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OPINIONS DU PUBLIC AU SUJET DE LA LOI ANTITERRORISTE
(ANCIENNEMENT PROJET DE LOI C-36)

21 mars 2004

  1. 3. ANALYSE DÉTAILLÉE
    1. 3.5 Conclusion
      1. 3.5.1 Influences possibles sur les attitudes des participants
      2. 3.5.2 Mot de la fin

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3.5 Conclusion

Comme dans toute recherche effectuée auprès de la population, les opinions colligées auprès des groupes de discussion sont des " impressions prises sur le vif " qui peuvent avoir été influencées positivement ou négativement par divers facteurs. C'est pourquoi il est important de cerner ces influences pour mettre les résultats en perspective et en contexte.

3.5.1 Influences possibles sur les attitudes des participants

Sept facteurs ont pu jouer un rôle dans les réactions des répondants à l'égard de la Loi et de ses dispositions. Les quatre premiers facteurs, d'ordre conjoncturel, sont les suivants : 1) le moment des séances, 2) le niveau d'instruction et la profession des participants, 3) l'origine ethnique des participants, 4) les habitudes des participants relativement aux médias.

Les trois autres facteurs sont liés aux attitudes et pourraient découler des quatre premiers ainsi que de l'expérience personnelle des participants. Ils concernent : 5) le rôle du Canada dans le monde, 6) le rôle des États-Unis dans le monde, 7) l'importance accordée à la présomption d'innocence et à la Charte canadienne des droits et libertés.

Moment des séances

Les rencontres se sont déroulées sur un mois, du 2 février au 5 mars 2004. Le calendrier initial a été prolongé d'une semaine en raison d'une tempête de neige à Halifax. À cette époque, la guerre en Irak était à l'arrière-plan dans l'actualité, ayant cédé la place au SRAS, au virus du Nil occidental et à la maladie de la vache folle. Les médias parlaient encore de " terrorisme ", mais il est possible que les participaient étaient devenus plutôt " indifférents " aux nouvelles faisant état quotidiennement d'incidents de cet ordre au Moyen-Orient.

Il y a eu toutefois, pendant la deuxième semaine de février, une nouvelle selon laquelle Ottawa pourrait constituer une cible pour les terroristes; cette nouvelle a d'ailleurs été mentionnée par certains participants aux rencontres de cette semaine-là (Montréal, Calgary, Regina, Vancouver). Par ailleurs, les incidents concernant Juliet O'Neill (la journaliste du Ottawa Citizen) et l'affaire Maher Arar étaient encore frais à la mémoire de nombre de participants.

Dans l'ensemble, les participants respectaient le fait que le Canada ait décidé de ne pas prendre part à la guerre contre l'Irak et ait adhérer à la position des Nations Unies plutôt qu'à celle des États-Unis et de la " coalition des bonnes volontés ".

Niveau d'instruction et profession

Comme nous l'avons indiqué dans l'introduction du présent rapport, les groupes de discussion étaient composés de personnes de milieux très différents, dont des étudiants, des travailleurs manuels ou intellectuels, des enseignants, des préposés, des programmeurs, des vendeurs, des personnes au foyer et même un professeur d'université à la retraite spécialisé en droit pénal. En raison de cette diversité, on observait des degrés variables de connaissance du Code criminel et de la loi en général, ainsi que divers degrés de préoccupation au sujet des dispositions présentées.

Origine ethnique

Si nombre de participants étaient de race blanche, les groupes de discussion comprenaient aussi plusieurs membres de minorités visibles. Ces derniers craignaient généralement plus que les autres les abus policiers. Comme un des participants l'a déclaré : " Ils l'ont déjà fait, alors qu'est-ce qui va les empêcher maintenant? " Néanmoins, les participants de ces groupes se disaient en général d'accord avec la Loi et ses dispositions.

Habitudes des participants relativement aux médias

Comme nous l'avons également indiqué au début du rapport, la plupart des participants se tenaient au courant de l'actualité. Si un petit nombre de participants seulement a déclaré ne pas prêter attention aux actualités, la plupart les regardaient régulièrement à la télévision et lisaient un quotidien, ne serait-ce qu'occasionnellement.

Rôle du Canada dans le monde

Les participants de tous les groupes se sont dits fiers d'être Canadiens. Partout, le Canada est décrit comme une nation pacifique, et on apprécie profondément le fait que le Canada n'ait pas participé à la guerre en Irak. Certains craignaient que si le nouveau gouvernement dirigé par Paul Martin se rapprochait politiquement des États-Unis, la réputation du Canada comme pays du maintien de la paix pourrait être menacée et le Canada pourrait devenir une cible potentielle d'attentats terroristes.

Généralement, les participants avaient le sentiment que le Canada agit en toute équité avec les gens qui contreviennent à la loi.

Certains participants croyaient en outre que sa réputation de pays pacifique pouvait aussi donner au Canada une image " bonasse " ou laxiste en ce qui a trait aux lois et à leur application. Certains craignaient d'ailleurs que la Loi antiterroriste ne soit pas appliquée pleinement et efficacement.

Rôle des États-Unis dans le monde

Durant les discussions, les interventions portant sur les États-Unis étaient généralement négatives; on décrivait les États-Unis comme un pays assez agressif, " qui n'en fait qu'à sa tête " et qui pratique l'" intimidation ". Les participants ont fait valoir que ce point de vue reposait en grande partie sur les événements liés à la guerre en Irak. À la lumière des attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis sont perçus comme la cible numéro un des terroristes.

Les participants croyaient aussi que les médias américains diffusent des informations biaisées et ont tendance à présenter la plupart de leurs reportages sous un angle " pro-Américain ". En général, les participants estimaient que les États-Unis exercent une certaine influence sur le Canada, et beaucoup redoutaient de voir le Canada imiter de trop près les orientations des États-Unis.

Appréciation du système de justice équitable du Canada

Les participants de tous les groupes, en général, se disaient fiers du système judiciaire du Canada, dont ils apprécient le caractère équitable. Ils ont précisé que cette fierté provenait du fait que notre système judiciaire repose fondamentalement sur la présomption d'innocence.

Durant les rencontres, cependant, en explorant plus à fond les dispositions de la Loi, les participants se sont demandé, non sans inquiétude, si certaines de ces dispositions ne contrevenaient pas à ce principe fondamental. En général, ils étaient inquiets de constater que la Loi donnait à la personne accusée de terrorisme ou étiquetée de terroriste la responsabilité de prouver son innocence. Cette inquiétude s'appliquait aux dispositions suivantes :

  • La disposition portant sur l'établissement d'une liste, qui autorise l'inscription d'une personne ou d'un organisme sur la liste avant que cette personne ou cet organisme puisse exercer un recours quelconque;
  • La disposition portant sur le financement, selon laquelle il incombe aux accusés dont les avoirs ont déjà été bloqués de prouver leur innocence;
  • Jusqu'à un certain point, les nouveaux pouvoirs conférés à la police, selon lesquels on peut arrêter une personne sans mandat et sans détenir des preuves solides contre elle.
Il importe de souligner que, tout comme dans la première étude, si les participants appréciaient le fait qu'il existe des recours, ils demeuraient vivement préoccupés par le fait que, malgré ces recours, certaines mesures prises en vertu de la Loi pouvaient détruire la vie de personnes innocentes.

3.5.2 Mot de la fin

En somme, si la Loi antiterroriste et l'ensemble de ses dispositions obtiennent l'approbation générale et sont acceptées pour l'essentiel, certaines préoccupations ressortent des discussions.

  • En réponse au bref résumé de la Loi antiterroriste, les participants ont réagi favorablement en général au fait que le Canada a adopté cette loi; ils estiment qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction. Cependant, beaucoup croient que la Loi est trop vaste ou trop vague et qu'elle utilise des termes qu'ils connaissent mal. D'après eux, ces termes pourraient être mal interprétés.
  • Dans l'ensemble, les réactions à la définition de la notion d'activité terroriste sont favorables. Le caractère vaste de cette définition et le fait qu'une personne ou un groupe doit remplir tous les critères contribuent à l'attrait exercé par la définition. Cependant, les participants se sont demandé si cette définition avait des failles et ont constaté qu'elle pouvait être mal interprétée, qu'en vertu de celle-ci, des manifestations et certains autres actes légitimes pourraient être considérés comme des actes terroristes.
  • Si les participants ont jugé que la disposition portant sur l'établissement d'une liste des entités terroristes constituait un mal nécessaire ainsi qu'un outil efficace pour repérer les groupes ou les personnes terroristes, ils avaient également le sentiment que cette disposition ébranlait un des fondements de notre système de justice. De leur point de vue, cette clause remplaçait la présomption d'innocence par une " présomption de culpabilité ", car elle autorise l'inscription d'une personne sur la liste des terroristes avant que cette personne ne puisse exercer un recours quelconque.
  • La disposition portant sur le financement du terrorisme était vue d'un oeil favorable. Beaucoup ont estimé qu'il s'agissait d'un outil efficace pour neutraliser les terroristes. Malgré cette acceptation, les participants estimaient ici aussi que cette clause renversait la présomption d'innocence. L'obligation de dénoncer a également suscité un malaise. De plus, beaucoup de participants considéraient que la peine maximale de 10 ans était trop clémente et devait être augmentée, car le terrorisme est un acte grave.
  • Les nouveaux pouvoirs d'enquête et d'arrestation à titre préventif étaient généralement acceptés, malgré des inquiétudes concernant les risques d'abus pas la police et de ciblage des minorités visibles. Les réactions à l'écoute électronique étaient également favorables; cependant, certaines personnes considéraient cette pratique comme désuète compte tenu de la prolifération des ordinateurs dans notre société, et certains jugeaient que, dans l'ensemble, cette disposition enfreint fondamentalement les droits et libertés civils.
  • Globalement, on approuve les protections prévues dans la Loi. La mesure de temporisation était considérée comme un outil efficace pour éviter les abus potentiels de la part de la police relativement aux nouveaux pouvoirs que la Loi lui confère. Quelques participants de chaque groupe, ayant mal compris la clause, croyaient que la Loi allait s'éteindre d'elle-même après cinq ans. L'obligation de faire rapport au Parlement a remporté une grande approbation, car les participants estimaient que cette mesure favoriserait la surveillance de l'utilisation des nouveaux pouvoirs par la police et constituerait une protection efficace contre les abus. Quelques participants estimaient cependant que l'obligation de faire rapport devrait être plus fréquente qu'une fois par année.
En conclusion, les participants estimaient que les risques associés à l'adoption de la Loi antiterroriste et à l'attribution de ces nouveaux pouvoirs à la police étaient acceptables pour le bien commun. Après avoir été informés de la teneur de la Loi plus en détail, la majorité des participants ont déclaré se sentir " à peu près comme avant ". Cette stabilité semble due au fait que même si le terrorisme est une réalité grave, il ne touche pas les participants dans leur vie quotidienne. La Loi n'avait eu aucune incidence sur la vie quotidienne des participants, sauf en ce qui concerne l'augmentation du temps d'attente aux frontières ainsi que dans les files d'attente aux comptoirs de billets et aux postes de contrôle de sécurité dans les aéroports. Néanmoins, on juge globalement que c'est " une bonne chose " que d'avoir cette loi.

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