Minist?re de la Justice Canada / Department of Justice CanadaGouvernement du Canada
Éviter le premier menu Éviter tous les menus
   
English Contactez-nous Aide Recherche Site du Canada
Accueil Justice Plan du site Programmes et initiatives Divulgation proactive Lois
 Salle de nouvellesSalle de nouvellesSalle de nouvelles
Communiqués
Fiches d'information
Personnes-ressources
Discours
Liens utiles
Recherche
Archives Page d'accueil

Allocution du ministre de la Justice et procureur général du Canada
Vic Toews, c.r.

Association des magistrats et des juges du Commonwealth
Toronto ( Ontario)
le 10 septembre 2006

L’allocution prononcée fait foi.

M. le Président, membres distingués du Conseil, mesdames et messieurs.

Au nom du gouvernement du Canada, je tiens à vous souhaiter la plus cordiale bienvenue dans notre pays et, en particulier, dans la belle ville de Toronto. Toronto est dynamique, cosmopolite, et j’espère que vous aurez l’occasion, durant votre séjour, de goûter à tout ce qu’elle peut vous offrir.

Je voudrais également remercier Lord Hope pour son aimable présentation. Je ne suis pas certain de reconnaître l’homme qu’il vient de décrire, mais j’aimerais bien le rencontrer un de ces jours.

C’est pour moi un honneur que de m’adresser à un auditoire aussi distingué, et je remercie les organisateurs de ce congrès de m’avoir offert une telle occasion.

Ce soir, je voudrais aborder pendant quelques instants l’importance de la primauté du droit. Le Canada est connu comme un pays stable, paisible et prospère, et il doit en particulier cette réputation à son respect de la primauté du droit.

Selon notre Cour suprême, la primauté du droit comporte trois éléments.

Premièrement, chaque citoyen est assujetti à la loi—les hauts fonctionnaires, les législateurs, les juges, les entreprises et les particuliers.

Deuxièmement, l’exercice d’un pouvoir public doit dériver d’une règle légale—autrement dit, les rapports entre l’État et le particulier doivent être régis par la loi.

Troisièmement, il faut disposer d’un ensemble de lois qui existent vraiment pour ordonner les relations sociales.

Si l’on demandait aux gens de définir la « primauté du droit », ils répondraient sans aucun doute par une paraphrase des deux premiers éléments—le principe selon lequel tous sont soumis à la loi et que toute mesure prise par l’État doit respecter la loi.

Mais qu’en est-il du troisième élément? Il va sans dire que la primauté du droit repose sur l’existence d’un ensemble de lois.

En fait, l’existence même d’un ensemble concret de lois est devenu un véritable enjeu il n’y a pas si longtemps. Dans une décision de 1985, notre Cour suprême a conclu que le gouvernement de la province du Manitoba—ma propre province, d’ailleurs—était constitutionnellement tenue d’édicter ses lois à la fois en anglais et en français.

Le problème était que la Province avait édicté toutes ses lois en anglais seulement depuis 1890. La Cour a donc conclu que la plupart des lois du Manitoba — de prime abord du moins—étaient inopérantes et sans effet.

Inutile de dire que nous nous trouvions devant un dilemme. Imaginez ce que peut faire l’abrogation de presque toutes les lois d’une juridiction donnée. Les municipalités, les commissions scolaires, les tribunaux administratifs, la plus grande partie du gouvernement, les organismes professionnels centraux—et même les tribunaux—disparaîtraient ou verraient leurs pouvoirs fortement réduits. Les entreprises, l’environnement, l’énergie et les transports ne seraient plus ou que peu réglementés. Et parce que l’automobile n’existait pas en 1890, la réglementation de la circulation routière—du moins telle que nous la connaissons—disparaîtrait.

La Cour faisait face à un conflit des principes de la « primauté du droit ». D’une part, la Cour concluait que la législature avait agi contrairement à la loi et que par conséquent les lois qu’elle avait adoptées ne pouvaient pas être valides. D’autre part, l’application stricte de ce principe entraînerait un énorme vide juridique et créerait une véritable anarchie dans la province.

Au bout du compte, la Cour a décidé de suspendre son jugement pendant une certaine période afin que les lois du Manitoba puissent être traduites correctement.

Je ne mentionne pas cette affaire simplement par ce qu’il s’agit d’un fait intrigant de l’histoire constitutionnelle du Canada, mais parce qu’elle souligne un point que je voudrais soulever en ce qui a trait à la primauté du droit.

Dans son sens large, la primauté du droit ne vise pas seulement ce que j’appellerais la notion qu’un avocat peut en avoir—c’est-à-dire que les tribunaux restreignent le pouvoir arbitraire de l’État. Elle vise plutôt la construction d’une société stable, prospère et paisible grâce à la promulgation d’un train de lois concrètes.

Dans une démocratie, les législatures représentatives sont chargées généralement d’établir un ordre juridique qui reflète et promeut les valeurs de ses citoyens.

Cela mène à mon prochain point—sur le rôle que joue la primauté du droit dans la promotion de la démocratie et du processus démocratique. La primauté du droit renforce la démocratie en mettant en relief la prépondérance des lois édictées de façon valide par la branche législative du gouvernement. Puisque les démocraties sont régies par la loi plutôt que par l’exercice d’un pouvoir arbitraire, elle légitime les institutions démocratiques qui rédigent les lois et, par extension, le processus démocratique.

Bien entendu, les tribunaux et les juges jouent un rôle crucial dans le maintien de la primauté du droit. Inutile de dire que celle-ci nécessite un appareil judiciaire solide et indépendant. Un appareil judiciaire efficace empêche à la fois l’État et le privé d’agir de façon arbitraire. Il est ainsi possible de promouvoir la stabilité sociale, le progrès et la prospérité. Une magistrature indépendante est nécessaire pour énoncer des jugements définitifs sur l’interprétation de la loi et sur la façon d’appliquer celle-ci dans des différends particuliers.

Par ailleurs, en vertu de la primauté du droit, les juges mêmes sont assujettis à la loi. Ce principe va au-delà de leur vie personnelle et de leur conduite professionnelle, et couvre leur prise de décision lorsque les juges sont appelés à appliquer des lois qui sont dûment adoptées par les législatures—dans la mesure où leur constitutionnalité n’est pas mise en doute.

Tel est le cas, même si le juge n’est pas d’accord avec la loi en question ou avec le résultat que dicte l’application de la loi.

Le maintien de la primauté du droit ne relève pas de la prérogative exclusive de la magistrature ou de l’exécutif ou du législatif. Il relève des trois branches du gouvernement en interdépendance, voire collectivement.

Cette tâche exige un très haut degré de respect mutuel entre les trois branches du gouvernement. Ensemble, les trois branches sont chargées de promouvoir la compréhension et le respect de leurs divers rôles aux multiples aspects en ce qui a trait à la préservation et à la promotion de la primauté du droit.

Mais la préservation de la primauté du droit dépend d’autre chose que du respect entre les branches du gouvernement—elle dépend également du respect que leur portent les citoyens.

Au bout du compte, la primauté du droit ne peut réussir que dans une société où le fonctionnement des institutions juridiques et législatives a la confiance de la population. Donc, pour maintenir cette confiance, toutes les branches du gouvernement doivent s’efforcer d’être pertinentes et sensibles aux exigences et aux aspirations du public que nous servons.

Il arrive également qu’il nous faille regarder au-delà de la population que nous servons. Des organisations comme l’Association des magistrats et des juges du Commonwealth nous rappellent que la préservation et le maintien de la primauté du droit sont une nécessité à l’échelle du monde et non seulement dans les limites de nos propres États.

Je sais fort bien qu’au Canada, la magistrature a relevé ce défi de différentes façons. Plus directement, un certain nombre de juges canadiens se sont engagés dans des projets internationaux pour promouvoir la primauté du droit dans des nouvelles démocraties, notamment dans les projets offerts par l’entremise de la section canadienne de la Commission internationale de juristes.

Les juges canadiens apportent leur expérience de la façon dont la primauté du droit favorise la stabilité et la prospérité dans notre propre société, et ils se sont servi de cette expérience pour aider les nouvelles démocraties à aller de l’avant.

Or, il est important de reconnaître que de tels efforts ne constituent pas seulement des occasions d’enseigner. Ce sont également des occasions d’apprendre. Lorsque des juges canadiens prennent part à des projets internationaux, ils transmettent leur sagesse, mais ils profitent également de la sagesse des autres. Ils constatent comment fonctionnent des systèmes de justice dans des contextes géographiques et culturels entièrement différents et incorporent ces expériences dans leurs propre vie professionnelle.

Je peux parler ici de ma propre expérience à cet égard, puisque j’ai beaucoup voyagé dans d’autres pays. Je peux donc affirmer que la promotion de la primauté du droit dans le monde entier est cruciale pour la stabilité et la prospérité de toutes les nations.

Je vous remercie tous vivement et vous souhaite plein succès dans vos discussions et délibérations de cette semaine.

- 30 -

 

 

Haut de la page Avis importants