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L'Association professionnelle des cadres supérieurs de la fonction publique du Canada, Symposium 2002

Notes pour une allocution de Sheila Fraser, FCA, Vérificatrice générale du Canada, le 6 juin 2002, Ottawa (Ontario)


Introduction

J'aimerais avant tout remercier l'APEX de m'avoir invitée à venir vous rencontrer aujourd'hui. Je suis fort impressionnée du calibre des participants et de la pertinence des sujets à l'ordre du jour du symposium. Cela témoigne de la crédibilité de l'organisation et du dévouement de ses cadres.

J'ai bien apprécié aussi le thème que vous avez choisi pour cette rencontre - « Le défi intermestique ».

Je dois toutefois vous avouer que les vérificateurs, même les vérificateurs généraux - ont plutôt l'esprit pratique. Nos défis sont plus souvent « mestiques » qu'« inter ».

Les fonctionnaires et les gestionnaires de la fonction publique devront constamment faire preuve de créativité et de débrouillardise pour relever les nouveaux défis qui se présentent à eux mais j'estime que certains principes de base changent très peu.

Le Parlement, le gouvernement et la fonction publique sont les gardiens des fonds que leur confient les Canadiens pour exécuter des programmes et fournir des services.

Nous ne devons jamais oublier qu'une grande partie de la confiance qu'ont les gens dans nos institutions démocratiques est attribuable à la croyance qu'ils ont que les fonds publics sont dépensés judicieusement et efficacement.

Malheureusement, comme vous le savez, la plupart de nos travaux de vérification révèlent que nous n'avons pas encore maîtrisé certains principes fondamentaux.

J'ose avancer qu'il existe un lien direct entre la façon dont le gouvernement réagit en temps de crise et la façon dont il s'acquitte de ses responsabilités au jour le jour.

Une situation de crise comme celle que nous avons vécue le 11 septembre capte l'attention de tous, impose un consensus quant aux priorités, stimule le leadership et oblige les divers intervenants à laisser de côté leurs différences et à travailler en équipe.

Depuis les événements du 11 septembre, les organisations du secteur public ont fait preuve de leadership à maints égards. L'aviation canadienne s'est mobilisée pour accueillir 247 avions transportant 43 000 passagers qui ne pouvaient plus atterrir aux États-Unis.

Citoyenneté et Immigration Canada a facilité le traitement des passagers à destination des États Unis qui se sont retrouvés de façon inopinée dans les aéroports canadiens. Et bien sûr, nous avons tous entendu parler de ces innombrables Canadiens qui, sans hésiter, ont nourri et dépanné leurs invités imprévus.

Mais dans les situations de tous les jours, lorsqu'il n'y a pas de crise, il n'y a peut être pas de consensus à l'égard des priorités, le leadership ne se manifeste pas toujours, et le travail en équipe n'est pas toujours évident ou optimal.

Alors, le véritable défi que doivent relever les gestionnaires est d'assurer une bonne gestion quotidienne en dépit des nombreuses priorités souvent conflictuelles, du manque de leadership et de la faible coopération des autres intervenants clés.

Dans ce sens, je crois que la meilleure façon de se préparer pour les situations extraordinaires est de bien gérer les situations ordinaires. Et la meilleure façon de se préparer pour un 11 septembre hypothétique est d'avoir un bon système en place le 10 septembre.

Comme nous le savons tous, aucun de nous ne peut prévoir ce que nous réservent pour demain les événements locaux, nationaux ou internationaux. Or, nous savons ce que nous devons faire aujourd'hui pour mettre en place de solides structures de gestion qui nous aideront à effectuer les changements organisationnels rendus nécessaires par des événements imprévus. Et, comme je l'ai déjà dit, les résultats de nos vérifications révèlent qu'il nous reste du travail à faire.

Par exemple, en temps de crise, il est indispensable d'avoir en main toute l'information utile et il faut pour cela d'excellents systèmes de collecte, de gestion et d'utilisation de données nécessaires à une planification efficace.

Et pourtant, à titre d'exemple, un ministère comme la Défense nationale, dont dépend notre sécurité, s'est montré incapable de le faire efficacement en ce qui a trait à son équipement de combat ou à ses effectifs.

Dans mon rapport de 2001 au Parlement, j'ai noté que les Forces canadiennes devront surmonter des obstacles de taille afin d'améliorer la gestion de l'état de préparation d'importantes plates formes d'armes. Les données de base au sujet de l'état de l'équipement n'étaient pas disponibles.

Les données réunies par nos vérificateurs étaient en réalité la première source d'information publique sur l'état des navires, des aéronefs et des véhicules de combat terrestre des Forces canadiennes. Je trouve cela préoccupant.

Déjà en 1990, nous avions constaté que les gestionnaires des ressources humaines de la Défense nationale ne possédaient pas l'information dont ils avaient besoin pour prendre des décisions en matière de recrutement et d'attribution relatives aux fonctions militaires.

Aujourd'hui, les Forces canadiennes n'ont pas le personnel qualifié requis pour répondre aux besoins et elles n'ont pas encore réussi à rajuster les politiques de recrutement et de maintien des effectifs dans le but de combler ces lacunes.

Il convient de noter que notre vérification sur l'état de préparation de l'équipement de combat a été réalisée pendant les mois relativement calmes qui ont précédé le 11 septembre.

L'équipe de vérification du MDN croit cependant que le Ministère déplace des montagnes pour faire face aux crises - cannibalisation de l'équipement et des pièces de rechange se trouvant au Canada, au besoin, afin que les troupes outre mer puissent obtenir ce dont elles ont besoin - mais il est bien clair que cela ne saurait constituer une stratégie à long terme de gestion optimale de l'équipement.

Il m'apparaît aussi clairement qu'une gestion inadéquate de l'information dans les périodes calmes menace la capacité de l'organisation de réagir en temps de crise.

Gestion horizontale

Les crises ont aussi cela de particulier qu'elles suscitent un consensus immédiat au sujet des priorités et favorisent la collaboration.

En temps plus normal, la plupart des ministères fédéraux ont toujours du mal à assurer le traitement horizontal des dossiers qui touchent à plus d'un ministère.

Quand nous effectuons des vérifications, nous repérons de nombreux exemples d'initiatives horizontales où certains ingrédients clés font défaut - leadership clair, objectifs communs, coordination efficace et information adéquate.

Je ne citerai que deux exemples que nous avons déjà signalés au Parlement où une meilleure collaboration horizontale s'impose.

La première carence touche l'impact des drogues illicites au Canada, un secteur où le leadership et la coordination devraient se manifester vigoureusement.

Malheureusement, les ministères et organismes fédéraux engagés dans la lutte contre la consommation de drogues illicites n'ont pas réussi à s'entendre sur des objectifs communs et un plan pour les atteindre.

Onze ministères et organismes fédéraux consacrent environ 500 millions de dollars par année à des efforts visant à contrôler les drogues illicites. Mais, ils ne connaissent pas l'ampleur du problème et ne savent pas si leurs efforts portent fruit.

Nous ne possédons même pas l'information nécessaire sur l'ampleur de la consommation de drogues illicites au Canada. Nous avons aussi souligné l'absence d'objectifs communs et d'un plan pour les atteindre ainsi que l'absence de rapports publics détaillés sur les drogues illicites et sur les efforts visant à les contrôler.

Nous avons aussi constaté avec inquiétude qu'il y a dans le système de justice pénale des lacunes en matière d'information et une absence d'efforts coordonnés - des lacunes qui font obstacle à une évaluation complète de l'efficacité globale du système.

On ne saurait mettre en place et tenir à jour un système de justice pénale efficace sans informations nationales fiables sur la nature des crimes commis, les tendances en matière de criminalité et les mesures de répression de la criminalité qui se sont avérées les plus efficaces.

Sans une telle information, le gouvernement ne peut être assuré de l'efficacité de ses initiatives et de l'absence d'effets pervers.

Le gouvernement fédéral a calculé que le coût réel de la criminalité - y compris les coûts de la sécurité privée, des assurances et de l'incidence sur les victimes - se chiffre à environ 46 milliards de dollars par année.

Et pourtant, une vérification faite par mon bureau a révélé une absence de coordination et de mise en commun de l'information sur la criminalité et les délinquants entre les organismes et établissements du système de justice pénale.

Ces carences dans la gestion horizontale ne sont pas nouvelles. Déjà, en décembre 2000, mon prédécesseur, Denis Desautels, avait signalé que le gouvernement gère mal les initiatives qui touchent plus d'un ministère. Pourtant, les questions « horizontales » comptent souvent parmi les priorités du gouvernement.


Conclusion

Aucun gestionnaire ne saurait gérer une crise à lui seul. Chacun d'eux doit gérer les ressources humaines, les finances, l'information, les biens, etc., du mieux qu'il peut, au jour le jour.

L'un des plus grands défis que vous devez relever en tant que cadres supérieurs c'est d'être de véritables leaders, de démanteler les limites territoriales et de trouver des façons d'amener vos ministères et organismes à travailler ensemble de façon productive à la réalisation d'objectifs communs. Je serai curieuse d'entendre vos commentaires là dessus pendant la période de discussion qui suivra.

L'autre grand défi - et il ne faudrait pas le sous estimer - c'est de maintenir le cap et la cadence à long terme pendant que se mettent en place les principales grandes initiatives du gouvernement. Je sais que vous connaissez bien ces grandes initiatives - fonction de contrôleur moderne, modernisation de la gestion des ressources humaines et stratégie d'information financière, pour ne mentionner que celles là. Elles ne s'accompagnent pas des grands déploiements d'énergie qui caractérisent la gestion en temps de crise.

Elles nécessitent plutôt vision à long terme, engagement, persévérance, collaboration et solide planification assortie d'échéanciers clairs et d'indicateurs de résultats.

En terminant, comme je suis souvent appelée à critiquer certains aspects de notre administration publique, je tiens à profiter de cette rare occasion pour vous saluer tous et vous féliciter, ainsi que les dizaines de milliers d'autres Canadiens qui servent leurs compatriotes dans les administrations publiques à la grandeur de ce vaste pays.

Si le Canada est respecté et admiré - je dirais même envié - dans le monde entier, c'est grâce, dans une large mesure, aux efforts que vous et de nombreuses autres générations de fonctionnaires avant vous, avez déployés et continué de déployer au service de votre pays.

Merci