Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Chapitre 25 - Citoyenneté et Immigration Canada et la Commission de l'immigration et du statut de réfugié - Le traitement des revendications du statut de réfugié (Rapport du vérificateur général de décembre 1997)

line

5 février 1998

L. Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada


Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de présenter les résultats de notre vérification du traitement des revendications du statut de réfugié.

Nos constatations et conclusions touchent tant Citoyenneté et Immigration Canada que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Ces deux organismes partagent la responsabilité du traitement des revendications.

À la fin de 1988, le système avait accumulé un arriéré important de demandes à traiter. Pour remédier à cette situation, une nouvelle structure et un processus totalement révisé pour le traitement des revendications avait alors été mis en place en janvier 1989. Les attentes étaient claires -- on visait le règlement rapide, équitable et efficace des revendications et le renvoi des revendicateurs non reconnus. Par la suite, d'autres modifications ont été apportées à la Loi sur l'immigration et aux règlements.

Monsieur le président, nous avons constaté que les résultats sont décevants. Nous nous inquiétons particulièrement du volume de cas en arriéré, des longs délais de traitement, tant à la Commission qu'au Ministère, et des difficultés à effectuer les renvois.

Au 31 mars 1997, environ 37 500 personnes attendaient une décision du Ministère ou de la Commission liée à leur revendication. Au chapitre des délais, on estime qu'une revendication peut assurer un séjour au pays pour une période de plus de deux ans et demi. La situation à propos des renvois mérite aussi une attention particulière. À la fin de notre vérification, CIC pouvait confirmer le départ de seulement 4 300 des 19 900 personnes qui auraient dû quitter le pays. En somme, le processus n'accorde pas rapidement la protection à ceux qui en ont vraiment besoin. De plus, il ne dissuade pas les personnes qui ne méritent pas ou qui ne requièrent pas la protection du Canada de revendiquer le statut de réfugié.

Les délais dans le traitement des revendications du statut de réfugié ne sont pas acceptables pour plusieurs raisons. D'une part, les délais à rendre une décision prolongent indûment le sentiment d'angoisse et d'incertitude qui affecte les réfugiés. D'autre part, les délais font en sorte que les revendicateurs s'installent et créent des liens dans la société canadienne. Il devient donc très difficile de renvoyer ces personnes après un certain temps. De plus, le faible taux de succès à retourner ceux qui n'ont pas besoin de protection nourrit une perception qu'il est plus facile d'immigrer au Canada par le moyen de la revendication du statut de réfugié que par les programmes prévus d'immigration.

Les coûts totaux liés aux réfugiés ne sont pas connus. Toutefois, des données fragmentaires indiquent que les coûts de l'administration fédérale s'élèvent au minimum à 100 millions de dollars par année. De plus, les deux provinces du Québec et l'Ontario versent, chacune de leur côté, environ 100 millions de dollars par année en aide sociale aux revendicateurs du statut de réfugié. Des économies pourraient être réalisées en accélérant le règlement des cas de revendicateurs non reconnus.

Plusieurs facteurs contribuent aux difficultés du système actuel. Nous avons noté, à diverses étapes du processus, des problèmes d'efficience et d'efficacité opérationnelle et des manques de rigueur qui ont un impact important sur la capacité du système de répondre aux attentes. Nous soulevons entre autres dans notre rapport les exemples suivants :

De plus, nous avons constaté que personne dans l'administration fédérale ne surveillait le déroulement d'ensemble du traitement des revendications. Finalement, les parlementaires ne peuvent pas évaluer le rendement d'ensemble des activités liées aux revendicateurs du statut de réfugié à partir des rapports qui leur sont soumis par le Ministère et par la Commission.

Dans notre rapport, nous mettons le gouvernement en garde contre des modifications « à la pièce ». Les problèmes liés au processus actuel du traitement des revendications sont complexes et il est nécessaire d'effectuer une révision majeure du processus. C'est toute l'infrastructure de coordination et de contrôle des activités qui doit être améliorée. Il est aussi important de réaliser que, lors d'une révision du processus, on devra définir des attentes réalistes en tenant compte des choix effectués par la société canadienne vis-à-vis des questions liées aux réfugiés.

Le 6 janvier dernier, la Ministre de la citoyenneté et de l'immigration a rendu public le rapport du Groupe consultatif pour la révision de la législation. Ce rapport soulève des questions fondamentales liées à l'immigration et à la détermination du statut de réfugié. À la suite des consultations prévues dans le cadre de ce rapport, le gouvernement aura à prendre des décisions difficiles. Étant donné les résultats obtenues précédemment, il fera face à un défi de taille en cherchant à élaborer et à mettre en oeuvre un système qui répondra aux objectifs visés.

Il est probable que le gouvernement proposera des modifications législatives de façon à apporter des changements au processus actuel. Nous appuyons toute initiative en ce sens et nous comprenons que cet exercice prendra un certain temps. Cependant, nous croyons que certaines mesures doivent être prises immédiatement, peu importe la nature des changements qui seront apportés au processus. En plus d'une meilleure coordination entre le Mministère et la Commission, une attention particulière devrait être apportée notamment aux questions suivantes :

Votre Comité a un rôle important à jouer en s'assurant que le Ministère et la Commission se dotent de stratégies et de plans pour pallier les lacunes notées dans notre rapport au niveau des pratiques. Toute révision majeure du processus devrait être accompagnée d'un plan détaillé permettant de bien gérer la période de transition et de limiter les impacts négatifs sur l'efficience et l'efficacité.

Monsieur le président, voilà qui conclut mon commentaire d'introduction. Nous serons heureux de répondre aux questions de votre Comité.