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Besoins en matière d'aide juridique, de conseillers parajuridiciaires et de services de vulgarisation et d'information juridiques au Yukon : Rapport définitif

Octobre 2002
Focus Consultants

Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles de l'auteur et ne représentent pas nécessairement celles du ministère de la Justice Canada.

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Résumé

Contexte

La présente étude des besoins en matière d'aide juridique, de conseillers parajudiciaires et de services de vulgarisation et d'information juridiques (VIJ) dans le Territoire du Yukon porte sur 10 domaines de recherche définis par des représentants des trois gouvernements territoriaux en juillet 2001. Avec les études parallèles réalisées dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, elle vise à décrire les besoins propres aux territoires du Nord en ce qui concerne la prestation de services d'aide juridique et de services connexes.

Méthodologie

L'étude comporte 53 entrevues avec des intervenants clés offrant des services d'aide juridique, de conseillers parajudiciaires et de VIJ, ainsi qu'avec d'autres répondants de la justice pénale et de personnes dans la collectivité qui ont eu des contacts avec le système d'aide juridique même, directement ou par l'intermédiaire du client. De plus, des données statistiques ont été recueillies auprès du ministère de la Justice du gouvernement du territoire du Yukon (GTY) (en particulier des Services judiciaires), de la Société d'aide juridique du Yukon (YLSS), de la Yukon Public Legal Education Association (YPLEA) et du Bureau des statistiques du Yukon. Un groupe de réflexion s'est réuni en août 2002 afin de réfléchir à l'ordre de priorité, à la justification et aux stratégies en ce qui concerne les besoins définis jusque-là.

Incidences de la structure des tribunaux, de la géographie et de la culture sur l'aide juridique

Voici les principales macro-caractéristiques qui ont une incidence sur les services de l'aide juridique:

  • La population autochtone représente 20 % de la population du territoire mais est majoritaire dans sept des treize localités de l'extérieur de Whitehorse.
  • L'existence d'un seul tribunal siégeant en permanence à Whitehorse, toutes les autres communautés étant servies à des fréquences diverses par des cours de circuit.
  • L'intention d'avoir recours plus souvent aux juges de paix entre les circuits périodiques dans les collectivités éloignées.

Ces caractéristiques font qu'il faut adapter une bonne partie des services d'aide juridique au rythme des cours de circuit, ce qui pourrait amener de plus en plus à prévoir une présence de l'aide juridique dans les cours des juges de paix. En outre, les conseillers parajudiciaires jouent un rôle essentiel pour ce qui est d'établir le lien entre le système judiciaire et les populations des Premières nations.

L'aide juridique est intervenue dans l'immense majorité des affaires pénales portées devant les tribunaux au cours des trois dernières années pour des crimes graves contre la personne ou la propriété. Les statistiques sur les demandes d'aide juridique approuvées en matière pénale reflètent fidèlement les fluctuations dans le nombre total des accusations portées devant les tribunaux pendant la même période.

Le principal changement qui a marqué la prestation des services d'aide juridique au Yukon au cours des trois dernières années a été la consolidation de la structure du personnel, conformément aux recommandations découlant d'un examen opérationnel effectué en mars 2000, à la suite d'une crise qui a fait perdre à la YLSS quatre de ses avocats salariés. Bien que la YLSS ait maintenant retrouvé sa stabilité, elle continue de dépendre du soutien important que lui accorde le gouvernement du Territoire du Yukon (GTY), et qui est passé à 69 % des contributions combinées des gouvernements fédéral et territorial, comparé à 50 % en 1997 1998. En outre, tout en reconnaissant que cette consolidation de la structure du personnel était nécessaire, de nombreux répondants de la profession juridique expriment des doutes quant à la viabilité à terme du recours aux avocats du secteur privé comme ressource d'aide juridique.

Cours de circuit

Les cours de circuit ont pour principal avantage de rapprocher le système judiciaire des localités dont la taille ne justifie pas une cour permanente. Leur principal inconvénient réside dans la rapidité avec laquelle les affaires doivent être traitées, en raison du temps limité que les avocats de l'aide juridique passent dans la communauté et du grand nombre de causes dont ils doivent s'occuper. Les répondants estiment que cette situation leur laisse moins de temps pour préparer leurs dossiers et comprendre la dynamique et les relations communautaires qui influent peut-être sur les causes. D'après eux, les clients ont également moins confiance dans le système judiciaire. Les retards importants ne sont cependant pas courants dans les cours de circuit.

Conseillers parajudiciaires

Le transfert de certains postes de conseillers parajudiciaires du Conseil des Premières nations du Yukon (CPNY) à plusieurs Premières nations dans les années 1990 a permis, d'une part, aux collectivités de mieux contrôler le recrutement et le travail de ces conseillers. D'autre part, d'un point de vue territorial, la vision des rôles et des besoins en matière de formation des conseillers parajudiciaires est moins unifiée que dans la première moitié des années 1990.

Bien que les avocats de la défense et les conseillers parajudiciaires qualifient leurs rapports personnels de positifs, la majorité des membres de la profession juridique disent clairement qu'il faudrait une coordination plus structurée entre le réseau des conseillers parajudiciaires et la YLSS. De l'avis général, des initiatives de formation de ces conseillers seraient le moyen le plus réaliste d'accroître la collaboration. Les répondants proposent diverses stratégies, comme l'adoption de différents niveaux d'accréditation pour les conseillers parajudiciaires, le jumelage de leurs séances de formation avec celles des juges de paix, la participation à des initiatives nationales de formation des conseillers parajudiciaires et l'encadrement individuel de ces conseillers par des avocats de l'aide juridique.

Cour des juges de paix

Les affaires entendues par les juges de paix concernent en grande majorité des infractions aux lois territoriales, une plus faible proportion concernant l'administration de la justice, la conduite avec facultés affaiblies et à d'autres infractions au Code criminel. À Whitehorse, la Cour des juges de paix s'occupe de près de 80 % des affaires soumises aux juges de paix de l'ensemble du territoire, mais il est prévu d'élargir le rôle des cours des juges de paix dans ces localités et, plus tard, dans tout le territoire.

Les avocats de service à la Cour des juges de paix de Whitehorse assiste tous les accusés lors de leur première comparution ou de leurs comparutions ultérieures pour obtenir un ajournement. Ils peuvent également être assignés à la défense de personnes contre qui pèsent des charges plus graves et susceptibles d'être entendues par un juge après leur première comparution.

Ces trois dernières années et demie, de 9 % à 12 % des décisions rendues par les juges de paix incluent des amendes de plus de 100 $, et de 13 % à 14 % prévoient des peines d'emprisonnement. Dans l'état actuel des choses, il est probable que, dans l'immense majorité de ces cas, les accusés ont bénéficié de l'assistance d'un avocat de service ou de conseillers parajudiciaires mais, si les cours des juges de paix sont élargies comme prévu, les avocats de service et les conseillers parajudiciaires seront appelés à répondre à une demande accrue, en particulier si les juges de paix siègent entre les dates de circuits régulières, ce qui les obligera à des déplacements supplémentaires.

Aide juridique en matière civile

L'expansion prioritaire des services de droit de la famille était une des principales recommandations découlant de l'examen opérationnel réalisé de la YLSS réalisé en 2002. La YLSS a donc commencé à financer certaines affaires relevant du droit de la famille jusqu'à l'étape de l'ordonnance définitive. D'après les données de 2001 2002, le taux global de refus de demandes concernant des affaires civiles ou familiales est plus élevé que pour les affaires pénales (18 % contre 2 %). Il semble néanmoins que les services d'aide juridique couvrent de 65 % à 80 % environ des affaires relevant du droit familial entendues à la Cour territoriale et à la Cour suprême.

À l'heure actuelle, seuls un ou deux avocats du secteur privé sont prêts à accepter des dossiers d'aide juridique en matière civile ou familiale, principalement à cause des honoraires peu élevés. L'immense majorité des affaires relevant du droit de la famille sont donc confiées aux avocats salariés. Les répondants reconnaissent qu'il y a eu des progrès dans le financement des affaires familiales, mais ils demandent instamment un financement plus constant jusqu'à l'étape de l'ordonnance définitive. Certains répondants attirent aussi l'attention sur la nécessité de simplifier la facturation, d'inciter davantage à régler les affaires familiales à l'amiable et de couvrir les affaires relevant de la Loi sur la prévention de la violence familiale. Dans les affaires civiles, plusieurs répondants estiment que les intéressés devraient avoir plus facilement accès non seulement à l'information, mais aussi aux conseils sommaires.

Activités avant la première comparution

Les principaux obstacles rencontrés par les répondants lorsqu'ils doivent aider leurs clients avant leur première comparution sont les suivants :

  • Les personnes en détention ont du mal à communiquer avec leur avocat pendant la journée. Il est possible de joindre les avocats de service le soir, mais ils sont généralement à la cour pendant la journée.
  • L'immense majorité des enquêtes concernant la libération provisoire ont lieu à Whitehorse, devant un juge de paix, mais environ 10 % se déroulent par téléphone. Plusieurs répondants estiment que ce système ne permet pas une bonne représentation, et un répondant refuse tout simplement de participer aux enquêtes par téléphone.
  • La divulgation de la preuve par la Couronne tarde souvent, ce qui fait que les avocats de la défense manquent de temps pour consulter leurs clients.

Liens entre affaires civiles et affaires pénales

Invités à commenter les liens entre les affaires civiles et les affaires pénales, les répondants décrivent une situation typique dans laquelle les conflits familiaux entraînent des voies de fait contre des membres de la famille, des enlèvements d'enfants, l'appropriation de biens ou d'autres crimes. Le plus souvent, il y a des enfants en cause dans ces conflits, et l'alcool est également un facteur. D'après les répondants, une approche plus globale serait nécessaire pour briser ce cycle. Des initiatives telles que celle du Tribunal sur les options de traitement en matière de violence familiale et les mécanismes de justice communautaire vont dans le bon sens.

Vulgarisation et information juridiques

La Yukon Public Legal Education Association (YPLEA) est une organisation sans but lucratif qui fournit de l'information juridique à la population afin de l'aider à comprendre le système judiciaire et de rendre ce dernier plus accessible. Le principal service qu'elle offre, et le plus connu, est la ligne d'information juridique sans frais à la disposition de tous les habitants du Yukon. Au cours des trois dernières années, 38 % des appels reçus concernaient des affaires familiales et 44 %, des affaires civiles.

Parmi les répondants, hormis la YPLEA, les membres de la profession juridique (avocats de la défense, avocats de la Couronne et juges) fournissent eux aussi des services de vulgarisation et d'information juridiques (VIJ), en mettant l'accent sur le droit matériel et la procédure. Les agents de la GRC insistent plus sur la prévention, tandis que d'autres services de VIJ suivent une approche plus diversifiée et plus globale, qui inclut à la fois les questions juridiques et sociales.

En matière de VIJ, les répondants estiment que les principaux besoins en ce qui concerne le droit matériel touchent au droit de la famille, bien que certaines questions relevant du droit civil, comme les normes d'emploi et les rapports entre propriétaires et locataires soient également mentionnées. Les besoins d'information relativement à la procédure portent notamment sur la démarche à entreprendre pour bénéficier de l'aide juridique et sur le fonctionnement des tribunaux. Nombre de répondants insistent sur le fait que la YPLEA devrait déménager dans un endroit plus central du centre-ville de Whitehorse, et ils recommandent aussi qu'elle soit plus en contact avec les localités éloignées et/ou les organisations intermédiaires. L'ajout d'une fonction de conseils sommaires afin d'élargir l'assistance offerte aux clients est aussi un sujet de préoccupation. Il nécessiterait de faire modifier le mandat de la YPLEA.

Éléments de coût

Les répondants citent notamment les éléments suivants comme facteurs influant sur le coût des services d'aide juridique :

  • Obligation de servir les localités éloignées par circuits.
    • Les dépenses relatives aux circuits représentent de 5 % à 10 % du budget de l'aide juridique, et une proportion à peu près équivalente des budgets de certains conseillers parajudiciaires. À part la ligne d'information juridique, la YPLEA n'a pas réussi à établir des contacts directs avec les collectivités.
  • Importante main-d'œuvre saisonnière et plus forte proportion de chômeurs que dans les provinces du Sud.
  • Pourcentages plus élevés, par habitant, de crimes signalés et de crimes avec violence que dans les provinces du Sud.
  • Indicateurs de consommation d'alcool plus élevés que dans les provinces du Sud.
  • Taux de divorce le plus élevé du Canada.
  • Syndrome des pensionnats et fort pourcentage de cas relevant de la protection de l'enfance.
  • Nécessité de verser des salaires concurrentiels avec ceux qu'offrent des employeurs comparables, par exemple, le ministère de la Justice fédéral ou le gouvernement territorial, pour ne pas continuer à perdre du personnel, comme avant 2000.
  • Les justiciables non représentés au civil prennent du temps aux tribunaux, ce qui influe sur certains dossiers d'aide juridique.

Lois et politiques fédérales et territoriales

Parmi les lois et politiques fédérales et territoriales, les suivantes semblent faire augmenter nettement le coût de l'aide juridique au Yukon :

  • Ressources fédérales accrues pour les avocats de la Couronne, ce qui impose aux avocats de l'aide juridique des pressions directes, puisqu'ils doivent préparer une défense comparable.
  • Volonté d'appliquer des solutions de rechange aux peines traditionnelles, en particulier pour les contrevenants autochtones (p. ex., arrêt Gladue, exigences prévues à l'alinéa 718.2e du Code criminel). L'examen de toutes les peines possibles en dehors de l'emprisonnement peut obliger la défense à consacrer plus de temps à la préparation de la cause et à la détermination de la peine.
  • Politiques de mise en accusation et de poursuites obligatoires en cas de violence conjugale, ce qui fait augmenter les dépenses liées à l'aide juridique.
  • Interventions policières excessives.
  • À cause de la procédure suivie pour la répartition des affaires et le traitement des dossiers du côté de la Couronne, les avocats de la défense n'ont pas assez de temps pour examiner les preuves déposées et discuter avec leurs clients, d'où la nécessité d'ajournements.

Conclusions

L'étude a fait ressortir des besoins sur les trois plans suivants :

  • Besoins structurels
    La YLSS a atteint une certaine stabilité organisationnelle, ce qui lui a permis de garder son personnel depuis l'examen opérationnel de 2000, mais pour cela, le GTY a dû augmenter sensiblement son financement. Le rééquilibrage des contributions fédérales et territoriales semble un point de départ essentiel pour les négociations futures concernant l'Entente sur l'accès à la justice. Il est également crucial que la YLSS établisse une certaine parité avec le personnel et les ressources fournis par le ministère de la Justice fédéral pour les besoins de la poursuite, ce qui a des répercussions directes sur les besoins en matière de ressources d'aide juridique.
     
  • Besoins propres aux Autochtones
    Plusieurs thèmes liés directement ou indirectement aux besoins des clients des Premières nations influent sur les accords de financement futurs, notamment la nécessité de mieux former les conseillers parajudiciaires, de fournir de l'aide juridique (avocats de service) et/ou des services de conseillers parajudiciaires si la Cour des juges de paix élargit ses activités dans les localités éloignées, et de prévoir plus de temps et plus de soutien, surtout sur les circuits, pour servir les clients des Premières nations.
     
  • Besoins sexospécifiques
    Dans la mesure où la majorité des affaires pénales prises en charge par l'aide juridique concerne des hommes, tandis que dans la majorité des affaires familiales, les clientes de l'aide juridique sont des femmes, l'importance accordée aux besoins relatifs à l'aide juridique en matière familiale peut être considérée comme sexospécifique. Tout en reconnaissant que la YLSS a amélioré ses services au cours de la dernière année et que la YPLEA joue un rôle important pour ce qui est de répondre aux besoins d'information dans les dossiers relevant du droit de la famille, les répondants mentionnent plusieurs domaines dans lesquels il serait possible d'augmenter considérablement l'assistance accordée. Dans tous les cas, les améliorations proposées ont des incidences financières.

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