Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Rapport de Septembre 1998

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1 Octobre 1998

L. Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada

Merci, Monsieur le Président. Nous sommes heureux d’avoir l’occasion de rencontrer le Comité pour discuter du Rapport qui a été déposé mardi. Je suis accompagné du sous-vérificateur général Michael McLaughlin, du vérificateur général adjoint David Rattray et de Grant Wilson, directeur principal au sein de la Direction générale des opérations de vérification.

Le Rapport attire l’attention du Parlement non seulement sur l’urgence pour le gouvernement de s’adapter à de nouvelles réalités, mais aussi sur la nécessité de revoir certains programmes que l’on tient pour acquis depuis longtemps.

Mardi, je vous ai donné un bref aperçu du Rapport, mais aujourd’hui, j’aimerais vous entretenir surtout des chapitres qui, à mon avis, devraient faire l’objet d’audiences en priorité. Je parlerai très brièvement de chacun des sujets proposés, suivant l’ordre dans lequel ils sont présentés dans le Rapport.

Le chapitre 10 traite de la Commission canadienne des droits de la personne et du Comité du tribunal des droits de la personne. Ces institutions jouent un rôle de premier ordre dans la défense des valeurs clés de notre société. Mais, avec le temps, leur processus est devenu lourd, long et coûteux.

La vérification a permis de constater que la Commission met beaucoup de temps pour instruire une plainte. En moyenne, il faut environ deux ans à la Commission pour examiner les plaintes. Les audiences du Tribunal sont également longues. L’incidence de cette situation sur les milliers de Canadiens qui cherchent réparation pour des cas présumés de discrimination peut être dévastatrice.

Un examen approfondi des rôles de la Commission et du Tribunal est nécessaire.

Le chapitre 14 porte sur le rôle d’Affaires indiennes et du Nord Canada dans la conclusion et la mise en œuvre d’ententes de règlement de revendications globales ayant pour objet des titres ancestraux de propriété des terres et des droits qui n’ont pas été réglés par traités ni annulés légalement.

En juillet 1997, douze revendications avaient été réglées. Elles comportaient le transfert d’un demi-million de kilomètres carrés de terres et le paiement de deux milliards de dollars en capital. Au moins 70 autres revendications formulées dans l’ensemble du Canada en sont à divers stades des négociations, et pourraient concerner jusqu’à 200 Premières nations.

Nous avons relevé des problèmes dans un certain nombre de secteurs dont il faudra tenir compte pour le règlement des autres revendications et la mise en oeuvre continue d’ententes antérieures. Il faut de nombreuses années pour en arriver à un règlement et les ententes restent entourées de beaucoup d’incertitude.

La vérification a révélé un manque de rigueur dans la détermination des sommes d’argent et de la valeur des terres et des autres ressources visées par les règlements finaux. Elle a aussi permis de déceler des lacunes dans la mise en œuvre de ces ententes, notamment l’absence de plans de mise en oeuvre, la communication d’information incomplète sur les coûts de même qu’une surveillance et une évaluation inadéquates.

Je suis également préoccupé par la réponse du Ministère à notre vérification. Il n’a répondu ni positivement ni négativement aux recommandations particulières. Par exemple, pour ce qui est de plusieurs questions signalées concernant la conclusion et la mise en œuvre des ententes de règlement, la réponse laisse supposer que nos observations s’appliquent aux revendications qui ont été réglées aux termes de politiques qui ont été remplacées, ce qui n’est pas le cas.

Je crois que la tenue d’une audience par le Comité aiderait à clarifier les mesures correctives que le Ministère a l’intention de mettre en œuvre.

Quant au chapitre 16, nous soulignons que le numéro d’assurance sociale est devenu avec les années la porte d’entrée à une multitude de programmes sociaux. Son usage s’est multiplié non seulement au niveau fédéral mais aussi aux paliers provinciaux et municipaux et même au secteur privé. Pourtant, il n’a jamais été conçu à des fins aussi vastes.

La vérification a permis de déceler un certain nombre de faiblesses dans la gestion du numéro d’assurance sociale. L’information sur les personnes, particulièrement sur les naissances et les décès, n’est pas toujours complète ou exacte. En outre, des milliers de personnes sans statut juridique au Canada détiennent des numéros d’assurance sociale qui sont valides.

La vérification a révélé que le Registre d’assurance sociale comportait 11,8 millions de comptes non certifiés. Ces comptes représentent les numéros d’assurance sociale qui ont été attribués à des personnes n’ayant pas été tenues de fournir des documents d’identification et qui n’ont jamais été validés ultérieurement.

Ces faiblesses peuvent être à l’origine d’erreurs, d’abus et de fraudes touchant de nombreux programmes fédéraux, les provinces et le secteur privé. Les programmes sociaux sont particulièrement vulnérables à cet égard et, dans l’ensemble, les répercussions pourraient être considérables.

La tournure qu’a prise l’utilisation du numéro d’assurance sociale m’inquiète parce qu’un usage aussi répandu met en péril la protection des renseignements personnels à laquelle ont droit tous les citoyens canadiens. Lorsque le numéro d’assurance sociale a été adopté, il était clair pour le Parlement et le gouvernement que la protection des renseignements personnels était d’une importance capitale. Pour protéger les fonds publics et les contribuables, il faut que le gouvernement détermine ce qu’il veut faire du numéro d’assurance sociale. Il est essentiel que le Parlement joue un rôle important dans la discussion de ces questions, dans l'accroissement de la sensibilisation du public et dans la recherche d’une solution satisfaisante.

Le Comité voudra peut-être discuter avec Développement des ressources humaines Canada de ce qu’il entend faire pour assurer l’intégrité de la base de données du numéro d’assurance sociale.

Enfin, le chapitre 18 traite de la Stratégie d’information financière du gouvernement. C’est un sujet que je considère personnellement comme étant d’un intérêt capital pour la santé de nos finances. La Stratégie a trois composantes clés : le passage à la comptabilité d’exercice intégrale (semblable à celle utilisée dans les entreprises privées); la mise en œuvre de nouveaux systèmes financiers; et l’intégration de l’information financière dans les décisions que prennent quotidiennement les gestionnaires.

La Stratégie est importante parce qu’elle permettra de fournir au gouvernement l’information dont il a besoin pour prendre des décisions éclairées au cours des années à venir. De façon plus précise, grâce à cette stratégie, le gouvernement remplace des systèmes comptables plutôt archaïques et il introduit des pratiques comptables plus modernes et utiles.

La Stratégie a été approuvée, il y a dix ans. Jusqu’à récemment, sa mise en œuvre s'est effectuée à un rythme trop lent. Le gouvernement ne peut plus se permettre d’autres retards. Il a besoin d’une information, dont il ne dispose pas pour le moment, afin de bien gérer ses activités.

L’examen, par le Comité, des progrès réalisés à cet égard pourrait donner le coup de pouce nécessaire à la mise en œuvre de la Stratégie dans les délais prévus.

Merci, Monsieur le Président. Nous serons heureux de répondre aux questions sur tout sujet soulevé dans le Rapport.