). Toutefois,
le rejet, par le tribunal, du certificat médical et des rapports
de police, parce qu'ils n'avaient aucune valeur probante, était
manifestement déraisonnable. L'authenticité de ces documents
n'a pas été mise en doute, et ils fournissaient la preuve
corroborante des préjudices et des plaintes. Il est manifestement
déraisonnable de la part de la Section du statut de rejeter ces
éléments de preuve parce que les certificats ne spécifient
pas que les blessures étaient attribuables à de mauvais
traitements infligés par le mari de la requérante. Les femmes
battues cachent souvent la cause de leurs blessures en raison de la honte
qu'elles éprouvent (R. c. Lavalle, [1990] 1 R.C.S.
852). La Cour a reconnu que les revendications du statut de réfugié
fondées sur la violence conjugale sont souvent tardives, en raison
de la nature de la violence conjugale. Le temps que la requérante
a mis pour présenter sa revendication n'aurait pas dû servir
de fondement à la conclusion défavorable quant à
sa crédibilité relativement à la violence conjugale.
Demande accueillie. (Décision de la SSR
TA0-13341, 20 novembre 2001).
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