Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Chapitre 24 - Revenu Canada - Direction de l’impôt international : la gestion des ressources humaines (Rapport de décembre 1998)

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Le 23 mars 1999

Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada

Monsieur le Président, j’aimerais vous remercier de nous donner l’occasion de présenter les résultats de notre vérification intitulée « Revenu Canada – Direction de l’impôt international : la gestion des ressources humaines ».

Avant d’entrer dans les détails de ce chapitre, j’aimerais dire que l’un des principes de mon bureau est de consacrer des ressources à la vérification des domaines fiscaux à risques élevés. En 1992 et 1993, nous avons examiné les arrangements fiscaux pour les sociétés étrangères affiliées, les décisions anticipées en matière d’impôt sur le revenu, les décisions et interprétations en matière de taxe sur les produits et services, ainsi que la disposition fiscale concernant la déduction relative aux ressources. En 1996, notre rapport a porté sur le programme d’application de la Loi de l’impôt sur le revenu aux grandes sociétés et sur le programme de Revenu Canada pour lutter contre l’évitement de l’impôt sur le revenu. Nous avons aussi fait un rapport sur l’administration des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu applicables aux fiducies familiales. De plus, nous avons effectué des travaux touchant la TPS, l’accise et les douanes. Tous ces programmes et toutes ces questions visent des domaines fiscaux à risques élevés où les enjeux sont de taille.

Le chapitre visé par l’audience d’aujourd’hui porte aussi sur un important domaine fiscal à risques élevés : la gestion des ressources humaines à la Direction de l’impôt international de Revenu Canada.

La Direction de l’impôt international, qui a été créée en novembre 1991, est le point de convergence pour toutes les questions d’exécution et d’observation liées aux règles fiscales internationales. Le domaine de l’impôt international est affaire de gros sous. En 1993, les contribuables ont déclaré à Revenu Canada des opérations transfrontalières entre entités apparentées d’une valeur de 248 milliards de dollars; sur cette somme, 116 milliards de dollars avaient trait à des opérations conclues entre entités apparentées du Canada et des États-Unis. Le Comité technique de la fiscalité des entreprises a souligné que des variations même relativement faibles du revenu attribué au Canada sur les opérations entre entités apparentées risquent de perturber considérablement l’assiette du revenu intérieur.

La complexité des questions que la Direction doit traiter est impressionnante. Parmi ces questions, on trouve la fixation de prix de cession interne; le commerce électronique; les entreprises internationales et leurs opérations entre entités apparentées; les paradis fiscaux et la concurrence nuisible en matière fiscale; les mécanismes de financement internationaux; les conventions fiscales; enfin, les non-résidents qui exploitent une entreprise au Canada ou qui aliènent des biens canadiens imposables.

La croissance constante du commerce électronique et de la mondialisation des entreprises, la création continue d’instruments financiers complexes et la sophistication des entreprises mondiales et de leurs fiscalistes et conseillers financiers continueront à poser des défis à la Direction de l’impôt international de Revenu Canada.

Il est clair que la Direction a besoin d’employés hautement qualifiés qui possèdent une bonne compréhension des lois fiscales du Canada et de celles d’autres administrations. D’après notre vérification, la question des ressources humaines exige beaucoup d’attention. Les lacunes qu’affiche la gestion des ressources humaines à la Direction, alliées aux règles souvent lourdes de gestion des ressources humaines en vigueur dans la fonction publique, ont considérablement retardé le processus de dotation.

Nous avons signalé que la Direction pourrait prendre des mesures pour accélérer le processus de dotation. Le chapitre illustre la durée exceptionnellement longue de la période nécessaire pour corriger les examens et dresser les listes d’admissibilité. Les bons candidats peuvent perdre tout intérêt s’ils doivent attendre longtemps avant de se voir offrir un poste.

Bien qu’elle ait reconnu depuis 1994 la nécessité pressante de se doter d’un plan des ressources humaines, la Direction en est toujours à l’étape d’élaboration d’un plan et de stratégies d’ensemble en matière de ressources humaines, reliés à son plan d’activités.

Monsieur le Président, le Ministère a reconnu que la nécessité de disposer de systèmes d’information et de bases de données fiables sur les ressources humaines est un sujet de préoccupation non seulement pour la Direction de l’impôt international, mais pour toute l’organisation.

La Direction devra disposer d’une solide stratégie en matière de ressources humaines pour s’assurer qu’à mesure que les titulaires de postes supérieurs prennent leur retraite ou sont mutés ailleurs, leurs postes seront dotés par des personnes compétentes et expérimentées. Pour appuyer la mise en œuvre de sa stratégie, elle aura en outre besoin d’un système d’information sur les ressources humaines qui soit fiable.

Nous avons constaté que les vérificateurs des bureaux régionaux comptent en moyenne moins de trois ans d’expérience dans le domaine des règles fiscales internationales. Sur les 80 employés qui travaillent actuellement à l’Administration centrale à Ottawa, seulement 31 d’entre eux y étaient en avril 1995. Beaucoup de postes clés, y compris les postes de direction, sont remplis grâce à des détachements, à des réaffectations et à des nominations intérimaires. Cette approche de dotation a donné lieu à un manque de continuité et de stabilité et risque de compromettre la qualité du travail. Lorsqu’il faut se mesurer à certains des fiscalistes les plus compétents et les mieux payés du secteur privé au Canada, il est logique d’avoir recours à des employés permanents qui ont à cœur de travailler dans le domaine des règles fiscales internationales.

Monsieur le Président, il y a actuellement cinq postes de niveau supérieur au sein de la Direction : un directeur général et quatre directeurs. Comme l’indique notre chapitre, le directeur général a été muté à une autre direction générale du Ministère en septembre 1996. Une mesure de dotation a été lancée peu après et une nomination a été faite en octobre 1997, soit un an plus tard. Depuis la fin de notre vérification, ce directeur général est aussi parti et le poste a été comblé au moyen d’une nomination intérimaire en février 1999. Les quatre postes de directeur ont aussi été comblés au moyen de nominations intérimaires.

Lorsque, en 1996, nous avons terminé notre vérification du programme d’application de la Loi de l’impôt sur le revenu aux grandes sociétés, la Direction menait de front un certain nombre de concours. Monsieur le Président, depuis ce temps, ces mesures de dotation ont été lancées, avortées et relancées. Dans l’intervalle, les fiscalistes du secteur privé continuent sans relâche à élaborer et à perfectionner des stratégies fiscales dans l’intérêt de leurs clients — des stratégies qui ne respectent pas nécessairement l’esprit de nos lois fiscales.

Le mois dernier, le Ministère a diffusé un plan d’équité en sept points. Ce plan signalait que l’équité exige un traitement égal peu importe l’âge, la race et le statut; l’endroit; les antécédents; le degré de sophistication; l’accès à des spécialistes; l’influence politique; l’assurance; enfin, la taille de l’entreprise. Pour qu’il y ait équité et que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, il faut une main-d’œuvre hautement compétente et stable pour faire en sorte que les contribuables multinationaux astucieux qui ont accès à des avis professionnels dispendieux paient leur juste part d’impôt.

Les employés de la Direction doivent avoir des relations avec des dirigeants de grandes sociétés et avec des fiscalistes compétents du secteur privé et d’autres administrations. On s’attend aussi qu’ils fassent preuve de jugement lorsqu’ils interprètent des transactions et des règles fiscales complexes. Pour attirer et retenir l’effectif nécessaire, le Ministère pourrait recourir au perfectionnement de l’effectif actuel, à l’embauche de nouveaux employés dotés des compétences appropriées et à la fourniture d’un environnement adéquat qui permette la croissance personnelle et l’avancement professionnel.

Monsieur le Président, la solution d’un certain nombre des problèmes exposés relève uniquement du Ministère. Il serait malaisé de s’attendre que l’Agence des douanes et du revenu du Canada, dont on propose la création, règle toute seule les problèmes de ressources humaines de la Direction ou du Ministère. Il est important que la Direction élabore sans tarder un plan pour embaucher, garder et former les employés clés. C’est l’objectif que visaient nos recommandations.

Cette vérification constituait notre premier projet sur les activités de la Direction de l’impôt international. Au cours des vérifications à venir, nous examinerons d’autres aspects importants de la Direction, sur lesquels nous ferons un rapport approprié; il pourrait s’agir, par exemple, des questions fiscales liées à la fixation de prix de cession interne et aux non-résidents.

Monsieur le Président, ceci met fin à mon commentaire d’introduction. Nous serons heureux de répondre aux questions du Comité. Merci.