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Le point sur une décennie au service du Parlement
(Le Rapport de fin de mandat du vérificateur général)

Le 27 février 2001

L. Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada

Je vous remercie, Monsieur le Président. Je suis heureux et honoré que le Comité m'ait demandé de comparaître pour discuter de mon dernier rapport, Le point sur une décennie au service du Parlement.

L'idée de ce rapport a commencé à germer lorsque plusieurs personnes, dont des députés et mon propre groupe de conseillers principaux, m'ont demandé si j'avais l'intention de préparer un rapport de fin de mandat. Aucun vérificateur général ne l'avait fait auparavant, et j'y ai beaucoup réfléchi. La plupart des parlementaires et des hauts fonctionnaires à qui j'en ai parlé m'ont encouragé à le faire. Finalement, j'ai décidé de réfléchir sur les travaux réalisés par le Bureau au cours de la dernière décennie et de résumer mes pensées et nos constatations. J'espère en toute sincérité que le Rapport constitue un sommaire utile des principaux messages livrés par le Bureau, qui autrement, devraient être extraits de plusieurs centaines de rapports de vérification.

Le Rapport porte sur cinq principaux thèmes : améliorer les finances du pays, changer les rouages du gouvernement, protéger l'environnement, améliorer la prestation des services aux Canadiens et améliorer la vérification législative. Je parlerai brièvement de chacun de ces thèmes.

Améliorer des finances publiques

Au début de la décennie, le Canada était aux prises avec une crise de la dette et du déficit. À la fin de la décennie, la situation s'était améliorée de façon significative. Néanmoins, on aurait tort de se reposer sur ses lauriers. Il faut tirer les bonnes leçons des problèmes que nous avons dû surmonter.

Depuis le début de mon mandat, j'ai soutenu que le Parlement et les Canadiens devaient être tenus mieux informés de la situation financière globale du pays pour qu'un débat public significatif sur les questions liées à la dette et au déficit puisse avoir lieu. Et le gouvernement a amélioré l'information qu'il communique : le Rapport financier annuel, la Stratégie de gestion de la dette, le Rapport sur la gestion de la dette et La mise à jour économique et financière représentent tous des progrès.

Mais il est possible de faire mieux. Le gouvernement devrait revoir son système budgétaire et plus particulièrement le facteur de prudence qu'il y intègre. Ce système crée de gros excédents juste avant la fin de l'exercice qu'il est tentant de dépenser. Nous avons également besoin de prévisions à plus long terme qui montrent les conséquences des diverses politiques de dépenses plusieurs décennies à l'avance, de sorte que les Canadiens puissent juger si le gouvernement va dans la bonne direction. Plusieurs pays le font déjà, mais le Canada continue de publier des objectifs uniquement sur un horizon de cinq ans.

Il faut également examiner constamment les dépenses pour supprimer les programmes non performants ou moins importants. Le gouvernement a assez bien réussi à le faire au moyen de l'Examen des programmes, mais ce n'était qu'un examen ponctuel. Sans ce genre de discipline, l'inertie fera que les dépenses recommenceront à croître de façon chaotique.

Enfin, il faut veiller à préserver la partie revenu de l'équation. D'énormes défis demeurent, comme l'imposition des activités internationales des contribuables canadiens et l'économie souterraine. Le Parlement a un rôle essentiel à jouer en veillant à assurer l'équité de la législation fiscale, la conformité de la politique fiscale aux objectifs du gouvernement et l'application efficace des politiques.

Améliorer les rouages du gouvernement

Les vérificateurs consacrent beaucoup de temps à réfléchir sur les rouages du gouvernement. Ces questions semblent parfois éloignées des intérêts des Canadiens et n'avoir d'importance que pour ceux qui travaillent au sein du gouvernement. Mais le fait est que si la structure du gouvernement n'est pas appropriée, la probabilité que les Canadiens bénéficient des programmes qu'ils veulent à un juste prix est beaucoup moins grande.

Je crois que le Parlement doit se pencher en priorité sur trois secteurs : la gestion des ressources humaines, les nouveaux mécanismes de prestation des services aux Canadiens et la responsabilité de gestion.

La gestion des ressources humaines

La gestion des ressources humaines est au cœur de chaque activité gouvernementale. La prestation des programmes fédéraux est entièrement tributaire de la fonction publique. Au début des années 1990, la fonction publique fédérale ne fonctionnait pas bien et des efforts de renouvellement et de réforme ont été menés continuellement depuis. Fonction publique 2000, un projet de renouveau mis en marche au début de la décennie, visait à soumettre la fonction publique à moins de règles et à l'axer davantage sur le service. Un autre projet appelé La Relève visait à réduire le malaise qui régnait dans la fonction publique et à faire face à la pénurie prévue de cadres supérieurs. Aucune de ces grandes initiatives n'a répondu entièrement aux attentes. Elles ont été freinées par le trop grand nombre d'intervenants qui s'efforçaient de gérer la fonction publique et par le manque d'intérêt pour les problèmes internes au niveau politique.

Si l'on ne prend pas dès maintenant des mesures efficaces, les choses ne pourront qu'empirer. Le gouvernement fédéral a de la difficulté à attirer et à retenir les travailleurs du savoir et les données démographiques sur la fonction publique montrent qu'il fera face à une diminution massive de personnel expérimenté de niveau supérieur au cours des cinq à dix prochaines années.

Cette situation me décourage. La fonction publique ne semble pas être en mesure de se changer d'elle-même. Des mesures radicales s'imposent maintenant plus que jamais. Le gouvernement devrait envisager de procéder à un examen indépendant visant à modifier la structure législative de la gestion des ressources humaines pour lever les obstacles. Parallèlement, il pourrait prendre en considération les modèles mis en place par d'autres administrations, lesquels sont moins centralisés ou uniformes que le modèle canadien.

C'est un problème qu'on ne doit pas – et qu'on ne peut pas – laisser traîner beaucoup plus longtemps.

Les nouveaux mécanismes de prestation des services

Au cours des années 1990, le gouvernement a fait l'essai de nouveaux moyens d'assurer la prestation de services – pour s'efforcer de réduire les coûts et d'améliorer la qualité et le niveau des services. En 1999, nous avons constaté que le gouvernement avait mis en place plus de 77 mécanismes de collaboration et mécanismes de régie déléguée avec d'autres ordres de gouvernement ou avec le secteur privé et des organismes à but non lucratif, qui coûtent aux contribuables environ cinq milliards de dollars par année.

Certains de ces mécanismes ne sont pas assortis de structures redditionnelles adéquates comme l'obligation de soumettre des rapports annuels appropriés. Il est arrivé que le gouvernement n'ait pas fait preuve de diligence pour déterminer si ses partenaires pouvaient assumer les responsabilités prévues par le mécanisme. Souvent, on ne communique que peu d'information au Parlement sur le rendement du mécanisme. L'information sur les mesures et les données de référence sont inexistantes.

Les contrats ont constitué aussi un nouveau moyen d'assurer les services. Le gouvernement a fait un bon travail dans certains cas, notamment dans celui du pont devant raccorder en permanence le continent à l'Île-du-Prince-Édouard. Dans d'autres cas, comme celui de la privatisation de NAV CANADA et du Programme d'entraînement en vol de l'OTAN, le gouvernement n'a pas suivi les principes fondamentaux d'une bonne gestion, c'est-à-dire l'évaluation des coûts et des avantages des contrats.

Dans l'ensemble, deux améliorations importantes s'imposent : il faut accroître la transparence et améliorer la responsabilité et, si le gouvernement veut continuer à utiliser les nouveaux mécanismes de prestation des services, il doit apprendre à négocier ses contrats dans une optique plus commerciale.

Rendre le gouvernement responsable

Le Canada possède un système de responsabilité politique solide, mais la responsabilité de gestion dans l'administration fédérale est répartie entre un plus grand nombre de personnes. Les deux piliers de la responsabilité de gestion – la gestion financière et la gestion des résultats (ou du rendement) – sont faibles. La gestion financière s'améliore lentement, mais la gestion des résultats semble être engagée dans une phase de planification perpétuelle où les gestionnaires sont en quête de mesures parfaites.

Le principal obstacle n'est pas seulement d'ordre technique. Le fait de communiquer de l'information sur le rendement qui soit franche et équilibrée semble comporter trop de risques : cela s'applique autant aux ministres qu'aux fonctionnaires. En bref, la culture au gouvernement veut qu'il soit plus sûr de communiquer de l'information médiocre.

Pour résoudre ce problème, le Parlement pourrait devoir légiférer afin d'obliger les ministères à lui communiquer de l'information sur le rendement. Il faudrait peut-être établir une distinction plus claire entre la responsabilité politique et la responsabilité bureaucratique. Il faudrait probablement lier plus étroitement la rémunération des hauts fonctionnaires aux résultats financiers et au rendement.

La gestion financière

Une bonne gestion financière est une composante essentielle de l'optimisation des ressources. Il faut contrôler les fonds publics et savoir combien les choses coûtent. Jusqu'à tout récemment, les sous-ministres ne se préoccupaient pas trop de la gestion financière – ils considéraient cette fonction comme une fonction administrative secondaire. Tout ce qu'ils voulaient savoir, c'était s'il y avait encore de l'argent dans la caisse et si aucune loi ou règlement n'avaient été transgressés. La directive première était de tout dépenser avant la fin de l'exercice et éviter ainsi la péremption des fonds.

Le gouvernement consacre maintenant énormément de ressources à la mise en oeuvre de la Stratégie d'information financière, ce qui devrait lui permettre de s'éloigner de ce niveau d'attentes très élémentaires. Mais les problèmes existent toujours. La comptabilité d'exercice aidera les ministères à comptabiliser les coûts au fur et à mesure que les actifs sont utilisés, mais les crédits nécessaires au financement ne seront pas comptabilisés selon cette méthode avant quelque temps. Cela veut dire que deux systèmes comptables seront utilisés. Autre aspect tout aussi important, il faut établir des liens entre les coûts et les résultats et veiller à ce que le rendement des hauts fonctionnaires soit évalué selon les résultats obtenus.

Protéger l'environnement

Les préoccupations sur l'état de l'environnement ont suscité un énorme changement au sein de notre bureau. La création du poste de commissaire à l'environnement et au développement durable est la concrétisation de cette préoccupation.

Le commissaire a cerné trois faiblesses dans la gestion par le gouvernement fédéral des questions liées à l'environnement et au développement durable : des écarts entre les engagements et les mesures concrètes; un manque de coordination entre les ministères et les administrations; des lacunes au niveau de l'examen de la performance environnementale et de l'information communiquée au Parlement.

Tout d'abord, le gouvernement fédéral semble avoir plus de facilité à établir des objectifs qu'à travailler à les atteindre. Cela a créé des écarts entre les engagements et les mesures concrètes. Par exemple, le gouvernement fédéral et les provinces ont entériné un plan de réduction de l'ozone troposphérique, une composante-clé du smog, mais ils ne se sont jamais entendus sur la façon de le mettre en application.

Deuxièmement, quand mon prédécesseur, Ken Dye, s'est penché sur l'environnement, il a posé la question suivante : « Qui est aux commandes? » Nous ne le savons pas encore vraiment. Les ministères sont profondément divisés quant à la manière de gérer les substances toxiques, et le gouvernement fédéral et les provinces ont conclu des ententes qui ne prévoient pas de dispositions pour déterminer si elles ont été mises en oeuvre.

Enfin, l'information environnementale communiquée n'est pas de meilleure qualité que l'information communiquée sur les autres résultats du gouvernement fédéral. En d'autres mots, elle est élémentaire au mieux.

La commissaire à l'environnement et au développement durable, Mme Johanne Gélinas, s'attaque à ces problèmes en travaillant avec les ministères fédéraux à l'établissement de stratégies de développement durable qui fonctionnent. Elle effectue également des vérifications environnementales et administre le processus de pétition grâce auquel les Canadiens peuvent tenir le gouvernement responsable des questions environnementales. Elle compte également rendre ce processus plus visible.

Je recommande fortement aux députés d'étudier en priorité ces trois questions environnementales essentielles.

Améliorer la prestation des services aux Canadiens

La majeure partie de nos travaux de vérification a porté sur l'examen de la prestation des services aux Canadiens. Il est impossible de résumer en quelques mots ou cas ce que nous avons appris au cours des dix dernières années. Certaines de nos constatations et recommandations les plus importantes ne touchaient, en fait, qu'un seul cas. Néanmoins, trois thèmes se dégagent de nos travaux des dix dernières années.

Tout d'abord, le fait de reporter des choix difficiles a été coûteux pour le gouvernement. On dit que la politique est l'art du possible. Un élément du « possible » est que toutes les parties intéressées améliorent leur sort. Cependant, quand il n'existe pas de solution gagnante, on a tendance à gagner du temps et à éviter de prendre des décisions difficiles. Au niveau de la gestion, on laisse les choses aller et on empêche aussi les fonctionnaires de concevoir des programmes économiques, efficients et efficaces.

Le présent Rapport donne quelques exemples de report de décisions difficiles au cours des dix dernières années : l'absence de cadre stratégique global pour des pêches durables, la lenteur exaspérante des améliorations des conditions de vie des Premières nations, et les lourdes compressions budgétaires subies par les Forces armées canadiennes sans que l'on parvienne à apporter les changements structurels nécessaires.

Deuxièmement, les compressions et les réorganisations effectuées au cours des années 1990 ont eu des effets sur les ministères. Développement des ressources humaines Canada, Pêches et Océans et la Défense nationale présentent tous des cas où les difficultés de rendement peuvent être attribuées, en partie, aux compressions.

Enfin, les cas de ministères présentés dans mon dernier rapport reflètent les problèmes de gestion dont j'ai déjà parlé : faiblesse des structures de contrôle, mauvaise gestion des résultats et pénurie de personnel bien formé.

J'espère que le Comité pourra tenir compte de ces problèmes répandus quand il étudiera les cas particuliers qui sont exposés dans les rapports périodiques courants du Bureau.

Améliorer la vérification législative

Je pense que le Bureau a également appris une chose ou deux pour améliorer ses propres activités au cours des dernières années. Je crois fermement que la vérification législative est essentielle au maintien du niveau actuel de probité et d'efficience du gouvernement et à l'amélioration de ce niveau. Nous devons protéger l'indépendance du Bureau et lui donner les moyens nécessaires pour qu'il demeure efficace.

Je mets au défi mes propres collègues de faire davantage que de communiquer uniquement l'existence de problèmes; il faut également en cerner les causes. Nous le faisons déjà dans une certaine mesure, mais le Bureau doit le faire davantage. Cerner les causes aide la direction à se rapprocher de la solution et fait qu'il est plus difficile de camoufler les problèmes.

Structurellement, il faut revoir le mode d'établissement du budget du Bureau afin de préserver l'indépendance du Bureau. À l'heure actuelle, le budget du Bureau du vérificateur général est négocié avec les représentants du Conseil du Trésor. C'est une situation gênante puisque le Bureau vérifie beaucoup d'activités qui relèvent d'eux. Le Royaume-Uni jouit d'un meilleur système de financement. Le budget du bureau de vérification est établi sur recommandation d'un comité neutre formé de députés de tous les partis.

Il faut aussi clarifier les règles quant aux entités que le vérificateur général doit vérifier. Des fonctions comme l'inspection des aliments, les services des parcs et la perception des recettes fiscales ne font plus partie du « noyau » du gouvernement, mais le vérificateur général est demeuré leur vérificateur. Cependant, le vérificateur général n'est pas le vérificateur d'autres organismes, comme le Fonds de dotation des bourses d'études du millénaire et l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.

Le Parlement doit établir des lignes directrices qui déterminent quand son vérificateur doit examiner de nouvelles entités et en rendre compte à la Chambre.

Conclusion

Monsieur le Président, ces dix années ont été bien remplies. J'en ressors impressionné par l'importance et la solidité de nos institutions et du processus politique qui nous protègent des tendances négatives d'ordre économique, social et environnemental et qui nous défendent contre le pouvoir des groupes d'intérêt. Nos institutions sont importantes tout comme l'est la politique. Ceux d'entre nous qui sont ou ont été au sein du système ont le devoir de veiller à ce que nous rendions compte de nos actions et des vastes ressources qui nous sont confiées.

Enfin, Monsieur le Président, j'aimerais profiter de l'occasion pour remercier mes collègues du Bureau qui m'ont appuyé avec autant de talent et d'énergie au cours des dix dernières années. J'aimerais également remercier les ministres, tous les parlementaires et en particulier les membres de ce comité, et les fonctionnaires du respect qu'ils ont manifesté envers le Bureau et à mon égard, et de leur travail acharné pour mettre en oeuvre les recommandations que nous avons faites. Finalement, je suis reconnaissant d'avoir eu cette occasion unique de servir le Parlement et la population canadienne.

Voilà qui conclut ma déclaration d'ouverture. Je serai heureux de répondre à vos questions.