Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Chapitre 3 – Défense nationale - Équiper et moderniser les Forces canadiennes (Rapport d'avril 1998)

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28 mai 1998

David Rattray, FCGA
Vérificateur général adjoint


Merci Monsieur le Président. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de rencontrer le Comité pour discuter du chapitre 3 du Rapport d'avril qui s'intitule « Défense nationale Équiper et moderniser les Forces canadiennes ». Je suis accompagné aujourd'hui de Peter Kasurak, le directeur principal responsable de ce chapitre.

Nous nous sommes penchés sur les défis qui se posent à la Défense nationale qui doit veiller à ce que les Forces canadiennes restent une force moderne et apte au combat. Vous vous rappelez sans doute que le Livre blanc de 1994 sur la Défense souligne que les Forces canadiennes doivent « pouvoir se battre aux côtés des meilleurs, contre les meilleurs ». Bien entendu, cela ne veut pas dire que nos forces couvriront toute la gamme des activités militaires. Mais il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elles disposent des composantes dont elles ont besoin pour maintenir leurs capacités essentielles.

Toutefois, le Livre blanc ne définit pas les engagements que les Forces canadiennes prendront et cela nous inquiète. Nous nous attendions à ce que les priorités et les plans de la Défense nationale aient permis aux Forces canadiennes d’être équipées et d’être prêtes à donner suite, si elles le devaient, aux engagements prévus par la politique de défense. Nous avons toutefois constaté que les Forces canadiennes n'acceptent actuellement d'engagement que si la tâche n'exige pas plus que les capacités de l'équipement qu'elles possèdent.

Comme nous l'indiquons dans notre chapitre, le Sous-chef d'état-major de la Défense examine la capacité des Forces canadiennes de déployer des forces d'intervention comme l'exige la politique de défense. Il est encourageant de constater que le Ministère cherche à évaluer une telle capacité, mais son examen ne porte que sur la situation actuelle. Il est tout aussi important d'examiner les perspectives à long terme des Forces canadiennes de même que la capacité et le rendement des forces militaires auxquels les Canadiens doivent pouvoir s'attendre.

Le Ministère s'attaque aux lacunes d'équipement lorsqu'il dispose de fonds. Toutefois, il a éprouvé de la difficulté à trouver le juste équilibre entre les dépenses en capital servant à l'achat d'équipement et les dépenses liées au personnel, aux opérations et à l'entretien. Au cours des dernières années, nous avons constaté que les dépenses en capital ont diminué de manière à ce que la Défense nationale puisse satisfaire aux exigences de coûts en matière de personnel, d'opérations et d'entretien. Si la tendance se maintient, les dépenses en capital pourraient chuter à un niveau inacceptable comme ce fut le cas au début des années 70 alors que le vieillissement de l'équipement était devenu un grave problème.

Trois options s'offrent au Ministère. Il peut maintenir le statu quo qui mine sa capacité de se moderniser; il peut rectifier les réductions des dépenses en capital en augmentant ses niveaux de référence et en réalisant des gains d'efficience; enfin, il peut, s'il reçoit une orientation adéquate, réexaminer la capacité et la structure à long terme des Forces canadiennes.

Pour l'instant, le Ministère préfère l'option qui prévoit la hausse du financement pour les biens d'équipement. Mais pour faire en sorte que cette option refoule la tendance à la baisse des dépenses en capital et que le Canada retrouve une force de défense moderne et bien équipée, il faut accorder plus d'attention à la planification et aux priorités à long terme de même qu'au rendement des forces militaires.

Le Parlement peut jouer un rôle important, voire crucial, pour aider à orienter la capacité et le rendement de la défense. En effet, en 1994, le Comité mixte spécial sur la politique de défense au Canada a demandé au Parlement de s'engager davantage dans les questions de défense. Il a entrevu la nécessité de procéder à un examen régulier de la politique de défense et de soulever des questions liées au budget et à l'approvisionnement.

Le Comité mixte spécial a fait plusieurs suggestions qu'on pourrait maintenant envisager de mettre en oeuvre. À notre avis, de ses recommandations découleraient l'orientation et la surveillance nécessaires dont nous faisons mention dans notre chapitre.

Notre première recommandation appuie les efforts que la Défense nationale déploie pour examiner son cadre de développement des forces. Nous croyons que ce cadre de planification est essentiel si l’on veut que les Forces canadiennes utilisent leurs ressources de la meilleure façon. Il faut encourager le Ministère à poursuivre cet effort et à mettre l'accent sur l'avenir, particulièrement sur les ressources dont il aura besoin pour faire son travail.

Le Comité mixte spécial a souligné que le Parlement pourrait contribuer à ce processus de planification. Nous sommes d'accord pour dire que la surveillance accrue recommandée par le Comité laquelle pourrait s’exercer dans le cadre d'un examen annuel exhaustif ou d'un examen approfondi du Budget principal des dépenses de la Défense aiderait à orienter les dépenses du Ministère.

Pour envisager l'avenir, la Défense nationale doit élargir sa présente perspective. Les plans ne couvrent actuellement qu’une période de cinq ans. Or, on prévoit que l'équipement durera au moins 30 ans. Ce que la Défense nationale achète maintenant aura des répercussions sur son fonctionnement à long terme. Le Ministère doit être en mesure de répondre aux questions fondamentales concernant la nature des capacités qui doivent être maintenues, les ressources nécessaires et les risques auxquels les militaires seront exposés.

L'orientation sur ces questions provient de la politique de défense qui indique ce que les Forces canadiennes doivent faire. Le Comité mixte spécial a incité le Parlement à suivre de près les futurs examens de la politique de défense et demandé la tenue d'un débat annuel sur celle-ci. Nous croyons qu'une telle surveillance est nécessaire pour déterminer la mesure dans laquelle les Forces canadiennes sont en mesure de mettre en oeuvre la politique de défense du Canada.

Notre deuxième recommandation vise à améliorer l'information communiquée au Parlement. En effet, une meilleure information sur les plans d’immobilisations et les priorités en matière de défense aiderait le Parlement à surveiller les dépenses et les budgets de défense. Nous signalons dans notre chapitre que la Défense nationale a réussi jusqu’à un certain point à élaborer son cadre de mesure du rendement mais qu'il reste un important travail à faire. Des indicateurs de rendement utiles doivent donc être élaborés. Selon nous, la Défense nationale devrait établir un lien entre ce qu'elle dépense et les capacités et le rendement des forces militaires qu'obtiennent les Canadiens en contrepartie.

Si la Défense nationale pouvait améliorer l'information qu'elle communique sur ses capacités et son rendement, le Parlement pourrait faire un meilleur examen de son Budget principal des dépenses. La Défense nationale nous a dit qu'elle aura de l'information utile sur le rendement d'ici deux ans. À ce moment-là, le Comité pourrait vouloir surveiller la tendance prévue des dépenses de la défense.

En fin de compte, nous espérons que le Ministère connaîtra les mêmes succès que d'autres pays rencontrent déjà. Ces pays parviennent à mieux assortir leurs ressources de défense aux objectifs de leur politique en ce domaine. En d'autres mots, le Ministère devrait dire au Parlement s'il est en mesure de faire ce qu'on lui demande de faire avec les ressources qu'on lui accorde. Le Parlement devrait savoir ce que le Ministère peut faire et ce qu'il ne peut pas faire.

D'autres pays ont pris les devants et obtenu des résultats positifs. Le Canada s'engage sur la même voie qu'eux en mettant en oeuvre un système de comptabilité d'exercice et en élaborant un système de communication d'information sur le rendement. Ces initiatives sont encourageantes et nous croyons qu'elles amélioreront l'information sur la défense. Mais d'autres pays examinent aussi la défense à des niveaux très élevés; dans certains cas, ils ont signé des ententes sur les produits à livrer. Nous sommes d'accord avec le Comité mixte spécial pour dire qu'un tel examen de haut niveau serait profitable pour le Canada.

Monsieur le Président, la Défense nationale amorce une période au cours de laquelle elle renouvellera ses principaux systèmes d’armes, au fur et à mesure qu’elle pourra se le permettre. Vous avez sans doute entendu parler, par exemple, des décisions récentes d'acquérir des hélicoptères de recherche et de sauvetage ainsi que des sous-marins. Le Comité peut aider à orienter les efforts du Ministère de manière à ce que celui-ci fasse la meilleure utilisation des ressources accessibles et mette l'accent sur les attentes à long terme.

Ceci met fin à mon commentaire, Monsieur le Président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.