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Créer un cadre de sagesse communautaire : examen des services aux victimes dans les territoires du Nunavut, du Nord-Ouest et du Yukon

  1. 4.0  Territoire du Yukon
    1. 4.3  Services offerts dans les collectivités du Yukon
      1. 4.3.4 Défis en matière de prestation de services aux victimes

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4.3.4     Défis en matière de prestation de services aux victimes

Même s'il existe un certain nombre d'excellents programmes au Yukon, les répondants ont également parlé de plusieurs défis en matière de prestation de services aux victimes qui doivent faire l'objet de travaux plus poussés. La présente section présente des renseignements détaillés sur ces défis.

Manque de soutien de la collectivité pour les victimes et les fournisseurs de services

  • « La collectivité ne risque pas d'héberger une femme à la maison de transition … il y a beaucoup de violence indirecte ici … les familles ou des amis proches vous forcent à faire des choses que vous ne voulez pas faire … les liens du sang familiaux sont tricotés serrés et protègent les délinquants. »
     
  • « Il y a une forte résistance à la reconnaissance de la violence conjugale et de son incidence sur la famille et sa présence dans la collectivité … les gens souffrent du fait que du point de vue social, nous minimisions leur comportement violent. »
     
  • « Les gens ne veulent pas que le système judiciaire, la GRC ou des travailleurs sociaux, qui pourraient leur enlever leurs enfants, interviennent … et les femmes se sentent très désensibilisées et portent ce fardeau comme une insigne … c'est " nous contre eux". »
     
  • « Nous devons faire plus pour mettre fin à la violence familiale …il ne se passe rien dans la collectivité où la violence sexuelle est discutée … il faut tout révéler …le secret est si bien caché que les gens disent qu'il ne faut pas y toucher …beaucoup d'entre nous disent "non, il faut parler" … lorsque nous entendons dire qu'il n'y a pas de ressources, c'est qu'on craint de faire face au problème. »
     
  • « Notre principal défi consiste à amener les parents à considérer les besoins de leur enfant comme la priorité … si un parent n'apporte pas son soutien et ne fournit pas ce cadre de vie sécuritaire à l'enfant, nous n'obtiendrons pas de succès. »
     
  • « Nous vivons dans une culture où les gens vivent repliés sur eux-mêmes sans prendre d'engagement, sans assumer leurs responsabilités ou témoigner leur empathie aux autres … les gens risquent donc d'agresser les autres et d'être victimes de violence … le repli sur soi est le stade de développement appelé adolescence …les traumatismes empêchent de parvenir à l'âge adulte. »
     
  • « Pour commencer, les hommes et les femmes peuvent cesser de se traiter de “ nazis ” qui travaillent pour le changement social … il n'y a pas de comportements ou de dysfonctions observés chez les gens qui ne proviennent pas de la cause fondamentale qu'est l'inégalité des femmes … les gens ne comprennent pas que la violence envers les femmes et la violence familiale touchent vraiment tout le monde. »
     

L'attitude du public et les normes sociales concernant la violence conjugale, les agressions sexuelles et la violence à l'endroit des enfants qui nient les niveaux élevés de violence interpersonnelle au Yukon et qui laissent de côté, blâment et harcèlent les victimes et les fournisseurs de services constituent l'un des principaux défis soulevés par les fournisseurs de services. La plupart des répondants ont indiqué que même s'il y a eu des améliorations dans ce domaine (voir les « partenariats efficaces » plus haut), il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.

Bien des répondants ont indiqué que les amis, la famille et la collectivité en général exercent beaucoup de pressions sur les victimes pour qu'elles ne révèlent rien et qu'elles s'attribuent le blâme de la violence qu'elles subissent. Les familles et les collectivités ne ménagent presque aucun effort pour protéger les délinquants. Lorsque les victimes ont le choix entre appartenir à une famille et à une collectivité ou dénoncer la situation, la plupart en sont réduites à choisir de se blâmer et de garder le silence.

Selon ces répondants, cela mène naturellement à une opposition entre  « eux et nous », surtout dans les petites collectivités. Les victimes, qui sont dissuadées de faire appel aux fournisseurs de services et aux autorités, en viennent à croire que toute intervention leur portera encore davantage préjudice à elles et à leurs enfants. En outre, selon plusieurs répondants, il y a chez les membres des Premières nations une répugnance naturelle à faire confiance à tout service ou système gouvernemental.

De plus, plusieurs répondants ont indiqué que certaines normes publiques favorisent le harcèlement et le licenciement des fournisseurs de services, des féministes et d'autres activistes sociaux qui travaillent à l'émancipation des femmes et à la suppression de la violence faite aux femmes. Comme l'a fait remarquer un répondant, le « repli sur soi » et le « manque d'empathie » dans la société ne limitent en rien les effets de ces attitudes.

Manque de soutien et de compréhension des victimes chez les dirigeants

  • « Des dirigeants qui occupent des postes de commande ont parfois formulé des observations inopportunes qui ont engendré un mouvement de ressac contre les femmes maltraitées. »
     
  • « Dire "nous croyons savoir que tu as éprouvé des difficultés et nous n'intervenons pas"équivaut à protéger un comportement déviant. »
     
  • « Certains dirigeants n'ont rien fait pour leur propre guérison … ils sont des victimes ou des agresseurs. »
     
  • « Ce sont les gens au-dessus de nous (qui exercent le pouvoir politique) qui disent "nous ne pouvons pas faire cela parce que nous n'avons pas les ressources" … mais nous avons les ressources. »
     
  • « Le défi consiste à conserver les questions relatives aux femmes dans le programme politique. »
     

La plupart des répondants ont indiqué que le leadership public concernant les questions de victimisation et le soutien politique à l'égard de leurs services aux victimes ne sont pas toujours constants. Selon ces répondants, la plupart des administrations publiques du Yukon ont appuyé au cours des 30 dernières années une gamme relativement étendue de programmes sociaux et de services spécialisés. Toutefois, selon certains répondants, certains dirigeants politiques, tant au sein des administrations publiques que des gouvernements des Premières nations, ont critiqué les services actuels parce qu'ils étaient peu pertinents et inutiles, ou soutenu que les problèmes sociaux sont trop graves pour que quiconque puisse les résoudre.

Ces répondants disent que ce comportement traduit le manque d'information ou une attitude réactive à l'égard de la victimisation en général, et les niveaux élevés de traumatisme au Yukon en particulier. De plus, ils estiment que cela révèle un mouvement de ressac général envers le féminisme et les questions relatives aux femmes, en particulier la violence faite aux femmes, dans notre société. Quelques répondants croient également que ces dirigeants n'ont pas fait face à leur propre cas en matière de victimisation ou d'agression et que, par conséquent, ils ne veulent pas voir des services qui pourraient les obliger à le faire. Les attitudes de ces dirigeants politiques peuvent également refléter l'attitude du public en général selon laquelle le Yukon, bien qu'il soit assez avancé par rapport à d'autres territoires du Nord, n'appuie pas ou ne comprend pas encore vraiment les victimes de violence.

Manque d'infrastructure, de ressources et de services

  • « Nous sommes une petite organisation disséminée un peu partout … certains clients ayant de grands besoins nous téléphonent tous les jours …tout organisme qui travaille avec les victimes n'a jamais assez de ressources pour répondre au besoin; il y a toujours des clients. »
     
  • « Nous avons besoin d'un endroit où nous pouvons aller pour traiter nos clients … un endroit pour offrir aux victimes des programmes et une guérison familiale. »
     
  • « Nous avons un niveau élevé de violence envers les enfants, de violence physique et de violence sexuelle, de violence conjugale et d'agressions sexuelles … souvent ces actes de violence ne sont pas signalés … les gens doivent pouvoir appeler une ligne d'écoute téléphonique. »
     
  • « Des hommes sont victimes de violence, mais ils n'appellent pas … il y a beaucoup de violence et de traumatisme dans la collectivité …la plupart des délinquants ont vécu une histoire horrible de violence. »
     
  • « Il ne semble pas y avoir de services aux victimes pour les personnes âgées … aucun interprète ou soutien affectif …  il existe une violence cachée à l'endroit des personnes âgées et peu d'entre elles ont accès aux services. »
     
  • « Il n'y a pas de système de soutien pour les personnes avec lesquelles nous avons travaillé dans le camp; il n'y a pas d'aide postpénale … les trafiquants d'alcool sont leur système de soutien. »
     
  • « Il n'y a pas assez de services pour le groupe des enfants âgés de zéro à trois ans …  les gens ne veulent pas prendre position au sujet de la victimisation … les enfants dans nos collectivités sont réellement abandonnés; ils ont subi des traumatismes et une perte; ils doivent s'attacher à quelqu'un … la capacité d'établir des relations fondées sur la confiance, le respect et la compassion dans sa vie est mise en péril lorsque les enfants ont été victimes de violence sexuelle et physique et qu'ils ont été abandonnés. »
     
  • « Les gouvernements appuient le financement de projets et ce n'est pas toujours ce dont on a besoin ... il doit y avoir des façons de continuer à faire des choses qui fonctionnent …il y a beaucoup de réticence à accroître les coûts de fonctionnement et de maintien et une foule de bons programmes qui doivent se poursuivre. »
     
  • « Dans les très petites collectivités, il est très difficile de trouver des gens qui acceptent de remplir ces postes affectés à la prestation de services aux victimes en raison de l'isolement du travailleur …la collectivité éprouve des difficultés sans durabilité …les gens qui travaillent dans le domaine des services aux victimes n'y restent pas pour toujours …les gens s'en vont, et c'est difficile pour les clients et la collectivité. »
     

Presque tous les répondants ont indiqué qu'ils travaillaient à pleine capacité et qu'ils ne peuvent pas encore répondre aux besoins qu'ils observent chez la population du Yukon. Certains ont dit qu'ils avaient besoin d'établissements améliorés ou plus grands. D'autres ont souligné qu'ils avaient de la difficulté à maintenir un effectif complet d'employés formés, parfois à cause des taux élevés d'épuisement professionnel et parfois en raison des salaires et des avantages sociaux insuffisants. Plusieurs répondants souhaitaient que leur organisme ou un autre organisme ait la capacité d'offrir plus de services en dehors des heures ouvrables. Plusieurs ont mentionné la nécessité d'avoir un genre de ligne d'écoute téléphonique dans le territoire.

En ce qui concerne le continuum général de services, les répondants croient qu'il y a des lacunes dans les programmes de traitement des hommes victimes de violence, les services aux victimes de violence âgées et les programmes d'intervention rapide pour les enfants à risque élevé. En outre, alors que les répondants ont relevé le niveau relativement élevé et la qualité des services offerts au Yukon, bon nombre estimaient qu'on n'accorde pas encore assez d'attention aux besoins en matière d'aide postpénale des personnes qui ont accès à ces services. Ceux qui travaillent avec les victimes dans les domaines de la toxicomanie et de la violence conjugale ressentaient le plus ces lacunes.

Un certain nombre de répondants croient que beaucoup d'hommes victimes de violence et de voies de fait sont « invisibles » et qu'ils hésitent davantage à discuter de leur passé que les femmes victimes de violence. Les fournisseurs de services qui travaillent dans le domaine de la guérison et du rétablissement ont indiqué que les hommes qui deviennent des délinquants ont souvent été victimes d'actes de violence qui n'ont pas été abordés ou reconnus.

Plusieurs répondants ont soulevé la question de la violence cachée à l'endroit des Aînés. Les répondants ne connaissaient pas la fréquence de ce genre de violence. Ils ont simplement fait état de ce qu'ils avaient entendu dire de la bouche des Aînés et des victimes avec lesquelles ils travaillent. Les répondants ont indiqué que les Aînés sont réticents à divulguer la violence qu'ils subissent parce qu'ils craignent les représailles des membres de leur famille, qui peuvent être les délinquants, et la perte éventuelle des relations familiales.

La plupart des répondants croient que malgré les excellents programmes destinés aux enfants victimes de violence au Yukon, il reste beaucoup à accomplir. En particulier, les répondants estiment qu'il faut beaucoup plus de programmes d'intervention pour les enfants en bas âge et les enfants victimes de violence dans les petites collectivités. De plus, ceux qui travaillent avec les adolescents croient qu'il faut faire beaucoup plus pour renseigner les jeunes sur les questions relatives au viol commis par une connaissance, à la violence conjugale et aux agressions sexuelles. Ils ont également insisté sur la nécessité de renseigner les parents et de les sensibiliser aux besoins des enfants et des adolescents qui passent à l'acte.

Les répondants ont fait remarquer que malgré le niveau relativement élevé du nombre et de la qualité des services au Yukon, il reste encore du travail à accomplir dans le domaine des normes en matière de programmes. Les gens estiment qu'il faut élaborer des normes professionnelles et des compétences de base dans le domaine de la prestation de services aux victimes. L'évaluation de ces services est devenue une priorité permanente, et il faut tenir des statistiques significatives à ce sujet. En outre, les rôles et responsabilités de certains fournisseurs de services doivent être précisés.

Les fournisseurs de services ont fait état d'un certain nombre de difficultés dans le secteur du financement :

  • dans la plupart des organismes, le financement est insuffisant pour permettre à l'organisme de remplir son mandat et de répondre à la forte demande de services du public;
  • le financement des organismes non gouvernementaux est à court terme, ce qui oblige ceux-ci à lutter pour leur survie sur une base annuelle … cela entraîne une instabilité des programmes et un roulement du personnel qui mine la confiance et nuit aux progrès réalisés avec les clients;
  • il faut absolument offrir plus de programmes dans les collectivités excentriques, ce qui est impossible sans un accroissement du financement.

Un nombre considérable de répondants ont indiqué qu'il faut accorder beaucoup plus d'attention à la prestation de services aux victimes dans les petites collectivités du Yukon. Ils ont fait état de la nécessité de défenseurs impartiaux des victimes, de possibilités de guérison des victimes, de services médicaux adéquats et du soutien général des victimes de violence par la collectivité. Comme il est discuté plus haut, l'attitude de la collectivité et les normes sociales concernant la victimisation rendent le soutien des victimes beaucoup plus nécessaire.

Manque d'information

  • « Nous devons profiter davantage des connaissances culturelles de nos Aînés avant qu'ils passent de vie à trépas. »
     
  • « Nous devons commencer à écouter davantage les victimes … nous devons entendre ce qu'elles disent … nous devons être mieux à l'écoute. »
     
  • « Les fournisseurs de services ont besoin d'une formation concernant la trousse de prélèvement dans les cas de viol et la violence conjugale. »
     
  • « C'est tout un défi de garder les fournisseurs au diapason en ce qui concerne leur connaissance de la dynamique de la violence dans les relations et les modes de traitement …certains conseillers voient des couples même lorsqu'il s'agit d'une relation empreinte de violence. »
     
  • « La confidentialité est un concept complexe …la sécurité peut être mise en péril s'il y a une réticence à établir un lien entre les clients et les services … il faut apporter un soutien lorsqu'il y a une explosion et qu'une femme est la plus ouverte au changement et la plus vulnérable. »
     
  • « Quels sont les protocoles en matière de gestion des cas … les politiques de confidentialité peuvent contribuer au manque de coopération entre les organismes et les ministères et de communication de l'information … nous devons toujours penser à ce qui aidera la victime. »
     
  • « J'ai entendu dire que le personnel infirmier appelle parfois la police en cas d'agression sexuelle même si la victime ne veut pas parler aux policiers …cela bouleverse les femmes de sorte que les trousses de prélèvement dans les cas d'agressions sexuelles ne sont pas utilisées et que les femmes ne reçoivent aucune aide. »
     
  • « Les organismes doivent préciser leurs rôles et coordonner leurs activités …nous avons besoin d'un réseau de pairs au niveau de la direction … nous devons partager les ressources (financières et locaux). »
     

D'après les réponses, il semble que les fournisseurs de soins et les fournisseurs de services du Yukon aient contribué avec assiduité à leur propre formation et guérison. Plusieurs répondants ont mentionné que leur personnel avait suivi une formation concernant le syndrome de stress post-traumatique, la toxicomanie, les traumatismes indirects (réactions traumatiques résultant du travail auprès des victimes de violence), les compétences en counseling, la sensibilisation à la toxicomanie, les méthodes de guérison traditionnelles comme les cercles de guérison, le counseling familial et collectif ainsi que la dynamique de la violence familiale et sexuelle et le rétablissement ultérieur.

Toutefois, les répondants ont indiqué qu'il y a encore des domaines où il faut poursuivre le travail. Certains ont dit que les fournisseurs de services n'ont pas une connaissance assez approfondie de la violence conjugale et sexuelle. D'autres estimaient que la pratique consistant à voir les partenaires violents et leurs victimes ensemble, avant que le problème de violence ait été réglé, était contre-indiquée et dangereuse.

Presque tous les répondants ont reconnu la nécessité de maintenir l'équilibre dans leur vie tout en travaillant avec les victimes. Certains ont reconnu qu'ils n'y arrivaient pas toujours et qu'ils demandaient de l'aide eux-mêmes. Cela devient encore plus problématique lorsqu'il y a des liens de parenté entre les fournisseurs de soins et les fournisseurs de services, d'une part, et les victimes et les délinquants d'autre part. Ces facteurs se combinent souvent et entraînent l'épuisement professionnel des travailleurs ainsi qu'un taux de roulement élevé du personnel dans certaines collectivités.

Les répondants estimaient qu'il faut améliorer les compétences en communication et en établissement de relations chez les fournisseurs de services et les fournisseurs de soins. Ils ont recommandé que tous les fournisseurs de services conçoivent des méthodes d'intervention adaptées aux différences culturelles.

La question de la confidentialité des données sur les clients constitue un sous-thème dans le domaine des réseaux de partenariats. Les répondants ont indiqué qu'il y a une confusion et qu'il n'y a aucun protocole ou politique établi qui soit largement accepté au sujet de la question de savoir « qui peut dire quoi à qui ». Ils croient que cette situation a entraîné une diminution des services aux victimes, ce qui a mis un frein à leur rétablissement.

Même si les répondants étaient généralement satisfaits des progrès réalisés dans le domaine de la communication de l'information, de la gestion conjointe des cas et de la coopération entre les organismes, ils estimaient qu'il reste beaucoup de chemin à parcourir pour établir un réseau de partenariats qui répondra mieux aux besoins des victimes. Ils ont relevé la tendance de tous les organismes et ministères à s'isoler les uns des autres. Cela a parfois créé une certaine confusion au sujet des rôles et des responsabilités … et fait rater des occasions de partager les ressources.

Difficulté de travailler avec les victimes de violence

  • « D'un point de vue thérapeutique, la minimisation, le déni et le blâme constituent nos défis. »
     
  • « Cela ferme la porte à beaucoup de nos femmes … elles ne peuvent pas faire face à la victimisation en raison de la violence sexuelle subie par le passé. »
     
  • « Nous avons un grand nombre de personnes souffrant d'une déficience cognitive et de toxicomanes … quelques victimes s'enivrent tout le temps, se font violer au moins une fois par mois … nous n'avons aucun succès avec ces personnes. »
     
  • « Beaucoup de jeunes femmes victimes de violence dans leurs relations qui devraient aller au refuge n'y vont pas … elles veulent rester avec leur partenaire et elles ne veulent pas qu'on leur dise de quitter celui-ci. »
     
  • « Les traumatismes et la victimisation causent des différences neurologiques … une prédisposition semblable au SAF, le profil des symptômes est le même …il s'agit d'un déséquilibre neurochimique … il y a une réticence à discuter de ces questions … les victimes du SAF, d'un traumatisme ou de violence risquent fort d'être antisociales et de commettre des actes de violence à l'endroit d'autres personnes. »
     
  • « Il est difficile de changer les systèmes de croyances pour passer d'une situation de pouvoir et de contrôle à l'égalité dans les relations intimes … il s'agit d'une dynamique qui existe également dans l'ensemble de la collectivité. »
     
  • « Il est très douloureux de faire face à certaines choses … il est difficile pour les victimes de faire face à certains crimes antérieurs … c'est difficile pour les travailleurs s'ils ont des liens de parenté avec des gens de la collectivité. »
     

Les répondants au sondage connaissent bien les problèmes auxquels ils sont confrontés lorsqu'ils tentent d'aider et de soutenir les victimes de violence. Bien des victimes ont beaucoup de problèmes à régler, notamment :

  • toxicomanie, alcoolisme et dépendance à l'égard du jeu;
  • itinérance;
  • chômage, manque d'instruction et pauvreté;
  • traumatismes multiples et(ou) répétitifs;
  • mécanismes de défense bien établis;
  • dommages neurologiques et au cerveau comme le syndrome d'alcoolisation fœtale;
  • gamme étendue de problèmes médicaux;
  • problèmes juridiques;
  • difficultés relationnelles et rôle parental insatisfaisant;
  • comportement antisocial et violent;
  • manque de soutien de la famille et de la collectivité;
  • syndrome de stress post-traumatique.

Tous les répondants ont reconnu qu'un seul organisme ou ministère ne peut pas résoudre tous ces problèmes et ils ont dit que même si les services sont relativement bien établis au Yukon, bien des victimes de violence ne bénéficient pas de quelque genre que ce soit d'intervention utile. Ils ont également reconnu qu'après qu'une victime de violence a commencé à faire appel aux services offerts, il se peut qu'il faille de nombreuses années pour réunir les ressources nécessaires pour faire face à ses problèmes souvent multiples et complexes. Les victimes qui ont subi des dommages au cerveau par suite d'un traumatisme ou du SAF, qui sont parfois handicapées pour la vie, peuvent avoir besoin d'un soutien et de services permanents pendant toute leur vie.

Difficulté de travailler avec le système judiciaire et le système correctionnel

  • « Qu'est-ce qui leur donne le droit de dire qu'il n'y a pas de place pour les victimes … nous ne sommes plus obligés d'être devant le juge ou d'être interrogés par des avocats …nous pouvons raconter notre histoire à un cercle. »
     
  • « Certains éléments de la justice réparatrice sont très dangereux pour les victimes …dans les cercles, le délinquant compte de nombreux défenseurs tandis que la victime est seule pour entendre de merveilleuses choses au sujet du délinquant … les victimes sont réduites au silence par ce processus …il y a un manque d'information; les gens ne comprennent pas le traumatisme et la victimisation. »
     
  • « La déclaration de la victime est un document très personnel, qui est utilisé devant le tribunal … mais il se peut qu'elle ne veuille pas le faire circuler dans le cercle et le faire lire par tous les membres de la collectivité. »
     
  • « Les professionnels de tous les niveaux, y compris les juges, doivent absolument être plus sensibilisés et mieux renseignés au sujet des questions de violence, de pouvoir et de contrôle, du stress post-traumatique, etc. »
     
  • « Le Tribunal pour l'instruction des causes de violence conjugale abuse de la situation …les avocats de la défense ne suivent pas le code de déontologie et ils en profitent … un rapport du Service correctionnel Canada fait état d'une étude selon laquelle beaucoup de délinquants incarcérés soutiennent qu'ils étaient des victimes, que leurs avocats de la défense ont recommandé qu'ils le fassent … ils soupçonnent que dans beaucoup de cas, l'argument de la victimisation est faux … que ce n'est pas le genre de publication à laquelle on s'attendrait du SCC et qu'il vaut la peine de l'examiner … je soupçonne que c'est la vérité. »
     
  • « Nous devons offrir aux représentants de la Couronne et aux policiers une formation sur la violence sexuelle, la violence familiale et le SAF … il arrive parfois que les policiers ne prennent pas les déclarations et qu'on dise aux enfants qu'ils ne sont pas obligés de témoigner … souvent les enfants veulent raconter leur histoire et ils ont besoin de le faire alors que des personnes bien intentionnées ou ignorantes veulent les « protéger » et font plus de mal que de bien … souvent la police n'agit pas dans le cas d'une ordonnance de non-communication ou d'un manquement à celle-ci … ils ne croient pas qu'ils sont sérieux. »
     
  • « Beaucoup de délinquants suivent maintenant des traitements sans être incarcérés …la séparation de la victime et de l'agresseur est primordiale pour favoriser la guérison du traumatisme chez la victime et le délinquant … cette séparation ne se produit pas de sorte que le traumatisme n'est pas traité. » 
     
  • « Les refuges tiennent les clientes trop éloignées des autres ressources … ils protègent les femmes contre les méchantes personnes et les bonnes personnes. »
     

Les répondants ont formulé des observations précises lorsqu'ils ont décrit les défis en matière d'établissement de politiques et les divers systèmes judiciaires du Yukon. Un nombre relativement élevé de fournisseurs de services sondés estimaient qu'il faut résoudre un certain nombre de problèmes graves.

Plusieurs fournisseurs de services estiment que les initiatives en matière de justice alternative et de justice réparatrice, comme les tribunaux de conciliation, le conseil de détermination de la peine et la concertation des familles, n'ont pas toujours traité adéquatement les victimes de crime. Ils ont indiqué que certaines victimes craignent de participer et sont souvent accablées par le soutien manifesté aux délinquants dans ces cercles. Certaines victimes ne veulent pas que leur déclaration de la victime soit lue dans ces cercles, ce qu'on semble avoir fait sans consulter la victime au préalable. De plus, plusieurs victimes ont indiqué qu'elles ne croyaient pas que le groupe les avait appuyées et qu'elles ne ressentaient aucun sentiment de « rétablissement » ou de réconciliation de la part du groupe. Il semblerait que certaines victimes se soient senties complètement réduites au silence après avoir entendu les remarques élogieuses au sujet du délinquant dans ces cercles.

D'autre part, quelques répondants ont dit que ces processus de justice alternative ont assisté dans une grande mesure les victimes dans leur collectivité et qu'ils les ont aidées à se rétablir.

En ce qui concerne le système judiciaire ordinaire, les répondants croient que les procureurs de la Couronne et les juges ont besoin de beaucoup plus de formation sur les questions de victimisation et de traumatisme. En particulier, ils estiment que ce personnel judiciaire n'a pas une connaissance suffisante de la violence conjugale et sexuelle, des questions de pouvoir et de contrôle dans les relations, des traumatismes chroniques, de la violence antérieure et du syndrome d'alcoolisation fœtale.

Quelques répondants estiment qu'il arrive souvent que les avocats de la défense ne respectent pas le code de déontologie dans leur façon de traiter les victimes au cours des procès. Et certains se demandent si les avocats de la défense disent à leurs clients de soutenir qu'ils sont des victimes afin de réduire leur peine ou d'obtenir la sympathie du juge et du public.

Quelques répondants estiment également que la police doit prendre plus au sérieux les ordonnances de non‑communication et les appliquer plus adéquatement, ce qui n'est pas le cas actuellement, d'après eux. Ils ont également indiqué que la police ne traite pas toujours les enfants victimes de façon appropriée; les policiers leur disent qu'ils n'ont pas à raconter leur histoire afin de leur épargner d'autres traumatismes. Les fournisseurs de services qui travaillent avec les enfants victimes ont indiqué que l'enfant peut réellement avoir besoin de raconter son histoire dans le cadre de son propre processus de rétablissement.

Les fournisseurs de services ne s'entendent pas sur ce qui constitue un traitement efficace des victimes et des délinquants dans les cas de violence conjugale et sexuelle. Certains répondants estiment que les délinquants et les victimes doivent être séparés afin de guérir et ils ne croient pas que cela se produit. D'autres répondants se demandent si les refuges pour femmes battues tiennent les femmes trop éloignées des autres services.

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