Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Les subventions et les contributions : certains programmes d'Industrie Canada et du ministère du Patrimoine canadien (Chapitre 27 - Rapport de décembre 1998)

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11 février 1999

L. Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada

Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de présenter les résultats de la vérification de certains programmes de subventions et de contributions d'Industrie Canada et du ministère du Patrimoine canadien.

Notre rapport contient trois messages principaux. Premièrement, le chapitre souligne comment nos vérifications des programmes de subventions et de contributions au cours des 21 dernières années nous ont amenés à formuler, à de nombreuses reprises, les mêmes observations décevantes. Deuxièmement, notre dernière vérification a montré qu'il existe de nombreuses possibilités d'améliorer la gestion du Programme du multiculturalisme du ministère du Patrimoine canadien et du Programme d'adaptation aux fermetures de bases de l'Ontario exécuté par Industrie Canada. Troisièmement, nous avons constaté qu'Industrie Canada pourrait renforcer l'obligation de rendre compte du rendement dans le cadre de ses ententes de contributions avec le Réseau canadien pour l'avancement de la recherche, de l'industrie et de l'enseignement (CANARIE Inc.) et avec le Réseau de recherche appliquée préconcurrentielle (PRECARN Associates Inc.). J'expliquerai brièvement ces questions.

Formulation des mêmes observations à de nombreuses reprises

Pendant de nombreuses années, nous avons communiqué au Parlement les résultats de nos vérifications de divers programmes de subventions et de contributions. En 1977, nous avons relevé des problèmes de conformité aux autorisations de programme, des lacunes dans la conception des programmes, des faiblesses au niveau des contrôles, de même qu'une mesure et une communication insuffisantes au chapitre du rendement. Dans des vérifications subséquentes, nous avons fait des observations analogues. Nous avons certes constaté des améliorations dans certains secteurs lors de nos suivis, mais, dans l'ensemble, nous avons continué à relever les mêmes problèmes chaque fois que nous avons vérifié ces programmes.

Pourquoi ces problèmes ont-ils persisté? Certaines réponses ont à voir avec le fait que les décideurs n'ont pas respecté les règles qui régissent les subventions et les contributions, d'autres avec le fait que la gestion laisse à désirer et que les pratiques de gestion ne sont pas solides. Pour régler ce dernier problème, notre bureau procède à l'élaboration d'un cadre de gestion du rendement. Ce cadre nous permettra de définir nos attentes au plan de la gestion et il aidera les gestionnaires à se montrer critiques à l'égard de leurs programmes. Nous y travaillons pour le moment et nous projetons de le publier dans un prochain rapport.

Objet de la vérification

Cette vérification attire l'attention sur une question de gestion importante, à savoir ce qui constitue une diligence raisonnable dans l'évaluation des demandes de subventions ou de contributions. L'exercice d'une diligence raisonnable ne sous-entend pas des analyses exhaustives dans tous les cas; il est évident que l'étendue de l'analyse est liée au montant de la subvention ou de la contribution. L'exercice d'une diligence raisonnable vise au moins à fournir la certitude que les décisions de financement tiennent compte des critères établis par le Conseil du Trésor et qu'elles sont fondées sur une information fiable.

Permettez-moi maintenant de passer brièvement en revue nos constatations.

Possibilités d'amélioration des programmes exécutés directement

Dans le cas du Programme d'adaptation aux fermetures de bases de l'Ontario, qui est doté d'un budget de 11,7 millions de dollars sur sept ans, nous n'avons trouvé que peu d'éléments pouvant indiquer qu'Industrie Canada avait fait preuve d'une diligence raisonnable dans l'approbation de nombreux projets. Nous n'avons trouvé que peu d'information dans les dossiers indiquant que les critères approuvés par le Conseil du Trésor avaient été pris en considération.

Au ministère du Patrimoine canadien, nous avons trouvé d'importantes possibilités d'amélioration de la gestion du Programme du multiculturalisme. En 1997-1998, le Ministère a versé des subventions ou des contributions s'élevant à 19 millions de dollars à 1 000 projets dans le cadre du Programme. Le Ministère doit s'assurer de l'exercice d'une diligence raisonnable dans l'approbation des subventions et des contributions et veiller à ce que les bénéficiaires fournissent l'information requise sur le rendement. Dans le cas d'environ 30 p. 100 des dossiers que nous avons vérifiés, nous n'avons pas pu obtenir la certitude que les représentants du Ministère avaient exercé une diligence raisonnable dans l'évaluation du projet.

Nous craignons aussi que les attentes quant au rendement du Programme soient ambiguës. Le Ministère n'a pas accompagné les objectifs du programme général d'une description plus claire et mieux ciblée des buts à atteindre et des résultats à obtenir. Nous avons constaté que le Programme, parce que les décisions ne peuvent être fondées que sur des objectifs généraux, sert à financer des projets qui relèvent également du mandat d'autres ministères ou d'organismes provinciaux.

Nécessité de renforcer l'obligation de rendre compte des accords exécutés indirectement

Nous avons aussi constaté qu'Industrie Canada pourrait renforcer l'obligation de rendre compte du rendement dans le cadre de ses accords de contributions avec CANARIE Inc. et PRECARN Associates Inc.

Les activités de CANARIE se déroulent en trois phases. Le gouvernement fédéral a contribué un total de 107 millions de dollars par l'entremise d'Industrie Canada pour les phases 1 et 2. La phase 3 en est à l'étape de la planification pour le moment.

Le plan d'entreprise et le plan d'exploitation de CANARIE ne contiennent pas d'objectifs de rendement annuel au regard desquels le Ministère pourrait surveiller le rendement des activités de CANARIE. Nous avons remarqué que les responsables de CANARIE n'étaient aucunement tenus de produire une mise à jour annuelle de ces plans, ni un rapport annuel de rendement. Industrie Canada ne surveille pas de manière structurée les résultats obtenus annuellement par CANARIE. Nous avons aussi constaté qu'Industrie Canada ne faisait pas assez pour s'assurer que les pratiques utilisées par CANARIE pour le choix et la gestion des projets satisfont aux exigences du Ministère.

Quant à PRECARN, le Conseil du Trésor a approuvé, pour les phases 1 et 2, le versement d'une aide financière pouvant aller jusqu'à 35,4 millions de dollars sur une période de six ans.

Comme le veut l'accord, PRECARN présente un plan d'entreprise annuel définissant clairement les attentes relatives au rendement. Cependant, nous n'avons relevé aucun indice prouvant qu'Industrie Canada procède à un examen du plan pour s'assurer qu'il répond aux attentes ministérielles ni qu'Industrie Canada approuve officiellement le plan, même si cela constitue une exigence de l'accord. Nous avons en outre constaté que le Ministère ne surveille pas, de manière indépendante, les résultats obtenus chaque année.

Questions que le Comité pourrait souhaiter approfondir

En résumé, il y a plusieurs questions que le Comité pourrait vouloir approfondir avec les ministères. Premièrement, il pourrait demander aux deux ministères de lui faire rapport sur les résultats précis attendus de chacun des programmes de subventions ou de contributions présentés dans la partie III du Budget des dépenses, Rapport sur les plans et les priorités. Cela permettrait d'atteindre deux buts. D'une part, on préciserait et on compléterait l'information déjà fournie dans la partie III en expliquant le lien entre les dépenses annuelles consacrées aux programmes de subventions et de contributions de chaque ministère et les objectifs généraux que chacun poursuit. D'autre part, cela faciliterait grandement les prochains travaux de vérification des subventions et des contributions menés par le Bureau.

Une deuxième question se pose : même les programmes les mieux conçus échoueront si une diligence raisonnable n'est pas exercée. Le Comité pourrait vouloir demander aux ministères de revoir leurs processus de prise de décision pour tous les programmes de subventions et de contributions afin que les projets financés représentent une optimisation des ressources tant pour les requérants que pour le programme. En particulier, les ministères devraient voir à ce que toutes les demandes de financement admissibles soient évaluées au regard des critères approuvés par le Conseil du Trésor et à ce qu'il y ait des vérifications régulières de tous les programmes de subventions et de contributions.

Le Comité des comptes publics voudra peut-être demander à Industrie Canada de revoir les mesures de reddition de comptes et les attentes relatives au rendement pour tous les accords exécutés indirectement et d'évaluer le rendement annuellement.

Monsieur le Président, ceci met fin à mon commentaire d'introduction. Nous serons heureux de répondre aux questions du Comité. Merci!