Commentaires d'introduction au Comité des comptes publics

Chapitre 28 - Pêches et Océans Canada - Le saumon du pacifique : la durabilité de la ressource (Rapport du vérificateur général de décembre 1997)

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12 février 1998

L. Denis Desautels, FCA
Vérificateur général du Canada


Monsieur le Président, merci de me donner l'occasion de présenter les résultats de notre vérification de la gestion du saumon du Pacifique par Pêches et Océans Canada.

Je suis accompagné aujourd'hui du directeur principal, John McCullough, et du directeur, Geoffrey Robins, qui viennent tous deux de notre bureau régional de Vancouver.

Notre examen de la durabilité du saumon du Pacifique doit être communiqué en deux étapes. La première partie de la vérification a porté sur la conservation et la protection de l'habitat du saumon, l'accent étant mis sur les activités de gestion de l'habitat menées par Pêches et Océans Canada dans la région du Pacifique. En 1996-1997, ces activités représentaient 10,3 millions de dollars du budget total de 88 millions de dollars que la région a consacré à la gestion de la pêche (11,6 p. 100).

La seconde partie de la vérification portera sur la gestion de la pêche du saumon, y compris les plans de pêche et l'allocation des ressources aux principaux utilisateurs. Les résultats de cette vérification seront communiqués dans le rapport de 1999.

Permettez-moi d'abord de dire que je crains qu'on ne fasse pas assez d'efforts pour assurer l'existence d'un nombre suffisant d'habitats sains en eaux douces, lesquels sont essentiels pour la survie des espèces et des stocks de saumon.

Le saumon doit pouvoir remonter les rivières et les ruisseaux où il est né pour se reproduire et croître, et poursuivre ensuite son cycle vital en retournant dans l'océan.

Le cycle vital fait face à de nombreuses menaces dont certaines sont incontrôlables, comme le changement climatique et la survie en milieu marin. Mais d'autres menaces pour l'habitat, comme l'urbanisation, l'agriculture et les exploitations minière et forestière, ainsi que les activités de pêches, peuvent être gérées et contrôlées par les gouvernements et par le public.

Parmi les principaux stocks de saumons rouge, rose et kéta, les remontées sont demeurées constantes. Ce n'est toutefois pas le cas pour les saumons quinnat et coho qui reviennent frayer en nombre de moins en moins important. Dans le cas de certains stocks de saumons coho, leur petit nombre représente une source d'inquiétude particulière.

À notre avis, ce sont les nombreux stocks plus petits de toutes les espèces, mais particulièrement du coho, qui sont indispensables pour protéger la diversité génétique et assurer la durabilité des espèces dans leur ensemble.

Dans notre vérification, nous soulignons que l'information sur la situation des stocks de saumon n'existe que pour 4 900 (60 p. 100) des quelque 8 100 stocks recensés en Colombie-Britannique et au Yukon. De ces 4 900 stocks, plus de 700 sont considérés à risque.

Le Ministère a choisi d'axer la plus grande partie de ses efforts sur les stocks de plus grande taille, qui ont une valeur commerciale, au détriment des plus petits stocks. C'est toutefois la protection de ces stocks de petite taille et de la diversité génétique qu'ils représentent qui peut servir d'assurance contre les menaces croissantes pour la durabilité des espèces. Le Comité voudra peut-être alors encourager le Ministère à s'intéresser davantage aux stocks de petite taille afin de conserver la diversité génétique.

En 1986, le Ministère a mis en oeuvre la Politique de gestion de l'habitat du poisson. Au même titre que les dispositions sur l'habitat de la Loi sur les pêches , cette politique confie à Pêches et Océans Canada un mandat fort en faveur de la durabilité et de la diversité génétique.

Toutefois, malgré l'objectif de la politique d'un « gain net » d'habitats productifs, la perte d'habitats se poursuit. Le Ministère estime qu'une telle perte est probablement la cause de la disparition de 20 à 30 p. 100 des petits stocks de saumons en Colombie-Britannique. Il est difficile de déterminer la mesure exacte de la perte d'habitats parce que l'information non seulement se présente sous diverses formes et se trouve en différents endroits, mais n'est souvent pas facile d'accès. Le Comité voudra peut-être savoir ce que le Ministère compte faire pour obtenir et utiliser de meilleurs renseignements sur les stocks et sur les habitats.

De plus, le Parlement n'obtient pas un tableau complet de la situation étant donné que le Ministère n'est pas tenu de lui communiquer une vue d'ensemble de l'habitat du saumon.

D'après la politique de gestion mise en place, les projets qui entraîneront une perte ou une transformation de l'habitat sont présentés au Ministère pour approbation. Pêches et Océans Canada a fait de cette procédure de présentation son principal moyen de protéger l'habitat.

J'ai deux grandes préoccupations à propos de cette procédure. D'abord, le Ministère doit accorder plus d'attention aux initiatives, initialement intégrées, de planification de l'utilisation des ressources et des terres. Ensuite, il doit se préoccuper davantage de la surveillance et du suivi ultérieurs des projets, non seulement pour déterminer si les conditions approuvées ont été respectées, mais aussi pour évaluer l'incidence des décisions prises et du rendement obtenu en matière de gestion de l'habitat, en fonction de l'objectif d'« aucune perte nette ».

Alors que le ministre de Pêches et Océans Canada est responsable des pêches en milieu marin et des pêches intérieures, ce sont les lois provinciales qui régissent l'utilisation des terres et des eaux. Or, ces lois touchent l'habitat en eaux douces du saumon. Aussi, l'appui et la collaboration du gouvernement de la Colombie-Britannique, des administrations municipales, d'autres parties intéressées et du public sont-ils essentiels à la protection et au rétablissement de l'habitat.

Les gouvernements fédéral et provinciaux travaillent ensemble dans de nombreux secteurs de la gestion des pêches aux termes de l'Entente générale sur les pêches de 1985. L'Entente entre le Canada et la Colombie-Britannique sur des questions de gestion du saumon du Pacifique, qui date de 1997, constitue une base pour développer cet effort de coopération.

J'aimerais souligner qu'il est nécessaire que les futures ententes avec d'autres niveaux de gouvernement comportent un cadre de responsabilisation qui permette la mesure du rendement et des résultats, de manière à garantir que Pêches et Océans Canada remplit son mandat. L'Entente de 1985 ne prévoyait pas un tel cadre.

Pour terminer, j'aimerais souligner la collaboration et l'esprit constructif dont les employés de mon Bureau et ceux du Ministère ont fait preuve au cours de la vérification. Nous savons que la région du Pacifique du Ministère est inondée de demandes et nous reconnaissons que Pêches et Océans Canada déploie beaucoup d'efforts, soit seul, soit avec l'aide de partenaires de l'extérieur, en vue de protéger l'habitat du saumon. Notre vérification signale qu'il reste des choses à faire pour endiguer les pertes de stocks de saumons et d'habitats, contribuant ainsi à garantir la durabilité future d'une ressource si importante pour la population de la Colombie-Britannique et du Canada.

Sur ces mots, monsieur le Président, je mets fin à mon commentaire d'introduction. Nous serions heureux de répondre aux questions du Comité.